Sacralité de l’espace, de l’histoire et des hommes
Le détroit de Gibraltar dans les mythes arabes
p. 91-103
Texte intégral
1Situé à la croisée de la mer Méditerranée et de l’océan Atlantique, de l’Europe et de l’Afrique, c’est-à-dire au carrefour de deux continents et de deux mers, le détroit de Gibraltar n’a jamais constitué un « fossé » séparant les continents voire les civilisations, comme le laisserait supposer la géographie physique. Au contraire, il a joué plutôt le rôle d’un « canal » ou d’un « pont », reliant les espaces, les hommes et les civilisations.
2Occupant une situation géostratégique éminente, le détroit de Gibraltar a été un point de passage privilégié par les conquérants, qu’ils viennent d’Europe en direction de l’Afrique du Nord ou bien dans l’autre sens, de la rive sud vers la rive nord. De l’Antiquité jusqu’à l’époque contemporaine, Phéniciens, Romains, Vandales, Wisigoths, Berbères, Arabes, Turcs, Français, Espagnols, Anglais et Italiens ont illustré le mouvement incessant des hommes qui a marqué le détroit de Gibraltar, quelles que soient les motivations diverses qui aient pu en être à l’origine. Toutes ces circulations, d’ordre démographique, économique, politique ou religieux, à travers les siècles et les millénaires, ont largement contribué à l’émergence de ce que l’on pourrait appeler une « civilisation de la Méditerranée », en diffusant un ensemble de mythes dont certains mettent en scène le détroit de Gibraltar. Ces récits fabuleux ont forgé un imaginaire et une mémoire du détroit, à partir de personnages légendaires ou d’événements historiques, ayant marqué l’histoire de l’humanité, en général, et celle de cette région des confins de la Méditerranée, en particulier.
3Parmi tous ces récits et ces légendes, nous avons choisi de traiter les mythes arabes, c’est-à-dire ceux qui ont été écrits et sauvés de l’oubli en langue arabe, et qui traitent du détroit en tant que partie inséparable d’un tout, la Méditerranée. Nous avons essayé d’en expliquer les significations et de voir comment ils ont contribué à sacraliser l’espace, l’histoire et les hommes associés à ce lieu mythique.
Le mythe du péché originel et les difficultés des conquérants musulmans
4En principe, le mythe du péché originel n’est pas un mythe arabo-musulman et renvoie plutôt à l’univers biblique. Cependant, la mythologie arabe ne manque pas de mythes de ce genre, qui « expliquent », en racontant ce qui s’était passé dans les temps mythiques, « les premiers temps », pour reprendre les termes de M. Eliade1, une situation présente dans l’Antiquité ou au Moyen Âge musulman.
Le faqīh Abū l‑Ṭayyib, ʿAbd Allāh b. Muḥammad al‑H̱allāl [ou Ibn al‑H̱allāl], nous rapporta à al‑Rayy [ce qui suit], et dit : Aḥmad b. Muḥammad b. Yazīd al‑ʿAstarabāḏi, nous rapporta [ce qui suit], et dit : Abū Salama nous rapporta [ce qui suit], et dit : Ibn Yasār nous rapporta [ce qui suit], et dit : on rapporte que ʿAbd Allāh b. ʿAmr avait dit :
Dieu, lorsqu’il créa la « mer de Syrie » (Šām) [La Méditerranée], lui fit cette révélation : « Je t’ai créée, et vais te remettre à mes serviteurs qui, souhaitant quelque grâce de moi, diront : « Gloire à Dieu » ! ou « Dieu est saint » ! ou « il n’y a d’autre divinité que Dieu ! » Comment les traiteras-tu ? Eh bien, Seigneur, répondit la mer, je les noierai ! — Loin de moi ! En vérité je te maudis ! Je te rendrai moins belle et moins poissonneuse !
Puis, Dieu fit la même révélation à la mer d’Irak, qui dit : « Seigneur, je les porterai sur mon dos… » — « Va ! Je te bénis ! Je te rendrai plus belle et plus poissonneuse ! ». Voilà qui prouve qu’il n’existe que deux mers2.
5Ce récit est rapporté sous la forme d’une tradition prophétique (ḥadīṯ), dûment munie d’une chaîne de transmetteurs (isnād) pour attester de son authenticité. Il est attribué au fameux compagnon du Prophète, ʿAbd Allāh b. ʿAmr b. al-ʿĀṣ, ce qui renforce encore la fiabilité et le caractère sacré de son contenu. Certes, cette tradition ne remonte pas directement au Prophète mais seulement à un de ses compagnons. Cependant, celui-ci était réputé pour son savoir religieux, ce qui était une manière de se référer, de manière indirecte, au Prophète lui-même, source absolue de toute sacralité et de tout savoir sacré. On considérait qu’un compagnon du Prophète, réputé pour son honnêteté et pour sa science, n’aurait jamais inventé ni imaginé un tel récit mais l’aurait écouté de la bouche même du Prophète, ou d’un autre compagnon aussi irréprochable que lui, ou du moins, dans le pire des cas, il l’aurait rapporté d’après les savants des gens du Livre, juifs ou chrétiens, c’est-à-dire, d’une autre source du savoir sacré, considérée cependant comme moins fiable. La mise en comparaison de la Méditerranée et du golfe Persique par ce mythe-tradition reflète, en effet, des données à caractère historique, géographique et symbolique.
