Introduction
p. 1-14
Texte intégral
À Cécile, Thibault et Ariane
1Le 11 septembre 1707, la cité de Tudèle, une petite ville de Navarre1, fête la naissance d’un prince héritier : le premier prince des Asturies dans la monarchie hispanique depuis quarante-six ans. Une relation imprimée permet de se faire une idée précise des festivités données à l’occasion de la naissance du premier fils de Philippe V2. Parmi les réjouissances, il y a la procession d’un char. Sur celui-ci figurent un coq et un lion que des rubans relient à une figure centrale, la déesse de la Concorde. Le coq représente le royaume de France, le lion incarne la monarchie hispanique. Sur les rubans par lesquels l’allégorie féminine de la Concorde relie les animaux, on peut lire :
De Nuevo a la unión assisto,
pues del Gallo, y del Leon,
Luys nos confirma la unión.
2Ces paroles prêtées à la Concorde signifient : « J’assiste de nouveau à l’union / et du Coq et du Lion / Louis nous confirme l’union ». En effet, le prince héritier né le 25 août précédent, le jour de la saint Louis, se trouve être à la fois le fils de Philippe V et l’arrière-petit-fils de Louis XIV. Par l’exaltation de sa naissance, Tudèle fête les nouveaux rapports entre les monarchies française et espagnole. Elle en donne une image éphémère mais explicite.
3Cette allégorie véhiculée par le char à Tudèle offre ainsi une représentation de la nouvelle unión entre les deux monarchies. La naissance du prince est présentée comme un moyen de renforcer les liens entre les deux couronnes. La figure de l’« union » n’est pas nouvelle. Elle renvoie à des exemples du passé connus de tous mais elle se trouve ici renouvelée et organisée autour de deux princes de la maison de Bourbon. Cette nouvelle union succède à celle de la maison d’Autriche, en place en Castille et en Aragon depuis Charles Quint.
4Depuis les règnes des Rois Catholiques, Isabelle et Ferdinand, et de leurs premiers successeurs, Charles Quint et Philippe II, l’unión servait à désigner le rassemblement progressif de multiples possessions territoriales sous leur autorité, par le biais des nombreux mariages. L’unión de las coronas pouvait ainsi désigner le rattachement de la Catalogne à l’embryon castillano-aragonais en 14793, la constitution de l’empire de Charles Quint4, ou encore l’union dynastique de la couronne portugaise à celle de Castille, sous le règne de Philippe II5. L’unión dinástica, fondée par le mariage d’Isabelle la Catholique et de Ferdinand d’Aragon, marqua la première étape de la constitution progressive d’un ensemble territorial qui atteignit son extension maximale sous Charles Quint. L’organisation et l’articulation progressive des multiples couronnes constituant cet ensemble demeura une caractéristique essentielle et durable de la monarchie hispanique. Pour rendre les différentes parties de cette entité plus solidaires entre elles, le comte-duc d’Olivares proposa en 1625 son projet d’Unión de Armas. Il s’agissait de faire en sorte que la défense d’un territoire de la monarchie soit l’affaire de tous les autres et que chaque royaume contribue à la protection de l’ensemble6. « L’union » désignait ainsi l’agrégation des différents royaumes péninsulaires autour du noyau des royaumes de Castille et d’Aragon, à la transition de la fin du Moyen Âge et de l’époque moderne.
5Simultanément, la Reconquista se poursuivait, avec la chute du royaume de Grenade, qui tomba aux mains des armées des Rois Catholiques en 1492. Il n’en fallut pas plus pour voir dans l’émergence d’une puissance territoriale, parallèlement à une forme d’unification religieuse, le signe manifeste d’un destin tracé, celui de la naissance et du développement d’une monarchie aux aspirations universelles, reprenant à son compte les rêves brisés d’une Chrétienté médiévale unifiée. Les descendants de Charles Quint étaient ainsi convaincus que leur domination était le signe d’une élection divine7 dont la conquête du Nouveau Monde et l’unité religieuse constituaient les signes patents. Machiavel se fit l’écho de cette mission divine dans Le Prince, montrant ainsi que cette vision de la couronne espagnole, championne du catholicisme, irrigua la pensée bien au-delà des frontières de la péninsule Ibérique8. Quevedo évoqua également cette conception d’une puissance toujours en guerre pour l’orthodoxie religieuse9. On retrouve ce messianisme politique jusqu’à Philippe V, qui en usa abondamment pour appuyer ses prétentions à la couronne. Son grand-père, Louis XIV, avait eu recours au même argument10. Tommaso Campanella, moine dominicain, avait lui aussi lié l’émergence et la constitution de « l’empire d’Espagne », selon sa propre formule, à la défense de la foi catholique11. Dans sa Monarchia di Spagna (1598), il énumérait les trois causes nécessaires selon lui à l’établissement des principautés humaines : Dieu, la prudence et l’occasion. Ces trois éléments furent réunis puisque après avoir « combattu les Maures pendant huit cents ans sous les auspices du Christ Dieu, les Espagnols finirent par devenir de bons soldats et ils acquirent valeur et prudence12 ». Il ne manquait plus que l’opportunité. Celle-ci se concrétisa avec le mariage de Ferdinand d’Aragon et d’Isabelle de Castille, auquel s’ajouta la lignée de la maison impériale. Enfin, « la dernière union et la ruine du roi du Portugal [avaient] rendu la monarchie d’Espagne illustre13 ». Le dominicain italien a ainsi souligné combien cette image d’une puissance favorisée par Dieu s’imposa. L’œuvre de Campanella fut d’ailleurs rééditée à plusieurs reprises au xviie siècle.
