Possibilité et nécessité d’un nouveau théâtre musical
p. 139-153
Texte intégral
1Dans cette communication, j’aborderai principalement les points suivants :
- possibilité d’un théâtre musical comme théâtre d’idées ;
- évolution de la conception théâtrale ;
- évaluation des éléments authentiquement nouveaux dans le théâtre musical du XXe siècle ;
- formulation d’une nouvelle expérience théâtrale aujourd’hui.
2Il est naturel que la problématique d’un théâtre musical se pose à nouveau aujourd’hui, même si les termes et les intentions en sont contradictoires.
3Elle se pose à nouveau en raison des conséquences globales d’une possible rencontre formatrice dans les nouvelles méthodes linguistico-expressives de création de chacun des arts d’aujourd’hui ; et dans le rapport déterminé entre leur conception et leur vérification sociale.
4En raison d’une rencontre, donc, où musique, peinture, poésie et dynamisme scénique contribuent, dans leurs dimensions actuelles, non à une synthèse des arts qui, par une somme ou une addition unitaire, établirait une simple correspondance entre son, couleur et mouvement, mais à une nouvelle liberté de l’imagination créatrice. L’interdépendance continuellement redéfinie des différents éléments constitutifs du théâtre finit par briser le despotisme univoque d’une composante sur les autres : la musique sur le texte et la scène1.
5Il n’y a donc plus de dépendance dans la collaboration : le texte, puis la musique, puis la mise en scène, donc une réalisation scénique et musicale – comme un produit dont on monterait au fur et à mesure les éléments préfabriqués –, mais une participation directe et simultanée.
6Un collectif de travail provoque, dans l’interdépendance des individualités technico-humaines différenciées, des rapports continuels et des choix fortement prégnants, précisément par le concours de la singularité des situations qui se libèrent et se potentialisent de la sorte.
7Il est clair qu’à cette condition, nous sommes bien loin d’un tel nivellement et de ce qui apparaît presque comme une oblitération de l’individualité, résultat d’une sorte de planification mal comprise d’une vague civilisation future et imprécise, telle que semble la concevoir notamment Umbro Apollonio2, qui introduit en contrebande une discussion d’ordre théologique.
8Dans l’actuelle contradiction des termes et des intentions – de l’ originales Theater à l’ instrumentales Theater, en passant par les happenings –, il me paraît nécessaire de chercher à préciser non seulement la perspective d’aujourd’hui, mais aussi le point de départ que j’ai choisi et déclaré ouvertement dans le dédale des différentes expériences théâtrales de ce siècle.
9Car rien ne naît fortuitement, ni dans des conditions de tabula rasa.
10Et la nouveauté ne se détermine pas par simple autoproclamation, ni de manière mécanique, à travers une simple mise à jour technique.
11Rechercher et indiquer explicitement, dans des événements du passé, les étapes successives d’un développement opérant encore à l’heure actuelle, répond à la nécessité de savoir « d’où nous venons », dans le but d’affronter l’actualité et d’y travailler avec une conscience critique.
12Si pour d’autres, les malins qui ont l’étiquette facile, cette attitude peut être puérilement qualifiée de « retour », eh bien, qu’ils continuent donc à fainéanter dans leur déplorable manie !
I
13« Est théâtre d’avant-garde celui qui, à partir d’engagements idéologiques qui prennent la place de l’antique contenu sacré ou mythologique, s’insère dans une situation révolutionnaire et la promeut, en donnant pour acquis le principe que la révolution, comme processus de transformation et de croissance, est le principe même du devenir historique de la société, de l’actualisation de son destin et de son existence comme organisme vital. » C’est ce qu’écrit Giulio Carlo Argan dans son article « Intolleranza 1960 et le théâtre d’avant-garde » paru dans Avanti ! le 18 mai 1961, et il précise : « Brecht oui, Ionesco non ».
14En effet, Argan écrit : « En ce sens, le théâtre de Brecht est sans aucun doute d’avant-garde, bien que traversé de motifs traditionnels et populaires ; celui de Ionesco ne l’est pas, bien que structuralement nouveau, parce que jouant constamment sur une ambiguïté idéologique qui transforme l’entente entre personnages et public en une connivence amusée, intelligente et complice, permettant ainsi à la bourgeoisie d’accepter sans se trahir l’image déformée qu’on lui présente d’elle-même dans une critique implicite ».
15Cette simple vérité touche au cœur de la discussion sur la possibilité ou non, sur l’actualité ou non, et sur l’engagement relatif au contenu ou sur les spéculations technico-formelles du théâtre musical, ramenant tout à un unique principe-rapport : celui entre idéologie, situation révolutionnaire et société au sens de l’histoire et du progrès.
16(Une précision : une idéologie comprise non pas comme une oasis idéaliste, qui est éloignée de la réalité vivante, et souvent en opposition avec elle, et qui, de ce fait, a tendance à se substituer à cette réalité jusqu’à l’étouffer (à la manière de Jdanov pour être clair), mais comme conscience agissante, qui se vivifie au contact phénoménique avec la réalité et qui, se déterminant elle-même, détermine ; donc, non un voile qui couvre la réalité, mais un instrument de vérité.) Pourquoi et sur quels arguments veut-on d’une part fonder le manque de perspective pour un théâtre musical renouvelé, ou d’autre part en limiter la portée novatrice, surtout de nos jours ?
