Des sommets des Pyrénées à la cartographie de la Grèce : Pierre Peytier (1793-1862)
Résumé
Dans le cadre fixé pour le Congrès des sociétés historiques et scientifiques de 2017, « Circulations montagnardes et européennes », qui se tenait à l’université de Pau et des pays de l’Adour, la carrière de Pierre Peytier (1793-1862), qui a œuvré dans les Pyrénées puis en Grèce, a été examinée. Ses travaux s’insèrent, principalement à partir de 1816, dans le projet de nouvelle carte de France, projet qui réalisera ce qui s’est appelé la Carte d’état-major. Puis, entre 1828 et 1836, Peytier est appelé comme ingénieur-géographe du Dépôt de la guerre à être associé aux savants de l’expédition de Morée, chargée de contribuer à la cartographie de la Grèce. Il rédigera en outre le troisième volume du tome IX du Mémorial du Dépôt général de la guerre en 1853.
Texte intégral
1La loi du 21 ventôse an II (11 mars 1794) crée l’« École centrale des travaux publics », en sorte qu’y soient formés ceux qui auront pour tâche d’œuvrer « Pour la Patrie, les Sciences et la Gloire ». L’École polytechnique figure, sous cet intitulé, dans les créations de l’An III (1795). Ce sera aussi le cas, notamment, du Bureau des longitudes et de l’Institut de France, lequel comprend l’Académie des sciences ; le service du Cadastre est également créé. Cette école fournira nombre d’ingénieurs-géographes et de cadres du corps d’État-major. L’école doit fournir des « Ingénieurs-Géographes pour la levée des Cartes générales et particulières de terre et de mer ».
2Les premières promotions de la nouvelle école seront bientôt à l’œuvre, tel Corabœuf (X 17941), relevant de la première d’entre elles, alors qu’elle n’est pas encore appelée École polytechnique. Corabœuf sera l’un des géodésiens de la campagne d’Égypte. D’autres suivront et, parmi eux, Peytier (X 1811) et Hossard (X 1816 ou 17), qui vont s’illustrer dans les Pyrénées.
La Commission pour la carte de France
Vers une nouvelle cartographie de la France
3Partant vers l’est de la France pour ses campagnes en Europe, Napoléon trouve insuffisante la carte de France à laquelle ont œuvré les Cassini ; ce serait apparu lors des relevés de terrain effectués par les ingénieurs-géographes participant aux opérations, intégrés aux troupes. Les événements ayant suivi les remarques de Napoléon en 1808 retarderont les décisions, si bien que c’est seulement en 1817 qu’il sera décidé de créer une nouvelle carte de France.
Le rôle de Laplace
4En octobre 1816, le « Projet de nouvelle carte de France » est soumis à une commission de quatorze membres, dont le président est Laplace ; il a alors près de soixante-dix ans. C’est un savant connu et reconnu, que ses travaux situent dans la ligne de Newton, et à qui la position de pair de France, membre de l’Académie, du Bureau des longitudes, etc., fournit de l’autorité. Le vice-président est Delambre, du même âge, dont la réputation n’est plus à faire depuis ses contributions à la création du système métrique décimal finalisé en 1799. Le secrétaire est presque un jeune homme, puisqu’il a vingt années de moins ; il s’agit de Puissant.
