Appréhender la pauvreté en milieu rural
Mécanismes d’appauvrissement et réactions seigneuriales dans le Vexin aux xive-xve siècles
p. 109-127
Texte intégral
1L’Île‑de‑France, avec la Champagne, la Normandie et la Picardie, sont les régions les plus éprouvées par la guerre de Cent Ans. La région du Vexin français, au nord‑ouest de l’Île‑de‑France, constitue ainsi un espace privilégié d’étude des conséquences de la conjoncture sur les populations rurales. Les terroirs y sont fertiles, et la région bénéficie de la proximité de Paris, qu’elle alimente en partie en vin et en céréales1. C’est précisément cette richesse et cette proximité qui font de la région la première victime des conflits de la fin du Moyen Âge, la principale ville, Pontoise, étant l’une des portes d’entrées de la capitale. Les années 1358‑1360 constituent le paroxysme de cette première phase de destructions : se cumulent ainsi les ravages des Grandes Compagnies, les conflits du roi avec Charles le Mauvais et les conflits sociaux. Au xve siècle, la période de destruction est beaucoup plus longue, et s’étend sur trente années particulièrement dévastatrices pour les campagnes vexinoises. À partir de 1415‑1417 au moins, les soldats sont partout dans la région. Pontoise est assiégée à plusieurs reprises et occupée par les Anglo‑Bourguignons de 1418 à 1436. Les épisodes de peste, de famine et les mauvaises récoltes se succèdent dans les deux décennies suivantes, la période la plus dure s’étendant de 1430 à 14442.
2Le contexte des années 1320 aux années 1490 est ainsi un contexte de crise profonde, durant lequel les campagnes se vident. Les paysans ayant réchappé aux épidémies fuient les terroirs les plus isolés3, laissant derrière eux friches et ruines. L’appauvrissement est l’une des composantes de cette conjoncture, même s’il est particulièrement difficile à saisir en milieu rural car, dans le cadre des seigneuries, le travail y est sous‑entendu, conditionné par des contrats engageant autant d’intérêts symboliques qu’économiques. Dans ce contexte francilien de la fin du Moyen Âge, le statut de travailleur agricole le plus répandu est le tenancier. L’absence de rémunération explicite, comme peuvent en bénéficier les salariés agricoles, rend très opaque leur activité économique, mais ne l’annule pas pour autant. Le tenancier, à l’instar de l’artisan, vit et travaille avec sa famille, subit et s’adapte aux crises et reprises conjoncturelles.
3L’analyse de ce groupe de travailleurs ruraux peut être approfondie par le cas vexinois de l’abbaye de Saint‑Martin de Pontoise (figure ci‑dessous). D’obédience bénédictine, l’abbaye est fondée au xie siècle, sur un plateau dominant avantageusement le confluent de l’Oise et de la Viosne, sur la route de Paris à Rouen. À la fin du Moyen Âge, elle est à la tête d’un réseau de douze prieurés et domine un des domaines fonciers monastiques les plus importants du Vexin français. Le fonds archivistique disponible aujourd’hui demeure conséquent, bien qu’hétérogène et souvent détérioré, car il conserve une part honorable d’écrits de gestion et de contrats agraires. De fait, il permet d’alimenter une réflexion sur les conditions de vie de la paysannerie engagée auprès de l’abbaye de Saint‑Martin, et d’aborder la question des mécanismes d’appauvrissement des paysans et de leur perception par les moines. Les études récentes invitent à dépasser la vision négative des arrérages et de la dette en général, comme irrégularité financière ou absence de circulation d’un bien dû. Dans le contexte médiéval, les arrérages participent du lien social au sein de la seigneurie et peuvent traduire une confiance mutuelle entre deux acteurs économiques4. L’endettement, au‑delà de la simple incapacité d’honorer un engagement contractuel, peut également être considéré comme un lien social nécessaire au sein de la communauté5. L’arrérage est ainsi un vecteur fondamental de la restauration du lien seigneurial. Face à ses tenanciers récalcitrants ou en fuite, l’abbaye doit composer pour maintenir le fragile équilibre entre sa survie financière et l’occupation de ses tenures.
4Cette étude se concentre sur deux terroirs au profil très différent : le terroir de l’abbaye de Saint‑Martin, derrière son enclos monastique, et le terroir de l’un de ses prieurés, Saint‑Pierre d’Amblainville. Le terroir de Saint‑Martin se situe sur un plateau fertile essentiellement dédié à la vigne. Les tenanciers le travaillant résident au xvie siècle dans le bourg de Saint‑Martin, qui est l’un des faubourgs de Pontoise. À une vingtaine de kilomètres au nord, le terroir du prieuré d’Amblainville est composite, réparti entre plusieurs hameaux isolés. La ville la plus proche (Chambly) se situe à une dizaine de kilomètres. Les tenures sont mises en valeur de façon différente, certaines comportant une maison, des jardins, d’autres étant laissées en prés, labourées ou en vignes. Les tenanciers semblent résider et travailler dans le même terroir, et plusieurs exploitations sont d’un seul tenant. Des années 1320 aux années 1490, ces deux espaces sont touchés par les crises de façon différenciée, entraînant un appauvrissement des tenanciers plus ou moins durable.
Qu’est-ce qu’un tenancier appauvri ?
L’arrérage, ou la difficulté de verser ses charges
5Les tenanciers apparaissent à trois occasions dans la documentation domaniale : lors de la validation de leur contrat, lors des différentes opérations du prélèvement seigneurial et, pour finir, en cas de litige. Les tenanciers ne rencontrant pas de difficultés particulières pour exploiter leur tenure et honorer leurs redevances apparaissent finalement assez peu : dans le contrat initial si celui‑ci a été conservé, puis périodiquement mais succinctement lors des prélèvements annuels. À l’inverse, les difficultés de paiements ou les désertions sont autant d’occasions de mentionner les contrevenants : listes d’arrérages, comptes passés devant l’abbé, sentences du prévôt, témoignent de la complexité de ces situations d’appauvrissement de la paysannerie dans un contexte de crise. De fait, au cours de la période, les tenanciers ont de plus en plus de mal à verser leurs redevances et les mentions « deffectus » ainsi que les listes d’arrérages se multiplient. À la fin du xve siècle, les receveurs de l’abbaye ouvrent même une section entièrement dédiée aux arrérages dans leurs comptes annuels6. Surtout, les séries de comptes conservées pour la seconde moitié du xve siècle témoignent des faibles taux de recouvrement des redevances (tableau 1) :
Tableau 1. — Taux de versement des redevances à Amblainville (en %)
Année | Argent | Avoine | Blé | Volailles | Œufs | Vin |
1456 | 57 | 67 | 100 | 78 | – | 100 |
1457 | 86 | 50 | 100 | 44 | 50 | 100 |
1458 | 68 | 100 | 100 | 100 | 67 | 100 |
1459 | 83 | 100 | 100 | 100 | – | 80 |
1460 | 98 | 93 | 100 | 100 | – | 0 |
1461 | 54 | 100 | 100 | 91 | 100 | – |
1462 | 100 | 59 | 100 | 109 | 100 | – |
Moyenne | 78 | 81 | 100 | 89 | 79 | 76 |
Source : Archives Départementales du Val-d’Oise (ADVO), 9H79, Registre III, Cahier de Jehan Ruffault (1452-1463).