6En réalité, le caractère composite ou fragmenté de la monarchie14 s’est maintenu avec constance tout au long de l’époque moderne15. Dès le mariage d’Isabelle et de Ferdinand, les royaumes conservèrent leur identité propre ; l’union ne signifiait pas la fusion ni l’uniformisation. Au demeurant, lorsque Ferdinand d’Aragon et Isabelle de Castille désignaient un ambassadeur pour faire connaître leurs positions à un autre prince, ils rédigeaient deux lettres de créance16. L’une était signée et accordait créance au nom du roi, et l’autre au nom de la reine. Leurs autorités étaient strictement séparées. Au xviie siècle, la gigantesque entité composée par ces différents territoires fut secouée, comme la plupart des autres royaumes européens, par des crises politiques17 tournant parfois au conflit armé, notamment lors de la guerre des Flandres, de la sécession du Portugal ou des révoltes de Catalogne en 1640, de Naples en 1647 et de Messine en 1674.
7À l’inverse, à la fin du xviie siècle, le royaume de France apparaît plus unifié ou, pour le moins, plus centralisé. Les règnes de Louis XIII puis de Louis XIV marquèrent un indéniable renforcement de l’autorité royale, en dépit des graves crises qui pouvaient surgir, comme la Fronde entre 1648 et 1652, et de la puissance de certaines provinces.
8La mort du dernier descendant direct de Charles Quint, Charles II, le 1er novembre 1700, ouvrit une nouvelle période pour les deux monarchies. En désignant le duc d’Anjou, deuxième petit-fils de Louis XIV, le dernier roi de la maison d’Autriche ne bousculait pas seulement l’équilibre continental, il créait aussi les conditions d’une nouvelle unión. Si les différentes couronnes n’étaient pas réunies au profit d’un seul prince, comme en 1580 lors du rattachement de la couronne de Portugal à celle d’Aragon et de Castille en la personne de Philippe II, les rois régnant à Madrid et à Versailles seraient dorénavant issus de la même Maison, c’est-à-dire qu’ils ne seraient plus simplement des parents mais seraient désormais unis par un lien filial direct. En cas d’extinction de l’une des deux branches, la seconde pourrait prétendre lui succéder et reconstituer à son profit un empire tel que l’avait réalisé Charles Quint.
9Désormais, l’union des couronnes ou unión de las coronas pouvait désigner à la fois un lien, celui qui existait entre Louis XIV et le duc d’Anjou, une relation, celle des monarchies française et espagnole, et une hantise, celle des puissances maritimes, qui refusaient d’accepter la perspective d’un tel accroissement du royaume des Lys. Menace réelle ou crainte infondée ? Réalité politique ou pure fiction ? Formule d’un langage diplomatique ou projet politique concret ? Les questions surgissent dès lors que l’on tente d’étudier et d’analyser les rapports entre les deux principales monarchies à la fin du xviie siècle et dans les premières années du xviiie siècle.
10Si l’union des couronnes a pu constituer une réalité concrète au début du xviiie siècle, son caractère éphémère invite à la délaisser ou à ne voir en elle qu’une formule forgée dans les bureaux de la cour à Versailles, comme pour mieux légitimer un changement de dynastie. Lorsque Philippe V accepta de signer des renonciations au trône de France lors du traité d’Utrecht, en 1713, il prenait l’engagement, devant tous les princes européens, d’abandonner ses droits à succéder à son grand-père et à réunir ainsi la monarchie du Roi Catholique à celle du Très Chrétien. Cette disposition abolissait toute perspective d’union. La décision de Louis XIV, quelques années auparavant, en 1709, de désolidariser plus nettement l’avenir des deux monarchies avait déjà contribué à vider de sa substance l’idée d’une union des couronnes.
11Pourtant, ce lien fonda une grande partie des relations entre les deux monarchies au xviiie siècle. À plusieurs reprises, la signature des pactes de famille (1733, 1743 et 176118) souligne combien le souvenir de ce lien et de cette proximité justifiait ou renforçait une alliance politique renouvelée. Si l’union des couronnes fut un projet officiellement enterré en 1713, il n’en constitua pas moins un principe politique majeur durant la guerre de Succession d’Espagne. De plus, l’union mit un terme au cycle des affrontements entre les deux monarchies en Europe, qui avait commencé au xvie siècle entre Charles Quint et François Ier et s’était poursuivi sous les Valois avec Philippe II, et enfin sous les Bourbons, d’Henri IV à Louis XIV avec Philippe III, Philippe IV et Charles II. La compétition entre les rois de France et les différents princes de la maison d’Autriche, qui trouvait son origine dans l’unión de coronas de Castille et d’Aragon, s’acheva dans une seconde union des couronnes, celle que Louis XIV et Philippe V tentèrent de dessiner durant les premières années du xviiie siècle. Au-delà de la question de son échec ou de ses conséquences à long terme, le projet d’union des couronnes traduit l’ambition de rapprocher deux puissances, deux monarchies et leurs royaumes. C’est à cette volonté politique et à ses déclinaisons multiples que cette étude est consacrée. Il s’agit autant d’en repérer les effets que d’analyser les modalités de sa mise en œuvre par des négociateurs et des diplomates au cœur d’un conflit majeur.