17On trouve une réponse générique, mais fondamentale, dans les restaurations de type « Belle Époque » – pour le dire avec Italo Calvino3 – qui sévissent depuis des années, sous des formes variables et souvent obstinées de contemplation narcissique de soi.
18On peut relever deux moments de ce narcissisme qui, tout en s’opposant, correspondent : d’une part, cet humanisme qui, pleurant le « vide de l’âme », s’oppose dédaigneusement à la soi-disant matérialité de la technique actuelle (tendance particulièrement sensible en Italie) ; d’autre part, ces positions qui réservent aux seules sciences et techniques la capacité de connaître la vérité, et qui relèguent toutes les autres activités humaines dans le domaine du sentiment ou des problèmes dépourvus de valeur cognitive, en venant ainsi à ériger entre la science et les autres domaines une fracture aussi absolue et dangereuse que le dualisme proclamé par l’humanisme spiritualiste. Cette fracture provoque facilement une attitude complaisante envers les techniques comprises comme une fin en soi, écartant toute possibilité de vision globale du monde.
19Par l’attrait des procédés techniques, cette attitude fascine les néophytes d’une soi-disant objectivité qui, croyant échapper à toute contamination idéologique, apparaissent en réalité, à leur insu, comme les complices et les instruments d’une idéologie précise : celle du néo-capitalisme. Du reste, aujourd’hui, l’inexistence de la « neutralité idéologique » des positions de type néopositiviste a été définitivement démontrée, et ses présupposés philosophiques clairement mis en évidence. (Sur ce point, voir Philosophie et philosophie de la science de Ludovico Geymonat4.) « L’opéra est mort ! », proclament certains, et l’on estime périmée ipso facto toute nouvelle possibilité théâtrale, tandis que d’autres participent frauduleusement à la restauration à travers le néo-classicisme, le néo-dadaïsme propre aux chatouillements complaisants de l’épiderme salonard, et totalement exempt de cette tension humaine et de cette charge anarchique qui caractérisaient les dadaïstes de 1916, ou à la restauration néo-géométriste d’une harmonie aussi fausse que nostalgique. On cherche à consolider et à prolonger un monopole culturel devenu presque stérile, tout du moins en partie, en mettant au goût du jour de tels énoncés.
20Il est vrai qu’une certaine conception de l’opéra est révolue, et que bien d’autres conceptions se sont taries au fur et à mesure, mais pas le théâtre musical dans la continuité dynamique de son rapport avec l’histoire et avec la société.
21Il est vrai qu’est aussi révolue une époque historique donnée, dont on retrouve les exigences au niveau du langage technico-structurel, de la forme, de la signification et de la fonction sociale de l’opéra traditionnel.
22Mais par quel mystère notre époque ne contiendrait-elle pas en soi l’urgence, les thèmes et les propriétés linguistiques en vue de notre expression témoignage dans le théâtre musical ?
23Peut-être notre vie se déroule-t-elle archaïquement loin des combats d’idées, des tragédies humaines, des enthousiasmes, des amours et des luttes, loin de toutes nouvelles présences, raison pour laquelle on justifie le retour à des thèmes évasifs, archaïques et médiévaux, aux arches de Noé et à d’autres mythes de civilisations disparues, sinon à des baroquismes dix-septiémistes, plus ou moins travestis, que ce soit par réaction nostalgique ou par une subordination complice aux conventions d’une société particulière ?
24Certes, le charme de la « Belle Époque » est une séduction accommodante et corruptrice. Comme tel, il n’a rien à voir avec l’enthousiasme débordant et constructif du nouveau théâtre musical.
25Les idées ne sont valables, soutiennent certains, que résolues dans les structures formelles ; par conséquent, ce qui compte, ce ne sont pas les idées, mais le langage, la « manière de mettre en forme ».
26Ces attitudes cachent une vieille et douteuse distinction entre vérité du contenu et vérité de la forme ; mais dans la réalité de l’œuvre d’art, il est impossible de dissocier le moment formel de l’idée objectivement exprimée dans la forme ; comme l’écrit Galvano Della Volpe, on ne peut, à la manière de Croce, séparer l’image du concept, et la signification intellectuelle de l’image5.
27Il ne s’agit donc pas d’opposer aux différents formalismes une prééminence du contenu, mais d’affirmer l’indissolubilité objective de la forme et de l’idée, dans le dépassement de toute opposition abstraite entre art et vérité6.
28Donc : un théâtre d’idées, de luttes, étroitement lié au progrès, certain mais tourmenté, vers une nouvelle condition humaine et sociale de la vie.