6Les cas de non‑versement sont fréquents, comme dans le cas du tenancier Robin Damp Guillaume qui peine à payer les cens et est fréquemment puni d’amende. Il tient du prieuré d’Amblainville une maison avec cour et jardin d’un arpent et trois quartiers de terre, biens accensés respectivement pour 12 et 11 deniers parisis. En 1453, il est dans l’incapacité de payer les 18 deniers parisis de cens à la Saint‑Rémi et doit payer l’amende. Cinq ans plus tard, à la Saint‑Rémi de 1458, il manque de nouveau à l’échéance. Il parvient à payer plus tard, mais n’échappe pas à une nouvelle amende de cinq sous parisis, qu’il paye en plusieurs fois7. Dans les cas les plus extrêmes, ces arrérages peuvent courir sur plusieurs années, comme Jehan de Groulay, qui en 1493 ne verse plus ni cens ni rentes depuis plusieurs années. Il doit en effet annuellement une maille de chef‑cens et trois sous parisis de rente pour un demi‑arpent de terre au terroir de Saint‑Martin, et quatre sous cinq deniers parisis de chef‑cens pour une autre vigne d’un demi‑arpent et cinq perches, redevances qu’il ne paye plus depuis respectivement quatorze et dix ans8. Ces deux tenanciers se trouvent dans une situation difficile, le premier quelques temps après la reprise de Pontoise, le second en pleine phase de « reconstruction » agraire. Leurs cas ne sont pas isolés, et prouvent que la reprise en main des tenures, même lorsqu’elles sont cultivables, même dans un contexte a priori propice au retour de tenanciers volontaires, ne trouve pas toujours une issue favorable. L’arrérage constitue de fait l’indice concret des difficultés rencontrées par les tenanciers. Ne pas être en mesure de régler des redevances de manière plus ou moins récurrente est l’un des signes, peut-être le premier, de la précarité de certaines exploitations.
Déguerpissement et mobilité
7La fuite est le second indice de cet appauvrissement, ou tout du moins d’une solution pour parer à un risque d’appauvrissement. Que ce soit pendant la première ou la deuxième phase de reconstruction, au terroir de Saint‑Martin comme à celui d’Amblainville, les tenanciers sont très mobiles. Cette mobilité se traduit dans les sources par une multiplication des contrats agraires, qui constituent autant d’indices de ruptures de l’hérédité d’une terre. Ce turnover peut avoir deux facteurs : le départ du tenancier — fuite, mort9 — ou des opérations immobilières — achats, ventes, échanges. La mort du tenancier est très rarement spécifiée dans les baux de réaccensement. Tout juste connaît‑on l’identité de l’ancien tenancier et les raisons de son départ, qu’il s’agisse d’un déguerpissement ou d’une vente. Les périodes de grande mortalité sont essentiellement dues à la peste, qui sévit durant dix‑huit mois à partir de 1348, puis revient périodiquement— notamment dans les années 1360, et au xve siècle, en 1418 et dans les années 1430‑144010 —, ainsi qu’aux famines et disettes. L’une ou l’autre n’apparaissent toutefois jamais dans les sources.
8La fuite à proprement parler est la solution la plus radicale, qui ne peut être que totale — fuite du village et pas seulement de la tenure. Elle implique donc une séparation brutale avec le quotidien du tenancier, qui ne recourt à cette alternative que dans les situations les plus critiques. Les deux phases de troubles militaires des années 1340‑1360 et des années 1410‑1460 poussent les paysans à se réfugier dans les murs fortifiés des villes les plus proches ou éventuellement de leur seigneur11. Le Bourgeois de Paris décrit longuement l’arrivée des réfugiés de Pontoise à Paris le 29 juin 1419 : « […] par la porte Sainct‑Denis, quelque XX ou XXX personnes, si effroyez comme gens qui estoient, n’avoit gueres, eschappez de la mort », et ajoute « Pontoyse qui a esté à ceste journée, au matin, prinse des Angloys, et puis ont tué, navré tout ce qu’ilz ont trouvé en leur voye, et bien se tient pour bien euré qui peut eschapper de leur main, car oncques Sarazins ne firent pis aux chrestiens qu’ilz font »12. Il rapporte également que la semaine suivante, trois à quatre cents habitants de Pontoise et des villages alentours se pressent aux portes de la ville. L’insécurité due à la présence des gens de guerre, épisodique au xive siècle, mais continue au xve entre les années 1410 et 1460, contraint les tenanciers à abandonner leurs biens immobiliers. Ils ne sont d’ailleurs pas les seuls à fuir : en 1437, les moines de Saint‑Martin viennent se réfugier dans leur hôtel intra muros13.
9L’endettement, lorsqu’il atteint un niveau suffisamment critique, pousse également le tenancier acculé à fuir14. Les cas de déguerpissements sont ainsi fréquents, comme Perrotte, veuve de Jehan Manmonnier, mort en 1414, qui fuit à Paris en laissant derrière elle des terres grevées de dettes. Son défunt mari, laboureur, tenait de l’abbaye plusieurs tenures. Peu avant sa mort, il vend une rente foncière constituée, annuelle et perpétuelle, de 24 sous parisis à l’abbaye. Il meurt sans héritier, ce qui préoccupe l’abbaye car en plus de la menace d’abandon des terres qui compromet l’existence de la rente de 24 sous, Jehan Manmonnier laisse plusieurs années d’arrérages non rendus :
Il estoit deu a yceulx religieux quinze deniers parisis pour deux annees escheux au jour des octaves saint Denis derrainement passées et huit grans boesseaux d’avoine d’arrerages pour deux annees et termes fuis et eschux a Noel derrainement passé mil CCCC et treize. Et au regart des dis vint quatre solz parisis de rente il leur estoit deu la somme de cinquante six solz parisis pour terme termes escheuz audit Noel pour lesquelles causes et a deffault de paiement de ce. Et que ledit deffunt Jehan Manmonnier qui par avant estoit allé de vie a trespassement sans paier icelles charges et delaissé ses dits heritages sans possesseurs et sans labourer en adventure de venir en non valloir15.
10L’abbaye se retrouve ainsi face à des tenures visiblement déjà mal entretenues, désormais sans aucun labour et au statut juridique flou. Pour les récupérer et les réaccenser, le déguerpissement doit être acté officiellement par la justice du prévôt, et le temps écoulé depuis la mort de Jehan Manmonnier n’est pas suffisant. Finalement Perrotte, très vite remariée à Benart de la Chapelle, boulanger de Paris, revient avec son nouvel époux se désister de son douaire et de toutes les dettes l’accompagnant. Les tenures revenant aux mains de l’abbaye, celle-ci peut procéder sans restriction juridique à leur réaccensement :
Encore nous rapporta et tesmouigna que ledis heritages sont demoures sans possesseur et que la femme que ledit deffunct Jehan Maumonnier avoit espousée au jour de son trespassement s’estoit de partie de la dicte ville de Pontoise est allée demourant hors d’icelle […] pour consentir ou dissentir le decret et adiudicacion diceulx au regard de son douaire que elle avoit acquis et gagne sur les dis heritages criées en la compagnie et pendant le mariage deulx deux selon la coustume du lieu16.
