Médias et histoire culturelle
p. 127-140
Résumés
Historiographie récente, l’histoire des médias possède sa légitimité propre au sein d’un monde contemporain habité, sinon structuré, par la puissance des supports médiatiques, de leurs réseaux, leurs interactions, leurs évolutions techniques. Si les médias imprègnent, irradient, cristallisent la société, éclairent et pèsent sur les comportements collectifs, l’étude de la « culture médiatique » s’impose à l’historien contemporanéiste. Pour ce faire, il faut en maîtriser l’histoire économique, politique et sociale qui sous-tend la production des discours médiatiques. Les enjeux qui attendent les historiens tiennent sans doute à l’élargissement de leur cadre géographique qui doit impérativement devenir international à l’heure où la circulation des informations est une donnée structurelle des médias. Chantier d’histoire comparée, d’histoire des circulations médiatiques et d’histoire interculturelle : l’histoire des médias est de plain-pied dans l’histoire culturelle.
Pese a ser una historiografía reciente, la historia de los medias, posee su propia legitimidad en un mundo contemporáneo habitado, incluso estructurado por la fuerza de los soportes mediáticos, de sus redes, sus interacciones, sus evoluciones técnicas. Porque los medias conforman la sociedad y los comportamientos colectivos el estudio de la cultura mediática se impone al contemporaneista. Para eso huelga decir que los mecanismos económicos, políticos y sociales que sostienen la producción de los discursos mediáticos entra de lleno en el campo de la historia. Las nuevas cuestiones que se plantean a los historiadores se deben sin duda a la ampliación de su marco geográfico que se vuelve por la fuerza internacional ahora cuando la circulación de las informaciones se considera como un dato estructural de los medias. En la confluencia de la historia comparada, de la historia de las circulaciones mediáticas y de la historia intercultural, la historia de los medias forma plenamente parte de la historia cultural.
In spite of its recent historiography, the history of the media is a legitimate subject in its own right in the contemporary world, which is inhabited, even structured by the force of the media communications devices, of its networks, its interactions, and its technical evolutions. As the media shape society and its collective behaviour, the study of media culture forces itself on the contemporary historian. So it is obvious that the economic, political and social mechanisms that support the production of the media discourse come right into the category of this history. These new issues facing historians are, without doubt, due to the enlargement of the geographical framework in which the international circulation of information is considered as a structural element of the media. In the confluence of comparative history, the history of media circulations and intercultural history, media history clearly constitutes part of cultural history.
Texte intégral
1L’histoire des médias1, en France, constitue un champ de recherche relativement récent, développé, en tant que tel, depuis moins d’une dizaine d’années. De manière caractéristique, Jean-Noël Jeanneney, l’un des pionniers de ce domaine d’étude, n’emploie pas la formule « histoire des médias » dans l’article fondateur consacré aux médias comme territoire de l’histoire politique, publié en 1988 au Seuil dans le volume d’hommage aux travaux de René Rémond2. En revanche, huit ans plus tard, l’expression « histoire des médias » est inscrite dans le titre de son ouvrage de synthèse intitulé Une histoire des médias, des origines à nos jours3.
2Le mot « médias » fait pourtant son entrée dans la langue française dès 1953, comme l’a montré le linguiste Maurice Tournier4, avant de devenir, à la suite des travaux des spécialistes américains de la communication, un objet d’étude pour les sociologues, les sémiologues et « info-commistes ».
3On peut identifier les médias aux moyens, outils ou systèmes d’organisation qui permettent la diffusion ou la communication publique d’une information ou d’un message dans l’espace et dans le temps. Définition large qui incite à ouvrir le plus possible le spectre des supports médiatiques, à ne pas réduire les médias à leur dimension purement technique et matérielle, mais à exclure du terrain d’observation les relations interpersonnelles. La notion même de « culture médiatique », qui caractérise la période contemporaine5, suppose de considérer le champ des médias comme un système de représentations nourri par des supports divers, concurrentiels, complémentaires, en constante mutation, bâtis à partir d’écrit, de son, d’image, ancrés dans la perception du réel ou la création fictionnelle. Si, par commodité, l’approche privilégie le support, la réflexion doit se porter sur les phénomènes de croisement et de convergence médiatiques. Cette démarche est donc commandée par les clefs de la réception et des pratiques alors que, classiquement, l’étude part ou s’en tient au versant de la production et des contenus6.
