Les sciences sociales espagnoles et la ville contemporaine
p. 455-475
Texte intégral
1Depuis le milieu des années 1990, la ville et les sociétés urbaines contemporaines1 sont devenues des objets de recherche habituels dans les facultés d’histoire espagnoles2. Depuis les années 1970, toutefois, d’autres disciplines portaient déjà sur la ville espagnole un regard historique et analysaient sa genèse dans la durée. Aujourd’hui, toutes les disciplines des sciences sociales participent de ce mouvement, dans la plupart des grandes villes espagnoles. Certes ce développement d’une « histoire urbaine » s’inscrit dans un contexte international : les États-Unis et l’Europe ont chacun leur société d’histoire urbaine (la Urban History Association et la European Association for Urban History, créées respectivement en 1988 et 1989) qui organisent de grands colloques à échéance régulière. Plusieurs pays ont une société et/ou une revue spécialisée3. Notons également l’International Planning History Society, qui organise de vastes rencontres internationales et participe à la publication de la revue Planning Perspectives. Toutefois, dans chaque pays, l’intérêt des sciences sociales pour les processus de formation des villes, observés dans la durée, a sa chronologie et son histoire propres. Les questions qui animent les chercheurs, les thématiques qui retiennent leur attention et les manières de les aborder s’inscrivent dans une histoire et une historiographie le plus souvent nationales.
2L’histoire urbaine espagnole et plus généralement la manière dont les différentes sciences sociales ont abordé le fait urbain dans la durée depuis la dernière décennie du franquisme doivent ainsi être relues dans ce contexte national. Cet article propose quelques pistes de réflexion dans ce sens4.
I. — Crises urbaines et renouvellement de l’histoire des villes
3S’il faut trouver des dénominateurs communs aux histoires urbaines nationales, on peut dire que c’est souvent dans le contexte du constat d’une « crise urbaine » que se sont renouvelées les approches scientifiques des villes.
4Ainsi, aux États-Unis, les émeutes raciales et la paupérisation des inner cities dans les années 1960 sont à l’origine d’un nouvel essor des études urbaines et de l’histoire des villes. Ces phénomènes conduisent les Américains à s’interroger sur le fait que la grande mobilité sociale, au cœur du « rêve américain », puisse être en panne. C’est cette réflexion qui entraîne le grand renouvellement de l’histoire urbaine et l’émergence de ce qu’on a appelé la « new urban history ». Stephan Thernstrom et son équipe se lancent en effet dans une recherche qui vise à vérifier l’existence de cette mobilité sociale à l’époque de son apogée supposée : le tournant du xxe siècle5. C’est ainsi qu’ils mènent la première grande enquête historique sur cet objet, fondée sur l’exploitation statistique de données longitudinales, pour conclure du reste à la faible mobilité de la population étudiée (les ouvriers de Newburyport).
5À la même époque, en France, c’est d’une toute autre manière que s’exprime la crise urbaine. L’urbanisme des grands ensembles est remis en cause. On découvre le spleen des ménagères, enfermées dans des logements présentant certes les avantages du confort moderne, mais situés dans des quartiers mal équipés et terriblement isolés. Les opérations de rénovation des îlots insalubres et les relogements qu’elles entraînent suscitent le mécontentement de certains habitants. Plus généralement, on découvre une inadéquation relative entre les politiques publiques de logement volontaristes mises en œuvre depuis les années 1950 et les aspirations des populations qu’elles visent. C’est donc tout naturellement ces « aspirations » des habitants qui vont retenir l’attention les sociologues6. Pourquoi les Français préfèrent-ils le pavillon7, pourtant méprisé par les experts de tous bords8 ? Qui sont les habitants des grands ensembles et sont-ils vraiment mécontents de leur sort9 ? Le logement en grand ensemble ne constitue-t-il pas malgré tout une amélioration de leurs conditions d’habitat ?
6Plus tard, dans les années 1980, c’est dans le contexte d’une nouvelle forme de crise urbaine que les historiens français investissent finalement le thème de la ville. Alors que les médias relatent ce qu’ils décrivent comme des « émeutes », qui bouleversent les banlieues des grandes villes françaises, journalistes, experts et politiques érigent la question des quartiers pauvres en un problème politique de premier plan, qu’il sera désormais convenu d’appeler la « crise des banlieues »10. Celle-ci justifie un nouveau type de politique sociale, qui ne vise plus des populations, mais des territoires : la politique de la ville. La question sociale devient la question urbaine. C’est ainsi qu’une partie de l’histoire sociale devient histoire urbaine11. Des historiens, venus de l’histoire politique et sociale du monde ouvrier, laissent de côté l’usine pour chercher dans le quartier cette société et cette culture ouvrières en mutation. Fleurissent ainsi, dans les années 1980, les monographies de quartiers, toutes monographies de quartiers ouvriers12.
II. — Crise urbaine, crise du franquisme et émergence des études urbaines espagnoles
7En Espagne, c’est aussi dans le contexte d’une crise urbaine — elle-même une des facettes d’une certaine crise du franquisme, marquée par l’apparition de mouvements de contestation — que les sciences sociales renouvellent leur regard sur la ville. L’idéologie ruraliste du régime avait conduit l’État à se désintéresser des villes, excepté celles qui pour des raisons politiques bénéficiaient des faveurs du régime, Madrid en premier lieu. Même dans celles-ci cependant, l’urbanisme monumental l’emporta sur la modernisation des équipements et services, vétustes et insuffisants. Par ailleurs, la politique immobilière et de logement favorisait le développement d’immenses quartiers de plusieurs milliers de logements en périphérie. Les objectifs affichés étaient définis en termes quantitatifs plus que qualitatifs et ils concernaient essentiellement l’habitat. Des milliers d’habitants furent ainsi amenés à résider dans des quartiers sans équipements, sans écoles, et non reliés par les transports publics. Très vite et dans de nombreux quartiers apparurent en outre des malfaçons dans la construction. Ces nouveaux quartiers furent ainsi, dès les années 1960, l’objet à la fois d’études critiques des architectes et des premières enquêtes empiriques de sociologie urbaine.