11Les héritages sont ensuite un à un mis aux enchères par criée, sur la place du marché et le jour du marché (le samedi), à plusieurs semaines d’intervalles. L’identité des acquéreurs laisse entrevoir les dynamiques du marché de la terre à l’aube de la crise du xve siècle : Andry Piart, hôtelier de Pontoise, achète pour 4 livres parisis une vigne de cinq quartiers, avec une rente annuelle de 12 sous parisis ; Guillaume Marquier, dit Courtois, étuveur, achète pour 4 livres 16 sous parisis deux vignes d’un quartier et l’autre de 33 perches ; la dernière vigne de cinq quartiers, en « terre et plante », est acquise par Jehan le Ver Breton, bourgeois de Pontoise, pour 20 sous parisis. Les acheteurs ne sont plus de riches paysans comme l’était Jehan Manmonnier, mais bien des bourgeois de Pontoise. Cette mise aux enchères reflète la réactivité des moines dans le réaccensement de leurs tenures, qui, dans un contexte relativement apaisé17 et en possession d’un acte d’abandon en bonne et due forme, sont tout à fait volontaires et proactifs dans la recherche de nouveaux exploitants.
12Le prieur d’Amblainville est particulièrement exposé à ces fuites, comme en témoignent le cahier de Jehan Ruffault et les états des revenus de 1476 et 1477. Dès 1456, le prieur mentionne un cas en la personne de Jehan Cailleu, qui ne se présente plus pour payer ses charges foncières. Pour sa maison avec cour et jardin d’un arpent située rue Neuve, il doit verser à Noël un setier d’avoine, deux chapons, un provendier de froment de rente et 4 deniers parisis de cens. Après plusieurs échéances manquées, Jehan Ruffault note en marge : « Debet de plusieurs annees et est en nostre main18 ». Jehan Cailleu n’est certainement pas un cas isolé en 1456, et cela fait plusieurs années que le déguerpissement est dans ces terres reculées une solution ultime de préservation face aux prédations répétées des troupes armées. Le mouvement est tellement généralisé qu’il en devient très problématique pour les prieurs, qui, dans les années 1470, doivent gérer des groupements entiers de parcelles, comme ici en 1477 : « Item plusieurs pièces de terre en plusieurs lieux qui ne sont pas ycy escriptes lesquelles sont demourées en nos mains par deffaulte devoirs non faiz et non paier ce quelles nous devoient et doivent encorez19 ». Pour les tenanciers dont les difficultés financières sont notables, mais pas au point de déguerpir du village, la vente ou l’échange de leurs possessions sont des solutions échappatoires intermédiaires. Les tenanciers s’échangent les terres, soit pour concentrer leurs exploitations, soit pour se débarrasser d’une parcelle trop coûteuse à entretenir. Ainsi, vers 1420‑1425, Pierre Paillou a un demi‑arpent de vigne qu’il ne peut plus cultiver20. Celui-ci était en effet idéalement situé, jouxtant une autre de ses tenures, et qui plus est en bon état — il n’est pas fait mention de friches dans le bail de réaccensement de 1425. La vigne représente un coût d’entretien conséquent, aussi bien en matériel qu’en hommes, d’autant plus difficile à assurer dans un contexte militaire troublé et d’insécurité comme en 1425.
13Le cahier de Jehan Ruffault, grâce au suivi des versements de redevances sur près de dix années, permet d’appréhender ces mobilités au terroir d’Amblainville. Jehan Henry le jeune occupe en 1460 une maison qui est dite « anciennement à Jehan Roussel ». La parcelle contient, outre l’habitation, une cour, un jardin et une vigne, et le tenancier l’occupe depuis huit ans. La rente est cependant nouvelle, puisqu’elle n’apparaît dans le cahier qu’en 1460. Au terme de la mi‑mars, il ne verse cependant rien du demi‑chapon et des 4 deniers parisis de rente. L’année suivante, il revend sa tenure à Jehan Guynart, qui ne paye rien de la redevance la première année, mais la verse en revanche en 1462. Le prieur note bien le défaut de paiement en marge, mais, tolérant envers un tenancier qui s’installe dans une nouvelle parcelle, n’exige pas d’amende21. Par ces échanges de terres, les tenanciers s’assurent de retrouver une autre exploitation, plus proche de leurs besoins — terre plus petite, déjà défrichée — en contentant le seigneur qui touche de surcroît les lods et ventes à chaque mouvement.
14Ces quelques exemples illustrent les difficultés croissantes rencontrées par les tenanciers de Saint‑Martin. La désertification rurale, qui entraîne pour l’abbaye et le prieur une décapitalisation de leurs domaines respectifs, n’est, pour le tenancier, que la conséquence d’un acte de préservation, en même temps que d’une crise démographique particulièrement sévère22. Le début de la période voit des tenanciers manquer quelques termes de paiement puis parvenir à payer l’abbaye, mais, dans la seconde moitié du xve siècle, les cas de déguerpissement et d’endettement se multiplient, laissant les terres de l’abbaye vides d’hommes et progressivement couvertes de friches. L’abbaye tente, dès les années 1380, de s’adapter à l’appauvrissement de ses tenanciers.
Travailler en s’endettant
15Le cumul de plusieurs activités est un autre signe de l’appauvrissement des tenanciers ruraux. De fait, la majeure partie des salariés ruraux travaillant au service des moines, en particulier dans la réserve seigneuriale, sont des tenanciers et cumulent ainsi plusieurs formes d’engagements contractuels et donc plusieurs statuts juridiques23. Si la multi-activité n’est pas un élément rare pour la période, et ne traduit pas nécessairement un appauvrissement, elle est en revanche problématique lorsqu’elle vise à obtenir des denrées agricoles de première nécessité. Le receveur de l’abbaye consigne ainsi à la fin de ses deux années d’exercice de 1485 à 1487 une succession de comptes passés avec plusieurs acteurs économiques, dont une partie de salariés agricoles ayant travaillé sur les terres monastiques. Plusieurs de ces salariés travaillent ainsi à perte, le receveur leur décomptant à la fin de leur contrat des malfaçons et autres défauts d’engagement. Surtout, une partie d’entre eux achète auprès du grenetier de l’abbaye des céréales. Le compte final s’avère ainsi souvent négatif pour le salarié, qui, bien qu’ayant travaillé plusieurs mois voire une année entière au service des moines, se retrouve leur obligé. C’est ainsi le cas du laboureur Jehan Huppe qui fait compte avec l’abbé en 1487 au terme d’une année de travail sur la vigne de Lieux (tableau 2) :
Tableau 2. — Le compte entre l’abbaye et le laboureur de vigne Jehan Huppe (1487)
Composition du compte (en sous parisis) | Raisons |
+ 104 s. p. | Travail salarié (labour de vignes) |
- 6 s. p. | Cens (tenures) |
- 96 s. p. | Achat de blé au grenetier de l’abbaye |
- 11 s. p. | Malfaçons du travail salarié |
- 12 s. p. | Partie du salaire versée |
? | Arrérages de cens (deux années) |
Dette de 21 sous parisis envers l’abbaye |
Source : ADVO, 9H22, Cahier du receveur (1485-1487), fo 106vo.
