Communiquer le design par l’exposition. Essai de typologie
p. 213-222
Résumé
Cette étude porte sur les expositions de design et se donne pour objectif de construire une typologie afin de produire des repères pour une recherche ultérieure.
Dans un premier temps, nous étudions les travaux récents sur ce sujet. Nous constatons que chaque typologie est corrélée à un projet de recherche particulier.
Notre projet repose sur la notion d’intention (d’exposer le design) qui se décompose en deux variables, l’attention portée aux créateurs et l’intérêt pour les objets.
En combinant logiquement ces variables, nous obtenons les cinq types suivants rappelant les idéaux types wébériens :
– les expositions de design à coloration scientifique et innovante
– les expositions de design à caractère thématique principal
– les expositions de design présentant les résultats d’un concours
– les expositions d’histoire du design, générale ou sectorielle
– les expositions de type biographique, centré sur l’œuvre d’un designer
Un exemple est fourni pour chaque type et la pertinence du modèle est discutée.
Texte intégral
1Cette étude émane directement de mon intérêt pour les expositions de design, qui s’est manifesté par de nombreuses visites effectuées ces dernières années. Bien évidemment, cet intérêt est en rapport étroit avec mon ancien métier de designer1 et plus récemment de mon activité d’enseignante dans ce domaine. Le design est une activité de conception qui a la particularité de nécessiter une intense communication entre les différents acteurs afin que le projet aboutisse. Une de ces formes de communication est justement l’exposition. C’est un événement qui médiatise, met en scène le design et incidemment peut permettre de développer une réflexion analytique. C’est dans cette perspective que nous avons entrepris une recherche qui devrait se concrétiser prochainement par la soutenance d’une thèse intitulée : « Exposer le design, formes et intentions »2.
2Les premières expositions de design sont des expositions d’arts appliqués qui apparaissent au 19e siècle, dans les musées d’arts décoratifs mais aussi les musées d’art et d’industrie. Les musées de design, dénommés comme tels, n’apparaîtront qu’à la fin du 20e siècle. Le design s’expose aussi dans divers lieux : les musées d’art moderne qui l’inscrivent parfois dans leurs collections mais aussi dans toutes sortes de structures : cité du design, friches industrielles, centres d’art, fondations, musées d’entreprises...
3Dans le contexte de cette recherche s’est posé le problème du choix des terrains d’études et et de leur validation. Comment constituer un corpus d’expositions ? Cela supposait de se repérer dans la diversité de ces manifestations, d’éviter d’oublier certaines formes… Est donc apparue la nécessité de faire un classement, de construire une typologie des expositions de design afin de mieux organiser nos travaux de terrain. À l’origine des expositions, qu’elles se tiennent dans des institutions muséales ou non, qu’elles soient temporaires ou non, il y a toujours une logique d’agencement pour organiser le propos et le communiquer au public. Serge Chaumier nous rappelle qu’ « une mise en ordre du discours dans une optique scientifique d’organisation des savoirs, mais aussi de communication au public, au motif éducatif, s’avère présente dès l’origine du musée moderne »3. Le projet taxinomique permet de découvrir et comprendre, c’est une démarche analytique classique en sciences4. C’est la démarche que nous souhaitons entreprendre pour étudier plus particulièrement un champ de l’exposition qui reste peu questionné, celui des expositions de design. Construire une typologie des expositions de design permettra de rendre compte du phénomène en couvrant le champ concerné par une approche diversifiée faisant appel à de nombreux exemples. Une typologie « implique, comme en philosophie, une explicitation raisonnée des principes « essentiels » des êtres et des choses mais aussi des méthodes expérimentales validant des hypothèses. »5. Elle permet de penser et de classer, les deux actes étant fortement en interrelation comme l’a souligné malicieusement Georges Perec6.
4Au cours de cet article, nous aborderons successivement :
L’examen de quelques études récentes sur des typologies d’exposition.
L’exposé de la problématique de conception adoptée ici, les sources et les principes qui fondent la construction originale de notre propos.
La présentation de la typologie elle-même, illustrée par des exemples d’expositions récentes.
