L’impératrice byzantine au cœur des réseaux aristocratiques : l’exemple de Marie d’Alanie et d’Irène Doukaina-Comnène
p. 181-193
Résumé
Irène Doukaina est fiancée à Alexis Comnène avant qu’il ne devienne empereur de Constantinople. Cette alliance est celle de deux puissantes familles aristocratiques byzantines. Avant l’arrivée au pouvoir d’Alexis, le réseau « donné » d’Irène Doukaina va favoriser son ascension au trône en lui apportant l’appui indispensable du réseau Doukas. Une fois au pouvoir, Alexis hésite à épouser Irène : ne serait-il pas plus judicieux d’épouser l’impératrice en place Marie d’Alanie ? Là encore, le réseau d’Irène joue un rôle décisif en imposant son mariage et son couronnement en tant qu’Augusta. Comment les Doukai et les Comnènes utilisèrent-ils leurs réseaux pour se hisser jusqu’au trône ? Comment Marie d’Alanie, d’origine étrangère et donc sans réseau « donné », tisse-t-elle son réseau acquis ? Une fois impératrice, comment Irène va-t-elle s’imposer définitivement au réseau Comnène et mettre un terme à leur rivalité avec les Doukai ? Nous nous proposons de suivre le cheminement de ces deux impératrices à travers les réseaux aristocratiques byzantins dont les alliances se font et se défont inlassablement. Nous analyserons également leur comportement et leur capacité de manœuvre au sein de ces réseaux.
Texte intégral
1L’analyse de réseaux en histoire pose un problème de sources, qui présentent des lacunes sur la nature ou l’existence même de liens entre les individus. De plus, les noms propres des femmes y sont peu cités, puisque seule leur fonction de lien matrimonial importe, ce qui rend la tâche plus difficile encore. Reconstituer le réseau d’un individu demande au chercheur une lecture minutieuse et poussée. Nos principales sources ici sont Michel Psellos, Jean Skylitzès et Anne Comnène. Michel Psellos a été, en partie, témoin direct des évènements qu’il rapporte (des règnes de Michel V jusqu’à celui de Michel VII). Jean Skylitzès, qui écrit sous le règne d’Alexis Ier (1081-1118), retrace l’histoire des dynasties amoriennes et macédoniennes jusqu’en 1057. Anne Comnène enfin, qui écrit sous le règne de son neveu Manuel Ier Comnène (1143-1180), est l’auteur de l’Alexiade, l’histoire du règne de son père, Alexis Ier Comnène. Ces sources historiographiques, qui ont pour sujet le pouvoir impérial et la convoitise qu’il suscite, illustrent bien l’importance croissante des liens de parenté ainsi que le prestige de la bonne naissance (eugeneia) et du nom lignager. Comme le constate Angeliki Laiou1, Psellos ne fait que d’assez vagues allusions à la parenté, alors qu’Anne Comnène, qui écrit près d’un siècle plus tard, les décrit minutieusement, et pousse même ses recherches généalogiques sur quatre générations.
2Dans la deuxième moitié du xie siècle, les alliances par le mariage devinrent l’instrument de prédilection des familles de l’aristocratie byzantine pour constituer leurs réseaux. Deux critères principaux caractérisaient ces alliances : l’âge précoce des enfants que l’on unissait et l’endogamie.
3Parallèlement à cette évolution, des normes avaient peu à peu été élaborées par l’Église et l’État afin d’encadrer la parenté et ses pratiques matrimoniales. Tout d’abord, le droit byzantin avait hérité du droit romain la notion de degré de parenté, ainsi que le comput centré sur Ego (c’est-à-dire la somme des degrés qui séparent les intéressés de leur ancêtre commun ou de l’individu dont le mariage a créé l’affinité)2. En 692, le concile In Trullo interdisait définitivement le mariage entre cousins germains (exadelphoi) et codifiait les interdits pour affinité. En 726, la codification impériale de l’Éklogè étendait l’interdit d’alliance aux cousins issus de germains (disexadelphoi) et aux « frères spirituels » (par le baptême). En 997 enfin, le Tomos du patriarche Sisinnios interdisait les mariages au sixième degré d’affinité, faisant de l’argument de la confusion des noms de parenté un principe juridique3. Comme le fait remarquer Évelyne Patlagean4, ces empêchements poussèrent logiquement l’aristocratie byzantine à chercher plus loin ses alliances et à étendre un peu plus ses réseaux de parenté.
4Enfin, effet inattendu de cette législation, l’aristocratie y trouva des prétextes de rupture d’alliances, essentiels à sa politique matrimoniale. Angeliki Laiou5 note que la plupart des procès intentés pour rompre un mariage ou des fiançailles au xie siècle l’étaient par des aristocrates laïcs qui cherchaient à utiliser ces empêchements afin de rompre ou invalider une alliance qui ne leur était plus utile.
5Le xie siècle byzantin fut un siècle tourmenté qui vit d’abord la fin de la dynastie macédonienne en 1056, puis pas moins de cinq empereurs se succéder sur le trône jusqu’en 1078. Cette instabilité politique entraîna une lutte entre les familles de l’aristocratie, pour qui les alliances devenaient une condition nécessaire afin d’augmenter leur pouvoir social et politique et prétendre au trône. Durant cette période, nous constatons également une activité législative intense de la part de l’Église et de l’État concernant les normes et les empêchements de mariage. Si l’Église souhaitait exercer un contrôle moral, il est certain que l’État, en la personne de l’empereur surtout, souhaitait pouvoir contrôler au mieux les politiques matrimoniales de son aristocratie. Par exemple, É. Patlagean souligne la concordance de dates entre la menace à laquelle avait dû faire face Basile II (976-1025) contre l’alliance des Tzimiskès-Phocas-Sklèroi et Maléïnoi, et la promulgation du Tomos de Sisinnios qui s’intéressait de près aux alliances par affinité : l’empereur, ayant pu constater la grande portée politique de ces alliances, réagissait en conséquence6.