6La Méditerranée, y compris le détroit de Gibraltar, y apparaît comme une mer rebelle qui s’oppose à la volonté de Dieu. L’opposition est manifeste : Dieu veut faire embarquer Ses serviteurs, c’est-à-dire les musulmans, sur cette mer. Cependant, la Méditerranée refuse cet ordre et décide, délibérément, d’éliminer les serviteurs de Dieu, ce qui constitue un défi impardonnable à la volonté divine. À l’inverse, la mer du golfe Persique, non seulement se soumet de bon gré à l’ordre divin, en acceptant de servir les serviteurs de Dieu, mais elle décide d’adorer et de glorifier Dieu et Ses serviteurs. Selon toute probabilité, l’attitude du golfe Persique est une allusion à celle des anges à l’égard de Dieu, lorsqu’ils furent invités à se prosterner devant Adam. Quant à celle de la Méditerranée, elle fait référence au péché de Satan, lorsqu’il s’était abstenu de se prosterner devant Adam, refusant catégoriquement l’injonction divine. Dans ce discours mythique, ce « péché originel » serait ainsi responsable de « la pauvreté » des ressources maritimes méditerranéennes (« Je diminuerai ton ornement et ta pêche »), à l’inverse de celles du golfe Persique. Cette attitude serait également à l’origine des difficultés qu’avaient rencontrées les musulmans lors de leurs premières conquêtes en Méditerranée, dues au manque d’expérience et de connaissances dans le domaine maritime, qui avait causé de graves dommages sur le plan humain (« Seigneur. Alors, je les submergerai »). Tout ceci donna à la Méditerranée l’image mythique d’une mer « maudite ».
7En revanche, la mythologie arabe créa aussi ce que l’on peut appeler un contre-mythe à celui du péché originel, qui allait radicalement changer l’image de la « mer maudite », voire de la « mer infidèle », hostile aux musulmans, toujours « mer des Romains » (rūm), c’est-à-dire sous domination byzantine et plus généralement chrétienne, où les conquérants musulmans auraient connu de multiples tourments. Ce contre-mythe aurait été inventé lorsque les connaissances géographiques et maritimes des musulmans sur la Méditerranée, en particulier sur ses confins occidentaux et la région du détroit de Gibraltar, s’étaient suffisamment développées, à l’occasion de la conquête d’al-Andalus en 711. On passa alors de l’image de « la mer maudite », ou « infidèle », à l’image de « la mer de l’éternité et de la double vérité spirituelle », basée sur un long passage du Coran, concernant Moïse et Josué :
Moïse dit à son jeune serviteur : « Je n’aurai de cesse que je n’aie atteint le confluent des deux mers ; devrais-je marcher durant de longues années ».
Quand ils eurent atteint le confluent des deux mers, ils oublièrent leur poisson qui reprit librement son chemin dans la mer.
Lorsqu’ils eurent dépassé cet endroit, Moïse dit à son serviteur : « Apporte-nous notre repas, car nous sommes fatigués après un tel voyage ».
Il dit : « N’as-tu pas remarqué que j’ai oublié le poisson lorsque nous nous sommes abrités contre le rocher ! Seul le démon me l’a fait oublier pour que je n’y pense pas. Il a repris son chemin dans la mer. Quelle étrange chose ! ».
Moïse dit : « Voilà bien ce que nous cherchions ! » Puis ils revinrent exactement sur leurs pas.
Ils trouvèrent un de nos serviteurs à qui nous avions accordé une miséricorde venue de nous, et à qui nous avions conféré une Science émanant de nous3.
8La rencontre de Moïse avec le serviteur anonyme d’Allāh, généralement appelé al‑H̱aḍir dans la tradition musulmane, dévoila à Moïse, le prophète, messager de Dieu et transmetteur de la révélation exotérique, une autre révélation, cette fois-ci non prophétique, mais également d’origine divine, une révélation ésotérique, au-delà des capacités de compréhension de Moïse.
Moïse lui dit : « Puis-je te suivre pour que tu m’enseignes ce qu’on t’a appris concernant une voie droite ? »
Il dit : « Tu ne saurais être patient avec moi. Comment serais-tu patient, alors que tu ne comprends pas ? »4.
9Se produisit alors une série d’incidents incompréhensibles pour le prophète-messager de Dieu : dommages causés par al‑H̱aḍir dans le bateau, assassinat du jeune homme apparemment innocent, réparation d’un mur menaçant de ruine dans une cité qui leur avait pourtant refusé l’hospitalité. Ces incidents mirent Moïse en colère et il exposa ses griefs à al‑H̱aḍir lui-même, qui lui révéla le sens ésotérique de ces incidents5.
