La transmission de la science agronomique en Italie entre le xive et le xvie siècle : le rôle des traducteurs
p. 49-64
Résumé
L’agronomie connaît un regain d’intérêt sans précédent au sein des cours princières italiennes entre le milieu du xive et la seconde moitié du xvie siècle. Ce phénomène est en rapport avec l’engouement des élites politiques et intellectuelles pour l’Antiquité classique et tardive, qui fut la caractéristique principale de la Renaissance dans la péninsule. Les nombreuses traductions des plus importants traités d’agriculture écrits entre ier et le ive siècle de notre ère (en particulier le De re rustica de Columelle, l’Histoire naturelle de Pline, l’Opus agriculturae d’Aemilianus Palladius) représentent de remarquables témoignages de cette volonté de transmission du savoir des Anciens, d’un point de vue linguistique (dénominations des différents outils de travail, des opérations agricoles, etc.), mais aussi technique. C’est grâce à ces travaux qu’une terminologie agronomique moderne se forme et sera transmise aux spécialistes des siècles suivants.
Texte intégral
1La version de l’Opus agriculturae de Rutilius Aemilianus Palladius (ve siècle) en langue vulgaire toscane nous a été transmise par cinq manuscrits datés d’entre le milieu du xive et le début du xvie siècle, ainsi que par une édition de 15611. Les rédactions les plus intéressantes sur le plan lexical sont contenues dans les manuscrits cotés Bibl. Riccardiana (Florence) 22382 (1340), Bibl. Laurenziana (Florence) Redianus 128 (1401-1425), Plut. 43.12 / Plut 43.13 (1443), et Ashburnensis 524 (1464). Ces textes sont tous anonymes, à l’exception de l’Ashburnensis 524, dont l’auteur serait Antonio di Luca degli Albizzi, cité à la fin du colophon.
2Les versions vernaculaires de l’Opus agriculturae sont le signe aussi bien d’une redécouverte de l’Antiquité classique et tardive que d’un intérêt nouveau pour l’agronomie de la part des élites politiques et culturelles toscanes du Moyen Âge et de la Renaissance3. En effet, c’est au sein du cénacle constitué autour de la famille Médicis à partir de la seconde moitié du Trecento que les activités pratiques concernant le travail des champs commencèrent à être accompagnées d’études théoriques souvent puisées dans le savoir transmis par les écrivains de la basse Antiquité, même si la question de leur valeur en tant qu’authentiques traités pratiques et techniques reste posée. L’absence totale d’illustrations, qui accompagnent pourtant habituellement les « vrais » traités scientifiques depuis l’Antiquité, associée à certaines interprétations erronées du texte source, feraient plutôt penser à des œuvres de vulgarisation réservées aux non initiés4.
3Le ms. Ricc. 2238 et la traduction de 1464 (ms. Ashburnensis 524) représentent le début et la fin d’un processus de création d’un lexique technique qui sera, au fil des siècles, reconnu et utilisé par tous les spécialistes du domaine en question. L’édition de 1561 de Sansovino ne constituera en grande partie qu’un peaufinage stylistique, d’où la terminologie technique, qui dans les versions précédentes découlait en grande partie d’un savoir populaire ancestral, semble avoir été bannie dans sa quasi-totalité.
4Les versions vernaculaires de l’Opus agriculturae nous ont légué très souvent les premiers témoignages écrits, sur le plan lexical ou sémantique, d’un nombre considérable de technicismes agronomiques ou botaniques. Que la méthode choisie par les traducteurs ait été celle de la littéralité5, ou que leur œuvre ait abouti à des créations lexicales totalement autres que dans le texte original, les auteurs de ces volgarizzamenti prouvent que souvent la langue technique n’est pas pour eux une patine extérieure vide de sens collée sur des phénomènes naturels (fruits de la terre, opérations agricoles etc.) qui leur restent quasiment inconnus – ce qui semblerait être le cas de la traduction française de Jean Darces de 1554 – et pour lesquels ils sont contraints de créer ex nihilo un terme plus ou moins approprié. Ces auteurs ont su parfaitement conjuguer l’observation directe du monde de la campagne, grâce à une proximité, peut-être inédite en Europe à l’époque, de ses principaux acteurs, et la maîtrise indiscutable des mots qui en définissaient ses nombreuses facettes. Ce faisant, ils ont jeté les bases du vocabulaire agronomique italien moderne et contemporain. En créant des technicismes ad hoc ou en faisant sortir de la nébuleuse des dénominations populaires nombre de termes locaux qui y circulaient depuis des siècles de façon anarchique, et en les dotant pour ainsi dire d’une existence officielle, leur œuvre d’intermédiation entre la science des Anciens et le monde dans lequel ils vivaient laisse aisément entrevoir la fierté d’avoir fourni à leurs contemporains, ainsi qu’aux générations suivantes, de nouveaux outils permettant de mieux maîtriser le monde de la nature. À ce propos, le prologue des Traductions vernaculaires, à partir de la version du début du xve siècle (Redianus 128), est révélateur :
« Ici commence le traité du Romain Aemilius Rutilius, dit Palladius, consacré aux travaux à accomplir, en temps utile et selon les règles de l’art, à la campagne. Si notre auteur avait considéré que le commencement de son ouvrage pourrait faire office de prologue, personnellement, l’idée d’ennuyer mes lecteurs en en rajoutant un deuxième ne m’aurait même pas effleuré. Mais finalement, j’ai jugé bon de le faire parce que la version vernaculaire, qui m’a coûté tant de fatigue, est digne d’avoir son propre préambule. […] Et que ce très long prologue puisse suppléer aux défaillances de celui, plus court, de Palladius, et qu’il apporte gloire à mon nom, en tant que traducteur6. »
5L’œuvre de traduction devient en ce sens un ouvrage à part entière, qui peut aspirer au statut de texte de référence, une sorte de nouveau modèle pour les agronomes des siècles suivants. En témoigne l’énorme quantité de ces néologismes techniques qui se sont perpétués dans les écrits scientifiques des époques moderne et contemporaine. C’est ce que je me propose de montrer à travers l’analyse des technicismes qui suit.
