L’inlassable quête aux chansons des associations de musiques et danses traditionnelles : une érudition en roue libre et à perdre haleine1
p. 324-336
Résumé
Depuis le milieu des années 1960, des militants culturels, plus souvent issus des mouvements d’éducation populaire qu’ils n’étaient proches des défenseurs des « identités » régionales, sollicitent sans relâche – et encore aujourd’hui avec succès – la mémoire musicale et chorégraphique des anciens. Leurs collectes, qu’ils ont d’abord menées concurremment à celles des ethnomusicologues du musée des arts et traditions populaires mais qu’ils poursuivent depuis longtemps en position de monopole, ont notablement enrichi le corpus de chants – dans toutes les langues de France – et de danses traditionnels. Ces érudits-ethnographes de fait, qui se désignent du terme de « collecteurs », ont créé pour conserver et valoriser les archives sonores qu’ils ont constituées des associations actives dans la plupart des régions, dotées de phonothèques dont la compétence est largement reconnue. Leur longévité ou leur persévérance – la relève générationnelle est bien assurée ! –, justifient qu’on les identifie comme un réseau de la France savante dont les ressorts intellectuels et artistiques propres méritent d’être caractérisés.
Texte intégral
« Il faudrait un jour faire quelque chose sur le collectage. Je ne connais personne que cela ait laissé insensible et qui se soit comporté comme un simple accumulateur d’informations. »
Jean-Michel Renard2
1Recueillir la chanson populaire a l’allure d’un mouvement perpétuel, depuis qu’il a été inauguré en France avec la publication du Barzaz Breiz3, en 18394. Dans cette quête inlassable, c’est à la séquence la plus récente qu’on s’intéressera ici : elle est aussi la plus longue, puisqu’elle se poursuit de nos jours, mais encore tout à la fois la plus féconde, celle qui a mobilisé le plus grand nombre d’acteurs et qui est aussi demeurée, jusqu’à présent, la moins explorée.
2La contribution que je soumets à ce propos s’inscrit dans le cadre des recherches que je mène sur les associations dites « revivalistes », c’est-à-dire celles qui portent et incarnent le revival des musiques et danses traditionnelles en France depuis la fin des années 1960. Ces recherches en croisent d’autres, engagées plus récemment sur l’institution de l’ethnomusicologie de la France au Musée national des arts et traditions populaires, à partir de sa création en 19375. Car le terrain de convergence – et/ou de confrontation – des entreprises menées par les ethnomusicologues-muséographes, d’une part, et par les militants revivalistes d’autre part, a précisément été l’enquête, si divergente, au-delà d’un souci commun de sauvegarde des patrimoines oraux, qu’aient été les finalités des premiers, engagés dans une ethnographie d’urgence des sociétés rurales, et celles des seconds qui visaient surtout, au moins originellement, comme interprètes, l’enrichissement de leurs répertoires. Le collecteur associatif apparaît donc, en première analyse, à la fois comme un continuateur – tardif – des folkloristes du xixe siècle, joignant qui plus est l’art à l’étude, et un concurrent voire un censeur de l’ethnologue. On verra surtout qu’il l’a assez rapidement supplanté, ou plus exactement qu’il a suppléé sa désertion.
3Je m’attacherai d’abord à caractériser le phénomène du collectage, qui est plus et mieux que la nouvelle dénomination d’une pratique déjà bien enracinée, mais aussi la population des collecteurs qui l’incarne, en tentant de démontrer qu’elle doit être considérée comme une sous-catégorie de la France savante. J’essayerai ensuite de prendre la mesure de cette pratique avec des chiffres qui ne peuvent être que des ordres de grandeur. Enfin, je tenterai une approche plus qualitative.
Caractériser
4La collecte des chansons (mais aussi bien des airs de musique dite traditionnelle) est, je me répète, un mouvement qu’on ne saurait figer. Mais il est loisible d’inscrire la séquence revivaliste dans une trame ou une triangulation, aussi dynamique que possible, qui s’appuiera sur un octuor d’adverbes.
5Chronologiquement, elle clôt la chaîne qui s’est réellement formée sous la double autorité du ministre Fortoul et de l’académicien français Jean-Jacques Ampère6, déployée avec les folkloristes du second Empire puis de la IIIe République (Damase Arbaud, Barbillat et Touraine, Paul Sébillot, Julien Tiersot, Achille Millien, Félix Arnaudin, Claudius Servettaz, etc.), à laquelle se sont raccordés les premiers créateurs français d’archives sonores (Ferdinand Brunot, Roger Desvignes) et qu’ont enfin menée, et avec quelle autorité, au moins jusqu’à l’aube des années 1980, les pionnières de l’ethnomusicologie du domaine français, Claudie Marcel-Dubois et Maguy Pichonnet-Andral.
6Spatialement, l’action s’est déployée dans la France des terroirs, plus bocagère et montagnarde que littorale, située au sud d’une ligne moins Genève – Saint-Malo que Dieppe – Pontarlier. Le quart nord-est est donc resté en dehors du mouvement, un peu faute de combattants, beaucoup parce qu’il a été postulé qu’en dépit de la place tenue par l’agriculture dans l’économie de ces territoires, conséquemment par les « anciens milieux ruraux7 » dans la vie sociale, les guerres dont ils furent le théâtre à partir de 1870 y ont plus précocement qu’ailleurs sonné le glas des sociétés traditionnelles.