10Étant donné que ce fameux récit coranique ne mentionne pas les noms des principaux protagonistes, notamment ceux du serviteur de Moïse et de son interlocuteur, ou encore les toponymes du voyage de Moïse, les exégètes du Coran et les géographes-mythographes ont souvent tenté de localiser le mystérieux « confluent des deux mers » et d’identifier les personnages de cette histoire. Si la plupart d’entre eux s’accordent sur les noms de Josué et d’al‑H̱aḍir, la localisation du « confluent des deux mers » est beaucoup plus controversée, même si la majorité tend à l’identifier au détroit de Gibraltar.
À Ceuta [dit Abū Ḥāmid al‑Ġarnāṭī, se trouve le rocher que Moïse atteignit, là où Josué perdit le poisson6.
11Quant à la cité qui avait refusé à Moïse et à al-H̱aḍir l’hospitalité, on l’identifia à Algésiras :
Les gens de cette ville d’Algésiras [dit al-Ḥimyarī] refusèrent l’hospitalité à Mūsā [Moïse] et à al-H̱aḍir, que la paix soit sur eux.
Dans cette cité, ce dernier éleva un mur et détruisit un bateau. Quant à al-Ǧalandī, il s’empara par la force de tous les navires. On rapporte ceci d’après Wakīʿ b. al-Ǧarrāh7.
12L’identification de ces noms mystérieux, appartenant au récit coranique, à des toponymes méditerranéens et, plus précisément, à des lieux associés au détroit, contribua à sacraliser cet espace géographique. Le voyage de Moïse, de son serviteur, et la rencontre avec al-H̱aḍir, sont les preuves indiscutables, dans le discours mythique arabe, que la Méditerranée a changé de signe : de mer « maudite », elle devient une mer « bénie ». Le voyage de Moïse semble ainsi annuler le péché originel de la Méditerranée. À certains égards, le rôle de Moïse en Méditerranée est comparable à celui de Jésus-Christ qui, par sa présence et son sacrifice, annula le péché originel des hommes dans le monde, dans la culture chrétienne.
13Mais la mer Méditerranée ne fut pas la seule bénéficiaire du voyage de Moïse. Le prophète Moïse lui-même en tira un enseignement primordial. C’est au détroit de Gibraltar qu’al-H̱aḍir lui révéla que la vérité spirituelle avait une double dimension : une vérité exotérique, révélée par Dieu à ses prophètes et à ses messagers, et une autre vérité ésotérique, qui existe au-delà de toute révélation exotérique, mais qui la complète — même si parfois elle s’y oppose —, non conditionnée par la raison humaine, ni la charia.
14Selon cette conception ésotérique, que l’on retrouve notamment dans le soufisme, Josué et al-H̱aḍir, compagnons de Moïse dans son voyage vers l’ouest, apparaissent comme des êtres éternels et immortels.
15Selon al-Ṭabarī, « dire que al-H̱aḍir vivait au temps d’Afrīdūn et de Ḏū l-qarnayn est plus vraisemblable [, sinon,] il aurait été à l’avant-garde de Ḏū l-qarnayn, compagnon d’Abraham8 ». Après avoir reçu une initiation ésotérique, « il but l’eau-de-vie9 », ce qui le rendit immortel. Quant au serviteur de Moïse, il eut un autre sort, plus dramatique :
Moïse partit avec son serviteur, portant ce poisson-là. Ils marchèrent jusqu’à ce qu’il fût fatigué par la marche, et arriva au rocher et à cette source. L’eau qui s’en écoulait était bien l’eau-de-vie. Celui qui en boit devient éternel. Et toute chose morte qui s’y approche, la vie la touche, et ressuscite10.
16Le serviteur n’étant pas autorisé spirituellement à obtenir la vie éternelle, il fut terriblement et éternellement châtié, non pas par Moïse, le représentant de la raison et de la charia, mais par al-H̱aḍir, le connaisseur des secrets ésotériques qui dépassaient le messager lui-même :
Ibn ʿAbbās dit : le serviteur but l’eau de l’éternité et, par conséquent, devint immortel. Alors, le sage le prit comme captif, et l’enferma dans un bateau que le sage jeta à la mer. Depuis, il fut condamné à être sans cesse agité dans ce bateau, jusqu’au jour de la résurrection, parce qu’il n’aurait pas dû boire l’eau de l’éternité11.
17Tous ces secrets ésotériques eurent comme cadre, selon la mythologie arabe, le détroit de Gibraltar, transfiguré en espace des mystères et de l’éternité.
Les conquérants fictifs de l’Antiquité
L’œuvre d’Alexandre/Ḏū l-qarnayn
18La mythologie arabe ne manque pas de citer les noms de plusieurs héros de l’Antiquité, arabes et non-arabes, qui conquirent l’Afrique du Nord, tels que Jālūt, Ifriqīš, Tubbaʿ al Ḥimyarī, Abraha Ḏū l-Manār, Ḥimyar b.Sabaʾ, etc. Mais le détroit est rarement mis en scène comme le lieu de l’accomplissement de leurs exploits12. Une figure mythique, cependant, est étroitement associée au détroit : il s’agit d’Alexandre le Grand, identifié en général au grand conquérant coranique, le « Bicornu » (Ḏū l-qarnayn), auquel le récit coranique consacre un long passage dans la sourate de la Caverne13. Souvent arabisé par les généalogistes arabes, en lui attribuant souvent une origine yéménite, mais considéré aussi parfois comme non-arabe, Alexandre/Ḏū l-qarnayn, est également identifié par certains récits mythologiques à Hercule. En ce qui concerne le détroit de Gibraltar, on lui attribue ce qui suit :
- Il aurait divisé le monde habité (al-maʿmūra) en quatre parties et aurait situé géographiquement Tanger dans la première partie.
