Les multiples langages du rituel nuptial dans la Rome antique
p. 11-22
Résumé
Grâce aux témoignages antiques, source essentielle de cette étude, nous connaissons bien le déroulement de la cérémonie nuptiale à Rome. Son but est d’unir les époux mais aussi de proclamer leur union. Un certain nombre de rites scellent d’abord le mariage en privé mais en présence de témoins, humains et divins. Le départ théâtral de la fiancée informe les voisins de l’événement. Le bruyant cortège nuptial publie ensuite cette union à la cité entière. L’entrée solennelle de la mariée dans la maison conjugale prévient le quartier de l’arrivée de la nouvelle épouse. À l’intérieur son accueil rituel informe la maisonnée, qu’une nouvelle matrone fait désormais partie de la maison. Pour transmettre le message la parole formulaire, juridique ou religieuse, joue un rôle essentiel, mais d’autres langages sont utilisés : images signifiantes, gestuelle théâtrale, cris, acclamations, chants se succèdent ou s’associent, complétant ou remplaçant la parole formulaire. À chaque étape du rituel le langage change selon le lieu et le public auquel s’adresse le message.
Texte intégral
1Le langage, sous toutes ses formes, est l’indispensable outil du lien social : il permet aux membres d’une communauté de communiquer entre eux. La cérémonie nuptiale, outre qu’elle crée un couple conjugal par l’engagement réciproque des nouveaux époux, doit faire connaître cette nouvelle structure familiale à la société. On ne se marie pas seulement pour soi, mais aussi pour les autres. Je voudrais analyser ici les différents langages auxquels avait recours la cérémonie nuptiale dans la Rome antique, à chaque étape de son déroulement : le rite nuptial proprement dit, qui officialise l’engagement des époux, le pittoresque cortège nuptial, qui accompagne la mariée jusqu’à la demeure de son nouvel époux, et enfin l’entrée de celle-ci dans la maison conjugale, prélude à l’acte qui concrétisera l’union sur le lit nuptial. Le langage parlé y tenait une place importante, alternant les formules juridiques, religieuses ou simplement traditionnelles. Mais d’autres moyens d’expression y figuraient, rituels ou spontanés, qui utilisaient d’autres formes, orales, comme les acclamations, les chansons et les plaisanteries, ou visuelles, images signifiantes et gestuelles variées. En identifiant ces différents langages je tenterai aussi de déterminer à quel public ils s’adressent.
La cérémonie privée
La dextrarum iunctio
2Je passe sur les préparatifs de la toilette et de la coiffure de la mariée. Certes elles ont une signification mais elles ne font pas à proprement parler partie de la cérémonie nuptiale. Celle-ci commence par un rite religieux qui se déroulait en privé : une prise d’auspices1. Avant d’informer les hommes, il faut informer les dieux et demander leur approbation. Plus qu’un message, c’est un dialogue : les hommes demandent l’approbation divine, qui leur est donnée par l’intermédiaire des oiseaux dont ils observent l’apparition. Pour respecter les coutumes religieuses, un sacrifice était également nécessaire2, autre façon de communiquer avec les dieux. En ce qui concerne les hommes, la signature du contrat, acte juridique, qui met par écrit et valide l’engagement réciproque des deux parties, est l’indispensable préalable à la cérémonie. C’est un accord privé entre deux familles, mais qui doit être vu, entendu et reconnu par des témoins, représentants de la société.
3Mais ce qui officialise l’union des époux, c’est la dextrarum iunctio, geste par lequel ils joignaient leurs mains droites ; c’est un rite nuptial dont on trouve maint exemple dans des civilisations variées3. À Rome la main droite symbolisait la fides, c’est-à-dire à la fois l’engagement et la fidélité à cet engagement4. La dextrarum iunctio est une union symbolique des nouveaux époux, et non plus de leurs familles, garantie par leur fides, devant les yeux des assistants. De nos jours l’échange des anneaux, qui a la même signification, est toujours public, lui aussi. Le geste rituel se faisait sous l’égide d’une femme que l’on appelait la pronuba5 : c’était une sorte de marraine, qui avait préparé la fiancée à son nouvel état d’épouse en lui enseignant le travail de la laine et la morale matronale6 ; elle l’accompagnerait ensuite jusqu’à la maison conjugale où elle la remettrait définitivement à son mari. Elle joignait elle-même les mains des époux. Le geste suffisait à constituer l’union conjugale : la scène figure sur les monuments funéraires et elle est parlante en soi. Cependant la pronuba prononçait peut-être en même temps une formule rituelle. On peut le supposer d’après un passage de la comédie de Térence intitulée L’Andrienne. La courtisane Chrysis, sur son lit de mort, confie sa jeune pupille Glycère à l’amant de celle-ci, Pamphile ; il ne s’agit pas vraiment d’un mariage car la jeune fille n’est pas citoyenne : Pamphile ne peut pas l’épouser légalement. Chrysis accomplit donc un simulacre d’union conjugale, en espérant que geste et formule engageront les jeunes gens comme dans un véritable mariage ; elle tient le rôle de la pronuba en disant à Pamphile :
« Par ta main droite et par ton Genius, au nom de ta loyauté (fides) et de la solitude où elle va se trouver, je te demande solennellement de ne pas l’abandonner et de ne pas la laisser sans protection. »7
4Et elle la lui remet en disant :
« Je te donne à elle en tant que mari. »8
5Le commentateur Donat écrit en note :
« Il apparaît qu’elle dit ces mots en joignant leurs mains droites. »
6Chrysis prononce peut-être la formule rituelle de la dextrarum iunctio9. La référence à la main droite et à la fides plaident en ce sens. Le geste et la parole s’unissent donc pour matérialiser l’engagement réciproque des époux et le faire connaître aux témoins qui assistent à la scène (familles et proches) et dont la présence certifie la validité de l’union. Dans la pièce de Térence l’absence de témoins confirme que l’union ainsi scellée n’est que symbolique et n’a aucune valeur aux yeux de la société.