7Politiquement, on ne s’étonnera pas de la proximité de beaucoup de collecteurs avec le militantisme régionaliste et le combat pour la reconnaissance et la préservation des langues minoritaires, qui a impliqué leur sympathie pour – voire leur implication dans – les « luttes » si ardentes de la décennie post-soixante-huitarde. Mais, même là où cette cause rencontre moins d’écho, on peut constater que l’ancrage à gauche, la posture anti-élitaire, la solidarité sociale et culturelle avec les classes populaires sont revendiqués avec d’autant plus de véhémence que les promoteurs du mouvement sont conscients, bien avant que l’opinion commune ne prenne conscience du poids de ce « passé qui ne passe pas8 », de la nécessité de détacher les musiques et danses alors qualifiées de “folkloriques” du « projet culturel de Vichy9 ».
8Institutionnellement, si l’on a d’abord eu affaire à des collectifs peu formalisés, voire spontanéistes pour reprendre la terminologie d’alors, c’est somme toute assez rapidement qu’a été emprunté le chemin vers une structuration associative, dès la seconde moitié des années 1970, puis fédérative. La Fédération des musiciens routiniers prend forme vers 1982, la Fédération des associations de musiques traditionnelles (FAMT) est créée en 1985, dans ce lustre où s’ébauche une politique ministérielle des musiques traditionnelle dont les promoteurs, Maurice Fleuret10 et Bernard Lortat-Jacob11 notamment, sont convaincus qu’elle a besoin de trouver un interlocuteur aussi puissant qu’incarné au sein de la société civile. Au cours de la décennie 1990, parachevant le mouvement, se développe un réseau de centres de musiques traditionnelles en région12, dont la FAMT13 assume la coordination.
9Technologiquement : rien n’aurait été possible, du moins à cette échelle, sans les progrès apportés dès la fin des années 1960 aux techniques d’enregistrement du son puis de l’image animée : miniaturisation, allégement du poids, mobilité procurée par l’emploi de piles, apparition de la cassette audio. Appareils et supports sont alors devenus des biens de consommation courante. Il en est résulté une démocratisation irréversible de la pratique de l’enquête, nonobstant les réserves de principe et les critiques méthodologiques qui ont été rapidement émises, non sans motif, on y reviendra, dans les cercles autorisés de la recherche, quant au manque de rigueur des amateurs, dans les modalités de recueil comme de conservation des données.
10Épistémologiquement : cette ethnographie, ni officielle ni autorisée, a pu, surtout à ses débuts, dans les années 1970, adopter une posture anti-académique dont les pouvoirs publics se sont alarmés. On en repère l’écho, quelque peu accablé, dans le rapport de l’inspecteur général des finances Redjem Benzaïd, L’ethnologie de la France, besoins et projets qui est, en 1980, à l’origine de la création de la Mission du patrimoine ethnologique et où sont stigmatisés « le gâchis des collectes anarchiques et l’illusion pseudo-scientifique d’une ethnologie spontanée14 ».
11Terminologiquement : l’entreprise emploie pour se dénommer un vocabulaire qui est une signature, voire un manifeste, même si la méconnaissance du lexique disciplinaire est peut-être à invoquer au moins autant que la volonté de se distinguer. Il n’est en effet pas question d’enquête de terrain ni d’enquêteur mais de « collectage » et de « collecteur ». Le premier terme, inconnu du Littré comme des première éditions du dictionnaire Robert, semble un néologisme apparu au tournant des années 1960 et 1970 dans le sillage de la vague « folk », sinon déposé par elle sur le rivage des sciences humaines, quoique Florence Descamps soutienne, mais sans citations probantes, que « le terme est utilisé tout au long du xixe siècle par les sociétés savantes, les érudits locaux [et] les académies15 », car les folkloristes évoquaient plutôt leurs collectes que leurs collectages ; quant au terme de collecteur qui ressortissait jusqu’alors des sphères fiscale et biblique, sa transposition dans la sphère du patrimoine oral constitue bien une novation. On adhérera en revanche sans réserve aux remarques de Florence Descamps sur la « connotation d’organisation » qui caractérise le collectage, sur la volonté de « rationalisation » qu’il sous-entend, sur la « finalité » du « traitement » dont il constitue la phase préparatoire, ou encore sur la « dimension territoriale et locale », la « connotation patrimoniale », et l’« action sociale de terrain » qu’il englobe16.
12Sociologiquement : le mouvement est porté par ceux qui sont regardés comme formant les basses castes des cercles académiques et artistiques, ces prolétaires intellectuels qui ont fait leurs classes dans les écoles normales, ont presque toujours pratiqué, au moins quelques années, le métier d’instituteur, acquis en autodidactes – ou par l’enseignement mutuel – une formation musicale et enfin pris le risque de la professionnalisation dans les carrières du spectacle vivant, sous le régime de l’intermittence, ou, pour une minorité, dans l’artisanat de la lutherie. Les plus jeunes des collecteurs ont, quant à eux, généralement emprunté la voie encore plus escarpée des emplois aidés, subissant d’entrée de jeu une précarité que leurs aînés avaient plutôt choisie, du moins au départ. Peu ou pas d’« héritiers », par conséquent, chez les collecteurs, qui viennent, sinon des classes populaires, du moins des strates les moins fortunées des classes moyennes.