6Les deux familles qui nous intéressent ici, les Doukai et les Comnènes, s’illustrèrent particulièrement dans leur habileté à mener des politiques matrimoniales efficaces et finalement parvenir à mettre sur le trône leur candidat Alexis Comnène en 1081. Cette réussite fut plus précisément l’œuvre de la mère d’Alexis, Anne Dalassènè, du césar Jean Doukas et de l’impératrice Marie d’Alanie.
7Nous nous proposons, à travers les politiques matrimoniales menées par ces personnages, de dessiner les contours du rôle que pouvait jouer une aristocrate, plus précisément une impératrice, au sein de ces réseaux d’alliances. Plusieurs facteurs sont à prendre en compte : en premier lieu, l’enfantement : le taux de nuptialité représentait un atout majeur dans le jeu des alliances7. En second lieu, la légitimité dynastique apportée par l’impératrice. En troisième lieu, les origines familiales de l’impératrice : quel était en effet l’apport réel d’une impératrice d’origine étrangère dans le réseau qu’elle rejoignait ? Le facteur personnel enfin : le fait d’appartenir à une famille, à un réseau, ne garantit pas que tous ses membres seront fidèles et solidaires les uns envers les autres, ou poursuivront les mêmes buts.
Des politiques matrimoniales actives : Marie d’Alanie et Anne Dalassènè
8Marie d’Alanie8 était une princesse géorgienne. Lors de son arrivée à Constantinople à la fin des années 1060, pour épouser l’empereur Michel VII Doukas9 (1071-1078), elle ne représentait pas la première alliance entre les Bagratides et les empereurs de Constantinople.
9Son père, Bagrat IV (1027-1072), avait lui-même passé trois ans comme otage à la cour de Basile II10, puis épousé une princesse byzantine, Hélène Argyropoulaina, la nièce de l’empereur Romain III Argyre (1028-1034). En secondes noces, il avait pris pour femme Boréna, sœur du chef de l’Ossétie (ou de l’Alanie11, dans le nord du Caucase) et mère de Marie.
10J.-C. Cheynet met en avant le rôle de la lignée bagratide, qui renforça des liens déjà existants entre les Doukai, les Comnènes et les Cérulaires, ainsi que le rôle de la famille royale de Bulgarie au sein des parentés byzantines12. À la mort du souverain bulgare Jean Vladisthlav, Basile II avait pris sous sa protection sa veuve et ses enfants13 : ces derniers avaient été unis aux grandes familles de l’aristocratie d’Asie Mineure sous l’impulsion de l’empereur. Ainsi, Catherine de Bulgarie avait épousé Isaac Ier Comnène (1056-1059), sa nièce Romain IV Diogénès14 (1068-1071) et Marie de Bulgarie Andronic Doukas15.
11Hormis ses dames de compagnie16, Marie d’Alanie était donc seule à la cour, sans réseau donné. La naissance d’un porphyrogénète en 1074, Constantin Doukas, conforta sa position d’impératrice. On constate également qu’elle apparait sur les monnaies émises par Michel VII, à l’instar de sa belle-mère l’impératrice Eudocie Makrembolitissa, considérée comme l’une des impératrices les plus puissantes du xie siècle. Lors du renversement de son époux par Nicéphore Botanéiatès (1078-1081), ce dernier choisit Marie comme nouvelle épouse, après avoir longuement hésité entre elle et Eudocie Makrembolitissa : c’est curieusement son apparent isolement et ses origines étrangères qui semblent avoir joué en sa faveur.
12Le césar Jean Doukas, l’oncle de Michel VII, avait poussé Nicéphore à arrêter son choix sur Marie, arguant qu’il n’aurait ainsi pas de parents susceptibles de l’embarrasser ou de l’importuner17. Ce mariage était en fait tout à fait illégal : Michel VII, contraint d’abdiquer, avait revêtu l’habit monastique. Marie n’était donc ni veuve, ni officiellement divorcée. Le premier prêtre sollicité par le césar pour célébrer cette union avait logiquement refusé. Quant à celui qui finit par accepter, il fut plus tard déposé, comme le prévoyait le Tomos de Sisinnios18.
13En tant qu’impératrice, Marie avait mené une habile politique matrimoniale, plaçant ses proches dans des familles influentes à la cour :
sa cousine Irène, fille du roi d’Alanie, épousa Isaac Comnène, le frère d’Alexis, en 107119.
une cousine d’Irène épousa Théodore Gabras, alors duc de Trébizonde.
une autre parente20 enfin épousa Constantin, le neveu du patriarche Michel Cérulaire21.
14À travers ces quatre alliances, celle de Marie comprise, les Bagratides s’alliaient donc aux Doukai mais aussi à leurs alliés les Cérulaires22, opérant ainsi un renchaînement d’alliance23. L’union avec les Comnènes, quant à elle, semblait préciser un rapprochement entre ces derniers et les Doukai.