- Il aurait creusé le détroit (al-zuqāq, ou la « ruelle ») séparant géographiquement l’Europe de l’Afrique.
- Il aurait construit le « pont merveilleux » (al-qanṭara al-ʿaǧiba) du détroit, reliant ainsi l’Europe à l’Afrique, en remplacement de l’ancienne connexion terrestre directe.
19Ainsi, il aurait créé mythologiquement ce que nous appelons le détroit de Gibraltar, avec tout ce qui le caractérise, c’est-à-dire, sa fonction de point géographique reliant et séparant tout à la fois deux continents et deux civilisations.
L’œuvre d’Araclush
20Alexandre/Ḏū l-qarnayn n’était pas l’unique conquérant du détroit ni le seul à y construire des monuments éternels et utiles mais il était le plus célèbre par ses œuvres indépassables dans l’histoire. Néanmoins, on trouve dans la mythologie arabe un autre conquérant, identifié non pas à un personnage biblique ou coranique, ni même arabe ou sémite, mais à un héros grec : Araclush (ou Eraclush), le roi constructeur de l’idole de Cadix. Voici ce que rapporte al-Ḥimyarī :
On dit aussi que lorsque Araclush eut élevé ce monument [les idoles magiques de Cadix], il se dirigea vers le pays des Berbères. Il parvint d’abord à la ville de Ceuta, sur le détroit qui sort de l’Océan Environnant [Atlantique]. Il conquit sans s’arrêter ville après ville14.
21Araclush (ou Eraclush), dont le nom est facilement identifiable au héros gréco-romain Héraclès/Hercule, ne put atteindre le rang de prophète, ou même de saint, à l’instar de Ḏū l-qarnayn, pour la simple raison qu’il utilisait la magie dans ses constructions, surtout à Cadix. Il fut donc considéré comme un « sage » grec, mais jamais comme un prophète.
22C’est à Araclush, le sage et le magicien conquérant, que l’on attribua l’idée de faire s’agiter l’océan Atlantique et, par conséquent, d’en interdire la navigation et la traversée à toute flotte, quelle que soit son appartenance, et d’interdire également le détroit et, au-delà, la navigation dans toute la Méditerranée aux marins berbères, durant toute l’Antiquité et le haut Moyen Âge, jusqu’à la deuxième moitié du ve/xiie siècle, grâce à un talisman qu’il fabriqua par l’art de la magie.
Ce talisman-là [celui de Cadix] eut une influence sur la mer, qui lui fait face, de manière qu’on ne la vit jamais calme et qu’aucun bateau berbère n’y navigua, et ce jusqu’à ce que la clé [de l’idole de Cadix] fût tombée de sa main15.
23Cette chute eut lieu au ve/xiie siècle, au moment où la dynastie berbère des Almoravides décida de se doter d’une véritable flotte musulmane à l’extrémité ouest de la Méditerranée. Cette marine de guerre, dont les bases principales étaient situées dans la zone du détroit (à Cadix, Tanger, Ceuta, Algésiras et Almería), avait pour fonction de faciliter l’accès des Almoravides à leur province d’al-Andalus, de freiner l’avancée de la Reconquête chrétienne dans la péninsule Ibérique, notamment face au royaume d’Aragon, et d’assurer la domination des Almoravides sur le bassin occidental de la Méditerranée, dans un contexte méditerranéen marqué par les croisades.
Les conquérants historiques musulmans du Moyen Âge
24Le détroit de Gibraltar fut conquis au cours du Moyen Âge par plusieurs conquérants musulmans, arabes et berbères, au nom du califat omeyyade de Damas, de l’émirat almoravide, du califat almohade et du sultanat des Mérinides. À ce titre, plusieurs généraux et souverains effectuèrent la traversée militaire du détroit. Nombre d’entre eux l’effectuèrent même plusieurs fois, en particulier les souverains du Maroc. Cependant, bien que souvent victorieux sur le champ de bataille, ils ne firent pas tous l’objet d’un processus d’héroïsation, ni placés sur le même rang dans le discours mythique.