Évaluer
13Dresser un bilan, au moins provisoire (puisque l’effort se poursuit) mais chiffré, des collectages, voire dénombrer les collecteurs ne semble pas a priori relever de la mission impossible puisque les opérateurs les plus engagés, parfois depuis plusieurs décennies, rendent régulièrement des comptes et les actualisent, ne serait-ce que pour s’assurer la poursuite des financements que leur accordent les pouvoirs publics. Si la page d’accueil du site emblématique, au sens propre, du mouvement, le Portail du patrimoine oral17 (PPO), ne fournit pas de données agrégées, on arrive, en additionnant celles affichées par ses composantes ou par des entités indépendantes18, à une estimation de l’ordre de 100 000 heures d’enregistrement conservées.
14Impressionnant, ce chiffre n’est toutefois qu’indicatif : il amalgame enregistrements originaux de collectages et copies de toutes sortes, opérées sur des disques diffusés commercialement ou d’anciennes enquêtes du Musée National des Arts et Traditions Populaires (MNATP), mais aussi les captations sonores de stages, conférences, bals ou concerts, sans oublier les échanges réciproques entre associations. Le catalogue collectif que propose le PPO est encore beaucoup trop loin de l’exhaustivité pour qu’on puisse à la fois cerner le pourcentage de doublons qu’il conviendrait de retrancher, mais aussi évaluer le volume d’heures qu’il faudra ajouter au terme des opérations de numérisation et de description. Sans oublier le stock des enregistrements demeurés entre des mains privées, qu’il serait bien hasardeux de prétendre quantifier et dont l’intégrité physique, donc la pérennisation sont tout sauf garanties, surtout en cas de disparition des collecteurs.
15Il n’est guère plus facile, et pas nécessairement plus éclairant, de recenser les associations et organismes dont le collectage figure au rang des objectifs statutaires, parfois – mais très rarement – de façon exclusive. On arrive en effet à une estimation qui oscille entre cent et deux cents structures, sachant que la valeur haute de cette fourchette pourrait être nettement dépassée si l’on incluait les cercles celtiques et autres groupes folkloriques, qui, dans les années 1950-60, ont eu ou prétendu avoir une activité de collecte soutenue.
16C’est encore le dénombrement des personnes physiques qui paraît pouvoir livrer la statistique la moins trompeuse. Il circonscrit la population visée à quelque huit cents individus, dont l’implication est évidemment très variable et obéit probablement à une gradation proche de la loi de Pareto : autrement dit, il y a fort à parier que 80 % des collectes est imputable à 20 % au maximum des collecteurs. Ce rapport très inégalitaire se vérifie par exemple dans l’aire géographique qui réunit à elle seule plus de 60 % des individus, à savoir la Bretagne augmentée du département de Loire-Atlantique.
17Dastum19 avance en effet le chiffre de cinq cents collecteurs, tout en reconnaissant qu’ils sont occasionnels pour la grande majorité d’entre eux ; incidemment, que le sous-groupe des persévérants voire des opiniâtres soit de l’ordre de la centurie constitue en soi une performance considérable ! Même en tenant compte de la précocité du mouvement au pays de La Villemarqué, de Luzel, de Guilcher et de Donatien Laurent, elle creuse un écart que les autres régions ne sauraient combler.
18L’aire occitane à l’ouest du Rhône aligne sans doute cent soixante collecteurs, ce qui n’est pas rien, mais à condition d’additionner le Massif central20, le Languedoc, la Gascogne et la Guyenne. Sur l’autre rive du fleuve, la Savoie, le Dauphiné et la Provence peuvent se targuer de près de 120 contributeurs21. Ils sont près de soixante-dix pour le Poitou historique (incluant la Vendée22), une grosse cinquantaine en Bourgogne23, une vingtaine en Normandie comme en Corse24.
19Le Roussillon et le Pays basque français ferment le ban avec chacun une dizaine de collecteurs. Encore faudrait-il prendre en compte quelques rares individualités dont l’éclectisme caractérise les terrains d’enquête, parmi lesquels on peut citer Catherine Perrier, Éric Montbel et Michel Colleu, même si ce dernier s’est plutôt spécialisé dans la collecte des chants de marins, mais pour une bande littorale qui court de la Manche à la Gironde.
20On peut encore – et il faut – préciser les ordres de grandeur qui permettent, d’approximation en approximation, de cerner, encore superficiellement, le phénomène du collectage, en risquant une périodisation. Celle-ci ne peut être brossée qu’à très grands traits, tant que l’inventaire des corpus d’enregistrements ne couvre pas plus complètement les données sur les dates où ceux-ci sont été effectués. Mais il est déjà possible de dessiner une trajectoire d’ensemble.
