Les éco-quartiers, une innovation sociotechnique au service d’une culture de la soutenabilité urbaine ou de nouveaux marchés ?
p. 117-143
Texte intégral
1Les journées de clôture de l’ANR Pagode ont été l’occasion de réfléchir à la contribution des éco-quartiers1 au lancement de nouvelles formes d’urbanisme favorables à la soutenabilité urbaine. Dès la signature de la Charte d’Aalborg, en 1994, les éco-quartiers ont été identifiés comme un levier d’action par excellence de l’urbanisme durable par les principaux acteurs de ce nouveau mouvement, dont les villes constituées en réseaux (Rudolf et Kosman 2004). Ces derniers ont contribué à la dissémination des éco-quartiers dans toute l’Europe et le monde entier, certaines régions ayant été plus réactives et prolixes que d’autres. Si un même mot sert à rendre compte d’une nouvelle conscience en matière d’urbanité, la réalité se déploie selon des contenus distincts. Cette diversification autour du «concept» d’écoquartier invite à les interroger du point de vue de leur contribution à la promotion de la soutenabilité urbaine et plus particulièrement sous l’angle de la diffusion d’une nouvelle culture urbaine.
2Les éco-quartiers sont-ils les vecteurs de transformations culturelles, aussi petites et insignifiantes soient-elles, et quels chemins empruntent-ils pour y parvenir? Ce questionnement sera mené de la conception des éco-quartiers aux formes d’appropriation de ces derniers par leurs habitants. Il servira au passage à mettre en évidence des tendances qui s’affirment par-delà la diversité phénoménologique qui s’impose dans un premier temps. Parmi les observations susceptibles de rendre compte de certaines tendances, il convient de mentionner un «interdit» latent – le mot est peut-être un peu fort –, qui s’impose des typifications ordinaires aux outils à l’usage des experts en matière d’éco-quartiers. Ces patterns cognitifs étant agissants à différents stades de la promotion d’un quartier en éco-quartier, c’est-à-dire en amont de projets de renouvellement urbain jusqu’à l’obtention du «label» éco-quartier.
3Une observation attentive et inscrite dans la durée (Rudolf 19982) permet la mise en évidence d’un processus à géométrie variable quant à la prétention d’une opération d’urbanisme à afférer à la typification d’«éco-quartier». Ce constat est conforté par plusieurs terrains d’application. Le premier a trait à l’absence d’engagement de la politique de l’Anru dans des processus de promotion en éco-quartiers, dont le travail de Gilles Vodouhe3 rend compte à partir de l’étude approfondie d’un processus de renouvellement urbain sur un grand ensemble de la CUS (Rudolf et Vodouhe 2014a, 2014b). Cette observation peut certes être pondérée par la réhabilitation intéressante du grand ensemble Rieselfeld à Freiburg avec la réserve, cependant, que cette opération ne relève pas de la politique de l’Anru et qu’elle fait exception dans le paysage allemand. Son exemplarité conforte plutôt la règle d’exclusion dont semblent être frappés les grands ensembles. D’autres exemples appuient la montée en généralité selon laquelle les représentations des professionnels de l’urbanisme durable ne sont pas favorables à la promotion des grands ensembles en éco-quartiers. Cette frontière s’appliquant dans une moindre mesure aux quartiers ouvriers anciens pour épargner les friches industrielles ou militaires. Les cas de réhabilitation des casernes vacantes à Fribourg en Brisgau ou à Tübingen, suite au déménagement des forces françaises après la chute du mur de Berlin en 1989, témoignent de ce que ces friches bénéficient d’un certain halot positif. Cet intérêt pour les friches industrielles est également présent à Strasbourg, ainsi qu’en atteste l’urbanisation le long du bassin du Rhin pour le quartier Danube ou de l’ancienne brasserie de Kronenbourg.
4Comment décoder ces frontières tacites qui opposent les quartiers éligibles de ceux qui ne le sont pas et les interpréter? La connaissance de cet interdit emprunte deux détours principalement.
- Le premier revient sur les réserves qui s’expriment à l’égard de certaines opérations urbaines quant à leur légitimité à se porter candidates au label «EcoQuartier». Ces doutes reposent sur des typifications et des représentations qui font obstacle à une démarche de type «ÉcoQuartier».
- Le second revient sur la démarche «ÉcoQuartier», dont dépend l’obtention du label «ÉcoQuartier» en France, afin de mettre en évidence les mécanismes qui contribuent implicitement à des processus d’exclusion de certaines opérations urbaines. Le fait que la démarche se focalise sur les processus de fabrication, par exemple, n’est pas favorable à la prise en compte de l’existant. Enfin, en se désintéressant des modes de vie au sein des quartiers (processus d’installation et d’appropriation mais aussi de vieillissement des quartiers), la démarche n’offre pas d’arguments d’éligibilité pour des réalités déjà existantes, dont les efforts de réhabilitation se verraient ainsi récompensés.
Un processus à géométrie variable au fondement des écoquartiers
5Qu’à un signifiant correspondent plusieurs signifiés, cette situation n’est pas inédite, c’est même plutôt un invariant de la condition humaine (Ledrut 1973). Ce constat est conforté par l’observation selon laquelle le signifiant «éco-quartier» invite à l’exploration de possibles qui justifie une certaine diversité de pratiques et de réalisations. Il ouvre à des carrières dynamiques et multiples des éco-quartiers. L’expression s’apparente davantage à un programme de recherche en pleine ébullition qu’à une réalité stabilisée. Ce raisonnement n’explique pas pour autant selon quels arguments certaines réalités phénoménologiques sont plus volontiers écartées que d’autres de cette aventure. Cette exclusive est d’autant plus étonnante lorsqu’il s’agit de quartiers en plein processus de réhabilitation et de transformation qui présentent bien des atouts pour relever un tel défi comme c’est le cas du quartier d’Hautepierre dont il va être question.