5Le texte intitulé « Précis du projet » est présenté le 14 octobre 1816 à Son Excellence le ministre de la Guerre par Laplace. On peut y lire notamment :
« Malgré l’estime dont jouit, à beaucoup de titres, la carte de Cassini, on ne saurait aujourd’hui contester, 1° que ce grand œuvre ne soit imparfait […] et principalement dans celles qui forment les limites actuelles de la France ; 2° que les changements innombrables [sont intervenus. La] grande topographie dont les Cassini furent les créateurs a stimulé diverses puissances d’Europe à de semblables entreprises [… Nous devons nous] procurer une nouvelle topographie de notre sol, propre à nous assurer une supériorité que nous avons tant de motifs et de moyens de reconquérir2. »
6Le 21 mars 1817, Laplace présente le projet à la Chambre des pairs, rappelant entre autres considérations :
« La France a, pour l’exécution de ce système, tous les moyens que l’on peut désirer, les savants les plus capables de les diriger ; un corps d’ingénieurs très instruits qui ont fait ce que l’on a de mieux dans ce genre et auxquels on peut adjoindre des officiers d’artillerie et du génie […]. Je désire que les ministres veuillent bien prendre en considération le plan que je propose […]. Conservons parmi nous la gloire des sciences et des beaux-arts3. »
7À l’instigation du maréchal Gouvion Saint-Cyr, il est décidé de créer une nouvelle carte de France, et le 6 août 1817 paraît une ordonnance royale à ce sujet.
Le rôle de l’École polytechnique
8Un rapport d’exécution est établi et l’École polytechnique en est chargée. Pour ce faire, en préliminaire, il conviendra d’établir trois chaînes de triangles en longitude et cinq chaînes en latitude avec, au total, 35 000 points de repère. La carte sera finalement établie avec sept parallèles pour les longitudes et cinq méridiennes pour les latitudes. Pour les longitudes, celle qui correspond au méridien de l’Observatoire de Paris – parcouru déjà à plusieurs reprises depuis sa création en 1667 – en constitue la référence fondamentale. Pour les latitudes, le parallèle de Paris s’impose aussi, établi en premier lieu par Cassini II.
9La carte, appelée Triangulation de la France, étant ainsi fixée, selon ce qu’avaient écrit les rédacteurs du projet en débutant par : « […] tracer deux grandes lignes perpendiculaires entre elles, et dirigées l’une au nord, l’autre au sud ; l’autre de l’est à l’ouest ». Le texte complétait : « On couvre tout l’espace à mesurer d’un réseau de triangles que l’on rattache à ces lignes4 ». Il s’agit de la méridienne et du parallèle de Paris, auxquels les autres seront rattachés, permettant ensuite de leur associer tous les triangles dont l’ensemble constituera la nouvelle carte de France. Le parallèle situé le plus au sud de la France est celui appelé parallèle des Pyrénées.
10En 1818, le corps des officiers d’état-major est créé et ses membres seront pour beaucoup issus de l’École polytechnique.
Pierre Peytier et la triangulation des Pyrénées
Les acteurs de la chaîne des Pyrénées
11La réalisation de cette chaîne est placée sous la responsabilité, comme chef du groupe concerné, de Jean-Baptiste Corabœuf (né en 1777 à Nantes, décédé en 1869). La chaîne des Pyrénées, comprenant de hauts sommets à gravir, est répartie en une partie orientale sous les ordres de Corabœuf, dont le principal adjoint est Jean Prosper Testu, né à Rouen en 1797. Pour la partie occidentale, c’est Pierre Peytier (Jean Pierre Eugène Félicien Peytier) qui assume les responsabilités ; il est né le 15 octobre 1793 à Genestelle, en Ardèche, de Pierre Peytier et de Marianne Gleizal, devenu X 1811, et décèdera le 2 février 1864. Son principal collaborateur est Paul Michel Hossard (né le 15 mai 1797 à Angers et décédé le 8 juin 1862).
L’instrument des ingénieurs-géographes
12L’astronomie géodésique ou la géodésie astronomique, fondée depuis Picard et utilisée au xviiie siècle par les Cassini et leurs collaborateurs, avait vu s’accroître la qualité et la précision des instruments. Et ceci, grâce aux « artistes », ainsi qu’on désignait à cette époque ceux qui possédaient l’art de les réaliser ; mais ils avaient peu évolué dans leur structure et leur forme.