15Lorsque Marie comprit que Botanéiatès ne choisirait pas son fils Constantin Doukas pour lui succéder, elle renforça de manière significative son réseau en adoptant Alexis Comnène24.
16Marie démontrait sa parfaite connaissance ou du moins sa bonne appréhension du fonctionnement de la parenté à Byzance : elle avait compris que l’adoption était le lien le plus fort qu’elle pouvait créer entre elle et Alexis à ce moment-là. Si le mariage d’Alexis avec Irène Doukaina unissait déjà les intérêts des deux familles, il ne liait pas directement Alexis et Marie. Elle établissait donc un canal de communication direct entre eux, faisant de lui le frère de son fils Constantin, soit un autre lien fort. Marie était donc bien consciente de la nécessité de renforcer son propre réseau, dit « égocentré », parallèle à celui des Doukai : ses objectifs en effet différaient sensiblement de ceux du césar Jean, le chef de famille, qui était prêt à soutenir n’importe quelle action du moment qu’un Doukas (homme ou femme) montait sur le trône, tandis que Marie soutenait uniquement les ambitions impériales de son fils.
17Cette adoption prenait place à un moment critique pour Marie et Alexis Comnène. La position de favori que ce dernier occupait alors à la cour suscitait la jalousie25. Le rituel ecclésial de l’adoption s’accompagnait d’un échange de cadeaux et/ou de faveurs : dans ce cas précis, Marie offrait à Alexis sa protection et son soutien contre ses ennemis à la cour et recevait en échange la reconnaissance de Constantin comme héritier du trône. Dans les faits, ce lien spirituel servait à faciliter les entrevues entre les conspirateurs : Anne Comnène établit clairement le lien entre le refus de Botanéiatès de faire de Constantin son héritier et la participation de Marie au complot des Comnènes26. Cette alliance se révéla profitable puisque c’est grâce à Marie que les frères Comnènes échappèrent au piège tendu par les hommes de l’empereur27.
18Comme le souligne B. Hill28, Marie sut, face à une situation de crise, mettre en place un pouvoir alternatif à celui de son époux l’empereur ; cependant, à la différence de B. Hill, je relativiserais sa capacité à légitimer. Si Marie fournit en effet une légitimité dynastique à Nicéphore Botanéiatès, ce ne fut pas le cas pour Alexis. Ce dernier était déjà issu d’une famille qui avait occupé le trône, certes brièvement, et était, de plus, marié à une Doukaina. Ainsi, lorsqu’il poussa Marie à l’adopter, Alexis répondait alors à un besoin pressant, celui d’une protection immédiate à la cour. De plus, l’adoption ouvrait des droits à la transmission du patrimoine : nous savons que Marie avait été richement dotée par Nicéphore Botanéiatès29. Le succès d’une révolte ne nécessitait-il pas, après tout, des richesses importantes, indispensables à la levée d’une armée ? Enfin, la dernière tentative de Botanéiatès pour conserver le pouvoir avait été de proposer d’adopter Alexis, afin de faire de lui son héritier30, démontrant ainsi que lui seul possédait la capacité de légitimer son successeur. Finalement, Marie ne put transmettre à elle seule la légitimité dynastique, ni à son fils Constantin, ni à son fils adoptif Alexis. Tous deux eurent besoin pour cela de l’appui du réseau Doukai.
19La bonne compréhension du fonctionnement de la cour byzantine dont avait fait preuve Marie d’Alanie tout au long de sa carrière d’impératrice pourrait s’expliquer par le fait que sa grand-mère Marie et son père avaient tous deux passé beaucoup de temps à Constantinople. En 1031, la reine Marie (qui assurait alors la régence au nom de son fils Bagrat) et Romain III Argyre signèrent un traité de paix ; à cette occasion, Bagrat avait reçu la dignité de curopalate et épousé la nièce de l’empereur, Hélène31. Puis en 1048 environ, Bagrat et sa mère se rendirent à nouveau dans la capitale byzantine, cette fois pour demander à l’empereur Constantin IX Monomaque (1042-1055) de mettre un terme au conflit qui les opposait à Liparitès32. Alors que Bagrat était ensuite rentré en Géorgie, sa mère Marie était restée à Constantinople où elle avait revêtu l’habit monastique33. Entre 1052 et 1055 enfin, Bagrat avait séjourné de nouveau à la cour impériale34. Peu de temps après, l’impératrice Théodora avait réclamé la présence de Marie à la cour afin de l’adopter35 : lorsque Marie s’était rendue à Constantinople en 1056, sa grand-mère Marie s’y trouvait déjà36. L’influence politique de la reine Marie ne devrait donc pas être négligée, que ce soit dans le choix de Marie comme fille adoptive de Théodora et peut-être aussi dans celui de future impératrice37. La comparaison entre elle et Eudocie Makrembolitissa ou encore Anne Dalassènè semble ici justifiée.
20Ces éléments nous permettent de déduire que Marie et sa famille connaissaient bien la capitale et le palais impérial, ce qui expliquerait également le choix de Marie comme fiancée de Michel VII : les impératrices étrangères étaient en effet rares à l’époque ; or, la menace grandissante des Turcs Seldjoukides avait rendu indispensable l’alliance avec les Bagratides, qui comptaient parmi leurs alliés les Alains38. Le réseau dont avait hérité Marie lui conférait donc une importance géopolitique, à laquelle venaient se cumuler les relations construites et entretenues par sa grand-mère puis par son père.