21Jusqu’au milieu des années 1960, c’est une avant-garde d’une vingtaine de personnes qui opère. L’effectif croît rapidement, sensiblement et continûment à partir de 1969 : dans les années 1970, ce sont sans doute deux cents personnes qui arpentent les campagnes et les montagnes françaises. Le sommet de la courbe est atteint au moment des assises des collecteurs qui se déroulent au printemps 1982 et il se maintient en plateau jusqu’au milieu des années 1990. La décrue s’amorce à la fin du xxe siècle mais, plus qu’un reflux ou une désaffection, ce qui s’observe est un redéploiement vers de nouvelles thématiques, plus sociologiques que patrimoniales au sens artistique du terme (comme la vie quotidienne et la civilisation matérielle), et vers de nouveaux terrains ou espaces : après des décennies d’immersion dans la ruralité, on s’avise en somme qu’il importe d’investir la ville et ses banlieues, pour collecter auprès des communautés étrangères et ultramarines.
Analyser
22La pratique du collectage des musiques traditionnelles au cours des dernières décennies du xxe siècle peut à présent subir l’épreuve d’une analyse croisant les approches disciplinaires (histoire, sociologie, anthropologie), à condition de ne pas viser une exhaustivité qui restera longtemps hors d’atteinte, mais de procéder plutôt en juxtaposant plusieurs approches ou éclairages.
23On retiendra d’abord que l’éveil d’une vocation de collecteur n’est pas réductible à un projet réplicable à l’infini mais dérive d’une pluralité de projets dont les deux ressorts fondamentaux, diversement dosés d’un itinéraire à l’autre, sont politique et artistique. Chronologiquement, celui-là a joué en premier, dans un contexte militant de réhabilitation et d’affirmation des cultures dominées, territorialement, socialement mais aussi souvent linguistiquement. Les “luttes” des années 1960 et 1970 ont en effet souvent emprunté la voie de la redécouverte, de la réappropriation et de la promotion du patrimoine oral porté par les classes populaires, dans les régions où le monopole du français n’était pas encore absolu, en Bretagne bretonnante, en Corse, au Pays basque et dans nombre de cantons de la France méridionale demeurés occitanophones.
24La revendication régionaliste, voire autonomiste, avec les risques de dérives identitaires qu’elle comporte, sous-entend nécessairement le sauvetage des langues minoritaires, y compris dans leur expression chantée. Moins connu mais non moins significatif apparaît le combat de militants du monde rural pour la reconnaissance de l’égale dignité des cultures paysannes dans le contexte de la modernisation des structures agricoles et du bouleversement économique et social que les campagnes ont connus au cours des années 1960. Cette voie d’accès au collectage s’incarne particulièrement bien dans l’aventure de l’UPCP-Métive, comme dans le parcours d’un de ses co-fondateurs, André Pacher (1932-1996), d’ailleurs attaché à la survie du parlanjhe picto-charentais25. Fils d’agriculteur, instituteur puis professeur de culture générale dans l’enseignement agricole, il a été profondément marqué par son service militaire en Algérie qui lui a fait prendre conscience qu’un des plus puissants ressorts de l’oppression coloniale réside dans l’intériorisation de la perte d’estime de soi qu’elle instille chez le colonisé. Convaincu qu’un processus comparable de colonisation intérieure permet depuis bien plus longtemps aux classes dominantes d’asseoir leur emprise sur les milieux ruraux en déconsidérant leur culture, il conçoit son action comme une offensive de résistance et déclenche, avec les jeunes adhérents des associations constitutives de son Union, les Opérations de Sauvetage des Traditions Orales Paysannes, ou « OSTOP », qui consistent à aller enregistrer et filmer les anciens dans leurs lieux de vie et de travail. Les captations sonores et audiovisuelles réalisées alors forment la matrice des archives ethnographiques conservées par le Centre d’étude, de recherche et de documentation sur l’oralité, au sein de la « Mesùn » André Pacher, siège de l’UPCP-Métive à Parthenay (Deux-Sèvres).
25Avec l’émergence puis l’essor du mouvement folk, durant la première moitié des années 70, une dynamique purement musicale prend le dessus, même si ceux qui la portent sont peu suspects de conservatisme politique. L’enjeu, pour ces jeunes musiciens, peut-être plus soucieux de performances instrumentales que vocales, est prioritairement artistique et professionnel. Les plus impliqués d’entre eux entendent se mettre à l’écoute et même à l’école des derniers musiciens dits “routiniers”, dont ils revendiquent l’appellation pourtant a priori peu flatteuse : elle désigne traditionnellement ces continuateurs des ménétriers de village, qui, par opposition aux musiciens maîtrisant le solfège et lecteurs de partitions, jouent d’oreille, surtout des airs à danser.
26Leur démarche répond d’abord à une nécessité pratique, celle de se doter d’un répertoire suffisamment fourni pour disposer de la ressource nécessaire à l’animation de ces « bals folk » dont le succès est alors impressionnant, tout en respectant un parti pris consistant à se mettre dans les mêmes conditions d’apprentissage que leurs devanciers, ce qui suppose de s’inscrire dans une chaîne de transmission orale et par conséquent de se tenir à distance des recueils imprimés dont ils ne sauraient du reste que faire puisqu’ils ont soigneusement veillé à ne pas devenir lecteurs. Ils sont paradoxalement encouragés dans cette posture par le refus d’assistance des ethnomusicologues du MNATP, qui ont décrété l’inaccessibilité de leurs enregistrements d’enquête, au motif de la protection des droits moraux des informateurs. Au passage, cette attitude, ressentie comme l’expression du dédain de l’institution scientifique et muséale pour les « chevelus », a stimulé en retour l’agressivité anti-académique des figures du revivalisme et leur volonté de prouver qu’ils feraient des récoltes plus abondantes et meilleures. D’une vexation anecdotique est donc issue – indirectement – l’assise d’une légitimité bientôt sans partage.
