Le couple bœuf-cheval et les impérialismes américains, ou l’origine de la plus-value du capitalisme financier
Résumé
La domestication des animaux et l’activité d’élevage telles qu’elles se sont manifestées dans l’Ancien Monde à partir de la révolution néolithique sont les fondements de l’économie capitaliste. Dans l’histoire de la conquête et de la colonisation du continent américain, le bœuf et le cheval ont joué un rôle politique et économique décisif. Sur ce plan, deux modèles d’élevage du bœuf se sont opposés : le modèle anglo-normand des colonies puritaines du Nord-Est d’élevage intensif fermier et le modèle ibérique extensif des colonies méso-américaines et sud-américaines. Le second modèle, aux frontières de la domestication, confère au vacher le prestige de la mise en jeu de sa propre vie dans l’espace sauvage, à l’exemple des chasseurs amérindiens qui se sont convertis à l’équitation. Contre le lieu commun évolutionniste, nous montrerons que ce complexe économique et symbolique dynamisé par la « culture du pauvre », largement repris par le folklore et le spectacle (cinéma, rodéo), est à la source de la plus-value d’un capitalisme financier qui subsume la valeur puritaine du travail productif.
Texte intégral
Le bétail et l’origine de la valeur
1Les grandes inventions du Néolithique – domestication des plantes et des animaux, métallurgie, notamment – ont permis à l’homme d’augmenter considérablement ses rendements, de fonder l’appropriation privée de la terre, de l’eau et des animaux de rente. C’est sur cette base que s’est développée l’économie de marché et d’abondance. À l’origine d’un tel processus, le bétail a une place centrale : il est l’aune de la valeur qui fonde l’économie productiviste. Ainsi certains mots européens ont-ils gardé la trace de cette origine : pécuniaire et pecuniary viennent du latin pecunia (« argent, propriété, richesse »), qui vient lui-même de pecu (« troupeau, bétail »). L’espagnol ganado (« bétail ») est la forme nominale du participe du verbe ganar (« gagner »), tandis que l’anglais cattle (« bétail bovin »), issu de l’anglo-français catel (« propriété »), est un vocable dérivé du latin médiéval capitale, qui donnera les modernes « capital » et « capitalisme ». Dès l’abord de son classique Vocabulaire des institutions indo-européennes, Benveniste livre une analyse magistrale de la relation entre bétail et richesse, et en particulier du próbaton grec, vocable signifiant le bétail en général, mais aussi, par métaphore, une puissance qui marche, une richesse en mouvement, soit un bien meuble, un capital1.
2En vieil anglais, feoh, une racine du mot fee (« honoraire », « droit », mais aussi « bien acquis par héritage »), signifie la possession de bétail et par extension la propriété en biens ou en argent. Fé, en vieux norrois, signifie « bétail, bien, possession ». Føreyar en féroïen, « les îles aux moutons » ou « les îles du bétail » ; aujourd’hui encore, en islandais, l'expression að hafa mikið fé (« avoir beaucoup de moutons »), signifie avoir beaucoup d’argent. Une autre racine du même mot est le vieux français fieu, racine de « fief », soit un concept associé à la fois à l’appartenance familiale, au fief comme patrimoine et à la possession de terre et de bétail qui en est le corollaire2. Cette dernière étymologie est typique du rapport que les sociétés de l’Ancien Monde (soit l’Eurasie, le monde méditerranéen et l’Afrique) ont établi entre le droit de propriété, le bétail, le territoire et l’identité lignagère, un rapport dont est issue la notion de « race » au fondement de la hiérarchie des sociétés européennes dominées par l’aristocratie.
3C’est ainsi que cette dernière classe et son épigone bourgeois, qui a voulu imiter ses façons, ont pu s’identifier à leurs chevaux de race, voire à leurs taureaux dans le cas des propriétaires latifundiaires andalous qui lancèrent l’activité d’élevage pour la corrida au xviiie siècle dédiée à la production d’une « race sauvage » (raza brava). Un tel paradoxe lexical indique à quel point l’entreprise capitaliste, incarnée par l’accumulation de bétail domestique, peut avoir pour corollaire une étrange fascination régressive pour son envers dialectique, soit l’animal dans son état originel de pureté et d’insoumission, l’animal que l’homme n’a pas encore transformé en agent productif. Ainsi, en Europe, aux gains de productivité obtenus à partir de la domestication du gros bétail se sont ajoutés les effets de prestige que s’arroge la « classe de loisir », stigmatisée par Thorstein Veblen, lorsque, comme le font les éleveurs de chevaux de haute école et de taureaux de race brava, l’ostentation exprime le pouvoir par l’exhibition, directe ou indirecte, des biens dont la valeur symbolique subsume la valeur d’usage. Sur ce plan, il semblerait que les sociétés occidentales aient tiré toutes les conséquences d’un mode néolithique d’appropriation des espèces animales qui, loin de se limiter à satisfaire les besoins élémentaires de l’humain en matière de nourriture, de vêtement et de force de travail, permet d’exalter la distinction entre les catégories sociales et de les fonder selon un critère qui s’apparente, suivant l’éthique aristocratique, à l’ordre de la nature.