21Marie ne fut pas la seule responsable du succès des Comnènes. L’impératrice avait, en la personne d’Anne Dalassènè39, leur mère, un allié de taille. Anne ne s’était, semble-t-il, jamais vraiment remise de ce que son époux Jean refusa de succéder à son frère Isaac Ier 40. Ce dernier avait donc désigné Constantin Doukas pour lui succéder. Nous sommes en 1059 : durant les vingt années suivantes, Anne travailla sans relâche à tisser un réseau liant sa famille aux plus puissantes familles de l’aristocratie byzantine.
22Sous le règne de Constantin X Doukas (1059-1067), elle avait marié ses deux filles Marie et Eudocie : la première à Michel Tarônitès41, la deuxième à Nicéphore Mélissènos42. Puis, sous Romain IV Diogénès, sa fille Théodora avait épousé le fils de l’empereur, Constantin.
23Le mariage de son fils Isaac avec la cousine de l’impératrice Marie en 1071, sous le règne de Michel VII, était certainement une belle réussite pour Anne Dalassènè qui avait été exilée avec sa famille suite à son implication dans un complot43 ; ce mariage marquait donc le retour en faveur des Comnènes à la cour. Puis, en 1078, Alexis épousait Irène Doukaina, la petite-cousine de Michel VII, peu de temps avant que ce dernier ne soit renversé par Nicéphore Botanéiatès. Sous le règne de ce dernier enfin, une des petites-filles d’Anne épousait un parent de l’empereur. Peu à peu, les alliances conclues par Anne étaient de plus en plus prestigieuses. Elle réussit même « l’exploit remarquable » (pour reprendre l’expression de J.-C. Cheynet44), d’unir ses descendants aux trois familles qui avaient occupé le trône entre 1059 et 1081 : les Diogènai, les Doukai et les Botanéiatai. Elle est assurément le maître d’œuvre de la réussite des Comnènes.
Un héritage précieux : Irène Doukaina
24Un réseau familial pouvait-il être considéré comme partie intégrante du patrimoine familial et donc s’hériter ? Le cas d’Irène Doukaina peut nous aider à y répondre.
25Michel Psellos fait remonter les origines de Constantin X Doukas et son frère Jean aux « …fameux Andronic et Constantin », au milieu du xe siècle45. Andronic Doukas, grand domestique des Scholes, s’était révolté en 904, sous le règne de Léon VI (886-912). Son fils Constantin l’avait imité en 91346. Il s’ensuivit une élimination si radicale de la famille Doukas qu’il est difficile de faire le lien entre les Doukai du xe siècle avec Constantin et Jean Doukas qui réapparaissent dans les sources un siècle plus tard, au moment de la conspiration contre Michel VI (1056)47. Cette révolte avait hissé sur le trône Isaac Comnène, bien que Constantin Doukas ait été un temps envisagé. Il accéda finalement à l’Empire trois ans plus tard, lorsqu’Isaac, malade, abdiqua en sa faveur48. Nous savons par Psellos et Skylitzès que la première épouse de Constantin Doukas était une Dalassènè49. Lors de son avènement, il était déjà marié à Eudocie Makrembolitissa. Peu de temps avant de mourir, Constantin X fit prêter serment à Eudocie de ne jamais se remarier et de gouverner aux côtés de son frère le césar Jean, sans introduire sa propre parenté50. Ce serment avait pour but non dissimulé de protéger les intérêts de son fils et héritier, et plus largement ceux des Doukai, contre les ambitions d’autres familles, à commencer par celles des Makrembolitai51 et de leurs alliés les Cérulaires52.
26Il serait intéressant de nous arrêter ici un instant sur les conséquences de la disparition d’un intermédiaire entre deux familles à travers deux exemples :
le premier exemple est celui de la première épouse de Constantin Doukas, une Dalassènè, qui était morte prématurément. L’absence d’enfant impliquait qu’il n’y avait plus d’intermédiaire pour faire le lien entre les Dalassènoi et les Doukai. Nous pouvons donc en déduire que le candidat des Dalassènoi en 1056 était bel et bien Isaac Comnène et non Constantin Doukas.
le deuxième exemple est celui d’Eudocie qui avait décidé de se remarier, malgré son serment, avec Romain Diogénès. De cette union étaient nés deux fils, qui représentaient pour les Doukai une menace certaine. De plus, nous savons par Psellos53qu’Eudocie avait soutenu le retour de Romain après sa défaite de 1071, s’opposant alors clairement à la politique de son propre fils Michel VII et du césar Jean qui avaient décidé d’affronter Romain ; ce dernier avait été finalement aveuglé (sur les ordres du césar certainement) et était mort des suites de ses blessures. Quant à Eudocie, devenue trop encombrante, elle avait été reléguée dans un monastère avec ses filles et les fils qu’elle avait eu de Romain54, Constantin, Léon et Nicéphore. Ici, la mort de Constantin X avait bel et bien affaibli, sinon brisé, les liens entre Eudocie et les Doukai, qui remplacèrent alors leur alliance avec les Makrembolitai et les Cérulaires par une alliance avec les Comnènes. Ainsi, dès le début de son règne personnel, Michel VII donna, comme nous l’avons vu, son accord pour le mariage de la cousine de son épouse Marie avec Isaac Comnène puis, pour celui de sa petite cousine Irène avec Alexis Comnène55.