27En tout cas, c’est ainsi que s’est amorcé le mouvement qui a poussé des musiciens, anciens étudiants lyonnais, parisiens ou encore toulousains, à quadriller les plateaux et vallées du Massif central, de l’Aubrac au Morvan, comme les Landes de Gascogne ou les bocages poitevin, breton ou normand, pour tenter d’apprivoiser les derniers violoneux, cornemuseux, accordéonistes ou vielleux, s’approprier leurs répertoires, leurs coups d’archet, leurs doigtés et leurs styles, accessoirement recueillir des instruments délaissés. À force de questionner, d’enregistrer ou de filmer les vieux routiniers, beaucoup ont succombé à la tentation de les instituer en maîtres de musique, restaurant ainsi, plus ou moins consciemment le schéma corporatiste où le disciple, le compagnon, s’imprègne, par la répétition et l’imitation, de ce que lui a montré son maître sonneur, en décalquant avec application le processus dépeint par George Sand26 dans son roman éponyme. Aussi bien cette inspiration s’hybride-t-elle en ces années du flower power avec le modèle – ou le cliché – du « maître indien » dont la persistance s’observe encore aujourd’hui27.
28Choisir un ou plusieurs pères en musique, obtenir de lui ou d’eux d’être regardé comme un fils (guère ou pas de fille dans ces lignages électifs !) : l’expérience a été relatée avec la lucidité du recul, sans nier le calcul et le volontarisme initiaux mais sans dissimuler davantage le moment de bascule dans la perte de tout contrôle, par plusieurs néo-routiniers. On s’attachera aux témoignages de deux d’entre eux, Olivier Durif28 et Éric Montbel29, qui se rejoignent pour souligner, dans des termes voisins, que la leçon administrée ressortissait davantage de la philosophie que de l’ethnomusicologie, et qu’en prendre conscience a permis à l’artiste de s’affranchir de l’obsession du collectage, dont ils se gaussent rétrospectivement sans s’exonérer d’avoir succombé au tropisme, le premier raillant ces :
« Collectionneurs dans l’âme avant d’être musiciens, cherchant à reconstituer la musique comme une collection de timbres, épris de la moindre variation qui valoriserait cette collection, cherchant par monts et par violoneux le moindre détail qui agrandirait le corpus. »30
29Quand l’autre assimile à « une cueillette de champignons » la manie de « ramasser des beaux airs [pour] les sauver de l’oubli31 ».
30Et de rectifier :
« En fait, sans le savoir, ce fut une tout autre aventure, à laquelle je n’avais pas forcément demandé d’adhérer : s’inscrire dans une filiation, dans une tradition malgré moi. (…) Rien ne nous avait préparés vraiment à ces rencontres avec des hommes de bien. »32
31Autrement dit, la relation au long cours qui s’est nouée après un premier contact, parfois, du reste, peu concluant, fait progressivement accéder le collecteur au rang d’apôtre du musicien collecté, puis, après sa disparition, à celui d’évangéliste. On peut alors parler de transfiguration et de rédemption. En effet, la représentation qui s’impose ainsi crée un fossé avec le contre-modèle du collecteur-prédateur, auquel sont assignés pêle-mêle tous les prédécesseurs, folkloristes, ethnographes, enquêteurs du MNATP, même si, parallèlement, un hommage est rendu à la consistance de leur héritage. Au contre-modèle est substituée une icône empathique, celle du collecteur-réanimateur qui convainc progressivement ses informateurs de renouer avec une pratique régulière de leur art (le chant, en soliste ou dans la ronde, le jeu instrumental, l’art du conte, etc.), en contexte de sociabilité, récréatif ou festif (veillée, concert, bal).
32Une manifestation récurrente, qui a connu sa vingtième édition en 2015, est particulièrement emblématique de cette assomption du collectage : il s’agit de la fête du chant de Bovel (Ille-et-Vilaine) et des veillées chantées qui sont organisées pour la préparer, dans ce village et dans ceux des cantons alentour, instaurant (ou restaurant), autour d’une pratique et des répertoires auxquels elle est adossée, un vivre-ensemble inter-générationnel et inter-culturel.
33Dans un territoire à mi-chemin de Rennes et de Redon, au cœur de cette Bretagne non bretonnante que d’aucuns dénomment la Gallésie, prospérant sur un terreau associatif33, irrigué, bonifié et viabilisé depuis les années 1970, la manifestation capitalise l’engagement de trois générations de collecteurs dont les interventions, depuis la fin des années 1950, se sont moins succédé que superposées34. Et son écho est encore prolongé par la publication de livres-disques monographiques, centrés sur des chanteurs de tradition et qui donnent à entendre leurs prestations en situation de concert (ou de fest-noz) où ils mènent le chant et où le public leur répond35.