16Jehan Huppe éprouve probablement déjà des difficultés à régler les cens qui pèsent sur ses tenures, raison pour laquelle il se met au service des moines pour travailler leur vigne. Au cours de l’année, ses récoltes ne sont pas suffisantes et il est contraint d’acheter du blé auprès du grenetier de l’abbaye. Son endettement auprès des moines n’est pas récent puisqu’il a deux ans d’arrérages de cens, et l’origine de sa situation critique doit certainement se trouver dans la crise frumentaire des années 1480 à 1482. Son travail salarié auprès de l’abbaye, qui est déjà une forme de remboursement d’une dette par accumulation d’arrérages24, ne fait donc qu’accroître cette situation d’endettement.
Le seigneur face à l’appauvrissement de ses tenanciers : résilience et tolérance
La nécessité d’occuper les terres
17L’appauvrissement des tenanciers entraîne pour l’abbaye une désertion progressive de ses terroirs, et en particulier les plus éloignés. À partir de la fin du xive siècle, les mentions de friches se multiplient, mais le paroxysme de ces abandons est atteint dans la seconde moitié du xve siècle, après la reprise de Pontoise par les troupes royales françaises. Or, la rente de l’abbaye est presque exclusivement assise sur les revenus de cette terre vide d’hommes et couverte de ronces. En 1463, le dénombrement des biens fait au bailli royal de Senlis fait état de cette situation désastreuse :
S’ensuit la déclaration des rentes et cens appartenant à l’église de Saint‑Martin, lesquelles sont de présent et depuis 40 ans en non valoir et non réception d’aucune chose, car les maisons et lieux cy après déclarés chargés des dites rentes sont, à l’occasion des guerres qui ont été en ce royaume, inhabitées et inhabitables, et où il y avait le village appelé la ville de Saint-Martin où résidaient 100 à 120 ménages tenant feu et lieu, habitants et paroissiens de ladite église, celle‑ci avait 26 à 30 livres de rentes, qui est aujourd’hui diminuée car audit village il n’y a ni maison ni a peine une pierre sur une autre, et par conséquent nul habitant, et pour ce ne vaut aujourd’hui ladite rente que 4 sous parisis25.
18Au terroir du prieuré d’Amblainville, la situation est encore plus problématique et atteint des degrés inquiétants pour le prieur. Dès 1413, celui‑ci constate dans les registres de gestion de ses redevances la fuite (ou la mort) de ses tenanciers : « Item en plusieurs lieux plusieurs autres pièces de terres qui ne sont pas écrites ici sont en notre main par faute d’hommes et de paiements26 ». Non seulement les tenanciers se font rares, mais ceux qui restent sont dans l’incapacité de payer leurs redevances. L’abandon des terroirs à cette période n’est pas étonnant. La situation se dégrade cependant davantage, à tel point que le prieur envisage en 1456 d’affermer pour neuf ans l’ensemble du domaine du prieuré pour quelques sacs de grains — 6 mines de grains par an, soit environ 330 kg —, avec en plus les terres à champart et l’obligation de labourer les terres et de les rendre viables27. Le projet semble n’avoir pas eu de suite : les redevances sont levées durant les neuf années suivant 1456. Néanmoins, cela révèle le désarroi du prieur, qui plie un instant sous le poids de la tâche à accomplir pour relever les terres et par le même coup en recouvrer les droits. Dans les années 1470, les tenanciers ne sont pas tous revenus, et certains villages restent déserts, comme le bourg d’Hamecourt, à quatre kilomètres du prieuré, désespérément vide : « Et de tout ce qui est aujourd’hui pour ledit Hamecourt déclaré ci‑dessus n’en est rien en valeur car il n’y demeure nul ménage ni autre sinon un gentilhomme qui y fait résidence pour le présent et depuis 2 ans28 ». Dès la première phase de reconstruction, dans les années 1380, l’abbé au terroir de Saint‑Martin et le prieur à Amblainville assouplissent en partie leur exigences seigneuriales afin de conserver et attirer les tenanciers appauvris.
La conciliation des contrats
19La situation juridique des terres abandonnées est très floue : aucun acte de déguerpissement n’est conservé, certains tenanciers reviennent, d’autres pas. Devant l’énorme masse des terres à mettre en criées, les seigneurs demandent l’aide du pouvoir royal : le roi autorise les seigneurs à bailler les héritages abandonnés à des nouveaux tenanciers en 1447 seulement, alors que le mouvement de réaccensement a déjà commencé dans certains endroits, et en réservant le droit au tenancier de contester ces reprises dans un délai d’un an. Au terroir de Saint‑Martin, les moines ont été très réactifs pour réaccenser les parcelles de vigne. Les baux sont conclus en grappes, la même année, et très souvent le même jour. C’est le cas en 1384 : six baux sont accordés, dont cinq le même jour (19 mars). Deux de ces contrats sont en fait des reconnaissances de droits pour des terres occupées depuis cinq ans (1379). La situation est bien identifiable : il s’agit d’une opération de réinvestissement de zones tombées en friches après les effets des premières crises. Les baux sont conclus oralement, mais l’abbaye, pour assurer sa rente foncière, revient tout de même vers les nouveaux tenanciers plusieurs années plus tard — ici cinq ans — pour coucher sur papier et passer devant le tabellion le bail et ses modalités. Ces « reconnaissances » sont importantes, car elles témoignent d’une part de la réactivité de l’abbaye dans l’administration du temporel, capable d’adapter les outils de gestion dans une situation de crise ; d’autre part, l’on prend ici la mesure des incidences de la crise sur la vie économique et sociale. Pour convaincre les tenanciers de reprendre des friches, l’abbaye renonce à l’authentification, alors que les pratiques de l’écrit sont déjà très développées en cette fin de xive siècle. Cette authentification à retardement signifie sans doute aussi la volonté de l’abbaye de prévenir toute contestation du nouveau tenancier, au moment où les crises semblent s’éloigner et le contexte s’améliorer. En décembre‑janvier 1425, l’abbaye réitère une campagne de réaccensement semblable.
20Le prieur d’Amblainville, au même moment, peine à trouver des preneurs pour son domaine à l’abandon. Les premières terres réaccensées sont celles d’Amblainville dans les années 1450, tandis qu’à Hamecourt les tenanciers ne réinvestissent les terres et les maisons qu’à la fin des années 1470. Ces nouveaux baux conclus sont conciliants, avec des reports de redevances accordés jusqu’à quatre ans, parce qu’ils comportent toujours des conditions de reprises difficiles. Les tenures, abandonnées depuis plusieurs dizaines d’années parfois, sont à défricher, et les maisons à reconstruire. Les baux de masures des années 1420 aux années 1490 comportent presque tous l’obligation de construire une maison, voire plusieurs, en échange d’un rabattement des redevances sur deux, trois voire quatre ans. Ces baux sont accordés jusqu’aux années 1490, témoignant de la lenteur de la reconstruction et de la difficulté pour le seigneur d’attirer des tenanciers réticents. Contrairement au terroir de Saint‑Martin, la composition des redevances n’évolue pas à Amblainville. Elles restent quasiment identiques, mais sont en revanche amoindries les premières années du bail. Les devoirs en nature symboliques, comme les œufs à Pâques, sont également maintenus, mais les tenanciers ne les donnent que très rarement, témoignant de la modification du lien symbolique en même temps que des difficultés éprouvées par la paysannerie.