4Il convient donc de considérer le champ médiatique comme un système en constant mouvement, marqué par une géométrie conjuguant la verticalité (production, médiation, pratiques, réception, flux relatif), mais aussi l’horizontalité (pluralité des supports, circulation, contact), la centralité et la transversalité (hiérarchie, convergence, amplification, dilation, effacement), et les jeux d’échelle (liés, notamment, à la relativité du temps, de l’espace, des populations considérées, etc.). Ce système médiatique est lui-même producteur de culture ; une culture dont on ne peut comprendre la diversité, la densité, la diffusion, l’impact, etc., en ignorant la complexité et le fonctionnement du système.
Histoire politique, histoire culturelle et approches des médias
5L’approche qui observe d’abord les médias sous l’angle de la fonction sociale et des représentations collectives, interroge sur les démarches qui ont prévalu jusqu’ici (distinguant, par exemple, une histoire des moyens d’information — presse, radio, télévision — d’une histoire du cinéma) ; elle éclaire sur le rythme de développement d’une sphère caractérisée par des normes, des standards, des représentations « culturelles » propres à modifier les comportements ; elle fournit aussi un outil de compréhension d’une « culture médiatique » marquée par des logiques de marché, d’offre, de demande, des pratiques collectives, des imaginaires sociaux. C’est bien pourquoi le chantier de l’histoire des médias s’inscrit, sans s’y confondre toujours pourtant, dans le domaine plus vaste de l’histoire culturelle, partageant avec elle des approches qui tiennent aux sources, aux méthodes, aux axes problématiques.
6En histoire culturelle, l’objet « médias » est central. La principale originalité de l’histoire culturelle, c’est son regard tendu vers l’aval des phénomènes, c’est-à-dire la réception. Il ne s’agit pas simplement de bâtir une histoire des pratiques et de la réception médiatique, mais de réfléchir à la question de l’imprégnation d’une culture médiatique, cette démarche commandant une histoire des médias liant étroitement production, médiation et réception.
7Les historiens ont mis bien du temps à s’approprier le mot « médias » qui leur posait des problèmes de définition et pouvait leur apparaître bien anachronique : si, pour un sociologue, observateur du très contemporain, son emploi ne comporte guère d’obstacles, il en est différemment pour le spécialiste du xixe siècle. Mais, surtout et peut-être, l’apparition de l’expression « histoire des médias » a été retardée par la conjugaison de deux phénomènes. Le premier, classique, est celui de la délimitation d’un domaine partagé avec les autres sciences sociales. Le second, plus fondamental encore, est l’histoire qui a marqué la construction du champ d’investigation. L’histoire des médias, en effet, est l’héritière de l’histoire de la presse et de ses démarches d’étude. L’histoire de la presse s’est très vite constituée en territoire autonome, laissant à d’autres le soin de bâtir de nouveaux chantiers, celui de l’histoire du livre, de l’histoire du cinéma, voire de l’histoire de l’image. Marquée par les interrogations politiques posées aux modes de l’information, l’histoire de la presse, considérant le xxe siècle, a absorbé des objets audiovisuels, comme la radio ou la télévision, sans y mêler le cinéma ; elle a reconnu certaines sources visuelles, le dessin et la photographie dans une certaine mesure, en laissant de côté l’affiche, par exemple. Aujourd’hui encore, l’histoire des médias est marquée par une historiographie distinguant les moyens d’information des moyens de communication, la production de nouvelles de la création culturelle, le réel et la fiction, etc.
8La topographie de la recherche, en effet, est fixée par l’hétérogénéité des supports et leur histoire. La multiplicité des supports a engendré de multiples spécialistes : de la presse écrite, de la radio, de la télévision, du cinéma, de l’affiche, du dessin, de la photographie, etc. Aux macro-territoires de la recherche médiatique, se sont ajoutés des micro-terrains eux-mêmes fragmentés, en raison de la complexité des supports. Juste un exemple pour le montrer : la photographie. La photographie, en effet, relève de domaines et de logiques très différentes : photographie d’information, photographie documentaire, photographie de création artistique, photographie d’amateurs, etc. Cette diversité et cette hétérogénéité, inscrites dans la production même de la photographie (le monde des photographes de presse ignore celui des photographes des galeries d’art), interrogent sur la pertinence d’une démarche qui privilégie le support sur la question médiatique. Elles expliquent aussi pourquoi l’historien est parfois mal à l’aise pour définir les frontières de son territoire. Ainsi, l’historien de la photographie ne peut-il prétendre tenir à la fois le domaine de la photographie d’actualité, sur lequel réfléchissent sémiologues et info-commistes, et la photographie d’art, exploitée par les historiens de l’art, voire la photographie d’amateur, observée par les anthropologues, etc. Et pourtant, reliée aux autres supports médiatiques par la problématique des représentations collectives et des imaginaires sociaux, de la fonction sociale des médias et de leurs usages, l’étude de la photographie prend un sens nouveau. On pourrait avancer la même remarque pour le cinéma, marqué par sa diversité : actualités filmées, films documentaires, films de fictions, dessins animés, films publicitaires, etc.