5Enfin une réflexion plus générale sera menée afin d’envisager l’intérêt et les limites de cette proposition et d’examiner un certain nombre de perspectives ainsi ouvertes.
Quelques études récentes autour de la question de la typologie des expositions
6Les expositions étant nombreuses et de nature très diverses, l’idée d’un classement sous forme de catégories ou de types s’est rapidement imposée et il n’est guère d’auteurs s’intéressant au phénomène qui n’ait d’une façon ou d’une autre produit des propositions de classement. Ces travaux seront présentés de façon synthétique grâce à un regroupement thématique des propositions des différents auteurs.
Classement fondé sur une analyse des fonctions remplies par les expositions à partir d’une approche de type empirique
7Ainsi, dans un numéro d’Azimuts consacré à l’exposition du design, Marguerite Davault, Aruna Ratnayake et Xavier De St Jean7, distinguent trois approches différentes de l’exposition en faisant référence principalement à la scénographie. Ils distinguent des formes qui empruntent leur modèle aux espaces commerciaux, de celles qui s’inspirent des outils scientifiques et de celles qui font référence à des pratiques artistiques. Ce point de vue a l’avantage de choisir un angle d’approche très large puisqu’il inclut même les pratiques commerciales. En abordant l’exposition sans définition a priori, il se donne la possibilité d’investir des champs que d’autres auteurs ignorent délibérément.
8Nathalie Heinrich8 quant à elle adopte une entrée clairement fonctionnelle dans une perspective d’analyse généraliste comme dans le modèle cité précédemment. Elle recense quatre fonctions :
la fonction symbolique, glorification religieuse ou politique, liée à la valeur ostentatoire des objets
la fonction commerciale, liée à la valeur marchande
la fonction documentaire, liée à la valeur informative ou scientifique
la fonction esthétique, liée à la valeur artistique des œuvres
9Cela lui permet de ne pas oublier à côté des fonctions classiques, des fonctions plus « politiques » comme la valorisation médiatique d’une collection ou d’un artiste. Notons que ce modèle qui privilégie les fonctions permet de construire des types « idéaux » mais que chaque exposition est en fait une combinaison originale de plusieurs fonctions. Dans cette catégorie, il est possible de ranger aussi une classification qui, tout en s’inscrivant dans une perspective sémiotique, résulte d’une approche empirique et fonctionnelle. Il s’agit du modèle proposé par Jean Davallon selon trois catégories : les expositions d’objets, d’idées et de point de vue9. Ce modèle est étudié et modifié par Serge Chaumier qui propose une variante en quatre catégories : l’exposition d’objet, d’idée, de spectacle et d’interprétation dont les variables associées sont respectivement la finalité, le référent, le modèle et le public10.
Classement fondé sur la définition de l’exposition comme un langage
10Serge Chaumier, qui reprend la typologie de Jean Davallon, insiste sur cette représentation de l’exposition comme langage en étendant la notion à « tout ce qui s’expose »11 (commerce, Facebook,...). Il propose une typologie en fonction de la structure narrative de l’exposition. Six catégories résultent d’une combinatoire de formes de discours d’exposition. La chose exposée désignée par le terme d’expôt prend alors la forme du discours lui-même, du style de discours, de l’occasion du discours, de l’instrument du discours, du support du discours ou du porteur du discours12. Dans un modèle moins complexe, qui tente une synthèse des nombreux travaux qu’ils ont étudiés, André Desvallées, Martin Shärer et Noémie Drouguet13 distinguent quatre langages de l’exposition, à partir du mode d’utilisation principal des objets : le langage esthétique comme œuvre d’art séparée de son contexte, le langage didactique qui renvoie à la signification de l’objet et à la transmission d’un savoir, le langage théâtral qui contribue à la participation émotionnelle, le langage associatif qui combine et juxtapose les objets pour susciter la réflexion. Cette dernière catégorie, que l’on trouve parfois chez d’autres auteurs, a retenu notre attention, car elle décrit une situation où le dispositif effectue un apprentissage sans qu’une intention didactique transparaisse. Ce modèle a été identifié sur le terrain.