De la critique de l’« urbanisme de polygones » au « modèle Barcelone » : la genèse des formes de la ville
8À Barcelone, c’est à l’École d’architecture qu’un premier mouvement s’amorce. En 1968, un petit groupe d’architectes, marqués par la lecture des architectes italiens théoriciens de la typo-morphologie, forment autour de Manuel de Solà-Morales le Laboratoire d’urbanisme de Barcelone. Cette école d’urbanisme se construit en réaction à l’urbanisme franquiste, qu’elle stigmatise comme un urbanisme de « polygones », reprenant le terme technique qui désigne les vastes unités d’aménagement — proches des ZUP françaises — qui sont les cellules de base de l’extension urbaine dans les années 1960. À cet urbanisme de la table rase, héritier de la théorie des CIAM d’avant-guerre, ils opposent un urbanisme capable de travailler à toutes les échelles, attentif aux habitants et à la réalité urbaine existante, dont il faut donc étudier la genèse pour comprendre les logiques. Comme les Italiens ou les Français de l’École d’architecture de Versailles (autour de Castex et de Panerai), les architectes barcelonais enquêtent sur l’histoire de la morphologie des villes pour concevoir le projet urbain13. Ces architectes produisent ainsi une typologie des formes urbaines, dont ils modélisent les conditions de production14. Le laboratoire est à la fois un lieu de recherche, de formation et de projet.
9Très féconde, cette école a une longue postérité : elle forme toute la génération d’architectes et d’urbanistes barcelonais dont on vante encore aujourd’hui les réalisations. Si le succès des projets urbains mis en œuvre par la municipalité barcelonaise depuis les années 1980 a récemment donné lieu à des bilans plus nuancés15, il reste que le « modèle Barcelone »16 continue d’en être un pour de nombreuses villes européennes et américaines.
Les premières enquêtes empiriques
10Ce sont ces mêmes nouveaux quartiers qui donnent lieu aux premières enquêtes empiriques de sociologie urbaine. À notre connaissance, les deux études coordonnées par le sociologue Mario Gaviria sur des quartiers madrilènes, respectivement l’Ampliación de la Concepción et le Gran San Blas, publiées par la revue Arquitectura en 1966 et 1968, sont les premières du genre17. C’est avec un tout petit budget et en immersion sur le terrain à la manière des premiers sociologues de l’École de Chicago et des anthropologues — il logeait chez un ami dans le quartier de la Concepción — que Mario Gaviria commença sa première enquête18. Première scientifique, c’est aussi une expérimentation pédagogique, explique Gaviria en introduction de l’étude sur le Gran San Blas. Elle commence en effet comme un exercice de terrain, un atelier de sociologie urbaine, proposé aux étudiants au second semestre de l’année 1966-1967 du CEISA. Il s’agissait de mettre en application les connaissances transmises par le cours théorique du premier semestre, consacré à la lecture d’ouvrages étrangers de sociologie urbaine et d’urbanisme, de Max Weber à la Charte d’Athènes, en passant par les Haumont et Chombart de Lauwe. Mario Gaviria s’était en effet notamment formé en France, où il avait été marqué par les écrits d’Henri Lefebvre, qu’il édite en espagnol et fait ainsi connaître dans ce pays dès la fin des années 196019. Gaviria fait donc lire à son équipe les sociologues et démographes urbains français contemporains (outre ceux déjà cités, notons l’enquête coordonnée par Paul Clerc sur les grands ensembles20). Dans un chapitre introductif à l’étude sur le Gran San Blas, les auteurs passent rapidement en revue ces enquêtes françaises pour dire ce qu’ils en ont retenu, mais aussi les insuffisances qu’ils leur trouvent. Des Pavillonnaires, ils aiment l’enquête par entretiens et l’« analyse sémiologique » qui en est faite, théorisée par Henri Lefebvre dans sa longue préface. Comme les sociologues français, ils procèdent à la fois par questionnaire et par entretiens approfondis. Ils prennent même le parti de publier in extenso les entretiens en annexe de leur étude. Des tâches plus urgentes les ont empêchés d’en faire l’analyse, expliquent-ils, mais ils espèrent que d’autres chercheurs s’en saisiront. À tout moment, ces deux enquêtes pionnières sont marquées du sceau de l’expérimentation et de l’enthousiasme qui l’accompagne.
11D’emblée cette sociologie urbaine espagnole naissante se distingue toutefois de la sociologie française à la fois par ses questions et ses méthodes ; c’est le contexte national qui l’explique. La jeune génération d’Espagnols grandis sous le franquisme, avec lequel ils sont en opposition, travaille avec la passion qui accompagne le sentiment d’ouvrir un chantier nouveau, utile, urgent, et politique. Ce qui les anime, plus encore que les sociologues français qu’ils lisent, pourtant eux aussi engagés dans une recherche experte, c’est la volonté d’inventer de nouveaux modèles d’urbanisme, la conviction qu’une autre — meilleure — manière de faire la ville est possible, et qu’on ne pourra l’élaborer qu’en analysant le résultat des politiques urbaines passées et en cours. L’équipe de Gaviria ne cherche donc pas tant à enquêter sur les aspirations des habitants, qu’elle ne s’efforce d’analyser — d’évaluer même — les grandes opérations d’urbanisme qui sont alors menées. Ce qui les intéresse fondamentalement, c’est de comprendre comment telles caractéristiques urbanistiques d’un projet vont favoriser ou non le développement de la « vie urbaine »21, l’existence d’un « quartier »22. Cette démarche explique autant qu’elle résulte du fait que sociologues et architectes collaborent étroitement dans ces études. L’engagement des architectes dans une réflexion sur les usages de la ville par ses habitants, fondée sur des enquêtes empiriques, qui passe par la collecte de données urbanistiques, morphologiques, mais aussi sociales, est sans conteste une spécificité espagnole durable. Celle-ci a pour autre conséquence le lien jamais mis en cause en Espagne entre études urbaines, expertise et projet. Les deux recherches coordonnées par Mario Gaviria comptent donc avec la collaboration de nombreux architectes, mais aussi d’économistes, de juristes et de politistes. La jeune génération d’universitaires et d’étudiants espagnols participe, toutes disciplines confondues, à cette entreprise d’une certaine manière révolutionnaire. Ils font feu de tout bois et combinent diverses méthodes. Les enquêtés, en premier lieu, sont divers : l’équipe s’intéresse à la fois aux usagers du quartier (habitants, responsables associatifs, etc.), à ses concepteurs (les architectes), et à ses gestionnaires (les employés de l’administration publique)… Ils emploient la méthode de l’entretien de manière indiscriminée pour ces diverses populations, ce qui est déjà en soi novateur.