9Bref, la commodité du support est peut-être une fausse commodité ; elle conduit à la fragmentation des approches et ne permet pas d’appréhender l’inscription du phénomène dans les mutations sociales. L’étude par support, rendue nécessaire par l’impératif des sources et les méthodes de leur exploitation, reste un point d’observation qui n’offre pas les meilleures conditions du regard panoramique, avec même le risque d’hypertrophie de l’objet considéré. Au contraire, en se plaçant du point de vue des pratiques et de la réception, le chercheur est plus à même de comprendre comment, très concrètement, se constitue, se diffuse et circule la culture médiatique, comment s’opère un jeu d’allers et de retours entre le produit médiatique et celui à qui il est destiné7.
10Deux courts exemples qui s’appliquent au temps médiatique et à la nouvelle, son annonce et sa péremption. Avant que la radio ne pénètre massivement les foyers, la presse parisienne du matin connaissait deux contraintes de temps : il fallait parvenir en province suffisamment tôt pour concurrencer les journaux locaux ; il convenait de publier des informations suffisamment « fraîches » pour tenir la vente jusqu’à l’arrivée des journaux du soir. La durée de vie de la nouvelle pouvait alors s’établir, disons à une bonne dizaine d’heures, c’est-à-dire, en ville, à une période séparant le départ vers le lieu de travail, marqué par l’achat du journal du matin, et le retour, ponctué par l’acquisition d’un quotidien du soir. Or, les informations radiophoniques bouleversent la donne, moins du reste dans les années 1930 que dans les années 1950-1960. Non seulement la presse écrite, bientôt, n’a plus le monopole de l’annonce, mais les nouvelles publiées peuvent être périmées au moment même où le journal est placé en kiosque. La durée d’existence de la presse ne dépend soudain plus de son propre fonctionnement. Bien sûr, le rythme de vie, ponctué par l’activité sociale et professionnelle, réduit les risques (la radio reste attachée au foyer), mais le journal doit adapter ses contenus pour retenir le lecteur et garantir la survie du quotidien jusqu’à l’heure du coucher. Précisément, c’est dans les années 1950 que s’éteint l’habitude du double achat (un quotidien du matin/un quotidien du soir ; un quotidien national/un quotidien de province). Autre exemple, bref, qui souligne la nécessité de s’attacher aux pratiques et aux comportements collectifs pour comprendre le système médiatique. L’impact collectif du journal télévisé, à partir de la fin des années 1960, bouleverse à son tour le temps de la radio8 : progressivement, le carrefour de l’information radiophonique est d’abord avancé dans la soirée pour éviter la concurrence du « 20 heures » ; il se déplace bientôt du soir au midi, puis du midi au matin (7-9 heures). Les formes mêmes de l’information à la radio subissent le contre-coup du glissement pour s’adapter aux nouvelles conditions et aux nouveaux lieux d’écoute (du salon à la salle de bain, de la salle à manger à l’habitacle de l’automobile…). L’offre médiatique forge sans doute des aspects des modes de vie, mais les modes de vie eux-mêmes dessinent les contours de l’offre médiatique. Aussi l’étude exclusive des contenus ne peut-elle permettre de cerner la complexité d’un phénomène social qui, pour être saisi, doit mobiliser les multiples dimensions de la contextualisation.
11On n’appréhendera pas la culture médiatique dans les sociétés contemporaines en isolant artificiellement les médias les uns des autres. L’histoire des médias au xxe siècle, en effet, se distingue d’abord par la convergence de médias concurrents et complémentaires. De nos jours, le lien aux médias n’est jamais exclusif. Même dominante, la culture télévisuelle n’est pas unique. L’homme qui regarde la télévision peut aussi lire le journal, écouter la radio, être touché par l’image publicitaire, surfer sur Internet, aller au cinéma ; encore faut-il savoir ce qu’il regarde, lit, écoute précisément, étudier usages et comportements. Par ailleurs, le média ne se développe pas indépendamment des autres, mais en interdépendance et en interaction et ce, quelle qu’en soit la nature et la vocation apparente (informer, cultiver, divertir, convaincre, etc.). Au bout du compte, l’individu constitue le point de fusion et de restitution de la culture médiatique ; c’est bien ce qui rend difficile l’étude des médias, mais plus largement la construction de l’histoire culturelle.