6Pour rappel, ce quartier résulte d’une opération qui se réclame d’innovante en matière d’architecture et d’urbanisme, dans les années 1960 où il a vu le jour. Rétrospectivement, c’est-à-dire dans les années 2000, soit avant l’intervention de l’Anru, ce grand ensemble pouvait se targuer de bénéficier d’un fort potentiel paysager, hérité de sa morphologie singulière en ruche d’abeilles. Cette morphologie offrait d’intéressants cœurs de mailles, dont chacun présentait des caractéristiques propres tout en partageant le fait de ne pas être traversé par des voiries et par conséquent par des voitures. Ce détail morphologique, qui aurait été érigé en qualité dans un éco-quartier, s’est vu exclusivement associé à un facteur d’insécurité, certes recevable, mais dont l’hypostase a conduit à éclipser tout autre type de justification. Hautepierre a donc bénéficié d’une opération de «résidentialisation» à l’issue de laquelle tous les cœurs de maille ont disparu avec la richesse paysagère qu’ils abritaient.
7À cet atout qui n’aura pas été valorisé, on peut ajouter d’autres potentiels précieux du quartier comme son excellente connectivité – en raison d’une très bonne desserte en transports collectifs publics assurée par la ligne A du Tram (première ligne à avoir été mise en circulation à Strasbourg) ainsi que par des bus et des pistes cyclables –, sa bonne dotation en services publics et son dynamisme associatif. L’ensemble de ces infrastructures va à l’encontre de l’argument de l’enclavement qui demeure encore agité quelques fois comme obstacle à une réhabilitation de type éco-quartier. Cette objection ne résiste pas à l’étude des mobilités réalisée par Horizome4. Cette étude a montré au contraire la grande ouverture du quartier, tant sur le monde, puisqu’il compte plus d’une centaine de nationalités différentes, que sur la ville et la CUS5.
8Tous ces potentiels sont de peu de poids contre l’inertie qu’oppose une mauvaise réputation liée au destin malheureux des grands ensembles en général. Lancé comme une opération exemplaire dans les années 1961, il a attiré de nombreux foyers prêts à se lancer dans l’aventure d’un grand ensemble moderne atypique. Aux années de gloire, considérées sous l’angle de la cité du renom (Boltanski et Thévenot 1991), le quartier a entamé une spirale descendante économique et sociale propre à bon nombre de grands ensembles des grandes villes européennes. Cette carrière n’est pas tant à inférer aux caractéristiques urbaines du quartier qu’à l’exode massif d’une partie de sa population, la mieux dotée en différents capitaux, dès les années 1980. Ces mobilités associées à des effets de capture d’une autre partie de sa population, la plus vulnérable économiquement et socialement a achevé le processus de disqualification d’Hautepierre. Cette description, qui fait écho par sa teneur à la carrière de bien d’autres grands ensembles, ne fera pas l’objet de longs développements en raison de son caractère idéal-typique. Ce portrait suffit à étayer l’argument de l’existence de frontières tacites dans les représentations et dans les typifications à l’égard de certains quartiers. L’objectivation à leur égard est entravée par les préjugés qui pèsent sur leurs populations. On ne les observe plus du point de vue de leurs caractéristiques architecturales, techniques et urbaines, mais de la position sociale de leur population.
9L’«interdit» qui pèse sur Hautepierre comme candidat éventuel à un grand-ensemble populaire, réhabilité en éco-quartier au terme d’un processus de renouvellement urbain dans le cadre de l’Anru, a été testé à quelques reprises dans des entretiens menés avec des élus ainsi qu’avec différents intervenants sur le quartier. Cette exploration, effectuée par Gilles Vodouhe, a été justifiée par un épisode sémantique destiné à qualifier le type de renouvellement urbain dont Hautepierre était l’enjeu. Selon différents témoignages, l’expression de «quartier jardin» se serait «naturellement» imposée par la référence au projet de l’architecte-urbaniste Vivien, concepteur d’Hautepierre. Cette figure a par ailleurs trouvé une correspondance heureuse avec les cités jardins dont la ville de Strasbourg s’apprêtait à fêter le centenaire en raison des joyaux qu’elle recèle, dont la cité du Stockfeld.
10Tous ces arguments qui ne manquent certes pas d’à propos ont mis cependant en lumière que les choix qui se sont imposés à cette occasion ont été faits au regard d’un passé populaire et ouvrier, voire de populations déplacées lors des grandes percées haussmanniennes dans le cas du Stockfeld, et non du présent ou de l’avenir. Ce constat passe d’autant moins inaperçu que ces options ont été faites à un moment de plein essor de l’urbanisme durable à la CUS. Cette actualité d’intense communication institutionnelle en faveur des éco-quartiers ne pouvait qu’accentuer le grand absent de la discussion qui se livrait à Hautepierre au même moment. C’est de ce rapprochement de calendrier qu’est née l’hypothèse selon laquelle l’option d’un grand ensemble populaire de type éco-quartier n’aurait pas été une mauvaise piste tant en termes d’expérimentation urbaine pour la CUS que du point de vue des habitants d’Hautepierre. La réception de cette proposition lors des entretiens et à l’occasion d’échanges informels sur le quartier a étayé l’hypothèse selon laquelle les «éco-quartiers» demeurent dans les représentations ordinaires et professionnelles une option réservée pour de nouvelles opérations d’urbanisme et pour des populations solvables et prêtes à vivre conformément aux exigences de l’urbanisme du XXIe siècle!
