La chasse vers l’inconscient : métaphores cynégétiques de la confession dans Le Livre de Seyntz Medicines
Résumé
L’article examine l’usage dévotionnel des métaphores animalières dans un texte pieux anglo-normand du xive siècle, Le Livre de Seyntz Medicines de Henri de Lancastre. Afin de s’attaquer aux peccata cordis, la confession se transforme dans une exploration de l’inconscient (conçu en termes augustiniens comme ce qui est inaccessible à l’esprit). La multiplication du péché dans les zones d’ombre de la psyché est décrite à travers une multitude de métaphores de génération animale, tandis que l’acte de la confession est allégorisé comme une chasse aux renards se déroulant dans les régions souterraines du cœur. L’animal sert ainsi à donner une expression à l’indicible, à décrire et ainsi expurger le péché logeant dans l’inconscient.
Texte intégral
1Cet article se propose de mettre en exergue l’usage des métaphores animales dans l’exploration de l’inconscient dans un texte confessionnel anglo-normand du xive siècle, Le Livre de Seyntz Medicines. Au lieu d’avoir recours à des notions modernes sur la constitution du moi, nous allons appuyer notre analyse sur la théorisation des parties obscures de l’être mise en place par le texte lui-même. L’imagerie animalière joue un rôle prépondérant dans la représentation des soubassements du moi que le pénitent se doit d’explorer dans le cadre d’une confession compréhensive s’attaquant notamment aux péchés enfouis aux tréfonds de l’être, les peccata cordis1.
2La question de la relation des représentations médiévales de l’inconscient à l’animal mériterait une étude plus approfondie. La maîtrise des pulsions instinctives est d’ordinaire mesurée à l’aune du rapport extérieur avec l’animal. Plusieurs genres médiévaux établissent un lien entre l’apprivoisement de l’inconscient et celui des bêtes sauvages. Ainsi, dans la littérature hagiographique, la docilité des animaux à l’égard des saints peut être interprétée comme un témoignage de leur pureté morale2. De même, dans les traités de fauconnerie, l’affaitage des rapaces dépend de la maîtrise que le veneur peut exercer sur lui-même. Les vices répugnent aux nobles oiseaux de proie, d’où l’association des arts de la chasse à la moralité3. « Le mestier de fauconnerie/Requiert homme de honneste vie » (v.1983-1984)4, selon le Roman des Déduis. Dans la préface de son traité cynégétique, Gaston Phœbus va jusqu’à promettre le paradis à tout veneur5. Comme la chasse permet d’éviter l’oisiveté, elle est valorisée comme une propédeutique du contrôle des mauvaises pensées. Depuis l’Ethique d’Abélard, le péché de pensée (en intentio) a acquis un poids très important dans l’économie du salut, ce qui permet au comte de Foix d’avancer la promesse du Paradis à ceux qui arrivent à s’en garder grâce à l’exercice de la chasse.6
3Contrairement aux exemples ci-dessous où le comportement des animaux extérieurs à l’individu modèle l’état de la psyché, les métaphores animalières du Livre des Seyntz Medicines sont insérées à une véritable représentation allégorique de l’espace de l’intériorité, qui est d’autant plus intéressante que le traité a été écrit par l’un des nobles les plus influents à la cour de Edward III, Henri de Grosmont. Contrairement à son père, qui s’était opposé à la royauté, Henri de Grosmont s’y est rapproché à travers son service diplomatique et militaire. Il a combattu en Écosse en 1336 en tant que lieutenant du roi, en Aquitaine (1345) et en Bretagne (1355) au début de la Guerre de cent ans, ce qui lui a valu des honneurs exceptionnels de la part du souverain. Perçu comme un parangon de la chevalerie européenne, il a été nommé parmi les chevaliers fondateurs de l’Ordre de la Jarretière. Le roi a également transformé le comté de Lancastre en palatinat et lui a octroyé le titre de duc de Lancastre (distinction nouvelle, ayant auparavant été accordé au seul dauphin, le Prince Noir)7. Les chroniqueurs se sont prévalus de sa réputation pieuse et chevaleresque pour donner du crédit à la nouvelle dynastie de Lancastre, dont ils le donnent pour ancêtre fondateur : à travers sa fille Blanche, il est le grand-père de Henri IV8.
4Le Livre des Seyntz Medicines se présente comme un exercice pieux en deux parties, auquel le duc se serait adonné grâce aux injonctions de son confesseur9. Développant les métaphores jumelées du péché comme blessure et du Christ comme médecin, la première partie représente l’examen de conscience comme dissection d’un corps malade, alors que la deuxième partie porte sur les remèdes spirituels qui peuvent être puisés dans la contemplation de la Passion. Les comparaisons liées à la guérison spirituelle puisent dans un savoir médical pragmatique : par exemple, Henri de Lancastre assimile les effets de la contemplation à ceux d’un coq éventré placé tout chaud sur la tête d’un malade mental où donne la recette de l’extraction de l’eau de roses. Ce côté pragmatique semble avoir intéressé en propre, car, à part les deux témoins complets dans lequel le texte nous est parvenu, le manuscrit Blackburn (Lancs) Stonyhurst College, 24, qui a servi comme base de l’édition de Arnould et le manuscrit Corpus Christi College, Cambridge 21810, des fragments concernant des recettes médicinales extraites du texte ont été conservés séparément11.