Dette individuelle et endettement généralisé
21L’endettement29 des tenanciers est polymorphe, mais s’explique en grande partie par la conjoncture défavorable. La dette — en tout cas celle que l’on voit dans la documentation domaniale monastique — est majoritairement constituée d’une accumulation d’arrérages, et, au stade plus avancé et plus critique, gonflée par des arrentements successifs sur des biens fonciers. Individuelle, elle révèle un isolement financier — le réseau des connaissances ne se mobilise pas pour aider le débiteur — et fragilise le tenancier, qui se retrouve seul face à l’abbaye exigeant une amende forfaitaire ou un jugement du prévôt. Collective, elle traduit davantage un problème structurel dans un espace géographique donné, une décapitalisation des exploitations à cause de la crise. Surtout, elle se mue en un rapport de force entre d’une part l’abbaye — à travers le receveur ou l’officier qui vient percevoir — et d’autre part la communauté paysanne. Dans ce cas, l’abbaye ne semble pas exiger les amendes coutumières aux tenanciers, ou en tout cas pas dans l’immédiat. Si le prieur d’Amblainville note scrupuleusement les arrérages pour la seconde moitié du xve siècle, aucune sentence contre un tenancier n’a en revanche été conservée30. Le prieur ne mobilise pas l’appareil judiciaire31 pour faire valoir ses droits, mais parvient à récupérer les terres non occupées ou sur lesquelles le tenancier ne verse plus rien. Cette résolution des contentieux sans recourir explicitement — mais le prieur est de fait le seigneur justicier sur une partie de ses tenanciers — à la justice tient à deux états de fait. D’une part, les tenures du prieur sont très peu attractives, les tenanciers en déguerpissent ou y renoncent probablement facilement. D’autre part, cela correspond aux pratiques de gestion de la rente du prieur, qui demeure inflexible sur sa composition et les modalités de sa perception, et impose par conséquent aux tenanciers en défaut de paiement de partir. La grande proximité du prieur avec les tenanciers d’Amblainville est sans doute déterminante dans l’application des décisions seigneuriales. Par opposition, le prieur poursuit systématiquement les débirentiers lorsqu’il s’agit non plus d’individus mais d’institutions — comme les religieux de Saint‑Victor à Amblainville.
22À Saint‑Martin, où les abbés recourent plus régulièrement à l’appareil judiciaire, onze sentences dont neuf contre des tenanciers sont conservées32. Les mauvais payeurs ne sont cependant pas tous concernés par ces mesures de sanction, seuls les tenanciers isolés font l’objet d’une sentence en justice. Pour les terroirs comme Théméricourt ou Commeny en 1476‑1477 par exemple, la majorité des tenanciers ne verse pas ses redevances, ou avec plusieurs années de retard. Pour autant, ils ne semblent pas inquiétés par le receveur, qui ne mentionne pas les arrérages dans son cahier, et les laisse courir sur plusieurs années. En revanche, pour les terroirs proches et attractifs comme Saint‑Martin, rapidement réaccensés par l’abbé, les tenanciers sont plus vulnérables du fait de la singularité de leur cas. Les tenures sont toutes occupées, cultivées, et leurs exploitants versent avec plus ou moins de régularité leurs charges.
La redéfinition des rapports de domination entre seigneurs et tenanciers
L’endettement, un outil de restructuration du lien seigneurial
23Conjointement à la recomposition, ou non, des redevances foncières, la gestion de l’endettement des paysans est fondamentale pour les moines. En effet, la marge de tolérance face aux arrérages constitue le prolongement de la politique seigneuriale mise en place ou simplement maintenue pendant la reprise agraire. Le simple fait de laisser courir des arrérages sur une ou plusieurs années traduit déjà une certaine volonté de conciliation de la part du seigneur, comme le remarque Julien Demade qui souligne que « si arrérages il y a, c’est qu’ils sont voulus par le seigneur33 ». L’abbé de Saint‑Martin et son receveur font preuve d’une certaine souplesse dans la gestion de ces non‑versements. Si le tenancier Jehan de Groulay ne verse rien durant quatorze ans pour ses deux vignes à cens et à rente, c’est surtout parce que l’abbaye le permet, puisque les termes des contrats à cens comportent suffisamment de protection pour qu’elle puisse réclamer son dû et, le cas échéant, récupérer la parcelle. Le recours à la justice ne concerne en effet qu’une partie des cas litigieux entre l’abbaye et ses tenanciers, la plupart étant réglés en interne entre le receveur des moines et les mauvais payeurs, comme le suggèrent les notes marginales et les décomptes d’arrérages dans les outils de gestion aussi bien du receveur monastique que du prieur. L’endettement des tenanciers, essentiellement via les arrérages, constitue un vecteur central dans la restructuration du lien seigneurial, les moines entretenant en quelque sorte certains endettements, en n’engageant pas des poursuites ou de sanctions contre les mauvais payeurs.
24Si l’abbaye sait faire preuve d’une certaine tolérance, elle sait également se rappeler aux bons souvenirs des tenanciers rétifs. Plusieurs sentences rendues par le prévôt de la châtellenie de Pontoise témoignent des poursuites engagées par l’abbaye. Au seul terroir de Saint‑Martin, les actes de sentences conservés ont été produits de manière rapprochée. La répartition des actes de sentences suit de fait celle des contrats agraires. Que ce soit durant la première ou la deuxième reconstruction, les sentences se concentrent dans les périodes de reprise stabilisées, au tout début du xve siècle et dans le dernier quart du xve siècle. Ces poursuites en justice sont parfois très tardives, comme pour Jehan de Groulay, inquiété plus de dix années après ses premiers arrérages. Ces sentences aboutissent le plus souvent à des condamnations en faveur du seigneur lésé, mais toujours avec une réduction des arrérages ou de l’amende encourue par le tenancier. Jehan de Groulay, qui doit 4 livres 6 sous et 9 deniers d’arrérages, n’est condamné par le prévôt qu’à payer une amende de 5 sous parisis. L’abbaye, qui doit de fait renoncer à quatorze années de redevances, offre de surcroit les 5 sous parisis à Jehan de Groulay, qui est quitte de toute dette, en échange d’un rappel de ses obligations contractuelles34. Le cas n’est pas isolé, le tenancier Lucas Rouelle bénéficie également de cette clémence en 1488 :
A tous ceulx qui ces presentes lectres verront, Jehan Muterne lieutenant de monseigneur le prevost en garde pour le roy nostre seigneur de la ville et chastellenie de Pontoise, salut. Savoir faisons que au jourdui s’est comparu par devant nous Lucas Rouelle lequel de son consentement avons condempne et condempnons a rendre et paier aux religieux abbé et couvent de Saint-Martin ung denier parisis de chef cens portant amende paiable au jour des octaves saint Denis et quatre solz parisis de rente annuelle et perpetuelle paiable au jour des roys, que lesdits religieux ont droit de prendre et parcevoir par chacun an ausdits termes sur une piece de vigne en deux pieces, contenant ung arpent ou environ assis au terrouer dudit Saint-Martin tenant d’une part à maistre Jehan Leclerc et d’autre à Pierre Mesnet mareschal, aboutissant d’un bout a Jehan Letellier et d’autre à Mahiet Landrin, avecques seize solz parisis pour les lotz ventes saisines d’icelle piece de vigne a paier a la voulente desdits religieux abbé et couvent. Et oultre l’avons condempne à paier lesdit cens et rente tant et sy longuement qu’il sera detempteur et proprietaire d’icelle piece de vigne35.