11L’incapacité à se représenter une carrière d’«éco-quartier» pour Hautepierre procède de frontières mentales selon lesquelles certaines populations ne seraient pas prêtes à faire une telle expérience. Outre que ce raisonnement fait écho à des convictions justifiant et entretenant des discriminations sociales, voire raciales, il va à l’encontre de la pratique d’estampillage, répandue par ailleurs, de quartiers sortant de terre, sans états d’âme de considérations sociales. Les procédures d’attribution étant généralement plus pointilleuses sur les critères architecturaux et techniques que sur les formes d’appropriation dont ces innovations seront l’objet! Cette interprétation est redoublée par les nombreux retours d’expériences peu probants d’éco-quartiers érigés en «modèles» du point de vue de leur conception. Ces échecs sont à leur tour généralement présentés comme le fait des habitants qui, bien que volontaires et prêts à s’engager par l’entremise de l’accession à la propriété dans un éco-quartier, ne seraient pas à la «hauteur» des exigences de ces derniers6.
12C’est par la répétition de petites phrases assassines ou de petits silences et sous-entendus, qui ponctuent les entretiens et les échanges entre acteurs en bien des occasions, que s’insinue progressivement l’argument selon lequel il pèse sur la conception des éco-quartiers un a priori qui réserve ces innovations sociotechniques d’un genre nouveau, fer de lance de l’urbanisme du XXIe siècle, à certains publics.
13Ce cadrage pèse de tout son poids sur l’éligibilité de quartiers populaires dont les populations sont réputées peu solvables et de surcroit en échec scolaire ou peu éduquées. Outre que ce type de raccourci est offensant, il s’oppose à l’exploration et à la diversification de formes d’habitabilité respectueuses de la planète et de ses habitants. En l’état d’investissement symbolique du concept d’éco-quartier, ce dernier reste suspendu à des innovations sociotechniques sophistiquées et à des équipements coûteux qui ne sont pas accessibles à tout le monde. Cette exclusivité prive l’écologie politique de certains ressorts, dont celui de diffuser dans la vie quotidienne à travers la diversification des modalités des manières d’habiter et de consommer, même à moindre coût économique et selon des patterns culturels et sociaux multiples. Ces observations conduisent à s’interroger sur les démarches qui président à la définition des labels «EcoQuartier».
Une démarche d’attribution du label «EcoQuartier» inachevée7
14Relativement à leur émergence et promotion dans la continuité de la signature de la charte d’Aalborg en 1994, les éco-quartiers vont mettre un certain temps à prendre en France (Rudolf 2001). S’ils commencent à voire le jour timidement au tournant des années 2000, ce n’est qu’avec le premier Grenelle de l’environnement qu’ils vont être explicitement promus au rang de dispositif incontournable de la ville durable. Cette reconnaissance est consacrée par la démarche «EcoQuartier» qui est habilitée à décerner le label ad hoc aux candidats sélectionnés au terme d’un concours effectué sur dossier. Cette procédure participe du processus de normalisation des éco-quartiers8. Le premier appel à projets ÉcoQuartier a été lancé fin 2008 afin de rassembler les candidatures de qualité au sein d’un club opérationnel, de les valoriser et de permettre la diffusion de «bonnes pratiques». Des nouveaux appels ont été lancés les années suivantes avec plus de 350 dossiers par édition. Par delà un travail de clarification des éco-quartiers par l’édification d’une norme estampillée au terme d’un processus de gouvernance multi-acteurs, l’enjeu de cette démarche est la lutte contre l’étalement urbain par la croissance du pavillonnaire.
15Les éco-quartiers se présentent donc comme une sorte de laboratoire urbain destiné à relever les principaux défis qui se posent aux villes actuelles9. Si la ville durable ne résulte pas de l’addition de ses écoquartiers, l’échelle du quartier apparaît comme la réalité vécue la plus consistante pour engager des territoires dans des logiques de soutenabilité. À cet égard, un projet d’éco-quartier devrait se concevoir selon cette perspective, c’est-à-dire en prévision de mutations futures à différentes échelles de la ville. Les outils déployés dans le cadre de la démarche ÉcoQuartier visent à doter les différents acteurs de la conception urbaine de grilles d’analyse ambitieuses leur permettant de s’inscrire dans cet objectif global. Il s’agit ni plus ni moins de construire des outils d’évaluation des projets architecturaux et urbains.
16Historiquement l’évaluation est un instrument au service de l’administration publique, fondé scientifiquement. La finalité de l’évaluation est la conversion de variables scientifiquement éprouvées en informations utilisables pour la prise de décision et orientée vers l’utilisateur. La construction d’un label est conditionnée par le croisement de trois exigences parfois difficilement compatibles: la rigueur scientifique, l’efficacité politique et la légitimité démocratique (Boulanger 2004). Les labels procèdent d’opérations de traduction entre différentes communautés épistémiques et sociales, c’est-à-dire qu’ils résultent du passage d’informations ou de concepts scientifiques en guides d’action et de décision. Ils assurent à cet égard un rôle de médiateur entre différents univers sociaux. La confection d’un label se heurte à différents enjeux dont celui de l’équilibre entre un souci de représentativité scientifique des phénomènes et la convivialité et maniabilité de l’outil. Ce pari équivaut, dans le cas de l’élaboration de grilles d’évaluation pour les éco-quartiers, à agréger de nombreuses variables afin de respecter la complexité qui sous-tend les établissements humains sans tomber dans le piège de la confection d’une usine à gaz (Rudolf 2006). Sans entrer dans les discussions relatives à la conception de ce type d’outils, il convient de mentionner que la recherche développement dans ce domaine a été particulièrement prolixe et qu’il existe une palette impressionnante de supports destinés à accompagner les praticiens du monde entier (Boutaud 2005).
