Chapitre V
Le secteur I et la mosquée
p. 33-39
Texte intégral
1Les travaux engagés sur le site concernèrent d’abord la partie orientale de la plate-forme, désignée sous le nom de secteur I. Cet espace était séparé du reste de l’établissement par un long mur à deux parements, d’un mètre de large, au milieu duquel s’ouvrait une porte surmontée d’un grand arc dont six claveaux de 57 cm de longueur furent retrouvés. Cette porte s’ouvrait sur un passage autrefois voûté, large de 2,80 m, dont le sol était recouvert par des dalles soigneusement jointes. Dans l’épais sol d’effondrement couvrant ce dallage furent retrouvés les restes d’une charpente de bois composée de poutres et de solives provenant de pins d’Alep (pinus halepensis) et de peupliers (populus) datés au C14 du milieu du xe siècle, voire de la fin du ixe siècle. À ces éléments étaient associés huit clous à tête ronde, en mauvais état de conservation, ainsi qu’une tuile canal de faible courbure et de couleur jaunâtre. Ce passage était longé par un couloir de 80 cm de largeur, séparé du précédent par une maçonnerie dont ne subsistait plus que la base sur une longueur de 3,20 m. Le mobilier collecté dans ce passage comprenait 174 tessons de jarras, jarritas, ollas et tinajas, quelques objets métalliques, mais surtout 41 fragments de verre provenant de petites fioles à décor bichrome, de flacons à corps cannelé et de récipients à décor de côtes.
Le bâtiment A : la muṣallá
2De part et d’autre de cette entrée se développaient plusieurs constructions, dont deux bâtiments d’une superficie à peu près égale. Le plus remarquable, au sud, était une salle à plan rectangulaire d’environ 60 m2 à laquelle on accédait par une porte s’ouvrant dans le mur est et que l’on a interprété comme la salle de prière d’une mosquée (muṣallá)1. Ses parois étaient constituées d’une maçonnerie de pisé reposant sur deux lits de blocs de grès disposés en boutisse et joints à l’aide d’un mortier de terre. Autrefois recouverte d’une épaisse couche de chaux blanchâtre, la plus grande partie de la paroi ouest de cette salle avait disparu tandis que le mur sud avait fait l’objet d’une reprise au moyen de quelques lits de moellons sommairement équarris2. L’épaisseur des murs est et ouest oscillait entre 75 et 80 cm, tandis que celle des parois nord et sud n’excédait pas 60 cm.
Dimensions | Longueur intérieure | Longueur extérieure |
Mur Est | 10,20 m | 11,80 m |
Mur Ouest | 10,30 m | 12,00 m |
Mur Nord | 6,10 m | 7,30 m |
Mur Sud | 6,10 m | 7,30 m |
3Dans le niveau d’effondrement du mur est furent dégagés plusieurs éléments sculptés, parmi lesquels les fragments d’un arc outrepassé de 30 cm de rayon. Cet arc était encadré par un panneau rectangulaire (alfiz) dont la base était constituée par un bandeau de 8 cm d’épaisseur présentant en son centre une fine incision longitudinale. L’ensemble reposait sur une petite colonne de 14 cm de diamètre, couronnée par un chapiteau tronconique parfaitement lisse, d’environ 30 cm de hauteur, décoré d’un mince bourrelet à la base. Le fût de cette colonne reposait sur une plinthe carrée de 20 cm de côté, surmontée d’un anneau épais. Il s’agissait de l’encadrement d’une porte dont le seuil était occupé par un bloc de grès présentant à son extrémité un cylindre sculpté d’un diamètre égal à celui de la petite colonne évoquée plus haut. L’absence de plusieurs éléments de cette structure interdit de préciser sa hauteur exacte, même si une restitution partielle permet d’affirmer qu’elle ne dépassait pas 2 m.
4La nature de la toiture de cette salle demeure imprécise, même si les dimensions des piliers centraux qui la divisaient en deux nefs égales et parallèles au mur de la qibla plaident en faveur d’une couverture assez lourde. Les deux premiers étaient formés par des blocs carrés de 56 cm de côté et de 28 cm de hauteur, tandis que le troisième, au centre de la pièce, était plus étroit (47 cm) et soutenait une épaisse colonne de 33 cm de diamètre associée à un chapiteau décoré de motifs végétaux. L’addition de tous les fragments conservés de cette colonne indique que la hauteur de la pièce ne devait pas excéder trois mètres. Le mobilier que l’on y a mis au jour s’est avéré peu abondant mais suggestif puisque, si le sol d’occupation ne contenait que 352 tessons, la majeure partie de ceux-ci appartenait à des lampes à huile glaçurées (candiles) et à des fragments de verre. Un bougeoir en terre crue de 12 cm de hauteur y fut également découvert.