Les trois modes de mariage
7La dextrarum iunctio est commune à tous les mariages mais c’est seulement une coutume signifiante. Légalement la procédure romaine reconnaissait trois modes de mariage, tous anciens. Le mariage par usus se fondait sur la durée patente d’un an de vie en couple. Il ne nécessitait aucun acte particulier et n’entre pas dans notre sujet sauf dans la mesure où une vie commune notoire est en soi un moyen de manifester l’union entre les deux protagonistes : c’est une sorte de langage permanent.
8Le mariage par coemptio était une union civile, fondée sur une vente fictive de la fiancée. La scène reproduisait les gestes et les formules d’une procédure de vente. Évidemment, comme pour une véritable cession commerciale, la présence de témoins susceptibles d’attester la validité de la transaction et donc du mariage était indispensable.
9Le mariage par confarreatio était une cérémonie religieuse, pratiquée seulement par les vieilles familles patriciennes10. Elle prenait à témoin de la nouvelle union le grand dieu de la cité, Jupiter, représenté par son prêtre, le flamen Dialis11. Il n’est pas étonnant que Jupiter patronne un rite nuptial, car il est le dieu des serments et il a des liens étroits avec Fides12, la déesse de la bonne foi à laquelle se réfère implicitement la dextrarum iunctio.
10L’union des nouveaux époux est symbolisée par une mise en scène signifiante de couleur archaïque. Les époux sont assis sur des sièges jumelés recouverts par une peau de mouton encore garnie de sa laine, celle de l’animal immolé lors du sacrifice qui précède la cérémonie nuptiale13. La peau brute est encore imprégnée de sacré. C’est réunis matériellement par ce double siège qui n’en fait qu’un que les futurs procèdent au geste essentiel du rituel : ils partagent un gâteau de far qui donne son nom à la cérémonie. Dans toutes les sociétés, se partager un mets ou une boisson signifie que l’on s’engage à partager les aliments vitaux. C’est un geste social, symbole d’alliance ; A. Van Gennep le classait parmi les rites d’union des nouveaux époux, comme le fait de partager le même siège14. Le far est une céréale très ancienne et par là même réservée à l’usage religieux. C’est lui qui sert à fabriquer la mola salsa, ce mélange de farine et de sel que l’on versait sur les animaux sacrificiels avant de porter le coup fatal15. La nature de l’aliment partagé dans le rite nuptial sacralise l’engagement, d’autant plus que la confarreatio se célèbre devant Jupiter, dieu des serments. Des formules consacrées complétaient la cérémonie.
11La présence comme témoin de Jupiter, représenté par son flamine, et l’usage du far donnent une garantie religieuse à la nouvelle union mais le rite a aussi une signification sociale : la cérémonie exigeait la présence de dix témoins car l’alliance n’est pas seulement celle des deux époux, c’est celle de deux gentes (familles) patriciennes ; elle concerne donc l’ensemble de la caste des patriciens, représentée par ces dix témoins. Il ne faut pas oublier que la vie politique romaine était en grande partie fondée sur les relations d’amitié entre les clans que représentaient les grandes familles de l’aristocratie et leurs alliés. Les mariages scellaient des unions politiques autant que conjugales. La sanctification de l’union apportée par la confarreatio garantissait cette alliance que les témoins pouvaient attester. La cérémonie s’adresse à la fois aux dieux et aux hommes, au roi des dieux et à l’élite de la société.
Le cortège nuptial
12Quel que soit le mode de mariage utilisé, la partie festive en était le banquet de noces. Un repas pris en commun est toujours à l’origine un geste religieux. Certes, c’était aussi l’occasion pour les invités de classe sociale inférieure de participer à la liesse générale et de profiter largement de la générosité de leur hôte mais, dans un registre différent, le repas de noces a le même but que la confarreatio : publier l’union des nouveaux époux et la célébrer par un acte social et religieux. Les assistants y étaient plus nombreux et d’une origine sociale plus variée que lors de la dextrarum iunctio ou de la confarreatio et il se déroulait dans un lieu semi-public : les pièces de réception de la maison. L’atmosphère y était beaucoup moins solennelle que dans les rites précédents et la jeune mariée n’y assistait sûrement pas.
13Le rituel nuptial à proprement parler reprend au moment où elle quitte la maison de son père pour se rendre chez son nouvel époux. Tout ce deuxième acte du mariage se déroule dans l’espace public. Les témoins n’en sont plus les quelques représentants des familles et de la caste concernée, ni les amis et clients conviés au banquet : c’est la cité qui va prendre connaissance de la nouvelle union. Pour imaginer l’ambiance qui y régnait, la littérature latine nous offre deux textes précieux, l’un sur le mode poétique (l’épithalame mise en scène par Catulle dans la Pièce 61), l’autre sur le mode parodique (la comédie de Plaute, Casina).