Typologies originales
11Elisabeth Caillet élabore sa typologie à partir de concepts clés qui sont des organisateurs de l’exposition14 : elle s’intéresse ainsi au concept déterminé, au concept heuristique, à l’idée de raison et à l’idée esthétique. Cela lui permet de construire sa typologie et de distinguer des expositions à visée documentaire, à visée spéculative, à visée politique et à visée artistique. Ce modèle apparaît centré sur le projet d’exposition, projet qu’elle explicite comme intention pour construire sa typologie. De manière diamétralement opposée, Susan Pearce adopte une typologie organisée autour de 4 verbes : croire, apprendre, admirer, comprendre15. Sans le dire explicitement, elle propose un modèle principalement déterminé par des logiques de réception à partir des conduites supposées de visiteurs dans quatre situations types qui sont associées à ce que l’on pourrait nommer des attitudes. Si la démarche est intéressante, elle présente des limites qui sont liées à la validation des interprétations des conduites en situation de visite d’exposition. On peut aussi évoquer le travail de Raymond Montpetit qui distingue les expositions à logique « exogène, ancrées dans un savoir spécialisée » ou « à logique endogène, fondées sur la communication ». Cette classification différencie les expositions où les objets sont disposés selon « un ordre préalable qui doit être connu et reconnu par le visiteur » de celles « où la disposition des choses montrées est générée selon les besoins identifiés par la mise en exposition elle-même. »16. Enfin, Sarah Cordonnier s’intéresse principalement aux expositions d’art contemporain. À ce sujet, elle repère quatre types d’expositions classées deux par deux17 :
les expositions monographiques, rétrospectives ou sur projet
les expositions collectives, historiques (regard sur l’histoire de l’art) ou thématiques.
12La notion d’auteur ou artiste apparaît ici privilégiée, ce qui n’a rien d’étonnant puisque ses centres d’intérêt portent sur l’art contemporain. Selon elle, il existerait un système de contrainte qui pèserait sur l’organisation des expositions, contraintes d’ordre artistique, politique et (ou) communicationnelle. Elle ajoute qu’on pourrait établir un axe allant de l’exposition destinée au prestige des tutelles (expos d’artistes) à l’exposition destinée au public (didactique) en passant par des expos spécifiques destinées aux experts et amateurs avertis du monde de l’art (figure 1).
13Au cours de cette étude, nous reviendrons sur cette forme de présentation particulière en essayant d’identifier la variable qui permet de construire cet axe de validation.
14Au terme de cette revue des travaux portant sur les typologies d’exposition, nous notons la grande variété des modèles proposés par les auteurs. On peut émettre l’hypothèse selon laquelle chaque classement renvoie à une problématique particulière (ce pour quoi il est fait). Il ne peut y avoir de classement ayant une pertinence globale indépendamment du projet qui a présidé à sa construction. Il conviendra d’esquisser une typologie en partant de l’exposé fondant notre projet.
Conception et principes de construction de la typologie
15Comme nous l’avons déjà précisé en introduction, nous avons l’ambition de rendre compte dans une typologie des différentes variétés d’exposition en les regroupant en catégories distinctes. Cette perspective de classement est donc un préalable à une étude scientifique du domaine de l’exposition de design. En même temps, elle constitue une première tentative de compréhension de ce qu’on appelle une exposition de design.
16Le modèle d’analyse utilisé met en avant le concept d’intention entendu comme le projet implicite et explicite des concepteurs de l’exposition, généralement désignés sous le nom de commissaires et de scénographes. L’exposition est mue par une intention qui se concrétise notamment par son dispositif, forme d’arrangement spatio-temporel et ensemble de règles qui président à son fonctionnement18.
17Nous émettons aussi l’hypothèse que les expositions de design construisent des formes qui empruntent à la fois aux stratégies des musées d’art où l’artiste est particulièrement mis en valeur et à celles des musées des sciences et des techniques où c’est l’objet qui est d’abord présenté à travers ses fonctionnalités.