13Un instrument nouveau était apparu dans les années 1780 ; il résultait de l’évolution de l’octant de marine, né en Grande-Bretagne avec Hadley et sa publication de 1732. Employé par les expéditions françaises au Pérou et en Laponie motivées par l’étude de la forme de la Terre, ces outils avaient montré leur efficacité. L’octant, devenu sextant de marine, a inspiré à Mayer, dont les travaux ont débuté en 1752, le cercle entier répétiteur, utilisé à la mer pour déterminer les coordonnées locales. Borda, vers 1780, en fait un instrument pour les coordonnées terrestres. Le fabricant d’instruments Etienne Lenoir parvient à le réaliser sous la forme d’un cercle répétiteur à deux cercles et deux lunettes, à utiliser soit pour les déterminations d’azimuts pour la géodésie, soit pour celles des distances zénithales astronomiques (fig. 1). Il est utilisé pour la première fois en 1787, à l’occasion du raccordement géodésique des méridiens des observatoires de Paris et de Greenwich, qui se révéla être un succès.
14Devant cette réussite franco-britannique, Cassini IV contrôla la qualité de cet instrument pour les déterminations astronomiques ; en effet, la réalisation des opérations cartographiques nécessite, comme à la mer, la connaissance des deux coordonnées locales des lieux. Ses deux lunettes étant employées alternativement pour les azimuts, l’instrument – ayant son plan situé dans celui des sommets des triangles successifs – évite les lectures successives du cercle ; il permet, en outre, de gagner en précision pour les mesures. Les cercles, placés dans le plan vertical et réglés grâce au niveau qui équipe l’un d’entre eux, conduisent, avec le concours d’un second observateur lecteur de l’horloge associée, à l’obtention de la distance zénithale de la référence astronomique observée, que constituent des étoiles de position bien connues.
Les ingénieurs-géographes sur le terrain
15C’est avec cet instrument, transporté d’un lieu de référence à un autre, le plus souvent d’un sommet à un autre de la chaîne des Pyrénées, que se réalise en plusieurs étapes, par Peytier, Hossard et leurs collaborateurs, la partie occidentale de cette chaîne (fig. 2) ; y figure également ce qu’on appelle la base de Dax. Le tracé trigonométrique représente l’ensemble des triangles correspondant, en premier lieu, aux points de premier ordre ; s’y ajoutent les triangles les complétant avec les points de deuxième ordre.
16Toute opération de triangulation nécessite, après les déterminations angulaires d’azimut, et en vue de la réalisation cartographique, la connaissance des dimensions au sol ; elle s’obtient à partir d’un triangle dont un des côtés constitue une base, souvent une dizaine de kilomètres, que l’on mesure un assez grand nombre de fois. De la sorte, l’ingénieur-géographe dispose d’un côté d’un triangle, de longueur bien connue, qui lui servira à déterminer la longueur des autres côtés du triangle et, de proche en proche, il obtiendra les dimensions entières de sa triangulation.
17Les ingénieurs-géographes chargés des méridiennes opéreront par la même méthode de triangulation ; en outre, ils auront besoin de connaître de place en place la latitude des lieux qui la fixent. C’est en position verticale de l’instrument qu’ils pourront l’obtenir.
18Le Congrès national des sociétés historiques et scientifiques tenu à Pau en 2017 a donné l’opportunité à Bernard Flacelière, rédacteur en chef de la revue XYZ publiée par l’Association française de topographie, lui-même géodésien, topographe, cartographe comme Pierre Peytier, d’organiser un déplacement au val d’Azun, en direction du col du Soulor, où se trouve le monument érigé « à la Mémoire des géodésiens de la triangulation de la chaîne des Pyrénées ». Les noms des quatre hommes qui en eurent la responsabilité en 1825 y figurent, dont celui du lieutenant Peytier (fig. 3).