Pratiques et opérations agricoles
Cacherello = excréments, crottins de chèvre
« Latior fit si rara ponatur vel, cum producere incipiet caulem, eo leviter inciso gleba prematur aut testa... Item multis seminibus condita nascetur, si caprini stercoris bacam subula subtiliter excavaris et in ea semen lactucae, nasturtii, ocimi, erucae, radicis inmiseris, tunc involutam fimo bacam terra optime culta brevi scrobe demerseri7. »
« Più larga est et si fa s’ella est posta rada o come ella comincia a producere la foglia quella leggermente si fenda nel garzullo et con terra si corichi et con testo... Ancora nasceranno condite et saporose di molti semi se sottilmente tu scaverai con una lesina uno cacherello et in quello mecterai seme di lattuga et di nastruzo et d’orzimo et di ruca et di radice et questo cacherello involto con letame sotterrerai in una piccola fossa d’octima terra divelta8. »
« Ella diventa più larga, quanto è posta più rara, et diventa anco larga, quando cominciando a mandar fuori il gambo si taglia leggiermente, et si aggrava alquanto con zolla o con mattone...Si fa lattuga condita in questa maniera. Si toglie una pallottola di capra, et forata leggiermente con una subbia, s’empie col seme di lattuga, di nasturcio, di ruchetta, di basilico et di radici, et così piena si mette sotterra9. »
(La laitue devient plus grosse si on la sème clair ou si, après avoir pratiqué une légère incision dans sa tige au moment où elle commence à sortir de terre, on la comprime avec une motte de terre ou une tuile. On peut aussi en obtenir à partir de plusieurs graines différentes : pour cela on creuse délicatement une crotte de chèvre avec une alène, on met à l’intérieur des graines de laitue, de cresson alénois, de basilic, de roquette et de radis, on enrobe cette crotte de fumier et on l’enfonce dans un trou creusé dans un terrain parfaitement cultivé.)
6Les passages des mss. Plut. 43.12 (1400-1425) et Ashb. 524 (1464) constituent les premiers témoignages écrits du lexème cacherello. Ce terme, apparemment technique, a été conservé dans la terminologie agronomique des siècles suivants. Ainsi, Gianvittorio Soderini (1527-1596), dans le Trattato delle coltura degli orti e giardini, se positionne dans le sillage du Palladius vulgaire, quand il déclare que :
« Posti due o tre de’ suoi semi in un cacherello di capra o di pecora, verranno innanzi più allegramente10. »
(Si on met deux ou trois graines dans de petits crottins de chèvre ou de brebis, la laitue poussera mieux.)
7Le Nuovo vocabolario italiano di arti e mestieri de Giacinto Carena donne du vocable une acception moins technique en qualifiant de cacherello toute sorte d’excréments d’animaux, ayant la forme de boulettes ou « moquettes » :
« Cacherelli : sterco di topi, e di altri animali, che lo mandan fuori a pezzi sodi e figurati, come le lepri, le pecore, le capre, e la più parte degli uccelli granivori11. »
(Cacherelli : excréments de souris et d’autres animaux, qui les expulsent par petits morceaux bien compacts et de forme particulière, comme le font les brebis, les chèvres et la plupart des oiseaux granivores.)
8Sa présence, attestée dans la seule aire linguistique italo-romane (surtout Centre et Nord) au niveau exclusivement dialectal (« cacherello : sterco o pallottoline di topi, pecore, capre12 », voir mil. cagarèl) ou dans des textes techniques appartenant à la même zone géographique toscane, tels ceux examinés ci-dessus, laisserait penser qu’il s’agit d’un terme spécifique de cette région13, faisant probablement partie du basilecte, ayant intégré par la suite l’idiome national standard. Son entrée dans la langue commune italienne doit se situer dans la seconde moitié du xviie siècle, à en juger par toute une série de vocabulaires qui en ont conservé la trace, à commencer par un Dittionario italiano et Francese de 1678 :
« Cacherello. Crotte d’animal, comme de brebis, de chèvres, lievres, lapins, souris et de poules. »
9Ou encore le supplément du Vocabolario della Crusca de 1739 (vol. I, p. 387) :
« Cacherello. Sterco de’ topi, delle lepri, de’ conigli, delle pecore, capre, e simili animali. Pallad. »
10La citation de la traduction de l’Opus agricolturae par le lexicographe du xviiie siècle confirme indirectement le passage du texte qui fait l’objet de cette publication comme la toute première attestation du lexème en question. S’avère tout aussi intéressant un Dizionario delle invenzioni e scoperte de 1829, dans lequel Palladius se révèle être la seule source de la Renaissance à nous avoir légué ce technicisme. Plusieurs autres dictionnaires bilingues s’échelonnant entre la fin du Seicento jusqu’aux dernières décennies du xixe siècle constituent autant de preuves de la vitalité du terme et de sa large diffusion : parmi elles je me limiterai à citer ici le Dictionnaire allemand-italien de Matthias Kramer, le Dizionario d’Alberti di Villanova (1811, s.v.), ceux également bilingues français-italien rédigés par Francesco d’Antonio Buttera en 1832 (s.v.) et par Costanzo Ferrari en 1874, le Dictionnaire multilingue maltais-anglais-italien de F. Vella (1843).
Garzullo = cœur du chou (ou d’un légume en général)
11Les passages des versions vernaculaires de Palladius cités plus haut constituent également les tout premiers témoignages du terme garzullo (dérivé de garzuolo < lat. vulg. *cardiolum, littéralement « petit cœur ») dans le sens de « cœur du chou, de la laitue ».
12La traduction française de Jean Darces14 traduit le latin caulem par « tige » : « Elles deviennent plus larges […] quand on leur entame un peu la tige », en raison, me semble-t-il, d’une méconnaissance flagrante des choses de la terre. En effet, ce n’est pas la tige de la laitue qu’on fend, mais bel et bien le cœur. Au contraire, la version vernaculaire italienne, entre autres en raison de l’emploi de termes populaires, est l’écho d’un savoir qui découle d’une expérience directe de la mise en culture des champs. On peut répéter la même observation au sujet de cacherello, traduit en français par le syntagme on ne peut plus flou de « crotte de chieure ».