29Un théâtre totalement engagé, tant sur le plan structurel et linguistique que sur le plan social : du musicien, de l’écrivain, du peintre, du metteur en scène jusqu’au dernier électricien et ouvrier de scène, en tant qu’ils travaillent et innovent chacun dans leur élément linguistique propre, conscients qu’ils sont des nouvelles possibilités et des nouvelles nécessités techniques dont ils disposent, et responsables encore de choix précis dans la situation humaine, culturelle et politique d’aujourd’hui.
30Un théâtre de situations, conçu par Sartre comme s’opposant au théâtre psychologique, et le dépassant7.
31Un théâtre de la conscience, avec une nouvelle fonction sociale : le public ne se limite pas à assister passivement à un « rite », attiré et ravi par des motifs mystico-religieux ou évasivo-gastronomiques et passionnels, mais se trouve confronté à des choix précis – ceux-là même qui ont rendu possible le résultat expressif théâtral – et incité à prendre conscience et à faire activement ses propres choix, sans qu’il les réduise à des catégories esthétiques posées et résolues abstraitement, ni à des spéculations momentanées de jeu ouvert, mais en les effectuant en rapport avec la vie.
II
32L’opéra dans sa conception, telle que la tradition l’a forgée, révèle notamment les caractéristiques formelles suivantes :
- séparation fixe et différenciée, sur deux plans, entre public et scène, comme dans une église entre fidèles qui assistent et officiant qui célèbre ;
- les deux dimensions de l’opéra, visuelle et sonore, réalisées dans un rapport simpliste selon lequel : « Je vois ce que j’écoute, j’entends ce que je vois » ;
- l’élément scénico-visuel (forme, lumière et couleur) statique dans une fonction purement illustrative de la situation chantée ;
- le rapport entre chant et orchestre se développant de manière univoque comme dans un film, qui représente peut-être aujourd’hui la version industrialisée de l’opéra traditionnel, entre le parlé et la bande-son ;
- perspective axée autour d’un centre focal unique tant sur le plan visuel que sur le plan sonore ;
- par conséquent : on bloque toute possibilité d’utiliser le rapport espace-temps.
33Il apparaît clairement, à partir de ces constatations, que cette conception particulière de l’opéra reste liée, par-delà les siècles, à une origine rituelle antique, sur laquelle la perspective statique du catholicisme s’est développée à une époque précise, lorsque le débat ouvert, et de nature parfois hérétique, entre auteurs et public catholique échoua.
34Il faut rappeler que l’écart entre le public et la scène, qui est encore le fait des théâtres actuels, trouve son origine non seulement dans la pratique liturgique, mais aussi dans les premières représentations des mystères et des sacre rappresentazioni quand, au cours du haut Moyen Âge, on dressait sur les places des scènes fixes autour desquelles le public se rassemblait.
35Un document parmi d’autres : la gravure de Lucas van Leyde Ecce Homo (1510) représente clairement cette situation.
36De cette manière, on annulait le rapport social qui s’était établi librement, à ciel ouvert, dans les actions des sacre rappresentazioni en mouvement, entre l’action scénique, au contenu précis, et les possibilités d’un public qui n’était ni sélectionné, ni discriminé économiquement ou en raison de sa caste : comme cela s’est produit et comme cela se produit encore dans de nombreux pays, où l’action scénique est transférée dans des lieux clos.
37Le centre focal unique, la dislocation sur deux plans du public et de la scène, et le statisme de la scène avaient alors une justification théologique et pratique, qui répondait à une structure sociale précise.
38Dans le devenir de nouvelles structures et dans le développement de la pensée scientifico-humaniste de ce siècle, la nécessité d’un théâtre musical vivant dans notre culture est logique.
39À ses débuts, on n’a porté jusqu’à aujourd’hui que peu d’attention. Et il est difficile de comprendre que Ferruccio Busoni qui, par ses voyages et ses rencontres, aurait dû avoir plus d’une occasion de ressentir les symptômes d’une nouvelle réalité théâtrale, fasse à ce point tort à son intuition par ailleurs géniale, en affirmant encore en 1921 : « Renouant avec l’antique mystère, l’opéra devrait prendre l’aspect d’une cérémonie élevée, semi-religieuse et loin de la vie quotidienne ; une cérémonie qui devrait être, dans le même temps, stimulante et divertissante […]. Comme l’Église catholique […], qui sait utiliser musique, costumes et chorégraphies avec intelligence et souvent avec un rare bon goût, pour atteindre un résultat en partie mystique, en partie théâtrale8 ».
III
40C’est entre 1910 et 1913 que Schoenberg composa le « Drama mit Musik » (« Drame avec musique ») La Main heureuse qui, après avoir été représenté à Vienne en 1924 et à Cologne en 1954, mais mal dans ce dernier cas, reste encore ignoré de la scène.
41C’est pourtant le point de départ d’une conception moderne du théâtre musical.
42Naturellement, on la rattache généralement au grand renouveau artistique qui s’est développé à Munich, vers 1912, autour du groupe du Blaue Reiter ; et on se borne en général à considérer le texte dans le cadre de la production typiquement expressionniste.
43L’étiquette est facile et encourage… la paresse de l’interprétation.