La sortie de la mariée
14Après le banquet de noces, à la nuit tombante, les amis du marié se rassemblent devant la porte. Ils réclament la mariée à grands cris. Chez Catulle, chaque strophe s’achève par le refrain :
« Sors, nouvelle épouse. »16
15Dans Casina le chœur, composé du futur époux et de son patron, s’égosille grotesquement à chanter le chant d’hyménée17. Dans les deux cas la mariée tarde à apparaître : chez Catulle le chœur réitère plusieurs fois son appel ; dans Casina le futur s’impatiente :
« Mais qu’est-ce qu’elle fabrique si longtemps ? Ma parole elle le fait exprès ! »18
16Cet ostensible manque d’empressement est un message : il signifie que la fiancée est chaste. Plus elle tarde à se montrer, plus elle affiche sa vertu :
« Une noble pudeur la retient. »19
17Quand enfin elle apparaît, les acclamations qui la saluent informent tout le voisinage de l’événement20. Le caractère spectaculaire de cette sortie tant attendue était renforcé par son apparence : elle était tout entière enveloppée dans le flammeum, un grand voile couleur de feu qui dissimulait son corps et cachait au moins le haut de son visage. La toilette de la mariée est chargée de sens mais les spectateurs ne voient que le voile qui la couvre. Ce voile transmet cependant un message essentiel puisque c’est lui qui donne son nom aux noces : nuptiae vient de nubere, qui signifie pour une jeune fille « se voiler pour (un homme) », c’est-à-dire « se marier ». Et ce message est double. La couleur du flammeum est un présage de fécondité21 ; il promet que la fiancée remplira son devoir d’épouse : donner à son mari une descendance légitime ; car la fécondité fait partie des qualités qu’on loue chez une matrone, souvent associée à sa vertu22, et on l’inscrit même sur sa pierre tombale23. Mais la nature du vêtement transmet un autre message. Le voile proclame qu’au moment où elle se montre à l’extérieur de la maison de son père, elle est invisible. Cette invisibilité traduit concrètement l’idéal conjugal qu’elle s’engage à incarner. La matrone parfaite est celle qu’on ne voit pas et qu’on n’entend pas : la discrétion et la modestie sont ses vertus majeures, qui garantissent qu’elle restera l’épouse chaste d’un seul homme et ne suscitera la convoitise d’aucun autre que lui24. La morale conjugale répartit les rôles entre les sexes : l’homme appartient au domaine public, la femme à la sphère privée : sa fonction est limitée à la domus, d’où elle est censée ne sortir que dûment voilée et escortée. Horace compare l’environnement des dames à un véritable rempart. La loi protège d’ailleurs l’intégrité des matrones et punit tout homme qui ose lui porter atteinte, en gestes ou en paroles25. L’épousée voilée du flammeum revendique publiquement ce statut.
18Une autre apparition était saluée par des acclamations : celle du panier de laine de la mariée, accompagné de son fuseau et de sa quenouille, qui témoignait qu’elle avait été initiée au lanificium (travail de la laine) et qu’elle serait une bonne lanifica26. Le statut matronal que Romulus est censé avoir fondé exemptait les matrones de tout travail domestique à l’exception du travail de la laine. Autrement dit la tâche première de la matrone était de filer et de tisser à l’intérieur de la maison, où était confinée toute son activité, et cette tâche était le symbole de sa vertu27. L’habileté au travail de la laine figure sur les épitaphes à côté de la chasteté et de la fidélité pour faire l’éloge de la défunte28 : même si à l’époque historique la matrone ne file ni ne tisse plus, l’adjectif lanifica est resté symbole de vertu. On reconnaît le mythe de Pénélope, à la fois tisserande exemplaire et modèle de fidélité. À Rome, cet idéal est incarné par Lucrèce, l’héroïne de l’époque royale qui se suicide parce que, souillée par un viol, elle ne peut plus donner à son mari des enfants de pure race ; la tradition la montre occupée au travail de la laine lorsque son séducteur la voit et s’éprend d’elle. Comme le flammeum, qui manifeste la vertu de l’épousée par sa nature et présage sa fécondité par sa couleur, le panier de laine, accompagné des outils du lanificium, annonce qu’elle sera une bonne épouse, répondant à l’idéal matronal. Les acclamations qui saluaient son apparition en criant son nom « Talassio ! Talassio ! »29 le faisaient savoir à tout le voisinage.
Le rapt nuptial simulé
19À l’image muette mais signifiante de l’apparition de la mariée sur le seuil succède une scène théâtrale, qui fait partie des rites de séparation. Les amis du marié se saisissent de force de la fiancée qui résiste et pleure en se cramponnant à sa mère30. Catulle évoque deux fois la scène31. L’enlèvement simulé est fréquent parmi les rites nuptiaux : comme le fait qu’elle tarde à sortir de la maison paternelle, il exprime visuellement la pureté et la pudeur de la vierge32. À Rome, la scène est censée rappeler l’ancienne coutume du rapt nuptial, dont l’enlèvement des Sabines est resté l’archétype. Mais Romulus avait ensuite sanctifié le rapt en créant le statut matronal, qui donnait aux Sabines un statut d’épouses légitimes. De sorte que dans la mémoire mythique cette scène de rapt simulé proclame publiquement à la fois que la fiancée est chaste et que le prétendu enlèvement aboutira à faire d’elle une matrone, comme ce fut le cas pour les Sabines. Il donne aux spectateurs une justification sociale au « transfert » de la jeune fille d’une maison à l’autre.
