83 Schönberg a parlé lui-même des six pièces comme d’un « cycle » (voir la lettre à Berg du 10 avril 1930, dans Briefwechsel Schönberg – Berg, II, p. 392).
84 Ces informations concernant les dates sont données par le compositeur lui-même au bas du manuscrit de Verbundenheit (ASC, Ms. 647) – voir le fac-similé du document sur le site de l’ASC, et la transcription des éléments textuels qui y figurent, dans SW 18-2, p. 205.
85 La création des Six Pièces op. 35 eut lieu le 24 octobre 1931 (Glück – devenu la 4e pièce du cycle – avait été créé, séparément, dès le 2 novembre 1929). Voir le dossier relatif à la genèse de l’œuvre dans SW 18-2, p. xxix-xxxiv, ainsi que l’historique du projet, et une étude du contexte dans lequel il a vu le jour, dans Joseph H. Auner, « Schoenberg and His Public in 1930 : The Six Pieces for Male Chorus, Op. 35 », dans : Walter Frisch (éd.), Schoenberg and His World, Princeton, Princeton University Press, 1999, p. 85-125, et Robert Falck, « Schoenberg in Shirtsleeves. The Male Choruses, Op. 35 », op. cit., p. 111-130.
86 Dans le manuscrit, Schönberg avait d’abord noté « Sehr mässig » (Très modéré) avant de préciser « nicht zu langsam ». Les versions de Verbundenheit, relativement nombreuses, qui ont été enregistrées depuis les années 1960 (parfois isolément, la pièce étant extraite du cycle) adoptent toutes un tempo plus lent : la plupart durent environ 2’ ; la version de Laurence Équilbey (avec le Chœur Accentus, 2002) est même excessivement étirée (2’30), et Pierre Boulez, en 1984 (avec les BBC Singers), allait déjà dans ce sens (2’15). Cette lenteur change évidemment (assombrit) le caractère de la pièce.
87 Josef Polnauer, « Schönbergs “Verbundenheit” », dans Arnold Schönberg zum 60. Geburtstag (13. September 1934), Wien, Universal Edition, 1934, p. 44-49 (repris dans SW 18-2, p. l-lii). Voir également, outre les textes déjà mentionnés de Joseph H. Auner et de Robert Falck, les développements consacrés à la pièce par Josef N. Straus dans Remaking the Past. Musical Modernism and the Influence of the Tonal Tradition, Cambridge (Massachusetts), Harvard University Press, 1990 (p. 83-86), et par Lukas Haselböck dans Zwölftonmusik und Atonalität. Zur Vieldeutigkeit dodekaphoner Harmonik, Laaber, Laaber-Verlag, 2005 (p. 366 sq.).
88 Voir la lettre adressée par Josef Rufer à Schönberg après le concert berlinois du 31 janvier 1932 où fut donné tout le cycle (Schönberg était alors à Barcelone) : « Malheureusement je ne suis pas arrivé à découvrir la série et la façon dont elle est employée. » (lettre du 2 février, citée dans SW 18-2, p. xxxiv ; c’est Rufer qui souligne), ou encore la recension de Willi Reich lors de la parution de la partition : « Ce chœur [Verbundenheit] me paraît être le plus remarquable des six, car l’effet qu’il produit est tout à fait tonal, alors même que la conduite des voix n’est aucunement régie par des fonctions. Je n’ai pu y trouver aucune série de douze notes à proprement parler, mais bien l’application de la technique dodécaphonique à des groupes de six et quatre notes. » (Der Auftakt, 12, 5/6, 1932, p. 127 – cité dans SW 18-2, p. l).
89 Voir déjà, à ce propos, supra, p. 58, la note 79.
90 Le choix d’une dyade (et non d’une note unique) comme axe de symétrie permettant d’unir deux par deux les formes sérielles est constant chez Schönberg, et s’explique essentiellement par la volonté de coupler entre elles des formes dont les hexacordes sont complémentaires. Le principe est maintenu dans Verbundenheit bien que la division de l’échelle de départ en deux hexacordes n’ait ici aucune raison d’être. Mais on verra que la conception de la pièce implique que les intervalles résultant de l’inversion soient des intervalles « impairs » – en particulier la quarte (ou la quinte).
91 Voir supra, p. 187 et 203 (notes 70 et 90).
92 Sur ce tétracorde (Forte 4-9), voir déjà supra, p. 59 et p. 93.
93 Polnauer déjà pose d’emblée que la pièce est, « non une composition dodécaphonique (Zwölfton-Komposition), mais clairement tonale » (« Schönbergs “Verbundenheit” », p. 45 [SW 18-2, p. li]).
94 À la fin de son texte, Polnauer attire l’attention sur la ressemblance qui existe entre les premières notes de la Hauptstimme et le début de la chanson L’Homme armé – cette mélodie, note-t-il, « que les anciens Néerlandais et leurs descendants se sont transmis de génération en génération comme le mot de passe d’une communauté intellectuelle (als Kennwort geistiger Verbundenheit) » (ibid., p. 49 [SW 18-2, p. lii] ; c’est Polnauer qui souligne).
95 Voir le passage du Traité d’harmonie où Schönberg propose de considérer les cadences plagales comme des ellipses (Kürzungen) (Harmonielehre, p. 433, et l’ex. 295).– Dans le chapitre de son livre Remaking the Past consacré aux triades, Josef N. Straus a choisi les mes. 1-3 et 19-21 de Verbundenheit (A1 et C1) pour illustrer la mutation de l’écoute rendue nécessaire, selon lui, par le recours à l’inversion : celle-ci, explique-t-il, contraint en effet à passer d’une écoute en termes de fonctions tonales à une écoute en termes de set-class relations – autrement dit, les trois accords de A1 n’ont pas à être entendus comme des triades « représentatives de fonctions harmoniques », mais comme des réalisations de la collection 3-11 de Forte (037), qui sont, elles, équivalentes par inversion (Remaking the Past, p. 85 sq.). Le théoricien n’envisage ainsi les « fonctions harmoniques » que du strict point de vue de la grammaire tonale : la succession des trois triades « inversées » des mes. 19-21, écrit-il, « rend toute analyse tonale inconcevable » (ibid., p. 84). Cependant, outre le fait que s’en tenir, au sein même de A, aux trois mesures initiales ôte de sa force à la démonstration (une telle « analyse tonale » est problématique dès la suite de la strophe, avant que soit mis en œuvre le procédé de l’inversion), ne saisir dans la pièce que des réalisations de la collection 3-11, en dehors de toute logique de degrés, revient à appauvrir considérablement l’écoute. La distinction entre deux types de fonctionnalité, l’une tonale, l’autre modale, permet, au contraire, d’articuler deux écoutes dans lesquels les accords gardent une valeur propre au sein d’enchaînements régis par une logique elle aussi spécifique.
96 J. Polnauer, « Schönbergs “Verbundenheit” », p. 46 (SW 18-2, p. li).
97 Schönberg fait à maintes reprises coexister, au sein du tissu polyphonique, des graphies différentes – ainsi, aux mes. 8-9, les notes de la Hauptstimme, ‹do♭ si♭ mi♭ sol♭ la♭›, sont-elles écrites fa♯ sol♯ la♯ si♮ ré♯ dans les autres voix ; des bémols voisinent de la même façon avec des dièses aux mes. 20-21 – et le phénomène s’accentue encore dans les mes. 32-34. Le manuscrit lui-même présente en plusieurs endroits, de ce point de vue, des écarts avec le texte édité (cf. SW 18-2, p. 216).
98 A. Schönberg, Harmonielehre, p. 442, ex. 305.