27L’idée de cette dernière alliance venait surtout du césar Jean Doukas dont l’avenir s’annonçait sombre : en effet, la santé de son fils Andronic (le père d’Irène) déclinait ; son neveu Michel VII avait fini par l’écarter de l’exercice du pouvoir56, neveu dont l’autorité s’affaiblissait. Quant aux Comnènes, Isaac et Alexis, ils étaient plus que jamais bien placés à la cour grâce à la politique matrimoniale menée avec une grande maîtrise par leur mère et chef de famille, Anne Dalassènè. Une alliance avec eux s’avérait donc incontournable si le césar voulait maintenir sa famille au sommet de l’État. C’est ce même constat qui dut décider Anne Dalassènè à accepter cette union, si l’on tient compte de l’animosité qu’elle éprouvait à l’égard de cette famille qui lui avait volé le pouvoir en 1059. Toutefois, une fois l’alliance avec les Doukai conclue, Anne, fine tacticienne, ne négligea pas pour autant de s’allier à la nouvelle famille régnante, les Botanéiatai.
28Le mariage d’Alexis avec Irène soudait donc les ambitions de ces deux familles qui travaillaient désormais à un seul et unique but, s’emparer à nouveau du trône.
29Irène Doukaina héritait donc des ambitions de son grand-père, et de celles de toute une parenté, le réseau Doukai. Sa naissance mettait à sa disposition un éventail très large de contacts et donc d’alliés potentiels. Encore faudrait-il pouvoir mettre en exergue l’utilisation réelle qu’elle fit de ce réseau.
30En 1078, Isaac et Alexis Comnène s’étaient mis au service du nouvel empereur Nicéphore III Botanéiatès. Ils bénéficiaient, grâce à la parenté d’Isaac avec Marie d’Alanie, d’un libre accès au gynécée où, durant trois ans, ils préparèrent consciencieusement leur révolte, sur les conseils avisés de leur mère. Ils passèrent à l’action dans la nuit du 14 février 1081 : avant de s’enfuir de la capitale, ils devaient rallier des généraux à leur cause. Bien qu’Alexis fût Domestique des Scholes, son frère Isaac, du fait de sa longue carrière militaire, demeurait plus populaire que lui auprès des armées. Isaac bénéficiait également de son statut d’aîné. Bien conscient de la position de favori de son frère, Alexis prit la précaution de faire avertir le césar de leur fuite : ce dernier, d’une rapidité de réaction et d’une efficacité redoutables, apporta alors non seulement des fonds monétaires indispensables à la levée de troupes mais aussi, appuyé par les frères d’Irène, il imposa Alexis à l’armée, après avoir mené une propagande auprès des militaires pour les décider à acclamer son candidat57. Le césar fut grandement aidé dans sa tâche par Georges Paléologue, l’époux d’Anne Doukaina (la sœur d’Irène) : convaincu par sa belle-mère, Marie de Bulgarie, de se rallier aux Comnènes58, son action fut décisive. À la tête de la flotte, il empêcha le rival et beau-frère d’Alexis, Mélissènos de pénétrer dans le port de Constantinople et prêter ainsi main-forte à l’empereur Botanéiatès59. Il veilla également, une fois la victoire acquise, à ce que la flotte acclamât Irène en même temps qu’elle acclamait Alexis, rappelant que c’était uniquement pour elle qu’il se battait60. Relevons ici que son propre père, Nicéphore Paléologue, était demeuré dans le camp opposé, celui de Botanéiatès61. Nous en déduisons donc qu’il ne s’estimait pas tenu par la solidarité familiale que l’on pourrait supposer être inhérente à ce type de réseau. Irène pourrait ici être considérée comme l’intermédiaire entre Alexis et Georges puisqu’elle établit entre eux le lien de syngambroi (époux de deux sœurs), lien qui s’avéra déterminant dans l’engagement de Georges aux côtés d’Alexis.
31Les Doukai avaient fait pencher la balance en faveur d’Alexis. Cependant, une fois qu’il eut pris possession du Grand Palais, il les installa dans un palais à part62 et se fit ensuite couronner seul par le patriarche Kosmas. Les Doukai durent attendre sept jours avant de voir Irène finalement couronnée. En effet, une atmosphère de flottement régnait sur le palais impérial à ce moment-là : Alexis était tiraillé entre l’attirance certaine qu’il éprouvait pour Marie et la nette conscience du soutien indispensable des Doukai. De l’aveu même de sa fille, Anne Comnène, son père refusait d’éloigner Marie, et les rumeurs les plus folles couraient à Constantinople, causant l’inquiétude de sa belle-famille63.
32Là encore, la réaction énergique du césar s’avéra déterminante. Il fit à nouveau appel au patriarche Kosmas, qui lui était intimement lié64 : Anne Dalassènè tentait de pousser ce dernier à la démission afin de le remplacer par son propre candidat65. De son côté, le patriarche arguait qu’il ne quitterait pas son poste tant qu’il n’aurait pas couronné Irène de ses propres mains. Il obtint finalement gain de cause66. Anne demeurait donc hostile aux Doukai, estimant sans doute que leur soutien n’était plus nécessaire maintenant que son fils occupait le trône. Lorsqu’elle avait accepté le mariage d’Alexis avec Irène, elle était certainement loin de se douter que ce serait Alexis et non pas Isaac qui monterait sur le trône. Sans doute l’idée de devoir partager le pouvoir avec les Doukai lui était-elle insupportable.