12Pour déterminer si l’union des couronnes fut uniquement un principe politique ou une construction plus ambitieuse mais inachevée, il convient de rechercher les traces de son existence. C’est en analysant son fonctionnement que l’on pourra connaître ses effets sur l’histoire et les évolutions des monarchies française et espagnole. Comment ce principe politique, auquel les ministres et les ambassadeurs de Louis XIV tentèrent de donner corps, imprima-t-il sa marque sur les relations franco-espagnoles ? Notre étude de l’union des couronnes n’a pas pour objectif de revenir sur l’idée de rupture provoquée par la montée du duc d’Anjou sur le trône de la monarchie hispanique. Elle cherche à montrer que l’union des couronnes constitua pendant dix ans un principe moteur de l’action des princes, des rapports entre les cours de Versailles et Madrid, faisant de ces années une époque d’initiatives et de renouveau de leurs relations à l’orée du xviiie siècle. Trop fragile pour être saisissable du premier coup d’œil et trop courte dans le temps pour laisser une empreinte évidente, l’union des couronnes n’en a pas moins été une réalité politique de l’Europe du début du xviiie siècle.
13L’avènement du duc d’Anjou comme roi « des Espagnes », selon la formule alors en vigueur, marqua un tournant dans les relations des deux pays entre eux mais également avec le reste du monde. Depuis le xvie siècle, les rois de France avaient considéré les princes de la maison d’Autriche, qu’ils fussent à Vienne ou à Madrid, comme leurs premiers concurrents. Des guerres d’Italie à la guerre de Succession d’Espagne, en passant par celle de Trente Ans, continuée jusqu’en 1659, ou encore celle de la Ligue d’Augsbourg, l’histoire du continent européen fut écrite au rythme des déclarations de guerre, de trêve ou de paix, jamais durables, entre les membres de la famille de los Austrias et ceux de la famille des rois de France.
14À partir de 1701, la situation fut totalement bouleversée. Agresseur infatigable des possessions de la maison d’Autriche pendant deux siècles, le roi de France devenait le premier défenseur des possessions du Roi Catholique. Dans une Europe sans nations, cette facilité à passer d’une couronne et d’une domination à une autre souligne combien ce que nous appelons improprement les « relations internationales19 » doit être envisagé et analysé en dehors de tout schéma national, y compris lorsque un État d’aujourd’hui se confond en grande partie avec une monarchie d’Ancien Régime. Le sort d’un territoire et l’avenir de nombreuses populations dépendaient aussi d’arrangements dynastiques et de règlements entre les princes. Les habitants d’un territoire étaient le plus souvent exclus des décisions négociées par les représentants des souverains. Ils pouvaient ainsi passer d’une domination à une autre lors d’un traité de paix. La défense, durant la guerre de Succession d’Espagne, des Pays-Bas espagnols et des possessions américaines et italiennes du Roi Catholique par le roi de France est emblématique du revirement de 1701. Ces territoires avaient fait l’objet d’attaques incessantes durant tout le xviie siècle : les Pays-Bas avaient été ravagés durant la guerre de Hollande (1672-1678) et les guerres suivantes, l’Italie du Nord avait été également attaquée, tout comme les possessions américaines et caribéennes.
15Le changement dynastique a été longtemps analysé en termes de rupture et de bouleversements20. La guerre de Succession constitue en effet l’orée du nouveau siècle pour la Monarchie Catholique. Une dynastie succédant à une autre, les modifications institutionnelles, culturelles et sociales ont concentré l’attention des chercheurs. L’existence d’une influence ou d’une domination de la France sur la monarchie espagnole21 a été ainsi traquée par plusieurs générations d’historiens22. Cette voie a depuis été quelque peu délaissée au profit des interrogations sur l’existence d’un « modèle français » qui aurait été implanté en Espagne ou à l’inverse sur les transferts de la monarchie hispanique vers le royaume de France23. Plus récemment, Anne Dubet et José Javier Ruiz Ibáñez ont déplacé le questionnement en proposant d’étudier la « modélisation », c’est-à-dire comment un modèle était construit et fabriqué par les acteurs eux-mêmes24. À travers l’étude des évolutions politiques, des réformes comme celle du despacho en 170525 ou celle de la Nueva Planta26, de l’introduction d’institutions longtemps jugées typiquement françaises (le régiment et l’intendance27) ou encore des transferts culturels, comme le vêtement28 ou la musique29 à l’image de l’introduction de la « musique française », on a évalué, quantifié et nuancé les interactions entre les deux monarchies et leurs sociétés.
16Cependant, le lien entre les deux branches, s’il est évoqué, n’a pas été étudié en tant que tel. Les rapports entre la Monarchie Catholique et celle du Très Chrétien ont été étudiés à l’aune de ce qu’ils avaient été au siècle précédent. À la concurrence, à la compétition et à l’émulation aurait succédé un âge de domination brutalement interrompu par le traité d’Utrecht et les renonciations de Philippe V à ses droits sur la couronne de France. Si cette analyse reste en partie pertinente, elle n’ouvre pas de perspectives pour l’après-Utrecht. En effet, comment lire dans ce changement dynastique la matrice des rapports politiques, diplomatiques et économiques entre les deux monarchies au xviiie siècle ? L’historiographie se satisfait ainsi d’une coupure commode, réelle mais qui mérite néanmoins d’être discutée.