44En réalité, on néglige le rapport dynamique entre l’exigence de révolte et de polémique de ce milieu culturel, et les conséquences stylistico-techniques dont Schoenberg sentait la nécessité9.
45Et en effet, dans ce « drame », chant et action mimée alternent et se développent successivement ou simultanément, l’un n’étant pas l’illustration de l’autre, mais chacun caractérisant indépendamment différentes situations.
46On commence ainsi à transgresser le schéma : « Je vois ce que j’écoute, j’écoute ce que je vois », en élargissant l’utilisation de la dimension visuelle et sonore.
47Élément ambivalent, le chœur sur la scène a une fonction double : sonore et purement visuelle, couleur et forme. Dans ce cas, non plus chœur-figurant attendant son tour pour chanter, mais chœur intégré à la mise en scène et transformé en forme, couleur et lumière, dans l’utilisation autonome et symbolique de ces éléments, bien précisée dans la partition.
48Résultat : non un pur jeu abstrait, comme le ballet La Sonorité jaune écrit par Kandinsky en 1912, mais une dynamisation expressive du texte pour les relations instaurées entre les composants scénico-musicaux, utilisés de manière multidirectionnelle10.
49En 1932 Schoenberg laisse inachevé, à la fin du deuxième acte, Moïse et Aaron, opéra en trois actes.
50(À propos de l’idée de cet opéra : il n’y a pas de contradiction schématique entre pensée et action (comme beaucoup le croient), mais la recherche d’une structure sociale : dans ce cas, la référence ne se limite pas exclusivement au peuple juif, mais témoigne tragiquement de la condition allemande désespérée, désormais (1932) presque emportée par le nazisme. Après des années, Schoenberg compose le troisième acte, conséquence tragique du final du deuxième acte : Un survivant de Varsovie.) Pour cette grandiose conception, Schoenberg dut considérer et utiliser une nouvelle dimension spatiale de l’élément sonore, jusqu’alors centralisé dans la fosse et sur la scène.
51Dans la scène I de l’acte I, Schoenberg donne les indications suivantes pour le chœur parlé à quatre et six voix, « Voix du buisson ardent » : « On pourrait disposer les voix derrière la scène, isolées acoustiquement entre elles, chacune étant reliée par téléphone à des haut-parleurs disposés dans la salle, de telle sorte qu’elles ne se réunissent que là11 ».
52Dans son oratorio inachevé L’Échelle de Jacob, Schoenberg avait déjà pensé à l’utilisation de différentes sources sonores dans la salle.
53Dans une note relative à l’idée finale de l’oratorio, il indiquait en 1921 : « D’abord le chœur et les solistes sur scène, puis, peu à peu, et de plus en plus, les chœurs éloignés et les orchestres éloignés, de sorte qu’à la fin, la musique se répande de toute part dans la salle ». (Par chœurs éloignés et orchestres éloignés, Fernchöre et Fernorchester, Schoenberg désigne des chœurs et des groupes orchestraux loin de l’estrade et reliés par des microphones à des groupes de haut-parleurs situés en différents points de la salle.) La perspective centralisée autour d’une source sonore unique (scène et orchestre) était ainsi brisée par l’utilisation possible de différentes sources sonores disséminées en différents points de la salle-théâtre.
54On y trouve facilement un développement actuel des cori spezzati du XVIe siècle.
55(À ce propos, il serait plus que jamais souhaitable d’étudier cette pratique musicale, selon des critères rigoureux, pour analyser le rapport entre conception musicale et réalisation de sources sonores acoustiquement isolées les unes des autres, comme c’était le cas au dôme de Trévise et à San Marco, mais aussi certainement dans d’autres lieux fermés ou en plein air à Venise. Outre la reconstitution de ce rapport obtenu par déduction à partir des partitions musicales et des particularités acoustiques de telle ou telle architecture, il serait nécessaire de réunir des documents, ce que permettrait une recherche aux Archives d’État de Venise12.) Le développement récent de l’électro-acoustique augmente beaucoup les possibilités de réalisation d’une conception spatiale à plusieurs sources sonores.
56On prouve ainsi la vérité de l’intuition de ce qui a été conçu, et on libère encore plus l’imagination créatrice pour de nouvelles expressions d’aujourd’hui, n’en déplaise à ceux qui se lamentent sur le « vide de l’âme » et à ceux qui réduisent la présence humaine en l’identifiant à l’« harmonieuse objectivité matérielle » d’un instrument qu’on fait souvent tourner à vide.
57Lulu, chef-d’œuvre d’Alban Berg, et Il prigioniero, œuvre centrale de Luigi Dallapiccola, où se trouvent déjà des éléments d’un théâtre de situations, représentent les étapes ultérieures de la conception moderne du théâtre que nous connaissons aujourd’hui.
58Presque au même moment, d’autres musiciens donnèrent vie à une expérience particulière, importante non pas tant pour des questions de langage technico-musical que par la modernité des idées et de l’engagement de leur théâtre : Bertolt Brecht en était le cœur.