18Cette intention de conception comporte donc deux variables principales :
19La première (x) concerne plus particulièrement l’attention portée aux créateurs dont les œuvres sont présentées dans l’exposition. Cette manifestation d’attention sera d’autant plus forte que le nombre de créateurs concernés par l’exposition sera réduit. Cette intensité tendra à devenir maximale dans le cas d’une approche biographique concernant seulement un ou deux designers.
20La seconde (y) concerne l’intérêt pour les objets qui sont présentés dans l’exposition. Cet intérêt pourra porter sur des fonctions assurées par ces objets (sans considération particulière pour le travail de création) ou sur des aspects esthétiques (en liaison ou non avec le travail de conception et leur statut d’œuvre artistique).
21Ces variables peuvent être représentées par des axes :
22L’espace de variation de x (figure 2) peut être représenté par une droite qui a pour limites extrêmes :
à gauche l’absence de toute référence aux auteurs des objets qui sont exposés
à droite la consécration d’un designer à travers la célébration de son travail
23L’espace de variation de y (figure 3) peut de la même manière être représenté par une droite avec pour extrémité :
à gauche une présentation des objets sous leurs aspects fonctionnels ou techniques
à droite une mise en valeur de ces objets grâce à une authentification (la chaise de tel grand designer par exemple) ou une forme particulière d’esthétisation.
24Nous pouvons composer ces deux variables x et y, c’est à dire les faire varier simultanément, ce qui revient à adopter une représentation graphique classique selon deux axes orthogonaux ayant la même origine. Nous aboutissons ainsi au schéma suivant :
25Ce croisement permet d’identifier deux types extrêmes (A et E) et de proposer trois types intermédiaires correspondant à différentes valeurs de x et y, (B, C et D).
26Nous allons tenter d’expliciter le contenu de ces cinq types (A, B, C, D et E) mais nous souhaitons avant cela, préciser que ce modèle, qui résulte d’une construction a priori, est fondé sur le croisement fonctionnel de deux variables.
27Il a une double origine :
d’une part, il se rattache à une tentative de modélisation de type mathématique. Il est une construction théorique simple, s’inspirant des fonctions algébriques
d’autre part, il emprunte à la notion d’idéal type, tel que l’a décrite Max Weber19. Celui-ci a fortement contribué à la mise au point d’une méthode qui visait à montrer la possibilité d’une science sociale objective s’appuyant sur une construction rationnelle, rompant délibérément avec l’empirisme.
28Notre démarche est donc très différente des constructions empiriques de typologies qui s’effectuent généralement à partir d’un recensement des caractéristiques essentielles des phénomènes étudiés. Elle procède d’une réflexion portant sur l’intention des expositions qu’elle décrit sous la forme de deux composantes ou variables. Le modèle va exploiter de manière systématique les combinaisons possibles entre les principaux états de ces deux variables. Nous obtenons ainsi une sorte de matrice heuristique qui servira de grille de lecture des cinq types d’exposition de design retenus.
Présentation de la typologie et exemples
29Il n’est pas très difficile de préciser le contenu des types extrêmes A et E, car le sens des bornes de chaque variable x et y a précédemment été donné.
30Type A : ce type se trouve au point de rencontre entre une absence de référence aux créateurs (x) et une présentation d’objets cantonnés à leur dimension fonctionnelle et technique (y).
31On peut reconnaître ici les expositions s’intéressant aux usages et aux fonctionnalités des objets. Dans le cas où la dimension esthétique disparaît complètement, nous basculons hors du champ du design et nous nous rapprochons de présentations concernant plutôt les sciences et les techniques. S’agissant d’expositions de design, on rencontrera surtout des présentations d’objets répondant à des usages déterminés. Elles seront marquées le plus souvent par les dimensions scientifiques et innovantes. Nous pouvons les dénommer : exposition de design à coloration scientifique et innovante. Un exemple est fourni par une exposition qui s’est tenue à la fondation EDF Electra à Paris du 26 avril au 1er septembre 2013. Elle s’intitulait : « En vie, aux frontières du design »20.