Héritage historiographique et voies nouvelles de la recherche
12Éclairons nos propos, en rappelant ici les conditions d’émergence de l’histoire des médias, imprégnées, comme nous le disions, par l’histoire de la presse. L’histoire de la presse, marquée jusqu’ici par quelques travaux pionniers9, s’est développée dans les années 1950-1960, en rupture avec l’approche littéraire et événementielle des journaux, notamment par le biais des grandes figures, et en liaison avec l’affirmation d’une science de l’information, dont les préoccupations n’étaient pas proprement historiques10. Les études de presse cherchaient alors à comprendre les mécanismes de l’information, en établissant des grilles de lecture visant à la décoder, à la quantifier, avec cette idée sous-jacente que les contenus des journaux obéissaient à des règles propres à influencer le lecteur11.
13Précisément, les recherches sur la presse se sont développées au moment où l’histoire politique renouvelait profondément ses axes problématiques12. Les nouveaux historiens du politique, soucieux de comprendre le comportement des foules, découvrant l’immense chantier de l’opinion publique, cherchaient des outils massifs pour saisir l’état de l’opinion à un moment donné. Le regard s’est alors porté sur la question de l’influence de la presse sur l’opinion publique, légitimant, du coup, les recherches sur les journaux. La rencontre s’est faite d’autant plus naturellement que le contexte d’après-guerre et de guerre froide, marqué par la propagande, poussait à réfléchir sur l’influence des moyens d’information. Bref, la presse était d’abord perçue comme un enjeu politique. Toutefois, la démarche a fini par montrer ses limites. Dans le pire des cas, le lien mécanique établi entre l’émetteur et le récepteur, le média et l’opinion a conduit à confondre l’opinion publique et le journal lui-même. Dans le meilleur, faute d’outils pour la mesurer, on a abandonné le terrain de la réception pour se réfugier dans l’analyse de contenu. Le point d’observation de la production ne pouvait évidemment suffire pour saisir la réception. Surtout, même en considérant que la presse ait exercé une quelconque influence, on oubliait que le journal était d’abord un produit s’adressant non à un citoyen mais à un lecteur, c’est-à-dire un client un peu particulier, lié à son journal par un contrat de lecture, et que le système de représentations politiques du citoyen-lecteur (combien même celui-ci ne lirait que les articles politiques de son journal) était déterminé par un ensemble de facteurs (origines, formation, croyances, itinéraire, relations interpersonnelles, etc.) relativisant le rôle particulier des médias, eux-mêmes agissant de manière concurrentielle et contradictoire.
14Décevant pour la presse, le questionnement politique s’est alors déplacé, dans les années 1980, vers les médias audiovisuels, notamment en raison du monopole gouvernemental, en France, sur la radio et la télévision. À vrai dire, les historiens avaient été précédés par les politistes, soucieux, dès les années 1960, de comprendre l’influence de la télévision sur les comportements électoraux des Français. Le rôle de René Rémond est, à cet égard, essentiel. Pionnier de l’histoire politique du temps présent, il fut le premier historien français à s’interroger sur la réception politique de la télévision, menant conjointement des recherches avec les politistes, ancrant les problématiques de l’audiovisuel au cœur même des études de l’Institut d’études politiques13.
15Avec les travaux historiques sur la radio et la télévision, singulièrement impulsés à Sciences Po par Jean-Noël Jeanneney, l’enjeu politique était amplement précisé par l’enjeu de pouvoir avec, en particulier, les interrogations sur la dépendance de l’information à l’égard de l’État. Or, par rapport à l’histoire de la presse, les perspectives de l’histoire de l’audiovisuel, dans les années 1980, sont totalement inversées : guidée par les sources, la recherche privilégie les structures aux dépens des contenus. Les archives écrites, en effet, si rares en matière de journaux, permettent de comprendre le fonctionnement des médias audiovisuels et les cadres structurels de la production d’information, alors que les difficultés d’accès (et de méthode) aux sources sonores et visuelles détournent les premiers historiens de la radio-télévision des contenus14. Il faut attendre le milieu des années 1990 et la création de l’Inathèque de France pour que puissent se développer des travaux sur les images et les sons. Reste qu’en ce domaine les lacunes sont irréparables : les trous béants de la documentation interdisent des études approfondies sur les contenus de la radio des années 1920-194015 ou de la télévision des années 195016. Enfin, rares sont encore les études d’ampleur à se situer dans la problématique des représentations, à l’instar de la thèse d’Isabelle Veyrat-Masson sur l’histoire à la télévision17. Elles sont amenées néanmoins à se développer, en raison même de l’épuisement d’une partie du questionnement politique.