34Le collecteur est par définition un passeur : sa démarche réconforte les trésors vivants de la génération amont, autant qu’elle assure la transmission à celle qui suit la sienne. Sous le regard de celles et ceux qui incarnent la relève des musiques traditionnelles, être ou avoir été collecteur institue en référence, légitime une révérence. Quand le collecteur est également enseignant, cas de figure quasi standard, son prestige s’en voit amplifié auprès des musiciens apprenants dont il a la responsabilité. La jeune violoniste Clémence Cognet, qui a enquêté auprès de quarante-six collecteurs, témoigne du prestige dont ils sont entourés36 et qui lui paraît dû au fait que leur action permet « l’invention d’une tradition qui décède juste après qu’on l’a recueillie37 ». Elle va même jusqu’à invoquer un « mythe de la collecte » dont elle soutient qu’il « a engendré un abandon des démarches de collecte depuis plusieurs années38 », ce qui peut être discuté.
35En fait, le collectage, dans le registre des musiques et danses traditionnelles du domaine français, est un éternel recommencement où les “derniers”39 continuent, quoiqu’on pense et dise, d’avoir une descendance. Preuve qu’il reste pratiqué en milieu rural, plusieurs associations, comme la Loure (Normandie), la Maison du patrimoine oral (Bourgogne) ou l’Agence des musiques des territoires d’Auvergne, proposent des stages d’initiation qui, chaque année, affichent complet. Sans doute les stagiaires sont-ils surtout désireux d’approfondir ainsi leur connaissance du domaine, voire de construire, avec l’apprentissage de la méthodologie adaptée, des outils d’animation, et c’est très exceptionnellement qu’ils deviennent des collecteurs assidus, a fortiori autonomes. Mais les stages comportent nécessairement l’épreuve du terrain et force est de constater que les organisateurs parviennent à en repérer qui, en dépit des visites et des “revisites”, sont demeurés un tant soit peu fertiles.
36Les campagnes, cependant, ne sont plus la cible exclusive des collecteurs de musiques et danses traditionnelles. À dire vrai, c’est quasiment depuis sa création en 1991 que le Centre des Musiques Traditionnelles Rhône-Alpes (CMTRA) s’est mis en quête des « musiques migrantes », portées par les habitants d’origine étrangère et les associations qu’ils ont fondées, afin de restituer dans sa diversité le paysage sonore de l’agglomération lyonnaise40. Les résultats des enquêtes menées dans différents quartiers (la Croix-Rousse, la Guillotière, le 8e arrondissement) ou sur des traditions musicales importées de régions du monde bien circonscrites (Proche-Orient, Maghreb) ont nourri, comme à Bovel, des publications juxtaposant textes, images et sons41. Plus récemment, un collectif de musiciens grenoblois s’est engagé dans une démarche comparable, qui a pour cadre le quartier de la Villeneuve42. Il y a fort à parier que ce type d’initiatives se développera.
37De même, la valorisation spectaculaire de la figure du collecteur n’a sans doute pas fini d’être exploitée sur et par la scène “trad”. Le collectage est en effet devenu au cours de la dernière décennie un argument de spectacle vivant. Le mouvement a été amorcé en 2006, dans un registre intimiste qui est aussi celui de la tradition baroque du tombeau, par le grand violoniste Jean-François Vrod, avec une performance intitulée Le jour de l’air de Jo, veillée pour archives, vidéo et musique. Joseph Perrier, dit “Jo”, était un violoneux de l’Artense43 que Vrod a assidûment pratiqué, comme collecteur puis comme ami et compagnon de jeu. Chaque jour durant l’année consécutive à son décès, il a institué un rituel intime consistant à jouer un air que Jo lui avait appris et à noter les réflexions que cette musique suscitait ou les souvenirs qu’elle convoquait. Il a ensuite organisé des veillées où il lisait à des assemblées restreintes des pages de son journal, interprétait une sélection du répertoire de Jo et projetait les vidéos qu’il avait tournées chez lui44. D’autres acteurs historiques de la mouvance, tels André Ricros45, fondateur de l’AMTA, ou les Poitevins Jean-François Miniot et Maxime Chevrier46 n’ont pas tardé à s’engouffrer dans une brèche permettant de mêler hommage aux musiciens traditionnels et autobiographie. Mais des artistes de la jeune génération s’y sont également risqués47, sans doute pour approcher en la simulant sur scène une expérience qu’ils n’ont pas ou guère vécue. À leur manière, ils donnent corps à l’injonction de Jean-Michel Renard sous la dédicace de laquelle cet article s’est placé.
38D’autres initiatives, plus scientifiques, peuvent avoir droit de cité. L’une consisterait à entreprendre la prosopographie des collecteurs des musiques et danses traditionnelles qui ont opéré ou qui opèrent en France depuis la Libération. Ce qui aurait déjà pour mérite de prolonger les travaux engagés voici près de vingt ans par Gérard Carreau48, Bénédicte Bonnemason et Pierre Corbefin49. Enquêter sur les enquêteurs, ou collecter les collecteurs, s’impose en effet, non pour succomber à la tentation d’une connaissance tournant sur elle-même pour consolider un savoir circulaire, mais à la fois pour dresser le bilan patrimonial de ces ethnographies en roue libre et pour sonder les reins et les cœurs de celles et ceux qui furent ou qui restent possédés par cette cause qu’on aurait tort de percevoir comme désuète ou perdue.