4Cependant, on sait bien que tous les modèles de développement n’ont pas été voués à suivre une seule direction. Nous voudrions montrer en l’occurrence qu’entre les sociétés de chasseurs et les sociétés d’éleveurs, avec leurs rapports respectifs aux animaux et les conséquences que l’on vient de rappeler, il n’y a pas forcément une gradation évolutive et nécessaire, mais bien plutôt des processus d’hybridation qui ont eu une importance décisive dans la dynamique du capitalisme. Nous choisissons d’illustrer le propos à partir des études ethnographiques que nous avons réalisées sur les cultures de l’élevage bovin extensif et du rodéo au Mexique et dans l’Ouest des États-Unis3. On y analyse les raisons profondes d’un fait dont la singularité pourrait passer inaperçue, tant le cinéma et ses topiques sont devenus comme une seconde nature pour les modernes : quelle est donc cette force étrange qui a pu faire d’un humble gardien de vaches, le cow-boy, héritier direct du vaquero mexicain, habitué à errer sur sa monture au milieu des territoires les moins hospitaliers, un moderne chevalier, un héros planétaire et la glamoureuse incarnation de la première puissance économique mondiale (fig. 1) ?
La réhabilitation paradoxale du « sauvage » amérindien par le « domestique » européen
5Pour répondre à cette question, nos travaux montrent, à travers les éléments historiques et ethnographiques qu’offre l’Amérique du Nord, que les corrélations entre chasse et élevage, ou entre sociétés amérindiennes et sociétés occidentales, loin de suivre la voie d’une évolution unilinéaire, relèvent d’effets de va-et-vient, d’influences réciproques et d’intrications originales, au centre desquelles s’est jouée la relation de l’homme à l’animal. La formidable altération qu’a constituée la diffusion massive du bétail européen à partir de la conquête du Nouveau Monde – où le bœuf et le cheval, ainsi que la chèvre, le porc, le mouton et le poulet étaient inconnus avant 1492 – a stimulé la créativité des populations de chasseurs indigènes et des métis qui suivaient leur exemple afin d’adapter la pratique d’élevage aux particularités d’un milieu géographique dominé par les territoires désertiques. Or ce sont bel et bien les processus de cette sorte qui ont participé au développement inouï de la modernité aux États-Unis.
6Une telle problématique nous oblige à revenir à un fondement infrastructurel de l’archéologie, de la préhistoire et de l’ethnologie, soit la dualité classique entre sociétés paléolithiques et sociétés néolithiques. En premier lieu, on peut se demander si la culture des chasseurs-cueilleurs exclut nécessairement les formes de relations à l’animal (familiarisation, dressage, exploitation, appropriation) qui caractérisent les sociétés néolithiques et en particulier ce que Digard appelle « système domesticatoire4 ». Dans nombre de sociétés de chasseurs-cueilleurs, les ethnographes ont remarqué autre chose qu’un mode de prédation à sens unique5. Les exégètes locaux racontent volontiers que le gibier chassé dans les règles « s’offre » aux hommes ; l’approche de l’animal confine à l’assimilation réciproque, c’est-à-dire à un rapport de familiarité. Par exemple, au Mexique, les chasseurs indiens préhispaniques utilisaient des masques et des appelants sonores pour se confondre avec les cerfs, tandis que l’art de la battue et du piégeage au collet pouvait leur permettre de ramener les proies vivantes, de les garder en captivité et, une fois familiarisées, de les sacrifier, comme le faisaient aussi les guerriers avec leurs prisonniers humains. Plus généralement, les pratiques des chasseurs-collecteurs supposent une relation d’échange donnant lieu, sinon à un mode d’élevage, à une relation de husbandry qui n’est pas forcément sans rapport avec l’élevage, ainsi que l’indique, sur un autre continent, la fameuse interaction sibérienne de la chasse et de l’élevage du renne, à partir de techniques similaires de piégeage de ces animaux au collet6.