12Outre les données sur les logements et les problèmes qu’ils présentent d’après leurs habitants, les équipements collectifs, la consommation des ménages, les relations quartier-ville, et l’image du quartier, les enquêteurs collectent aussi des données sur la morphologie du quartier et sur ce qu’ils appellent la « structure urbaine ». Pour cela, ils mènent une étude fine des équipements et des commerces et de leur aire de chalandise ; ils cartographient les itinéraires des piétons, inventant ainsi une voie originale pour appréhender les usages sociaux de la ville. Ce sont en effet les usages de cette ville nouvelle, créée de toutes pièces par l’urbanisme de polygones, et la vie sociale qu’elle produit, qui sont les véritables objets de l’enquête. Cela explique que, très tôt, les chercheurs espagnols s’intéressent au rôle des commerces dans la production de la « vie urbaine » et la socialisation de voisinage.
III. — Les enjeux urbains au cœur de la transition démocratique : l’histoire de la ville au service du projet urbain
13Ces caractéristiques précoces des études urbaines espagnoles : liens très forts entre recherche et projet, engagement dans une démarche empirique, proche des habitants, associant étroitement chercheurs et praticiens (qui sont souvent les mêmes personnes) s’expliquent par le contexte historique, d’abord la crise du franquisme, puis la Transition démocratique. En effet, les associations de quartier jouent un rôle moteur pendant la Transition. Elles fournissent du reste une partie des cadres politiques de la Démocratie. Les grandes municipalités sont conquises par la gauche dès les premières élections démocratiques en 1979. L’équipement des quartiers et la résorption de l’habitat indigne (taudis et baraques) sont au cœur de leurs programmes. L’indéniable succès d’une partie de ces opérations, menées dans les années 1980, reste parmi les titres de gloire des partis de gauche et de la Transition. La modernisation des villes sous tous ses aspects est alors le laboratoire de la démocratie : experts, élus et habitants y travaillent ensemble. Architectes, géographes, sociologues et élus, engagés auprès des associations d’habitants, travaillent avec les usagers à la conception des projets de rénovation (remodelación) de leur quartier. Tour à tour, ils enquêtent aux archives et sur le terrain, s’entretiennent avec les habitants, participent aux réunions des associations de quartier, et présentent leur projet à la mairie. Dans le contexte français actuel d’injonction à une démocratie participative et à un urbanisme concerté, les politiques urbaines espagnoles des années 1980 pourraient faire figure de lointain idéal.
Les architectes madrilènes, entre enquête empirique et projet
14La sociologie urbaine naissante n’a toutefois pas la postérité que laissait supposer son caractère pionnier dans les années 1960. Ce sont plutôt les architectes qui prennent le relais de cette science urbaine en gestation, dans une démarche qui continue d’associer enquête et projet. Pendant la Transition démocratique, à Madrid, c’est ainsi surtout à l’École d’architecture que se retrouvent les héritiers des enquêtes coordonnées par Gaviria. Ils y forment en 1977, autour de Ramón López Lucio, un Séminaire de Planification et d’aménagement urbain (SPyOT), plus tard renommé Section d’urbanisme de l’institut Juan de Herrera23.
15Comme les Barcelonais du Laboratoire d’Urbanisme, ce groupe associe étroitement recherche et projet, mais plus que ces derniers, ils adoptent une véritable démarche empirique, étonnement peu formaliste. De nombreux étudiants, boursiers et vacataires, encadrés par des enseignants-chercheurs et des professionnels produisirent, dans ce cadre, une vaste somme d’études sur Madrid, pour la plupart inédites, ainsi que sur d’autres villes espagnoles. Ils enquêtent sur la genèse des formes urbaines à partir de relevés de terrain, des parcellaires anciens, et des archives (actes de vente et permis de construire notamment), suivant en cela une méthode assez proche de celle que mettent alors en place les géographes (sur laquelle nous reviendrons plus loin). Ils mènent ainsi une véritable enquête historique pour comprendre la production des espaces qu’ils étudient et pour lesquels ils conçoivent des projets. Depuis 1997, l’activité de ce groupe est reflétée dans la revue Urban, publiée par l’École d’architecture de Madrid. Celle-ci a toutefois entièrement renouvelé son équipe en 2010 ; on s’attend donc à une réorientation de sa ligne éditoriale.
La réactivation du mythe du « fracaso »
16C’est marqué par d’autres lectures, faites dans le contexte d’une historiographie proprement espagnole, que va se développer dans les années 1970 un nouveau courant d’études urbaines, à fort contenu théorique. Il donne lieu à la première histoire urbaine contemporaine espagnole, en fait principalement entreprise par des géographes.
17Pour comprendre la lecture de la sociologie urbaine marxiste, et notamment d’une de ses figures les plus marquantes, Manuel Castells, espagnol travaillant alors en France, par la jeune génération d’universitaires espagnols, opposants au régime, il faut revenir sur la longue tradition historiographique du « retard espagnol ». Depuis la génération de 1898, puis de 1927, l’histoire de l’Espagne est analysée en termes d’« échec », en comparaison à une Europe, qui se résume principalement au Royaume-Uni quand il s’agit d’histoire économique et à la France pour l’histoire politique. Nous ne reviendrons pas ici sur les écrits de Joaquín Costa ni d’Ortega y Gasset24 qui dénoncent un déclin de l’Espagne, provoqué par la corruption et le caciquisme, par la faute desquels le pays aurait raté le train de la modernisation économique, sociale et politique et serait ainsi resté en marge de l’Europe. Dans le triple contexte, historique de la crise du franquisme, idéologique du développement du tiers-mondisme et scientifique marqué par l’école des Annales et par le paradigme marxiste, la thèse du « fracaso » (littéralement l’échec) espagnol va être réactivée. L’Espagne est analysée comme un « sud » en Europe, une périphérie.