Bibliographie
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Annexe
Illustrations
Notes de bas de page
1 L’auteur remercie, pour l’aide qu’ils lui ont apportée lors de la préparation de la communication dont cet article est issu, Clémence Cognet, Stéphanie Coulais, Yvon Davy, David De Abreu, Éric Desgrugillers, Éva et Olivier Durif, Yaël Epstein, Vincent Morel, Mikael O’Sullivan et Gwenaëlle Sarrat.
2 J.-M. Renard, Histoire d’un collectage.
3 T. Hersart de la Villemarqué, « Barzaz Breizh » (…).
4 Cf. J.-L. Le Quellec (éd.), Collecter la mémoire de l’autre.
5 En équipe avec Marie-Barbara Le Gonidec et dans le sillage des travaux de S. Iglesias, Musicologie et Occupation, et de B. Gérard, Histoire de l’ethnomusicologie en France (1929-1961), lesquels dérivent eux-mêmes des actes d’un colloque fondateur édités par J. Christophe, D.-M. Boëll et R. Meyran (dir.), Du folklore à l’ethnologie.
6 J. Cheyronnaud (éd.), Instructions pour un recueil général des poésies populaires de la France.
7 J.-M. Guilcher, Danse traditionnelle et anciens milieux ruraux français. Tradition, Histoire, Société. Le grand ethnochoréologue français emploie cette expression qui lui paraît plus appropriée que celle de société traditionnelle.
8 E. Conan et H. Rousso, Vichy, un passé qui ne passe pas.
9 C. Faure, Le projet culturel de Vichy, folklore et révolution nationale, 1940-1944.
10 Directeur de la musique puis de la musique et de la danse d’octobre 1981 à septembre 1986.
11 Ethnomusicologue au Musée de l’homme, alors chargé de recherches au CNRS, chargé de mission (à mi-temps) pour les musiques traditionnelles à la direction de la musique d’avril 1982 à 1985.
12 Qui juxtapose des associations existantes, comme l’Union pour la culture populaire Poitou-Charentes (UPCP), Dastum, le Conservatoire occitan de Toulouse, l’Agence des musiques traditionnelles d’Auvergne (AMTA), et les centres qui se créent en Aquitaine (Lapios), Rhône-Alpes (CMTRA), Languedoc-Roussillon, Limousin (CRMT) ou encore en Corse et en Berry.
13 Qui devient au printemps 1992 la FAMDT (Fédération des Associations de Musiques et Danses Traditionnelles).
14 Cité par N. Barbe, Isac Chiva, ethnologie et politique patrimoniale.
15 F. Descamps, La place et le rôle du collecteur de témoignages oraux.
16 Ibidem.
17 Accessible à l’adresse http://www.portaildupatrimoineoral.org. Le site a été mis en ligne en 2011 mais le pôle associé de la Bibliothèque nationale de France dont il est l’émanation et que porte la FAMDT existe depuis 1999.
18 On dénombre 22 structures documentaires, actives ou désormais en sommeil, toutes, à une exception près, de statut associatif. Le portail rassemble huit adhérents de la FAMDT (AMTA, Centre occitan des musiques et danses traditionnelles (COMDT), Centre régional des musiques traditionnelles du Limousin (CRMTL), Dastum (Bretagne), La Loure (Normandie), Maison du patrimoine oral (Bourgogne), Mùsic (Roussillon), UPCP-Métive (Poitou-Charentes), ainsi qu’une branche d’une unité mixte de service CNRS-Aix Marseille Université (phonothèque de la Maison méditerranéenne des sciences de l’homme) ; d’autres organismes, dont certains sont d’ailleurs membres de la FAMDT, comme le CMTRA, conservent des stocks imposants dont la mise en ligne n’est pas encore à l’ordre du jour.
19 Terme qui signifie précisément « collecter ».
20 L’AMTA revendique 56 collecteurs, le CRMTL 32, le COMDT, pour le Languedoc toulousain, et la Talvera, qui est implantée dans le Tarn, 56. Le complément est amené, pour le Béarn, par l’Institut occitan d’Aquitaine.
21 Dont quinze pour l’actuelle région Provence Alpes Côte d’Azur.
22 Terre d’émulation, sinon d’affrontement, entre l’UPCP-Métive, républicaine, laïque et socialisante, et l’Arexcpo fondée et animée par un collaborateur de P. de Villiers, au conseil général comme au Puy du Fou.
23 C’est en terre morvandelle que la collecte a été particulièrement intense et se poursuit encore, mobilisant à la faveur de stages d’initiation à l’enquête ethnographique un contingent régulièrement renouvelé d’occasionnels.
24 Où, comme en Bretagne, le mouvement a été précoce et où il s’est vigoureusement relancé à l’époque du riacquistù. Mais si Dastum s’est imposé comme point de rassemblement et de conservation, la fragmentation a prévalu dans l’île.