Le cortège nuptial
20Le cortège qui escorte la fiancée jusqu’à la demeure de son mari est le moment le plus visible de toute la cérémonie, car son itinéraire traverse la ville : c’est un événement public. Jusqu’ici les différents rites ne concernaient que les familles et les proches ; même la sortie de la fiancée et son enlèvement simulé sont un message aux seuls voisins ; le cortège nuptial, lui, transmet le message à toute la cité. Il ne doit surtout pas passer inaperçu : son caractère public garantit la légitimité de l’union. C’est pourquoi il offre un spectacle coloré et bruyant, attirant l’attention générale.
21Il est précédé de torches. Elles ont sans doute une fonction apotropaïque. Westermarck les compare aux cris et coups de fusil que l’on retrouve avec cette fonction dans de nombreux rites nuptiaux33. Mais en outre elles rendent le mariage visible, au propre, car les torches éclairent la scène, qui se déroule de nuit, et au figuré, car elles attirent l’attention sur lui. Une torche particulière, en aubépine, était portée devant l’épousée34. L’aubépine, signe de fécondité35, renforçait l’effet du flammeum dont elle était enveloppée. Le message transmis aux spectateurs est indirect mais clair : le but du mariage célébré est de donner une descendance au mari : la mariée met toutes les chances de son côté pour accomplir cette mission.
22Elle était encadrée par les garçons d’honneur du marié, qui la tenaient chacun par un bras, continuant à mimer le rapt. Mais ce qui attirait surtout l’attention c’étaient les chants licencieux et les plaisanteries grivoises que lançait la troupe des jeunes gens. On les appelait vers fescennins (fescennina iocatio). Ils occupent une grande partie de l’épithalame de Catulle36 et visent surtout le mari. On s’accorde à donner à ces lazzi improvisés, qui sont toujours d’ordre sexuel, une valeur apotropaïque : ils sont censés écarter magiquement le danger qu’implique la défloration d’une vierge pour le mari. L’obscénité des vers fescennins, les rires qu’ils provoquent le protègent de ce danger mais en même temps ils proclament la pureté de l’épousée puisque s’unir à elle présente un tel risque.
23Pendant le trajet, elle répétait comme une incantation le nom de Gaia Caecilia : cette déesse passait pour avoir été une matrone modèle, tant par ses vertus conjugales que par ses talents de filandière37. Elle avait sa statue, avec son fuseau encore garni de laine, dans le temple de Dius Fidius38, dieu de la fides, ce qui la met en relation à la fois avec le lanificium et avec le mariage. Effectivement elle avait été assimilée à la reine Tanaquil : celle-ci avait présidé à l’union d’une servante avec le dieu phallique apparu dans le foyer du palais royal ; cette union devait aboutir à la naissance du futur roi Servius Tullius39. Elle était ainsi l’archétype de la pronuba, la marieuse modèle. L’image de la corbeille à laine garnie des outils du lanificium et l’incantation convergeaient vers le même effet : proclamer que la mariée avait été initiée à la double fonction d’épouse et de lanifica et serait une autre Gaia Caecilia40. Enfin, comme Gaia Caecilia semble avoir eu des liens avec la symbolique du feu41, on peut penser qu’en l’invoquant l’épousée s’assurait aussi un présage de fécondité. On doit donc conclure que le patronage de Gaia Cecilia met la mariée sous le signe, non seulement de la mystique du travail de la laine, que symbolisent, dans le culte, la statue accompagnée des outils de filandière de la déesse, et dans le cortège nuptial, la quenouille et le fuseau de la uirgo nubens, mais aussi du feu fécondant qui précède la mariée sous la forme de la torche d’aubépine, qui l’enveloppe sous la forme du flammeum et qu’elle invoque en répétant le nom de Gaia Caecilia42. Chaque élément du cortège nuptial, visuel ou oral, fait savoir à tous le but du mariage et la perfection de la future épouse.
L’arrivée à la maison conjugale
24L’arrivée à la maison conjugale change totalement le ton de la cérémonie. Le cortège s’arrête. Les chansons, les cris et les rires cessent : c’est le silence. Les scènes qui vont se dérouler seront statiques et graves.
Gaius et Gaia
25D’abord le mari accueillait la fiancée devant la porte de la maison conjugale en lui demandant solennellement qui elle était. Et elle répondait par une formule de type juridique : « Où tu es Gaius je suis Gaia »43. En même temps qu’un engagement public, c’est une revendication de son identité nouvelle. Elle proclame que pour devenir l’épouse d’un homme elle renonce à tout ce qui était sa vie précédente. Il n’est pas anodin que la formule soit prononcée devant la maison et non à l’intérieur. D’abord il faut qu’elle ait changé d’identité pour pouvoir entrer dans la maison conjugale mais surtout la scène se déroule dans l’espace public : le voisinage de sa nouvelle demeure est informé à son tour du mariage.
