Le sentiment national est-il une catégorie pertinente pour comprendre les adhésions et les conflits sous l’Ancien Régime ?
Is National Feeling as a Category Relevant for an Understanding of Loyalties and Conflicts under the Ancien Régime?
¿Es el sentimiento nacional una categoría pertinente para comprender las adhesiones y los conflictos bajo el Antiguo Régimen?
p. 155-167
Résumés
Jean-Frédéric Schaub
L’évidence de l’identité nationale est aujourd’hui soumise à une double offensive. Sur le plan politique et institutionnel, l’échelle régionale et l’échelle européenne se sont consolidées, y compris dans des pays non fédéraux, tels que l’Espagne et le Royaume-Uni. Sur le plan de la recherche en histoire, les grands récits de la genèse et de la consolidation de l’État-nation se trouvent aujourd’hui concurrencés par d’autres approches des processus de politisation et de socialisation aux époques moderne et contemporaine. Mais la critique efficace des illusions du discours national ne peut pleinement satisfaire la nécessité de comprendre les formes d’adhésion aux structures collectives. De ce point de vue, le cas espagnol offre un exemple limite, dans la mesure où les efforts conjugués du régionalisme et de la critique intellectuelle ont fini par exclure le terme España du vocabulaire spontané. La communication précise le sens que les acteurs des xvie et xviie siècles pouvaient donner aux expressions España, Great Britain et France. Elle propose de réfléchir, enfin, aux formes d’identification de l’Europe occidentale comme siège de la civilité par opposition à la barbarie externe.
La evidencia de la identidad nacional se ve hoy sometida a una doble ofensiva. En el plano político e institucional se han consolidado las escalas regional y europea, incluso en países que no son federales, como España o Gran Bretaña. En el piano de la investigación histórica, los grandes relatos de la génesis y de la consolidación del Estado-nación compiten con otros enfoques de los procesos de politización y de socialización en las épocas moderna y contemporánea. Ahora bien, la crítica eficaz de las ilusiones del discurso nacional no puede satisfacer plenamente la necesidad de comprender las formas de adhesión a las estructuras colectivas. Desde este punto de vista, el caso español ofrece un ejemplo límite, en la medida en que los esfuerzos conjugados del regionalismo y de la crítica intelectual han terminado por excluir el término «España» del vocabulario espontáneo. Este estudio precisa el sentido que los hombres de los siglos xvi y xvii podían dar a las expresiones España, Great Britain y France. Propone reflexionar, por último, sobre las formas de identificación de la Europa occidental como depositaria de la civilidad en oposición a la barbarie externa.
National identity as an obvious fact is today under pressure on two fronts. Politically and institutionally, the regional and European levels are now consolidated, even in non-federal countries like Spain and the United Kingdom. In the sphere of historical research, the grand accounts of the birth and consolidation of the nation-State now face competition from other approaches to the process of politicisation and socialisation in the modem and contemporary ages. However, an effective critique of the illusions of national discourse cannot fully satisfy the need to understand the forms of adherence to collective structures. From this standpoint, the Spanish case is an extreme example inasmuch as the combined pressures of regionalism and intellectual criticism have finally banished the term España from spontaneous utterance. This paper examines the sense with which the movers of the 16th and 17th centuries could imbue the expressions España, Great Britain and France. In a word, it seeks to throw light on the forms whereby Western Europe is identified as a seat of civilised society in contrast to the barbarism prevailing outside.
Texte intégral
Historiographie et question nationale
1En abordant la question qui est au cœur de cette rencontre en terrain hispanique, nous devons d’abord faire face à un paradoxe. En effet, selon que l’on réfléchit en sociologue, en politiste ou en historien non contemporanéiste le problème adopte des styles différents, pour ne pas dire opposés. Ainsi, si l’on se réfère à la période qui s’ouvre pendant le dernier quart du xixe siècle, avec les retombées de la troisième guerre carliste et avec la naissance du catalanisme politique, sous la Restauración, la recherche historique et sociologique trouve en Espagne un domaine parfait pour analyser le phénomène du nationalisme. Je ne dis pas du nationalisme contemporain, comme on l’aura remarqué, tant l’épithète me semble redondante. En revanche, si l’on raisonne à partir de l’expérience politique et culturelle de la monarchie hispanique (1478-1808), c’est au contraire le monde des identités multiples, des frontières indécises, bref de la pluralité partout et de l’unité nulle part si ce n’est divine, qui s’impose à l’enquête. C’est ainsi qu’en Espagne plus qu’ailleurs, un historien du contemporain ou un sociologue peuvent aisément être tirés par la question nationale, et ce d’autant plus volontiers que s’y dessine la tension en nationalisme espagnol et nationalismes d’échelle plus petite1. De leur côté, les médiévistes et modernistes trouvent libre champ pour penser l’organisation de la cité d’avant la cristallisation nationale, justement parce que l’Espagne semble avoir raté son unification nationale.