59Je me réfère ici à Kurt Weill, et en premier lieu à son Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny (1929) ; au Hindemith de L’Importance d’être d’accord (1929) ; au Hanns Eisler de La Décision (1930) ; à Paul Dessau : L’Exception et la Règle (1930), Le Procès de Lucullus (1949), Maître Puntila et son valet Matti (1960).
60Suivant ces deux tendances, le théâtre musical s’est émancipé, dans la première moitié du siècle, de la conception traditionnelle de l’opéra, en participant aux mouvements de renouvellement des structures sociales et artistiques déterminantes de l’époque.
61À la conception essentiellement statico-théologique de l’opéra traditionnel européen (foyer visuel unique ; source sonore unique ; rapport liturgique entre public et scène, le tout déterminé avec rigidité, presque en héritier de la « mécanique céleste » de Newton) se substitue une conception dynamique de relations changeantes (plus grande richesse des dimensions et des éléments de la composition théâtrale ; par suite, élargissement de la capacité active du public ; sources visuelles et sonores possibles et disséminées dans toute la salle ; par suite, libération du rapport spatio-temporel, en héritier non plus de Newton mais tout au plus d’Einstein).
62Des réalisations du théâtre européen se souviennent de ces principes, surtout dans les trente premières années de ce siècle, qui ont ensuite pris ici la forme d’une tragique restauration, ici « bureaucratiquement dégénérée », ailleurs de la folle barbarie nazie.
63À Moscou, Meyerhold pensa « créer un théâtre directement engagé dans les luttes politiques, et qui ne se contenterait pas, comme ceux de Vakhtangov et de Taïrov, de se mettre au diapason de la révolution », comme l’écrit Angelo Maria Ripellino dans son livre extrêmement documenté Maïakovski et le théâtre russe d’avant-garde13.
64« Il proclama donc l’Octobre théâtral : il affirmait qu’il était indispensable de faire passer dans chaque spectacle les luttes et les aspirations de la classe ouvrière. » Quelqu’un peut-il seulement imaginer accuser Meyerhold de pure propagande politique14 ?
65Aux antipodes des constructions statiques du théâtre de Taïrov, véritables coulisses, Meyerhold base son théâtre sur le mouvement de différents éléments, exploitant enfin l’espace tridimensionnel de la scène à l’aide de machines et d’échafaudages automoteurs.
66« Le sens du théâtre ne se trouvait ni dans le cadre, ni dans l’atmosphère, ni dans le discours, ni dans les lumières, mais dans le mouvement : un symbolisme motorique15.» Le parallèle avec la dynamisation expressive de La Main heureuse est évident.
67À la même époque, on élimine le fossé entre public et scène, en portant l’action scénique dans le public, transformé en acteur, à l’intérieur du théâtre comme en plein air.
68– En plein air : théâtre de masse en mouvement et non circonscrit à une place ou à une arène, où le public, se déplaçant sur les grandes places de Leningrad où se développait l’action de L’Assaut du Palais d’Hiver, se transformait en ce déluge humain des grandes journées de la révolution.
69Véritable théâtre d’avant-garde qui, « à partir d’engagements idéologiques prenant la place de l’antique contenu sacré ou mythologique (dans ce cas la sacra rappresentazione), s’insère dans une situation révolutionnaire ».
70– À l’intérieur du théâtre : théâtre dans le théâtre, donc.
71Pirandello, le novateur, qui n’a peut-être pas encore été vraiment compris en Italie, et la grande expérience du théâtre politique de Piscator dans la Berlin de 193316.
72À propos du théâtre dans le théâtre : dans la comédie en trois actes Le Chat botté, écrite par Ludwig Tieck dans les premières décennies du XIXe siècle17, l’action se développe sur la scène et au parterre, où quelques acteurs jouent réellement le public, en commentant l’action scénique, même durant celle-ci, en discutant entre eux et en se querellant sur la signification de cette fable pour enfants. Même l’entracte est déjà composé et inséré par l’auteur dans l’action. On y discute et on y débat justement sur ce qui a été vu et entendu.
73Encore une confirmation de ce phénomène de l’art, selon lequel une tendance particulière surgit une première fois dans le temps, disparaît ensuite, pour représenter, des années plus tard, sa problématique propre à la lumière de nouveaux développements, déterminés par des exigences de structures sociales en devenir.
74(Momente de Stockhausen est peut-être un exemple récent d’une reprise d’éléments qui ont déjà été introduits ou esquissés dans l’histoire des formes ; cette composition comprend l’entrée du chef d’orchestre et les applaudissements du public exécutés par l’orchestre, proposant ainsi une récupération du temps hors de la représentation, comme chez Tieck.)
IV
75Et aujourd’hui ?
76Pour illustrer ce que j’ai dit au début à propos d’un nouveau théâtre musical, d’une participation directe et simultanée dans l’interdépendance d’individualités technico-humaines différenciées (musicien, peintre, poète et metteur en scène), au lieu d’une collaboration a posteriori, j’aimerais évoquer maintenant une expérience récente.
77Au mois de mai de cette année, nous décidâmes avec un groupe d’amis vénitiens de chercher à donner vie, d’une manière ou d’une autre, et sur le plan de l’art, à notre solidarité avec les Espagnols qui se battaient alors par de grandes grèves contre le régime franquiste.