17Pour replacer les relations entre les deux couronnes dans le temps long, il est nécessaire de se plonger dans le temps court, et de poser la question des objectifs poursuivis durant les premières années du règne de Philippe V. Il s’agit de saisir les répercussions sur les rapports franco-espagnols d’une union comprise comme principe politique. Si les ambitions politiques des princes étaient parfois irréalisables, elles orientaient néanmoins leurs décisions. S’interroger sur les rapports entre la France et l’Espagne au xviiie siècle nécessite de revenir à l’étude d’un moment jugé fondateur par les contemporains. L’enjeu n’est toutefois pas d’étudier tous les projets qui ont échoué, mais de retrouver au milieu d’une période dont l’étude a été profondément renouvelée ces dernières années, l’idée qui articula le plus grand nombre de projets. Comment le principe d’une « union des couronnes » a-t-il guidé la pensée politique du temps ou pesé sur les décisions prises par Louis XIV et Philippe V ? À partir d’un lien familial très fort entre deux souverains, il a favorisé une recomposition des relations entre deux monarchies et deux sociétés. Ces années furent celles des hésitations, des tentatives et des compromis, mais finalement une période fondatrice pour les rapports franco-espagnols.
18Analyser l’union des couronnes impose également de reconsidérer la manière dont Louis XIV et Philippe V organisèrent la défense de ces territoires durant la guerre de Succession d’Espagne. L’historiographie s’est peu intéressée à la situation de ces possessions jusqu’à une date très récente30. L’importance accordée aux traités d’Utrecht et de Rastadt (ou Rastatt), qui sanctionnèrent le démembrement de la monarchie espagnole, a longtemps détourné l’attention des quelques années qui les précédèrent. Pourtant, l’Amérique espagnole, ainsi que les Pays-Bas31 et les possessions italiennes du Roi Catholique, constituaient dans l’héritage de Charles II des parties tout aussi importantes que les territoires péninsulaires. L’union des couronnes les affecta comme l’ensemble de la monarchie. Durant quelques années, la monarchie hispanique se trouva aux côtés du royaume de France pour combattre des adversaires communs.
19Toutefois, l’union des couronnes ne mit pas seulement fin à deux siècles d’affrontements, constituant en définitive le point final de l’histoire de los Austrias. Elle se manifesta sous bien d’autres formes. Le commerce, le cérémonial, les arts, le langage diplomatique et la propagande furent aussi marqués par son empreinte.
20Le commerce est sans doute le domaine par lequel les ministres de Louis XIV tentèrent le plus efficacement de donner corps à l’idée d’une union des couronnes. Pierre angulaire des « relations internationales » depuis le milieu du xviie siècle, le commerce fut l’un des enjeux majeurs de la guerre. Pour les puissances maritimes, Provinces-Unies et Angleterre, l’union des couronnes n’était pas seulement emblématique des aspirations de Louis XIV à la monarchie universelle, elle risquait aussi d’accorder au roi de France le bénéfice des immenses débouchés du commerce avec l’Amérique32. Louis XIV ne se trompait pas lorsqu’il écrivait à son ambassadeur Amelot de Gournay que « l’objet de la présente guerre est le commerce des Indes et la richesse qu’il produit33 ». D’autre part, on sait que plusieurs ministres appuyèrent l’idée d’accepter le testament de Charles II en raison des avantages commerciaux qu’ils espéraient en retirer pour le royaume34. Si le commerce fut l’un des mobiles pour entrer en guerre contre l’alliance formée par les Bourbons, il constitua aussi l’une des voies de la paix : son règlement fut le prélude aux négociations d’Utrecht, comme l’illustrent les missions du négociant-négociateur Nicolas Mesnager aux Provinces-Unies, à partir de 170935. Les possessions américaines du roi d’Espagne et le commerce auquel elles donnaient lieu ne constituent donc pas une périphérie dont le sort se trouvait rejeté dans les articles d’un traité, mais un objectif majeur des stratégies militaires et financières déployées durant la guerre. Les retours des flottes chargées de métaux précieux, comme nous le verrons, symbolisèrent à merveille l’union désirée par les ministres de Louis XIV et permirent à l’attelage formé par les deux couronnes de tenir pendant plus de dix ans.
21Durant la guerre, les différents ambassadeurs tentèrent d’obtenir l’ouverture du marché américain pour les négociants français. Théoriquement interdit, mais largement pratiqué sous la forme de l’interlope, le commerce des Français fut l’un des sujets de négociations. La signature du traité de l’asiento36, en juin 1701, ouvrit la première brèche dans le monopole commercial espagnol, mais elle ne fut pas la seule. D’autres dispositions, concernant la monnaie, les remises de fonds, l’exportation des laines, ou encore les règles de la navigation et de la course, firent l’objet d’âpres négociations. Dans chacun de ces exemples, « l’union des couronnes » constitua autant un argument qu’un objectif. L’historiographie récente a souligné combien l’union dynastique des royaumes de Portugal et de Castille en la personne de Philippe II se fondait sur une vision impériale, c’est-à-dire sur la complémentarité des possessions espagnoles et portugaises37. Dans le cas de l’union des couronnes de 1701-1709 en revanche, on peut avancer l’hypothèse que le commerce joua le rôle de ciment pour un rapprochement à la fois si désiré et si redouté.