5La traductrice du Livre des Seyntz Medicines, Catherine Batt, lui reconnaît un amateurisme savant, qui réhausse le ton très personnel de l’œuvre et l’éloigne des sommes didactiques et des traités catéchétiques produits à foison après Latran IV, auxquels le texte emprunte pourtant ses classifications des péchés et une grande partie de son imagerie12. Plutôt que d’essayer à inculquer des typologies pénitentielles, le Livre des Seyntz Médicines les présuppose acquises. Rédigée à la volée, en « journées » que Henri de Lancastre a pu dérober à ses occupations, la confession s’interrompt pour marquer le temps liturgique des Pâques par une méditation sur la Passion.
6L’intérêt de cet exercice dévotionnel privé réside dans l’isolement d’une section à part dédiée à la confession des peccata cordis, qui délaisse le sentier battu de l’énumération des péchés capitaux selon les cinq sens qui organise le début de la partie confessionnelle, afin de se lancer dans une exploration du paysage allégorique du cœur, visant à évincer le même type de péché intérieur auquel faisait allusion Gaston Phoebus.
7L’originalité du traitement des peccata cordis chez Henri de Lancastre est de les saisir dans leur propension à se dérober à la conscience, ce qui aboutit au paradoxe de la nécessité d’une confession de ce que l’individu ignore sur lui-même. L’acte de l’aveu doit dépasser les frontières de la connaissance lucide et franchir le pas de l’inconscient.13
8L’étonnante exigence d’une confession qui repousse les limites de la connaissance de soi au-delà de ce qui est ontologiquement accessible aux prises de conscience puise son origine dans le modèle anthropologique augustinien. Dans le livre X des Confessions, Saint Augustin affirme que la connaissance de soi est nécessairement entravée, en raison de l’existence des régions de l’être qui ne sont pas immédiatement accessibles à l’esprit. Les antres de la mémoire recèlent un savoir « inconscient » qui alimente toutes les recherches métaphysiques de l’homme, car personne ne peut chercher quelque chose dont il ne garderait point l’ombre d’un souvenir. La spécificité du projet confessionnel augustinien est donnée par l’étroite association de la quête de soi à la quête de Dieu, synthétisée dans la célèbre formule noverim me noverim te. D’un côté, Dieu est à chercher dans les ténèbres de la mémoire inconsciente, d’un autre côté sa révélation progressive jette de la lumière sur la nuit du moi profond :
« Je vais donc confesser ce que je sais de moi, et aussi ce que j’en ignore, puisque ce que je sais de moi, je ne le sais qu’en tant que vous m’éclairez, et ce que j’en ignore, je l’ignore jusqu’à ce que mes ténèbres se muent « en un plein midi » devant vos yeux. »14
9L’homme a une compréhension entravée de soi-même, mais est en revanche parfaitement transparent pour un Dieu qui sonde le cœur et les reins. Il ne peut se connaître que dans la révélation de la connaissance que Dieu a de lui. À la fin des temps, il ne sera pas jugé sur la conscience partielle et partiale qu’il a de lui-même, mais sur sa véritable nature telle qu’elle est connue par Dieu. La confession devient donc un exercice d’ajustement de la vision de soi, nécessairement superficielle, à la perception des abîmes de l’être qui est le propre de Dieu. Une confession qui vise ainsi à dévoiler les profondeurs du cœur ne peut pas se borner aux actes peccamineux que l’individu est conscient d’avoir commis, mais doit trouver les moyens de dépasser le paradoxe de l’impératif d’une expression de ce que l’individu ignore sur lui-même et se lancer dans une exploration de l’inconscient.
10Afin de ne pas tomber dans l’anachronisme, le mot « inconscient » dénotera par la suite les régions du soi ontologiquement obscures à la conscience dans l’acte de surveiller l’étendue de l’être. Selon le modèle anthropologique hébraïque15, Henri de Lancastre localise ces zones d’ombre dans le cœur et non pas dans la mémoire comme chez Saint Augustin.
11Le cœur se trouve au centre d’une circulation peccamineuse entre l’univers de l’intériorité et le monde. Les intentions conçues dans le cœur finissent par se matérialiser dans des péchés in facto. Cette maturation du péché est représentée par une série d’images animalières qui font du cœur un terrain de génération du péché. Le cœur est représenté comme un terrier de renards où ceux-ci se retirent pour se multiplier.
« Et les renars, quant il ont fait ascun male, trop bien se savent retraire et la reposer tantqe il voient lour temps, et se muscent la qe homme ne les poet veoir tantqe ils venent hors de pertuz qe sont de toutz partz ; et en ces pertuz fount ils de joefnes, et c’est tout dedeinz en l’angle ; et qi les lerroit a covenir, ils multipliroient tant qe grant damage par toute le paiis ferroient. »16
12Les renards ne sont visibles que lorsqu’ils sortent du terrier pour quérir leur proie, le péché ne devient donc intelligible pour la conscience que lorsqu’il se manifeste dans le monde. Dans sa forme embryonnaire dans le cœur, il est plus dommageable, en raison de la difficulté épistémique à le saisir et de sa propension à se multiplier de façon incontrôlée à l’abri des ténèbres de l’inconscient.
13À travers le dispositif rhétorique des généalogies allégoriques, Henri de Lancastre désigne Orgoil et Peresce comme le couple parental dans cette métaphore de reproduction animale.