Les rites de la porte
26Avant de pénétrer dans la maison elle devait encore se livrer à quelques rites superstitieux : elle ornait de rubans de laine les montants de la porte et les graissait avec de la graisse de loup44. La porte, qui sépare deux mondes mais permet aussi de passer de l’un à l’autre, est sacralisée dans beaucoup de civilisations. Passer une porte pour la première fois exige des précautions magiques. Les bandelettes de laine (uittae) manifestaient la sacralité de la porte45. La graisse de loup, animal dangereux, devait protéger la mariée à son passage : on utilise souvent les forces maléfiques en les retournant contre les menaces éventuelles. En accomplissant ces rites la nouvelle mariée exprime sa volonté d’entrer dans sa nouvelle demeure, créant une symétrie avec sa résistance au moment du rapt simulé ; la situation est inversée : comme les Sabines elle va passer du statut de vierge enlevée par la violence, dont la résistance prouvait la pureté, à celui d’épouse légitime. En opérant ces rites d’entrée elle accepte et même revendique publiquement son entrée dans sa nouvelle demeure et dans sa nouvelle vie.
27Le moment essentiel était le franchissement du seuil. Les témoignages des auteurs anciens divergent sur ce rite46. Mais qu’on l’ait portée à l’intérieur ou qu’elle ait pris soin de ne pas heurter le seuil, comme le conseille la pronuba à Casina47, le sens est le même : le seuil sépare l’espace public de l’espace privé. Il constitue une barrière sacrée, plus symbolique encore que la porte qui, elle, permet l’accès en s’ouvrant. Toucher cette ligne sacrée en entrant serait un dangereux sacrilège et un présage désastreux.
28Bien entendu cette scène théâtrale, même si elle est muette, transmet un message clair aux voisins. Elle montre concrètement l’entrée solennelle de la nouvelle mariée dans la demeure conjugale et l’irréversibilité de son intégration dans la demeure. La gestuelle du franchissement du seuil vient confirmer la proclamation orale de la formule prononcée par la fiancée. L’un comme l’autre disent au voisinage qu’elle passe d’un monde à l’autre, d’une maison à l’autre, de l’état de vierge au statut de matrone.
L’accueil dans la maison
29Une fois franchi le seuil, d’autres rites consacraient l’intégration de l’épousée dans la maison conjugale. Son mari l’accueillait « avec l’eau et le feu »48. On ne sait pas exactement comment se déroulait le rite mais son sens ne fait aucun doute : aqua et igni accipere est exactement l’inverse de la formule de l’exil : aqua et igni interdicere. L’exilé est privé des deux éléments qui symbolisent la vie domestique. Aucune maison ne l’accueillera. La nouvelle épouse au contraire reçoit à son arrivée une preuve de son intégration à la vie domestique. Les spectateurs du rite sont maintenant limités aux membres de la maisonnée ; ce sont eux qui devront désormais considérer la nouvelle mariée comme la maîtresse de maison.
30Les dieux ne sont pas oubliés. La mariée apportait trois pièces de monnaie ; elle donnait la première à son mari, déposait la seconde sur le foyer et allait jeter la troisième au carrefour le plus proche49. La valeur magique de l’argent est connue. La mariée se concilie d’abord la faveur du Genius de son mari : le Genius était un dieu attaché à la personne de chaque homme ; vu sa racine (même famille qu’engendrer) il incarnait son pouvoir fécondant50. La nouvelle épousée achetait symboliquement la faveur du Genius pour qu’il l’accepte comme épouse du maître de maison et pour que son union soit heureuse et féconde. La pièce déposée sur le foyer était destinée au Lare Domestique, qui protégeait la maison51. Lui offrir cette piécette revenait à lui demander de bien vouloir la considérer comme faisant partie désormais de la maison sur laquelle il veillait. Quant à la troisième pièce, si l’épousée allait la jeter au carrefour le plus proche, c’est qu’à chaque carrefour il y avait un autel dédié aux Lares des Carrefours. Ces Lares recevaient un culte de la part des habitants du quartier car les croisements étaient des endroits dangereux ; il fallait se concilier la faveur des divinités qui y résidaient. La mariée se mettait ainsi sous leur protection. Ces trois offrandes signifiaient donc son intégration religieuse à un couple, à une maison et à un quartier.
Dans la chambre nuptiale
31Les rites d’accueil et d’intégration de la mariée une fois accomplis devant l’ensemble de la maisonnée, la pronuba la conduisait à la chambre nuptiale. Les autres assistants ont disparu ; elle reste seul témoin des derniers instants avant l’acte décisif ; elle installait la jeune fille sur le lit nuptial et lui prodiguait les ultimes conseils : elle devait lui rappeler son devoir de soumission (obsequentia) et la préparer à ce qui l’attendait, comme le suggère la fameuse peinture dite des « Noces Aldobrandines » : sur cette scène empreinte de gravité la pronuba, assise sur le lit nuptial à côté de la jeune mariée, dont le visage exprime une tristesse résignée, l’encourage avec compassion. Plaute fait une joyeuse parodie de ces dernières recommandations dans Casina52. Puis la pronuba appelle le mari et lui remet solennellement sa nouvelle épouse :
« Tu peux venir à présent, nouveau mari ; ton épouse est prête sur la couche nuptiale. »53
32Il est probable qu’une dernière formule confirmait oralement la remise de l’épouse à l’époux. On trouve peut-être une allusion à celle-ci lorsque la pronuba qui accompagne Casina dit au mari :
« Allons, Olympion, puisque tu le souhaites, reçois de mes mains cette femme comme épouse. »54
33Une autre phrase de cette pronuba invite le mari à ne pas être trop brutal avec la jeune fille :
« S’il te plaît, elle est pure et innocente, vas-y doucement ! »55
34Il est vrai que la mariée était souvent très jeune56 : le conseil n’était pas superflu. Dans Casina il est destiné à faire rire car le spectateur sait que sous le voile de la mariée se dissimule un solide gaillard qui rossera le mari. Mais la comédie parodie peut-être une formule rituelle qui garantissait au mari la virginité de la future, confirmant oralement ce qu’affirmait au départ, dans un autre langage, la comédie du rapt simulé. Les épitaphes précisent souvent, comme une des vertus de la défunte, qu’elle est arrivée vierge au mariage.