16Or, depuis les années 1970, et tandis que se développait une histoire des médias d’information dans l’ombre du politique, s’affirmait une histoire du cinéma se situant dans une toute autre perspective et rompant avec l’approche esthétique et encyclopédique qui avait prévalu jusqu’ici. Marc Ferro a non seulement souligné la valeur documentaire du film, mais aussi les caractères d’un produit cinématographique propre à nourrir les représentations collectives18. Pierre Sorlin, de son côté, dans une démarche de sociologie historique, a confirmé cette approche, notamment par ses travaux d’analyse filmique, mais il a aussi montré la nécessité de reconstituer toute la chaîne liant production/médiation/réception, en insistant tout particulièrement sur les publics, leurs caractères, leurs comportements, leurs goûts, leurs modalités d’écoute19.
17À quelque temps de là, s’est aussi affirmée une histoire des images, fixes pour l’essentiel, plaçant au centre de sa réflexion la construction des imaginaires et attirant l’attention de l’historien à la fois sur des sources à la diffusion massive, et pourtant largement négligées par lui (dessins, photographies, cartes postales, bandes dessinées, timbres-poste, logos, cartes, packaging, posters, etc.) et la nécessité, pour lui, d’apprendre à décrypter le langage iconographique20.
18Parallèlement, l’histoire des moyens d’information s’est enrichie d’un volet social, d’une histoire de la médiation et des médiateurs, une histoire du journalisme et des journalistes21, et d’un volet économique, une histoire des entreprises de presse, soulignant l’importance de ne pas couper l’institution, la production, le contenu de l’ensemble du dispositif de l’information, mais aussi de considérer les médias comme des industries culturelles22. Les contenus de la presse écrite ont été revisités sous l’angle des imaginaires sociaux23, rapprochant récemment historiens et littéraires24. Désormais, toute monographie du journal intègre à la réflexion les différentes dimensions énoncées25. Enfin, dans les années 1990, tandis qu’en matière de cinéma, l’histoire culturelle légitimait le regard étroit jeté sur les publics, l’histoire de la télévision se penchait enfin sur les produits diffusés — tous les types de produits — pour mieux éclairer la question des représentations collectives26. Le temps est fini où l’on prétendait comprendre la télévision au seul prisme du journal télévisé.
19Cet état des lieux, s’il pêche par son schématisme, avait surtout pour but de montrer les mutations dans l’approche des objets, leur élargissement, mais aussi les rapprochements opérés par des domaines à l’origine constitués de manière autonome, autour des problématiques propres à l’histoire culturelle. Aujourd’hui, l’histoire des médias peut apparaître comme un vaste champ de recherche cohérent : d’où l’idée, en 2000, de constituer une association de chercheurs baptisée Société pour l’histoire des médias et, trois ans plus tard, une revue promue par cette association et le groupe Temps, médias, société de Sciences Po, Le Temps des médias.
La « culture médiatique » en France : esquisse de périodisation
20L’histoire des médias ne peut pas se réduire, croyons-nous, et pour les raisons esquissées, ni à une histoire des émergences ni à une histoire de dominations successives de supports. Or, les médias fonctionnant en système, ses éléments constitutifs n’évoluant pas eux-mêmes au même rythme, il n’est guère aisé d’établir une périodisation marquant des ruptures nettes. Essayons pourtant d’en dresser quelques contours généraux pour la France, ce qui me permettra aussi de préciser l’approche proposée.
21Schématiquement, on peut définir quatre temps, scandés par de ruptures tri ou quadri-décennales. Le premier temps, qui relie la fin du xixe siècle (nous allons revenir sur la question des débuts) aux années 1930, est caractérisé par les lois nouvelles de l’industrialisation des médias, l’hégémonie entrepreneuriale, la phase ascendante de la consommation de masse. C’est l’affirmation de la nouvelle standardisée, mais aussi, par exemple, des formes de la propagande, caractéristiques d’une dilatation d’un espace indifférencié de réception. Codes, messages, genres médiatiques offrent un cadre de standardisation qui unifie l’espace national et creuse l’écart avec la culture des élites. L’identité des médiateurs s’en trouve bouleversée. Amateurs éclairés, créateurs, éducateurs, militants sont bientôt submergés par la logique de cloisonnement et de professionnalisation.
22La deuxième période relie les années 1930 aux années 1960. Plus que l’affirmation de l’image et du son (cinéma parlant, photo, radio), c’est le nouveau rapport au monde et sa perception collective, nourris par l’effet de proximité et d’immédiateté produit par les médias, qui commandent le système. La masse se transforme en public (c’est, du reste, à cette époque que se définit en France la notion de service public d’information). L’information générale établit ses lois ; le cinéma fixe ses standards, comme la publicité qui, amarrée à la communication montante, se généralise. Les médiateurs codifient leurs professions, les groupes mono-médias se forment, le marché se rationalise. Le rapport de l’offre à la demande oriente désormais explicitement la consommation médiatique, avec l’idée émergente d’un public à la fois singulier et pluriel.