32Type E : à l’intersection de la consécration du designer auteur (x) et de la présentation d’objets authentifiés par une signature (y), on peut situer le type E . Dans cette catégorie, se trouvent des expositions où un designer est présenté à travers sa biographie et ses créations les plus emblématiques, souvent de manière rétrospective. Il s’agit d’une célébrité. Ce dernier est parfois invité à participer à la scénographie elle-même. Pour ces raisons, nous choisissions d’appeler ce type : exposition de type biographique, centré sur l’œuvre d’un designer. Nous pensons à un exemple récent : l’exposition « Momentané » consacrée à Ronan et Erwan Bouroullec du 26 avril au 1er septembre 2013 au Musée des Arts décoratifs de Paris21.
33Type C : à mi chemin entre le type A et le type E, on trouve le type C qui correspond à une position moyenne entre les valeurs des 2 variables x et y. Nous situons dans ce type des expositions qui ne se désintéressent pas des auteurs sans leur consacrer une importance primordiale et qui présentent des objets originaux tout en ne négligeant pas leur fonctionnalité. Nous pensons pouvoir reconnaître ainsi un type d’exposition assez représenté dans le monde du design. Il s’agit des manifestations présentant les palmarès, les résultats de concours de design et mettant en valeur les projets élaborés à cette occasion. Nous pouvons nommer ce type : exposition de design présentant les résultats d’un concours. Un bon exemple réside dans cette petite exposition intitulée « Design sur un plateau », organisée à Paris du 6 octobre 2011 au 14 janvier 2012 par une institution d’entreprise, la Milk Factory22.
34Les deux derniers types qu’il nous reste à définir vont nécessairement venir se placer :
pour le type B entre le type A et le type C
pour le type D entre le type C et le type E
35Type B : ce type présente un état des variables x et y proche des valeurs de ces 2 variables dans le type A. Cela signifie qu’une importance majeure est donnée à la fonctionnalité ou à la technicité des objets mais aussi que ceux-ci sont identifiés du point de vue de leur créateur quand il est connu, sans que cela soit particulièrement souligné. Le plus souvent, c’est le cas des expositions ayant principalement un caractère thématique. En effet, le choix de thématiser l’exposition va induire d’accorder une moins grande importance aux auteurs et de donner une plus grande valeur à l’aspect fonctionnel et technique.
36On trouve à l’intérieur de ce type des expositions centrées sur des propositions thématiques originales. Nous proposons de designer ce type par le nom d’exposition de design à caractère thématique principal. Ce type est particulièrement bien représenté parmi la diversité des expositions de design. Nous songeons par exemple à celle organisée par l’association Arcade à Sainte Colombe en Auxois du 16 juillet au 14 octobre 2011 : « Design pour grands crus »23.
37Type D : ce type correspond à un état des variables x et y qui est proche de l’état de ces même variables dans le type E. Il en résulte que l’exposition fera une place de choix aux designers en tant qu’auteurs. Ils pourront être plusieurs mais seront bien identifiés. Cette présentation pourra aussi adopter une démarche offrant la possibilité de comparaisons. Il s’agit donc d’expositions centrées sur des designers de manière comparative ou thématique. C’est souvent le cas dans les approches historiques du design par l’exposition. La perspective historique se prête en effet à des comparaisons à travers les époques. Elle permet une présentation des écoles de design en privilégiant les designers les plus emblématiques.
38Nous choisissons donc de lui attribuer le nom d’exposition d’histoire du design, générale ou sectorielle. Un exemple récent nous est fourni par une manifestation qui s’est tenu à la Cité du design de Saint Etienne du 11 juillet 2013 au 16 mars 2014 : « Histoire des formes de demain »24.
39La typologie présentée ici permet de distinguer et de classer les nombreuses expositions de design inventoriées pour nos travaux de recherche.
40Elle nous a permis de répartir les chantiers de notre terrain d’étude afin de pouvoir introduire de la diversité dans nos enquêtes. De ce point de vue, elle démontre une certaine pertinence. Elle satisfait aussi un critère de cohérence, car ses principes de construction sont en accord avec notre approche de l’exposition comme projet intentionnel.