La cour
5La porte qui s’ouvrait dans le mur de la qibla donnait accès à une cour (ṣaḥn) dont une partie était recouverte d’un lit de petits galets sur une épaisseur de 4 à 6 cm. Plusieurs structures creusées dans la roche y furent mises au jour, parmi lesquelles deux bassins de forme circulaire probablement destinés aux ablutions. À côté de ces bassins se trouvaient encore deux fragments d’un petit arc provenant vraisemblablement du mur de la qibla. Si tous les éléments permettant de discerner ici la présence d’un ṣaḥn semblent réunis, en revanche on relèvera l’inversion manifeste dont témoigne l’emplacement de la muṣallá et du ṣaḥn dans la mesure où c’est généralement de l’autre côté de la salle de prière que s’étend la cour d’une mosquée.
6Si cette anomalie demeure sans explication, il convient toutefois d’insister sur le fait que malgré la faible épaisseur du sol d’occupation qui recouvrait la plus grande partie de cette cour, le mobilier découvert s’est avéré riche et varié puisqu’il se composait de 1 908 tessons, de plusieurs objets métalliques (pince à épiler, plaque boucle, élément de fermeture de coffret…), d’une pierre à aiguiser, d’une cinquantaine d’ossements d’animaux et de 85 fragments de verre appartenant à des coupelles et des gobelets. Il contenait surtout une pièce de monnaie de la taifa hūdide de Saragosse sans doute frappée au nom de l’émir Aḥmad Ier al-Muqtadir (1046-1081). On signalera encore, au pied d’un banc adossé à la paroi est de la salle de prière, la découverte d’un dé à jouer, d’une pièce de jeu d’échecs et de deux perles de rosaire. La majorité des tessons se rapportait à des céramiques destinées à la cuisson des aliments (42 %), parmi lesquelles une marmite à quatre anses. Un grand nombre de fragments provenaient de jarras à pâte claire décorées de traits au brun de manganèse, tandis que les pièces glaçurées étaient essentiellement constituées par des fragments d’ataifores de couleur miel, de candiles et d’écuelles à pied annulaire et à deux anses (escudillas).
7C’est à l’intérieur de la cour que l’on a pu mettre en évidence les traces d’une réoccupation partielle des lieux au cours du bas Moyen Âge. En fonction des monnaies chrétiennes mises au jour dans ce secteur et des quelques fragments de bols à marli à décor vert et brun provenant de Manresa, de Manises ou de Paterna, cette phase de réoccupation semble pouvoir être placée entre la deuxième moitié du xiiie siècle et le premier tiers du xive siècle. À cette date, les murs qui ceinturaient la cour de la mosquée furent démontés et les blocs de grès qui les composaient furent réemployés dans la construction d’un petit bâtiment dont ne subsistaient plus que quelques assises. En direction du sud et aux limites de la falaise, la fouille permit enfin la découverte de plusieurs structures d’époque islamique creusées dans la roche, dont une rigole permettant d’évacuer les eaux de pluie, une citerne soigneusement maçonnée, plusieurs silos, et surtout deux cavités circulaires superposées de 1,70 m de diamètre pour la plus grande et de 0,80 m pour la plus petite, vraisemblablement associées à un ancien moulin. À l’extrémité du fossé qui séparait le site du plateau de Mogache et à l’angle de la plate-forme rocheuse se trouvaient enfin les restes d’une petite tour rectangulaire malheureusement disparue, comme nous l’avons déjà signalé (chap. IV, note 4), à la suite de travaux effectués par la Comarca de los Monegros lors de l’aménagement d’un chemin.