I. — Au service de deux rois : l’ambassadeur Amelot
22Au cœur des relations entre deux princes, la figure de l’ambassadeur apparaît comme un élément clé de l’organisation de l’union. De surcroît, dans le contexte d’une relation étroite entre les souverains régnant à Madrid et Versailles, il n’était plus seulement un représentant ou un négociateur, mais l’âme et l’image d’une politique. Véritable courroie de transmission des volontés de Louis XIV, il était également l’un des premiers conseillers du jeune Philippe V. Cette position, nouvelle pour un représentant du roi de France, nécessitait de redéfinir le rôle de l’ambassadeur du roi à Madrid. Il devait coordonner, voire anticiper, les transformations liées au changement dynastique.
23Quelque temps avant la mort de Charles II, Louis XIV avait choisi le marquis d’Harcourt afin de le représenter à Madrid. Le comte de Marsin, un homme de guerre, lui succéda en 1702. Plus apte à commander une armée qu’à négocier, il fut rapidement remplacé par le cardinal d’Estrées38. Ce troisième ambassadeur du roi de France auprès de Philippe V resta lui aussi seulement un an à Madrid : il ne s’entendait pas avec la première dame d’honneur (camarera mayor) de la reine Marie-Louise-Gabrielle, la princesse des Ursins39. Le neveu du cardinal, l’abbé d’Estrées, le remplaça rapidement. Le duc de Gramont lui succéda mais ne convainquit pas davantage dans sa mission que ses prédécesseurs. Le roi de France se résolut donc à choisir un ambassadeur plus discret, au profil moins éclatant mais qui, finalement, eut la longévité la plus grande dans cette mission. Le marquis Amelot de Gournay partit à Madrid en mission en 1705 et n’en revint qu’en 1709. Des ambassadeurs envoyés à Madrid, il est le moins connu et le plus secret. Son action a peu suscité la curiosité des historiens, à l’exception de celle du baron de Girardot, qui publia la correspondance de Louis XIV avec Amelot40. Pourtant, aucun autre ambassadeur ne s’immisça aussi profondément dans le gouvernement de Philippe V. Son profil d’ancien membre du conseil de Commerce et de négociateur chevronné aurait pu susciter un intérêt plus marqué. Il avait déjà été ambassadeur au Portugal, à Venise et dans les Cantons suisses où il avait négocié le renouvellement d’un accord important pour le roi de France. Celui-ci prévoyait un approvisionnement garanti en sel pour les vallées suisses en échange de levées de mercenaires pour les armées de Louis XIV. La figure de l’ambassadeur Amelot permet ainsi de mieux saisir les spécificités d’une époque où les intérêts commerciaux étaient de plus en plus relayés dans l’entourage des princes, comme en témoignent ses correspondances.
24Cette étude vise donc, par l’analyse de l’action de l’ambassadeur Amelot, à retrouver les traces de l’union des couronnes, telle qu’elle a pu exister au début du xviiie siècle. Il s’agit de repérer, dans le travail quotidien de l’un des serviteurs de Louis XIV, les marques du lien particulier entre le royaume des Lys et la monarchie du Roi Catholique. À travers celui qui a le mieux incarné l’union des couronnes, on tentera de déceler si celle-ci ne fut qu’une illusion ou à l’inverse une ambition et un projet politique qui ont pris corps, même de façon éphémère.
II. — La guerre de Succession d’Espagne : quel conflit, quelle histoire ?
25La guerre de Succession d’Espagne a donné lieu à de nombreuses études. L’historiographie s’est profondément renouvelée au cours de ces dernières années, plus particulièrement en Espagne, où les commémorations du tricentenaire de l’avènement des Bourbons ou d’événements marquants, comme la bataille d’Almansa (1707), furent l’objet de nombreux colloques et congrès41. La bibliographie est certes abondante, mais presque toujours dans une perspective nationale ou européenne alors que le conflit fut largement mondial.
26L’intérêt porté à la guerre de Succession n’est pas récent. Au xixe siècle, François-Auguste Mignet42, Arsène Legrelle43 ou encore Alfred Baudrillart44 ont ouvert la voie en étudiant les négociations et leurs différents rebondissements. La dimension économique du conflit a également très tôt suscité des études comme celle de Dahlgren, sur la course et les voyages des Français dans la mer du Sud45, c’est-à-dire le Pacifique, ou celle de Georges Scelle sur la Traite négrière aux Indes de Castille46. Les connaissances plus spécifiques sur le déroulement et la conduite de la guerre ont été régulièrement mises à jour, depuis Parnell et Stanhope47, jusqu’à nos jours avec l’ouvrage de Joaquim Albareda48, en passant par Henry Kamen49.