18Les historiens de l’économie analysent ainsi les causes de l’« échec » de la révolution industrielle25. Ils les cherchent principalement dans le décalage avec l’histoire anglaise. Les historiens du politique s’interrogent sur l’échec de la révolution bourgeoise26. Est-il dû à l’inexistence d’une bourgeoisie révolutionnaire ou au fait que celle-ci aurait raté son destin historique ? C’est ce débat historiographique sur la formation ou non d’une « bourgeoisie révolutionnaire » en Espagne au xixe siècle qui conduisit certains historiens à étudier la ville et plus particulièrement le marché du sol urbain. L’essentiel de la fortune de la bourgeoisie de nombreuses villes, Madrid notamment, dans la deuxième moitié du xixe siècle, se compose en effet de biens fonciers urbains ou en cours d’urbanisation et c’est surtout dans ce secteur que ses membres investissent27. Les travaux d’Ángel Bahamonde Magro sur la bourgeoisie madrilène sont à ce titre exemplaires28. Il étudie les transactions immobilières, notamment celles qui suivent l’adoption de la loi d’ensanche de Madrid. La démarche de ces historiens est clairement critique : il s’agit de montrer comment les bourgeoisies urbaines ont fui les investissements productifs, susceptibles de moderniser l’économie nationale, pour se consacrer à une spéculation lucrative mais stérile sur les biens fonciers. Plus généralement, pour toute l’Espagne, rurale et urbaine, la desamortización (libération des biens de mainmorte) apparaissait comme un épisode fondamental de la révolution bourgeoise ; cette grande mutation juridique, économique et sociale qui affecta le sol rural et urbain a donc été bien étudiée29.
19Si les historiens ne s’intéressent ainsi qu’indirectement à la ville, ce sont les géographes qui vont véritablement fonder la première histoire urbaine espagnole. Ils sont mus par la même volonté critique d’expliquer l’exception espagnole en matière de développement économique, dont serait responsable une bourgeoisie capitaliste aux stratégies d’investissement contraires à l’intérêt général. Ils cherchent donc dans l’histoire de la propriété et de la promotion immobilières la genèse de la société urbaine inégalitaire et injuste qu’ils connaissent. Un article de Manuel de Terán, paru en 1961, mettant en relation les formes de la ville et les conditions de leur production30, ouvrit la voie à cette nouvelle école de géographie urbaine. Capitalismo y morfología urbana, publié par Horacio Capel à Barcelone l’année même de la mort du dictateur, donnait un cadre théorique à cette approche31. Les élèves de Terán, puis de Capel, appartenant à la génération formée dans les dernières années du franquisme, adoptèrent une démarche d’histoire régressive. Ils analysèrent les données du Registro de la Propiedad (Conservatoire des hypothèques), reconstituant l’histoire des propriétés foncières, puis immobilières des grandes villes, Madrid et Barcelone en premier lieu32. Il s’agissait à la fois de mettre au jour la constitution des fortunes foncières au cours du xixe siècle, la forte concentration des patrimoines fonciers et immobiliers, le rôle des grands propriétaires fonciers, puis celui des promoteurs — groupe professionnel qui prospère sous le régime franquiste — dans l’organisation de l’espace urbain, sa morphologie, les caractéristiques du parc de logements et son peuplement. Cette démarche scientifique révélait comment l’urbanisation s’était faite au profit de quelques-uns contre l’intérêt général. Ces recherches montraient notamment comment les plus-values foncières avaient toujours échappé à la collectivité et plus généralement comment les anticipations des propriétaires sur ces plus-values avaient déterminé les formes de l’urbanisation. Les questions qui animaient ces géographes les conduisirent ainsi à favoriser l’étude des grosses opérations, lieux supposés de la structuration d’un capitalisme immobilier moderne.
20Alors que la majorité des historiens donnait la part belle aux politiques économiques, et aux institutions et procédait le plus souvent à l’échelle nationale dans la tradition de l’histoire économique de l’époque — les travaux cités sur le marché foncier mis à part —, les géographes inventaient ainsi une approche historique à l’échelle micro, très proche des réalités locales.
IV. — Du fracaso au milagro : l’histoire urbaine au cœur du modèle Espagnol de développement ?
21C’est la fin de la théorie du fracaso, son retournement en théorie du modèle espagnol de développement à la fin des années 1980 et dans les années 1990, qui va finalement conduire les historiens à s’intéresser plus directement à la ville. C’est à ce moment que sont jetées les bases d’une institutionnalisation de l’histoire urbaine en Espagne.
22Les taux de croissance remarquables de l’Espagne dans les années 1990, la mise à niveau des infrastructures économiques du pays et des divers équipements publics (urbains notamment), la très rapide transformation des mœurs dans les années 1980, tous ces éléments, qui apparurent comme un rattrapage accéléré du « retard espagnol » et qui participent de ce qu’il est convenu d’appeler le « miracle espagnol », conduisirent les historiens à relire l’histoire contemporaine de l’Espagne. Le « miracle » ne se fondait-il sur aucune base antérieure à la deuxième moitié du xxe siècle ? Si c’était le cas, le succès espagnol représentait alors un espoir pour les pays en voie de développement. Ou bien s’appuyait-il sur des bases anciennes, résultait-il de transformations économiques et sociales remontant au xixe, voire au xviiie siècles, dont les historiens du fracaso n’auraient pas saisi l’importance33 ? C’est ainsi qu’une nouvelle génération d’historiens entreprit des monographies régionales à la recherche d’éléments locaux ou sectoriels de modernisation, que les grands indicateurs nationaux ne permettaient pas d’appréhender.
23Cette petite révolution historiographique espagnole doit naturellement être lue à la lumière de l’histoire mondiale des sciences sociales. Elle a en effet lieu dans le contexte de la crise des grands paradigmes historiques construits depuis les années 1930. L’histoire économique et sociale, procédant par macro-analyses quantitatives à l’échelle nationale, avec des catégories dont la pertinence n’était pas toujours questionnée, se trouvait mise en cause. Elle était alors relayée par de nouvelles démarches historiques, marquées à la fois par les apports de la sociologie et ceux d’une économie en plein renouvellement. Ainsi les historiens, dans le sillage pionnier d’E. P. Thompson, se lançaient-ils dans une « déconstruction » de leurs catégories d’analyse, qu’ils s’efforçaient de reconstruire en restant au plus près du réel, donc de l’individu et du local. Ce mouvement donna lieu à la multiplication d’enquêtes à petite échelle, qui bénéficiaient aussi de l’apport théorique de la micro-histoire italienne. Parallèlement, la mathématisation de l’économie — l’arrivée des économistes économètres — ouvrait aux historiens d’autres voies pour mesurer le développement. À l’histoire des politiques économiques pouvait ainsi succéder celle de l’économie.
