Luigi Nono dénonce le grave manque d’intérêt pour La Fenice1
p. 387-388
Texte intégral
1La juste lutte que mènent actuellement les 350 employés du théâtre de La Fenice se révèle de plus en plus emblématique, non seulement du point de vue local, mais sur le plan national. Pendant que la classe dirigeante actuelle – gouvernementale et locale (commission régionale et provinciale) – s’enfonce dans une crise du système – qu’elle a provoquée par son incapacité à gérer ses propres institutions –, aussi bien sur le plan de la production que sur celui de la culture, la lutte engagée des travailleurs, dans l’unité des problèmes économiques et culturels, se charge de la responsabilité et de la nécessité d’un changement radical des orientations politiques, qui se base sur la participation des masses travailleuses, des protagonistes et des dirigeants.
2Les employés de La Fenice ont précisé les contenus de leur lutte dans un tract que la presse nationale n’a pas encore repris : pour la réforme – et la dénonciation du gouvernement qui ne veut rien savoir –, pour une participation directe, une autre gestion et un engagement de leur activité, pour un lien avec les organisations des travailleurs unis dans une lutte qui nous concerne tous, dans la défense de Venise (non « musée », ni « Venise vivante »), comme dans les problèmes nationaux ; et pour un rapport de base (et non paternaliste) avec les institutions locales, afin de développer l’activité dans la région, en répondant aux exigences, aux indications et aux nouvelles responsabilités de conduite politique et culturelle que les travailleurs expriment.
3La réponse a été immédiate : des rencontres et des documents rédigés avec des délégations syndicales ouvrières – pétrochimiques, portuaires, avec les représentants unitaires des trois confédérations (CGIL, CISL et UIL), avec le secrétaire de la Chambre du travail et avec le secrétaire de la Filcea : non une simple solidarité, mais des clarifications réciproques, des propositions d’actions communes et un engagement à intervenir contre l’inhumanité de la Région, de la Province et du gouvernement, indifférents à la résolution de la situation économique délicate, résultant de trois mois sans salaire – avec des menaces de licenciements contre de jeunes employés du théâtre, qui se trouvent dans l’impossibilité de payer leur loyer.
4Une indifférence qui confine à l’ostentation de la part de l’assesseur à la Culture de la Région, dans son refus de rencontrer une délégation des employés du théâtre.
5Les bases d’unification des luttes sont devenues claires lors de ces rencontres : défense du salaire et du poste de travail, autre organisation, engagement et gestion du travail. Les forces travailleuses agissent ainsi pour imposer, en coproducteurs de culture, et ici de manière unitaire, les justes droits que revendique Venise pour un nouveau développement social et culturel.
6La lutte de La Fenice est soutenue à l’évidence sur le plan national. Les 350 employés du théâtre témoignent d’une conscience et d’une responsabilité qui augmentent de manière irréversible leur capacité contractuelle et leur volonté résolue de peser comme sujets actifs.
7Date : 3 octobre 1974.
8Source : « Luigi Nono denuncia il grave disinteresse per “La Fenice” », in L’unità, 4 octobre 1974.
Notes de bas de page
1 [Le texte de Nono était précédé de l’introduction suivante de la rédaction : « Venise, le 3 octobre [1974]/Le camarade Luigi Nono nous a envoyé cette déclaration sur la situation à La Fenice de Venise, déclaration qui lui a été demandée, il y a quelques jours, par Il gazzettino. Le quotidien de la DC vénitienne s’est refusé à la publier, démontrant une fois encore, non seulement une grave incorrection professionnelle, mais aussi la volonté de censurer le débat, qui investit aujourd’hui toute la ville, en ignorant des voix qui ne seraient pas agréables à la direction politique du quotidien vénitien “indépendant” ».]
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