13Comme le terme cacherello, garzullo a laissé des traces durables dans la littérature agronomique des siècles suivants, quoique sa signification s’en soit trouvée parfois quelque peu modifiée : ainsi, si, dans le Vocabulaire de Giacinto Carena, l’acception que nous avons détectée dans les versions vulgaires de l’Opus agriculturae de Palladius est maintenue :
« Codeste foglie [del cavolo] sono di colore verde cupo, che poi ingialla, cominciando dall’interno ‘grumolo’ o ‘garzuolo’15. »
(Ces feuilles [du choux] sont d’un vert très sombre, qui par la suite tirent progressivement sur le jaune, à partir du cœur, qu’on appelle « grumolo » ou « garzuolo ».)
14Chez Giovanni Pietro Bergantini16, le terme désigne par métonymie le chou en général, non pas le seul cœur :
« Spesso vedrai piante congeneri / surte da un seme stesso ; una di cui / sfogasi senza frutte, e lussureggia / di fiori ; ed altra, che da fiori è immune, / e rende frutte ; e quella maschio dicesi ; / femmina questa ; come abbiamo fra le palme, / […] fra ortiche e lupoli e ‘l garzuolo, e ‘l montan semprevivo, e la selvaggia / mercorella […].17 »
(Il peut t’arriver de voir des plantes, absolument les mêmes, carrément sorties de la même graine : parmi elles il y en a qui ne portent pas de fruits et qui sont bien chargées de fleurs, et d’autres qui sont dépourvues de fleurs mais qui par contre portent beaucoup de fruits. Les premières, on les appelle plantes mâles, les deuxièmes plantes femelles : c’est le cas des palmiers […] des orties, du houblon, du choux, de la joubarbe des montagnes […].)
15La diffusion géographique du terme garzullo, limitée au centre et au nord de l’Italie (Émilie et Vénétie) au niveau exclusivement dialectal, ainsi que son emploi dans des contextes techniques, mènent aux mêmes conclusions que pour le terme cacherello et feraient songer à une nature presque exclusivement locale du lexème.
16Il est intéressant de remarquer que l’extrême originalité des témoins de la tradition manuscrite s’estompe nettement dans la version publiée par Francesco Sansovino en 1561. Ainsi, le diminutif technique cacherello se simplifie en une triviale pallottola di capra, alors que l’endroit exact de la laitue qui faisait l’objet de l’opération de fécondation par insertion des excréments caprins (le cœur), désigné par le terme garzullo, disparaît purement et simplement.
17La traduction de Sansovino se présente comme l’épuration stylistique des textes qui l’ont précédée : le registre est bien plus soutenu, mais la variation est rare, ce qui a pour résultat une standardisation qui engendre un lexique très plat, d’où tout caractère technique ou presque est absent.
18Cela ne surprend guère : en effet, Francesco Sansovino est un polygraphe d’origine florentine. Il s’établit à Venise et écrit pour d’illustres représentants de la Sérénissime qui, suite à la conquête du Dominio da Terra (entre 1405 et 1462) et aux troubles engendrés par les guerres d’Italie (surtout après la défaite d’Agnadello de 1509 et la guerre de Cambrai), abandonnent de plus en plus souvent leurs activités traditionnelles liées au commerce maritime, et s’installent sur la Terraferma pour que la propriété foncière leur confère le prestige que la mer ne pouvait plus apporter. Sansovino fait seulement semblant de s’adresser à un grand seigneur désireux de s’installer à la campagne – en l’occurrence Ottavio Pallavicino, à qui, dans le prologue, il déclare vouloir dédier son œuvre –, mais son message sonne faux, et on sent que l’agriculture constitue un domaine qui lui est presque totalement étranger.
19Tout comme pour l’auteur de l’édition vénitienne de 1561, pour les nobles vénitiens qui faisaient construire de somptueuses villas dans les campagnes de Vénétie en ce milieu du xvie siècle, cette nouvelle existence « terrienne » ne constituait souvent qu’une simple mise en scène, en phase avec les nouveaux goûts de l’Arcadie et du théâtre contemporain, qui véhiculait les valeurs et les sentiments des idylles grecques de l’époque de Théocrite, et leur mode de vie consistait à singer les grands seigneurs florentins des xive et xve siècles. D’ailleurs, cette attitude ne manquait pas de leur attirer les foudres des intellectuels traditionalistes de la République. À travers l’étalage d’un patrimoine foncier, les élites vénitiennes ayant élu domicile sur la Terraferma tendaient à effacer leurs origines marchandes, tournant donc résolument le dos aux valeurs fondatrices de l’État vénitien, celles qui, dès l’origine de la cité de la lagune, avaient été à la base des commerces maritimes et de la prospérité de la Sérénissime. La nouvelle politique consistant à « mare postergare » pour « terram colere » représentait donc bien plus qu’un changement de cap. Elle était le signe d’un renversement des mœurs ancestrales et d’une immoralité inquiétante : plusieurs sources (par exemple l’Oratio pro Loredan de Bernardo Navagero, ou encore le Bellum Cameracence d’Andrea Mocenigo) critiquent farouchement l’émergence de comportements vaguement dégénérés selon les paramètres ancestraux de l’étique vénitienne, comme l’amour excessif du luxe, qui finissait à la longue par ramollir la force et saper l’esprit entreprenant des habitants de la lagune. Tout cela laissait présager une fin dramatique : les événements de la guerre de Cambrai en témoignèrent18.
Ligatura = lien (de chanvre) pour lier la vigne
« Subligatio acerbis uvis facienda est, quando excutiendi aut rumpendi acini nulla formido est. Ligatura in vitibus locum debet mutare, ne unum semper adsiduitas conterat vinculorum19. »
« El sollevare delle uve acerbe est da fare quando non si può scanicare o dirompere l’acino. La legatura nelle viti dee mutare luogo accio che il continovare de’ vinchi non la logori20. »
(Il faut lier les grappes de raisin lorsqu’elles sont vertes, c’est-à-dire lorsqu’on ne craint pas de faire tomber ou d’écraser les grains. On ne doit pas garder la ligature, sur les vignes, toujours au même endroit, pour éviter que la présence continue du lien ne meurtrisse toujours la même place.)