La ville : manifestation et moteur d’une « modernisation » à l’espagnole ?
24Dans ce contexte, les historiens espagnols entreprirent des monographies locales et sectorielles et s’affranchirent à la fois d’une histoire institutionnelle des politiques économiques et du cadre national. Pour comprendre ce dernier point, il faut bien sûr aussi prendre en compte la décentralisation opérée par la Démocratie en Espagne, qui favorisa à la fois intellectuellement et matériellement (régionalisation des politiques et des financements de la recherche et des maisons d’éditions) les études locales. À la thèse du fracaso, succédait ainsi progressivement celle d’une voie originale — espagnole — de développement dont les caractéristiques restaient à définir. Les éléments de la faillite supposée de l’Espagne sur un chemin de la modernité conçu sur un modèle unique purent être réinterprétés. En déplaçant le regard et en ouvrant la focale, ils devinrent les étapes d’un autre modèle de développement, spécifiquement espagnol.
25C’est dans le cadre de cette démarche que les historiens s’intéressèrent à la ville34. Ils étudiaient alors plus volontiers la deuxième moitié du xixe siècle et le début du xxe, moment où les villes, en Espagne comme dans le reste de l’Europe, sont le lieu d’indéniables mutations. Elles apparaissent tout à la fois comme le moteur de la modernisation du pays et comme exemplaires de celle-ci. Certaines villes — Madrid ou Valence par exemple — croissent, prospèrent et se modernisent sans que cette transformation ne résulte de leur industrialisation. Elles semblent donc présenter des éléments intéressants pour définir un modèle espagnol de développement. Ainsi Anaclet Pons et Justo Serna35 ont-ils cherché dans la croissance sans industrialisation de Valence au tournant du siècle un modèle proprement méditerranéen et méridional de modernisation urbaine qui passe par une intégration régionale liant la capitale à son arrière-pays et qui se caractérise par le développement du commerce en lien avec l’agriculture régionale. Quant au cas madrilène, il s’agit selon José Carlos Rueda Lafond d’« un modèle cohérent, également observé dans d’autres capitales européennes, quoique beaucoup plus tardivement et beaucoup moins clairement »36, qui associe « une modernisation objective de la ville selon certains indicateurs économiques et sociaux » et une forme de modernisation politique. Les mutations de Madrid dans le dernier tiers du xixe siècle sont au fondement même de l’enrichissement de la ville : la croissance s’autoalimente. Le bâtiment est le secteur dominant de l’industrie de la ville. La grande affaire de Madrid dans le dernier tiers du xixe siècle, c’est bien la ville elle-même. Dès lors, celle-ci, sa transformation morphologique, son extension spatiale, son équipement, la constitution des grands réseaux (transports, eau, électricité, égouts), les projets d’urbanisme dont elle est l’objet, l’évolution de sa société, de ses modes de vie et de sa culture urbaine attirent l’attention des historiens. Deux colloques, consacrés à l’histoire de Madrid, et les livres qui en résultèrent37, rendent bien compte de cette première étape dans l’émergence d’une histoire urbaine madrilène.
26C’est donc naturellement ce thème de la « modernisation » qui rassembla de nombreux historiens lors du premier colloque national d’histoire urbaine tenu en 199138. Au début des années 1990, la publication d’ouvrages de synthèse d’histoire urbaine39, l’essor des monographies de villes centrées sur le tournant du xxe siècle40, la création en 1992 à Valence d’une revue spécialisée, Historia Urbana (à l’existence toutefois très éphémère) et le choix de la revue d’histoire Ayer d’y consacrer un numéro spécial en 1993 semblaient annoncer le développement de ce champ de l’histoire.
Aujourd’hui : pôles régionaux, diversification et rencontres ?
27Où en est-on aujourd’hui de ce développement d’une histoire urbaine espagnole ? Il semble que la ville soit devenue un objet d’histoire légitime qui trouve sa place dans les facultés, mais aussi que les séparations disciplinaires tendent doucement à s’atténuer. De plus en plus, géographes, historiens, historiens de l’art, architectes et sociologues se lisent et se rencontrent. La tendance au morcellement géographique des recherches, en revanche, ne s’est pas inversée. Des pôles régionaux se sont ainsi affirmés, notamment Barcelone, Madrid, Bilbao ou Valladolid, autour de quelques équipes. Quelques grandes tendances se dégagent.
28L’école de géographie urbaine, née dans les années 1970, continue de prospérer. Elle est représentée notamment par les élèves de Rafael Mas à Madrid (dont Isabel Rodríguez Chumillas41 et Elia Canosa42), par ceux d’Horacio Capel à Barcelone, et s’est étendue bien au-delà de ces deux villes, comme à Valladolid43 ou aux Canaries44, etc. La démarche reste proche de celle mise en œuvre dans les années 1970 et 1980 : il s’agit de faire la genèse de la ville contemporaine sous l’angle du marché immobilier, par l’analyse des transactions, de la promotion et de la construction. Ces géographes travaillent principalement à partir des données du Registro de la Propiedad (qui enregistrent les données notariales sur les mutations immobilières), des dossiers d’urbanisation (zones à urbaniser, etc.), de qualification au titre d’une aide à la construction, et de construction. La nouvelle génération est passée de l’histoire de l’urbanisation de la deuxième moitié du xixe siècle, marquée par les plans d’ensanche, qui avait retenu l’attention de ses professeurs, à celle qui commence au milieu du xxe siècle, dans un cadre réglementaire dont les grandes lignes remontent à l’époque franquiste. Celui-ci est notamment défini par la loi foncière de 1956 et par la législation d’aide à la construction résidentielle (lois de 1939, 1954 notamment) qui définissent le « logement protégé ». L’activité de ces chercheurs est reflétée par la revue électronique gratuite Geocrítica, dont le rayonnement dépasse largement le cadre national. Elle touche notamment les pays d’Amérique latine, avec lesquels les géographes urbains espagnols collaborent beaucoup. C’est du reste une autre caractéristique de la géographie urbaine, voire d’une grande partie des études urbaines espagnoles, que d’être fortement tournée vers l’Amérique.