17Un des enjeux pratiques pour les professionnels et les collectivités demeure de trouver un bon compromis pour s’équiper en établissements modèles du point de vue de la diffusion de la durabilité urbaine à différentes échelles de la ville. La démarche française EcoQuartier n’échappe pas à ce défi. De l’avis de différents experts, la démarche EcoQuartier s’est beaucoup améliorée depuis qu’elle existe (Ifore 2009). Elle reprend les grands principes du développement durable10 qu’elle décline selon trois étapes, dont pour commencer la signature d’une charte d’engagement des collectivités. Ce préalable conditionne la démarche qui mise sur l’impulsion d’une démarche multi-acteur, relayée ensuite par un accompagnement technique établi sur demande. Suit une deuxième étape d’admission du dossier qui autorise à l’utilisation du logo EcoQuartier. Cette autorisation ne présume pas de l’obtention du label qui est effective au bout d’une année de suivi. Une fois le label obtenu, il ne peut plus être retiré. Il s’agit donc d’un label millésimé.
18La démarche «ÉcoQuartier» s’est par ailleurs qualifiée par l’intégration progressive d’items ou d’épreuves qui accordent une place intéressante au vécu et à la subjectivité. Ainsi chaque indicateur doit être accompagné d'un commentaire ou d'une remarque et il existe une rubrique qui sollicite les porteurs de projets à s’exprimer sur la vie des habitants de leur éco-quartier à une certaine échelle temporelle. La mise en récit de ces innovations est donc requise et ce n’est pas négligeable du point de vue de l’ouverture culturelle de leurs concepteurs. Si ce type d’ouverture est prometteur du point de vue de la reconnaissance des modes de vie, la démarche passe cependant à côté de l’évaluation factuelle de la qualité de vie d’un éco-quartier. Et pour cause puisqu’elle se limite à certifier un processus qui va de l’état de la conception à la livraison à 50% réalisée des espaces et des équipements publics et à 30% des bâtiments.
19Ces observations rejoignent les critiques de Jacques Mirenowicz, rédacteur de la Revue Durable (Fribourg en Suisse), exprimées dans le cadre d’une journée d’étude consacrée aux outils d’évaluation des écoquartiers organisée par l’institut de formation en environnement en novembre 2009 à Paris (Ifore 2009). Mirenowicz, au même titre que d’autres intervenants de cette journée, insiste sur le fait que l’écoquartier ne se limite pas à un processus de programmation et de réalisation, mais qu’il s’agit d’un quartier doté d’une vie après la livraison. Cette remarque est adossée au constat qu’il n’existe pas d’études conséquentes sur l'influence des éco-quartiers sur les attitudes et les comportements des habitants. Ces observations qui sont des incitations à redoubler la recherche action orientée vers les outils d’évaluation des éco-quartiers interrogent la démarche ÉcoQuartier. Serait-il possible d’envisager des indicateurs basés sur l'après-construction et sur la vie du quartier et sur sa gestion et de les intégrer dans une procédure modulable et évolutive de la démarche «ÉcoQuartier»?
20L’intérêt d’une telle évolution pour le label EcoQuartier permettrait une meilleure prise en compte des dynamiques sociales d’appropriation de ces nouveaux équipements et morphologies urbaines. Par ailleurs et c’est un argument de taille, il permettrait d’ouvrir le label EcoQuartier aux quartiers qui en sont actuellement exclus. Il offrirait un débouché intéressant au renouvellement de la ville sur elle-même dans l’esprit de la loi LRU puisqu’il permettrait de labelliser des friches urbaines. Ces dernières étant autant d’espaces disponibles à l'intérieur de la ville, elles sont des leviers d’action contre l’étalement urbain. Même si elles ne peuvent lutter contre la tentation que représente un déclassement (reclassement ?) de terrains agricoles en foncier pour leurs propriétaires, leur qualification apporterait un argument écologique et social, voire économique à la réhabilitation de vieux quartiers et faubourgs ou friches industrielles en tissu urbain.
21C’est donc la procédure, davantage que les critères usuellement retenus, qui prive l’application du label à l’évaluation d’opérations sur des quartiers existants. Cette restriction retentit sur les exigences des opérations de renouvellement urbain mais également sur la valeur attribuée aux modes de vie dans l’évaluation des éco-quartiers. C’est un aspect non négligeable tant du point de vue de l’évaluation sociale de ces innovations architecturales et techniques que du point de vue de leur aptitude à promouvoir des nouvelles manières d’habiter la planète. L’enjeu est important puisqu’il s’agit de l’évaluation des éco-quartiers du point de vue de l’ambition publique de les ériger en dispositifs élémentaires de la ville soutenable. La contribution des habitants à la réalité des éco-quartiers est cruciale puisque c’est d’elle que dépend leur aptitude à diffuser de nouvelles formes d’urbanité moins insoutenables que celles qui prévalent actuellement. Il est important que cette contribution se dote d’instruments d’évaluation, afin qu’elle puisse être reconnue. Une telle reconnaissance servirait l’adoption de réflexes de soutenabilité en cœur des métiers de la conception et de la construction. Elle permettrait de doter la maitrise d’usages d’une réalité plus consistante qu’elle ne possède actuellement.
Renouer avec les exigences d’une culture écologique vive et vivante
22La thèse de Vincent Renaud (Renaud 2014) est assez illustrative des dérives que le «meilleur éco-quartier du monde» est susceptible de connaître faute de méconnaître le pouvoir des usagers. La prise en charge par ces derniers des innovations architecturales et urbaines est l’épreuve pas excellence dont dépendra in fine la carrière pratique et symbolique des éco-quartiers. Et il se pourrait bien que faute d’y avoir accordé de l’attention, les éco-quartiers finissent dans le même état de disgrâce que les grands ensembles auxquels le label EcoQuartier est refusé, même à titre de typification ordinaire. Les éco-quartiers s’apparentent donc davantage qu’il n’y paraît au premier abord aux grands ensembles dont la profession et les élus tentent à tout prix de les distinguer. Ils leur ressemblent par le rôle de laboratoires de nouvelles doctrines architecturales et urbaines qu’ils remplissent. «Car l’architecture moderne (…) vise non pas à répondre aux usages des habitants, à leurs habitudes, à leur mode d’habiter, mais précisément à les transformer pour faire advenir un monde «nouveau», «moderne», en phase avec la révolution industrielle émergente depuis le XIXe siècle» (Renaud 2014, p. 99). Il suffirait de remplacer les références à l’architecture moderne par celles relatives à l’urbanisme durable, promu par la charte d’Aalborg11 pour adapter la proposition faite ci-dessus aux éco-quartiers.