Pierre Peytier en Grèce : l’expédition de Morée
19Cette expédition constitue un deuxième aspect de la carrière de Peytier, qui séjourna en Grèce entre 1828 et 1836, se consacrant à la cartographie du pays dans la ligne de ses travaux d’ingénieur du corps d’état-major de 1818. Selon Stelios Papadopoulos, écrivant en 1971, Pierre Peytier s’est rendu en Grèce sur l’invitation du président Capodistria en 18285 ; soit dans l’année où, selon l’étude de Numa Broc, se fait jour l’idée d’envoyer en Grèce une « commission scientifique qui accompagnerait l’armée, sur le modèle de la glorieuse Commission d’Égypte ». Numa Broc ajoute que c’est à la demande du directeur du Dépôt de la guerre que « les ingénieurs-géographes sont étroitement associés aux savants dans le but de dresser une carte à grande échelle de la Morée6 ».
La carte de Grèce
20Peytier va donc se joindre au corps expéditionnaire qui parvient aux côtes de la Grèce le 3 mars 1829. Dès le 9 mars, la commission de Morée réunit son matériel, et bientôt Peytier organise des brigades topographiques. Rapidement, une base est fixée et mesurée sur 3,5 kilomètres, de manière à se trouver disponible pour la triangulation à entreprendre. En dépit de la fatigue et des conditions de l’été à la latitude du pays et de quelques décès, les travaux avancent, si bien que Peytier et ses collègues rentrent en France en 1831.
21C’est justement en 1831 que les deux corps employés à la cartographie sont réunis par une ordonnance en date du 22 février. Le fils de Laplace, Charles-Émile, né à Paris le 5 avril 1789, y appartiendra ; il décèdera à Paris le 27 décembre 1874.
22Selon Stelios Papadopoulos et Agapi Karakatsanis :
« Peytier revint en Grèce le 28 mars 1833 et y resta jusqu’au mois de mars 1836 pour diriger la plus grande partie des travaux en vue de l’élaboration de la carte complète du royaume de Grèce de cette époque, carte qui fut définitivement publiée sous sa direction en 18527. »
23La carte de la Morée ainsi réalisée a été établie, par ordre de M. le maréchal duc de Dalmatie, ministre de la Guerre, au 1/200 000e en six feuillets ; elle a été obtenue après de nombreuses vérifications portant sur les positions locales des lieux représentés. Il a fallu également contrôler des éléments ayant servi à la détermination des mesures de caractère tant géodésique qu’astronomique. Les instruments employés étaient des théodolites, ne paraissant pas plus précis que les cercles de Borda de Lenoir ; mais étant de plus petites dimensions, ils étaient plus maniables et plus faciles à transporter d’un lieu à l’autre.
Le Mémoire sur la Grèce de 1838 et sa publication
24Les séjours de Peytier, au cours desquels il a effectué pour établir la carte de la Grèce de nombreuses mesures et les calculs qui en dérivaient, lui ont aussi donné l’opportunité de noter dans un mémoire différentes remarques sur ce pays alors qu’il y circulait. Stelios Papadopoulos écrit à ce sujet :
« Le manuscrit du Mémoire sur la Grèce, écrit et signé par Eugène Peytier, est conservé dans le dossier 1628 de la série des Mémoires […] des archives du Service historique de l’armée (Vincennes) […]. La note de Peytier sur la couverture prouve que le texte n’était pas considéré par lui comme définitif, surtout en ce qui concerne le style8. »
25La date, précédant seulement son nom, est du 19 mars 1838, et Papadopoulos mentionne un sceau portant l’inscription « Ministère de la Guerre, Dépôt de la Guerre, Documents statistiques ». Papadopoulos a indiqué que le manuscrit comportait 56 feuilles au format 32 × 20 cm. Une première partie, consacrée au thème « Description physique » débute avec le chapitre « Position géographique » : latitude, longitude de différents lieux considérant d’entrée les parties extrêmes du pays, poursuivant avec la superficie, la configuration du pays, etc.
26Pierre Peytier achève avec des considérations sur l’armée grecque, sous différents aspects, en examinant la composition de l’armée et indiquant : « Une ordonnance récente fixe l’effectif de l’armée régulière à 8 000 hommes ». La dernière phrase du manuscrit concerne l’école militaire grecque : « L'École militaire est commandée par un colonel. Son personnel est de 80 élèves et de 10 officiers ». On remarque que la date précédant la signature est le 20 mars 1838. Peytier a rédigé rapidement son mémoire, sans doute à partir des notes d’informations recueillies au fil du temps.