25L’objectif n’est pas tant de recouvrer la dette du tenancier, mais de réaffirmer les droits de l’abbaye sur la tenure, à l’instar des abbayes bretonnes qui poursuivent en justice les tenanciers pour quelques sous d’arrérages, et obtiennent souvent un rappel des obligations contractuelles sans amende36.
26Dans quelques cas bien spécifiques, l’abbaye accorde une rente foncière constituée à des tenanciers, doublant son rôle de seigneur de celui de créancier. Ces rentes constituées accordées par l’abbaye sont assez rares, et essentiellement réservées aux tenanciers urbains de Pontoise. Ces tenanciers sont bouchers, boulangers, charpentiers, occupent des censives bâties en habitations voire en ouvroirs. Ils ne se contentent souvent pas de leur activité artisanale, et prennent quelques parcelles exclusivement agricoles au terroir de l’abbaye. Par rapport aux tenanciers ruraux, ils éprouvent moins de difficultés à verser leurs redevances, et là doit se trouver la raison pour laquelle ils peuvent obtenir des moines des rentes constituées, leur régularité dans l’application des charges forgeant une réputation de solvabilité rassurante. Ce doit être le cas de Fleuret Guibert, charpentier, engagé auprès de plusieurs créanciers. Demeurant rue de la Barre à Pontoise, il prend à cens en 1425 un demi‑arpent de vigne au terroir de Saint‑Martin. Ce contrat l’engage doublement auprès de l’abbaye, d’une part en tant que tenancier, d’autre part en tant que débiteur. La première partie est en effet constituée du bail à proprement parler, Fleuret Guibert s’engageant à prendre la vigne chargée d’une maille de chef‑cens et de quatre sous parisis de rente. Puis, il s’engage à payer une rente annuelle — désignée comme « crois de cens cotage ou rente annuelle et perpétuelle » — de 40 sous parisis sur son autre bien, sa maison avec jardin rue de la Barre. Celle‑ci n’appartient pas à la censive de l’abbaye, le contrat précise en effet qu’elle est chargée d’une maille de chef‑cens envers un autre seigneur. Elle est surtout déjà chargée de deux autres rentes : dix sous parisis de rente envers les héritiers d’un autre créancier, Guillaume Gosselin, et quatre sous parisis de rente au chapelain de la chapelle Saint‑Nicolas — fondée à Saint‑Melon de Pontoise37. En tout, il doit chaque année en redevances diverses, près de trois livres parisis à plusieurs seigneurs et créanciers, ce qui ne prend pas en compte ses éventuelles autres tenures ou engagements liés à sa profession de charpentier, ainsi que ses dépenses de subsistance. Cette accumulation de dettes traduit la confiance accordée par ses créanciers et crédirentiers à Fleuret Guibert, sans que la documentation ne livre l’issue de cette situation financière périlleuse.
27Au‑delà de la rente à proprement parler, l’abbaye est surtout soucieuse de maintenir le lien de domination seigneurial sur ses tenanciers, même les plus appauvris. Cette volonté explique que les receveurs et les prieurs notent chaque œuf non rendu, exigent même avec plusieurs années de retard les arrérages et en réfèrent à la justice de la prévôté quand le tenancier est plus retors que les autres. Car si l’appauvrissement des tenanciers signifie mécaniquement la diminution de sa rente seigneuriale, cela ne doit en revanche pas modifier le rapport de domination induit et maintenu par le cadre de la seigneurie. Ainsi, dans les contrats de réaccensement des terres à défricher, le cens n’est jamais diminué, et l’abbaye joue sur le report d’un à quatre ans de la rente pour attirer les tenanciers appauvris et inquiets de s’engager dans une exploitation où tout est à faire. Or, dans la composition de la redevance foncière, le cens est bien plus important que la rente au niveau symbolique. Fixé par la coutume, il est une redevance purement recognitive et très peu élevé, en tout cas jusque dans la première moitié du xve siècle. La rente en revanche a été rajoutée au tournant du xiiie et xive siècle pour compenser la perte de valeur du cens qui, fixe et en argent, est de moins en moins rentable pour le seigneur. L’abbaye, face à l’appauvrissement de ses tenanciers et de ses moyens de productions, consent donc à baisser la partie de la redevance ayant le moins de portée symbolique, mais presque jamais le cens, qui est l’essence même du lien avec ses tenanciers.
28Lorsque rien n’est à prélever, puisque les tenanciers sont trop appauvris soit pour payer, soit pour rester, l’abbaye tente coûte que coûte de maintenir ce lien organique. Percevoir les redevances constitue en effet un moment privilégié pour elle dans la réaffirmation de sa domination. Le prélèvement seigneurial, en tant qu’action ritualisée, rythmée par le calendrier liturgique et agricole, est assuré autant que possible, même si le receveur ne se déplace que pour percevoir quelques deniers dans un village en déshérence. Dans les cas les plus désespérés, ce déplacement est même d’une impérieuse nécessité pour assurer une réactivation d’un lien de domination qui ne prend son sens que lorsqu’il est visible. À Amblainville, le prieur est conscient de l’importance de cette présence et tente tant bien que mal de la maintenir même après la guerre dans les terroirs les plus désertés de son domaine, comme par exemple à Hamecourt, complètement dépeuplé en 1476. Excepté le gentilhomme isolé, qui n’est de toute façon pas d’un grand secours pour défricher, le village est vide d’hommes et donc de toute rente. Pourtant, en 1477, le prieur envoie à la saint Jean‑Baptiste un prêtre « dire messe pour tenir possession38 ». Faute de redevance à aller prélever, la « possession » passe ici par un acte liturgique, et est toute symbolique puisque le seul fidèle demeure le gentilhomme.