23Cheval de Troie de la Charte d’Athènes en ce qui concernent les grands ensembles qui vont se multiplier au sortir de la seconde guerre mondiale, les éco-quartiers servent à la réception de la Charte d’Aalborg qui déconstruit points par points les principes de la charte du mouvement d’architecture et d’urbanisme moderne (CAUM). Que ce soit par le rejet de l’urbanisme de plan au profit d’une démarche intégrée au contexte, les éco-quartiers proposent des solutions de substitution au fonctionnalisme. À l’imperméabilisation des sols et l’enterrement des eaux par la canalisation hérités de l’hygiénisme du XIXe siècle, ils préconisent des aménagements qui restaurent la perméabilisation des sols et le ruissellement des eaux. Les éco-quartiers raisonnent à partir de nouvelles normes en matière de construction et de composition urbaine et se font idéalement les vecteurs de ces dernières tant à l’échelle du bâti, de l’urbanisme, que des espaces publics. Sans remettre en question l’ambition des éco-quartiers du point de vue du renouvellement des préceptes à l’œuvre dans les sciences de l’ingénieur, en architecture et en urbanisme, les relais dont profitent ces arguments importent pour la compréhension de ce qui se joue socialement autour des éco-quartiers. On ne peut pas faire l’économie de ce que les éco-quartiers constituent de nouveaux débouchés pour de nombreux produits et services. À ce titre, ils se font les relais de toute une économie qui profite de l’écologie (secteurs de dépollution notamment). Ces soutiens contribuent de manière ambivalente au «mouvement» écologiste. Ils se présentent comme des alliés potentiels de l’écologie scientifique, mais fragilisent les tenants de considérations plus éthiques et politiques, voire esthétiques, de l’écologie (Rudolf 1998, 2005, 2007c). L’alliance avec le marché fait non seulement peser un risque de discrédit symbolique sur les revendications culturelles des écologistes mais elle pèse également sur les pratiques qui se revendiquent de cette sensibilité. L’«inondation» de réponses écologiques par l’entremise du marché éclipse l’invention de solutions, bricolées au cas par cas par des habitants à la recherche de réponses à des questions qu’ils rencontrent dans leur quotidien.
24Un tel conflit est le résultat du succès rencontré par l’écologie politique des années 70, celle qui s’est joué sur différents fronts, celui du quotidien et du travail, et que l’expression d’«Alternatives» regroupe. Entre les chantiers de l’époque et ceux qui œuvrent à la diffusion des éco-quartiers, ce n’est pas tout à fait la même partition qui se joue. Alors que les pionniers de l’écologie politique agissaient au nom d’une transformation sociale radicale à partir de collectifs dont ils faisaient partie (Diener et Supp 1982; Müller 1991; Rudolf 1998 et 2005; Dobre 2002), ce sont des experts désormais qui accomplissent cette tâche pour le compte d’autrui12. Le rapport de forces entre la diffusion d’équipements et d’innovations prêts à l’emploi, disponibles sur le marché, et l’invention de tactiques au cas par cas, renvoie à l’affrontement entre deux logiques de production de la société auquel la sociologie n’a cessé de s’intéresser. Depuis les écrits de Marx, c’est de la dissociation du produit du travail de son producteur, soit de la disqualification de l’un et de l’autre, au profit du mode de production industriel et capitaliste dont il s’agit. La même partition se joue autour de l’habiter et des modes de vie au tournant du XXe et XXIe siècle.
25À l’exception bien connue du quartier Vauban13, né du rêve d’un jeune architecte adossé aux mobilisations de jeunes exclus de l’accès à des logements de qualité dans une ville soumise aux spéculations foncières, les éco-quartiers sont rarement le fruit de mobilisations sociales. Ils s’apparentent sur leur courte vie davantage à des partenariats publics privés, qui offrent de nouveaux débouchés aux différents acteurs de la fabrique urbaine, qu’à des initiatives citoyennes. À ce titre, ils servent sans doute autant d’indicateurs de performance des municipalités, du secteur de la construction et du bâtiment, de la recherche technique et du développement de nouveaux marchés que d’indicateurs d’une large adhésion de la société civile à la transition écologique. Entre des élus qui s’en servent pour vanter leur politique et positionner leurs communes dans le palmarès des villes où il fait bon vivre, des promoteurs qui renouvellent à la marge leurs produits en passant par des architectes qui développent de nouvelles compétences dans le cadre de l’autopromotion par exemple, les futurs habitants des éco-quartiers n’ont guère droit au chapitre qu’à titre d’administrés auxquels on tente d’inculquer de nouvelles manières d’habiter.
26Comme le montre Vincent Renaud (2014), les futurs habitants des écoquartiers sont pris en charge de bien des manières et à tout propos, mais très peu à titre de partenaires de l’établissement de normes de soutenabilité durables tant à l’échelle de leur appartement que des espaces partagés et publics. Cette prise en charge prend davantage la forme d’un encadrement. Ce dernier se décline en réunion d’accueil «planifiée une à trois semaines avant la remise des clefs», permettant au «bailleur de présenter aux locataires les principales nouveautés du logement» et de leur remettre éventuellement des petits livrets, rédigés sur le mode ludique, de manière à rendre l’ingestion de ces nouvelles manières de vivre plus digestes, voire attrayantes. Ces consignes trouveront diverses occasions de rappels que ce soit lors de l’emménagement définitif des habitants puis de manière régulière lors de réunions prévues à cet effet, voire par des lettres de mise en demeure pour les plus récalcitrants.