20Ce néologisme sémantique, qu’on retrouve dans la totalité de la tradition manuscrite, fait encore partie intégrante du vocabulaire agronomique des aires linguistiques italo-romane et gallo-romane : l’italien legatura est attesté en tant que terme technique de la viticulture à partir de la fin du xvie siècle21 et jusqu’à l’époque actuelle22. En ce qui concerne l’aire francophone, la première attestation de ce terme technique, très courant jusqu’à nos jours, semblerait être l’œuvre d’Olivier de Serres : « Les oziers sont communément employez pour ligature des Vignes, en estant la plus usitée et meilleure matière23. » Le fait de retrouver plusieurs dérivés dans un cadre plus strictement dialectal – ląyür / łirǝ (Blonay, Suisse) : « tige de chanvre servant à attacher la tige de la vigne à l’échalas, lien de vigne » ; łàura (Vaux) : « lien de vigne » ; ligadure (Béarn) : « façon de lier les vignes24 » – plaiderait pour un caractère paneuropéen et populaire du mot.
21Comme dans le cas des lexèmes garzullo et cacherello, une comparaison rapide avec le texte français de Jean Darces (1554) met en relief, sinon une technique plus assurée du traducteur toscan en matière de viticulture, du moins une plus grande maîtrise de la terminologie spécifique qu’il emploie. Ici, au substantif italien legatura correspond une tournure verbale, preuve évidente d’un moindre degré d’abstraction et, partant, d’une moindre faculté d’apprivoiser le phénomène observé (« La vigne ne se doit tousiours lier en un mesme lieu, à fin que par assiduité elle ne se coupe25 »), Or il est bien connu que dans les domaines techniques, un lexique savant et performant est souvent la principale manifestation d’une science d’un certain niveau.
Saectolare = ébourgeonner (la vigne)
« Erit tamen optimi putatoris inferius sarmentum quod bono loco natum fuerit, reparandae vitis causa semper tueri et ad unam vel duas gemmas relinquere26. »
« Sarà optimo s’el potatore el tralcio disocto el quale sarà bene nato per cagione di racconciare la vite sempre guardarlo et lasciarlo ad una o due gemme : questo si chiama saectolare27. »
(La meilleure façon de tailler la vigne sera celle qui consistera à laisser en place les sarments bien développés qui poussent dans la partie inférieure du cep, en ne gardant qu’un ou deux yeux : on appelle cette façon de procéder « ébourgeonnage ».)
22Saectolare, vraisemblablement diminutif de la forme intensive de secare, représente une normalisation par rapport au verbe s(a)eppolare du ms. Ricc. 2238 (p. 95), dérivé de s(a)eppolo (« petite arbalète utilisée pour chasser les oiseaux »), dont descend le seppollare, transmis par le ms. Redi 128. La normalisation pourrait s’expliquer sur la base de la présence du substantif segolo (« sécateur »), employé quelques lignes plus loin dans le texte du ms. Ashb. 524, à la place du terme coltello (« couteau », dans le sens de « sécateur ») du ms. Ricc. 2238.
23Saectolare constitue un hapax. Il est peut-être à considérer comme un occasionalisme engendré par une incompréhension du texte source par le traducteur du ms. Ashb. 524.
24La traduction française de Jean Darces (1554) ajoute également une explication technique à la description de l’opération d’ébourgeonnage : « Toutesfois le bon vigneron reservera tousiours le ietton plus bas, mais qu’il soit creu en bon lieu, en y laissant un ou deux yeulx, pour renouveller la vigne ». La similitude des attitudes des deux traducteurs vis-à-vis du texte source est assez curieuse pour qu’on la souligne. Jean Darces a-t-il pris pour modèle, au moins dans ce cas de figure spécifique, l’une des versions italiennes de l’Opus agriculturae ? En tout cas, la différence lexicale entre la version française et l’italienne est, différemment des autres cas de figure signalés dans cet article, le signe d’une connaissance de l’agronomie tout aussi directe que celle de ses prédécesseurs transalpins. En outre, peut-on considérer le verbe contenu dans l’ajout en français comme un synonyme de saectolare ? C’est tout aussi difficile à dire. Ce qui est sûr, c’est que Jean Darces connaît et emploie le verbe technique « ébourgeonner » quelques lignes plus haut (p. 9 v°) : « Es lieux chauds, secz, et exposez au soleil il ne fault esbourgeonner les vignes, pource qu’en telz lieux l’ombre ayde beaucoup ». Faute d’éléments probants, la question est destinée à rester sans réponse.
Scalzare / scortecciare = « cavailloner », aérer, déchausser le pied (du cep de la vigne)
« Ianuario mense locis temperatis ablaqueandae sunt vites, quod Itali excodicare appellant, id est circa codicem dolabra terram diligenter aperire28. »
« Il mese di gennaio nelli luoghi temperati sono da scalzare le viti. La quale opera quegli di Italia chiamano scortecciare, cioé d’intorno alla scorza della vite aprire la terra con la vanga diligentemente29. »
(C’est en janvier que dans les régions de climat tempéré, il faut déchausser les vignes. Les Italiens disent « cavaillonner », ce qui consiste à ouvrir soigneusement la terre à la pioche autour du tronc de la vigne.)
25En tant que terme technique de l’agronomie, la première attestation écrite du verbe scalzare est représentée par un passage des Prediche volgari (1427) de saint Bernardin de Sienne :
« Egli chiama il mezzaiolo e diceli : « Questo fico non è buono a nulla : taglialo, ché egli occupa la terra ». Dice il lavoratore : « Doh ! Lasciamolo stare questo anno ; non lo tagliamo : io li lavorarò un poco la terra da piei e scalzarollo da torno, per vedere se elli facese meglio »30 ».
(Il appelle le métayer en lui disant : « Ce figuier est stérile, coupe-le, puisqu’il ne fait qu’occuper de la place. » Le paysan répond : « Non, laissons-le tranquille pour cette année, ne le coupons pas. En effet, je peux un peu déchausser son pied en remuant la terre tout autour et voir s’il peut fructifier un peu plus. »)
26Une influence lexicale de saint Bernardin étant, me semble-t-il, à exclure, il est très probable que le vocable ait fait partie du basilecte agricole toscan. Il faudrait donc considérer la tradition manuscrite de l’Opus agriculturae, à commencer par son plus ancien témoin (Ricc. 2238, 1340), comme la première attestation officielle de ce technicisme.