35Sa mission accomplie la pronuba quittait la scène, elle aussi. Le rituel nuptial n’était pas fini pour autant mais désormais tout se déroulait sans témoin humain. C’est à un dieu que l’épousée adressait une prière : au Genius de son époux, auquel le lit nuptial, appelé lectus genialis, était consacré57. Cette prière orale venait compléter le geste du don de la pièce de monnaie : l’un comme l’autre cherchent à obtenir la faveur de la divinité qui veille sur la virilité du mari. Le reste se passait sans témoins, dans l’obscurité : les protagonistes eux-mêmes ne voyaient pas la consommation de leur union. La cérémonie nuptiale était terminée. Il faudrait attendre le lendemain pour qu’un sacrifice le matin et un nouveau repas, où cette fois l’épousée serait présente dans son costume de matrone, rendent manifeste son nouvel état.
36Il nous reste à tirer les conclusions de cette analyse des différents actes de la cérémonie nuptiale. Je choisis volontairement le terme « actes », qui évoque le monde du théâtre car, c’est la première constatation, les différentes étapes du rituel sont visiblement des scènes théâtrales, destinées à adresser un message aux spectateurs. Mais les modes d’expression varient. Une simple image peut suffire, comme l’apparition de la mariée drapée dans son flammeum ou celle du panier de laine. Le plus souvent c’est une gestuelle signifiante qui porte le message, comme le partage du gâteau de far, l’enlèvement simulé ou le franchissement de la porte. Mais souvent la parole formulaire vient confirmer la signification du geste et lui apporter sa garantie, car la parole possède une valeur performative aussi efficace que celle du geste. Les mots de la pronuba « doublent » en quelque sorte le geste d’union de la dextrarum iunctio ; la formule « Où tu es Gaius je suis Gaia » justifie le franchissement de la porte en lui donnant son sens. La prière au Genius a le même but que l’offrande de la pièce de monnaie. L’incantation de l’épousée qui répète le nom de Gaia Caecilia s’ajoute à l’apparition du flammeum et l’exhibition du panier de laine. Même les cris, les chansons, les interpellations, les rires, le bruit en général, transmettent un message.
37La deuxième constatation est que le rituel nuptial est orienté ; il se déplace de la maison de la fiancée à celle du mari. Ce déplacement est déjà signifiant en soi car il manifeste de façon visible que le mariage fait passer l’épousée du monde dans lequel elle vivait en tant que vierge, chez son père, dans celui de son mari où elle sera une matrone. Son changement de statut est rendu visible aux yeux de tous par son passage d’un lieu à l’autre. En conséquence, les différents moments de la cérémonie se font dans des endroits différents et avec un public différent et le ton de chaque scène, ses modes d’expression dépendent de l’endroit où elle se déroule et du public auquel elle s’adresse. On pourrait diviser l’ensemble en trois phases :
– Première phase : dans puis devant la maison paternelle
38On passe de l’intimité de la toilette de la mariée à la semi intimité des rites qui concluent le mariage : signature du contrat, dextrarum iunctio, confarreatio se font devant un public limité : famille, proches, témoins choisis. On prend comme garants de grandes divinités comme Jupiter et Fides. Les rites se célèbrent avec gravité dans des scènes statiques ; les gestes signifiants sont complétés par un langage formulaire, juridique ou religieux. La sortie de la mariée marque un changement de ton car on est désormais dans la sphère semi-publique ; les témoins sont les gens du quartier. Les scènes sont plus théâtrales, avec davantage de mouvement et un langage moins formel : cris réclamant la mariée, acclamations saluant son apparition et celle du panier de laine, comédie du rapt simulé.
– Deuxième phase : de la maison paternelle à la maison du mari
39Enfin la mariée quitte la maison paternelle. Son changement de résidence et de statut est matérialisé et proclamé par le bruyant déplacement du cortège qui l’escorte d’un point à l’autre. Cette fois le public s’élargit à la cité tout entière et, dans le mouvement général, les modes d’expression se font plus libres, mélangeant le visuel (torches, mariée dans son flammeum, cortège animé) et le sonore, où le spontané l’emporte sur le rituel (chansons grivoises, lazzi, acclamations). Tout est fait pour attirer l’attention des éventuels spectateurs, tant par la visibilité des acteurs que par le bruit qu’ils font. Il faut donner le maximum de publicité à l’événement. De nos jours encore, à défaut de cortège nuptial à l’ancienne, ce sont des cortèges de voitures qui traversent la ville en klaxonnant sans discontinuer, au son d’une musique tonitruante : le but de ce véritable spectacle est d’attirer l’attention sur des mariages qui, sans cela, demeureraient limités à la sphère privée et manqueraient de la publicité indispensable pour les valider aux yeux de la société. Ces bruyantes manifestations s’adressent à un public humain plus large, plus populaire que celui du rituel nuptial ; il faut l’interpeller pour l’informer quasiment malgré lui. Sur le plan divin, le bruit, les torches, les chansons obscènes ne s’adressent plus à des grands dieux mais cherchent à éloigner des forces obscures : les pratiques magiques se substituent aux rites religieux. Même l’invocation à Gaia Caecilia prend la forme d’une incantation et non d’une prière. Le langage est adapté aux circonstances et au public.
