L’appartenance italienne à la bourgeoisie et au fascisme et ses rituels chez Alberto Moravia : du conformisme à la transgression
p. 77-87
Résumé
Les œuvres de Moravia retranscrivent la réalité de l’appartenance à deux groupes : la bourgeoisie et le fascisme. Elles rendent compte des différents signes et rituels d’appartenance nécessaires à une intégration totale : la fausseté, le nihilisme et la supériorité du matériel sur l’humain pour appartenir à la bourgeoisie, et la virilité et la déshumanisation pour adhérer au fascisme. L’enjeu est de comprendre comment la réalité sociale et politique de l’appartenance en Italie est retranscrite dans la fiction de Moravia, d’étudier la complexité, les difficultés de cette appartenance (comment s’intégrer dans un groupe quand on n’en maîtrise pas les codes ?) en analysant comment le contre-exemple permet d’analyser la société et ses codes d’appartenance, ses transgressions. L’étude sera basée sur différentes œuvres de Moravia, majoritairement des romans mais aussi quelques nouvelles afin de rendre compte d’une évolution dans son écriture.
Texte intégral
1Dans l’ère de la mondialisation qui est la nôtre, les frontières ont perdu leur caractère sacré et défensif, la notion de distance a été profondément bouleversée et l’échange, le partage règnent désormais en maîtres. Le développement d’Internet a fortement contribué à cette réalité plus puissante que jamais car, si les réseaux ont toujours existé, ils n’ont jamais été aussi présents qu’aujourd’hui, facilités par le progrès des voies et modes de déplacement, de communication. C’est pourquoi il semble essentiel de s’interroger sur le double indissociable réseaux-société. Tantôt héritage, tantôt partage, c’est toujours par un réseau que se crée l’union de groupes et par un système de codes, de signes d’appartenance que naît une identité, qu’elle soit sociale, politique ou encore artistique, littéraire. C’est cette dernière qui est au cœur de cette étude visant à mieux comprendre l’appartenance italienne à la bourgeoisie et au fascisme et ses rituels dans l’œuvre de l’auteur romain Alberto Moravia : l’enjeu est de saisir comment il a exploité les moyens offerts par la littérature pour retranscrire la (sa ?) réalité. Une analyse, donc, de ces signes d’appartenance qu’il fallait absolument connaître et appliquer pour intégrer un groupe quel qu’il soit. Mais s’ils sont essentiels au processus d’intégration, que faire quand on ne les maîtrise pas ? Comment surmonter l’échec de ce dessein devenu indispensable voire vital ? En somme, comment et pourquoi les anti-héros de Moravia oscillent-ils perpétuellement entre conformisme et transgression ?
2Avant toute chose, il est nécessaire de rappeler qui était Alberto Moravia. Né en 1907 et décédé en 1990, c’est un auteur atypique car au talent précoce : âgé à peine de 17 ans, il commence l’écriture de son premier roman, Les Indifférents1, loué par la critique. Commence alors une longue et opulente production littéraire. Il explore les possibilités offertes par la littérature : tantôt le roman (son genre de prédilection), tantôt le théâtre (attrait justifié par l’intensité tragique qui le caractérise), tantôt la nouvelle, l’essai ou les contes pour enfants. Mais le but demeure toujours le même : représenter la société telle qu’elle est pour mieux la comprendre et, surtout, dans l’espoir de provoquer des prises de conscience chez un peuple qu’il considère endormi, passif, envoûté par des chimères. Retranscrire la réalité est selon lui le rôle premier d’un écrivain, même si cette fonction s’est peu à peu transformée en besoin viscéral. Toutefois, Moravia n’a pas toujours été plébiscité : ardemment critiqué par le Vatican qui jugeait son propos scabreux et immoral, voire amoral, il a surtout été vivement contesté par le régime fasciste qui percevait en lui un appel insolent à la rébellion du peuple, sans oublier les féministes qui considéraient (et considèrent encore aujourd’hui) ses personnages comme représentatifs d’une idéologie sexiste, misogyne et phallocrate, amalgame somme toute fallacieux. La méfiance du fascisme à son égard l’a inévitablement confronté à l’obstacle de la censure, source de problèmes financiers sérieux et de fuites récurrentes. Mais loin de renoncer à son intégrité politico-intellectuelle, il a élaboré des stratagèmes pour contourner cette censure et poursuivre son activité littéraire, goûtant dès lors à la puissance de l’implicite. Si son talent est indéniable, il est néanmoins regrettable que son travail n’ait pas obtenu l’attention, l’intérêt qu’il mérite. C’est d’ailleurs ce qui pousse Renzo Paris, critique italien, à s’exclamer :
« Tout à coup, pour tout le monde, Moravia sembla n’avoir jamais existé. Dans les articles le concernant qui sortaient toutefois de temps en temps, on parlait d’oubli. (…) Et c’était comme oublier un continent ! »2
3Afin d’explorer la retranscription de la réalité sociale et politique chez Moravia, cette étude s’appuiera sur plusieurs de ses œuvres, majoritairement des romans, et sur certaines critiques significatives.