7Localisés au sud de la Sierra Madre occidentale, à environ 300 kilomètres au nord de Guadalajara (Mexique), les Indiens huichol affirment encore aujourd’hui que le cerf s’offre aux chasseurs, qui lui vouent une cérémonie sacrificielle sur les lieux de leur campement. Ancêtre primordial, le cerf est « l’arrière-grand-père » de tous les lignages indigènes et donc un grand familier auquel on s’identifie7. Pour autant, cela n’a pas empêché les Huichol de se convertir à l’élevage extensif depuis l’époque coloniale tardive et de faire du bœuf une valeur suprême. Le principal débouché de cette dernière activité étant, comme la chasse, d’ordre sacrificiel, ils ont ainsi instauré au centre de leur cosmogonie un axe symbolique dual reliant les deux grands mammifères, préhispanique et hispanique, sauvage et domestique. Le cerf, animal associé à la masculinité, à l’est, au désert, au soleil levant, au jour, à la saison sèche au cours de laquelle ont lieu les grands rituels dirigés par les hommes, est le signe de valeur qui s’oppose symétriquement au bœuf, animal associé à la féminité et à l’enfance, à l’ouest, à l’océan Pacifique, au soleil couchant, à la nuit, à la saison des pluies dont l’avènement est favorisé par le sacrifice. C’est ce dernier rite qui fait la conjonction logique d’un tel système dualiste, la chasse étant clairement traitée comme une pratique sacrificielle8.
8Avec les Huichol, on voit donc que l’économie rituelle cynégétique, d’origine préhispanique, n’exclut pas celle de l’élevage bovin dont l’origine historique européenne est d’ailleurs niée par le mythe, qui lui substitue une provenance de l’océan Pacifique (et donc de la nuit, de l’eau et du pôle féminin de leur cosmologie), suivant la fameuse tendance « bricoleuse » propre à la pensée sauvage chère à Lévi-Strauss. Par ce biais, c’est l’objet économique de l’élevage colonial qui est détourné, de la rentabilité au sacrifice. Le bétail bovin, grand pourvoyeur de sang sacrificiel, garant de la continuité des cycles vitaux de la reproduction de la nature et des humains, est considéré comme partie du lignage des éleveurs. Sur les pâturages et dans les enclos, les femmes traitent les veaux comme des enfants, les enfants entretiennent une relation de complicité ludique avec les vaches, comme s’il s’agissait de leurs pairs (fig. 2, 3), et dans le sacrifice, au moment crucial de l’immolation rituelle, c’est toujours un enfant, un « ange » (hakeri), qui présente à l’officiant sacrificateur le couteau et le bol qui permet de recueillir la première offrande de sang (fig. 4). Partant, nous avons pu émettre l’hypothèse que, chez les Huichol, la projection anthropomorphique sur le bétail bovin, associé à l’enfance et à la femme, fait pendant à celle qui s’applique au cerf, héros culturel masculin du mythe, tandis que l’immolation rituelle des individus de ces deux espèces, entre sacrifice et chasse, reproduirait, dans les conditions d’un univers colonisé par les chrétiens, la logique du sacrifice humain préhispanique9. Les deux catégories, animal domestique et animal sauvage, animal d’élevage et animal de chasse, se conjoignent dans un rapport d’identification réciproque à l’humanité.
9Il ne faudrait naturellement pas croire que de semblables modes de relation anthropomorphique aux animaux soient exclusifs de sociétés exotiques comme celle des Huichol. Outre les débordements affectifs, les projections psychologisantes et autres manies ritualistes que l’on peut observer au sein des villes contemporaines parmi les passionnés des animaux de compagnie, chez certains propriétaires de bétail occidentaux nous avons pu remarquer la force des relations de type animiste et interactif avec les individus composant leur troupeau. Ainsi, les éleveurs de taureaux de combat en Espagne ou de taureaux de rodéo aux États-Unis considèrent-ils leur bétail comme une métafamille avec les ancêtres fondateurs de la lignée. En Camargue, les manadiers (éleveurs de taureaux pour la course camarguaise, sans mise à mort) réservent à leurs animaux champions des attitudes d’affection et d’extrême sollicitude. Après que les représentants les plus spectaculaires de la lignée (et d’un rapport maximal pour le propriétaire) ont accompli leur carrière dans l’arène et sont morts de leur « belle mort », les traitements rituels peuvent aller jusqu’à l’inhumation sous une pierre tombale, un hommage qui a bien entendu pour corollaire, des années durant, le récit ému de souvenirs relatifs à ces êtres d’exception avec lesquels on entretenait un rapport de complicité et de respect mutuel. Plus généralement, les manadiers reconnaissent l’existence dans l’herbe de leurs meilleurs pâturages d’une force qui « donne du sang », selon la formule employée par une informatrice, c’est-à-dire dont l’absorption par le bétail est un facteur majeur dans le processus de reproduction de l’énergie et du caractère des produits sélectionnés et mis en vedette dans l’arène. Ici, le terroir et le sang de la lignée constituent l’équation qui fait du bœuf non seulement un métahumain, mais un agent des forces de l’esprit. Chez ces modernes, on pense donc la relation homme-animal sous la forme d’un échange social et métaphysique, avec un type de croyance comparable à celui que les chasseurs-collecteurs ou chasseurs-éleveurs amérindiens manifestent à cet égard10.