La recomposition des redevances foncières
29Cet appauvrissement des tenanciers est aussi pour l’abbaye l’occasion de reconfigurer la composition de sa rente seigneuriale, en particulier au terroir de Saint‑Martin. Le lieu est stratégique, car il concentre les vignes les plus rentables des moines. Les différentes campagnes de réaccensement sont ainsi pour ces derniers l’occasion de revoir la répartition traditionnelle entre le cens, faible mais recognitif de la sujétion du tenancier, et la rente, élevée et restituant la juste valeur agricole de la tenure. L’abbaye procède ainsi en deux temps. Initialement, les cens de ces tenures essentiellement viticoles sont très peu élevés — en moyenne 1 denier par arpent — et accompagnés de rentes en avoine. Puis, dans la première moitié du xve siècle, au moment des premiers réaccensements après la seconde crise, l’abbé fait disparaître les rentes en nature, et les remplace par des rentes en argent très élevées – en moyenne 94 deniers par arpent. Enfin, l’abbé tend à supprimer les rentes, mais maintient le niveau des redevances grâce à l’augmentation considérable du cens — en moyenne 85 deniers pour 1 arpent. La tendance est donc à la simplification du prélèvement, avec une réévaluation du cens par rapport à la valeur foncière des biens. Autrement dit, l’appauvrissement des tenanciers et l’abandon massif des tenures ont permis à l’abbaye de reprendre en main les censives et de reconstruire un nouveau lien à travers la redevance foncière. Le cens, réévalué à la hausse, symbolise ici le renforcement de la domination seigneuriale. Cette politique est appliquée de manière globale par les abbés dans les terroirs environnants, comme à Gency, où Estienne Tremblay prend en 1462 un demi‑arpent de vignes pour un chefcens très élevé de 4 sous parisis par an, alors même que la tenure est en friche. Pour assurer l’engagement du preneur, les moines ajoutent des clauses de responsabilité d’entretien, sans succès puisqu’à deux reprises au moins Estienne Tremblay peine à verser ses redevances, en 1472 et en 149539. La réévaluation des redevances foncières traduit une nette volonté de fermeté et de réaffirmation de l’autorité de l’institution, qui se poursuit dans des opérations procédurières de recouvrement des arrérages.
30La recomposition de la rente constitue ici une mesure conservatrice, représentative de la politique économique monastique. La fin du Moyen Âge n’est pas pour l’abbaye, à l’instar de la plupart des seigneuries foncières, l’occasion de nouveaux modes de gestion de la terre. Tout juste les abbés, et surtout les prieurs d’Amblainville, adaptent-ils les contrats des tenures, privilégiant le champart dans les zones particulièrement désertées. Les périodes de reconstruction sont en revanche l’occasion de réajuster les différents de modes de gestion déjà existant en fonction des besoins et du niveau de dégradation des droits monastiques. Ainsi, face à la désertion prolongée de certains terroirs, les moines les afferment en groupant les censives en domaines plus vastes, confiés à des fermiers. Le prieur amodie ainsi une partie des terres labourables d’Amblainville, et l’abbé semble privilégier les terroirs avec le plus grand nombre de censives ou les prieurés désaffectés. Toutefois, les moines n’afferment qu’une partie seulement de leurs censives, et conservent les plus attractives en tenures.
31À Amblainville, l’absence de baux ou de comptabilités domaniales avant le xve siècle ne permet pas de comparer la composition des redevances foncières avant et après la reconstruction. Au vu des détails fournis par le prieur dans son cahier de 1455‑1463, et considérant les redevances du début du xive siècle au terroir de Saint‑Martin, celle‑ci ne semble cependant pas subir de grande modification. Là où les abbés reconfigurent les redevances composites pour obtenir un cens unique en argent, les prieurs maintiennent des charges très hétérogènes, comportant une part fixe en argent, et des rentes additionnelles en avoine, chapons et œufs. En 1461, Jehan Gynart doit ainsi verser à la Saint‑Rémi 12 deniers parisis et une poule de cens, puis à Noël un setier d’avoine, une demi‑mine de blé, deux chapons de rente et 6 deniers parisis de cens ; enfin à la mi‑mars il doit un demi‑chapon et 4 deniers parisis de cens40. Le cens est bien exigé en argent et le sur‑cens est essentiellement composé d’avoine et de volailles. La production agricole est donc clairement orientée par le seigneur, qui contraint le paysan à cultiver environ un demi‑arpent en avoine41.
Des exigences adaptées aux conditions de reprise ?
32La reconstruction menée par les seigneurs dans leurs domaines est traditionnellement présentée comme conservatrice, au sens où les seigneurs cherchent à obtenir la même valeur et la même composition des redevances42, les seigneuries ecclésiastiques se démarquant même par une certaine rigidité vis‑à‑vis de leurs tenanciers43. Le prieur et l’abbé se distinguent sur ce point durant la reconstruction de la seconde moitié du xve siècle : s’il est vrai que le prieur d’Amblainville ne semble pas modifier la composition de ses redevances foncières et comptabilise chaque œuf manquant aux versements de ses tenanciers, l’abbé fait preuve de plus de souplesse. Dans les deux domaines, l’enjeu est bien évidemment de retrouver un niveau de rente acceptable, après des années de diète financière, mais également de sauvegarder la structure seigneuriale.
33Le prieur tente d’y parvenir en réappliquant les mêmes charges dans ses contrats à cens, et répond avec rigueur aux défauts de versement de ses redevables. Les redevances exigées dans les contrats à cens sont assez élevées, notamment la partie fixe en argent, qui s’élève par exemple à 12 sous parisis pour le tenancier Jehan Henri le Jeune en 1452, alors que le village est presque désert. Ce conservatisme a plusieurs conséquences, à commencer par une grande mobilité des tenanciers lorsque la reprise se solde par plusieurs années d’arrérages. Le prieur parvient tout de même à maintenir un petit nombre d’entre eux, la majorité étant assez assidus au versement de leurs redevances. Son statut de seigneur justicier et l’insertion du prieuré au cœur du village sont dans ce sens essentiels à l’application des obligations des tenanciers, même dans un terroir aussi dépeuplé. L’abbé quant à lui reconfigure sa rente seigneuriale, en augmentant le nombre de terres affermées, et en simplifiant une partie des redevances sur les tenures. À l’instar des seigneurs nantais44, il parvient à l’issue de la reconstruction agraire à partager son domaine en deux types d’exploitations distincts, offrant deux types de revenus. D’une part des cens en argent mobilisables immédiatement pour les dépenses du monastère, et d’autre part des loyers de ferme en nature, diversifiés, offrant la possibilité aux moines de s’insérer dans le marché local.
34L’appauvrissement des tenanciers de l’abbaye de Saint‑Martin de Pontoise, causé par une conjoncture très défavorable, entraîne, par la désertification des terroirs, une décapitalisation massive des exploitations. L’abbaye doit alors composer avec les quelques tenanciers ruinés qui demeurent sur leurs terres, et les friches à revaloriser. On observe deux types de reconstructions dans le terroir de Saint‑Martin et les terres du prieuré d’Amblainville. D’un côté, une dynamique palpable, des moines qui réaccensent rapidement des terres certes en friches, mais accessibles depuis les murs rassurants de Pontoise. À partir des années 1380, les tenanciers n’habitent plus au village de Saint‑Martin, entièrement détruit, mais à Pontoise. L’abbaye fait preuve de clémence pour attirer les tenanciers dans les friches, mais sait réagir rapidement pour rappeler aux bons souvenirs ceux qui peinent à payer les redevances. De l’autre côté, des terres vides, en proie aux ronces, où le prieur est en peine de trouver des bras pour retourner les friches et attend patiemment les tenanciers les jours de perception du cens. Si l’amélioration assez rapide de la conjoncture agricole à Saint‑Martin permet à l’abbaye de restructurer les fondements de sa domination seigneuriale, l’abandon prolongé des tenures du prieur ne lui laisse d’autre choix que d’attendre et attirer les tenanciers. Cependant, dans les deux situations, l’appauvrissement des tenanciers est l’occasion pour les moines d’éprouver la réalité et la solidité de la structure seigneuriale.
Notes de bas de page
1 La Plaine de France (couvrant Saint‑Denis, Roissy, Écouen) alimente ainsi la ville en grains, tout comme le Vexin français qui exporte également du vin.