Le bâtiment B
8Au nord du bâtiment A de la muṣallá et de l’autre côté du passage voûté évoqué plus haut, se développait une seconde salle rectangulaire (6 m/11 m), mal conservée, dont le plan originel avait été bouleversé à la suite de la construction d’un mur longeant un chemin permettant de rejoindre le secteur II. L’extérieur de cette seconde salle ne présentait aucune particularité notable, si ce n’est un silo vide de tout contenu et fermé par trois dalles épaisses, ainsi qu’une petite estrade rocheuse de forme carrée, de près de 1,20 m de côté, adossée à l’une des parois du passage voûté menant à la cour de la mosquée. Le sol d’occupation qui recouvrait l’ensemble de la pièce ne contenait que 234 tessons parmi lesquels figurait un grand nombre de céramiques à usage culinaire, dont une grosse marmite à deux anses et décor incisé. Le mobilier glaçuré comprenait des fragments d’ataifores à décor melado, de nombreuses escudillas et une série de redomas couvertes d’une glaçure monochrome de couleur verte. On retiendra également la présence dans cette pièce d’une petite clé de coffret, d’une tuile canal et de plusieurs fragments d’une grande tinaja présentant un décor composé de stries incisées et de vaguelettes. Un petit foyer creusé dans la roche contenait une quinzaine d’ossements de pigeon, tandis que les autres foyers non maçonnés observés dans le sol d’occupation comprenaient majoritairement les restes de petits ruminants.
9Si les réaménagements survenus au cours du bas Moyen Âge dans ce secteur contrarient la lecture des bâtiments édifiés quelques siècles plus tôt, il n’en demeure pas moins qu’avaient été fondé là une mosquée comprenant une salle de prière (muṣallá) et une cour (ṣaḥn) où se trouvait un bassin destiné aux ablutions des fidèles. Le caractère monumental de cet ensemble, la présence de sculptures, de colonnes et de chapiteaux, ainsi que la découverte d’un mobilier particulier (bougeoir, candiles, perles de rosaire…) et la mention d’un ṣāḥib al-ṣalāt cité dans le document de 1102 confortent cette interprétation3. Il s’agit ainsi d’une découverte remarquable dans la mesure où les mosquées rurales de la Marche Supérieure d’al-Andalus s’avèrent mal documentées au regard des édifices cultuels urbains, tels que la Grande mosquée de Saragosse, l’oratoire de l’Aljafería ou la Grande mosquée de Tudèle4. Si l’absence de minaret conservé ne constitue pas un obstacle à cette interprétation5, en revanche l’emplacement du miḥrāb demeure une source d’interrogation et l’on peut supposer qu’il s’agissait d’une simple niche creusée dans le mur de la qibla6. C’est d’ailleurs à cette dernière que pourraient se rapporter les fragments d’un petit arc retrouvé dans la cour7. Quant au bâtiment B, il pourrait s’agir du lieu de résidence d’un personnage d’un rang particulier, peut-être le responsable de la prière. Au-delà de ces hypothèses, le mobilier découvert dans la cour de la mosquée révèle qu’il s’agissait d’un lieu de rencontre et de sociabilité où l’on pratiquait des activités ludiques, sous la forme de jeux d’échecs ou de dés, en particulier le long d’un banc placé à l’extérieur de la salle de prière, c’est-à-dire en un lieu protégé du soleil aux heures les plus chaudes de la journée, où les fidèles s’asseyaient pour prier si on en croit les perles de rosaire qui furent retrouvées là.
10Les données fournies par les découvertes monétaires et les résultats des analyses au C14 réalisées à partir de fragments de solives (nos 3 et 4) montrent que cette mosquée fut édifiée vers le milieu du xe siècle et qu’elle fut fréquentée sans interruption jusqu’à la fin du xie siècle. Loin d’être un simple lieu de culte établi en milieu rural, elle fit vraisemblablement office de mosquée du vendredi8, non seulement pour les habitants du site, mais également pour les populations qui résidaient dans les environs9. On ne connaît dans la région qu’une seule mosquée répondant à ce statut, à savoir celle du ḥiṣn de Piracés mentionnée par le chroniqueur Aḥmad al-‘Uḏrī lorsqu’il relate qu’il s’agissait d’une forteresse densément peuplée dans laquelle se trouvait une Grande mosquée (masǧid al‑ǧāmi‘a). Les recherches menées sur le ḥiṣn voisin de Gabarda n’ont révélé aucune trace d’un tel édifice et il est permis de considérer que la mosquée de Marcén fut employée comme un lieu de culte où l’on célébrait la prière du vendredi, d’autant que la donation faite par le roi Sanche Ramire au monastère de Montearagón en mai 1093 évoque la présence d’une mosquée à Marcén en l’associant à celle de Piracés10.