« Et sicom le renard voluntiers ont cynk chiaus a une litiere- et contez le piere et la miere, et ceaux font sept- et tout ensi est il de pecchez qe ont joefnes chiaus en mon coer come en l’angle. Et contez Orgoil le pere et Peresce la miere, et les autres cynk, si en troveretz sept, sanz autre vermyne dont y a grant foison ; et ces sont mortels, car il meurent et mordent et font mourir, et ensi fait le renard ; par quoi jeo les dois meultzpar ensample comparer ensemble. »17
14Dans une adnominatio doublée d’une allitération, Henri de Lancastre insiste sur le bien-fondé de son analogie des renards aux péchés mortels. La mère, Peresce, représente un principe de procrastination spirituelle qui s’oppose à toute activité dévote, mais principalement à la confession et donc à l’éviction du péché du for intérieur18.
« Le pecché de Peresce si est com une geline qe couve ses oefs tant q’ils devenent pucyns, et puis les norist tantqe soient grantz et parcruz ; et tiels y a que devenent asseez plus grantz qe la miere. Et tout ensi est il de ceo pecché de Peresce qe bien poet estre la geline au diable, qe couve touz les autres pecchez et les norist tantqe ils soient grantz et parcruz.
Sicome la geline primes couve les oefs, ensi couve Peresce les males penseez et les temptacions tantqe ils devenent poucyns, c'est-à-dire qe tant demurront celes malez penseez et les temptacions dessouz le pecché de Peresce et tant les covre de ses eles et les repount qu’il y vient un consentement et donqes de moustre ils prime en sa propretee come le poucyn qe ist horst de l’oef. Ceo est qe adonqes le poet homme conoistre qe c’est pecché venial et tant le poet homme nourrir, cet venial pecché, q’il devient mortel, et c’est quant apres le consentement le pecché est fait en fait, adonqes est il come grantz et parcruz. »19
15L’imagerie de la poule couvant ses oeufs est une autre manière d’évoquer l’état embryonnaire du péché dans le cœur et les difficultés épistémiques que celui-ci pose pour la conscience qui cherche à s’en saisir. Le péché in ovo est impossible à nommer, dorloté dans le noir et couvert par les ailes de la « geline » infernale. La morale abélardienne de l’intentio repose sur le consentement délibéré au mal, en rejetant comme non peccamineuses les étapes de la suggestio et delectatio. Henri de Lancastre n’y souscrit pas entièrement, reconnaissant une énergie très dangereuse à l’existence pré-consciente du péché. C’est seulement à l’étape de poussin, donc lorsqu’ils ont intégré la sphère de la conscience grâce à l’acte du consentement, que les péchés se montrent dans leurs « propretee ».
16Le thème du cœur en tant que lieu de gestation du péché est repris à travers une autre métaphore de génération animale plus complexe. Si dans l’exemple de la geline infernale, la progression de l’intérieur vers le monde correspond au modèle linéaire traditionnel (suggestio, delectatio, consensus, péché véniel, péché mortel), une allégorie construite autour du cycle de la migration des saumons offre une image circulaire de la dynamique du péché.
« Quand un samon voelt espandre et faire des jofsnes, il se trait loynz de la mer vers mont en ces eawes et deviant tout hors de sa nature ; et l’appelle homme kyper en ascuns paiis, et lui ne ses joefnes jammes samons ne purront devenir tantqe ils eient estee a la mer et d’illoqes pris lors nature ; et devant ne sont ils appellez ne tenuz pur samons, ne ne sont del savor ne aussi ne coustent mye atant. Tresdouz Sires, aussi est il des pecchés, qe quant ils sont loinz de coer, com en la bouche ou en ces autres lieus de qoi j’ai devant parlee pur faire joefnes, c'est-à-dire et a entendre qe en ces lieus, com en l’oraille, en l’oil, et en touz les autres malveises lieus, vient li vil pecché et engendre tout pleyn de jofnes et espant, mes ils ne devenent ne ne sont appellez ne tenuz mortels pecchés tant qu’ils eient estee au coer et illoqes pris lour malveise nature ; et avant ceo n’ont il pas la mal savour de delit. Et aussi ne coustent ils pas tant en enfern ou les marchandises de mortels pecchés sont a cheres denarrees achatez. »20
17Les saumons se reproduisent dans leurs frayères, en remontant les rivières. Dans cette nouvelle image allégorique, la génération des péchés in facto se produit à l’interface avec le monde représenté par les sens et non pas dans l’obscurité du cœur comme dans les allégories précédentes. Le cycle reproductif des saumons présuppose plusieurs métamorphoses déterminées par la topographie de leur migration. Ainsi, les alevins se développent dans des tacons (kyper) dans les bouches des rivières, mais afin d’acquérir leur nature de saumon, les kyper doivent retourner à la mer, ce qui est une manière de dire que le péché ne devient mortel que dans le cœur. C’est de la sorte que Henri de Lancastre souligne le fait qu’il saisit le péché comme une entité dynamique, à la fois identique à soi-même et en perpétuel changement. Cette ontologie de la continuelle transformation rend le péché difficile à figer dans l’aveu, car lorsqu’on confesse un péché in facto, on n’extirpe pas les racines intérieures de celui-ci.