23Les années 1960-1990, elles, rapprochent les sphères d’information, de communication et de consommation, en valorisant notamment les principes de ciblage. Les groupes multimédias qui naissent s’efforcent de satisfaire ou de provoquer la demande de segments du marché, encore larges, dont la pratique est marquée par l’usage de médias multiples mais spécifiques. Consommation généralisée et consommation spécifique des médias cohabitent, la différenciation des publics confinant à la segmentation. La médiation s’y adapte par une plus forte spécialisation des médiateurs et, partant, de l’exaltation des valeurs du professionnalisme et de l’expertise.
24Enfin, les années 1990 ont peut-être ouvert une nouvelle étape par l’exacerbation de tendances repérables dans la période précédente : la dilatation planétaire de l’espace médiatique (soulignée, du reste, par l’affirmation des groupes internationaux multimédias) ; la standardisation mondiale des formes, des contenus, des usages ; mais aussi le passage de la segmentation à la fragmentation des publics dont la structure, qui brouille les repères sociaux traditionnels, tend vers la communauté ou la tribu, munie de sa propre identité, de ses codes de reconnaissance, de ses signes. Productrices d’imaginaires, sphère de la consommation généralisée et sphère de la consommation différenciée s’éloignent l’une de l’autre, même si l’individu continue à user de l’une comme de l’autre. La nouveauté, peut-être, alors que les moyens techniques permettent l’accès direct à une masse d’information planétaire et, pour chacun, la création de sa propre information, c’est la mise en cause du rôle traditionnel du médiateur à l’heure de la communication multidirectionnelle et interactive. Et ce n’est pas un hasard si les débats passionnés autour des médias ont émergé dans les années 1990, comme un siècle auparavant : nous y venons.
25Car reste, en effet, la délicate question des débuts. Pour fixer l’origine, il faut considérer l’ensemble des médias, imprimés et visuels. Indéniablement, un infléchissement se produit dans les années 1860. Cependant, il me semble qu’il convient de distinguer les signes d’un phénomène en émergence et l’affirmation du phénomène lui-même. Ainsi, même en matière de presse, qui fixe l’ordre de la réflexion, me paraît-il nécessaire de relativiser la rupture. Bien sûr, on peut mettre en avant les centaines de milliers d’exemplaires du Petit Journal, créé en 1863, les contenus (pas si neufs, en fait) qui semblent expliquer l’élargissement du public, les nouveaux modes de lecture, et même la naissance de l’affiche publicitaire. Cependant, la réussite du Petit Journal souligne, paradoxalement, l’étroitesse du marché. Un peu à la manière de la presse à bon marché qui était parvenue à gagner la frange périphérique du lectorat traditionnel des quotidiens, dans les années 1830, Le Petit Journal conquiert un lectorat populaire aux marges de la lecture des quotidiens dans les années 1860 ; cette frange est simplement plus large. Peut-on parler de « masse » ? Rien n’est moins sûr. Et Marc Martin a bien montré combien le public du Petit Journal était socialement caractérisé, composé uniquement des couches populaires supérieures, déjà adeptes de la lecture27.
26Or, lorsque des concurrents du Petit Journal, tel Le Petit Parisien en 1873, ou Le Matin en 1884, croient pouvoir, non pas dépouiller Le Petit Journal de son lectorat, mais conquérir en masse de nouveaux lecteurs « populaires », avec des recettes proches, c’est l’échec. Les premières années du Petit Parisien sont difficiles28 : 50.000 exemplaires en 1880, alors que Le Petit Journal tire à 600.000 ; quant au Matin, il reste une feuille marginale. Du reste, dans les années 1880, la presse quotidienne est dominée par les titres politiques, classiques sur le fond mais bénéficiant de la liberté républicaine ; des quotidiens politiques pouvant atteindre quelques dizaines de milliers d’exemplaires (jusqu’à 100.000 pour La Lanterne, 180.000 pour La Petite République).
27Bref, le tournant décisif de la consommation de masse se situe, à nos yeux, un peu plus tard, dans les années 1890-1910. C’est au début des années 1890 que Le Petit Parisien connaît son essor, notamment grâce à la conquête — enfin — de la province, alors que Le Petit Journal stagne. C’est en 1892 qu’apparaît Le Journal qui, immédiatement (contrairement à ce qui s’était passé pour Le Petit Parisien), connaît des ventes gigantesques ; c’est à la fin des années 1890 que Le Matin devient, à son tour, un grand journal ; c’est à partir des années 1890 que les grands quotidiens se lancent dans des campagnes d’autopromotion, à grands coups d’affiches, de concours, de manifestations sportives29. C’est encore à cette époque que le journalisme, dans ses genres et sa structure sociale, connaît sa première vaste mutation, alors que les quotidiens d’opinion amorcent leur irréversible déclin. Et ce n’est pas un hasard si les années du tournant du siècle sont animées par le débat sur l’américanisation de la presse, timidement amorcé au milieu des années 1880. On pourrait également avancer des remarques concordantes avec la presse magazine, singulièrement féminine. Bref, l’offre de presse parvient à rencontrer ou à provoquer la demande sociale, alors que se constitue le capitalisme de presse.