25 À défaut d’une étude bio-bibliographique nourrie sur André Pacher, on peut renvoyer à un reportage télévisé de 1970, contemporain des débuts de l’UPCP et qui avait été tourné pour l’émission de l’ORTF Vivre en France (http://www.ina.fr/video/CAF93053086), ainsi qu’au CD anthologique « Chants de protestation » édité par Modal en 1999, dont le livret d’accompagnement comporte des extraits de « Dits et écrits d’André Pacher ».
26 G. Sand, Les maîtres sonneurs.
27 M. Vassallo, Clichés et angles morts.
28 O. Durif a été président de la FAMDT (1996-2008) et dirige actuellement le CRMTL qu’il a fondé en 1998.
29 E. Montbel, fondateur et ancien co-directeur du CMTRA, est docteur en ethnomusicologie, avec une thèse dont il a tiré un ouvrage paru sous le titre Cornemuses à miroir du Limousin (Paris, L’Harmattan, 2013).
30 O. Durif, Revenir à Lacombe…, p. 208.
31 E. Montbel, Pour les amateurs de beau jeu, deux solitaires au pays des cornemuses, p. 3.
32 Ibid.
33 Il faut citer le Groupement culturel breton des pays de Vilaine, organisateur à Redon d’un concours-festival (La Bogue d’or), la Bouèze, la Grandjagoul et l’Épille, plus directement impliquée dans la tenue de la fête du chant.
34 Albert Poulain et Louisette Radioyès ont été pionniers ; leur ont emboîté le pas un Yves Defrance et un Pierrick Cordonnier, respectivement fondateurs de La Bouèze et de la Grandjagoul ; la relève est incarnée par Charles Quimbert, ancien directeur de Dastum, et par Vincent Morel, qui y assure la conservation et l’inventaire des collectes gallèses, tous deux par ailleurs créateurs de l’Epille et piliers de la fête du chant.
35 Sont ainsi paru en 2014 André Drumel, chanteur du pays de Pontivy, co-édité par Dastum et l’Epille, et Vous jeunes gens qui désirez entendre, Gisèle Gallais… , co-édition Dastum – Presses universitaires de Rennes.
36 C. Cognet, Le collectage, pourquoi recueillir les musiques traditionnelles, p. 44. : « Le fait d’avoir collecté est devenu une source de prestige ».
37 Ibid.
38 Ibid.
39 Auxquels Daniel Fabre a consacré, entre 2007 et 2009, son séminaire de l’École des hautes études en sciences sociales. Voir aussi, sur le paradigme du dernier, D. Fabre, « D’une ethnologie romantique ».
40 E. Montbel, « Lyon Hallogène. Les musiques de l’émigration dans la cité ».
41 Les références en sont fournies à l’adresse http://www.cmtra.org/Nos_actions/36_Atlas_sonores_1.htm
42 Le projet, intitulé In Situ, est principalement porté par l’association Sasfé mais bénéficie du concours des musiciens de Mustradem (MUSiques TRAditionnelles de DEMain). Il a été conçu comme « une action de collectage-création », amorcée en janvier 2014 « à partir d’un collectage de chants, musiques et ambiances sonores issus des différentes populations du quartier de la Villeneuve de Grenoble » qui alimente « diverses créations, simultanées et successives » dont les premières ont été présentées en juin 2014.
Source : http://www.sasfe.fr/projets/insitu/
43 Pays d’Auvergne à cheval entre les départements du Cantal et du Puy-de-Dôme.
44 Aux dires de l’artiste lui-même, aucune captation de ces veillées n’a été réalisée. Restent les documents sonores et audiovisuels qu’elles ont mobilisés ainsi qu’un livre comportant les transcriptions musicales des « 117 mélodies du répertoire de Joseph Perrier, violoneux de l’Artense » (J.-F. Vrod et L. Dupré, Les airs de Jo).
45 Auteur-interprète de Je vous réfléchis, « ciné-spectacle » créé en 2010 au festival Planète Musique de Nanterre.
46 Co-auteurs d’un spectacle intitulé Pas de danseur, pas de danse, dont une première version a été proposée à l’édition 2001 du festival De bouche à oreille (Parthenay) et dont dérive Manière de danse... histoire de dire, nouvelle création présentée en 2014 à l’écomusée du Marais vendéen « Le Daviaud ». M. Chevrier a également conçu une performance soliste intitulée « Le choix appartient à celui qui le fait » (festival Bouche à oreille 2011).
47 La Maison des cultures de pays (fondée à Parthenay par André Pacher) a programmé au printemps 2014 une performance intitulée 4e jour d’enquête dont l’argument est ainsi résumé : « Chez un Ancien volubile, une jeune fille vient faire sa première enquête. Le dialogue qui s’engage permet au public de se questionner sur la place de chacun, informateur et collecteur. » (source : http://www.metive.org/Memoire-des-sources.html).
48 G. Carreau, Dictionnaire biographique des collecteurs de l’ancienne chanson folklorique française (1830-1930 environ).
49 B. Bonnemason et P. Corbefin, Les chercheurs et collecteurs en danse traditionnelle. Répertoire de recensement pour la France métropolitaine.
Auteur
Conservateur général du patrimoine
Chercheur au IIAC-Lahic (MCC-CNRS)
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Signes et communication dans les civilisations de la parole
Olivier Buchsenschutz, Christian Jeunesse, Claude Mordant et al. (dir.)
2016