29Les géographes s’intéressent naturellement aussi au marché immobilier actuel et rencontrent en cela juristes, économistes et architectes. La place qu’a prise le secteur immobilier dans l’économie espagnole lors de la dernière période de croissance (1996-2006), puis la crise qui lui succède depuis 2007 explique leur intérêt renouvelé pour ce secteur. José Manuel Naredo, venu de l’économie rurale, puis promoteur de l’économie environnementale en Espagne et engagé dans l’écologie politique, ouvrait une voie en analysant la bulle immobilière des années 198045. Depuis, le marché immobilier et l’économie du logement deviennent petit à petit des champs de recherche au même titre que d’autres dans les facultés d’économie, alors que jusque-là ne s’y consacraient que quelques rares spécialistes, comme Julio Rodríguez López46. En témoignent les études réunies dans le numéro monographique consacré au logement de la revue Papeles de Economia Española en 200647. Par ailleurs, la présence croissante des juristes dans la revue Ciudad y Territorio, publiée par le ministère de l’Équipement depuis 1969 et témoin de l’évolution des études urbaines espagnoles depuis lors, reflète l’intérêt renouvelé de cette discipline pour le droit urbanistique et environnemental et pour une analyse de l’économie immobilière par le droit.
30Dans les facultés d’histoire, le champ s’est structuré autour de quelques grandes filiations. Ainsi, à Bilbao, c’est depuis la démographie historique que l’équipe constituée autour de Manuel González Portilla est devenue un des grands foyers d’histoire urbaine. Partie de l’usage d’une source, les recensements municipaux, et de son traitement statistique, elle a analysé l’évolution de la population urbaine. Un groupe de chercheurs a ainsi contribué à l’histoire des migrations, passant d’une analyse transversale des données du recensement (par coupes pour des années données) au suivi longitudinal des trajectoires individuelles48. L’étude de la transformation de la population citadine qui accompagne l’industrialisation de la Ria de Bilbao a naturellement conduit une partie de ces historiens à l’étude des transformations et de la modernisation urbaine. Ils ont ainsi travaillé sur le marché immobilier et la production du bâti urbain, dans la lignée de l’école de géographie précédemment évoquée et avec les mêmes sources, mais dans une perspective plus d’histoire sociale, soucieuse de mettre en relation l’histoire politique, économique et sociale avec celle du marché immobilier49. D’autres se sont tournés vers l’histoire des équipements urbains50. Cette équipe, désormais intitulée « groupe de recherche en démographie historique et histoire urbaine », a publié trois synthèses extrêmement complètes sur l’histoire de la métropole de Bilbao51. Le dynamisme de ce groupe, qui a su tisser des liens entre historiens, géographes, architectes et historiens de l’art, explique que la revue Historia Contemporánea, publiée par l’université du Pays Basque, ait accueilli deux numéros spéciaux consacrés à la ville52. Cette ouverture disciplinaire est passée par une collaboration des historiens basques avec des historiens latino-américains, surtout mexicains. Celle-ci a pris la forme d’un « séminaire permanent de réflexion et de débat sur les transformations dans le monde urbain », à l’initiative de l’université du Pays Basque et de l’université Benemérita Autónoma de Puebla, qui organise son cinquième congrès à Grenade en septembre 201153. Les historiens basques reprennent ainsi la réflexion des géographes sur la ville hispanique, des deux côtés de l’Atlantique. Notons enfin que cette équipe est en train de passer de l’étude de la ville au tournant du xxe siècle à celle de la deuxième moitié du xxe siècle.
31Un autre groupe d’historiens est actif à l’université Complutense de Madrid, autour de Luis Otero Carvajal, constitué depuis 2006 en « groupe d’histoire de Madrid à l’époque contemporaine ». Les chercheurs qui le composent viennent de l’histoire sociale et culturelle, histoire du petit peuple de Madrid, des métiers, de la bienfaisance, histoire de la vie quotidienne et des cultures urbaines. Le thème de la modernisation qui retient l’attention des historiens depuis les années 1990 les a conduit à relire l’histoire du petit peuple de Madrid, à la recherche précisément de sa mutation en population citadine moderne. Leurs sources premières sont les recensements municipaux, qu’ils nourrissent ensuite de tous les fonds d’archives municipales susceptibles d’apporter des informations sur le mode de vie de la population. Ces historiens travaillent souvent à l’échelle du quartier pour Madrid ou de la ville moyenne (Alcalá), tout en s’accordant sur un protocole de recherche qui leur permet de mettre en commun efficacement leurs recherches54. Leur travail reste centré sur la période fin xixe - début xxe siècle, dans la tradition historiographique de la « modernisation ».
32Barcelone est toujours un foyer important d’histoire urbaine, mais plus diversifié, moins lié à un groupe de recherche et plutôt au sein d’autres facultés que celle d’histoire. Les recherches historiques sur la ville viennent ainsi principalement des géographes (autour d’Horacio Capel et de Mercedes Tatjer notamment) et d’un architecte, José Luis Oyón. Elles croisent les thématiques de la genèse de l’espace urbain, dans la tradition de l’école de géographie urbaine espagnole et celle de la ville industrielle et ouvrière. L’autre particularité du foyer barcelonais d’histoire urbaine est la relative absence de cloisonnement disciplinaire : toutes les approches se croisent et les chercheurs, d’horizon disciplinaire différent, travaillent ensemble. Ils sont servis par une municipalité qui a construit en partie son image sur les politiques urbaines et accueille donc favorablement les programmes de recherche et les projets de publication sur l’histoire de la ville, qui peuvent prétendre à faire valoir une mémoire barcelonaise55.
33Enfin, l’histoire de l’urbanisme est représentée dans plusieurs universités par des historiens de l’art et des architectes. Les premiers font une histoire de l’urbanisme et des politiques urbaines sur le mode de l’histoire des idées56, dans le sillage ouvert notamment par Carlos Sambricio à Madrid57. Ils se sont aussi attachés à étudier les usages des règlements urbanistiques et le décalage entre norme et pratique58. C’est le cas de Joaquín Sabaté Bel59 à Barcelone ou de Ricardo Anguita à Grenade60. Quant aux architectes, outre les groupes déjà évoqués, citons les chercheurs de l’Institut universitaire d’urbanisme de l’université de Valladolid et leur revue Ciudades. Ceux-ci ont adopté une démarche originale qui emprunte à la fois aux historiens, aux géographes, aux sociologues et aux architectes. Ils mènent ensemble des études sur la ville actuelle et des recherches historiques, pratiquent à la fois travail d’archives et de terrain. Ils s’intéressent autant aux politiques publiques qu’aux réalités sociales ou aux caractéristiques morphologiques des villes. Leur recherche scientifique est tournée vers le projet.