33Marie envisageait-elle de se marier une troisième fois ? Marie et Alexis étaient de fait certainement amants (ils avaient le même âge, et les sources sont unanimes sur la beauté de Marie ; Irène était à peine une adolescente et il semble que son mariage n’avait toujours pas été consommé). En tant que mère et fils spirituels, leur mariage serait tombé sous le coup de l’interdit67, l’acte d’adoption étant considéré comme une alliance et donc comparable à un mariage. Enfin, même si l’adoption n’avait pas eu lieu, le mariage d’Isaac Comnène avec la cousine de Marie rendait cette union impossible car, conformément au Tomos de Sisinnios, deux frères ne pouvaient épouser deux cousines germaines. Marie d’Alanie quitta finalement le Grand Palais, persuadée par le césar, en échange d’un sauf-conduit impérial qui reconnaissait Constantin comme co-empereur. La politique de Marie portait enfin ses fruits : elle n’était certes plus impératrice, mais désormais mère adoptive de l’empereur et mère biologique de l’héritier du trône, situation inédite dans l’histoire de Byzance.
34Compte tenu des facteurs énoncés en introduction, nous constatons que c’est grâce au niveau de nuptialité élevé de sa famille qu’Anne Dalassènè était parvenue à tisser un réseau puissant : mère de huit enfants (5 fils et 3 filles), elle avait été à même de mettre en place un réseau étendu. Quant à Marie d’Alanie, elle avait eu la chance de disposer de jeunes parentes à marier.
35C’est bien la maternité qui semble avoir dicté la politique matrimoniale de ces deux femmes : toutes deux n’hésitèrent pas à transgresser des interdits, participer à des complots, ou encore tenter d’annuler des alliances contractées précédemment, dans l’intérêt de leurs fils, Alexis et Constantin. Leurs stratégies respectives démontrent qu’elles avaient parfaitement intégré le fonctionnement de la parenté : si cela semble naturel dans le cas d’Anne Dalassènè, issue d’une des plus puissantes familles du XIème siècle, cela est plus surprenant dans le cas de Marie qui, d’origine étrangère, réussit malgré cela à légitimer Nicéphore Botanéiatès.
36Leur liberté d’action fut-elle rendue possible par un contexte politique tumultueux ? Sans doute puisque comme le constate B. Hill, une fois Alexis et sa dynastie installés sur le trône, nous constatons un effacement relatif des impératrices Comnènes dans les sources. Les femmes qui succédèrent à Marie d’Alanie et Irène Doukaina se consacrèrent en effet davantage au patronage littéraire et aux fondations monastiques, laissant la politique matrimoniale aux mains de leurs époux.
37Le cas d’Irène Doukaina semble confirmer cette hypothèse : héritière d’un réseau qui l’avait hissée sur le trône à l’âge de quinze ans, une fois impératrice, elle ne semble pas avoir assumé de rôle dans les mariages de ses enfants68. Cependant, lorsqu’elle tenta à son tour de jouer un rôle politique, lors de la succession de son époux, elle se montra parfaitement imprévisible, prenant le parti de sa fille Anne et de son gendre Nicéphore Bryennios, contre son propre fils Jean, déjouant ainsi le comportement naturel que l’on pouvait attendre de la part d’une impératrice Comnène. En agissant de la sorte, Irène mettait en péril l’avenir de la dynastie. Devons-nous en déduire que malgré son mariage avec Alexis, Irène demeurait avant tout une Doukaina ? En faveur éventuellement de cette hypothèse, l’examen de son sceau particulier, où elle avait fait graver le nom de Doukaina69.
Bibliographie
Sources :
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Martin-Hisard Bernadette, « La vie de Georges l’Hagiorite », Revue des Études Byzantines, n° 64-65, 2006-2007, p. 5-204.
Oikonomides Nicolas, « Le serment de l’impératrice Eudocie : un épisode de l’histoire dynastique de Byzance », Revue des Études Byzantines, n° 21, 1963, p. 101-128.
Patlagean Évelyne, Un Moyen Âge grec, Paris, Albin Michel, 2007.
Patlagean Évelyne, « Christianisation et parenté rituelles : le domaine de Byzance », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, 33e année, n° 3, 1978, p. 625-636.
Pitsakis Constantin G., « Législation et stratégies matrimoniales. Parenté et empêchements de mariage dans le droit byzantin », L’Homme, n° 154-155, avril-septembre 2000, p. 677-696.
Settipani Christian, La Continuité des élites à Byzance durant les siècles obscurs, Paris, De Boccard, 2006.
Annexe
Illustrations
Notes de bas de page
1 A. E. Laiou, Mariage, amour et parenté à Byzance, p. 47-48.
2 É. Patlagean, Un Moyen Âge grec, p. 88.
3 C. G. Pitsakis, « Législation et stratégies matrimoniales. Parenté et empêchements de mariage dans le droit byzantin », p. 683.
4 É. Patlagean, Un Moyen Âge grec, p. 93.
5 A. E. Laiou, Mariage, amour et parenté à Byzance, p. 30.
6 É. Patlagean, Un Moyen Âge grec, p. 124.
7 A. E. Laiou, Mariage, amour et parenté à Byzance, p. 28.
8 Marie était son nom grec. Son vrai nom était Marthe.
9 Fils de Constantin X Doukas et d’Eudocie Makrembolitissa.
10 Jean Skylitzès, Empereurs de Constantinople, p. 305.
11 B. Martin-Hisard, « La vie de Georges l’Hagiorite », p. 19 : le royaume d’Alanie était un allié de longue date des Bagratides.