Les signes d’appartenance à la bourgeoisie : le règne de l’inauthentique et ses codes chez Alberto Moravia, entre témoignage et critique
4Au xxe siècle, en Italie, la bourgeoisie est la classe dominante. Plusieurs sous-catégories la composent : la haute bourgeoisie comprenant principalement les industriels et les commerçants, la bourgeoisie moyenne incluant les propriétaires de patrimoines ou de rentes solides, et enfin la petite bourgeoisie faite d’artisans ou de petits commerçants. Au siècle dernier, la bourgeoisie est rapidement devenue indissociable de la société capitaliste, incarnant alors cette société matérialiste qui privilégie l’industriel à l’homme. Il convient de déterminer quels sont les signes d’appartenance à la bourgeoisie et comment Moravia les introduit dans son œuvre pour témoigner de cette réalité et, surtout, en révéler la nocivité.
5Moravia a grandi auprès d’un père architecte et peintre d’origine juive et d’une mère catholique dans une famille bourgeoise moyenne. D’ailleurs, lorsque René de Ceccatty lui demande :
« Quel genre de vie menais-tu, quand tu étais petit ? »
il répond naturellement :
« La vie d’un enfant de la bourgeoisie, qui joue avec ses sœurs, se couche de bonne heure, parle français avec sa gouvernante. »3
6Si ce contexte familial lui a permis de connaître parfaitement la bourgeoisie et ses failles, il a été source d’une immense douleur : celle de se sentir « anormal » parmi tous ces gens à l’attitude turpide. Comme il est impossible d’étudier les signes d’appartenance à la bourgeoisie dans leur intégralité, nous nous intéresserons aux plus importants, à ceux qui étaient réellement constitutifs d’une identité sociale, ces codes qu’il fallait donc respecter et appliquer pour être considéré comme bourgeois. Les signes d’appartenance à la bourgeoisie gravitent autour d’une seule et même idée : l’ambivalence entre le vrai et le faux, l’être et le non-être.
7S’il est possible de caractériser la bourgeoisie par un seul terme, c’est bien l’hypocrisie. Nous en trouvons une représentation significative dans La femme et le communisme, anthologie des grands textes marxistes :
« Cellule exclusive et antisociale, vouée essentiellement à la garde et à la transmission du patrimoine, la famille bourgeoise est caractérisée par l’égoïsme, le mensonge, l’hypocrisie [...] »4
8La grandeur sociale, le conformisme ou encore la société capitaliste poussent les bourgeois à privilégier le paraître plutôt que l’être, s’enfonçant davantage dans les faux-semblants, dans l’inauthentique. Selon Moravia, la bourgeoisie française en est une incarnation parfaite, car elle est faite d’une élégance immonde et de gens calculateurs : voici ce qu’il dit dans I viaggi :
« Air français, donc bourgeois. La fausse taverne était pleine de gens (...) Il y avait les familles de commerçants ou de fonctionnaires avec leurs enfants sournois et pâles (...) Il y avait les jeunes commerçants endimanchés, à l’élégance immonde avec leurs guêtres, leurs vêtements moulants (...) leurs cravates dépareillées, leurs visages hâves et violents, leur œil faux et endolori. »5
9Moravia est conscient de ce règne du faux dans la bourgeoisie, c’est pourquoi il le place au cœur de son œuvre : il se délecte de la rhétorique, privilégiant la métaphore filée de l’inauthentique. C’est d’abord par le symbole du masque : dans tous ses romans, il se montre plus ou moins présent, plus ou moins puissant, mais il demeure omniprésent. Ceci est particulièrement vrai dans L’amour conjugal où ce symbole est indissociable de la description physique de Leda, l’épouse du protagoniste :
« La grimace donnait à tout son visage l’aspect répugnant d’un masque grotesque où certains traits auraient été justement exagérés jusqu’à la caricature par un humour particulier à la fois obscène et lamentable. »6
10Mais l’inauthentique, signe premier d’appartenance à la bourgeoisie, est également cristallisé dans l’image du théâtre. C’est dans Agostino qu’elle est la plus intéressante :
« Convaincu d’avoir sur lui tous les regards, il avait l’impression d’être enveloppé par un air théâtral et exemplaire comme si, au lieu d’être sur une plage, il s’était trouvé avec sa mère sur une scène, sous les yeux attentifs d’une centaine de spectateurs. »7