34De ce rapide tour d’horizon, certes ni exhaustif, ni définitif, que peut-on conclure ? En premier lieu, il est remarquable que, dès leur émergence dans les années 1960-1970, les études urbaines espagnoles, qui ne sont alors pas le fait des historiens, portent un regard sur le temps long de la production des villes. Ils cherchent dans la deuxième moitié du xixe siècle, l’époque des ensanches et du décollage de la croissance urbaine, les racines de la ville contemporaine. Dès cette époque, les études urbaines espagnoles sont donc tournées vers l’histoire, ce qui est peu le cas par exemple de la recherche urbaine française. Inversement, les historiens des facultés d’histoire s’intéressent finalement assez tardivement à la ville. Leurs questionnements s’inscrivent dans un contexte historiographique spécifiquement espagnol.
35Autre caractéristique notable, les sciences sociales de la ville sont durablement marquées par le contexte de leur développement dans les années 1970. Recherche et projet furent menés très naturellement de concert par ceux qui furent des acteurs de la Transition démocratique, et dont l’engagement scientifique était aussi un engagement politique. Depuis lors, cette tendance reste forte.
36Aujourd’hui, le productivisme immobilier de la dernière période d’expansion et la violence de la crise qui l’a suivi ont relancé une littérature critique, qui tantôt réactive le thème de l’exception espagnole, tantôt s’inscrit dans le courant de la géographie critique américaine néo-marxiste61. Plus généralement, ce contexte a suscité la création de collectifs qui produisent, encouragent, diffusent et mettent en débat des recherches sur la ville62 et il a relancé l’activité de ceux qui existaient déjà63. Ce mouvement semble aller dans le sens d’un développement de recherches sur la ville et d’un progressif décloisonnement disciplinaire.
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Notes de bas de page
1 Il ne sera question ici que de l’histoire de la ville à l’époque contemporaine (xixe-xxie siècles).
2 À ce mouvement ont participé plusieurs chercheurs français, accueillis à la Casa Velázquez : Laurent Coudroy de Lille, Xavier Huetz de Lemps, Stéphane Michonneau, Julie Roland, Céline Vaz, et deux élèves de Gérard Chastagnaret, Philippe Lavastre et l’auteur de cet article.
3 C’est le cas de la France avec la Société française d’histoire urbaine (fondée en 1998) et sa revue Histoire urbaine, de l’Italie avec l’Associazione Italiana di Storia Urbana et la revue Storia Urbana, de la Grande-Bretagne avec la revue Urban History, des États-Unis avec le Journal of Urban History, du Canada avec l’Urban History Review, etc.
4 En aucun cas, ce point historiographique ne prétend à l’exhaustivité, il reflète, avec tout ce que cela a d’arbitraire, les rencontres et les lectures de l’auteur au cours d’une dizaine d’années de recherche sur l’histoire des sociétés urbaines espagnoles.
5 S. Thernstrom et R. Sennett (éd.), Nineteenth-Century Cities : Essays in the New Urban History.
6 P.-H. Chombart de Lauwe (éd.), Paris et L’agglomération parisienne, et Id. (éd.), La Vie quotidienne des familles ouvrières, P.-H. Chombart de Lauwe et alii, Famille et habitation.
7 H. Raymond et alii, L’habitat pavillonnaire.
8 S. Magri, « Le pavillon stigmatisé ».
9 P. Clerc (éd.), Grands ensembles et banlieues nouvelles.
10 S. Tissot, L’État et les quartiers. Genèse d’une catégorie de l’action publique.
11 A. Fourcaut, « De la classe au territoire ou du social à l’urbain ».
12 Dans l’ordre de publication : G. Jacquemet, Belleville au xixe siècle, du faubourg à la ville ; A. Fourcaut, Bobigny, banlieue rouge ; P. Gervaise, Les « Passages » à Levallois-Perret ; A. Faure (éd.), Les premiers banlieusards ; M. Gribaudi, Itinéraires ouvriers. Espaces et groupes sociaux à Turin ; J.-P. Burdy, Le Soleil Noir. Un quartier de Saint-Étienne.
13 Sur l’histoire du projet urbain en Espagne, voir V. Sainz Gutiérrez, El proyecto urbano en España.
14 Voir les nombreux travaux du Laboratorio de Urbanismo de Barcelona (dont une grande partie est inédite), notamment l’ouvrage qui reprend un cours donné par M. Solà-Morales i Rubió dans ce cadre : Las formas de crecimiento urbano.
15 Voir par exemple H. Capel, El modelo Barcelona. Un examen crítico.
16 Sur cet urbanisme barcelonais, voir J. Busquets, Barcelona. La construcción urbanística de una ciudad compacta ; F. J. Monclús, « El “modelo Barcelona” » ; J. M. Montaner, « La evolución del modelo Barcelona ».
17 M. J. Gaviria (éd.), « La ampliación del barrio de la Concepción », et Id. (éd.), « Gran San Blas ».
18 Épisode relaté dans le quotidien El País : Patricia Gosálvez, « Sin miedo a la alta densidad. El animado barrio de la Concepción es una de las zonas más pobladas de Madrid », El País, Madrid, 28 décembre 2009.
19 Première édition espagnole de Le droit à la ville : El Derecho a la Ciudad, avec un prologue de M. Gaviria.
20 P. Clerc (éd.), Grands ensembles. Banlieues nouvelles.
21 M. J. Gaviria (éd.), « Gran San Blas », p. 2.
22 Ibid., p. 2.
23 Il existe un bilan de l’activité de ce séminaire, devenu Section d’urbanisme de l’institut Juan de Herrera : R. López de Lucio (éd.), Investigación y práctica urbanística desde la Escuela de Arquitectura de Madrid.
24 Joaquín Costa, Oligarquía y caciquismo, 1898 ; Id., Reconstitución y europeización de España. Programa para un partido nacional, 1910 ; Eduardo OrtegayGasset, « Discurso de Bilbao », 1910.