Pierre Peytier et le Mémorial du Dépôt général de la guerre
27Une année après la parution de la carte de la Grèce, Peytier publie le volume 3 du tome IX du Mémorial du Dépôt général de la guerre, réorganisé par Calon après 1795. Patrice Bret, qui en a fait l'étude, écrit au sujet du Dépôt général de la guerre :
« La politique ambitieuse de Calon, son directeur, se heurta à la rivalité d'autres institutions civiles et militaires […]. Le pouvoir napoléonien posa les bases rationnelles de la cartographie moderne et mit fin à la précarité du statut des ingénieurs-géographes en militarisant leur corps […]. Le Dépôt général de la guerre était alors, entre l'École polytechnique et le Bureau des longitudes, une institution savante reconnue par la communauté scientifique9. »
28Ce tome IX du Mémorial du Dépôt général de la guerre s’intitule Nouvelle description géométrique de la France (« nouvelle » puisque Cassini de Thury avait publié en 1783 l’ouvrage Description géométrique de la France). L’ouvrage comporte trois volumes.
29Dans le premier volume, publié en 1832, Louis Puissant a d’abord repris l’historique du projet. Tout ce que voudrait savoir un lecteur curieux des réalisations cartographiques du xixe siècle, sur lesquelles la population française a vécu au siècle suivant, s’y trouve, le plus clairement exposé. Dans la deuxième section se trouvent les résultats des éléments fondamentaux, tant en géodésie qu’en astronomie. L’ensemble s’étend sur plus de six cents pages. Outre le « Précis des opérations », y figure la « Triangulation générale », laquelle comprend – on l’aura compris – la chaîne des Pyrénées…
30La « Description de la chaîne trigonométrique des Pyrénées » figurant dans ce volume 1 est due à Corabœuf, responsable de l’ensemble de l’opération ; au sujet du choix des stations, il précise : « Afin d’accélérer la marche des opérations, dont l’exécution devait offrir tant de fatigues à supporter les travaux furent répartis10 » – comme on l’a vu – entre deux équipes, celle qu’il dirigeait et celle de Pierre Peytier. On y trouve le tableau des triangles, les positions géographiques des points de premier ordre, puis de second ordre, les noms des points de la chaîne au nombre de 43 pour le premier ordre et de 120 pour le second ordre.
31Les observations astronomiques concernent les distances zénithales des étoiles observées aux points de premier ordre, les hauteurs absolues de chacune des deux parties de la chaîne. On remarque que le sommet le plus haut est celui du pic de Baletous (figurant dans la partie confiée à Peytier) à 3 150 mètres (valeur arrondie au mètre), et que l’expédition d’ensemble a dû monter sept fois au-dessus de deux mille mètres. Pour les données des points de second ordre, six pages leur sont consacrées.
32Alors que ce volume 1 était consacré aux opérations menées jusqu’en 1831, le volume 2 conduit Puissant à consacrer la troisième section aux principaux résultats trigonométriques obtenus entre 1832 et 1837. La quatrième section est consacrée aux observations astronomiques. Une carte générale des triangles est annexée à ce volume, qui sera publié en 1840. Le délai pour la publication s’explique par le fait que Corabœuf avait dû effectuer une révision des nivellements géodésiques de l’ensemble des opérations.