28Mais la presse n’est pas seule à participer à la mutation. Un croisement s’opère entre le déclin de médias anciens (nous pensons, par exemple, à l’imagerie populaire, et singulièrement à l’Imagerie Pellerin d’Épinal qui bascule dans le déclin à la fin des années 1890) et l’essor de nouveaux médias ou de médias rénovés, cinéma et affiche, notamment. Le tournant des années 1890- 1900 est clair pour l’affiche publicitaire, en matière de contenu, d’auteurs, d’exposition, de tirage, de public visé. Et, tandis que l’affiche publicitaire contribue à renouveler les imaginaires, au début du xxe siècle, les mouvements politiques comme les institutions (à l’exception notable de l’État) se saisissent de l’affiche illustrée pour conduire leur propagande. Et puis, la fin de la première décennie du siècle est marquée par l’irruption de l’industrie cinématographique, la création de cinémas en 1907, la création d’actualités filmées en 1908. L’image filmée elle-même a été précédée, dans la presse, par l’apparition de la photographie, d’abord dans les magazines dans les années 1890, ensuite dans les quotidiens à compter de 1903, condamnant, du même coup, une forme ancienne d’expression en images, le dessin documentaire.
29Autant de mouvements qui attirent l’attention sur une période et qui soulignent, malgré le caractère impressionniste de l’argument dû à l’exercice, la nécessité de considérer les médias en cohérence, en continuité, en système, si l’on veut comprendre l’originalité et la place d’une culture médiatique caractéristique des sociétés contemporaines.
30Terminons d’un mot. Nous croyons qu’il reste beaucoup à faire en matière d’histoire des médias. Il faut encore affiner les méthodes, les problématiques, mieux dessiner les frontières et mieux définir les échanges avec les disciplines voisines. La question des sources, souvent dispersées, souvent lacunaires, le manque d’archives pour reconstituer le cycle production/médiation/réception forment le quotidien de l’historien des médias. Les historiens français ont néanmoins une chance considérable, celle de disposer d’un dépôt légal en matière d’archives audiovisuelles. L’Inathèque de France, bientôt rejointe par les Archives du film à la Bibliothèque nationale de France, constitue un outil unique en Europe pour les études sur la radio et la télévision.
31Nous ajouterons encore trois éléments. D’abord, tout historien du culturel est amené à considérer les médias, tant il est vrai que la culture médiatique, à l’époque contemporaine, imprègne, irradie, cristallise la société, éclaire et pèse sur les comportements collectifs. Ensuite, l’histoire des médias attire l’attention sur la nécessité de concilier les différentes approches de l’histoire. La dimension culturelle des médias prend son sens et son épaisseur dès lors, et dès lors seulement, qu’on en maîtrise l’histoire économique, politique et sociale. Enfin, la notion même de système producteur de culture médiatique suppose non seulement une vérification de son bien-fondé dans le cadre national, mais surtout, peut-être, une réflexion dans une géographie résolument internationale. La circulation des informations, en effet, est une donnée structurelle des médias à l’époque contemporaine. C’est ce chantier à la fois d’histoire comparée, d’histoire des circulations médiatiques, d’histoire interculturelle des médias qui attend sans doute, demain, l’historien des médias.
Bibliographie
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Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Ce texte a été publié dans Laurent Martin et Sylvain Venayre (dir.), L’histoire culturelle du contemporain, Paris, Éditions Nouveau Monde, 2005, pp. 139-151.
2 J.-N. Jeanneney, « Les médias ». Notons que l’article commence par ces mots : « Sur le front de l’histoire politique renouvelée, le secteur des médias n’est pas le plus ardemment travaillé ».
3 J.-N. Jeanneney, Une histoire des médias.
4 M. Tournier, « Préfixes branchés de la communication », p. 133.
5 Notion mise en valeur par Pascal Durand et Marc Lits. Cf., notamment : P. Durand, « La culture médiatique au xixe siècle » ; M. Lits (dir.), La culture médiatique. Voir les actes du colloque international tenu à Lausanne (22-24 septembre 2004), J.-Y. Mollier et al., Culture de masse et culture médiatique en Europe et dans les Amériques.