Mūsā b. Nuṣayr, l’astrologue conquérant du détroit, des déserts, d’al-Andalus et de la ville de cuivre
25La conquête d’al-Andalus en 711, si impressionnante par son ampleur et sa rapidité, et si décisive par ses conséquences politiques, laissa une profonde empreinte dans la mémoire et la tradition historiographique arabe. Attribuée au génie militaire de Mūsā b. Nuṣayr et de Ṭāriq b. Ziyād, l’écho de leurs exploits retentit même en Égypte, où on garda la trace du mythe associé à cette conquête :
Ibn Wahb nous raconta ce récit et dit [que] Mūsā b. Nuṣayr envoya son client Ṭāriq à Tlemcen et lui ordonna de prendre le contrôle des côtes et des ports, et d’y établir des guetteurs, dans l’espoir de vaincre quelques-uns des bateaux des « Romains » (Rūm) [byzantins ou autres chrétiens] et d’y trouver un maître, détenteur de savoir. Alors, Ṭāriq accomplit l’ordre et réussit à le trouver. Il lui dit alors : « Sais-tu, d’après ton savoir, qui fera la conquête d’al-Andalus ? » Et l’autre lui répliqua : « Avec vous, elle sera conquise par un peuple nommé les Berbères, qui aura la même religion que vous. » Alors, Ṭāriq rédigea un rapport à Mūsā b. Nuṣayr. Celui-ci rassembla les Berbères, et lui envoya un contingent de mille hommes. Puis, Mūsā, qui était le plus versé en astrologie écrivit à Ṭāriq ce qui suit : « Tu arriveras à un rocher au bord de la mer. Là, charge tes navires et cherche parmi ceux qui sont en ta compagnie, un homme qui connait les noms des mois en langue syriaque. Alors, le 21 de Ayyar, qui correspond au mois de mai selon le calendrier non-arabe, ose le faire, avec la bénédiction d’Allāh et Son soutien, et marche avec Son appui et Sa victoire jusqu’à ce que tu te trouves devant une petite montagne rouge, au pied de laquelle il y a une source et, à côté d’elle, une statue ayant la forme d’un taureau. Alors, détruis cette statue, et cherche un homme très grand, blond, aux yeux obliques, et dont les mains sont paralysées, et nomme-le chef de ton avant-garde. » Lorsque Ṭāriq reçut la lettre de Mūsā b. Nuṣayr, il lui écrivit ce qui suit : « J’arriverai là où vous m’avez ordonné. Quant au signe de l’homme que vous m’avez ordonné de chercher, je ne l’ai point trouvé, sauf en moi-même16. »
26Le recours à l’astrologie était fréquent au Moyen Âge lorsque les souverains et les généraux entreprenaient des campagnes militaires. Cette discipline permettait de prévoir les victoires et les défaites et était considérée, sur un plan pratique, comme extrêmement utile. Quoique mal vue par la charia, voire même prohibée, la culture mythologique arabe ne manqua pas de lui octroyer droit de cité, sans même s’occuper de justifier sa présence sur un plan religieux ou de lui donner une interprétation islamique convenable. Les objectifs les plus ambitieux justifiaient donc l’usage de moyens parfois religieusement condamnés. Étant à l’origine même de l’œuvre de Ṭāriq, Mūsā b. Nuṣayr ne se contenta pas de la conquête de la péninsule Ibérique, dans sa dimension géographique concrète. Quiconque était capable de conquérir le détroit était forcément capable de conquérir des terres surnaturelles, situées en Ibérie, et même au-delà :
Par la suite [raconte Ibn Ḥabīb] Mūsā sortit lui-même conquérir Tanger, Algésiras et d’autres villes. Il poursuivit sa conquête jusqu’à ce qu’il fût arrivé à une terre qui faisait agiter ses gens. Et cela juste à côté de la Mer Sourde [l’Océan]. Il arriva alors à un pont sur lequel il y avait une statue en cuivre […] De là, il partit à la conquête de la fameuse ville de cuivre, où lui arrivèrent plusieurs évènements étranges, qui le convainquirent de se retirer, sauvant ainsi l’armée musulmane17.
27Chose curieuse, bien qu’il fût historiquement, et même mythiquement, le principal responsable de la conquête, la mythologie ne lui donna pas l’image d’un saint. L’usage de l’astrologie et l’accession à la sainteté étaient apparemment incompatibles. En revanche, son lieutenant Ṭāriq, qui n’était pas astrologue, eut le privilège d’obtenir ce rang. Il fut ainsi considéré comme le premier conquérant musulman effectif du détroit, au point même de lui donner son nom.
Ṭāriq b. Ziyād, le saint conquérant du détroit
28Dans la pensée mythique, une grande conquête se joue d’abord au niveau de la métaphysique, avant même de se dérouler sur les champs de bataille. Un tel évènement ne peut advenir dans le monde réel, sans qu’une intervention métaphysique ne se manifeste au préalable, son importance se mesurant au rang des personnages sacrés convoqués par le mythe :
On rapporte que Ṭāriq était endormi dans un bateau, lorsqu’il vit en rêve le Prophète — que la prière d’Allāh soit sur lui — et les quatre califes marcher sur l’eau, jusqu’à ce qu’ils fussent passés devant lui. Alors, le Prophète — que la prière d’Allāh soit sur lui — lui annonça la victoire, et lui ordonna d’être bienveillant avec les musulmans, et d’accomplir les promesses18.