78Nos rencontres furent à l’origine d’un collectif de travail composé d’un peintre, d’un metteur en scène, d’un acteur-homme de lettres, d’un musicien18 et de quelques représentants d’organisations culturelles.
79Il fut décidé tout d’abord, pour des questions de temps, d’utiliser des matériaux visuels et sonores déjà existants, au lieu de les créer nous-mêmes.
80Nous décidâmes de tout réaliser en plein air.
81Sur le Campo San Angelo à Venise, nous devions disposer quatre écrans, avec quatre appareils de projection, et en quatre points différents non symétriques.
82L’élément visuel se divisait en quatre types de matériaux :
- 25 diapositives de Guernica de Picasso – l’original et des études préparatoires ;
- trois documentaires sur l’Espagne, dont un de Buñuel ;
- 40 diapositives de photographies allant de la guerre de 1936 aux dernières grèves de cette année, et des textes poétiques ;
- des diapositives en couleur — rouge, jaune et violet (les couleurs du drapeau de la milice) — avec les titres écrits des chants que nous aurions utilisés au cours de la soirée.
83Quatre groupes de haut-parleurs, reliés à quatre microphones, devaient se trouver en quatre autres points de la place.
84L’élément sonore se divisait comme suit : un speaker donnant des indications historiques par intervalles ; quatre voix lisant alternativement des textes poétiques relatifs à l’Espagne et des chants de la guerre civile et de la nouvelle résistance espagnole.
85Les quatre différenciations de l’élément visuel et sonore, et les quatre sources visuelles et sonores disséminées dans l’espace déterminèrent deux possibilités de réalisation : chaque matériau différencié reste attaché, du début à la fin, à la même source, ou circule dans l’espace.
86Par exemple : les diapositives de Picasso ou les chants sont soit localisés continuellement sur le même écran ou sur le même groupe de haut-parleurs, de manière schématique, soit diffusés successivement ou simultanément par les quatre sources.
87Dans la première possibilité, le rapport espace-temps est bloqué, bloquant tout élément comme dans un théâtre avec un centre focal unique, alors que dans la seconde, ce rapport unilatéral aurait été brisé.
88Pour l’ensemble de la composition, basée sur le choix des éléments-matériaux – et je souligne le terme composition, pour le distinguer de la préparation des matériaux en soi –, il faut choisir entre quatre méthodes différentes.
891. Le metteur en scène fixait, à la table, et dans les moindres détails, la succession et la simultanéité temporelle et spatiale des différents matériaux de l’élément visuel et sonore, ainsi que l’alternance de ces deux éléments.
90C’est-à-dire : fixer si, à un certain moment, on devait projeter une photo de Robert Capa sur l’écran n° 3, ou sur les quatre écrans en même temps ; ou seulement sur un écran, alors que sur les trois autres, on projetait, successivement ou simultanément, une diapositive de Picasso, une photo d’Antonio Machado et un texte de Jesus López Pacheco19.
91Fixer en outre le rapport avec l’élément sonore.
92Dans ce cas, l’exécution-réalisation aurait été aux mains des techniciens.
932. Fixer des points de raccord et de rencontre, les autres étant laissés à l’improvisation du metteur en scène, du peintre, de l’homme de lettres ou du musicien, directement lors de l’exécution, ce qui les obligeait de cette manière à diriger chacun sa propre partie et à réagir immédiatement les uns par rapport aux autres.
94Par exemple : pendant que le documentaire de Buñuel, projeté sur un écran, constituait le point de référence fixe, les quatre autres collaborateurs devaient choisir sur le moment d’autres matériaux visuels et sonores, en rapport avec le documentaire.
953. Fixer l’entrée et les durées visuelles et sonores des différents matériaux, pour que chacun des quatre, agissant en interdépendance, expose les matériaux pendant la durée convenue. Soyons clairs : exposition de matériaux. Il est possible, dans ce cas, que de nouveaux rapports-résultats inédits se créent entre les différents matériaux ; des résultats qui se seraient développés selon une perspective unidirectionnelle s’ils avaient dépendu du choix d’un seul individu au lieu de l’interaction créatrice entre les quatre collaborateurs.
96Il ne s’agit pas ici d’une autogenèse du matériau, mais d’une participation directe et simultanée, qui est action et réaction d’individualités technico-humaines différenciées.
974. Se servir de la méthode illustrée au point précédent, en la considérant non pas comme un résultat final, comme le pensent aujourd’hui les théoriciens de l’œuvre ouverte, mais plutôt comme un moment préliminaire et propédeutique, c’est-à-dire comme un moment d’étude, de recherche et surtout comme une tentative : choisir donc parmi les résultats technico-expressifs ainsi obtenus et les fixer dans une forme précise.
98J’estime personnellement cette dernière méthode authentique pour la conscience créatrice, lorsqu’elle se base sur la collaboration de plusieurs individualités.