27La guerre de Succession d’Espagne ayant également donné lieu à une guerre civile et à des bouleversements institutionnels profonds, comme l’abolition des fueros50, c’est-à-dire des privilèges et des libertés des territoires de la couronne d’Aragon, ces aspects ont focalisé l’attention des historiens espagnols ; ce qui n’a toutefois pas interdit une réflexion plus générale sur la guerre. Des documents51, des sources imprimées52, des mises au point régionales et l’analyse précise de plusieurs moments de la guerre, comme la bataille d’Almansa ou la chute de Barcelone en 1714, ont donné lieu à de nombreuses publications.
28Les efforts de propagande des deux camps ayant favorisé la rédaction et l’impression de nombreux pamphlets, libelles et littérature de colportage (pliegos de cordel), ils ont fait l’objet d’études pionnières comme celle de María Teresa Pérez Picazo53, qui s’intéressa à la propagande durant la guerre de Succession. Depuis, ses analyses ont été enrichies par une série de travaux comme ceux de David González Cruz, qui a mis en évidence les liens de l’information entre l’Amérique et la péninsule Ibérique54, ceux de Marta Riess55 ou encore ceux de Rosa María Alabrús sur l’image de Philippe V en Catalogne56.
29En dépit d’une production abondante sur le sujet, l’historiographie ne s’est donc pas réellement intéressée à l’union des couronnes, au rôle joué par les ambassadeurs de Louis XIV dans l’organisation des relations entre les deux monarchies, ou encore à l’interaction entre, d’une part, les négociations diplomatiques et, d’autre part, les questions commerciales57. L’histoire économique et l’histoire politique constituent deux champs de la recherche historique encore bien trop souvent distincts. Dans nos sociétés contemporaines, le champ politique est souvent accusé d’être soumis au pouvoir économique. Ce constat mérite d’être discuté pour les périodes plus anciennes en s’intéressant notamment aux procédés par lesquels les princes tentèrent d’organiser la vie économique de leur royaume. Si l’évolution contemporaine de nos sociétés tend à confirmer cette vision, rien ne permet de la valider a posteriori pour l’époque moderne. Cette frontière entre les champs économique et politique doit plus sa fortune à l’évolution des sciences historiques depuis un demi-siècle qu’à la cécité des historiens. L’étude du politique et des relations internationales a connu une renaissance grâce à des travaux fondateurs, ceux de Lucien Bély par exemple, qui ont montré comment la décision politique de faire la paix ou la guerre n’intéressait pas seulement les princes mais une large part de la société. Sans présupposer de l’efficacité — ou de l’inefficacité — des décisions, il s’agit de comprendre comment elles pouvaient être modifiées par une compréhension des phénomènes économiques propre aux individus du xviie siècle.
30Pour tenter de retrouver les liens entre commerce et diplomatie, tels qu’ils existaient à la fin du xviie siècle, le croisement des sources et leur analyse ont été menés de manière systématique dans notre étude. Si la correspondance d’Amelot avec Louis XIV et le secrétaire d’État chargé des affaires étrangères, le marquis de Torcy, peut servir de fil conducteur, toutes les autres correspondances, qu’elles soient adressées au secrétaire d’État de la guerre, à celui de la marine et des colonies, ou encore au contrôleur général des finances, permettent de l’éclairer et de la questionner.
31Il faut ici souligner l’importance des documents conservés aux archives du ministère des Affaires étrangères (AMAE) : signe des relations singulières nouées entre les couronnes de France et d’Espagne au début du xviiie siècle, la seule correspondance d’Amelot pour ses quatre années d’ambassade contient autant de volumes que l’ensemble de la correspondance diplomatique échangée dans les quarante premières années du règne de Louis XIV, entre 1661 et 170158. En effet, la correspondance d’Amelot se répartit en cinquante volumes de la série Correspondance politique (Espagne, t. 147-197). La lecture minutieuse et continue de ces volumes a constitué une nécessité, parfois bien redoutable, pour mener ce travail. L’abondance de la documentation disponible invitait donc à singulariser l’action de l’ambassadeur Amelot, que sa durée dans le poste distinguait aussi de ses prédécesseurs.
32De plus, d’autres correspondances, comme celle des consuls59, celle des agents présents à Madrid, à l’exemple d’Ambroise Daubenton60, intendant de la marine, ou les lettres que l’ambassadeur échangeait avec les officiers ou les ministres espagnols61, sont venues enrichir un corpus déjà abondant. Les archives du Vatican (Archivio Segreto Vaticano, ASV), et plus précisément les documents de la Nonciature d’Espagne, ont permis d’apporter des éclairages plus spécifiques. Les archives du Saint-Siège ne contiennent pas seulement les lettres échangées entre le pape et ses nonces mais aussi tous les documents, notamment imprimés et libelles, que ces derniers envoyaient à la Secrétairerie d’État afin de tenir informée la cour de Rome.