29Mais le plus souvent, quand il s’agit de grands desseins, un seul signe annonciateur ne suffit pas. D’autres signes, ou au moins d’autres versions de la même prédiction, avec des détails plus étonnants, enveloppent d’une aura sacrée l’espace, l’histoire et les hommes :
Quand Ṭāriq embarqua, il tomba dans un profond sommeil et vit le Prophète — que la prière d’Allāh soit sur lui — entouré par les « Exilés » et les Auxilaires19; ils portaient tous l’épée à la ceinture et l’arc à l’épaule. Le Prophète lui dit : « Ô Ṭāriq, va accomplir ta mission. » Et Ṭāriq le vit pénétrer avec ses compagnons, devant lui, en al-Andalus. Ṭāriq se réveilla, satisfait de cette apparition ; il annonça la bonne nouvelle à ses compagnons, et ne douta plus de la victoire20.
30Dans cette autre version du même mythe de la grande conquête du détroit, le Prophète de l’islam aurait été lui-même le chef spirituel de la conquête, et aurait rassemblé et mobilisé son armée la plus sacrée, constituée notamment des compagnons, et serait entré lui-même avec cette armée en al-Andalus, avant même que Ṭāriq ait fait le premier pas. En conclusion, selon la « logique » de la mythologie, la conquête du détroit de Gibraltar aurait été l’œuvre « véritable » du Prophète en premier lieu, de ses compagnons en second lieu, et enfin de Ṭāriq et de son armée. Dans cette perspective, l’histoire de la conquête du détroit de Gibraltar s’inscrit dans la continuité de « l’histoire sacrée » de l’Islam.
Yūsuf b. Tāšfīn, le conquérant saint et bien intentionné
31L’« histoire sacrée » du détroit de Gibraltar s’arrêta brusquement avec les succès des grands conquérants musulmans. Durant des siècles, on observe un tarissement de la production de mythes concernant cette zone, probablement en raison de l’absence de grandes entreprises historiques qui l’auraient marqué. Il fallut attendre l’époque des grandes dynasties berbères et de leurs interventions militaires en al-Andalus, souvent couronnées de succès, pour voir renaître des mythes concernant le détroit de Gibraltar, mais, cette fois-ci, avec un imaginaire beaucoup moins fertile. Il n’est plus question de convoquer des personnages de haut niveau spirituel, ni même d’élaborer des récits saturés d’éléments surnaturels. Seuls deux grands souverains laissèrent leurs empreintes dans la mythologie : il s’agit de l’émir des musulmans almoravide, Yūsuf b. Tāšfīn, et du calife almohade, al-Manṣūr.
Au moment d’embarquer, Yūsuf b. Tāšfīn, raconte Ibn Abi Zarʿ, leva les mains et invoqua Allāh — Sublime soit-il — et dit : « Ô Allāh ! Si tu sais que ma traversée [du détroit] doit être un bienfait pour les musulmans, facilite-moi la traversée de cette mer, et dans le cas contraire, rend-la pour moi difficile, pour que je ne la franchisse pas. » Alors, Allāh lui facilita le passage le plus rapide21.
32La simple traversée du détroit, relativement rapide dans des conditions géostratégiques plutôt favorables, fut considérée comme un prodige. Cependant, les rêves annonciateurs de victoire laissent désormais la place à de simples prières de saint, avec des interprétations indirectes. La réponse métaphysique, favorable et rapide, à la prière de l’émir des musulmans, qui se tenait au bord de la côte sud du détroit, annonçait indirectement la victoire à la grande et décisive bataille de Zallāqa (1086).
Le calife almohade al-Manṣūr prévoyant la victoire d’Alarcos
33À l’instar de la grande bataille de Zallāqa, la bataille d’Alarcos (1195) ne fut pas passée sous silence, mais ne fit pas non plus l’objet d’une mythification particulière. Plus on avance dans le Moyen Âge, plus l’imaginaire concernant les conquérants du détroit de Gibraltar se raréfie et s’appauvrit, jusqu’à disparaître avec les Mérinides. Le mythe et l’« histoire sacrée » laissent alors la place à une légende de moindre importance :
Al-Manṣūr se déplaça [pour aller à la rencontre de ses ennemis ibériques]. Lorsqu’il fut arrivé près de Qaṣr Masmūda [al-Qaṣr al-Ṣaġīr], au bord de la mer, un commerçant de Séville le rencontra. Alors al-Manṣūr lui demanda son nom, et l’autre lui répliqua : « ʿAli b. ʿAskar [Sublime fils d’armée]. » Alors al-Manṣūr dit : « Par le Seigneur de la Kaʿba, notre armée s’était déjà faite sublime. » Et il eut un bon pressentiment22.
La conquête ibérique de l’Afrique du Nord et l’eschatologie musulmane
34Une des fonctions essentielles de la mythologie était de penser le présent d’une époque en tentant de l’expliquer par ce qui s’était passé à l’aube des temps. De même, ces récits montraient que tout ce qui était sacré en ce monde l’était par une intervention métaphysique qui lui donnait un sens, et sans laquelle il retomberait dans le chaos. Mais la mythologie ne se bornait pas à donner un sens au présent en le reliant à une « histoire sacrée ». Elle répondait également à l’angoisse du futur qui étreignait les peuples dans les périodes difficiles.