18La capture d’un kyper vaut moins sur le marché que celle d’un saumon. Ce commerce renvoie à la pesée des péchés lors du jugement dernier. Comme l’aveu est une image au miroir de la pêche peccamineuse, dans le champ de la confession aussi, les captures qu’on peut faire dans la mer du cœur valent plus que celles des actions extérieures, ce qui est une manière de faire valoir la nécessité d’une confession qui plonge dans les profondeurs de l’être.
19Dans toutes les métaphores animales que je viens d’examiner, le mal grouille et se multiplie dans l’utérus du cœur, à l’abri de la lumière de la conscience. Une confession qui se penche sur les peccata cordis est censée combattre cette prolifération incontrôlée du péché dans les tréfonds de l’être. Si le cœur est conçu comme toujours gros de péché, la confession est une manière d’accouchement. Dans la tradition didactique, les confesseurs sont souvent associés à de sages-femmes qui assistent la conscience parturiente afin d’apporter à la lumière de la connaissance les choses qui étaient enfouies dans les ténèbres de l’intériorité.
20Dans Le Livre des deduis du Roy Modus et de la Reine Ratio, la glose de la nature de la truie illustre ce rapport entre la confession comme accouchement et la grossesse perverse de l’intériorité.
« La truie a mont de condicions et de proprietés semblables a cellez du sainglier, fors que tant qu’elle est prains chascun an de set pourchiaus ou de plus, et communement nessent ou mois de mars. Et quant ils sont nés, il la sieunet de pres, et elle les nourrist et alete et se couche a terre pour les faire teter, et tant comme il la sieuvent, il n’est riens si del et si mordant comme elle est. Je entent par ceste truie les gens qui sont en ce present monde, qui sont prains chascun an de set pourchiaus ou de plus, ce sont les set pechiés mortieux et de leur branches, de quoi il sont si enflés et si plains que il peunet aller es lieux ou Dieu est aouré et servi. Et encore sont pis que la truie, qu’elle ne porte ses pourchiaus que quatre mois ou cinc, et communement homme porte ses pechiés un an, c’est de l’un mars a l’autre et faonne et les met hors en mars, au plus pres de Pasques que il peut. Lesquieux pechiés ne le peuent lessier pour sa mauvaise acoustumance, ains le sieunet de si pres que, quant il se couche a terre, il le viennent teter et alletier, c’est a entendre que il couche sa pensee et sa volonté es choses terrianes et es choses mondaines, pour quoi il nourrist en soi tous pechiés et tous visses, qui le font aler en la gloire Antecrist, c’est en puis d’enfer. »21
21La truie enceinte de sept pourceaux représente les hommes mondains portant eux aussi la totalité de péchés capitaux. La saison des Pâques qui est le moment de la confession annuelle obligatoire correspond à la saison de la mise à bas de la truie22. Même après leur confession, les péchés continueront à suivre les hommes endurcis dans leur habitus comme la portée de la truie lui va derrière pour se faire allaiter. Dans Le Livre de Seyntz Medicines, la métaphore de la confession comme accouchement est remplacée par celle de la chasse aux péchés. Henri de Lancastre déplore lui aussi de manière ironique que la saison de la chasse aux renards est plus longue que la saison de la confession.
« Mes plus sont haiez les renars entre nous qe les pecchés, et plus volunteers les chaceons a destruire et assez plus de peyne y mettons a les tuer et prendre ; mes jeo croie qe ceo soit pur ceo q’il semble par aventrue a ascuns de nous qe la seson ne dure mye apres Pasques de chacer au pecchés, et le renard ad sa seson assez plus. »23
22Dans Le Livre de Seyntz Medicines, le cœur est désigné comme un terrain de multiplication du péché à travers une multitude de métaphores autour de la génération animale. Dans ce contexte, il ne faut pas s’étonner que la chasse ne soit plus déclinée comme un sport aristocratique, mais devient un exercice dans l’extermination des nuisibles. Les profondeurs du cœur sont imaginées comme une tanière souterraine qui doit être nettoyée des renards et d’autres animaux qui l’habitent. Henry s’exclame : « Ore ne serroit il bon a destruire cele male vermyne ? »24 Les chasseurs de son allégorie ne sont pas des aristocrates, mais des « parkers » et des forestiers. Le Moyen Âge ne connaît pas seulement la chasse aristocratique, mais aussi la chasse comme contrôle des populations animales. Un traité cynégétique comme Le Livre des Deduis du Roi Modus et de la Reine Ratio contient également une partie dédiée aux pauvres gens contenant des conseils pragmatiques sur l’extermination des nuisibles, qui se rapproche beaucoup au niveau de détail des descriptions de techniques de chasse dans Le Livre de Seyntz Medicines. En fait, Henri de Lancastre énumèretrois techniques cynégétiques pour se débarrasser du renard, la chasse à force des chiens, l’extermination de l’animal dans sa cachette par la fumée et la chasse aux fox-terriers. De ces trois, seulement la première se retrouve parmi les méthodes classifiées comme aristocratiques, tandis que les deux autres sont décrites dans Le Livre des Deduis comme appartenant à l’extermination des nuisibles.
23La chasse à force des chiens se déroule en surface, dans la brousse. Une fois le renard à l’extérieur de son terrier, les issues en sont bouchées avec des pierres et des épines afin qu’il ne puisse pas regagner son refuge lorsqu’il se voit donner la chasse par la meute de chiens. L’animal hors de sa gîte représente le péché exorcisé de l’espace intérieur à travers la confession, mais qui doit être poursuivi jusqu’à l’annihilation totale en donnant satisfaction pour les transgressions commises.