2On voit bien de quels enjeux cette affaire peut être investie. D’un côté la réflexion sur les usages incontrôlés du concept de nation enserre la question nationale dans une temporalité étroite, c’est-à-dire réduite à l’histoire contemporaine. Cette réduction a un effet délégitimant, dans la mesure où les mouvements nationaux et leurs intellectuels organiques ont bâti la légitimité de leur vision du monde sur la profondeur historique2. Le millénaire catalan, la résistance de Pelayo inscrite dans la mémoire de Viriate, la pureté sans tache du sang basque : autant de bricolages qui cherchent des enracinements très anciens de l’identité nationale. Un passage du cours mélancolique de Lucien Febvre sur l’histoire de l’Europe, prononcé au Collège de France en 1944-1945, règle leur compte aux charlatanismes historiographiques, une fois pour toutes :
Les nationalités : ces revendications perpétuelles, ces vieilles mémoires qui n’oublient jamais rien, qui vivent dans la perpétuelle contemplation des atlas, des vieux atlas historiques, ces cimetières de rêves avortés et d’ambitions déçues. Ceci fut à nous, de 980 à 1002 [...] ; ceci fut conquis par nous, de 1324 à 1343..., donc ceci est à nous, ceci qui nous a été volé, oui, volé par la voisine [...] la nationalité faisait surgir deux choses également redoutables. L’une est la race [...] l’autre est l’histoire ou plutôt le passé, le passé cette force écrasante, cette masse formidable qui semble toujours vouloir écraser le présent [...] Heureusement le passé, c’est un cadavre. Et dans la mince pellicule du présent se réfugie la vie, la vie et ses explosions, la vie et ses créations, la vie qui n’a rien à faire avec le passé [...]3.
3D’un autre côté, le discours historiographique, désormais affranchi à l’égard de la nation politique et de la souveraineté de l’État, peut être accusé de suivre la plus grande pente d’une mondialisation gommeuse de frontières4. Une fois encore, les historiens se placeraient au service du plus fort, comme ils le firent depuis le xixe siècle dans la dynamique de la formation nationale et étatique. Il est ici utile de poser les questions en termes politiques, idéologiques et éthiques, pour éviter que ces trois registres n’envahissent en clandestins la recherche historique. Tous les chercheurs en sciences sociales ne sont pas tenus de s’aligner sur les mêmes positions. S’il est objecté qu’on ne peut impunément priver une nation de ses références, fussent-elles des mythes ou de simples « faux » savants, face au danger de l’universalisation marchande actuelle, la réponse politique peut être simple. Jusqu’à preuve du contraire, dans la deuxième moitié du xxe siècle, les peuples ont eu beaucoup plus à souffrir de l’affirmation de leur souveraineté et de celles des autres que de leur effacement. Les tragédies de Yougoslavie et du Rwanda, si récentes, procèdent de la même ivresse identitaire. Elles nous rappellent, en outre, que l’enivrement communautaire conduit à tenir son voisin de la veille, peut-être même son ami ou son parent, pour un monstre, une bête à abattre avant qu’elle ne vous déchire.
4Au fond, ce qui dans ces événements fait trembler les fondations mêmes de la vie collective est moins leur bilan démographique, en tout état de cause effroyable, que la révélation de la fragilité du lien social. La convention par laquelle les hommes se reconnaissent mutuellement la qualité d’êtres humains, dignes de respect, y compris dans le combat, s’est effondrée presque immédiatement dans le mouvement collectif d’affirmation identitaire. À côté de ces ravages majeurs, les méfaits de la dissolution des références qu’entraînent l’intensification du marché des biens culturels et la revendication paresseuse du « droit à la différence » apparaissent nettement moins horrifiants. Cette digression par les débats actuels est nécessaire pour éviter de feindre que les discussions historiographiques sur les sociétés d’Ancien Régime européen pourraient se déployer hors sol. La mobilisation politique du travail historiographique est pleinement à l’ordre du jour en Espagne, à diverses échelles. La dynamique à l’œuvre pourrait être décrite comme une régression du discours national espagnol provoquée essentiellement par l’excitation idéologique des national-régionalismes. Cet affrontement se poursuit devant les historiens critiques qui, s’ils s’avisent de privilégier la cohérence conceptuelle et la rigueur empirique, deviennent inaudibles au mieux, suspects au pire.