– Troisième phase : devant puis dans la maison du mari
40Dans la dernière phase du processus, une fois l’épousée arrivée à destination, le nombre des témoins diminue progressivement et les modes d’expression changent au fur et à mesure. Le cortège s’arrête et l’agitation se calme. Le voisinage est informé de l’arrivée de la nouvelle épouse par les rites qui matérialisent le passage du public au privé : échange préalable de paroles formulaires puis gestuelle codée du franchissement de la porte. On passe ensuite à la relative intimité de l’atrium de la maison conjugale où la nouvelle épouse est accueillie rituellement dans sa nouvelle demeure : le message s’adresse aux gens et aux dieux de la maison ; le ton est grave et solennel. Puis il ne reste plus sur le plan humain que la pronuba, dont les propos s’adressent successivement à l’épouse et à l’époux, préparant leur union proche ; et elle s’efface enfin pour laisser les laisser seuls dans la chambre nuptiale, sous le seul regard des dieux. Le rituel referme progressivement l’éventail des témoins jusqu’à l’intimité totale, renforcée par l’obscurité : le geste final ne concerne plus que les époux. Les modes d’expression changent à mesure : scènes théâtrales de l’entrée solennelle de l’épousée dans la maison ; à l’intérieur rites, formules, prières sur un ton de gravité, avant qu’hommes et dieux laissent enfin les nouveaux époux seuls dans l’obscurité.
41Au total, au fur et à mesure que s’ouvre l’éventail des destinataires du message que délivre la cérémonie nuptiale, les différents langages changent, de plus en plus animés, de plus en plus bruyants, passant peu à peu de la gravité à l’exubérance, du statique au mouvement, du formulaire au spontané. Bruit et mouvement culminent dans le cortège nuptial. Puis, en sens inverse, les différents modes d’expression du message redeviennent plus statiques, plus mesurés, plus graves au fur et à mesure que le public diminue en nombre, jusqu’à l’acte final où il n’y a plus de témoins. Les différents langages s’adaptent à chaque fois au public, proches ou inconnus, hommes ou dieux.
42On voit donc qu’à Rome le rituel nuptial a pour intention de faire savoir successivement à toutes les sphères de la société qu’une nouvelle union se conclut. Nul ne pourra l’ignorer : ni les dieux de la cité ni les dieux de la maison conjugale, ni les hommes, citoyens, famille, proches, voisins, membres de chaque maisonnée, tous sont informés d’une façon ou d’une autre. C’est pourquoi les langages du rituel nuptial romain sont multiples, adaptés aux différents publics auxquels ils s’adressent. Et le message se prolonge sous d’autres formes encore puisque le lit nuptial restera exposé dans l’atrium, à côté des toiles tissées par la maîtresse de maison, attestant la présence d’une bona matrona dans la demeure58. Même au-delà de la mort le message survit grâce aux scènes de dextrarum iunctio représentées sur les monuments funéraires. L’art est le plus durable des langages ; il montre aux passants et même à la postérité le geste qui avait fait des époux un couple uni jusque dans l’au-delà et les épitaphes attesteront que la défunte avait dès le mariage toutes les qualités d’une bonne épouse. Des siècles plus tard, le message s’adresse encore à nous : il nous prend à témoin des unions passées et sert même encore de modèle aux rites nuptiaux de notre temps car le sens de la cérémonie du mariage ne change pas : il a pour but de publier l’union d’un couple qui sera reconnu comme tel par la société et tous les langages sont bons pour le proclamer.
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Boyancé Pierre, « La main de Fides », dans Hommages à Jean Bayet, (coll. Latomus LXX), Bruxelles, 1964, p. 101-113. Les 2 articles sont repris dans P. Boyancé, Études sur la religion romaine, Coll. de l’École française de Rome, Rome, 1972, p. 91-103 et 121-133.
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Williams Gordon, « Some aspects of Roman Marriage ceremonies and ideals », JRS 48, 1958, p. 16-29.
10.2307/298208 :Notes de bas de page
1 Val. Max. 2, 1, 1 ; Serv., Aen. 4, 45. À l’époque historique, elle n’est plus que symbolique mais on donne encore le nom d’auspices à ceux qui sont censés les avoir pris.
2 Serv., Aen. 3, 136.
3 E. Westermarck, Histoire du mariage, IV, p. 184 sq.
4 Boyancé, « La main de Fides », p. 101-107.
5 Isid., Orig. 9, 8.
6 Seules les épouses des citoyens romains avaient droit au titre de matrone. Le statut matronal exigeait d’elles la fidélité au mari et un comportement irréprochable. En échange, il les protégeait de toute agression sexuelle et leur assurait le respect de tous. Voir P. Grimal, Matrona ; N. Boëls-Janssen, « Majestas matronarum ».