« Premierement, pur estoper les pertuz quant les peccez sont hors, q’il ne puissent trover entrer arieree en moy. Ceo serroit bone a estoper les pertuz par verraie confession et entiere repentance et volonté ferme qe, pur morir, jammes il ne doit returner le pecché q’est hors sailli, com bien sovent fait. Et sicom il est escoustumez de estoper la court des renars de peres et de espinys, tout aussi convendra estoper la court de mon corps par dures et poignantes penancez, dures com pieres et poignantes com espynes. Et qi pourroit ensi les pertuz de sa court estoper, jeo siu certeyn qe les pecchez qe sont hors serroient legiers a chacer et a prendre et a destruire quant ils ne se saveront ou muscer. »25
24Le topos de la fermeture des sens est traditionnellement associé à la prophylaxie du péché dans des textes didactiques comme l’Ancrene Wisse26. Chez Henri de Lancastre, la bouchée des issues du terrier par la pénitence est censée interrompre le mouvement cyclique du péché qu’il avait décrit à travers les métaphores de génération animale. L’avertissement de Luc 11, 24-26que l’esprit impur chassé de la maison balayée et ornée peut se retourner en emmenant avec lui sept autres démons est interprété par les glossateurs en relation avec la prolifération intérieure du péché, dont un seul entraîne toute la foule des péchés capitaux27. Le retour du péché dans l’espace intérieur est donc lié à une fertilité du mal que la satisfaction pénitentielle se donne pour tâche d’empêcher.
25La glose souligne à plusieurs reprises que la chasse en tant que satisfaction se passe en dehors du moi (hors, hors sailly). Le péché apparent est facile à neutraliser, car la force du mal vient de sa nature occulte, lorsqu’il couve dans les tréfonds de l’âme. En renversant l’agencement traditionnel des étapes de l’aveu (contrition, confession, satisfaction), Henri de Lancastre transforme le procès pénitentiel dans une chasse épistémique qui commence à la surface de l’être, à partir de ce qui est connu, pour s’avancer de plus en plus profondément vers l’inconscient. La topographie intérieure est caractérisée par les résistances qu’elle oppose à la connaissance, en opposition avec l’extériorité définie comme l’espace de la manifestation, donc de l’évidence épistémologique.
26La chasse du péché en surface n’en est pas moins une opération intellectuelle, qui relève de l’investigation dans le sens étymologique28 de traque des vestigia que les transgressions ont laissées dans le monde. Les chiens de cinq sens sont censés poursuivre la mauvaise odeur du péché, afin de faire réparation complète pour les fautes commises.
« Et sicom le renard it put si fort de lour meisme ord nature, qe home les poet mult bien pursuire et chacer et savoir par oue ils s’en vont et sont alez, le pecché doit estre ainsi chacee et pursui ; com quant j’ai fait ascun pecché vers vous, Sire, et ascun mal a mon proeme, jeo doi ceo pecché pursuire et chacer tantqe j’ai fait les amendes et pleyn satisfaccion. Et les chiens les perdent a la veue, ils les troveront bien par sentir pur la grant puor qe en vient : les chiens sont mes cynk sens qe devroient coure apres les pecchés et chacer tantqe ils eussent tout destruit ; et si ils ne les voient, si pursue les traces et la puor et la crye. »29
27La chasse en tant que satisfaction comporte aussi un degré d’obscurité (les chiens peuvent perdre de vue le péché), mais elle est tout de même placée sous le signe de l’évidence (l’odeur repoussante qui émane du péché ne faillira pas à conduire les chiens droits à la proie). Les deux dernières méthodes concernent une chasse aux renards se déroulant dans le souterrain. La deuxième méthode de chasse présuppose les renards enfermés dans leur terrier, dont toutes les issues sauf une sont bouchées. Les forestiers allument un triple feu à l’entrée qui reste libre, dont la fumée asphyxie tous les animaux qui se partagent le terrier (renards, blaireaux et autres nuisibles). La triple flamme est glosée comme le feu du Saint-Esprit, le feu de l’Amour de Dieu et de la Peur des Enfers, qui à leur tour émettent trois types de fumée nettoyant le cœur des péchés capitaux (la litière des renards) et de la multitude de péchés véniels figurés comme l’autre vermine grouillant dans le terrier.
28Au niveau strictement littéral, l’image d’une triple flamme qui se confond semble déroutante, mais l’allégorie semble inspirée de la pratique réelle de la chasse. Le Livre des Deduis du Roi Modus et de la Reine Ratio liste une méthode similaire pour la chasse aux renards où la fumée utilisée requiert aussi trois ingrédients : du charbon, du souffre et du piment. Par contre dans le traité cynégétique, les veneurs emploient la fumée pour faire sortir l’animal de sa cachette, alors que dans le traitement allégorique du Livre des Seynctz Medicines, les animaux sont exterminés dans les ténèbres de leur tanière. Autrement dit, les péchés du cœur sont expurgés sans qu’ils aient besoin de sortir à la lumière d’une prise de conscience du mal intérieur. Dans le cadre d’une métaphore filée de la confession, ce tableau allégorique interpelle, car il décrit une manière d’assainir les impuretés du cœur qui ne passe pas par la connaissance lucide que présuppose la verbalisation de l’aveu. Le nombre et la nature des animaux exterminés reste flous, car la purgation du cœur se fait par la grâce et non pas par l’entremise de la conscience, qui reste dans l’inconnaissance des profondeurs de l’être.