10Il existe cependant une différence idéologique majeure entre les éleveurs de l’Ancien Monde, qui intègrent leur bétail dans la notion consanguine de race familiale, en tant que mode identitaire et foncier, et les éleveurs amérindiens, qui n’ont pas le même rapport à l’identité et à la propriété. En Amérique précolombienne, on le sait, l’élevage était pratiquement absent, et dans ses rares occurrences il n’avait ni les mêmes débouchés ni les mêmes significations que dans l’Ancien Monde. Dans les Andes, les troupeaux de camélidés étaient bien distingués par groupes de parenté (moitiés), par communautés paysannes (ayllu), et appropriés individuellement, mais il n’y avait pas de rapport entre propriété lignagère et distinction de « races » au sein de troupeaux dont les individus vivaient entremêlés sur des pâturages communautaires11. La relation entre identité du groupe familial consanguin et propriété d’un territoire et d’un troupeau distingués par la même idéologie génétique est typique de l’Ancien Monde où elle a donné à la notion de « race » le poids que l’on sait.
11Chez les Amérindiens, où l’idéologie de l’alliance et de la filiation adoptive débordait largement les critères de la consanguinité12, où la territorialité donnait lieu à des droits collectifs de résidence et de déplacement, mais à aucune sorte d’approriation privée, la conversion massive aux grands animaux d’élevage qu’imposa à certaines tribus la colonisation européenne passait par une technologie hybride. Il s’agissait d’adapter à ces animaux invasifs les techniques de chasse au gros gibier, battue et piégeage au lasso ou, en Patagonie, aux boleadoras13. Cette modalité impliquait aussi l’art de la guerre dès lors que l’on faisait la razzia contre les troupeaux des missions ou d’autres colons blancs afin de dérober les chevaux, les bœufs ou les moutons qui étaient devenus des objectifs majeurs pour les Indiens, de même que les femmes et les enfants qu’ils enlevaient pour les adopter. L’appropriation du bétail, et le passage à la fameuse civilisation équestre des Indiens de l’Ouest américain, était donc le résultat, plutôt que d’un processus colonial d’acculturation, d’une culture originale de chasseurs-guerriers où l’exploit individuel était survalorisé et l’esprit d’adaptabilité fort développé14.
12Chez les Apaches ou chez les Navahos, les rites de destruction systématique des biens de l’individu à sa mort incluaient le bétail qu’il possédait15. Ce dernier habitus rituel est évidemment incompatible avec les principes capitalistes de la propriété privée et de la transmission patrimoniale au sein de l’unité consanguine, mais pas incompatible avec un rapport de familiarisation et d’identification des humains et des animaux. Par exemple, les Huichol d’aujourd’hui, on l’a vu, considèrent leurs vaches comme des êtres familiers, placés du côté des femmes et des enfants du lignage, mais leur économie sacrificielle, particulièrement dispendieuse, limite les possibilités d’accumulation capitaliste, même si l’argent est très clairement perçu comme le principe énergétique nécessaire à l’accomplissement du rite, comme une matière sacrée dont le mythe indigène associe l’origine au sacrifice du Christ16. Et lorsqu’un éleveur qui s’enrichit quelque peu envisage d’augmenter le nombre de têtes de son troupeau, il doit au préalable observer une série fastidieuse de rites (offrandes, pèlerinages) cinq années durant (le cinq étant chez les Huichol la somme des points cardinaux et du centre, soit le chiffre qui oriente toute la cosmologie et les opérations rituelles), faute de quoi son bétail mourrait. Parallèlement, le cerf est l’animal masculin que l’on capture, idéalement, au collet (même si le fusil est devenu l’arme de chasse dominante). Son sacrifice cynégétique est une forme rituelle impensable dans l’Ancien Monde où l’on ne sacrifie que des animaux d’élevage, généralement choisis parmi les plus beaux de la lignée.