12 J.-Cl. Cheynet, Pouvoir et contestations à Byzance (963-1210), p. 279.
13 Jean Skylitzès, Empereurs de Constantinople, p. 299.
14 Ces deux mariages avaient été contractés avant qu’Isaac puis Romain accèdent à l’Empire.
15 Il s’agit des parents de la future impératrice Irène Doukaina.
16 B. Martin-Hisard, « La vie de Georges l’Hagiorite », p. 180 : Marie arriva à Constantinople avec des dames de compagnie, dont certaines lui étaient apparentées (notamment sa cousine germaine Irène, fille du prince d’Alanie).
17 Anne Comnène, Alexiade, III, 2, 3, p. 107.
18 É. Patlagean, Un Moyen Âge grec, p. 88.
19 Jean Skylitzès, Empereurs de Constantinople, p. 270, note n°39 et p.395, note n°4 : les Comnènes étaient une famille originaire d’Asie Mineure. Le premier Comnène connu, Manuel Comnène-Erôtikos, s’était illustré comme stratège sous le règne de Basile II (976-1025) ; à sa mort, l’empereur avait pris en charge l’éducation de ses deux fils, Isaac, qu’il maria à Catherine de Bulgarie, et Jean, qui épousa Anne Dalassènè.
20 Paul Gautier, « La curieuse ascendance de Jean Tzetzès », p. 208 : il s’agit de l’arrière-grand-mère de Jean Tzetzès.
21 J.-Cl. Cheynet, Pouvoir et contestations à Byzance (963-1210), p. 314-315 : Michel Cérulaire, patriarche de Constantinople et oncle de l’impératrice Eudocie Makrembolitissa ; plutôt leader d’une faction politique qu’homme d’Eglise, il prit part de manière active à la vie politique et joua un rôle décisif dans l’accession au trône d’Isaac Ier Comnène.
22 N. Oikonomides, « Le serment de l’impératrice Eudocie : un épisode de l’histoire dynastique de Byzance », p. 119 : Constantin était le cousin d’Eudocie.
23 Mariage entre deux individus qui partagent en commun soit un consanguin éloigné, soit un allié.
24 Anne Comnène, Alexiade, II, 1, 5, p. 65.
25 Ibid., II, 1, 2-3, p.63-64.
26 Ibid., II, 2, 1, p. 66.
27 Ibid., II, 4, 1-2, p. 71.
28 B. Hill, « Alexios I Komnenos and the Imperial Women », p. 38-39.
29 É. Malamut, Alexis Ier Comnène, p. 145 : Marie d’Alanie disposait de revenus économiques importants provenant de l’oikos des Manganes et du monastère de l’Hebdomon (soit des fondations fort riches).
30 Anne Comnène, Alexiade, II, 12, 2, p. 98-99.
31 B. Martin-Hisard, « La vie de Georges l’Hagiorite », p. 19 : le titre officiel de Bagrat IV était « roi des Apxazes et curopalate de tout l’Orient » ; les Bagratides tenaient donc leur pouvoir de la reconnaissance de ce dernier par l’Empire Byzantin à travers ce titre de curopalate. Jean Skylitzès, Empereurs de Constantinople, p. 313 : le mariage eut lieu en 1032.
32 B. Martin-Hisard, « La vie de Georges l’Hagiorite », p. 23-24 : Bagrat venait certainement d’épouser Boréna ; cette visite inaugura un accroissement des échanges entre l’Empire et les Alains (c’est à la même époque également que l’empereur Monomaque prit pour maîtresse une Alaine de sang royal, soit une parente de Boréna).
33 Jean Skylitzès, Empereurs de Constantinople, p. 372 : probablement suite au viol dont elle fut victime par Liparitès.
34 B. Martin-Hisard, « La vie de Georges l’Hagiorite », p. 24 : un nouveau conflit avec Liparitès avait contraint Bagrat à demeurer à Constantinople, tandis que son adversaire exerçait effectivement le pouvoir au nom du fils de Bagrat, le futur Georges II.
35 L. Garland et St. Rapp, « Mary of Alania : Woman and Empress Between Two Worlds », p. 100 : les auteurs s’appuient sur une source géorgienne du xe siècle, La Vie de Georges l’Hagiorite.
36 Ibid., p. 100.
37 Ibid., p. 115-121 : les auteurs, d’après une source géorgienne, démontrent clairement que c’est déjà la reine Marie qui avait négocié le mariage de son fils Bagrat avec Hélène Argyropoulaina. Nous pouvons également soupçonner son influence dans l’adoption du prénom Marie par la jeune Marthe (Marie d’Alanie).
38 Ibid., p. 120 : le père de Bagrat, le roi Georges Ier, avait divorcé de la reine Marie pour épouser la fille du roi des Alains. Marie était revenue sur le devant de la scène politique lorsque le jeune Bagrat avait succédé à son père.
39 J.-Cl. Cheynet et J.-F. Vannier, Études prosopographiques, p. 76 : la famille des Dalassènoi compta tout au long du xie siècle des militaires de haut rang dont le plus illustre, Constantin, faillit accéder à l’Empire par Zoé Porphyrogénète.
40 É. Malamut, Alexis Ier Comnène, p. 128.