33L’union des couronnes n’étant pas un thème réservé aux seuls négociateurs, ses traces ont également été recherchées partout où cela a été possible : manuscrits de la Biblioteca Nacional de España (BNE), de la Real Academia de Historia (RAH, Madrid) et de l’Archivo General de Palacio (AGP), mais aussi les collections d’imprimés comme les Fullets Bonsoms de la Biblioteca de Catalunya (BC). Toutefois, si les Français sont évoqués dans des libelles, ceux-ci sont le plus souvent silencieux à l’égard d’Amelot. La princesse des Ursins, camarera mayor de la reine, et le conseiller français Jean Orry concentraient toutes les critiques et les attaques lancées contre les sujets du roi de France présents à Madrid. Il s’agit ainsi de comprendre comment un ambassadeur — Amelot — échappa aux nombreuses critiques qui étaient adressées aux Français de la cour, alors qu’il était l’instigateur ou le maître d’œuvre des décisions les plus impopulaires. Sa maîtrise du secret permet-elle d’expliquer le relatif manque d’intérêt dont il a fait l’objet par l’historiographie jusqu’à aujourd’hui ? On se propose de suivre comment un négociateur de Louis XIV a tenté d’imposer l’« union des couronnes » comme un principe directeur des relations entre la monarchie hispanique et le royaume de France. Dans cette perspective, le commerce devait jouer le rôle d’accélérateur et l’ambassadeur Amelot devait veiller à la bonne marche de l’entreprise.
Notes de bas de page
1 Tudèle était une ville qui avait le rang de ciudad depuis 1390. Cette cité avait une vie culturelle relativement riche et bien étudiée par Pascual Bonis, 1990.
2 Ychaso y Ximenez, Diario de las Grandes fiestas.
3 Belenguer Cebrià, 1996. Comme Joaquim Albareda le rappelle, le fondement juridique de « l’union des couronnes » découlait d’une conception égalitaire qui préservait les lois propres à chaque royaume et les frontières douanières. Les partisans de l’archiduc, qu’on appelait les austracistes, étaient très attachés à cette conception « horizontale » de la monarchie par opposition au rattachement des vice-royautés américaines adjointes à la couronne de Castille. Albareda Salvadó, 2004-2006, p. 253.
4 Belenguer Cebrià (éd.), 2001.
5 Franchi Conestagio, Historia de la union del reyno de Portugal a la corona de Castilla. Jean-Frédéric Schaub a proposé une nouvelle chronologie des révoltes et soulèvements portugais au temps de l’union des couronnes, en insistant sur leur précocité, c’est-à-dire dès le règne de Philippe II, voir Schaub, 2008, pp. 397-409. Sur l’unión de coronas, on se reportera aux travaux de Fernando Jesús Bouza Álvarez, notamment Bouza Álvarez, 1998 ; Id., 2000 ; Id., 1995 ; et à Oliveira Marques, 1991.
6 Olivares, Memoriales y cartas, t. I, doc. IX. Voir aussi Elliott, 2004, p. 282.
7 Haran, 2000, pp. 80-84.
8 « Au commencement de son règne [Ferdinand d’Aragon] assaillit le pays de Grenade ; et ce fut cette entreprise le fondement de ses États. D’abord il la fit tout à l’aise, sans crainte d’en être empêché, occupant par elle les esprits des barons de Castille, lesquels, vacant à cette guerre, ne pensaient à aucune nouveauté. Cependant il acquérait une autorité et puissance sur eux qui ne s’en doutaient nullement. Il put entretenir des troupes aux dépens de l’Église et du peuple, jetant les fondements, par une guerre si longue, de son armée… En outre, pendant qu’il s’apprêtait à de plus grandes entreprises, pour se servir toujours de la religion, il se mit à pratiquer une sainte cruauté, chassant les marranes de son pays et l’en dépeuplant : et on ne saurait donner exemple plus digne de piété ni plus singulier. Et sous ce même manteau et prétexte il envahit l’Afrique, fit l’entreprise d’Italie, finalement, guerroya la France » (Machiavel, Le Prince, chap. xxi, cité dans Méchoulan, 1991, pp. 296-297).
9 Ibid., p. 300.
10 González Cruz, 2006 et Álvarez López, 2008.
11 Campanella, Monarchie d’Espagne ; Monarchie de France.
12 Ibid., p. 11.
13 Ibid., p. 13.
14 Elliott, 1992 ; Greengrass (éd.), 1991.
15 Simon i Tarrés, 2005, pp. 34 sqq.
16 Torre y del Cerro, Documentos sobre las relaciones internacionales de los Reyes Católicos, t. III, p. 488, cité dans Ochoa Brun, 1995, p. 413.
17 Lorenzo Cadarso, 1996 ; Gelabert, 2001.
18 Cette idée perdura tout au long du xviiie siècle. Si la proximité entre les deux couronnes ne fut jamais aussi forte qu’elle avait pu l’être entre l’Empire et la monarchie hispanique au xvie et au xviie siècle, cette idée resta présente au siècle des Lumières. L’union était considérée comme le meilleur outil pour s’opposer à l’Angleterre. Voir AMAE, Mém. et doc, Esp., t. 153, 1659-1812 : Commerce et privilèges des Français, « Mémoire sur la nécessité de l’union entre la France et l’Espagne, soin des Anglais d’en détruire la réputation, leurs vues en cela, par M. le comte de Vaulgrenant », 10 août 1751, fos 299-302.
19 L’expression est teintée d’anachronisme mais elle reste commode pour désigner les rapports entre les princes, mais aussi entre leurs États. Lucien Bély suggère qu’elle puisse être remplacée par celle de « relations interprincières ou intersouveraines » (Bély, 2007, p. 27).
20 Pour une bibliographie récente, on se reportera avec profit à Molas Ribalta, Cerro Narganez, Fargas Peñarrocha (dir.), 2004. Fernández Albaladejo (dir.), 2001.