11Ce recours aux attributs du théâtre lui permet de témoigner d’une réalité tout en conservant sa vision critique : les bourgeois d’abord, et les hommes en général, renoncent peu à peu à leur identité réelle pour s’intégrer et être considérés « normaux ». Ils deviennent des acteurs qui jouent un rôle en société, réalité qui est à son paroxysme dans la nouvelle « Facciamo un gioco » : une mère y avoue que, une fois seule, elle se libère du paraître pour devenir ce qu’elle est réellement, c’est-à-dire non pas une mère affectueuse et dévouée, mais une mère cynique et froide :
« Je suis seule, et à peine suis-je seule que, étonnamment, je cesse d’être la mère et l’épouse affectueuse, infatigable, diligente, essoufflée, anxieuse qui ne prend jamais une minute de repos et qui se consacre continuellement à sa famille et je deviens une personne cynique, froide, impie et lucide. C’est une métamorphose bien curieuse qui m’étonne et aussi, un peu, m’effraie. »8
12Cette société bourgeoise apparaît alors comme symbole du faux, de l’absurde, de perte totale de sens. D’ailleurs, dans ses romans comme dans ses interviews, Moravia affirme que le langage a fini par mourir, substitué par le corps :
« Le langage parlé n’exprime plus grand-chose ; il a été remplacé par celui du corps, du physique. »9
13C’est surtout dans L’Ennui que le langage apparaît comme dénué de sens. À propos de Cecilia, de l’héroïne fugitive qui échappe sans cesse à Dino, il écrit :
« Ce silence signifiait que mentir et tromper étaient pour elle des mots privés de sens, non point parce qu’elle ne les comprenait pas, mais parce que rien dans la vie ne les pouvait désigner. Je la sentis m’échapper de nouveau… »10
ou encore :
« Ainsi, sans le vouloir, Cecilia laissait entendre que, pour elle, la vérité et le mensonge n’étaient qu’une seule et même chose et qu’au fond, il n’y a ni vérité ni mensonge. Dans sa bouche, les mots paraissaient perdre toute réelle signification, se réduire à des sons abstraits, comme s’ils eussent été les mots d’une langue étrangère ignorée de moi. »
14Nous l’avons vu, Moravia voit dans la bourgeoisie française l’incarnation parfaite de l’esprit bourgeois parce qu’elle est fausse, mais avant tout parce qu’elle est calculatrice, manipulatrice :
« Il y avait les bons vivants à la jovialité assourdissante, cordiale, démagogique et au regard froid, calculateur et prudent. »11 (Viaggi)
15Il existe un autre signe d’appartenance à la bourgeoisie : le conformisme. Pour faire partie du groupe, l’homme doit connaître et appliquer les codes qui le régissent : être considéré « normal » pour s’intégrer. Moravia perçoit cette réalité comme un danger puisque le conformisme nuit à l’individualité, il ne permet plus de distinguer les hommes. Il introduit alors cette réalité dans sa production littéraire, comme le souligne Luca Clerici :
« Il n’y avait que des groupes constitués de personnes qui portaient la même chemise et les mêmes pantalons ou encore le costume traditionnel, et pour cela, il était impossible de les distinguer les uns des autres. »12
16Mais c’est surtout à travers Le conformiste, son roman le plus significatif, qu’il dévoile le mieux sa vision critique. Marcello, enfant, prend conscience de son anormalité après plusieurs destructions (de la plus anodine avec les feuilles, à la plus cruelle avec le chat). Persuadé que toutes les difficultés qu’il rencontre sont dues à cette anormalité, il se fait la promesse d’entamer un processus de normalisation pour ne plus être exclu. Ce long travail semble porter ses fruits lorsqu’il réalise, en regardant un article de journal :
« J’éprouvai un soulagement singulier et, peut-être, plus qu’un soulagement, une stupeur en m’apercevant que la nouvelle imprimée sur le papier jauni [...] ne provoquait aucun écho appréciable dans mon âme. [...] Comment cette guérison s’était produite ? Je n’aurais pas su le dire. Mais, sans doute, le temps n’avait pas été le seul à produire un tel résultat. Je me devais également beaucoup, à moi et à ma volonté consciente, à travers toutes ces années, de sortir de l’anormalité et de devenir l’égal des autres. »13
17Ainsi, Moravia met en lumière la conséquence majeure du conformisme : la perte de repères. C’est ce qui pousse Marcello à croire qu’il deviendra normal en devenant indifférent :
« Il fut content de cette indifférence, signe indubitable qu’entre le garçon qu’il avait été et le jeune homme qu’il était désormais il n’y avait plus aucun rapport, ni même caché, ni même indirect. Il était vraiment un autre. »14
18Pourtant, c’est précisément l’inverse : c’est parce qu’il est indifférent, presque inhumain qu’il est exclu du groupe tant convoité. Toutefois, c’est dans Io e lui, publié en 1971, que Moravia dévoile le mieux les conséquences du conformisme : c’est précisément l’attitude conformiste de la mère de Federico qui déclenche chez lui des mouvements de rage incontrôlables :