5Ces précautions une fois prises, il convient de poser le problème en termes suffisamment larges pour qu’ils puissent donner prise à un comparatisme, au moins à l’échelle européenne. D’abord, on doit – brièvement – évoquer quelques éléments du démontage historiographique de la généalogie nationale. Puis, il importe d’évaluer ce qui reste pour comprendre comment les hommes se sont définis collectivement et individuellement, lorsqu’on a fait l’économie de l’hypothèse nationale. Enfin, on peut s’attacher à déplacer la question autour des notions de barbarie et de civilité telles que les ont mobilisées la pensée politique et la polémique publique aux xvie et xviie siècles.
Éléments d’une critique de l’histoire nationale
6Il n’est pas ici question de défendre, à la façon de Marcel Détienne, un rejet de principe d’une histoire soumise aux découpages nationaux5. La question est plus restreinte. Il s’agit de revenir sur certaines formes de mobilisations collectives d’Ancien Régime qui se sont inscrites dans des processus de politisation et ont été interprétées comme autant d’éléments de l’affirmation nationale. Je traiterai relativement rapidement le premier point, que d’autres communications abordent et sur lequel je me suis déjà largement exprimé6. Procédons du plus général au plus particulier. Si l’on veut bien considérer que le cycle révolutionnaire 1770-1870 a bien été révolutionnaire, il faut alors accepter que l’avènement de la nation politique comme détentrice unique de la souveraineté politique constitue une rupture majeure dans l’histoire de l’humanité.
7Dans cette hypothèse, la pluralité des formes d’appartenance qui caractérise l’inscription des individus et des groupes d’Ancien Régime dans la vie sociale ne peut être comprise comme préparation à l’identité nationale, sur le mode de l’accumulation de forces primitives. Cette diffraction apparaît, au contraire, comme ce avec quoi rompt radicalement le monisme national, sous la forme réputée artificielle de l’unité / indivisibilité à la française, ou sous la forme réputée sentimentale et naturelle de la communion à l’allemande. Si l’on suit cet axiome, on doit considérer que la nationalisation des territoires et des mécanismes de décision ne relève ni de la traduction institutionnelle ni de l’extension spatiale d’identités préalablement définies. La dynamique de nationalisation impose une déchirure et un amalgame, en un mot une refondation générale de la société politique. Ce mouvement peut, bien entendu, mobiliser des lambeaux de ce que furent un jour les formes traditionnelles d’affirmation identitaire mais c’est alors sous l’aspect de réemplois coupés du sens premier que les acteurs avaient pu leur donner.
8Cette hypothèse seule nous permet de comprendre que les processus par lesquels les nations politiques contemporaines ont été forgées ont tous été d’une extraordinaire violence. Qu’il suffise de rappeler les cortèges d’horreurs entraînés par ces séries d’événements : la production de la nation politique sous la France révolutionnaire et napoléonienne, la nationalisation états-unienne de la guerre d’indépendance à la Guerre civile, le Risorgimento italien, la guerre civile permanente – selon l’analyse convaincante de Jordi Canal – que l’Espagne connaît de 1808 à 1939. Les palmes de la brutalité reviendraient sans doute au parcours de la question allemande et à la modernisation par la russification de l’espace impérial russe sous régime communiste. Ces remarques rejoignent le diagnostic de certains historiens du droit, à commencer par Paolo Grossi, qui ont repéré dans la codification du xixe siècle le véritable moment absolutiste de l’histoire européenne7. Rien dans ce qui précède ne vient abonder une quelconque nostalgie de l’Ancien Régime qui, de toute façon, ne peut avoir sa place dans la recherche en sciences sociales. La question ne consiste donc pas à déplorer que le régime de souveraineté nationale ait procédé par réduction brutale de la pluralité des droits et des appartenances. Mais il s’agit de comprendre que, pour parvenir à ce résultat, des montagnes ont dû être déplacées. Et ce qui a été aboli dans ce processus, c’est le système socio-politique de l’ancienne Europe8.