27De la réunion aux petits flyers relayés par d’éventuels rappels à l’ordre, c’est toute une logique de déprise qui se joue ici. Et si on peut à juste titre parler de dépolitisation de l’habitant des éco-quartiers, le projet est éminemment politique ou plus exactement il est au service d’une économie politique. L’emménagement dans un éco-quartier rime ainsi avec l’inculcation de normes environnementales qui prend corps dans des règles de propreté, la régulation des pulsions et des phobies et des émotions. Il se joue toute une esthétique du rapport à soi, à l’intime et aux autres en passant par les lisières de l’appartement et jusqu’au cœur des espaces publics. Tous ces savoirs faire mettent en jeu des manières de faire collectif sur un mode contemplatif ou hédoniste qui n’a rien d’apolitique. L’écologie promue par la vie dans les éco-quartiers demeure en tous points inoffensive parce que compatible avec l’ethos individualiste du consommateur.
28Force est de constater que l’écologie promue par le label EcoQuartier se confond avec un conformisme ordinaire prêt à entrer dans la course aux innovations sociotechniques sans considération pour les principes qui fondent la culture écologiste. L’obsolescence des pratiques par la multiplication des gadgets de réduction de l’empreinte écologique et carbone, auxquels les habitants sont sommés de s’adapter sur un rythme de plus en plus soutenu, prive ces derniers de leur aptitude à dialoguer avec les supports mis à leur disposition. Un tel dialogue procède de la dialectique de l’objectivation et de la subjectivation que Georg Simmel a décliné tout au long de sa carrière. Ce dernier s’est interrogé tout au long de sa carrière intellectuelle sur la dynamique culturelle qu’il appréhende à travers ces deux grands processus. La subjectivation et l’objectivation, qu’il qualifie à partir de l’idée de la vie, sont au fondement de la culture. La culture est la rencontre entre le travail d’un sujet en quête de dépassement, dont l’aboutissement ponctuel et éphémère se réalise dans des formes objectives. La culture étant la résultante fragile entre «le plus que la vie» et «le moins que la vie», selon les expressions de Simmel.
29Équilibre fragile car toujours menacé par l’évanescence des formes en raison de l’impétuosité de la vie ou par un excès de rigidité, opposant un carcan à tout mouvement. De ce rendez-vous raté, dépend la qualité de la culture. «Ces créations de l’esprit objectif que j’ai évoquées au début: l’art et la morale, la science et les objets finalisés, la religion et le droit, la technique et les normes sociales, sont autant de stations par lesquelles doit passer le sujet pour gagner cette valeur spécifique qu’on appelle sa culture. Il faut qu’il les intègre en lui, mais c’est bien en lui-même qu’il doit les intégrer, c’est-à-dire qu’il ne peut pas les laisser subsister en tant que simples valeurs objectives. Tel est bien le paradoxe de la culture: la vie subjective, que nous éprouvons dans son flux continu et qui, d’elle-même, tend vers son propre accomplissement interne, est cependant incapable d’atteindre d’elle-même cet accomplissement du point de vue de l’idée de culture; il lui faut passer par ces créations dont la forme lui et désormais étrangère, cristallisées en une unité close et se suffisant à soi. La culture naît – et c’est ce qui est finalement tout à fait essentiel pour la comprendre – de la rencontre de deux éléments, qui ne la contiennent ni l’un ni l’autre: l’âme subjective et les créations de l’esprit objectif. », (Simmel 1988, p. 184).
30Entre un sujet en quête de lui-même et par conséquent enclin à se réaliser dans des formes objectives qui se muent rapidement en entraves et qu’il aspire à dépasser constamment s’établit une tension qu’il convient bien de qualifier de créatrice. Cette dialectique, encore qualifiée de tragédie de la culture, se transpose dans sa sociologie en un conflit entre individu et société au cœur duquel se jouent les grands enjeux de la modernité au tournant des XIXe et XXe siècles. Que ce soit à propos de l’émergence des formes sociales et de leur aptitude à se maintenir dans le temps et dans l’espace, au début de sa carrière, mais aussi à la fin de sa vie à propos des processus de métropolisation, le sociologue décline les thèmes de l’aliénation, de l’anomie et de la perte de sens, consubstantiels à la sociologie naissante, à partir de la tension entre culture objective et culture subjective. Ces réflexions s’intègrent dans une philosophie sociale qui raisonne à partir de la distinction entre la vie et les formes, lesquelles trouvent dans les mots, les symboles et les choses, mais aussi l’espace et le temps de puissants alliés. L’institutionnalisation, dont il est question à travers la figure des formes sociales, est un processus inéluctable et souhaitable dans la mesure où la vie sociale ne serait pas possible sans cette aptitude à la cristallisation. Elle génère cependant un conflit existentiel dont l’intensité varie en fonction des époques. La culture objective met à disposition des individus des motifs, dont l’inertie ou l’inconsistance, offre un terrain propice à la socialisation et la subjectivation. De ces expériences découlent des états respectifs de la personnalité sociale et des formes sociales, appréhendés généralement comme intégration sociale et systémique. Les principales «pathologies», déclinées par plusieurs générations de sociologues, témoignent respectivement des inadéquations entre culture objective et culture subjective.
31La perte de sens est toujours attribuable à un défaut de présence, que cette dernière soit le fait d’un abandon de l’élan vital ou d’un défaut qui prend sa source dans la «fabrication» des formes objectives. La référence à la fabrique n’est pas innocente ici puisqu’il s’agit précisément d’évoquer des logiques de production enfermées dans leur propre sillon sans considération pour les significations subjectives dont elles peuvent se faire les relais. Deux extraits de la tragédie de la culture permettent d’évoquer ces deux processus distincts de perte de sens, résultant respectivement de l’épuisement de la vie dans des formes obsolètes et d’un défaut de conception dès l’origine.