2 Les flux commerciaux semblent paralysés : la foire du Lendit a lieu une dernière fois en 1429, avant de cesser jusqu’à la paix de Tours en 1444. Entre 1435 et 1441 a lieu la prise de Paris et celle de Pontoise : on sait très peu de choses, preuve de l’asphyxie économique. Pontoise, porte stratégique du Vexin français qui ouvre la voie vers Paris, souffre énormément durant cette période. Elle est reprise en une nuit par les Français fin février 1436 et complètement pillée, mais réinvestie par les Anglais en 1438, qui pillent également tout le secteur jusqu’à Saint‑Denis. Le dernier siège par les Français à l’été 1441 est long et difficile, mais marque la reprise progressive de la région.
3 Dès les années 1417‑1418 au moins, des vagues de paysans vexinois se réfugient vers Paris (Journal d’un bourgeois de Paris, éd. de Colette Beaune).
4 Feller, Gramain, Weber, 2005, pp. 225-226.
5 Ibid., p. 260.
6 Weiss, 2002, pp. 127-128 ; Fourquin, 1964, pp. 150-151 : Guy Fourquin souligne par ailleurs que les redevances sont couramment payées en un bloc, avec plusieurs termes de retard.
7 ADVO, 9H79, Registre III, fo 15vo et 9ro.
8 ADVO, 9H70, Liasse 17, no 436 bis.
9 ADVO, 9H70, Liasse 16, no 401 : bail d’une vigne à Jehan Certain après la mort de Durant de Gienfosse (1448).
10 Fourquin, 1964, pp. 227-229 et 361-362.
11 Le témoignage de Thomas Basin est le plus connu : Histoire de Charles vii et Louis xi, éd. de Thomas Basin, p. 88.
12 Journal d’un bourgeois de Paris, pp. 126-128.
13 Le livre de raison de l’abbaye de Saint-Martin-de-Pontoise, éd. de Joseph Depoin, p. 229.
14 Pour Guy Fourquin, si les paysans fuient leurs campagnes pour les villes à partir des années 1340, ce n’est pas uniquement à cause des massacres et de l’insécurité décrits par le Bourgeois de Paris, mais également parce qu’au sortir de la Peste noire, les prix trop faibles des céréales, et essentiellement du froment, ne les incitent pas à rester (voir Fourquin, 1964, pp. 493-497). La Roncière, 1982, p. 8 reprend en partie les chiffres de Guy Fourquin dans son étude sur les prix à Florence, et constate que les phases des prix sont plus agitées en Île‑de‑France qu’ailleurs en Europe et notamment en Angleterre ou en Italie du Nord, à cause de la fréquence inédite et de plus en plus importante des crises au xive siècle. Le déclin des prix du blé est amorcé depuis les années 1303‑1320 dans la région, et se poursuit au début du xve siècle.
15 ADVO, 9H70, Liasse 15, no 337.
16 Ibid.
17 La région est de nouveau troublée par les conséquences de la guerre civile à partir de 1415.
18 ADVO, 9H79, Registre III, Cahier de Jehan Ruffault (1452-1463), fo 6ro.
19 ADVO, 9H79, Registre II, fo 47vo.
20 ADVO, 9H70, Liasse 17, no 415.
21 ADVO, 9H79, Registre III, Cahier de Jehan Ruffault (1452-1463), fos 11vo, 12vo et 14ro.
22 Fourquin, 1964, pp. 361-362. Pour les conséquences démographiques des épidémies de peste et autres maladies durant les xive et xve siècles, voir les synthèses dans : Bove, 2009, pp. 306-309 ; Claustre, 2015, pp. 101‑104.
23 Sur les salariés ruraux à l’abbaye de Saint‑Martin, voir : Alard‑Bonhoure, 2019, pp. 132-134, 193-201 et 279‑281.
24 Wilmart, 2017, p. 30.
25 Archives Municipales de Pontoise, 25 Z 236, Fonds Pihan de la Forest : dénombrement des biens, cens et rentes de l’abbaye remis au bailli de Senlis (1463).
26 ADVO, 9H79, fo 25vo.
27 ADVO, 9H79, fo 22ro.
28 ADVO, 9H79, Registre IV, fo 11vo.
29 La Roncière, 1973, pp. 97-100 a décrit très précisément les mécanismes de l’endettement, et en particulier les relations que cela induit entre le créancier et son débiteur.
30 Une série de sentences, émises par le prévôt contre les religieux de Saint‑Victor et le curé de l’église de Saint‑Martin pour un contentieux sur les dîmes d’Amblainville, et le prieur d’Avernes pour une rente sur son domaine, sont en revanche conservées (ADVO, 9H79, no 3 : CC, DD, NN, OO, PP, XX, YY et ZZ). Pour les modes de recouvrement des dettes, voir : Claustre, 2015 et Smail, 2013 (en particulier p. 375).
31 Le prieur est en l’occurrence seigneur justicier : « Le prieur d’Amblainville a en toute sa terre et seigneurie et sur ses hostez justice moyenne et basse toutes amendes ventes saisines forages rouages mesurages bournages et reliefz et rachatz telz comme ilz sont acoustumes en ladite ville d’Amblainville » (ADVO, 9H79, Registre IV, Déclaration des revenus de 1476, fo 1ro).
32 ADVO, 9H70, Liasses 15, 16 et 17.
33 Demade, 2006.
34 ADVO, 9H70, Liasse 17, no 436 bis.
35 ADVO, 9H70, Liasse 15, no 355.
36 Rabot, 2016, pp. 92-93 rappelle que nombre de litiges étaient réglés sans recours à la justice, voir avant l’intervention du prélèvement, via notamment la solidarité familiale ou l’intervention de médiations.
37 ADVO, 9H70, Liasse 17, no 415.
38 ADVO, 9H79, Registre V, fo 12ro.
39 ADVO, 9H44, 1462 : Bail à cens d’une vigne à Estienne Tremblay ; 1472 : Sentence du prévôt contre Estienne Tremblay ; 1495 : Quittance de paiement d’arrérages d’Estienne Tremblay (Gency). Voir détails des actes du dossier dans Alard‑Bonhoure, 2019, pp. 150-153.
40 ADVO, 9H79, Registre III, Cahier de Jehan Ruffault (1452-1463), fo 13ro-14vo.
41 Jacquart, 1975 : « En année normale, l'arpent de méteil pouvait rapporter 4,5 setiers (mesure de Paris), celui d'avoine 3 setiers ».
42 Fourquin, 1964, pp. 430-455.
43 Glomot, 2013, pp. 179 et 183 remarque ainsi que « les communautés religieuses se démarquent de trois façons : premièrement, elles entreprennent très précocement la réoccupation de leurs patrimoines ; ensuite, elles font preuve d’un grand conservatisme, voire d’une rudesse dans leurs rapports avec leurs tenanciers ; enfin, ponctuellement, on constate des tentatives d’innovation et d’optimisation de leur gestion », et que ce mouvement de redressement rigoureux est amorcé dès les années 1420 pour la Haute‑Marche.
44 Rabot, 2017.
Auteur
Université Paris 1 Panthéon‑Sorbonne — UMR 8589 Lamop
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