9C’est pourquoi on peut ne pas vouloir construire de généalogies longues de la nation politique. Cette position découle d’une pratique de l’histoire plus attentive aux normes institutionnelles et sociales attestées qu’aux mots d’ordre composés à l’intention de publics indéterminés. J’insiste sur ce point, car forte est la tentation de chercher refuge dans un usage mou de l’histoire dite des mentalités, dès lors que les historiens de la politique et du droit ont appris à résister à l’attrait de la téléologie national (ist) e. Gardons-nous surtout de changer d’objet de recherche, en passant de la nation politique au « sentiment national ». Un tel basculement crée plus de difficultés qu’il n’en résout. Car si l’on se place sur le terrain de cet artefact historiographique, alors se trouve posée la question de l’opinion comme objet de l’histoire. Labyrinthe ou boîte de Pandore, le problème de l’opinion n’est autre que celui de l’opinion publique. Or, ce domaine est inatteignable dans des sociétés qui présentent, de ce point de vue, deux inconvénients majeurs. D’une part, nous ne pouvons plus les sonder ni les interroger. D’autre part, elles ne sont pas organisées par des constitutions fondées sur la séparation théorique et pratique des espaces publics et privés9. Inatteignable également, parce que nous sommes placés devant des types de sources qui relèvent, en règle générale, de la prescription.
10Quels sont les équivalents pour l’Ancien Régime, des milliers de lettres de poilus de 1914-1918, de la pratique massive du journal intime, des données accumulées par les instituts de sondages et les administrations contemporaines ? Que l’on fasse l’exégèse des cérémonies royales, de l’art oratoire sacré, de la propagande imprimée, du théâtre autorisé, des correspondances politiques, on atteint pour l’essentiel le niveau des injonctions, ce qui à dire vrai n’est pas si mal, mais interdit de prétendre cerner la réalité du « sentiment national ». Sans doute est-il indispensable d’interroger les sociétés à partir de questionnements théoriques a priori. Mais encore faut-il élaborer des questionnaires qui peuvent trouver une traduction dans le langage de celles-ci et des réponses dans les ressources documentaires qui nous sont restées.
11Le niveau de l’injonction n’est certainement pas négligeable car il dessine l’espace des possibles dans l’imaginaire des acteurs du passé. Pour le reste, il faut faire notre deuil d’une quelconque capacité à mesurer leurs effets sur les individus auxquels elle s’adresse. L’histoire sociale a su admirablement dégager des formes de « résistance des faibles10 ». Ces résultats interdisent de croire que les individus des anciens temps, fussent-ils culturellement et socialement écrasés sous des rapports de domination incommensurables, aient enregistré les contenus de l’injonction sans les détourner. Nous ne pouvons donc en aucune façon faire le pas qui consisterait à prendre les discours de mobilisation collective comme la description des adhésions qu’elles prétendent susciter. Il faut donc s’en tenir à un niveau sur lequel les sources d’Ancien Régime nous renseignent.
12De longue date, certains historiens du Moyen Âge ont anticipé l’appel de Bartolomé Clavero et commencé à réfléchir en anthropologues sur l’Occident médiéval11. Il faut aller plus loin, car l’analogie avec l’anthropologie contemporaine laisse entendre que les sociétés anciennes demeurent disponibles au regard du chercheur. Or, rien n’est plus douteux. C’est pourquoi, il est temps que les historiens modernistes, apprennent auprès de leurs collègues antiquisants, historiens et archéologues, à admettre que des pans entiers de la vie des sociétés d’Ancien Régime leur échapperont à tout jamais.
Les autres modalités de l’adhésion identitaire
13Si l’on accepte de renoncer à l’enquête sur le « sentiment national » d’Ancien Régime, on doit en revenir au domaine institutionnel et juridique. Et dès lors, il est aisé de montrer que les formes politiques antérieures à la phase constitutionnelle n’ont pas donné lieu à l’avènement de nations politiques. Cela ne signifie naturellement pas que l’affirmation identitaire ait été un phénomène inconnu des hommes et des femmes de l’Ancien Régime.