L’hybridation des systèmes d’élevage anglo-normand et hispanique par le génie amérindien-métis
13À l’instar du renne en Sibérie, en Amérique le cheval et le bœuf ont fait l’objet d’une forme de transition entre chasse et élevage, entre rapport au sauvage et domesticité. Ainsi l’économie pastorale, cynégétique et sacrificielle des Huichol est-elle aussi une économie laitière, puisque les femmes, à la saison des pluies, traient les vaches après que celles-ci ont été capturées au lasso et immobilisées contre un arbre, le caractère farouche du bétail excluant toute autre technique d’approche. Tandis que l’homme prend la responsabilité de provoquer l’épanchement du sang sacrificiel du bœuf et du cerf, la femme a l’initiative de la (modeste) production laitière et de la fabrication consécutive de fromages. Chez les Huichol, la dualité entre les sexes s’articule avec la dualité humorale du sang et du lait, et avec la dualité technologique de la chasse et de la domestication, pour former un système sémantique associant dans une même logique d’hybridation ce que les Occidentaux considèrent comme des contraires inassimilables (fig. 5).
14On pourrait multiplier les exemples de ce type à travers le continent américain. Ils témoignent d’un phénomène plus général qui a déterminé la diffusion du bétail européen depuis les plaines du Canada jusqu’à la Terre de Feu. Il s’agit de l’articulation des deux grands systèmes domesticatoires opposés qui ont marqué la colonisation et la modernisation du continent américain17 :
- le système intensif anglo-normand, qui implique l’exploitation et les soins quotidiens (stabulation, harnachement, trait, labour, traite des vaches, castration des mâles non reproducteurs), donc un rapport très proche des hommes au bétail, sur des terres privatisées par des fermiers, dont la productivité est maximalisée ;
- le modèle ibérique extensif, où le bétail bovin et équin erre en semi-liberté sur un territoire ouvert de steppes, de marais, de montagnes et de déserts. Les animaux n’entrent en contact étroit avec les vachers montés qu’à l’occasion des rodéos originels (rabattage à cheval et enfermement des individus pour les manipuler dans l’enclos, marquage au fer rouge, débourrage des mustangs, abattage, etc.). Dans cet élevage bovin, où les mâles n’étaient pas castrés ni les vaches traites, ce qui favorisait la prolifération incontrôlée et le marronnage, le débouché était principalement l’exploitation des peaux et du suif, tandis que le comportement fuyard et agressif des bœufs et chevaux ainsi traités se prêtait à des jeux de vachers. Ceux-ci sont à l’origine de la tauromachie (en Espagne et par diffusion en Amérique) et de toutes les formes de rodéo observées du nord au sud du Nouveau Monde.
15Dans les immensités semi-désertiques du territoire colonial ibéro-américain (dont le Sud-Ouest des États-Unis), c’est un concept d’élevage cynégétique qui s’est ainsi développé, où le savoir-faire des chasseurs amérindiens pour capturer et maîtriser les grands mammifères sauvages – cerfs, élans, bisons, chevaux et bœufs naturalisés – a servi de guide18. Aux États-Unis, avec la ruée vers l’or et la conquête de l’Ouest, outre les massacres et les spoliations des différentes tribus, ce processus d’adaptation de l’élevage à un environnement difficile et dangereux a dynamisé l’entreprise capitaliste et lui a donné un mythe d’origine, à partir du moment où la culture pastorale métisse des cow-boys est devenue un phénomène médiatique rentable, propre à fasciner les foules, dans l’arène, au cinéma et ailleurs.
16Tandis que le modèle fermier anglo-normand est indissociable de la morale puritaine du travail productif et de l’éthique de sensibilité à l’égard des animaux domestiques (devenue aujourd’hui une doxa dans les sociétés urbaines occidentales), le modèle américain du ranching, issu de la conjonction de l’élevage extensif ibérique, de la culture cynégétique-guerrière des Indiens et de l’esprit de conquête économique des Anglo-Américains, se situe sur la frontière de la domesticité et du sauvage. Portée par l’éthique de l’exploit guerrier, le ranching et son avatar, le rodéo, saisissent l’animal dans l’espace vierge, exaltent avec lui une relation agonistique et ludique qui renvoie autant à l’héritage amérindien qu’à celui de la tauromachie coloniale19. Associée à la violence et au mode de vie dissolue de ses mainteneurs, cette culture populaire a donc suscité jusqu’à nos jours l’opposition de la morale puritaine à l’origine de la sensibilité « animalitaire », mais elle a aussi créé, finalement, une richesse fabuleuse.