27Les occurrences du lexème en question deviennent très nombreuses dans les siècles suivants jusqu’à l’époque moderne, dans des contextes strictement techniques. Giovan Vittorio Soderini (1526-1597), dans son Trattato della coltivazione delle viti, rappelle que le déchaussement du cep peut s’avérer utile pour améliorer la qualité d’une vigne produisant trop de grappes, au cas où l’ébourgeonnage n’aurait pas eu d’effet31. Au milieu du xixe siècle encore, Benedetto Del Bene propose également de déchausser la base des oliviers et d’y déposer du fumier composé de crottin de chèvre32. Comme nous avons eu l’occasion de le dire dans une précédente publication, ce n’est pas impossible que ce soit du verbe scalzare employé dans la version italienne de l’Opus agriculturae que serait dérivé le « déchausser » de la version française de 155433. Mais il est tout aussi vraisemblable que les termes italien et français descendent tous les deux du latin ablaqueare.
28Quant à scortecciare qui, à en juger par le passage en question, devait appartenir au vocabulaire agronomique autochtone, il n’a pas laissé de trace en italien. En revanche, il est intéressant de remarquer la présence dans cette langue d’un verbe sémantiquement proche, scoticare, « enlever la partie superficielle du terrain entourant la base d’une plante, normalement du cep de la vigne34 », dont la base de dérivation, cotica, remplace le mot corteccia du passage palladien en question (ces deux vocables désignant non pas l’écorce de la plante, mais la première couche de terre autour du pied). Le mot scoticare est attesté par le Vocabolario universale édité par la maison Tramater en tant que terme technique, surtout en Toscane35. Le témoignage du dictionnaire de Tramater, en l’absence d’autres sources écrites, laisse supposer une circulation orale de scoticare, au niveau du basilecte.
29Scoticare pourrait avoir servi de modèle à un autre verbe synonymique, scotennare :
« Privare un terreno dello strato superficiale, asportandone la vegetazione prativa e il fitto groviglio delle radici, per lo più per avviare una nuova coltivazione36. »
(Enlever la partie superficielle de la terre, en extirpant la strate herbeuse et l’entrelacs formé par les racines, normalement pour entamer une nouvelle culture.)
30Ce terme technique agronomique est largement attesté depuis le xvie siècle :
« Dove non son boschi si scotenna l’erba e s’abbrucia, e lavorata vi si semina ogni otto anni37. »
(Là où il n’y a pas de forêt, on enlève l’herbe et on la brûle. Après avoir labouré le terrain, on peut y effectuer les semailles tous les huit ans.)
« Mandò cavar su quel medesimo poggio una fossa ben ampia e ben fonda e sopra, legne ammassatevi dentro, gittar tutti que’ cinquantacinque corpi e le teste recise, e scotennar la terra, dovunque era caduta stilla del sangue de’ dicollati, e tutto gittar nella fossa38. »
(Il donna l’ordre de creuser une fosse bien profonde dans le même coteau et d’y jeter les cinquante-cinq cadavres à qui on avait fait couper la tête, ainsi que du bois et la partie du sol recouverte d’herbe que le sang des décapités avait souillée.)
31Le Vocabolario di agricoltura de E. Canevazzi et F. Marconi donne une définition extrêmement détaillée de l’opération du scotennamento :
« “Scotennare” : levare la cotenna, detto de’ terreni in generale e de’ prati in particolare. Tagliata la superficie in tante zolle a forma di quadratelli o rettangoletti (il che può farsi speditamente con una specie di ronca in asta), si sollevano esse con marra o badile, per essere trasportate altrove o ricollocate in posto dopo aver tolto di sotto un po’ di terra o terriccio39. »
(« Scotennare » : enlever la cotenna [couenne, strate herbeuse du sol] : se dit des terrains en général et des prés en particulier. Une fois la surface du sol découpée en carrés ou rectangles – on peut faire cela aisément avec une faucille courbe montée sur un bâton – on soulève ces derniers avec une pioche ou une pelle et on les déplace ailleurs, sinon on peut les remettre en place après avoir enlevé un peu de terre ou d’humus.)
32Seule l’aire linguistique gallo-romane connaît des lexèmes sémantiquement proches de scoticare / scotennare, dont les premières occurrences ne sont malheureusement
pas datées :
33St-Lô quouane, nant. couenne, « croûte de gazon enlevée dans un défrichement et qu’on fait brûler sur place », centr. couanne, « motte de terre gazonnée », canne (Minot), « surface d’un pré », centr. pré couanné, Morv. écouarner, « enlever le gazon d’un pré », écouenner (Franche-Comté), « sarcler », fourg. écouènai, « écobuer le terrain », Vezenaz ekwena, « dégazonner », écwanà (Vaux), « enlever le gazon avec la houe », ekwanàu (Vaux), « sarcloir », dekwana, « piocher légèrement la surface du sol40 ».
34La nature dialectale de ces lexèmes confirme indirectement l’appartenance des verbes scoticare / scortecciare au basilecte agricole et leur nature autochtone.
Scanicare = faire tomber (les grains de raisin)
« Subligatio acerbis uvis facienda est quando excutiendi aut rumpendi acini nulla formido est41. »
« El sollevare delle vite acerbe est da fare quando non si può scanicare o dirompere l’acino42. »
(Il faut lier les grappes de raisin lorsqu’elles sont vertes, c’est-à-dire lorsqu’on ne craint pas de faire tomber ou d’écraser les grains.)
35Ce passage représente à ma connaissance la première attestation écrite du verbe scanicare. Le sémantème technique du locus cité ci-dessus constitue un hapax en italien43. Il appartenait vraisemblablement au basilecte : le DEI (s.v.) rappelle l’existence en toscan du verbe scanicare dans le sens de « traîner quelque chose par terre ». Le substantif scanico (« dispersion, éparpillement ») est attesté depuis la deuxième moitié du xve siècle (GDLI s.v.). Il s’agit vraisemblablement d’un emploi technique spécialisé à partir du sémantème principal de scanicare44, « s’effriter », « tomber » (pour un enduit). Ce sens primaire est attesté dans le ms. Plut. 43.12 (début du xve siècle), lequel constituerait donc l’énième exemple de néologie sémantique des versions vernaculaires de l’œuvre de Palladius ; cette acception semble bien avoir été puisée, comme d’autres signalées dans cet article, à la langue du peuple :
« Camerarum quoque tectoria salso umore [harena marina] dissolvit45. »
« Quella del mare [rena] si secca più tardi e per la sua salsezza fa iscanicare gli intonichi delle camere46. »
(En outre l’eau salée qu’il [le sable de mer] contient attaque l’enduit des plafonds.)