41Ce classement permet-il de traiter de manière exhaustive toutes les expositions qui ont d’une manière ou d’une autre le design comme objet ?
42Nous n’en sommes pas certains mais nous pouvons préciser qu’aucune des expositions de design qui ont été organisées ces dernières années n’a présenté des caractéristiques qui l’empêchent de trouver une place à l’intérieur de l’un de ces cinq types.
43Une typologie bien construite doit encore satisfaire un critère. Un élément ne peut appartenir à la fois à deux types différents. Il n’est pas sûr que ce critère puisse être facilement respecté dans la proposition de classement que nous faisons. L’appartenance à une catégorie exprime plutôt une caractéristique dominante qu’une relation qui interdirait d’autres possibilités.
44Une suite à ce travail pourra porter sur l’application de cette typologie à un corpus plus important d’expositions de design. Cette démarche plus quantitative pourrait permettre de fournir une nouvelle validation du modèle qui a fait l’objet de cette étude.
Bibliographie
Des DOI sont automatiquement ajoutés aux références bibliographiques par Bilbo, l’outil d’annotation bibliographique d’OpenEdition. Ces références bibliographiques peuvent être téléchargées dans les formats APA, Chicago et MLA.
Format
- APA
- Chicago
- MLA
Caillet Élisabeth & Lehalle Évelyne, À l’approche du musée, la médiation culturelle, Lyon : Éd. Presses Universitaires de Lyon (Muséologies), 1998.
Chaumier Serge, Traité d’expologie, Paris : Éd. de la Documentation Française (Musées-mondes), 2012.
Combessie Jean-Claude, « Typologie », dans Encyclopædia Universalis, publication en ligne : http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/typologie-sociologie/, consulté le 13 avril 2014.
Cordonnier Sarah, Les Sciences humaines dans le centre d’art : convocation des savoirs et institution de l’art contemporain, Cachan : Éd. Hermès Science, Publications-Lavoisier (Communication, médiation et construits sociaux), 2012.
Davallon Jean, L’Exposition à l’œuvre : stratégies de communication et médiation symbolique, Paris : Éd. L’Harmattan (Communication et civilisation), 2003.
Davault Marguerite, Ratnayake Aruna & De Saint-Jean Xavier, « Exposition des expositions », Azimuts, n° 32, 2009, p. 28 - 47.
Desvallees André, Schärer Martin & Drouguet Noémie, « Exposition » dans Desvallées André & Mairesse François (dir.), Dictionnaire encyclopédique de muséologie, Paris : Armand Colin, 2011, p. 136 - 174.
Heinich Nathalie, « Exposition », dans Encyclopædia Universalis, publication en ligne :
http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/exposition/, consulté le 13 avril 2014.
Montpetit Raymond, « Une logique d’exposition populaire : les images de la muséologie analogique » , Public et Musées, n° 9, 1996, p. 55 -103.
10.3406/pumus.1996.1071 :Perec Georges, Penser/Classer, Paris : Éd. du Seuil (La librairie du xxie siècle), 2003.
Regimbeau Gérard, « Petit glossaire des notions centrales de ce numéro ». Hermès, n° 66, 2013, p. 16 -18.
10.4267/2042/51547 :Weber Max, Essais sur la théorie de la science, Paris : Éd. Presses Pocket (Agora, 116), 1995.
Notes de bas de page
1 J’ai exercé le métier de designer, puis de directrice de création dans différentes agences de design pendant une dizaine d’années avant de me consacrer à l’enseignement dans cette discipline.
2 Thèse en sciences de l’information et de la communication sous la dir. du Pr. Marie-Sylvie Poli à l’université d’Avignon et des Pays du Vaucluse.
3 S. Chaumier, Traité d’expologie, p. 20.
4 Dans la revue Hermès n° 66 « Classer, penser, contrôler », Gérard Régimbeau développe une définition de la taxinomie dans le sens où nous souhaitons l’utiliser : « La taxonomie ou (taxinomie) concerne l’étude élargie des lois sur l’ordre des savoirs d’où découle l’analyse compréhensive des règles de la classification. Ainsi la taxonomie scientifique se caractérise dans son histoire par une aspiration à l’arrangement unique, en quête de l’élaboration d’outils de référencement universels, visant l’exhaustivité et l’objectivité dans les diverses formes de classements des savoirs. ». G. Régimbeau « Classer, c’est penser », p. 18.