14Une des manifestations les plus perceptibles de l’identification collective est la désignation de ceux qui n’appartiennent pas au royaume, à la communauté civique, à la communion spirituelle. Dans le beau livre qu’il a co-signé avec Peter Sahlins sur les rôles des étrangers dans la France de Louis XIV, Jean-François Dubost a su analyser avec force comment un dispositif institutionnel, en l’occurrence fiscal, contribue à produire ce qu’il prétend enregistrer12. Dans l’Espagne du xviie siècle, le boycott commercial est sans doute l’arme préférée des rois de Castille et d’Aragon. La mise en œuvre de ces dispositions, combinée dans les ports espagnols avec l’activité de censure culturelle et spirituelle exercée par l’Inquisition, a eu des effets comparables à ceux constatés en France. Les mécanismes institutionnels peuvent également être activés hors tout contexte d’hostilité. C’est ainsi que l’agrément portugais de l’union des Couronnes en 1581 passait, entre autres, par l’interdiction perpétuelle faite au roi du Portugal de nommer des sujets castillans aux offices de justice du royaume et aux charges palatines de la Maison de Portugal. Cet épisode, bien connu, mérite d’être comparé à la polémique anglo-écossaise sur l’attribution de magistratures anglaises à des naturels d’Écosse au lendemain de l’avènement de Jacques Ier d’Angleterre (VI d’Écosse). Dans les deux cas, l’attention portée à la naturalité des aspirants aux places, charges et juridictions fait l’objet de définitions sans ambiguïté13.
15Ces dispositifs institutionnels peuvent sembler anticiper des appartenances que les nations politiques viendraient confirmer, ou bien le contraire. Ainsi, lorsque les rois de Castille, comtes de Bourgogne, seigneurs de vassaux francophones de Franche-Comté, interdisaient à ceux-ci d’unir leurs enfants dans les familles de la Bourgogne ducale et du duché de Lorraine, ils découpaient dans la vie sociale de cette région lotharingienne des limites que l’histoire démentirait. Dole ou Cambrai, comme l’a montré José Javier Ruiz Ibáñez, ne sont pas moins hispaniques que Tolède ou Murcie du point de vue juridictionnel, du point de vue de la fidélité dynastique, du point de vue de la défense de la catholicité14. Et, pourtant, elles sont aussi présentes dans le récit national français qu’elles demeurent marginales dans l’espagnol. Ici, sans doute le facteur linguistique joue-t-il un rôle important. Mais la prudence est de mise s’agissant de sociétés qui ne connaissent pas la notion de politique linguistique et dont les populations ne sont pas soumises à une harmonisation forcée. Une approche exhaustive proposerait une typologie des objets de l’adhésion collective à diverses échelles de la vie sociale : paroisse, seigneurie, vie civique, province, fidélités à large rayon, d’autres encore. Pour l’heure, je voudrais aborder le niveau qui prête le plus à confusion, c’est-à-dire l’invention de notions englobantes qui paraissent anticiper le découpage national contemporain.
16La question qu’il convient d’aborder est celle de la fortune des symboles politiques qui dépassent les adhésions locales ou régionales, et même dynastiques. On pense, en premier lieu, aux notions de (Grande) Bretagne, de France et d’Espagne à l’époque moderne, parce qu’elles coïncident, en gros, avec ce que seraient plus tard les États-nations correspondants. La critique historiographique ne doit pas faire l’économie d’une analyse de ces représentations. La mémoire d’une unité première de la (Grande) Bretagne, notion forgée sur une ascendance mythique d’un Brutus troyen, est très présente dans les discours politiques et la littérature, en Angleterre et en Écosse, depuis le Moyen Age15 mais surtout à partir du xvie siècle16. Mais ce qui relève de l’arsenal argumentatif dans la vie politique des « trois royaumes » d’Angleterre, d’Écosse et d’Irlande ne vaut pas la description d’un état collectif d’adhésion à une identité britannique. En fait, si l’on suit Linda Colley, c’est au cours du xviiie siècle, en tout cas après l’union parlementaire anglo-écossaise de 1707, et surtout dans l’élargissement et l’approfondissement de l’empire asiatique, que se forge la commune « britannité » des sujets de Sa Gracieuse Majesté17. Il n’est pas surprenant, au demeurant, que cette question ait suscité l’intérêt de Pablo Fernández Albaladejo, tant les analogies avec les problématiques hispaniques semblent importantes18.
17De même l’identification d’une « nation France », selon l’expression de Colette Beaune, dans les chroniques et la diplomatique des rois de France et dans la consécration de sanctuaires, n’autorise pas une découpe culturelle et politique qui préfigure le fait national19. Ainsi, qu’en est-il de la notion de « Franc », telle qu’elle apparaît dans les récits des croisades (Gesta Dei per Francos) dont on sait bien qu’elle embrasse beaucoup plus large que le royaume de France ? Surtout, qu’en est-il de la « francité » au XVIe siècle d’ensembles aussi considérables que la Bretagne, la Bourgogne, la Provence toujours impériale ? La multiplication des Parlements et Cours souveraines échappant à la juridiction du Parlement de Paris, du xive au XVIIe siècle inclus, est un bon indice du processus négocié d’agrégation territoriale, combien plus tangible qu’une mystique de la France, dont la mesure de l’impact demeure fragile. Là encore le fait que l’usage de la notion de France comme symbole englobant soit attesté dès les derniers siècles du Moyen Âge ne signifie nullement que l’on puisse décrire une adhésion collective capable de transcender fidélités et enracinements locaux et régionaux.