L’exaltation de l’économie de marché par les aléas du sauvage
17Entre les deux modèles antithétiques d’exploitation des grands animaux d’élevage s’étend un pan entier de l’histoire du Nouveau Monde, aussi bien sur son versant ibérique que sur son versant anglo-saxon. En termes économiques, deux systèmes de valeur opposés dans l’Ancien Monde se sont combinés ici : celui qui associe capital (bétail et ferme privée) et travail humain, d’une part, celui qui associe capital (bétail) et spéculation (aléas de la nature et jeu des humains), d’autre part. Chez les éleveurs californiens de bovins parmi lesquels nous avons enquêté revient comme un leitmotiv l’idée que le sens de leur activité est celui d’un pari (bet), renouvelé d’une année sur l’autre, sur la réussite de leur entreprise, le succès ou l’échec reposant en bonne partie sur les facteurs naturels que l’on ne contrôle pas, notamment les précipitations et la gestion des herbages, un bien rare dans les parages semi-désertiques où paissent leurs troupeaux (fig. 6). Ce facteur se redouble dans le cas des spécialistes de l’élevage pour le rodéo, dès lors qu’il s’agit de se livrer à de complexes expérimentations génétiques appliquées aux reproducteurs afin d’obtenir des animaux champions (c’est-à-dire extrêmement agressifs et dangereux).
18Comme un écho à cet investissement sur le « sauvage », toute la dramaturgie du rodéo américain – ainsi que du cinéma de western – repose sur le danger de mort couru par le cow-boy, dont le modèle originel du xixe siècle avait osé s’aventurer dans les marges où se sont épanouies les cultures des chasseurs-guerriers amérindiens, ceux qui furent capables d’amalgamer, d’une manière improbable pour des Européens, la raison cynégétique et la raison de l’élevage. Parmi les divers jeux taurins-équestres que comporte le spectacle, le bull riding, la monte de taureaux d’origine mexicaine, est devenu le plus populaire et générateur de gains. En deux mots, il s’agit pour le cow-boy bull rider de tenir jusqu’à huit secondes monté sur un taureau furieux qui cherche à l’éjecter en bondissant ; le jeu dangereux donne l’image d’un animal si agressif qu’il évoque la sauvagerie, à l’instar du taureau de corrida dont il descend historiquement (fig. 7).
19C’est à ce titre que le taureau de l’arène, le bucking bull (« taureau bondissant »), bien qu’issu d’un élevage hautement spécialisé, est assimilé à l’animal de chasse par le langage spécialisé. En effet, le vocable buck, qui est au cœur de l’univers du rodéo, désigne à l’origine le cerf mâle et, sous forme verbale (« this bull bucks good… »), les bonds du taureau champion, par analogie avec ceux que le gros gibier prodigue lorsqu’il est coursé par des chasseurs. Ainsi que nous l’avons montré par ailleurs, au Mexique à partir de la conquête (xvie siècle), la catégorie du cerf, animal de chasse majeur, a été la porte d’entrée sémantique pour que les Indiens assimilent et intègrent dans leur économie et leurs représentations le cheval et le bœuf des conquérants hispaniques, tour à tour désignés par des vocables signifiant « cerf20 ». Confrontés à l’introduction de l’élevage du gros bétail sur leur sol, les Indiens et métis mexicains allaient traiter ce formidable défi en contournant ou en inversant le sens de la technologie et de l’économie productiviste diffusées par les colonisateurs, associant le cheval et le bœuf au cerf et inventant – on l’a vu dans le cas des Huichol – une forme cynégétique d’élevage.