99Par rapport à un théâtre fermé, cette réalisation en plein air permettait une plus grande liberté dans la répartition spatiale des différentes sources sonores, mais surtout dans l’utilisation de différentes sources visuelles.
100En effet, dans un théâtre fermé, du moins tel qu’il existe encore aujourd’hui et tel qu’on continue à le concevoir et à le construire, en faisant abstraction des problématiques modernes, sans même tenir compte des indications de Gropius, Molnár et Weininger notamment, dans un tel théâtre donc, il est certes possible d’utiliser l’espace sonore grâce aux nouvelles installations électro-acoustiques qui sont aujourd’hui disponibles, mais l’utilisation de différentes sources visuelles s’avère bien difficile, sinon impossible.
101Difficulté également posée au public, contraint par le lieu et donc contraint visuellement.
102Le Campo San Angelo devait au contraire offrir au public du théâtre en plein air, tel qu’il a été décrit ci-dessus, les possibilités suivantes : élimination des facteurs de discrimination et des rites qui existent encore aujourd’hui, à La Fenice par exemple.
103Il est clair en effet que ce théâtre collectif devrait être offert au public par des institutions publiques ou privées. Et je ne vois pas pourquoi la Biennale, dont les manifestations ont lieu une fois par an, ou tous les deux ans, ne pourrait pas promouvoir un groupe constitué d’un peintre (ou d’un sculpteur), d’un écrivain, d’un musicien et d’un metteur en scène, en vue d’un nouveau type de théâtre en plein air.
104Nous ne voulions aucune chaise sur le Campo San Angelo.
105Le public pouvait entrer dans le spectacle, y circuler, écouter, voir, rester ou s’en aller, sans être contraint ni par le lieu, ni visuellement ; mais le public devait être actif dans ses choix sur ce qui lui était présenté successivement ou simultanément.
106Si l’on songe à la quantité, à la variété et à la complexité du matériau acoustique et visuel que nous absorbons chaque jour psychophysiologiquement, consciemment ou non, et si l’on songe à la puissance de notre capacité gnoséologique de réception de la réalité, même dans la simultanéité, on est contraint de se demander avec étonnement pour quelle raison l’habitude nous conditionne à voir ce que nous écoutons, à écouter ce que nous voyons et à limiter la perspective à un foyer visuel et sonore unique.
107Un exemple qui n’est pas si banal qu’on le pense : la possibilité de suivre en même temps une partie de football à la radio et une partie de basket-ball à la télévision, sans qu’il y ait interférence entre les deux dimensions, visuelle et sonore, qui restent autonomes.
108Si Intolleranza 1960 m’a conduit à collaborer à l’expérience du Campo San Angelo, cette expérience, à son tour, m’a offert de nouveaux arguments qui ont affermi mes convictions quant à un nouveau théâtre musical toujours en devenir. J’oubliais : la réalisation pratique sur le Campo San Angelo fut interdite par le préfet de Venise.
109C’est peut-être, a contrario, une preuve purement politique de la validité de cette expérience culturelle, à laquelle nous n’avons naturellement pas renoncé.
110Le théâtre musical est encore en chemin.
111La nécessité première est : communiquer.
112De nouvelles situations humaines demandent d’urgence à trouver leur expression.
113Plus notre vie risque de se fétichiser par une exaltation technologique, ou de s’abandonner « plaisamment » à une cynique indifférence apolitique, plus il faut méditer dans notre travail cette affirmation de Jean-Paul Sartre : « Et si l’on me donne ce monde avec ses injustices, ce n’est pas pour que je contemple celles-ci avec froideur, mais pour que je les anime de mon imagination et que je les dévoile et les crée avec leur nature d’injustices, c’est-à-dire d’abus-devant-être-supprimés. Ainsi l’univers de l’écrivain ne se dévoilera dans toute sa profondeur qu’à l’examen, à l’admiration, à l’indignation du lecteur ; et l’amour généreux est serment de maintenant, et l’indignation généreuse est serment de changer, et l’admiration serment d’imiter ; bien que la littérature soit une chose et la morale une tout autre chose, au fond de l’impératif esthétique nous discernons l’impératif moral20 ».
114Date : 1962.
115Source : « Possibilità e necessità di un nuovo teatro musicale », in Il verri, 1963, n° IX, p. 59-70 – leçon donnée, sur la base des « Notes pour un théâtre musical actuel », le 27 septembre 1962, sur l’île San Giorgio à Venise, pour le Quatrième Cours international de haute culture contemporaine, organisé par la Fondation Cini.
116Traduction, d’après Contrechamps, 1985, n° 4, p. 55-67.
Notes de bas de page
1 [Nous tenons compte, dans les notes, de certaines différences relevées par De Benedictis et Rizzardi. Ainsi, dans le tapuscrit final, Nono écrit : « Le théâtre musical se propose donc non comme dernier cri selon la thèse exprimée par Niccolò Castiglioni dans l’enquête sur les problèmes de la musique d’aujourd’hui, dans le n° 4 de La rassegna musicale – ce musicien faisant ainsi naître le soupçon, chez lui, d’une mentalité à la Dior assez éloignée d’une conscience critique et créatrice ». Cf. Castiglioni (Niccolò), « Eteronomia dell’eperienza musicale », in La rassegna musicale (volume des « Notes pour un théâtre musical »), 1961, n° XXXI/4, p. 457-458.]