18La démonstration se répète presque mot pour mot dans le cas de l’Hispania – Espagne. Depuis une vingtaine d’années, les nationalistes dits périphériques ont aboli le terme España, comme si ce dernier était implicitement précédé d’un « ¡Arriba! » ou suivi d’un « Una, Grande y Libre ». Il fallait lui préférer l’expression « Estado español », formelle et institutionnelle, impuissante à susciter le sentiment d’adhésion, tout comme l’hymne officiel dépourvu de paroles. Cette inhibition est un choix politique qui peut faire l’objet de jugements divers. Mais ce que les historiens modernistes peuvent affirmer à coup sûr, c’est qu’il a bel et bien existé un espace politique et culturel nommé Espagne et que celui-ci englobait non seulement des régions aujourd’hui autonomes, comme les anciens royaumes de la Couronne d’Aragon, mais aussi un pays indépendant, le Portugal. Cela ne signifie pas qu’il eût existé depuis longtemps une nation espagnole. En revanche, il apparaît clairement sous la plume des chroniqueurs, des magistrats, des ecclésiastiques et des poètes, que des hommes nés en Castille, en Catalogne, au Portugal reconnaissaient dans l’España un espace commun.
19Cette communion était composée de mémoires savantes, telles les géographies des anciens (Strabon, Pline), telles les généalogies royales des temps wisigothiques et les conciles tolédans (Étymologies d’Isidore de Séville). Et ces savoirs pointus étaient réactivés par la dynamique complexe et longue de la conquête chrétienne de l’Islam ibérique, du ixe au xve siècle. Sur cette double dimension gothique et catholique, je renvoie là encore aux travaux de Pablo Fernández Albaladejo. On trouve mille témoignages de cette référence explicite à un espace de chrétienté militante dans lequel se reconnaissent sans difficulté les hommes de l’époque moderne, même ceux qui entrèrent en conflit avec les titulaires de la Couronne de Castille. J’ai déjà eu l’occasion de montrer que la référence à l’hispanité demeure active au Portugal, y compris après la fin de l’union des Couronnes en 1640. Car les acteurs du xviie siècle ne confondaient certes pas Castille et Espagne. Et, dans cette autre forme de conquête que fut l’hispanisation de l’Amérique, comme le montre Tamar Herzog, la référence à l’Espagne est opératoire à plusieurs niveaux d’intégration socio-politique des personnes, sur les deux rives de l’Atlantique20,
20Ainsi les termes englobants ont existé bien avant que les nations politiques qu’ils ont fini par désigner ne se soient constituées. Il ne faut donc ni les bannir de notre questionnaire moderniste, ni les tenir pour ce qu’ils ne sont pas, c’est-à-dire des noms de nations politiques.
Les formes brûlantes de l’identité collective
21Les acteurs historiques diversifient leurs modes d’inscription dans des ensembles collectifs, à partir de registres variables selon les lieux et les époques. Même à l’âge contemporain où la mobilisation nationale des citoyens a bénéficié de moyens jusqu’alors inconnus (conscription universelle et propagande de masse) et s’est appuyée sur la théorie juridique de la souveraineté indivisible, le désir de s’inscrire dans des régimes de pluri-appartenance ne s’est jamais totalement éteint. Sous l’Ancien Régime, il est la règle, je l’ai indiqué. Il reste alors à comprendre, dans cette gamme de possibles, à quels niveaux d’appartenance correspondent différentes attitudes individuelles et collectives. Où se situe l’adhésion dominante pour tel type d’individu, dans tel type de société, à telle période ? La combinatoire est riche. Un citoyen peut être pris dans une relation de fidélité à l’égard d’un patron aristocrate, dans un rapport de participation à l’autorité dans le corps de ville, dans une soumission élective à la direction spirituelle des servants d’un sanctuaire, dans la vénération abstraite d’un roi jamais aperçu, dans la défense d’un parler au cœur d’un espace plurilingue, dans la perpétuation d’un patronyme et la reconnaissance de sa parentèle. La hiérarchisation de ces définitions de soi n’est pas intangible au cours de la vie d’un individu. Mais nous ne pouvons guère aller au-delà de l’hypothèse, sauf lorsque par bonheur une source de l’intimité parvient jusqu’à nous.