7 V. 289-290.
8 Te isti uirum do (v. 295).
9 G. Williams, « Roman Marriage », p. 16-29.
10 Gaius, Inst., 1, 112 ; Ulp., Reg., 9, 1, où sont cités la plupart des éléments commentés ici.
11 Serv., G. 1, 31.
12 P. Boyancé, « Fides et le serment », p 339-341.
13 Serv., Aen. 4, 374.
14 A. Van Gennep, Les rites de passage, p. 187.
15 C’est le sens premier du verbe « immoler ».
16 V. 95, 100, 110, 120.
17 V. 737-740.
18 V. 735-736 ; Catulle (61, 94) emploie le même verbe morari, tarder, que Plaute.
19 Cat. 61, 83.
20 Cat. 61, 121-125.
21 N. Boëls-Janssen, « La fiancée embrasée », passim.
22 Par exemple, Valère Maxime loue une épouse dont la vertu et la fécondité étaient remarquables : uxorem pudicitia et fecunditate conspicuam (7, 1, 1).
23 L’épitaphe précise souvent le nombre d’enfants qu’elle a mis au monde.
24 N. Boëls-Janssen, La vie religieuse des matrones, p. 229-232.
25 Hor., Sat., 1, 2, v. 96-99. Le costume matronal et l’escorte qui entoure la matrone en public sont un message proclamant qu’elle est intouchable. Le poète conseille de se tourner plutôt vers les prostituées qui montrent leurs charmes et dont la fréquentation est sans risque. Voir note 6.
26 Pl., NH 8, 194 ; Cic., De or. 2, 68, 277.
27 L. Larsson Loven, « Lanam fecit », p. 85-95 ; N. Boëls-Janssen, « La déesse au fuseau », p. 55-62.
28 La plus célèbre est celle de Claudia, CIL I, 2, 1211 ; voir aussi VI, 10230, qui associe pudicitia, lanificium et fides ; l’Éloge funèbre d’une matrone romaine (éd. par M. Durry aux Belles Lettres) cite aussi pudicitia et lanificium.
29 Plut., QR 271 f ; sur le sens du mot, N. Boëls-Janssen, La vie religieuse des matrones, p. 174-180.
30 Fest. p. 364 L.
31 62, v. 21-23 ; 61, v. 56-59.
32 E. Westermarck Histoire du mariage, IV, p. 302 sq.
33 Ibid. p. 252 sq.
34 Non. p. 161 L ; Pl., NH 16, 75.
35 Cette valeur est confortée par le fait que la torche était consacrée à Cérès (P. Fest. p. 77 L) ; voir H. Le Bonniec, Le culte de Cérès, p. 82-83.
36 V. 126-155.
37 P. Fest. p. 85 L.
38 Plut., QR 30, 272 e ; Pl., NH 8, 194.
39 Liv. 1, 39, 5-6 ; Pl. NH 36, 204 ; Den. Hal. 4, 2 sq.
40 N. Boëls-Janssen, « De Gaia Caecilia aux fées-marraines », p. 79-81.
41 N.Boëls-Janssen, La vie religieuse des matrones, p. 182.
42 Ibid., p. 181.
43 Plut., QR 30, 271 d.
44 Serv. Aen. 4, 458.
45 Les uittae séparaient visiblement le sacré du profane : les Vestales les portaient ; on en mettait aux portes des temples et sur les animaux sacrificiels.
46 N. Boëls-Janssen, La vie religieuse des matrones, p. 190-192.
47 Plut., QR 29, 271 d ; Luc., Phars. 2, 359 (on porte la mariée) ; Pl., Cas. 815 ; Serv. Buc. 8, 29 ; Isid. Orig. 9, 8 (elle ne doit pas toucher le seuil).
48 Varr., LL 5, 61 ; Dig. 24 ; Serv., Aen. 4, 167.
49 Non. p. 852 L.
50 N. Boëls-Janssen, La vie religieuse des matrones, p. 209-215, où on trouvera un résumé de la controverse qui a opposé H. Le Bonniec à G. Dumézil sur la fonction du Genius, avec les références.
51 Le prologue de l’Aululaire de Plaute, prononcé par le Lare, montre qu’il réside dans le foyer de la maison.
52 V. 746-747. Tout est inversé. C’est quand la mariée sort de chez elle que la fausse pronuba l’invite à ne pas heurter le seuil et elle enchaîne sur des conseils qui sont exactement le contraire de la morale matronale qu’elle est censée lui avoir enseignée : « Sois toujours la maîtresse de ton mari ». Catulle insère ces conseils dans la fescennina iocatio : « Jeune épouse, ne refuse pas non plus ce que demande ton mari » (61, 151-153).
53 Cat., 61, 191-192.
54 Cas. v. 754-755.
55 Cas. v. 756-757.
56 L’âge légal du mariage pour une fille était 12 ans. On les mariait parfois plus jeunes encore.
57 P. Fest. p. 83 L.
58 Les affidés de Clodius suscitèrent un scandale en détruisant le lit nuptial et les toiles exposés dans l’atrium de Lépide quand ils prirent sa maison d’assaut (Asc. Mil. 5, 13).
Auteur
Professeur émérite, Université de Bourgogne
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Signes et communication dans les civilisations de la parole
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