« L’attente se prolonge, dans la maison silencieuse, face à des meubles du xxe siècle. Et ma rage croît (...) Ils symbolisent le moralisme répressif et imbécile des années 30. De la bourgeoisie fasciste ! Nationaliste ! Militariste ! Colonialiste ! Paleocapitaliste ! »15
19Il existe enfin un dernier signe d’appartenance inhérent à la bourgeoisie : le nihilisme. Le jugement de valeur a été totalement bouleversé, privilégiant alors le matériel à l’humain. Moravia est convaincu que le règne de l’argent ne peut conduire qu’au vice :
« Ceux qui accumulent de l’argent ont l’âme inévitablement pleine de bassesses et de méchancetés. »16
20Suite à l’une de leur conversation, Jeanine Delpech révèle l’image que Moravia se fait de Rome :
« J’adore l’Italie, mais Rome est ce qu’il y a de moins bien en Italie. Les gens y ont l’esprit le plus étroit, plus mesquin qu’en province. Ils n’osent pas bousculer de vieilles traditions qui ont perdu leur sens. Les grands seigneurs d’autrefois avaient le mépris de l’argent, les nobles d’aujourd’hui, heureusement appauvris, en ont le culte. Leurs fêtes, leurs maisons, leurs amours dégagent un ennui mortel. J’étouffe ici. »17
21C’est précisément ce matérialisme qui, selon lui, contribue à la déshumanisation de l’homme : objet de l’industrie, il est devenu lui-même machine, « marchandise humaine » (merce umana)
« La civilisation industrielle est aussi une civilisation mécanique, c’est-à-dire elle produit une société à son image, organisée et articulée, tout comme une machine, dans les rapports sociaux, intellectuels, psychologiques. »18
22On assiste alors à une perte des valeurs humaines :
« La vie est ainsi faite. La bourgeoisie met désormais à exécution une représentation rituelle de valeurs insensées, sans plus aucun rapport avec les nécessités réelles, les sentiments réels des gens. »19
23Nous retrouvons cette déshumanisation banalisée dans son œuvre, notamment avec l’omniprésence du dédoublement, de la perte d’identité, même si c’est dans Io e lui que l’auteur se montre le plus explicite avec l’apparition d’une deuxième instance, « Lui » permettant au protagoniste anti-héros de se déculpabiliser. Avec 1934, Moravia se montre plus pessimiste que jamais avec la résignation de son protagoniste face à un monde déshumanisant, dominé par la violence :
« Malheureusement ou heureusement, dit Lucio, nous ne sommes pas complètement des hommes ; même. Nous le sommes de manière infime, disons à 1 ou 2 % ; pour le reste nous sommes des animaux à 98 %. »20
24Toutefois, si la majorité de ses personnages demeurent passifs, certains s’insurgent contre cette fausseté bourgeoise, c’est le cas par exemple de Carla dans Les Indifférents.
25Voici comment Moravia la représente :
« Carla ne s’accepte ni elle, ni le monde où il lui a été donné de naître, et le fait d’aller au lit avec l’amant de sa mère est pour elle, en réalité, un acte de défi à la conventionalité du monde bourgeois. (…) Alors elle cherche un moyen d’expression nouveau et elle le trouve dans le sexe qui, à la fin, demeure l’unique moyen de communication dont elle dispose. »21
26Ainsi, bourgeois par sa famille, Moravia a lutté contre cette caste qu’il jugeait répugnante en la décrivant puis en la déconstruisant afin d’en dénoncer les vices et les perversions. Le cadre familial qui l’a vu grandir a provoqué chez lui un fort dégoût : lui, qui se sentait anormal parmi tous ces êtres inauthentiques, rêve d’un monde où les valeurs humaines seraient prépondérantes. C’est ce qui a motivé ses nombreux voyages dans des contrées sauvages, seul endroit source de paix… Une pensée cristallisée par cette exclamation :
« Ah bourgeoisie, pensais-je, comme tu es vive et comme tu es insupportable. »22
Les signes d’appartenance au fascisme : le culte de la virilité et ses codes chez Alberto Moravia, entre témoignage et critique
27L’histoire de l’Italie fasciste débute le 30 octobre 1922 avec la prise de pouvoir par la force de Benito Mussolini, secondé par le PNF (Parti National Fasciste), et s’achève le 25 juillet 1943 avec la fin de sa dictature. L’enjeu de ce second axe est de déterminer quels sont les signes d’appartenance au fascisme et comment Moravia les introduit dans son œuvre pour témoigner de cette réalité et, surtout, dévoiler sa nocivité. Quels sont, en matière d’identité politique, ces codes qu’il fallait respecter et appliquer pour être considéré fasciste ?