22Reste une question par laquelle j’aurais pu également ouvrir mon propos : qu’est-ce que l’expérience des xvie-xviie siècles apporte à l’évolution du rapport entre identité et altérité dans les sociétés européennes ? Trois événements majeurs me semblent déterminer les contenus de cette opposition : l’ambition ottomane de se substituer à l’Empire romain, la découverte de l’Amérique et la fracture de la Chrétienté. L’hypothèse que je soumets à la discussion est la suivante : ce faisceau de bouleversements a eu pour effet de modifier complètement la définition de la barbarie, telle qu’elle avait dominé depuis l’histoire d’Hérodote jusqu’à la fin du Moyen Age21. En effet, le monde ottoman suscite un mélange indécidable d’horreur et de fascination, de répugnance et de reconnaissance22. Ensuite, les descriptions des conquêtes de l’Amérique livrent aux lecteurs européens une abondance sans équivalent d’informations sur la sauvagerie des natifs, mais aussi sur la brutalité des conquistadores. Enfin, la Réforme et les conflits qu’elle provoque répandent sur tout le continent la hideur de la guerre civile, sans jamais pleinement abolir la commune appartenance à la Chrétienté23. Si à ce déploiement d’ambivalences, on ajoute le fait que, dans les écrits du temps, les différents registres se combinent et se renvoient les uns les autres, alors on peut comprendre que des repères essentiels s’en sont trouvés brouillés.
23La réflexion conduite par Franck Lestringant sur la question de la cruauté, à partir du parallèle construit au xvie siècle entre question huguenote et question indienne, entre violence des conquérants coloniaux et celles des combattants des guerres de Religion, offre un excellent exemple de ce problème24. Bien plus que la naissance improbable d’un sentiment national – même affublé du honteux préfixe proto qui signifie que ce dont on annonce l’avènement n’est pas advenu –, ce qui me semble déterminant aux xvie et xviie siècles c’est le déplacement de la barbarie de l’extérieur de la civilité connue vers l’intérieur. Je dis civilité, car la notion de civilisation attend la seconde moitié du xviiie siècle pour apparaître simultanément en France et en Écosse25. Las Casas écrivit, en 1552, le bréviaire de la cruauté qui servit à décrire bien plus que les horreurs de la conquête américaine : sa Breve relación est l’une des matrices essentielles du discours sur les violences que des chrétiens, Européens si l’on veut, pouvaient infliger à d’autres chrétiens. Ce sont les antagonistes des guerres des Religions qui se sont d’abord attribué les uns les autres la qualité de barbares. Et l’on pourrait objecter que la rupture de la Chrétienté ne fait qu’internaliser l’ancienne frontière entre monde civilisé et barbarie. En réalité, l’affaire me semble plus complexe parce que l’altérité d’un anglais protestant pour un inquisiteur sévillan, ou l’altérité d’un capitaine de tercio aragonais pour un bourgeois d’Anvers n’est pas du tout de même nature que l’altérité qui caractérise le sultan de la Sublime Porte ou l’empereur de Chine. On ne peut effacer l’intensité de la communication et le haut degré d’intercompréhension entre ces acteurs, ainsi que leur soumission à des codes de conduite fondamentalement comparables. La cruauté d’un Espagnol en Flandres, dès lors qu’une large publicité lui est donnée, est une expérience qui affecte les fondements de la civilité des sociétés protestantes presque autant que de la catholique dont procède le coupable26.
24Alors que la monstruosité désignait le bord extérieur de la société au Moyen Age, Shakespeare, Agrippa d’Aubigné ou Quevedo l’identifient au cœur de celle-ci. L’intensification de la chasse aux sorcières et la théorie de la limpieza de sangre, dont tous les statuts sont postérieurs au xve siècle, sont de bons symptômes de ce phénomène. A ces éléments d’analyse, il faut en ajouter un, essentiel, l’apparition d’une diffusion massive du discours imprimé, selon l’expression de Fernando Bouza27. La hantise des hommes du xvie et xviie siècle, n’est pas celle qui habitait les citoyens-soldats des xixe et xxe siècles. La question majeure n’est pas en ces temps plus anciens la défense du sol d’une patrie englobante, dont bien rares sont ceux qui peuvent alors se le représenter. Ce qui me semble bien plus déterminant c’est l’anxiété que produit l’idée qu’à tout moment la civilité peut céder sous le coup d’une barbarie intérieure28. L’extraordinaire déploiement de dispositifs politiques de mise sous tutelle des populations, d’imposition de la discipline aux personnes trouve là leur moteur fondamental29. Michel Foucault a montré que l’interprétation de la conflictualité politique en termes de « guerre des races » dans l’Angleterre et dans la France d’Ancien Régime a déterminé l’urgence du dressage moral et social des individus30.