«(…), on voit apparaître des phénomènes qui semblent n’être que valeurs culturelles, des formes et des raffinements de la vie, caractéristiques notamment des époques avancées et fatiguées. En effet, quand la vie en elle-même s’est vidée de contenu et de sens, toute évolution vers son sommet, inscrite dans sa volonté et son devenir, n’est plus que schématique, incapable désormais de tirer de la matière des choses et des idées sa nourriture et sa progression, (…). Dans ce qui nous occupe ici, l’évolution individuelle ne peut plus tirer des normes sociales que le simple savoir-vivre en société, des arts que la simple jouissance improductive, des progrès de la technique que le seul aspect négatif d’un déroulement de la vie quotidienne sans peine et sans effort; (…) Considérons maintenant l’autre facteur de la culture: ces productions de l’esprit mûries pour une existence idéelle spécifique, indépendamment ici de tous les mouvements de l’âme, considérons-le dans son isolement autosuffisant; en aucun cas son sens et sa valeur propres ne coïncident avec sa valeur culturelle; (…). L’œuvre d’art doit être parfaite en vertu des normes artistiques (…); le résultat de la recherche, en tant que tel, doit être vrai et on ne lui demande absolument rien d’autre, (…), le produit économique se veut parfait en tant que produit économique et ne reconnaît pour soi aucun autre critère axiologique que l’économique. Toutes ces séries se déroulent dans la clôture d’une législation purement interne et la question de savoir si elles intègrent, et avec quelle valeur, dans cette évolution des âmes subjectives, ne concerne absolument pas leur signification: celle-ci se mesure à des normes purement concrètes et valables pour elle-seule. On comprend, à partir de cet état des choses, pourquoi nous rencontrons souvent une indifférence en apparence surprenante, voire même une aversion vis-à-vis de la culture, aussi bien chez les êtres humains uniquement orientés vers le sujet que chez ceux qui le sont uniquement vers l’objet. » (Simmel 1988, p. 192 et 195).
32À partir de cette réflexion, nous avançons que l’intérêt pour la chose publique et la vie de la cité procède d’une juste relation entre l’investissement de ce que Simmel qualifie d’âme individuelle et la cristallisation de formes objectives, riches en significations subjectives, individuelles et/ou partagées. La subjectivité pouvant faire l’objet de socialisation, c’est-à-dire être partagée et commune. L’idée de culture vive et vivante que nous mettons en exergue à propos de la formation d’une culture écologiste et de sa diffusion par l’entremise des écoquartiers se joue dans ce genre de rencontres délicates, jamais totalement abouties et en permanence en quête de justesse, d’où sa relation à l’espace et au temps et à l’historicité. Les villes formant plus que tout autre œuvre culturelle l’aboutissement de cette surenchère entre créativités subjectives et esprit rationnel. La conférence sur les métropoles, s’inspirant de Berlin et Vienne, capitales de fin siècle, est la traduction concrète des essais philosophiques de Simmel. Plus que tout autre manifestation, Berlin est la traduction vivante et la plus aboutie de cette tension créatrice qui s’épanouit à travers les sophistications de l’esprit rationnel à l’âge industriel – qui s’exprime à travers une organisation rigoureuse et l’essor des techniques urbaines -, et les excentricités esthétiques et économiques qui sont autant de réponses contre cette tendance à la standardisation propre à l’âge moderne. Les métropoles fin de siècle puisent leur créativité inédite et fragile dans cette opposition. Conformément à la tragédie de la culture, cette créativité n’est pas à l’abri de concourir à la fétichisation de la marchandise par la surenchère dans des formes de subjectivations, aussi multiples qu’insignifiantes parfois (cf. la mode et ses excentricités).
33L’obsolescence, dont il est question à propos de la culture objective disponible dans les éco-quartiers et en guise de motif culturel, expose les individus à des cristallisations sans consistance, en raison de leur mode de fabrication. Formes manufacturées plutôt que forgées par des pratiques sociales, elles sont vides et creuses avant même d’avoir pu diffuser et circuler dans les pratiques. Alors que les formes sociales perdaient de leur sens par la dissociation entre les motifs qu’elles relayaient et ceux de leurs contemporains qui ne s’y reconnaissent pas, en raison de ce qu’elles se présentent comme des objectivations étrangères aux intérêts du présent, l’obsolescence actuelle n’offre pas l’occasion de s’approprier des formes sociales, sans même parler de les engendrer. À peine sortie d’un laboratoire ou d’un atelier, a-t-on envie de dire, qu’elles sont promises à la vie éphémère d’un objet ou d’une pratique jetables. C’est donc la culture dans son ensemble qui semble menacée par l’obsolescence des objets et des formes sociales qui les sous-tendent, voire sacrifiée sur l’autel du marché qui lui semble en profiter.
Conclusion
34Nés de la critique sociale des années 1970 et des rêves qu’elle inspire, les éco-quartiers estampillés du label «EcoQuartier» passent pour de pâles figures au regard des initiatives citoyennes dont ils sont les héritiers. Ils illustrent la distance parcourue entre des causes sociales in status nascenti et leurs formes institutionnalisées. Par delà ce constat trivial du point de vue de la connaissance sociologique, une étude adossée à différents terrains de recherche montre qu’ils sont les instruments ou les vecteurs de discriminations sociales alors même que les processus d’attribution du label «EcoQuartier» ne font pas grand cas des habitants et par conséquent du sens et de l’engagement dans la construction de la durabilité. A l’observation attentive, il s’avère que les éco-quartiers font l’objet de l’application de critères à géométrie variable, tant dans les représentations communes que dans les évaluations administratives qui valident les candidats à la durabilité urbaine. Selon qu’il s’agit de quartiers existants, type grands ensembles, ou d’opérations d’urbanisation, le facteur humain connaît des pondérations variables. Ce traitement est révélateur de ce que les écoquartiers se font peut-être autant sinon davantage les opérateurs discrets mais élémentaires d’un marché en quête de croissance au nom de la soutenabilité urbaine que d’une transition culturelle de type écologique, au risque d’un ralentissement du marché.