29Le dernier tableau de la métaphore filée de la chasse confession met en place un face-à-face de la conscience et du péché figuré comme un affrontement entre un fox-terrier envoyé en éclaireur dans le labyrinthe souterrain du cœur et sa proie. Le chien est censé rencogner le renard et alerter les forestiers en aboyant. Guidés par l’aboiement du chien, ceux-ci insèrent une verge pliable à l’endroit où se trouve le renard et s’il le faut, creusent la tanière avec des piques et des pelles. Le renard acculé essaie de se défendre en se retournant de front envers le fox-terrier, cependant le nez à nez qui s’ensuit ne révèle pas à la conscience la véritable nature du péché, mais est au contraire interprété comme une perverse volonté de dissimulation.
« Mes qei fait donques la pecché a la conscience, quant il la sente de pres ? Mes tourne son deriere en l’angle et le visage devers le chien, pur soy meultz defendre. Homme doit jugger le visage de toutz bestes communalement pur le plus bel, et le deriere pur le plus lede. Il ne convient my dire la cause, car chescun le seit par soi meismes. Ensi fait le pecché, qi tourne ses ordures en l’angle, et le plus beal mette contre la conscience pur soy defendre s’il poet et ceo lesse abaier au visage : c’est a les meyndres et a les meyns ordz pecchez, et sont touz les plus ords tournez en l’alme par l’angle de coer, come dist est. Mes quant lui mestre vendra pur fouir apres le renard, il trovera aussi bien le deriere q’est en l’angle com le visage qe le chien abaie, et par l’abaier de l’un si avient homme a l’autre. »30
30Le péché essaie de dissimuler sa laideur en montrant un visage plus agréable à la conscience, tandis que ce qu’il y a de plus laid sera tourné vers l’angle obscur du cœur, qui reste ontologiquement inaccessible à la connaissance de soi. Henri de Lancastre est conscient du fait que le « je » est porté vers un jugement trop bienveillant sur soi-même. En énumérant les difficultés épistémiques posées par une confession explorant les profondeurs du cœur, Henri mentionne « qe jeo siu vers la partie de mon coer trop favorables en juggeant les malvestiés de luy »31. Compte tenu de cette impasse dans l’intellection du moi profond, l’examen de soi nécessaire à l’aveu est assisté par le confesseur en guise de forestier. Alerté par l’aboiement sincère de la conscience portant sur les parties les plus avouables du péché, celui-ci extrait adroitement le mal dans son entier, en allant au-delà de la connaissance que le sujet pénitentiel peut avoir de soi-même. Encore une fois, une confession qui vise à nettoyer les profondeurs du cœur ne peut pas se borner à ce dont le pénitent saisit consciemment, mais est censée fournir une réponse au paradoxe augustinien de la confession de ce qu’on ignore de soi-même.
31Dans la pratique confessionnelle, le confesseur peut viser à augmenter l’emprise de la conscience sur le domaine de l’inconscient ou au contraire, par des astuces relevant d’une fine connaissance des résistances psychologiques humaines, peut se proposer d’extraire un aveu qui contournerait les pièges que la conscience de soi du pénitent pourrait mettre dans la voie de son salut.
32Dans Le Livre de Seyntz Medicines, avant de prendre part à la chasse du péché, le confesseur est décrit comme un forestier censé maintenir l’équilibre de la faune des vertus et des prédateurs dans l’espace intérieur imaginé comme un parc de chasse. Les vertus (le noble gibier à maintenir dans le parc) sont souvent dévorées par les vices, qu’il est essentiel d’exterminer par une chasse aux nuisibles.
33En tant que forestier, le confesseur peut intervenir dans la chasse aux renards de deux manières, dont l’une est douce et l’autre violente. La méthode la moins intrusive est l’insertion d’une verge pliable qui suit les courbures de la tanière afin d’en extraire le renard acculé par le fox-terrier. En écoutant attentivement la confession sincère du pénitent, le confesseur doit fournir un enseignement qui doit lui servir de miroir moral. Les mots de doctrine taillés aux besoins particuliers du repentant s’acheminent directement vers la source du mal, sans qu’il y ait besoin d’ouvrir violemment l’espace intime du cœur, comme dans la deuxième méthode. Si la première méthode échoue, le confesseur est obligé de passer à quelque chose de plus brutal, notamment à la creusée du cœur à coups de bêche et de pelle.