6 Pour une mise au point sur l’historiographie et les problématiques historiques des grands supports d’information (presse écrite, radio, télévision), nous renvoyons le lecteur aux articles d’A. Chauveau et H. Eck, « La place des médias dans l’histoire politique, sociale et culturelle de la France contemporaine », C. Delporte, « De l’histoire de la presse à l’histoire des médias », et P. Eveno, « Plaidoyer pour une histoire des médias ».
7 C. Delporte, « Au miroir des médias ».
8 C’est aussi à cette époque que le déclin de la presse quotidienne du soir s’accélère.
9 Au premier desquels figure le remarquable ouvrage paru dans la prestigieuse collection « Évolution de l’humanité » : G. Weill, Le journal.
10 Les recherches en science de l’information furent notamment stimulées par le Centre d’études scientifiques de la presse qui, après avoir créé en 1946, la revue Études de presse, fusionna en 1951 avec l’Institut français de presse (IFP). Créé et soutenu par la « profession » des journalistes, l’IFP fut intégré à l’université en 1957. L’histoire de la presse fut animée, dans les années 1950-1960, par la collaboration à la fois par des professionnels diplômés et talentueux, mais en marge de l’université, tels Jacques Kayser, Claude Bellanger, Raymond Manevy, et des historiens utilisant la presse comme source historique, à l’instar de Pierre Renouvin, Jacques Godechot ou Jacques Ozouf. La monumentale Histoire générale de la presse française parue en cinq volumes entre 1969 et janvier 1976, fruit des travaux de la période considérée, repose sur les passerelles tendues entre professionnels éclairés et historiens, comme l’indique le nom des maîtres d’œuvre : Claude Bellanger, Jacques Godechot, Pierre Guiral et Fernand Terrou (juriste).
11 Cf., par exemple : J. Kayser, Le quotidien français (l’ouvrage, paru après la mort de Kayser, était préfacé par Pierre Renouvin).
12 L’ancrage du questionnement politique marque notamment les thèses d’H. Lerner, La Dépêche, journal de la démocratie ou de P. Albert, Histoire de la presse politique nationale au début de la IIIe République.
13 Cf. C. Neuschwader et R. Rémond, « Télévision et comportement politique ». Une telle étude ouvrit une tradition qu’on retrouve dans ce livre important : J. G. Blumer et al., La télévision fait-elle l’élection ? René Rémond revient sur cette période et les questions posées alors dans l’entretien donné au Temps des médias, « Les médias font-ils l’élection ? ».
14 Parmi les travaux importants en matière d’histoire politique de l’audiovisuel, notons les thèses de : J. Bourdon, Histoire de la télévision sous de Gaulle ; S. Bachman, L’éclatement de l’ORTF ; A. Chauveau, L’audiovisuel en liberté ? ; H. Eck, La Radiodiffusion française sous la IVe République ; C. Ulmann-Mauriat, La naissance d’un média.
15 Des études sur la radio d’avant-guerre tentent néanmoins de contourner l’obstacle documentaire : voir D. Maréchal, Radio-Luxembourg et C. Méadel, La radio dans les années 1930.
16 Cf. M.-F. Lévy (dir.), La télévision dans la République.
17 I. Veyrat-Masson, Quand la télévision explore le temps.
18 Aux ouvrages pionniers, bien connus, de M. Ferro, comme Analyse de film, analyse de société ou Cinéma et histoire, ajoutons l’article M. Ferro, « Le film. Une contre-analyse de la société ? ».
19 P. Sorlin, Sociologie du cinéma.
20 Voir à ce propos, les travaux cités dans L. Gervereau, Les images qui mentent.
21 M. Martin, Médias et journalistes de la République ; C. Delporte, Les journalistes en France.
22 P. Eveno, Le Monde ; J. Marseille et P. Eveno, Histoire des industries culturelles en France.
23 Voir D. Kalifa, L’encre et le sang ; A.-C. Ambroise-Rendu, Petits récits et désordres ordinaires.
24 D. Kalifa et A. Vaillant, « Pour une histoire culturelle et littéraire de la presse française ».
25 Cf., par exemple, L. Martin, Le Canard enchaîné, ou les fortunes de la vertu.
26 E. Mills-Affif, Filmer les immigrés.
27 M. Martin, « La réussite du Petit Journal ou les débuts du quotidien populaire ». Voir également : M. B. Palmer, Des petits journaux aux grandes agences.
28 Cf. F. Amaury, Histoire du plus grand quotidien de la IIIe République : Le Petit Parisien.
29 Voir à ce propos B. Lenoble, « L’autopromotion de la presse en France ».
Auteur
Université de Versailles-Saint-Quentin
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