28Ces signes d’appartenance gravitent autour d’une seule et même idée, la virilité : en effet, Benito Mussolini a bâti son image d’homme politique sur la force physique, donnant ainsi naissance à une esthétique du corps mâle idéal qu’il incarnait parfaitement. Il était l’exemple vivant de la puissance athlétique fasciste, devenant une propagande vivante de son culte de la force, de la guerre, de la vigueur. Voici d’ailleurs comment il définit lui-même le fascisme :
« Le fascisme exige un homme actif et donnant à l’action toutes ses énergies ; il le veut virilement conscient des difficultés qui existent et prêt à les affronter. »23
29Ce culte de la virilité se retrouve même dans sa famille puisqu’il donne une éducation virile à sa fille Edda qui « doit apprendre à ne jamais pleurer et à dompter ses propres peurs »24.
30Ce culte, caractéristique fasciste, passe aussi par l’apologie de la violence, laquelle apparaît explicitement dans leur choix de symboles : un poing fermé, un gourdin, un menton en avant provocateur… Il n’hésite pas à ordonner l’exécution des opposants au régime :
« Il n’y a qu’un remède : tapez dur ! Et nous espérons que peu à peu, en pilant les crânes, on dégrisera les cerveaux. »25
31Du culte de la virilité de Mussolini découle sa soif de pouvoir : encore enfant, il dit à sa mère « Maman, un jour, l’Italie devra me craindre »26. Il veut devenir puissant et pouvoir contrôler, assujettir les autres devenus instruments de pouvoir. Cette réalité revient de manière perpétuelle chez Moravia à travers le rapport omniprésent de dominant à dominé.
32Moravia, rappelons-le, se sent investi de la mission de tout auteur, c’est-à-dire représenter la société telle qu’elle est pour mieux la comprendre. C’est pourquoi il a retranscrit cette réalité du culte de la virilité dans son œuvre, à travers ses protagonistes masculins, par des démonstrations de force chez les hommes mariés qui se montrent brutaux, violents envers leur femme. Riccardo, par exemple, dans Le mépris, impose un interrogatoire forcé à sa femme, exigeant d’elle qu’elle lui avoue son mépris. Alors qu’elle nie et tente de s’enfuir :
« Je ne reconnais rien… Je voudrais simplement que tu me laisses en paix… laisse-moi en paix. »27
« Il la referm(e) au vol, la saisissant par le poignet ».
« Envahi par une fureur qui ne lui laiss(e) désormais plus le temps de réfléchir (...) il lui saisit de nouveau la main (...) de manière point caressante ».
33Notons que cet euphémisme final ironise brillamment la violence. Mais ces personnages ne sont que des chimères. En réalité, ces démonstrations de force par la violence ne font que dissimuler leur impuissance et font d’eux des anti-héros pour qui le corps féminin devient un exutoire à la frustration. Ainsi, les anti-héros de Moravia lui permettent de révéler la réalité sans philtre grâce au contraste entre l’apparence (la robustesse) et l’identité réelle (l’impuissance et la lâcheté), et donc de critiquer ce règne de l’inauthentique.
34Le culte de la virilité de Mussolini se poursuit dans sa vision de la femme : il s’appuie sur les théories de Loffredo qui prétend l’intelligence féminine inférieure à l’intelligence masculine, il proscrit le travail féminin qui entraîne selon lui « la masculinisation de la femme, l’accroissement du chômage, la stérilité, le divorce ». Une nouvelle fois, Moravia représente la réalité telle qu’elle est : ses personnages féminins sont le plus souvent légers, ce sont des femmes peu instruites qui acceptent docilement la soumission imposée par leur époux. L’auteur romain repousse les limites de la morale pour présenter le réel sans nul filtre.
35C’est ainsi qu’il donne naissance à Fausta qui, dans Io e lui, accepte l’intolérable en ne réagissant ni à son départ, ni aux violences psychologique, verbale et physique. Elle est prête à tout pour pouvoir le reconquérir au point d’accepter son unique condition : jouer le rôle d’une vache lors du rapport sexuel. Moravia est donc un jongleur de mots qui utilise l’ironie, le grotesque et l’immoral, voire l’amoral, pour montrer les travers de cette culture virile. Il se rit des schémas traditionnels : si l’homme fasciste doit être l’incarnation de la virilité, et la femme celle de la féminité sensuelle, il en est tout autrement dans son œuvre. Dans certains romans, il règne une certaine confusion dans l’identité sexuelle de ses personnages : ceux masculins font l’objet d’une féminisation, c’est le cas de Marcello dans Le conformiste qui a :
« Hérité de sa mère la perfection des traits presque mièvre dans sa régularité et sa douceur. Il avait un visage rond, des joues brunes et délicates, un petit nez, une bouche sinueuse à l’expression capricieuse et boudeuse (...) C’était presque un visage de fillette. »28
36Alors que les personnages féminins sont de plus en plus masculinisés : elles ont d’abord un corps musclé mais sensuel, puis elles prennent davantage confiance en elles jusqu’à Io e lui avec Irène, cette femme indépendante qui refuse formellement la présence et la nécessité d’un homme. Elle renvoie Federico à son impuissance en usant de la violence comme lui le fait avec son épouse :
« Elle m’assène des gifles et des coups de poing. Elle m’attrape alors par les cheveux, me jette par-dessus le lit et me projette sur le pavé le long de deux ou trois pièces, tout en me donnant en même temps, à l’aveugle, une quantité de coups de pied. À la fin elle me jette sur le divan et me serre le cou, comme pour m’étrangler. »29
37Ainsi, ce renversement des identités sexuelles révèle parfaitement bien l’absurdité du réel et de ses règles abjectes.