Notes de bas de page
1 Cette paroi, orientée nord-est/sud-ouest, formait ainsi le mur de la qibla dont l’orientation était de 120o (voir à ce sujet Rius Piniés, 2000). On objectera qu’il est difficile de concevoir la présence d’une porte s’ouvrant dans le mur de qibla, mais il s’agit là d’un phénomène attesté dans d’autres mosquées de la Péninsule telles que la Grande mosquée du ribāṭ de Guardamar (Alicante, ixe-xe siècles), celle du Cortijo del Centeno à Lorca (Murcie, xiie-xiiie siècles), ou encore dans la mosquée d’El Molón, au nord de Camporrobles, dans la province de Valence, un établissement abandonné au cours du xe siècle : Azuar Ruiz (coord.), 2004 ; Pujante Martínez, 2000 ; Lorrio Alvarado, Sánchez de Prado, 2004 et 2008.
2 Il n’est pas exclu qu’une porte ait été autrefois ouverte dans la paroi ouest de cet édifice, permettant ainsi l’accès direct des populations à la salle de prière, mais aucune trace d’une telle ouverture n’a été repérée.
3 Les sources latines contemporaines de la reconquête aragonaise ne signalent guère de tels personnages en milieu rural. Tout au plus peut-on relever dans les sources latines se rapportant à cette partie de l’ancienne Marche Supérieure quelques toponymes suggérant la présence de tels personnages, comme la almunia de Abincevala (Ibn Ṣāḥib al-Ṣalāt) signalée dans les environs en 1105 à l’occasion d’un accord entre l’évêque de Huesca et l’abbé de Monteraragón : DMH, doc. no 2 (1103).
4 Hernández Vera, 2004 ; Navas Cámara, Martínez Aranaz, 1994 ; Ewert, 1978 et 2012 ; Robinson, 1992. Il convient cependant de noter que les progrès de l’archéologie du peuplement rural ont mené à plusieurs découvertes de mosquées dans l’ensemble de la péninsule Ibérique au cours de ces vingt dernières années (voir Calvo Capilla, 2004 et 2014).
5 Il n’est pas exclu que la petite terrasse rocheuse établie près de la porte d’entrée du secteur I ait servi d’assise à une telle construction.
6 Si le miḥrāb dépasse habituellement du mur de la qibla, cette configuration connaît toutefois quelques exceptions dans la Péninsule, tels que le miḥrāb de la Grande mosquée de Cordoue du temps de ‘Abd al-Raḥmān Ier (Fernández-Puertas, 2009, pp. 58-64) ou le miḥrāb de la Grande mosquée de Puerto de Santa María à Cadix, daté de la fin du xe siècle (Toledo Jordán, 1998).
7 On pourrait encore supposer que le miḥrāb se trouvait dans la partie non conservée du mur de la qibla, près de la porte donnant accès à la muṣallá.
8 On rappellera que le terme mosquée recouvre deux réalités différentes, à savoir le masǧid, simple oratoire, et le ǧāma‘ (ou mosquée à ḫuṭba), où s’effectue le prêche du vendredi (Cressier, 2006).
9 Il n’est pas inutile de citer ici une fatwa reproduite par al-Wanšarīsī (1430-1508) : « Les habitants de quatorze villages (qarya) faisaient la prière du vendredi dans une vieille Grande Mosquée située dans la localité centrale. Après la guerre civile (fitna) ils se réfugièrent dans la citadelle (ḥiṣn) du village le plus haut perché dans la Grande Mosquée duquel ils firent la prière du vendredi. Après la paix (hudna) ils ont regagné leurs villages respectifs. Un groupe continue de célébrer la prière du vendredi dans la Grande Mosquée de la citadelle ayant servi de refuge et où s’élevaient trente maisons. D’autres fréquentent l’ancienne Grande Mosquée du village central comptant douze feux » (Fès, I, 186 ; Rabat, I, 222, dans Lagardère, 1995, p. 62, notice 233).
10 CDCH, doc. no 55 (1093) : « Concedimus insuper prefate ecclesie Ihesu Nazareni mezquitas de Petrasilice et de Marcen ».
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