« Et oue la beche fouir convient mon confessour et me tenir desuz le piee en fouir en ma char sicome en terre, et de la paele ouster la terre qe de la beche serra fouy- c’est les delicez de la char et les malveis desir- tout doit la paele getter en voie et nettoier la fosse de toutz ociosités ».32
34L’imagerie du souterrain renvoie à l’assimilation scripturaire du cœur à un sol fertile ou infertile.33Pourtant, le topos de la fouille du cœur provient sans doute d’un passage du commentaire de « Adveniat regnum tuum » dans un traité de vulgarisation doctrinaire très populaire au xive siècle, la Somme le Roi.34
« Mes il voit que il n’est ne purs ne dignes a lui veoir : adonques s’eschaufe li bon cuers leaus et se corroce a lui meesmes. Lors prent son pic et sa pele et commence a fouir et a miner et a entrer en cel cuer la dedenz et i trueve tant de pechiez et de vices et de defautes, tant de poudres, tant de tourbacions et de cures et de pensees eet de mauvese volenté, que il se corrouce et s’adole et prent un mautalent a soi meismes, si que il commence son cuer a netoier a certes et a geter hors toutes ces ordures qui li toloient la veue Dieu en lui, et ce fet il o la pele de veraie confession. Mes quant il a longuement miné et il a toutes ces ordures geté hors, lors trueve pes et repos et soulaz et joie, tant que il li semble que touz li mondes soit un enfers au regart de cele clarté et de cele pais qu’il trueve en son cuer. »35
35La conscience de la déchéance du cœur est un effet de la grâce dans la Somme le Roi, car la condition humaine est caractérisée par un aveuglement ontologique à sa véritable nature. Les pétitions du Pater sont associées aux sept dons du Saint-Esprit et c’est sous l’effet de l’esprit d’entendement que le pénitent ressent l’impulsion d’entrer en soi-même et de procéder à des fouilles dans « cel cuer la dedenz ». Le pronom démonstratif indique que c’est un endroit à part dans la topographie du moi, rarement visité en dehors de l’état de grâce. Le cœur profond est la fontaine de tout mal, mais de manière paradoxale c’est aussi l’endroit où « adveniat regnum tuum » et où, de façon augustinienne, l’homme peut gagner connaissance de Dieu en se connaissant.
36L’imagerie de la chasse aux renards met en place une image fort intéressante des strates souterraines du cœur et les glose explicitement comme des régions de l’anatomie de l’âme où la connaissance de soi bute systématiquement sur des impasses épistémiques. Les soubassements du cœur restent impénétrables à la lumière de la conscience, tout comme les rayons du soleil n’arrivent pas à pénétrer les profondeurs de la terre ou des eaux dans une allégorie néoplatonicienne de la mémoire chez Boèce :
« Dans ses vers enchanteurs l’harmonieux Homère
Célèbre l’éclat de Phœbus :
Vain éclat cependant ! De sa pâle lumière
Les rayons au loin répandus
Ne peuvent de la terre l’impénétrable masse,
Percer la charpente et les os,
Et de la mer dorée effleurent la surface
Sans éclairer le fond des eaux.
Tout autre est le pouvoir du Créateur du monde
Chassant les ombres de la nuit,
Dans les plus noirs replis de la terre et de l’onde
Son regard de feu plonge et luit.
Avenir et passé ! présent ! triple mystère
Qui pour Dieu n’est qu’un jeu !
Puisque Dieu seul voit tout, dites, fils de la Terre
Il n’est d’autre Soleil que Dieu.36
37La lumière du soleil qui ne fait qu’effleurer les surfaces, sans pouvoir pénétrer l’obscurité des profondeurs de la terre et des mers, peut être assimilée à la connaissance que les hommes peuvent avoir des abîmes de leurs propres mémoires, alors que la lumière transcendantale de la connaissance divine qui fonde la Providence appréhende l’essence de l’être dégagée de la gangue du temps. Une confession efficace doit accorder la lumière de la conscience sur celle de Dieu.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 S.Vecchio, « Peccatum cordis ».
2 A. Dominic, Saints and Animals in the Middle Ages, p. 30.
3 A. Strubel, La poétique de la chasse, p. 180-183.
4 G. de la Buigne, Le Roman des Deduis, p. 160.
5 « Mes je dis bien que s’il n’est bon veneur il n’entrera ja en paradis, mes en queuques manières qu’ils soient veneurs croy je bien qu’ilz entreront en paradis, non pas au milieu, mes en aucun bout ou au moins seront-ilz logiez es fors bours ou basses cours de paradis seulement pour avoir oster cause d’occieusité qui est fondement de tous maulx ». La chasse de Gaston Phœbus, comte de Foix, p. 237-238.
6 Sur la morale de l’intention, voir Peter Abelard, Peter Abelard’s Ethics ; M. D. Chenu, L’Éveil de la Conscience dans la Civilisation Médiévale, p.17-32 ; Odon Lottin, « L’intention morale de Pierre Abelard à Saint Thomas d’Aquin », Psychologie et morale au xiie siècle, vol. IV, p.330, 336, 465.
7 Pour plus d’informations sur la biographie de Henri de Lancastre, consulter l’excellente introduction de Catherine Batt à sa traduction anglaise du Livre des Seyntz Medicines : Henry of Grosmont, First Duke of Lancaster, The Book of Holy Medicines, pg. 1-17 et Kenneth Fowler, The King’s Lieutenant : Henry of Grosmont, First Duke of Lancaster 1310-1361.
8 Voir The Chronica maiora of Thomas Walsingham 1376-1422, p. 312.
9 Sur la spiritualité des laïcs autour du xive siècle, consulter Etienne Delaruelle, La Piété Populaire au Moyen Âge, p. 401-477 ; André Vauchez, Les laïcs au Moyen Âge, pratiques et expériences religieuses, p. 133-145 et Michel Grandjean, Laïcs dans l’église.