36Le caractère populaire du verbe ressort bien si on compare la traduction italienne à celle en français préclassique de Jean Darces (p. 17 v°), comme d’habitude bien moins technique et beaucoup plus plate : « Elle faict fendre aussi l’enduict des voustes par son humeur salée. »
Spiccare = explanter, transplanter (un arbre)
« Si provincia indiget olivetis et non est, unde planta sumatur, seminarium faciendum est47. »
« Se la provincia ha difecto d’oliveti et non vè onde si spicchino e’ piantoni, si est da fare semenzaio48. »
(Si la région manque d’oliveraies et qu’il n’y a donc aucune possibilité d’explanter et transplanter de jeunes plants, il faudra penser à créer une pépinière.)
37Ce néologisme sémantique, créé à partir de l’un des sens de spiccare, « prendre, prélever », attesté depuis le xiiie siècle, est très productif en italien, mais il fait référence seulement à un fruit qu’on cueille49, jamais, comme dans le passage en question, à un arbre qu’on transplanterait.
Les fruits de la terre
38Les lexèmes ayant trait aux produits de l’exploitation agricole sont très nombreux : outre quelques termes techniques destinés à une immense fortune dans la littérature agronomique des siècles suivants, tels duracino (« fruit à chair très ferme et noyau adhérent ») ou neretto (« vin rouge à la robe très foncée »), qui ont déjà fait l’objet d’une analyse lexicale approfondie50, rappelons ici l’unité lexicale complexe (tralcio) madornale.
Madornale (tralcio) (cursoncello) = coursonne (branche principale, normalement non fruitière)
« Hae, quae altius coluntur, ut in iugo vel pergula, ubi quattuor pedibus supra terram levatae steterint, quaterna brachia habeant51. »
« Quando saranno levate quattro piedi sopra terra si aranno quattro braccia cioè quattro buoni tralci madornali procedenti dalle quattro parti della vite52. »
« Ma quelle che si cultivano in più alto luogo, come sarebbe, o su le pergole o appiccati su gli arbori, habbiano quattro branchi, ogni volta che elle son levate da terra quattro piedi53. »
(Quand la vigne aura atteint la taille de quatre pieds, on aura quatre « bras », c’est-à-dire quatre branches fruitières (« coursonnes ») bien développées, qui auront poussé à partir des quatre sarments porteurs du cep.)
39L’expression tralcio madornale, après avoir refait surface en italien dans le Dizionario della lingua italiana Tramater (1840, s.v. madornale), à deux siècles et demi d’intervalle par rapport aux témoignages cités ci-dessus, employée dans un contexte identique à celui des versions vernaculaires de l’Opus agriculturae, celui de la viticulture, fait l’objet d’analyses approfondies dans les écrits d’agronomie de Cosimo Ridolfi (1858), même si, dans cette dernière source, la branche fruitière au centre de la dissertation est celle des courges :
« Io vi ho descritto la struttura delle cucurbitacee, ma quello che mi preme di notare è, che quando il tralcio primitivo il quale costituisce la pianta nel suo principio, e che diremo madornale, quando questo tralcio è allungato al punto di avere 5 o 6 foglie, dalle loro ascelle (cioè da quegli angoli che nascono fra il picciòlo o gambo delle foglie e il fusto dal quale provengono) dalle ascelle dico, nascono dei tralci secondari54. »
(Je viens de décrire la physiologie des cucurbitacées, mais ce que je voudrais surtout faire remarquer est que quand la tige principale de la plante, que nous qualifierons ici de maternelle, la seule qui soit au début de son développement, quand cette tige donc aura poussé et qu’elle aura au moins cinq ou six feuilles, des tiges secondaires se développeront à partir des « aisselles » pour ainsi dire, c’est-à-dire des points d’articulation entre lesdites feuilles et la tige de laquelle elles sont issues.)
40Le fait que l’expression désigne ici la physiologie d’une autre espèce végétale peut être le signe d’une évolution sémantique survenue au fil des siècles, non documentée par d’autres éléments. Mais il peut signifier également que l’unité lexicale tralcio madornale indiquait dès l’origine la branche principale d’une quelconque plante fruitière et qu’elle s’est progressivement spécialisée, par restriction sémantique, selon le domaine particulier dans lequel les différents professionnels l’employaient. La question est destinée pour le moment à rester ouverte.
41La comparaison entre les versions italiennes de l’Opus et la traduction française de Jean Darces met encore une fois en évidence, au travers des ajouts des premières par rapport à l’original latin, la profondeur des connaissances de leurs auteurs en matière d’agriculture. Le texte imprimé à Paris en 1554 est comme d’habitude bien plus standardisé que ceux rédigés de l’autre côté des Alpes : « Les vignes qu’on faict monter hault […] il leur faudra laisser quatre bras. »
42Les synonymes techniques branca madre o madrebranca, « branche principale d’un arbre », dont les premiers témoignages remonteraient au xviiie siècle (DEI s.v.) montrent bien que l’adjectif faisait probablement déjà partie du lexique agronomique, ne serait-ce qu’au niveau oral. L’ajout technique complémentaire, de toute évidence absent du texte source, témoigne vraisemblablement de la connaissance directe du milieu agricole de la part du traducteur du Riccardien 2238 (1340). Le technicisme a été par la suite transmis aux témoins successifs de la tradition.
43Le terme branco55, employé dans la traduction de 1561, pourrait, quant à lui, ne représenter qu’une simplification de madrebranca o branca madre, dont l’écrivain ne comprenait pas totalement la portée technique. Ce fait constitue une confirmation du modus operandi de Sansovino.
44Dans la documentation ancienne appartenant à l’aire linguistique gallo-romane, on retrouve les lexèmes « mère » et « cep maternel », employés dans la traduction française (1627) du recueil de curiosités naturelles de Johan Jakob Wecker, qui semblent bien correspondre aux termes utilisés dans les textes italiens :
« Troüés-les sep[s] de la vigne avec une tarière, et amenez un rameau du sep de vigne qui est le meilleur et le plus près, et le mettez dedans le trou, sans le couper de sa mère ou de son sep maternel56. »
45La similitude des éléments constituant les unités lexicales complexes aussi bien italiennes que françaises57 laisse supposer une nature paneuropéenne et populaire des mots en question, peut-être d’origine latine58.