35Située à l’extrême ouest de l’Europe, dans une péninsule et sur un territoire toujours plus réduit par les avancées de la Reconquête, la communauté musulmane d’al-Andalus ressentait profondément la menace chrétienne. Elle vécut dans un pressentiment de sa fin, s’attendant à une grande défaite musulmane, qui serait suivie par un exode massif des Andalous en Afrique du Nord, de l’autre côté du détroit de Gibraltar. Ce grand exode fut relié, dans la pensée mythique, à l’Apocalypse. La perte d’al-Andalus signifiait pour les musulmans andalous l’anéantissement même de l’Univers et la fin du monde. Déjà au ive/xe siècle, ce sentiment commun se traduisait par un hadith, ou tradition attribuée à un compagnon du Prophète, pour lui accorder davantage de sacralité et de crédibilité. Cette tradition trouva même une place dans un des six livres de la sunna musulmane les plus courants et considéré comme un des plus fiables par les sunnites. Il s’agit d’al-Mustadrak, œuvre d’al-Ḥākim al-Nīšābūrī (m. 405/1014) :
Al-Ḥākim rapporta ce récit de ʿAbd Allāh b. Ṣāliḥ dans son livre al-Mustadrak — dit al-Suyūṭi — et le déclara comme tradition juste [authentique] : « […] Un homme parmi les ennemis des musulmans en al-Andalus, nommé Ḏū-l-ʿArf, rassemblera de grandes troupes parmi les tribus des polythéistes. Alors, ceux qui sont en al-Andalus se trouveront dans l’incapacité à lui résister. Ceux qui font partie de l’élite, parmi les musulmans, s’échapperont en bateaux et embarqueront pour Tanger. Les gens du commun se trouveront sans bateaux pour embarquer. Alors, Allāh, Le Sublime, enverra [Ses serviteurs] et leur ouvrira la mer. Le cerf traversera sans que l’eau ne recouvre ses sabots. Les gens le verront et ils crieront : “Le cerf, le cerf, le cerf. Suivez-le !”. Alors, tout le monde traversera [le détroit] immédiatement. Par la suite, la mer redeviendra ce qu’elle était. L’ennemi traversera [le détroit] en bateaux. »23.
36Contemporain de la chute de Grenade en 1492, et vivant en Égypte, assez loin d’al-Andalus, al-Suyūṭi, (m. 911/1505) incorpore cette tradition apocryphe dans son Histoire du Caire et établit un lien entre le grand exode musulman d’al-Andalus, à travers le détroit de Gibraltar, la fin de l’Égypte et la fin du monde. Il écrivit alors un « Chapitre concernant ce qui se passera en Égypte juste avant le Jour dernier24 », ce qui montre que cette imagination eschatologique concernant al-Andalus ne fut pas simplement le fait des musulmans vivant dans la péninsule Ibérique mais un sentiment largement partagé, qui acquit une dimension panislamique. La perte d’al-Andalus annonçait, pour les musulmans, celle de tout l’Univers.
37D’ailleurs, il n’est pas difficile de voir dans cette tradition apocryphe quelques détails empruntés à la tradition eschatologique islamique. La présence du cerf rappelle la Bête de la fin des temps, annoncée par le Coran. De même, Ḏū-l-ʿArf rappelle l’image de l’Antéchrist, également annoncée par la tradition islamique.
38En définitive, les hommes ont élaboré, tout au long de l’histoire de l’humanité, des mythes qui contribuèrent à sacraliser le détroit de Gibraltar dans toutes ses dimensions. Ce processus de sacralisation concerna d’abord les hommes dont l’action avait marqué la mémoire du détroit : les conquérants de l’Antiquité, arabes et gréco-romains, les conquérants musulmans, arabes et berbères, et quelques rares souverains almoravides et almohades, les philosophes grecs, les magiciens, les marabouts et les mystiques. Ce processus touche également l’espace des deux rives du détroit : les villes, en premier lieu, mais aussi les lieux naturels, les montagnes, les cavernes, les sources d’eau et toute manifestation de fertilité, en second lieu. Des lieux tels que Cadix, Tanger, Ceuta, Algésiras, Gibraltar, Málaga, al-Qaṣr al-Ṣaġīr, Tétouan et Badis sont emblématiques de cette sacralité de l’espace, si fertile en imagination et si chargée en symboles. Cette sacralisation s’étendit enfin à la mer qui borde le détroit de Gibraltar. Bien que présentant une image foncièrement ambivalente, maudite d’un côté, sacrée de l’autre, pour des raisons d’ordre culturel et historique, les hommes n’ont jamais cessé de créer un imaginaire collectif où la Méditerranée finit par devenir une mer des merveilles, ce qui invite à poser le problème des rapports des hommes méditerranéens à leur environnement.
39Par ailleurs, le détroit de Gibraltar constitue une construction imaginaire qui reflète la complexité des interférences culturelles dont il fut le témoin au cours des siècles et qui y laissèrent leur empreinte. À ce titre, il confirme la règle proposée par la physique : rien ne se perd, tout se transforme. En effet, les mythes concernant le détroit de Gibraltar sont à la fois un amalgame de mythes grecs, ibères, berbères, arabes et islamiques, et une réélaboration incessante de tous ces mythes.