33Pierre Peytier a rédigé le troisième volume, publié en 1853. Il débute par un avant-propos rappelant ce que contenaient les volumes 1 et 2, spécifiant que :
« Le IXe volume du Mémorial qui forme la troisième et dernière partie de la Nouvelle Description géométrique de la France complète les deux premières, en précisant les résultats des opérations exécutées depuis 1839 jusqu’en 1844 et 1845, époques auxquelles ont été terminées les observations géodésiques et astronomiques11. »
34Dans ce volume, Pierre Peytier fait connaître qu’il a succédé en 1850 à Corabœuf comme chef de la première section du dépôt, lequel avait lui-même succédé à Puissant. La cinquième section complète la triangulation déjà partiellement publiée ; il s’agit notamment des triangles de différents parallèles. La sixième section constitue la suite des observations astronomiques ; elle est complétée d’un supplément relatif à quelques oublis et/ou rectifications aux sections antérieurement parues. Suivent quelques notes de Peytier sur les opérations géodésiques, concernant en fait les nivellements, la mesure des bases, etc. Ce troisième volume s’achève sur onze planches : triangles fondamentaux, signes conventionnels des cartes, études de courbes… Au total près de 550 pages et planches.
35Pour établir ce qui est devenu la carte d’état-major de la France, il aura ainsi fallu trente-cinq années, pas beaucoup moins que pour celle des Cassini ! Cette nouvelle carte, établie au 80 000e, va donner lieu aux premières cartes polychromes au 50 000e publiées par le Dépôt de la guerre de 1855 à 1880. L’étude historique des travaux qui ont suivi, toujours à partir de cette même carte, ayant bénéficié de levés de précision, se trouve sous la plume d’un autre ingénieur-géographe, Huguenin, dont l’ouvrage historique est de 194812.
36Les opérations géodésiques comme astronomiques, tant en Grèce que dans les Pyrénées, menées par Peytier comme par beaucoup d’autres, ont permis de faire connaître une nouvelle fois l’ensemble des travaux dont résultent les belles cartes du Service géographique de l’armée comme de l’Institut géographique national. Les méthodes développées en France depuis Picard et les Cassini sont à l’origine de celles mises en œuvre par leurs successeurs, en Europe comme dans le monde entier. Et si les uns et les autres circulent et visitent tant de lieux, c’est à des hommes comme Peytier qu’ils le doivent. Ce dernier méritait bien, grâce au Congrès national des sociétés historiques et scientifiques, que quelque hommage lui soit rendu par le récit de ses activités.
Bibliographie
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Levallois Jean-Jacques, « Mesurer la Terre : 300 ans de géodésie française », Paris, Presses de l'École nationale des Ponts et Chaussées / Association française de topographie, 1988.
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10.12681/er.9950 :Papadopoulos Stelios A. et Karakatsani Agapi A., The Peytier album ; liberated Greece and the Morea scientific expeditions, Banque nationale de Grèce, Athènes, 1971.
Peytier Jean Pierre Eugène, Mémorial du Dépôt général de la guerre, t. IX, vol. 3 : Nouvelle description géométrique de la France, Paris, C. Picquet, 1953.
Puissant Louis, Mémorial du Dépôt général de la guerre, t. IX, vol. 1 : Nouvelle description géométrique de la France, Paris, C. Picquet, 1932.
Notes de bas de page
1 Le code « X » signifie diplômé de l’École polytechnique ; l’année qui suit indique la promotion.
2 L. Puissant, Mémorial du Dépôt général de la guerre, t. IX, vol. 1 : Nouvelle description géométrique de la France, p. 4 et suiv.
3 Ibid., p. 7 et suiv.
4 Ibid.
5 S. Papadopoulos et A. Karakatsanis, The Peytier album.
6 N. Broc, « Les grandes missions scientifiques françaises au xixe siècle », p. 320 et suiv.
7 S. Papadopoulos et A. Karakatsanis, The Peytier album, p. 121.
8 Ibid., p. 122.
9 P. Bret, « Le Dépôt général de la guerre et la formation scientifique des ingénieurs-géographes militaires en France », p. 113.
10 Ibid., p. 335.
11 J. P. E. Peytier, Mémorial du Dépôt général de la guerre, t. IX, vol. 3 : Nouvelle description géométrique de la France, p. iii.
12 M. Huguenin, « Historique de la cartographie de la nouvelle carte de France ».
Auteur
Observatoire de Paris, Bureau des longitudes
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Signes et communication dans les civilisations de la parole
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2016