*
46Les traductions florentines de l’Opus agriculturae de Rutilius Aemilianus Palladius qui nous ont été transmises, en grande partie, par le biais de quatre manuscrits conservés à Florence (bibliothèque Laurenziana et bibliothèque Riccardiana), ont permis de créer, par la voie de la néologie lexicale ou sémantique, une terminologie agronomique spécialisée véritablement moderne, dans la plupart des cas en mettant par écrit des vocables locaux qui circulaient oralement au sein du basilecte agricole depuis des siècles.
47Même si on peut remarquer dans le plus récent de ces codices, l’Ashburnensis 524 de la bibliothèque Laurenziana, une stratégie de traduction bien plus originale que dans les autres — Antonio di Luca degli Albizzi, qui appose sa signature au colophon du manuscrit, rajoute volontiers des vocables techniques à la traduction littérale du texte source (c’est le cas du verbe saectolare, que nous avons examiné plus haut, et de beaucoup d’autres, non signalés dans ce texte) —, une grande partie des néologismes que nous avons analysés remontent au plus ancien témoin de la tradition manuscrite (ms. Bibl. Ricc. 2238), que les auteurs des versions successives n’ont fait que reprendre.
48Mais loin de constituer de simples copies et des opérations de dépoussiérage du vieux matériel lexical de leurs prédécesseurs, le travail des rédacteurs des traductions du xve siècle confirme bien l’existence d’une sorte d’école de traduction au sein du cercle culturel florentin mis en place par la cour princière des Médicis depuis le milieu du Trecento. Bien qu’elle soit échelonnée sur plus d’un siècle, il faut donc bel et bien considérer la tradition manuscrite du « Palladius vulgaire » comme l’œuvre d’un véritable réseau de professionnels de la vulgarisation technique et scientifique de l’époque humaniste et pré-humaniste. Leur héritage sera transmis aux agronomes des siècles suivants, jusqu’à nos jours.
49L’écart idéologique et lexical est flagrant si on compare ces premières versions florentines avec l’édition de Francesco Sansovino de 1561. Cette dernière, par le biais de l’absence presque totale de véritables technicismes et d’une volonté de simplification lexicologique extrêmement poussée, révèle on ne peut mieux sa nature toute nouvelle par rapport aux travaux qui l’ont précédée : celle d’un simple pamphlet destiné à rendre plus agréable la vie à la campagne des nouveaux seigneurs vénitiens du milieu du xvie siècle qui, pour intégrer la plus prestigieuse noblesse foncière de la Terraferma, avaient renié depuis peu leurs vraies racines de barcharolli, « hommes de mer ».
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 La villa di Palladio…, trad. F. Sansovino, 1561. Trad. dans le présent texte des passages de l’Opus agriculturae, livres I-II : R. Martin ; trad. de Palladius, traité d’agriculture, livres III-XIII : M. Campetella.
2 La traduction conservée par le ms. Ricc. 2238 a été publiée à Vérone en 1810 par P. Zanotti sous le titre Volgarizzamento di Palladio et constitue l’édition de référence dans le Grande Dizionario della lingua italiana (désormais GDLI). Ce manuscrit était considéré jusqu’à très récemment comme le plus ancien représentant de la tradition manuscrite vernaculaire de Palladius. L’énième codex contenant le texte de l’Opus agriculturae a été découvert en 2012 à la Bibliothèque nationale de Lucques (Lucca, Bibl. Statale, n° 1293) et fera prochainement l’objet d’une étude lexicale par les soins de V. Nieri.
3 Á cet égard voir M. Campetella, « Les néologismes techniques dans la traduction florentine… », p. 231.
4 Sur les illustrations des manuscrits agronomiques, F. Piponnier, À la recherche des jardins perdus, p. 231-232.
5 M. Campetella, « Les traductions du latin en italien des xve-xvie siècles », p. 88-89.
6 (Redi 128 fol. 1 = Plut. 43.13 fol. 1 = Ashb. 524 fol. 1 r° : « Incomincia el libro di Emilio Rutilio romano detto Palladio dell’ordine et modo della agricoltura. Se io considerassi solamente che l’auctore di questo libro nel principio della sua opera fece proemio a tucto el libro io non graverei el lectore di mio prolago. Ma perché io non aveo altra parcte in esso in proemio perpetuo della mia fatica del volgarizzare voglio agiugnere questo esordio [...] Sia questo lunghissimo prolago per ristoro del breve et piccolo di Palladio et nome et stima del volgarizzatore. » Sur les traductions de l’Opus agriculturae comme textes de référence, M. Campetella, « Les traductions de l’Opus agriculturae… ».
7 Opus agriculturae, livre II, 14, 2-3.
8 Plut. 43.12, fol 18 r° = Ashburnensis 524, fol. 32 r°.
9 La villa di Palladio Rutilio Tauro Emiliano..., p. 20.
10 G. Soderini, Trattato delle coltura degli orti e giardini…, p. 43.
11 G. Carena, Nuovo vocabolario italiano di arti e mestieri, p. 306.
12 C. Battisti et G. Alessio, Dizionario Etimologico Italiano (désormais DEI), livre I, 653.
13 A. Bencistà, Vocabolario…, p. 205.
14 J. Darces, Les treze livres des choses rusticques…,, p. 50.
15 Ibid., p. 446.
16 G. P. Bergantini, I quattro libri delle cose botaniche del padre Eulalio Sevastano tradotti, p. 217.
17 Pour d’autres citations jusqu’au xxe siècle, voir S. Battaglia (éd.), GDLI.
18 J. R. Hale, « La guerra e la pace », p. 239.
19 Op. Agr., I, 6, 10-11.
20 Ricc. 2238, p. 20 = Plut. 43.13, fol. 13 r° = Ashb. 524, fol. 8 r°.
21 « Sarebbe meglio… che si fessassero tutti dui [i maderi, coursonnes ou branches fruitières de la vigne] per mezo, come pur sarebbe un ditto lungo, et tagliarli po per traverso giusti da una parte fin’alla midolla : Et levata via quela metà tagliata ciascuno li commetterete et legarete come ho anco detto, perciò che restaranno più uguali in questa legatura, che nell’altra prima. » (A. Gallo, Le vinti giornate...,p. 73) ; « La legatura delle viti facciasi anco in tempo d’agresto, che non teme : ma non già in tempo fiorito. » (G. Falcone, La nuova, vaga..., p. 27). M. Campetella, I neologismi tecnici, p. 105-106.