41 Chr. Settipani, La continuité des élites à Byzance durant les siècles obscurs, p. 343 et 350 : les Tarônitai étaient une ancienne famille qui descendait des anciens princes du Tarôn, en Arménie ; grâce à cette alliance, la carrière de Michel fut fulgurante.
42 Ibid., p. 77 : les origines des Mélissènoi remontent au viiie siècle ; le premier membre connu de la famille était Michel, qui avait épousé sous le règne de Constantin V la sœur de l’impératrice ; nous les retrouvons sur la scène politique tout au long des viiie, ixe et xe siècles avant une interruption de près d’un siècle, jusqu’à ce qu’ils réapparaissent lors de cette alliance avec les Comnènes.
43 En 1071, l’empereur Romain IV Diogénès avait été vaincu et fait prisonnier par les Turcs. Les Doukai, menés par le césar Jean, avaient saisi l’opportunité de recouvrer le pouvoir ; cependant, Romain IV, libéré, avait tenté un retour en force et, dans ce but, échangé des lettres non seulement avec son épouse l’impératrice Eudocie, mais également avec Anne Dalassènè avec qui, rappelons-le, il était lié. La découverte de cette correspondance avait condamné les deux femmes, ainsi que leurs enfants, à l’exil.
44 J.-Cl. Cheynet, Pouvoir et contestations à Byzance (963-1210), p. 277.
45 Michel Psellos, Chronographie ou Histoire d’un Siècle de Byzance, VII, 2, 6, p. 140.
46 Jean Skylitzès, Empereurs de Constantinople, p. 157-159 et p. 167-169 .
47 J.-Cl. Cheynet, Pouvoir et contestations à Byzance (963-1210), p. 339.
48 Michel Psellos, Chronographie ou Histoire d’un Siècle de Byzance, VII, 1, 33, p. 133-134.
49 Jean Skylitzès, Empereurs de Constantinople, p. 328. Michel Psellos, Chronographie ou Histoire d’un Siècle de Byzance, VII, 2, 6, p. 141.
50 Voir N. Oikonomides, « Le serment de l’impératrice Eudocie : un épisode de l’histoire dynastique de Byzance », p. 101-128.
51 J.-Cl. Cheynet, Pouvoir et contestations à Byzance (963-1210), p. 201, note 12 et p. 267 : les Makrembolitai faisaient partie des familles notables qui accaparèrent les fonctions civiles entre 1040 et 1100 ; ils appartenaient au clan constantinopolitain des Monomaques, Cérulaires et Doukai.
52 N. Oikonomides, « Le serment de l’impératrice Eudocie : un épisode de l’histoire dynastique de Byzance », p. 119 : Constantin X se méfiait surtout des cousins d’Eudocie, Constantin et Nicéphore (les neveux du patriarche Michel Cérulaire).
53 Michel Psellos, Chronographie ou Histoire d’un Siècle de Byzance, Livre VII, III, 29, p. 165.
54 Anne Comnène, Alexiade, IV, 5, 3, p. 155 et X, 2, 2, p. 190 : Anne mentionne deux fils, Nicéphore et Léon, puis un troisième Constantin. En ce qui concerne l’imbroglio entre Léon et Constantin, voir Ibid., IV, 5, note n°1, p. 155.
55 M. Angold, The Byzantine Empire, 1025-1204, p. 123 : l’auteur souligne dans ces mariages l’action décisive de l’eunuque Nicéphoritzès.
56 Ibid., p. 121 : évincé par l’eunuque Nicéphoritzès qu’il avait lui-même placé à la tête de l’administration, le césar s’était retiré dans ses propriétés à l’automne 1073.
57 Anne Comnène, Alexiade, II, 7, 1-2, p. 84-85.
58 Ibid. II, 6, 1-2, p. 80.
59 Ibid., II, 11, 2-5, p. 95-97.
60 Ibid., III, 2, 1, p. 106.
61 Ibid., II, 6-7, p. 97-98.
62 Ibid., III, 1, 5, p. 105.
63 Ibid., III, 2, 7, p. 109.
64 J.-Cl. Cheynet, Pouvoir et contestations à Byzance (963-1210), p. 314 : Kosmas était un client des Doukai. Anne Comnène, Alexiade, II, 12, 5, p. 100 : il était déjà intervenu une première fois à la demande du césar pour pousser Botanéiatès à abdiquer sans livrer bataille.
65 Ibid., III, 2, 7, p. 109 : le moine Eustratios, protégé d’Anne Dalassènè ; il aurait sûrement été plus enclin à dissoudre le mariage d’Alexis et d’Irène.
66 Ibid., III, 2, 7, p. 110.
Voir É. Malamut, Alexis Ier Comnène, p. 60 : l’armée d’Alexis, lors de son entrée dans Constantinople, s’était livrée à un violent pillage au cours duquel les églises et les sanctuaires avaient été profanés ; il est clair qu’Alexis et sa mère n’étaient pas en position de forcer le patriarche au départ.
67 É. Patlagean, « Christianisation et parenté rituelles : le domaine de Byzance », p. 626-627 : l’adoption, devenue un rituel ecclésial, engendrait des empêchements de mariage.
68 B. Hill, « Alexios I Komnenos and the Imperial Women », p. 45-46.
69 J.-Cl. Cheynet, « Les sceaux des impératrices à Byzance ».
Auteur
Doctorante, Aix Marseille Université, CNRS, LA3M UMR 7298
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