5 J. C. Combessie, « Typologie » , publication en ligne.
6 En effet, G. Perec nous rappelle les hésitations que l’on rencontre face à ce travail de classement, pour engager sa réflexion : « Que me demande-t-on, au juste ? Si je pense avant de classer ? Si je classe avant de penser ? Comment je classe ce que je pense ? Comment je pense ce que je peux classer ? » . G. Perec, Penser/Classer, p. 151.
7 M. Davault, A. Ratnayake, Xavier De Saint-Jean, « Exposition des expositions », p. 28.
8 N. Heinich, « Exposition » , publication en ligne.
9 J. Davallon précise pour la muséologie de point de vue, qu’objets et savoirs « sont utilisés comme matériaux pour la construction d’un environnement hypermédiatique dans lequel est proposé au visiteur d’évoluer, lui offrant un ou plusieurs points de vue sur le sujet traité par l’exposition. On peut parler à leur propos d’une « muséologie de point de vue ». ». J. Davallon, L’Exposition à l’œuvre : stratégies de communication et médiation symbolique, p. 250.
10 Ibid. p. 42-43.
11 Ibid. p. 11.
12 Ibid. p. 98-99.
13 A. Desvallées, M. Schärer & N. Drouguet, « Exposition » , p. 154.
14 Elle invite à s’interroger sur non pas sur la nature de l’objet exposé (esthétique, scientifique, historique, ...) mais plutôt sur le concept de la muséographie qui va influencer le jugement du visiteur. É. Caillet et É. Lehalle, à l’approche du musée, la médiation culturelle, p. 69.
15 Cette typologie est rapportée par S. Chaumier : ibid. p. 54.
16 R. Montpetit, « Une logique d’exposition populaire : les images de la muséologie analogique », p. 87.
17 S. Cordonnier, Les Sciences humaines dans le centre d’art, p. 149.
18 Cette problématique, qui est au cœur de notre travail de recherche, est simplement ici mentionnée pour mémoire, car elle n’est qu’indirectement liée à l’étude portant sur la construction de la typologie.
19 M. Weber, Essais sur la théorie de la science, p. 172 -173.
20 Cette exposition rendait compte de la présence de la nature dans les créations de designers et d’architectes, que ce soit comme source d’inspiration ou plus particulièrement dans le rapport aux biotechnologies. Il s’agissait majoritairement de créations prospectives qui venaient illustrer une réflexion écologique et éthique sur ce que l’on nomme le « co-design » avec la nature.
21 L’exposition présentait toutes les facettes du travail des deux designers : les cloisons modulaires, l’univers du bureau et l’environnement domestique en mettant en scène divers objets de leur production mais aussi des éléments de leur processus de réflexion comme des dessins, des photos, des maquettes ou encore des vidéos. De telles manifestations contribuent au vedettariat des créateurs.
22 La Milk Factory présentait les créations de plusieurs designers répondant concurremment à un cahier des charges fourni par le commissaire de l’exposition pour revisiter le plateau de fromage utilisé dans un cadre domestique. On pouvait apprécier la créativité des réponses présentées dans un dispositif se prêtant à une comparaison.
23 Cette exposition avait pour thématique le vin et présentait des créations en relation avec ce thème : objets en verre, graphisme sur support papier...
24 Cette exposition retraçait une histoire du design en présentant des créations emblématiques à partir de la révolution industrielle jusqu’aux années 2000. On pouvait ainsi comprendre l’imbrication des écoles de design à travers le temps, les continents et les grands changements qui affectent cette discipline.
Auteur
Professeur d’arts appliqués
Doctorante en sciences de l’information et de la communication
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Signes et communication dans les civilisations de la parole
Olivier Buchsenschutz, Christian Jeunesse, Claude Mordant et al. (dir.)
2016