25 J. Nadal, El fracaso de la revolución industrial en España.
26 M. Artola, La burguesía revolucionaria.
27 Voir notamment Á. Bahamonde Magro et J. Toro Mérida, Burguesía, especulación y cuestión social ; Á. Bahamonde Magro, El horizonte económico de la burguesía isabelina, et plus généralement tous les travaux sur les desamortizaciones (vente des biens de main-morte) en ville.
28 Á. Bahamonde Magro, El horizonte económico de la burguesía isabelina, p. 789, et Id., « Crisis de la nobleza de cuna y consolidación burguesa ».
29 Pour un bilan historiographique de la recherche sur la desamortización, voir G. Rueda Hernanz, La desamortización en España.
30 M. de Terán, « El desarrollo espacial de Madrid a partir de 1868 ».
31 H. Capel, Capitalismo y morfología urbana en España.
32 Ce sont les travaux de Rafael Mas et de son équipe de géographie urbaine à l’Universidad Autónoma de Madrid et ceux de Horacio Capel et Mercedes Tatjer à l’Universidad de Barcelona. Parmi les ouvrages les plus marquants, citons R. Mas Hernández, El barrio de Salamanca ; D. Brandis, El paisaje residencial de Madrid ; M. Tajer Mir, Burgueses, inquilinos y rentistas.
33 Pour une analyse du passage de l’historiographie du fracaso à celle du milagro, voir D. Ringrose, Spain, Europe and the « Spanish Miracle » (1700-1900) ; G. Chastagnaret, « Sortir du sud : le modèle espagnol ».
34 À propos du rôle de la tendance historiographique de la « modernisation » sur le développement de l’histoire urbaine, voir Á. Bahamonde Magro, « La historia urbana », et J. C. Rueda Lafond, « Historia social, historia urbana ».
35 A. Pons et J. Serna, La ciudad extensa.
36 J. C. Rueda Lafond, « Historia social, historia urbana », p. 112.
37 Á. Bahamonde Magro et L. E. Otero Carvajal (éd.), Madrid en la sociedad del siglo xix, et Id., La sociedad madrileña durante la Restauración.
38 J. L. García Delgado (éd.), Las ciudades en la modernización de España.
39 Notamment F. QuirósLinares, Las ciudades españolas a mediados del siglo xix, et M. Guardia, J. Monclús et J. L. Oyón (éd.), Atlas Histórico de ciudades europeas, t. I.
40 R. Anguita Cantero, La ciudad construida, et Id., Ordenanza y Policía urbana ; J. V. Boira Maiques et A. Serra Desfilis, El Grau de Valencia ; A. Pons et J. Serna, La ciudad extensa ; A. Rivera Blanco, La ciudad levítica.
41 I. Rodríguez Chumillas, Vivienda y promoción inmobiliaria en Madrid, et Id., Vivir de las rentas.
42 E. Canosa, La promoción inmobiliaria en la periferia noreste de Madrid.
43 J. L. García Cuesta, De la urgencia social al negocio inmobiliario.
44 J. M. Parreño Castellano, « El destino social de la vivienda protegida de promoción privada », et Id., La vivienda protegida de promoción privada.
45 J. M. Naredo, La burbuja inmobiliario-financiera en la conyuntura económica reciente.
46 J. Rodríguez López, Una estimación de la función de inversión en viviendas en España.
47 (-) « La vivienda. Precios, mercados y financiación ».
48 Voir les travaux de R. García Abad, notamment le livre tiré de sa thèse de doctorat : Emigrar a la Ría de Bilbao.
49 J. M. Beascoechea Gangoiti, Propiedad, burguesía y territorio.
50 Ce sont notamment les travaux de Pedro Novo López sur l’eau, les déchets et les transports publics : « ¡Que no se habite, que no se beba, lejos del olfato, fuera de la vista ! » ; « ¡Airear, limpiar y vigilar ! La vivienda y los servicios esenciales en el Portugalete del cambio de siglo » ; « El agua potable a domicilio y los residuos ».
51 M. González Portilla (éd.), Los orígenes de una metrópoli industrial : La Ría de Bilbao, et Id., La consolidación de la metrópoli de la Ría de Bilbao, et Id., Nacimiento y desarrollo de la ciudad industrial.
52 Historia Contemporánea, 24, 2002, numéro spécial « Historia Urbana », et 39, 2009, numéro spécial « Nuevas perspectivas sobre la ciudad contemporánea ».
53 Au moins deux des précédents congrès ont donné lieu à des publications : J. M. Beascoechea Gangoiti et alii (éd.), La ciudad contemporánea, espacio y sociedad ; C. Contreras et C. Pardo (éd.), La modernización urbana en España y México.
54 L. E. Otero Carvajal et alii, La ciudad oculta ; G. Gómez Bravo, Los delitos y las penas ; B. Carballo Barral et alii, El ensanche de Madrid ; R. Pallol Trigueros, El Madrid moderno : Chamberí.
55 Parmi les nombreux ouvrages récents portant un regard rétrospectif ou historique sur la ville, on peut citer H. Capel (éd.), Las tres chimeneas ; J. L. Oyón (éd.), Vida obrera en la Barcelona de entreguerras ; J. L. Oyón, La quiebra de la ciudad popular.
56 Par exemple A. Azpiri Albístegui, Urbanismo en Bilbao, 1900-1930.
57 C. Sambricio, Madrid, vivienda y urbanismo : 1900-1960, présente une sélection de certains de ses textes les plus marquants.
58 Ce thème a donné lieu à un colloque dont les actes sont publiés : R. Anguita Cantero et X. Huetz de Lemps (dir.), Normas y prácticas urbanísticas.
59 J. Sabaté Bel, El proyecto de la calle sin nombre.
60 R. Anguita Cantero, La ciudad construida, et Id., Ordenanza y Policía urbana.
61 Voir par exemple R. Fernández Durán, El tsunami urbanizador español y mundial.
62 Comme l’Observatorio Metropolitano à Madrid, qui a publié une remarquable étude collective sur Madrid : Madrid : ¿la suma de todos ? : globalización, territorio, desigualdad.
63 Comme le Club de Debates Urbanos à Madrid, qui organise des tables rondes et des débats et qui a publié deux recueils d’études : J. Echenagusia (éd.), Madrid. Punto seguido, et (-), Madrid. Club de Debates Urbanos.
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Université de Paris I Panthéon-Sorbonne - UMR 8058 CHS
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