40Enfin, si nous sommes parvenus à faire apparaître les mythes concernant les grands conquérants fictifs ou historiques, de l’Antiquité et du Moyen Âge, et si nous avons tenté de les expliquer, plusieurs dimensions restent à développer. Il faudrait approfondir l’étude de la perception de l’extrême occident de la Méditerranée comme « mer merveilleuse », où la magie régit même le mouvement saisonnier du thon et établir de manière plus détaillée la carte des villes marquées par le sacré dans la zone du détroit de Gibraltar, auxquelles nous venons de faire allusion.
Notes de bas de page
1 Eliade, 1963, p. 16.
2 Al-Muqaddasī, Aḥsan al-taqāsīm, éd. de Goeje, pp. 15-16 ; trad. de Miquel, pp. 43-44.
3 Coran, XVIII, 60-65, trad. de Masson, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1995, t. II, pp. 364-365.
4 Ibid., XVIII, 66, t. II, p. 365.
5 Ibid., XVIII, 60-65, trad. de Masson, t. II, pp. 365-367.
6 Al‑Ġarnāṭī, al-Muʿrib ʿan baʿḍ ʿaǧāʾib al-Maġrib, éd. de Bejarano, p. 71.
7 Al-Ḥimyarī, Kitāb al-rawḍ al-miʿṭār fī ẖabar al-aqṭār, éd. de ʿAbbās, 1984, p. 223.
8 Al-Ṭabarī, Tārīẖ al-rusul wa l-mulūk, t. I, p. 366.
9 Ibid.
10 Ibid., p. 373.
11 Ibid.
12 Ibn al Haj al-Soulami, 2003, pp. 42-50.
13 Coran, XVIII, 83-98, trad. de Masson, t. II, pp. 367-369.
14 Al-Ḥimyarī, Kitāb al-rawḍ al-miʿṭār fī ẖabar al-aqṭār, éd. de ʿAbbās, 1984, p. 449.
15 Ibn H̱allikān, Wafayāt al-aʿyān, éd. de ʿAbbās, t. V, p. 326.
16 Ibn Ḥabīb, Kitāb al-tārīẖ, pp. 136-137.
17 Ibid., pp. 143-144.
18 Ibid., p. 137.
19 Les « Exilés » (Muhāǧirūn) désignent les musulmans mecquois qui émigrèrent avec le Prophète de La Mecque à Médine en 622. Les « Auxilaires » (Anṣār) sont les gens de Yaṭrib (Médine), qui l’accueillirent et le soutinrent contre ses ennemis mecquois.
20 Al-Ḥimyarī, Kitāb al-rawḍ al-miʿṭār fī ẖabar al-aqṭār, éd. de ʿAbbās, 1984, p. 35.
21 Ibn Abi Zarʿ, Rawḍ al-qirṭās, trad. de Beaumier, p. 145.
22 Al-Šarīf al-Ġarnāṭī, Rafʿal-ḥujub al-mastūra, Le Caire, 1925, t. II, p. 154.
23 Al-Suyūṭi, Ḥusn al-muḥāḍara, t. I, p. 165.
24 Ibid.
Auteur
Université Abdelmalek Essaâdi – Tétouan
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
La gobernanza de los puertos atlánticos, siglos xiv-xx
Políticas y estructuras portuarias
Amélia Polónia et Ana María Rivera Medina (dir.)
2016
Orígenes y desarrollo de la guerra santa en la Península Ibérica
Palabras e imágenes para una legitimación (siglos x-xiv)
Carlos de Ayala Martínez, Patrick Henriet et J. Santiago Palacios Ontalva (dir.)
2016
Violencia y transiciones políticas a finales del siglo XX
Europa del Sur - América Latina
Sophie Baby, Olivier Compagnon et Eduardo González Calleja (dir.)
2009
Las monarquías española y francesa (siglos xvi-xviii)
¿Dos modelos políticos?
Anne Dubet et José Javier Ruiz Ibáñez (dir.)
2010
Les sociétés de frontière
De la Méditerranée à l'Atlantique (xvie-xviiie siècle)
Michel Bertrand et Natividad Planas (dir.)
2011
Guerras civiles
Una clave para entender la Europa de los siglos xix y xx
Jordi Canal et Eduardo González Calleja (dir.)
2012
Les esclavages en Méditerranée
Espaces et dynamiques économiques
Fabienne P. Guillén et Salah Trabelsi (dir.)
2012
Imaginarios y representaciones de España durante el franquismo
Stéphane Michonneau et Xosé M. Núñez-Seixas (dir.)
2014
L'État dans ses colonies
Les administrateurs de l'Empire espagnol au xixe siècle
Jean-Philippe Luis (dir.)
2015
À la place du roi
Vice-rois, gouverneurs et ambassadeurs dans les monarchies française et espagnole (xvie-xviiie siècles)
Daniel Aznar, Guillaume Hanotin et Niels F. May (dir.)
2015
Élites et ordres militaires au Moyen Âge
Rencontre autour d'Alain Demurger
Philippe Josserand, Luís Filipe Oliveira et Damien Carraz (dir.)
2015