38Enfin, Mussolini a bâti son culte de la virilité en incarnant la figure du père protecteur, sévère mais bon. Les livres de classe véhiculaient cette image, faisant de l’éducation un énième instrument de propagande.
39Par exemple, dans La propagande dans la Seconde Guerre mondiale, Anthony Rhodes rapporte que l’on pouvait lire :
« Benito Mussolini aime beaucoup les enfants. Les enfants d’Italie aiment beaucoup le Duce. Vive le Duce ! Salut au Duce. À nous ! »30
40Nous retrouvons une fois de plus cette réalité chez Moravia : plusieurs personnages masculins sont des figures paternelles. C’est le cas dans Agostino (écrit en temps de guerre) où le protagoniste est un enfant dont le père est absent. Il trouve le réconfort chez Saro, un homme qui agit « paternellement »31 « avec la complaisance paternelle habituelle », qui rassure Agostino en lui disant « n’aie pas peur »32, en lui parlant « avec une sorte de complicité »33, le défendant face à une bande de jeunes moqueurs, même s’il sait aussi se montrer autoritaire :
« Donnez-moi ces cigarettes. »34
41Toutefois, cette image du père bon, chez Mussolini comme chez Moravia, finit par éclater : si les Italiens perçoivent d’abord le Duce comme un père protecteur, ils finissent par le considérer comme un traître. C’est le cas également des figures paternelles chez Moravia.
42Saro montre son vrai visage en tentant de séduire Agostino lors d’une traversée en barque. Sa monstruosité morale devient alors physique : il a l’aspect d’un « batracien »35 qui « a dans chaque main non pas cinq mais six doigts qui donnent à ses mains un aspect énorme (…), et qui ressemblent plus à des tentacules trapus qu’à des doigts »36, la pieuvre étant le symbole du monstrueux, du démoniaque. Si Moravia tient à représenter la réalité telle qu’elle est, il repousse de plus en plus les limites, ôtant filtres et tabous : en choisissant Federico comme protagoniste pour Io e lui, il met en scène un homme aux pulsions immorales qui se décharge de toute culpabilité qu’il attribue à « lui ». Mais malgré tout, c’est bien lui qui séduit Irène pour se rapprocher de sa fille, Virginia dont le nom symbolique incarne l’innocence infantile :
« Soudainement ‘lui’ parle. Sûr de sa domination et de mon obéissance, il dit :
– Avant toute chose, tu dois lui fermer la bouche avec ta main pour l’empêcher de crier. Si elle se débat, mets l’autre sur sa gorge et sers sans hésiter (…) Dans cinq ans au maximum elle sera parfaitement apte à nous consoler de la froideur de sa mère »
– Dégoûtant
– Pourquoi dégoûtant ? Regarde ses yeux et ses signes de fatigue sous les yeux. Elle paraît être une femme, peut-être l’est-elle déjà (…) »37
43Mais cette tentative échoue heureusement, comme toutes les autres, puisque la fillette sent sa présence, pousse un cri et court se réfugier dans les jambes maternelles.
44Pour conclure, il existe bel et bien une transposition littéraire d’une réalité politique. La présence des signes d’appartenance au fascisme, dans l’œuvre de Moravia, lui permet d’accomplir son but premier : représenter la société telle qu’elle est, c’est-à-dire misogyne, faussement forte, inauthentique, une société parfaitement incarnée par Benito Mussolini, homme avide de pouvoir, qui personnifie la force alors qu’en réalité il n’était que le « bouffon d’Hitler », expression maintes fois utilisée pour conspuer ce vil personnage. Moravia, maître en rhétorique, n’hésite pas à exploiter contrastes, renversements et symboles pour témoigner de cette réalité politique, en dévoiler les faiblesses, critiquer le régime fasciste par une satire cinglante du Duce et éveiller les esprits.