20La tradition « blanche » de jeu d’arènes, qui doit autant à l’influence amérindienne qu’à l’apport hispano-métis de l’élevage dans la nature vierge, détourne l’économie fermière de rente, d’origine anglo-normande, en écartant résolument l’exploitation du bœuf du labeur quotidien et des besoins alimentaires. Pourtant, sélectionné pour son agressivité idéalement « sauvage », ce taureau de pur jeu et de pur prestige est doté d’une formidable plus-value par rapport à ses homologues « classiques » d’embouche et de labour. Aujourd’hui, en effet, si un beau taureau d’embouche angus sur pied se vend autour de 2 000 dollars, un bucking bull champion peut valoir jusqu’à 1 million de dollars (fig. 8), une paillette de son sperme congelé pour la reproduction par insémination artificielle peut se vendre en ligne entre 20 000 et 30 000 dollars, tandis que les cow-boys bull riders capables de monter les bestiaux de son acabit arrivent à gagner, tel le numéro un de 2015, plus d’1,5 million de dollars au cours d’une année. La relation productiviste entre l’homme et l’animal est subsumée par un jeu dangereux et incertain : on peut y perdre la vie, mais on peut aussi y gagner beaucoup d’argent (fig. 9).
21Ce tour de force symbolique est inséparable des origines de la spéculation financière dont les Nord-Américains ont fait le moteur de l’économie mondiale, fondée sur l’image et le prestige qui déterminent, à la manière capricieuse que l’on sait, la valeur21. Est-ce un hasard si ce même mot buck est devenu, dans le langage familier des Étasuniens, une métaphore pour dire « dollar », rappelant ainsi le temps des pionniers, lorsque la peau de cerf (buckskin) avait effectivement la valeur d’une monnaie d’échange entre les traders blancs et les Indiens du Sud-Ouest qui projetaient sur cet animal de chasse des attributs symboliques de premier plan ?
22On pourrait objecter à la dimension culturaliste (américaniste) de notre analyse le fait que le toro bravo hispanique, qui est en quelque sorte l’ancêtre du bucking bull, bénéficie lui aussi d’une importante plus-value par rapport à l’animal d’embouche. Mais la différence des rapports est à la mesure des poids relatifs de l’Espagne et des États-Unis dans la dynamique historique du capitalisme moderne. Un toro bravo de grande « race » peut se vendre autour de 10 000 euros à la direction d’une arène, mais il n’est présenté qu’une seule fois et mis à mort à l’issue du spectacle. Par ailleurs, il est vendu au sein d’un lot de six ou huit exemplaires, comme élément faiblement différencié d’une marque d’élevage elle-même distinguée par une héraldique aristocratique. Le grand bucking bull, lui, est loué d’un spectacle à l’autre où il fait figure de vedette. Mais plus il y brille par son agressivité, plus sa cote monte (donc sa valeur comme capital) et, comme au marché aux bestiaux, il peut être vendu plus cher à une personne intéressée, qu’elle soit ou non éleveur d’ailleurs. Dans l’univers du rodéo américain, il peut y avoir une dissociation complète entre le taureau champion et celui qui l’a produit par son travail de sélection et de soins. Un milliardaire béotien pourrait s’offrir un taureau champion et le présenter ensuite sous son nom si la fantaisie lui en prenait. Par contraste, le toro bravo hispanique, produit européen, reste pris dans une conception aristocratique de la race, de type holiste, ce qui limite l’importance de la plus-value dont il fait l’objet, alors que le bucking bull, produit américain individualiste, résulte d’un élevage du sauvage qui démultiplie la plus-value en jouant sur la fascination des modernes pour le monde des origines où évoluaient les peuples de chasseurs-collecteurs auxquels étaient venus se confronter les intrépides vaqueros et cow-boys, un monde où les loups n’étaient pas encore ceux de Wall Street.
Bibliographie
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Saumade Frédéric, « De la sangre al oro : la transubstanciación del cristianismo y del capitalismo en la comida ritual de la Semana santa huichol (México) », Amérique latine, histoire et mémoire : Les Cahiers ALHIM, éd. numérique, no 25, 2013. [URL : http://alhim.revues.org/4618]
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Saumade Frédéric, Maudet Jean-Baptiste, Cowboys, clowns, toreros : l’Amérique réversible, Paris, Berg International, 2014.
Notes de bas de page
1 É. Benveniste, Vocabulaire des institutions indo-européennes, t. I, Économie, parenté, société, section 1, « Bétail et richesse », p. 37-45.
2 Online Etymology Dictionary. [URL : http://www.etymonline.com/index.php?allowed_in_frame=0&search=cattle&searchmode=none] Sur l’aire islandophone, je remercie Christophe Pons de m’avoir signalé ces éléments.
3 F. Saumade, Maçatl : les transformations mexicaines des jeux taurins ; F. Saumade, J.-B. Maudet, Cowboys, clowns, toreros : l’Amérique réversible.