21 L’adjectif « espagnol » comme le substantif « Espagne » ont été utilisés, en dépit de leur caractère anachronique, par commodité de langage.
22 Baudrillart, 1890a. Pour une bibliographie plus récente, on se reportera à Bernardo Ares, 2008, ou encore à la bibliographie contenue dans Désos, 2009.
23 Schaub, 2003.
24 Sur la « modélisation », on se reportera à Dubet et Ruiz Ibáñez, 2010, p. 215. Plus largement, on pourra recourir aux travaux d’Anne Dubet et surtout à Dubet, 2009.
25 Cremades Griñán, 1993 ; Castro, 1999 ; Ead., 2000 ; Ead., 2004.
26 Dedieu, 2000a.
27 Emmanuelli, 1981.
28 Descalzo Lorenzo, Gómez-Centurión Jiménez, 1998.
29 Berrocal, 2004 ; Morales, 2007.
30 Pour les possessions italiennes du roi d’Espagne, on se reportera à : Álvarez-Ossorio Alvariño, 2004a ; Álvarez-Ossorio Alvariño, García García, León Sanz (dir.), 2007. Le sort de l’Amérique a été en partie présenté lors d’un congrès, voir Jornadas nacionales de historia militar, 2001.
31 Pour les Pays-Bas espagnols durant la guerre de Succession d’Espagne, la thèse de Thomas Glesener apporte de très utiles mises au point, son étude étant davantage centrée sur les élites flamandes au service de la monarchie hispanique. Voir Glesener, inédite et 2017.
32 L’envoyé de Philippe V aux Pays-Bas, Bergeyck, l’écrivit très clairement à son souverain : « La crainte de l’union et de la perte du commerce [a] été le seul objet des deux puissances maritimes dans cette guerre » (lettre de Bergeyck à Philippe V, 16 mai 1712 ; citée dans Baudrillart, 1890a, t. I, p. 487).
33 Lettre de Louis XIV à Amelot en 1709, citée dans Bottineau, 1993, p. 45.
34 Bluche, 1986, pp. 768-769.
35 Bély, 1990, pp. 576-596.
36 Certains, comme Georges Scelle, ont pu l’écrire assiento. Néanmoins, j’ai choisi d’opter pour l’usage actuellement le plus répandu chez les historiens, qui est de conserver la version castillane, c’est-à-dire asiento. L’asiento est un contrat garantissant un monopole aux intéressés dans l’introduction d’esclaves dans l’Amérique espagnole.
37 Bouza Álvarez, 1987.
38 Le cardinal d’Estrées avait déjà rempli plusieurs missions importantes. Il avait été chargé d’obtenir le ralliement de Venise à la cause des Bourbons. Ce fut un échec. Sur cette mission, voir Maréchaux, 2010.
39 Cermakian, 1969.
40 Louis XIV, Amelot, Correspondance… Espagne.
41 Pereira Iglesias (dir.), 2002 ; Serrano Martín (dir.), 2004 ; Morales, Renom, Cisneros (coord.), 2007 ; Edelmayer, León Sanz, Ruiz Rodríguez (dir.), 2008.
42 Mignet, Négociations relatives à la succession d’Espagne.
43 Legrelle, 1895-1899.
44 Baudrillart, 1890a.
45 Dahlgren, 1907 ; Id., 1909.
46 Scelle, 1906.
47 Parnell, 1888 ; Stanhope, 1832.
48 Albareda Salvadó, 2010.
49 Kamen, 1974.
50 Les fueros étaient l’ensemble des privilèges et exemptions accordés à une personne, une communauté ou une province. On distinguait différents fueros : ecclésiastique, de guerre (fuero de guerra), de Castille (fuero Real de Castilla), d’Aragon, de Majorque, de Valence ou de Biscaye. Il sera ici le plus souvent question des fueros d’Aragon et de Valence, puisque ceux de Catalogne, appelés usatges, ne furent abolis qu’en 1714, soit bien après le départ de l’ambassadeur Amelot. Martínez Ruiz, 2007, s. v. « fuero », pp. 177-183.
51 Alabrús Iglesias (éd.), 2006.
52 López de Mendoza y Pons, Memorias para la historia de las guerras civiles de España ; Berwick, Memorias.
53 Pérez Picazo, 1966.
54 González Cruz, 2006 ; Id., 2009.
55 Riess, 2008.
56 Alabrús Iglesias, 2001.
57 Bély, 1992, p. XX.
58 AMAE, Cor. pol., Esp., t. 40 à 87-88, couvrant la période 1661-1701.
59 Les correspondances consulaires sont dispersées entre les archives du ministère des Affaires étrangères à Nantes (Centre des archives de Nantes, CADN), celles de la série Affaires étrangères et enfin celles de la série Marine des Archives nationales (AN).
60 Voir AN, Marine, B7.
61 Ces documents sont majoritairement conservés à l’Archivo Histórico Nacional de Madrid (AHN), dans une moindre mesure à l’Archivo General de Simancas (AGS) et plus sporadiquement dans les Archives des Indes à Séville (Archivo General de Indias, AGI), les archives du royaume de Valence (Arxiu del Regne de València, ARV), ou à l’Arxiu Nacional de Catalunya (ANC) de Barcelone.
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