35En matière d’écologie, la solvabilité de la population prévaut sur son engagement et son implication en faveur de la cause écologique. Le fait étant souvent occulté en référence à des déficits scolaires et culturels, voire économiques. Par les innovations sociotechniques dont ils se font le relais, les éco-quartiers s’adressent de fait à des populations susceptibles d’être promues en publics disponibles pour de nouveaux marchés. S’il ne s’agit pas toujours d’accéder à de nouveaux objets, l’installation dans un éco-quartier va de pair avec une remise en question des pratiques sociales usuelles qui peut être vécue comme une déprise des habitants par rapport à la culture. À cet égard, la restriction des éco-quartiers aux opérations d’urbanisation épargne de nombreux segments de la société de cette forme d’offensive du marché, des experts et de l’administration sur la société civile par l’entremise de l’habitat. Cette observation est d’une maigre consolation du point de vue des faiblesses que présente la démarche EcoQuartier. Il n’est pas étonnant qu’un nombre significatif de personnes se détournent de l’écologie. Ce désintérêt permet de pointer les difficultés auxquelles fait face la critique actuellement. Lorsque la critique écologique ou autre profite davantage à la préservation d’un système qu’à son effondrement ou sa transformation, tous les doutes quant à la critique sont permis. C’est bien là un des problèmes et non des moindres de la modernité tardive.
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Notes de bas de page
1 Les éco-quartiers font référence à des opérations urbaines qui veillent à la réduction de l’empreinte écologique des établissements humains. Certains leur préfèrent la désignation quartiers durables afin de faire explicitement référence aux différents piliers de la soutenabilité et ne pas prendre le risque de limiter les efforts à la soutenabilité écologique.
2 et aussi 2001; 2005; 2007a, 2007b, 2007d
3 Doctorant en urbanisme, Amup (EA 7309), ED 519, Université de Strasbourg.
4 L’association Horizome (projet HTP40) est une association régie par la loi de 1901, subventionnée par l’Agence Nationale pour la Cohésion Sociale et l’égalité des chances, le Conseil Régional d’Alsace, le Conseil Général du Bas-Rhin, la Ville de Strasbourg, le Ministère de la Culture et de la Communication et l’Office Public de l’Habitat de la Communauté Urbaine de Strasbourg. Elle est née en accompagnement du processus Anru et est adossée à des établissements d’enseignement supérieur et de recherche, notamment Amup (EA 7309).
5 Cf. Mobilités, Les mouvements de la ville de demain, Strasbourg Hautepierre, Éditions Horizome, Collection HTP40
6 Comme dans les situations de catastrophes dont la sociologie de l’environnement et des risques est coutumière, les pannes ne sont généralement pas attribuées à la technique mais aux usagers ! Plutôt que de considérer la panne sous l’angle de l’interaction entre humains et non humains, c’est toujours le facteur humain qui se voit désigner de grain de sable qui grippe le dispositif ou le système.
7 Ce paragraphe s’appuie sur le travail de Juan Pradas, réalisé en 2014 dans le cadre du master 2 «Aspu», mention urbanisme et aménagement, décerné par l’Ensas, l’Insa de Strasbourg et l’Université de Strasbourg.
8 Le plan Ville durable lancé en octobre 2008 vise à favoriser l’émergence d’une nouvelle façon de concevoir, construire, faire évoluer et gérer la ville. Quatre éléments illustrent bien ce plan: la démarche Éco-cités, l’appel au projet de Transports collectifs en site propre, le plan d’action Nature en ville et le concours Éco-quartiers. La genèse du concours Éco-quartiers, en juillet 2007, est l’un des résultats du Grenelle de l'environnement. En effet, il avait été proposé, lors d'une table ronde, que soient réalisés une quinzaine de grands projets d'innovation architecturale, sociale et énergétique. Un comité opérationnel d'urbanisme avait conclu qu'il fallait pour cela mettre en place un référentiel éco-quartier. La loi du Grenelle de juillet 2009 entérine ces discussions (site Ifore consulté en 2014).
9 Si les éco-quartiers ne règlent pas tous les problèmes posés à différentes échelles des systèmes urbains en perpétuelle croissance à l’époque des régions métropolitaines, ils offrent des jeux d’échelles intéressants permettant d’expérimenter certaines contraintes posées par l’individualisation de la vie quotidienne dans les villes, dont l’accroissement des mobilités selon des temporalités décalées.
10 Établissement d’un diagnostic de l’existant; prise compte des enjeux globaux; adoption d’un approche systémique et association des citoyens à la conception et au façonnement de leur lieu de vie.
11 La charte d’Aalborg, signée à Aalborg en 1994, consacre l’urbanisme soutenable. Elle est à ce dernier ce que la charte d’Athènes (1933) est au mouvement d’architecture et à d’urbanisme moderne. Une comparaison points par points des deux chartes a été proposée par Cyria Emelianoff («De la charte d’Athènes à la charte d’Aalborg: un renversement de perspectives. Au-delà d’une remise en question générale, la vision de la ville durable retourne comme un gant les principes fondamentaux de la Charte d’Athènes», 2001, consultable sur le site http://base.d-p-h.info/en/fiches/dph/fiche-dph-8457.html).
12 Ce déplacement se traduit par la requalification bureaucratique des habitants à des usagers et par le peu de cas réservé à la «maitrise d’usage» dans le processus de labellisation.
13 Quartier modèle, né du déménagement des forces françaises de RFA consécutivement à la chute du mur, il s’agit de l’éco-quartier sans doute le plus connu, visité et cité parmi tous. Il tient ses particularités de son histoire héroïque (Rudolf 1999; 2007a; 2007b).
Auteur
Professeure en aménagement et urbanisme, Département d’architecture de l’INSA de Strasbourg, Amup EA 7309
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