4 J.-P. Digard, L’homme et les animaux domestiques : anthropologie d’une passion.
5 Voir P. Descola, La nature domestique : symbolisme et praxis dans l’écologie des Achuar, p. 317 et suiv.
6 Voir T. Ingold, The perception of the environment, p. 126 ; id., Hunters, pastoralists and ranchers : reindeer economies and their transformations.
7 Voir F. Saumade, « Taureau, cerf, maïs, peyotl : le quadrant de la culture wixarika (huichol) ».
8 Voir le très bel article de D. Lemaistre, « The deer that is peyote and the deer that is maize : the hunt in the Huichol “Trinity” ».
9 F. Saumade, « Taureau, cerf, maïs, peyotl : le quadrant de la culture wixarika (huichol) », p. 223-224.
10 Voir F. Saumade, Des sauvages en Occident : les cultures tauromachiques en Camargue et en Andalousie ; F. Saumade, J.-B. Maudet, Cowboys, clowns, toreros : l’Amérique réversible.
11 Voir l’article de J. V. Murra, « Herds and herders in the Inca state », p. 189 et suiv.
12 Sur ce point fondamental du rapport entre idéologie de la parenté et de la domestication, et de l’opposition entre cultures européennes et amérindiennes à cet égard, on peut se reporter à l’analyse d’E. Désveaux, Quadratura americana : essai d’anthropologie lévi-straussienne, p. 163-187.
13 Pour un témoignage fascinant de l’ambiance cynégétique et guerrière parmi les Indiens de Patagonie du milieu du xixe siècle, dont la virtuosité de cavaliers et de manieurs de bétail et d’esclaves ne le cédaient en rien à celle de leurs homologues des grandes plaines étasuniennes, voir J.-P. Duviols (dir.), Trois ans chez les Patagons : le récit de captivité d’Auguste Guinnard (1856-1859).
14 Il existe de multiples sources historiques qui attestent la formation, entre la fin du xviie siècle et le milieu du xixe siècle, d’un véritable système économique à l’initiative des tribus des Grandes Plaines et du Sud-Ouest, associant razzia, enlèvement de femmes et d’enfants, vol de chevaux et autre bétail, une activité de prestige pour les guerriers indiens que le contact européen avait transformés en experts cavaliers, mais aussi un mode ordinaire de reproduction des groupes dans un contexte de dépressions démographiques et de famines fréquentes. Voir par exemple A. R. McGuinnis, Counting coup and cutting horses : intertribal warfare on the Northern Plains, ou P. Hämäläinen, Comanche Empire.
15 Selon Gladys Reichard, citée par P. Kunstadter, « Southern Athabaskan herding patterns and contrasting social institutions », p. 67, n. 1.
16 Voir F. Saumade, « De la sangre al oro : la transubstanciación del cristianismo y del capitalismo en la comida ritual de la Semana santa huichol (México) ».
17 Cette dualité anglo-ibérique dans les modèles domesticatoires du bétail bovin a été analysée en détails par T. Jordan, North American cattle-ranching frontiers : origins, diffusion and differentiation.
18 Sur ce point fondamental, voir F. Saumade, Maçatl : les transformations mexicaines des jeux taurins ; F. Saumade, J.-B. Maudet, Cowboys, clowns, toreros : l’Amérique réversible.
19 Les Espagnols ont imposé, avec l’élevage bovin extensif, la corrida au Mexique et au Pérou dès les premières années de l’époque coloniale, les traditions du rodéo résultant de l’adaptation consécutive de ce complexe technoludique aux immensités semi-désertiques du continent à l’initiative des Indiens et métis qui gardaient ou attaquaient les troupeaux. L’élevage western et le rodéo, traditions étasuniennes nées au xixe siècle sur les terres du sud-ouest prises au Mexique en 1848, honnies par les idéologues puritains et associations citoyennes pour la protection des animaux, procèdent de ce métissage. Voir F. Saumade, Maçatl : les transformations mexicaines des jeux taurins ; F. Saumade, J.-B. Maudet, Cowboys, clowns, toreros : l’Amérique réversible.
20 F. Saumade, Maçatl : les transformations mexicaines des jeux taurins.
21 Pour une analyse anthropologique de la valeur, voir D. Graeber, Toward an anthropological theory of value : the false coin of our dreams.
Auteur
Professeur à Aix-Marseille Université, membre de l’Institut d’ethnologie méditerranéenne, européenne et comparative (IDEMEC, UMR 7307)
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2016