45Ainsi, la bourgeoisie italienne et le fascisme ont tous deux pour point commun la perte des valeurs humaines et le règne de l’inauthentique : à travers la violence et la cruauté dans le régime fasciste, à travers la société matérialiste où la machine prévaut sur l’homme dans la société bourgeoise. C’est cette déshumanisation, cette perte des valeurs traditionnelles qui pousse Moravia à témoigner de cette réalité qui le révulse. Le fait de retranscrire le réel tel qu’il est, sans filtre ni tabous, révèle son désir de provoquer des prises de conscience chez un peuple endormi, envoûté par des chimères. Cette étude a permis de rendre compte des différents signes, codes et rituels d’appartenance nécessaires à une intégration complète. Le contre-exemple rend possible à la fois l’étude de l’homme et du double réseaux-société et permet de montrer à quel point l’appartenance peut être difficile. C’est donc principalement l’homme qui intéresse Moravia, auteur en quête perpétuelle d’authentique.
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Notes de bas de page
1 A. Moravia, Gli indifferenti.
2 R. Paris, Ritratto dell’artista da vecchio – Conversazione con Alberto Moravia, p. 9 : « Di colpo, per tutti, Moravia sembrò non essere mai nato. Negli articoli su di lui che pure di tanto in tanto uscivano, si parlava di oblio. […] Ed era come dimenticare un continente ! ».
3 R. De Ceccaty, Alberto Moravia, p. 10.
4 La femme et le communisme – Anthologie des grands textes du marxisme, pp. 25-26.
5 A. Moravia, Viaggi – Articoli 1930-1990 - « Francia 1932, Rouen », p. 105 : « Aria francese, dunque borghese. La finta taverna era piena di gente [...] C’erano le famiglie di commercianti o di funzionari coi bambini maligni e pallidi [...] C’erano i giovani di negozio indomenicati, dall’eleganza immonda, colle ghette, i vestiti attillati […], le cravatte impasticciate, i visi smunti e violenti, l’occhio falso e pesto […] »
6 A. Moravia, L’amore coniugale, p. 18 : « [La smorfia] da[va] a tutto il viso l’aspetto ripugnante di una maschera grottesca in cui a bella posta, per fini di una comicità particolare tra oscena e penosa, fossero stati appunto esagerati fino alla caricatura certi tratti : la bocca sopratutto, e poi le due rughe ai lati della bocca, e le narici e gli occhi. »
7 A. Moravia, Alberto, Agostino, p. 5-6 : « Convinto di avere addosso tutti gli sguardi, gli sembrava di […] essere avvolto da un’aria teatrale ed esemplare come se invece che sopra una spiaggia, si fosse trovato con la madre sopra una ribalta, sotto gli occhi attenti di centinaia di spettatori. »
8 A. Moravia, « Facciamo un gioco » in Un’altra vita, p. 18 : « Sono sola, e appena sono sola, stranamente, cesso di essere la madre e la moglie affettuosa, instancabile, sollecita, affannata, ansiosa che non si prende mai un minuto di riposo e si dedica continuamente alla famiglia e divento una persona cinica, fredda, empia e lucida. È una metamorfosi ben curiosa che mi stupisce e anche, un poco, mi spaventa. » (notons que l’expression euphémistique « un peu ; un poco » contribue à l’élaboration d’un personnage féminin indifférent voire inhumain).
9 A. Moravia, Le Roi est nu, p. 130.
10 A. Moravia, La noia in ZIMA, Pierre-V., L’indifférence romanesque – Sartre, Moravia, Camus, p. 120.
11 A. Moravia, « Francia 1932 – Rouen » in Viaggi – Articoli 1930-1990, p. 105 : « C’erano i buontemponi di provincia dalla giovialità fragorosa, cordiale, demagogica e dallo sguardo freddo, calcolatore e prudente ».
12 L. Clerici in A. Moravia, Un mese in URSS, p. XV-XVI : « Tutti gruppi costituiti da persone che indossano la stessa camicia e gli stessi pantaloni oppure il costume tradizionale, e perciò impossibili da distinguere l’una dall’altra. »
13 A. Moravia, Il conformista, p.103 : « Provò un singolare sollievo e, forse, più che sollievo, stupore accorgendosi che la notizia stampata sulla carta ingiallita […] non destava nel suo animo alcun eco apprezzabile. […] Come fosse avvenuta questa guarigione, non avrebbe saputo dirlo. Ma, senza dubbio, non era stato soltanto il tempo a produrre un tale risultato. Molto doveva anche a se stesso, alla sua consapevole volontà, attraverso tutti quegli anni, di uscire dall’anormalità e farsi eguale agli altri. »
14 A. Moravia, Il conformista, p. 104 : « Fu contento di questa indifferenza, segno indubbio che tra il ragazzo che era stato e il giovane che era non correva ormai più alcun rapporto, neppure nascosto, neppure indiretto, neppure sopito. Egli era veramente un altro […] »
15 A. Moravia, Io e lui, p.257 : « L’attesa si prolunga, nella casa silenziosa, di fronte ai mobili novecento. E la mia rabbia cresce. […] Simboleggiano il moralismo repressivo e imbecille degli anni trenta. Della borghesia fascista! Nazionalista! Militarista! Colonialista! Paleocapitalista! […] »
16 L. Parisi, Uno specchio infranto – Adolescenti e abuso sessuale nell’opera di Alberto Moravia, p. 3-4 : « Coloro che accumulano denaro hanno l’anima inevitabilmente piena “di bassezze e di cattiverie”. »