22 L. Casini, E. Marone, L’imprenditore agricolo, p. 292. Tout comme l’italien legatura, le français ligature est encore aujourd’hui d’usage courant en agronomie.
23 Le théâtre d’agriculture et mesnage des champs, p. 167.
24 W. von Wartburg, Französisches Etymologisches Wörterbuch, p. 321.
25 J. Darces, Les treze livres des choses rusticques…, p. 11 v°.
26 Op. Agr., III, 12, 2.
27 Ashb. 524, fol. 42 v°.
28 Op. Agr., livre II, 1.
29 Ricc. 2238, p. 30 = Plut. 43.12, fol. 35 r° = Ashb. 524, fol. 28 r°.
30 Prediche volgari (1427) de saint Bernardin de Sienne, Milan, 1936, p. 308.
31 « Quelle [viti] che han troppo grande il rigoglio... si ritirino col potarle di novembre e nei freddi si bruschino di febbraio, e quando non serve questo, si scalzino. », G. V. Soderini, Opere, I , p. 407.
32 B. Del Bene, L’Agricoltura…, II, p. 209 : « Convien pure scalzar gli ulivi, e se sono poco fruttiferi e di foglie ristecchite alle cime, sparger quattro moggia di letame caprino intorno alle piante grandi ». Voir aussi B. Davanzati, Volgarizzamento delle Storie di Tacito, II, p. 495 : « Posti [...] i magliuoli [...] lavorali, scalzali, tagliali tra le dua terre » ; G. Pascoli, Prose, p. 650 : « Non sono del popolo le osservazioni sulla chiocciola che porta la sua casa, la quale quando da terra sale alle piante, non si deve più scalzar la vigna ? ».
33 Les treze livres, p. 43 v°. Voir M. Campetella, I neologismi tecnici, p. 97, n. 40. par : Le français emploie par ailleurs le mot déchaussoir, « instrument pour déchausser les arbres », ce qui ferait logiquement penser à l’existence du verbe déchausser à une époque précédente.
34 Littéralement « enlever la couenne, la peau » (< *excuticare < ex + cutica).
35 Une traduction à la lettre du passage latin de l’Opus agriculturae en question, qui aurait engendré scoticare < excodicare (dont la base de dérivation codex / caudex, phonétiquement similaire, n’aurait pas été comprise) est possible.
36 GDLI XVIII, p. 274.
37 G. V. Soderini, Il trattato degli arbori, p. 201.
38 D. Bartoli, Istoria della Compagnia di Gesù (cité dans GDLI, s. v.).
39 Canevazzi et F. Marconi, Vocabolario di agricoltura, cité dans GDLI XVIII, p. 274.
40 W.von Wartburg, Französisches Etymologisches..., II/2, p. 1597.
41 Op. agr., I, 6, 10.
42 Ricc. 2238, p. 25 = Ashb. 524, fol. 7 v°-8 r°.
43 Ce sémantème rare est tout de même attesté dans le Vocabolario bresciano e toscano (s.v.) de B. Pellizzari : « Crudà. Scanicare. Si dice lo spiccarsi dalli graspi gli acini, o il grano delle spiche, e cadere in terra. ». On retrouve également ce terme dans le dictionnaire bilingue italien-français d’A. Antonini (1743).
44 Cette extension du sens primaire de scanicare est confirmée par le dictionnaire bilingue français-italien d’Annibale Antonini : « Scanicare. Si dice propriamente dello spiccarsi dalle mura, e cadere a terra gl’intonicati. Ôter l’enduit d’une muraille. Per metaf. Quando si teme di scanicare gli acini, le legature si vuol mutare. E anche si dice delle spighe. » (mots soulignés par l’auteur de l’article). La version allemande du même lexique (1763) est encore plus explicite : « Scanicare. Das die Weinbeeren abfallen. Quando si teme di scanicare gli acini, le legature si vuol mutare. » Dans les deux dictionnaires, la citation du locus palladien comme source unique confirme la nature d’hapax du lexème en question.
45 Op. Agr., I, 10, 2.
46 Plut. 43.12, fol. 20 r°.
47 Op. Agr., III, 18, 6.
48 Ricc. 2238, p. 106 = Ashb. 524, fol. 47 r°.
49 Voir, par exemple, P. A. Mattioli, Volgarizzamento di Dioscoride, p. 102 : « Produce le sue spie, overo noci simili quasi a quelle del pezzo, ma più grosse, le quali malagevolmente si lasciano spiccare dal picciuolo. » Pour d’autres exemples datant des xvie-xxe siècles, voir GDLI XIX, p. 881 et suiv.
50 M. Campetella, « Les traductions de l’Opus agriculturae… », p. 178, 185.
51 Op. Agr., III, 12, 6.
52 Ricc. 2238, p. 80 = Plut. 43.12, fol. 54 = Ashb. 524, fol. 43 r°.
53 F. Sansovino, La villa..., p. 22.
54 C. Ridolfi, Lezioni orali…, p. 186-187.
55 Branco/branca = « branche » < xve siècle (M. M. Boiardo, l’Orlando innamorato, 1475).
56 J. J. Wecker, Des secrets et merveilles de nature, p. 396. Dans l’édition originale de l’œuvre, rédigée en latin, le terme employé est « mater » : « Truncum vitis terebra gallica appellata praeforato, et praestantioris in proximo sitae vitis ramum attractum in foramen immittito, non ab antiqua matre decisum. » (De secretis, p. 428).
57 Le Trésor de la langue française, version informatisée de P. Ibms et B. Quemada (s.v. « Maternel »), ne connaît pas de sémantème agronomique pour l’adjectif « maternel ».
58 En latin, mater ne désigne pas les sarments principaux de la vigne (ni les branches principales d’une espèce végétale), même si des sémantèmes proches existent : « racine principale d’une plante » (Thesaurus Linguae Latinae, VIII, p. 445, l. 64-68) ou « tronc dans lequel on insère une greffe » (ibid., l. 69-73). Ce dernier sens recoupe grosso modo celui qu’on trouve chez Wecker.
Auteur
Université catholique de Lyon, Institut de linguistique romane Pierre Gardette
Université Jean Moulin-Lyon 3, Centre d’études linguistiques - CEL (EA 1663)
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Signes et communication dans les civilisations de la parole
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2016