25Les usages de la notion de barbare sont divers sous l’Ancien Régime. La revendication de la barbarie originelle est un argument paradoxal et efficace lorsqu’il s’agit de mettre à distance les institutions impériale et pontificale31. Mais alors que l’exaltation positive de la barbarie relève de la construction érudite, l’anxiété face à la sauvagerie qui guette détermine plus largement les comportements collectifs. On rejoint ici un thème de notre temps : l’irruption à froid de la haine entre voisins qui, le jour d’avant, vivaient en bonne intelligence. Cette expérience, les Européens viennent de la vivre dans les Balkans. De même qu’il y a soixante ans, ils virent que le pire des crimes jamais commis contre des hommes s’était produit chez eux. Il en est résulté une mélancolie intellectuelle dont on ne voit pas de raison majeure que les Européens puissent s’affranchir. Mais la conscience malheureuse que produisit la barbarie nazie n’est peut-être pas une expérience absolument nouvelle. Swift, dans la dernière page des Voyages de Gulliver, suggère que, pour un Européen qui en voyageant a découvert la laideur de sa propre société, le plus difficile est encore de se regarder dans un miroir. Cette expérience, Las Casas, Montaigne, Bacon et tant d’autres avec eux, l’ont sans doute connue.
Conclusion
26Au total, il me semble acquis que, dans son approche classique, l’histoire de la question nationale n’est pleinement convaincante que dans les bornes de la période contemporaine. Cela ne signifie pas que des formes d’adhésion collectives composites n’aient pas travaillé en profondeur les sociétés d’Ancien Régime. Il convient même de reconnaître la place qu’ont pu occuper des notions très englobantes, comme celles qui ont été évoquées : (Grande) Bretagne, France, Espagne. Mais, pour approfondir notre connaissance des mécanismes de politisation dans les sociétés européennes des xvie et xviie siècles, la découverte de la barbarie intérieure et le bouleversement des contenus de l’altérité me semblent constituer une approche moins soumise à la téléologie de l’avènement national.
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10.3917/deba.078.0039 :Notes de bas de page
1 J. Álvarez Junco, Mater dolorosa.
2 A.-M. Thiesse, La création des identités nationales.
3 L. Febvre, L’Europe. Genèse d’une civilisation, p. 278.
4 E. J. Palti, La Nación como problema.
5 M. Détienne, Comment être autochtone.
6 J.-F. Schaub, « Le temps et l’État » ; et Id., « El patriotismo durante el Antiguo Régimen ».
7 P. Grossi, Absolutismo jurídico y derecho privado en el siglo xix ; et Id., Dalla società di società alla insularità dello stato fra medioevo ed età moderna.
8 D. Gerhard, La vieja Europa.
9 J.-F. Schaub, « El pasado republicano del espacio público »».
10 J. S. Scott, Weapons of the Weak.
11 B. Clavero, Antidora.
12 J.-F. Dubost et P. Sahlins, Et si on faisait payer les étrangers ?
13 B. Galloway, The Union of England and Scotland.
14 J. J. Ruiz Ibáñez, Felipe II y Cambrai.
15 R. R. Davies, The First British Empire.
16 D. Armitage, The Ideological Origins.
17 L. Colley, Britons.
18 P. Fernández Albaladejo, Pablo, « De Hispania a Britania ».
19 C. Beaune, Naissance de la nation France.
20 T. Herzog, Defining Nations.
21 F. Hartog, Le miroir d’Hérodote.
22 L. Valensi, Venise et la sublime porte.
23 A. Dufront, Genèse des temps modernes.
24 F. Lestringant, Le huguenot et le sauvage-, et Id., Une sainte horreur ou le voyage en Eucharistie.
25 J. Starobinski, « Le mot civilisation ».
26 B. Schmidt, Innocence Abroad.
27 F. Bouza, Comunicación, conocimiento y memoria en la España de los siglos xvi y xvii.
28 J.-M. Apostolidès, Héroïsme et victimisation.
29 P. Schiera, Specchi della politica.
30 M. Foucault, Il faut défendre la société.
31 M. Werner, « La Germanie de Tacite et l’originalité allemande ».
Auteur
École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris
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