10 Le manuscrit de Stonyhurst porte les armoiries du duc de Lancastre et de deux compères de l’Ordre de la Jarretière (Jean de Grailly et le comte de Warwick), ce qui, selon Catherine Batt, met en avant une identité aristocratique définie à travers des alliances politiques et militaires, alors que le manuscrit de Corpus Christi est moins orné et semble destiné à un usage dévotionnel privé, relié à la fonction du collège fondé par Henri de Lancastre lui-même.
11 Par exemple, la recette pour faire de l’eau des roses et d’autres fragments ont été compilés avec d’autres textes portant sur la médicine dans le manuscrit Aberystwyth, National Library of Wales Peniarth 388.2. Voir Jeanne Krochalis et Ruth J. Dean, « Henry of Lancaster’s Livre de seyntz medicines : New Fragments of an Anglo-Norman Work».
12 Catherine Batt, The Book of Holy Medicines, p. 49. Sur la littérature spirituelle après Lateran IV, consulter Leonard E. Boyle “The Fourth Lateran Council and Manuals of Popular Theology”; E.J. Arnould, Le manuel des péchés ; étude de littérature religieuse anglo-normande (xiie siècle) et Texts and traditions of medieval pastoral care : essays in honour of Bella Millet. Sur la construction du moi pénitentiel en dialogue avec la norme dévotionnelle définie par cette littérature didactique, voir : Catherine Little, C. Little, Confession and resistance: defining the self in late medieval England ; Jerry Root, Space to speke : the confessional subject in medieval literature; Marie Flowers Braswell, The Medieval sinner : characterization and confession in the literature of the English Middle Ages.
13 Sur la confession du cœur voir aussi Peter von Moos, « Occulta cordis : contrôle de soi et confession au Moyen Âge : I Formes du silence ». Sur l’évolution des pratiques confessionnelles, voir les monographies de Sarah Hamilton, The Practice of Penance, 900-1050 ; Robert Blomme, La doctrine du péché dans les écoles théologiques de la première moitié du xiie siècle ; Paul Anciaux, The sacrament of penance ; Jean Charles Payen, Le motif du repentir dans la littérature médiévale des origines à 1230 ; Thomas Tentler, Sin and confession on the eve of the reformation ; Sandra McEntire, The doctrine of compunction in medieval England : holy tears.
14 St. Augustin, Confessions, p. 245.
15 A. Vanhoye, «L’anthropologie biblique du cœur», p. 119.
16 H. de Lancastre, p. 104.
17 Ibid., p. 106.
18 C. Batt, p. 25-32.
19 H. de Lancastre, p. 63.
20 Ibid., p. 85.
21 H. Ferrières, Les Livres du Roy Modus et de la Reine Ratio, p. 149.
22 Les statuts synodaux encouragent plutôt à trois confessions annuelles, pour Pâques, Noël et la Pentecôte. Voir aussi N. Bériou, « Autour de Latran IV (1215) : la naissance de la confession moderne et sa diffusion», Pratiques de la confession, p. 78 et sur l’exigence de se confesser souvent, Hervé Martin, « Confession et contrôle social à la fin du Moyen Âge », Pratiques de la confession, p. 81.
23 H. de Lancastre, p 106-107.
24 Ibid., p. 106.
25 Ibid., p. 107.
26 Il s’agit d’un manuel pour recluses en Moyen Anglais du début du xiiie siècle. En se proposant de codifier la vie extérieure des recluses, L’Ancrene Wisse se rapproche d’une règle monastique (livre I et VIII), mais son centre d’intérêt reste la vie intérieure (livres II-VII). L’intériorité que les recluses doivent cultiver est définie en rapport avec la clôture du reclusoir. Pour la construction de l’intériorité dans ce texte, voir Linda Georgianna, The Solitary Self.
27 « Lorsque l’esprit impur est sorti d’un homme, il va dans les lieux arides pour chercher du repos. N’en trouvant point, il dit : Je retournerai dans ma maison d’où je suis sorti et quand il arrive, il la trouve balayée et ornée. Alors, il s’en va, il prend sept autres esprits plus méchants que lui ; ils entrent dans la maison, s’y établissent, et la dernière condition de l’homme est pire que la première. » Luc 11, 24-26.
28 N. Bordessoule, De proies et d’ombres, p. 7.
29 H. de Lancastre, p. 107.
30 Ibid, p. 111.
31 Ibid, p. 123.
32 Ibid, p. 114.
33 Voir la parabole du Semeur et celle du trésor enfoui dans un champ, qui mènent à l’assimilation du cœur endurci à un terrain aride.
34 Avec plus de 90 manuscrits en français, ainsi que d’autres traductions dans d’autres langues, Somme le Roi est un des bestsellers du Moyen Âge. Ce traité catéchétique et moral écrit en 1279 à l’intention de Philippe le Hardi par le confesseur du roi, le frère dominicain Laurent porte sur les commandements, le Credo et sur une imbrication savante des septénaires des pétitions du Pater, des dons du Saint Esprit, ainsi que des vices et des vertus. Vers la fin du xiiie siècle, il est devenu un des livres de chevet de la piété populaire, satisfaisant, entre autres, au besoin de l’examen de conscience en vue de la confession.
35 La Somme le roi par Frère Laurent, p. 216.
36 Boèce, La consolation de Philosophie, p. 285.
Auteur
Docteur en littérature médiévale du département de Philologie Romane de l’Université de Columbia, New York
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2016