17 S. Casini, Moravia e il fascismo. A proposito di alcune lettere a Mussolini e a Ciano, p. 214.
18 A. Moravia, Un mese in URSS, p.31 : « La civiltà industriale è anche una civiltà meccanica, ossia produce una società a sua somiglianza, organizzata e articolata, appunto come una macchina, nei rapporti sociali, intellettuali, psicologici. »
19 A. Moravia, C. Ravaioli, La mutazione femminile, p. 29 : « Così è fatta la vita. La borghesia mette in atto ormai una rappresentazione rituale di valori insensati, senza più alcun rapporto con le necessità reali, i sentimenti reali della gente. »
20 Ibid., p. 21 : « “Purtroppo o per fortuna, non siamo completamente uomini ; anzi. Lo siamo soltanto in minima parte, diciamo un due per cento ; per il rimanente novantotto per cento siamo animali”. »
21 Ibid., pp. 14-15 : « Moravia : [...] Carla non si accetta, né accetta il mondo in cui si è trovata a nascere, e l’andare a letto con l’amante della madre è per lei, in realtà, un atto di sfida alla convenzionalità del mondo borghese. […] Allora lei cerca un mezzo espressivo nuovo, dirompente, e lo trova nel sesso che, alla fine, è l’unico modo di comunicare di cui dispone. »
22 A. Moravia, Viaggi – Articoli 1930-1990 - « Francia 1932 – Rouen », p. 105 : « Ah borghesia, pensavo, come sei viva e come sei insopportabile […] »
23 « Il fascismo vuole l'uomo attivo e impegnato nell'azione con tutte le sue energie: lo vuole virilmente consapevole delle difficoltà che ci sono, e pronto ad affrontarle. »
24 J.-C. Brisard, C. Quetel, Enfants de dictateurs, p. 35.
25 Ibid., p. 32.
26 « Mamma, verrà il giorno in cui l'Italia dovrà temere di me ! ».
27 A. Moravia, Il disprezzo, p. 105 : « “Non riconosco nulla… vorrei soltanto essere lasciata in pace… lasciami in pace” » ; « [lui] la ferm[a] a volo, afferrandola per il polso »; « invaso da un furore che ormai non [lo] lasci[a] il tempo di riflettere […] le afferr[a] di nuovo la mano »; La stringe « in maniera punto carezzevole. »
28 A. Moravia, Il conformista, p. 71-72 : « Marcello aveva ereditato da sua madre una perfezione di tratti quasi leziosa nella sua regolarità e dolcezza. Aveva un viso tondo, dalle guance brune e delicate, il naso piccolo, la bocca sinuosa, dall’espressione capricciosa e imbronciata […] Era quasi un viso di fanciulla. »
29 Ibid., p. 109 : « […] Mi prende a schiaffi e a pugni. Quindi mi acciuffa per i capelli, mi getta giù dal letto e mi trascina per i pavimenti di due o tre stanze dandomi nello stesso tempo, alla cieca, una quantità di calci. Alla fine mi sbatte sul divano e mi stringe il collo, come per strangolarmi. »
30 A. Rhodes, La propagande dans la Seconde Guerre mondiale, p. 68.
31 A. Moravia, Agostino, p. 91.
32 Ibid., p. 70.
33 Ibid., p. 74.
34 Ibid., p. 38.
35 Ibid.
36 Ibid., p. 35 : « ha in ambo le mani non cinque ma sei dita che d[anno] alle mani un aspetto enorme e numeroso e più che dita pa[iono] tozzi tentacoli. »
37 A. Moravia, Io e lui, p. 224 : « D’improvviso, ‘lui’ parla. Sicuro del suo dominio e della mia ubbidienza, dice: ‘Per prima cosa devi chiuderle la bocca con la mano per impedirle di gridare. Se si dibatte, mettile l’altra mano alla gola e stringi senza esitare. […] Ma fra cinque anni al massimo, sarà adattissima a consolarci della freddezza di sua madre.’” “Schifoso” “‘Perché schifoso ? Guardale gli occhi e quei segni di stanchezza sotto gli occhi. Pare una donna, forse lo è già.’»
Auteur
Doctorante
École doctorale Stanislas (Nancy II)
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Signes et communication dans les civilisations de la parole
Olivier Buchsenschutz, Christian Jeunesse, Claude Mordant et al. (dir.)
2016