2 [Dans le même cadre du Quatrième Cours international de haute culture contemporaine, le critique d’art Umbro Apollonio évoqua les nouvelles tendances de l’expression contemporaine. Voir « Ipotesi su nuove modalità creative », in Quadrum, 1963, n° 14 ; repris in Occasioni del tempo, Turin, Studio forma, 1979.]
3 [Nono se réfère à « La “belle époque” inattesa », in Tempi moderni, 1961, n° IV/6, p. 24-29 – repris, sous le titre « La “belle époque” inaspettata », in Calvino (Italo), Una pietra sopra, Turin, Einaudi, 1980, p. 70-74.]
4 [Geymonat (Ludovico), Filosofia e filosofia della scienza, Milan, Feltrinelli, 1960. Studi per un nuovo razionalismo (Turin, Chiantore, 1945), Saggi di filosofia neorazionalistica (Turin, Einaudi, 1953) et Galileo Galilei (Turin, Einaudi, 1957) figurent aussi dans la bibliothèque de Nono.]
5 [Della Volpe (Galvano), Crisi dell’estetica romantica e altri saggi, Rome, Samonà & Savelli, 1963 – exemplaire à l’ALN, avec Critica del gusto (Milan, Feltrinelli, 1964) et La libertà comunista (Rome, Samonà & Savelli, 1969).]
6 [Dans le tapuscrit final, Nono écrit : « À noter : nous avons parlé d’“idées objectivement exprimées” dans l’œuvre, et non d’“idéologie”, adoptée consciemment par l’auteur, une idéologie qui, comme le démontre le célèbre cas de Balzac, peut se révéler contradictoire avec les “idées objectivement exprimées” ». Nono est ici au plus près des thèses de l’esthétique marxiste, d’Engels dans la célèbre lettre à Margaret Harkness, et de Lénine dans ses articles sur Tolstoï. Voir Lénine, Écrits sur l’art et la littérature, Moscou, Éditions du progrès, 1978.]
7 [Dans le tapuscrit final, Nono écrit : « (Et Squarzina en a parlé) ». Le metteur en scène Luigi Squarzina participait au Cours international de haute culture contemporaine, à la Fondation Cini de Venise, avec une intervention : « Il paloscenico ideologico degli anni’60 » (« La scène idéologique des années soixante »).]
8 [Busoni (Ferruccio), « Schizzo per una introduzione alla partitura del Dottor Faust con alcune considerazioni sulle possibilità dell’opera » (Berlin, août 1921), in Scritti e pensieri sulla musica, sous la direction de Luigi Dallapiccola, Milan, Ricordi, 1954, p. 82-95 : 88 (exemplaire annoté à l’ALN). Voir aussi Lo sguardo lieto, tutti gli scritti sulla musica e le arti, sous la direction de Fedele D’Amico, Milan, Il saggiatore, 1977, p. 116-130 : 122 – ce texte ne figure pas dans Busoni (Ferruccio), L’Esthétique musicale, Paris, Minerve, 1990.]
9 [Dans le tapuscrit final, Nono écrit : « On y perd de vue certains éléments structurels objectifs, non exclusivement déterminés par une esthétique particulière, mais par une nécessité scénique moderne ».]
10 [Dans le tapuscrit final, Nono écrit : « Aujourd’hui, avec la technique scénique actuelle, il est possible de réaliser complètement cette partition géniale qui attend encore ». Cf. Kandinsky (Wassily), La Sonorité jaune (1912), in Écrits complets, vol. III, Paris, Gonthier-Denoël, 1975, p. 61-71.]
11 [Schoenberg (Arnold), Moses und Aron (1930-1932), Mayence, Schott, 1958, p. 3 (exemplaire annoté à l’ALN).]
12 [« Aux Archives d’État des Frari. Peut-être un thème pour la Fondation Cini », précise le tapuscrit.]
13 [Ripellino (Angelo Maria), Majakovskij e il teatro russo d’avanguardia, Turin, Einaudi, 1959, p. 126 ; traduction française, sous le titre, Maïakovski et le théâtre russe d’avant-garde, Paris, L’Arche, 1965, p. 146.]
14 [« Et ici, il est dit, ajoute Ripellino, que chez Meyerhold, la tendance politique n’étouffe jamais l’autonomie de la forme », donne le tapuscrit final, au lieu de cette phrase, intégrée ultérieurement sous forme manuscrite.]
15 [Füllöp-Miller (Gregor) et Gregor (Joseph), Das russische Theater, sein Wesen und seine Geschichte mit besonderer Berücksichtigung der Revolutionsperiode, Zurich/Leipzig/Vienne, Amalthea Verlag, 1927, p. 49.]
16 [Dans l’avant-dernier tapuscrit, Nono écrit : « (Parmi les rares exemples, dans l’édition italienne, d’ouvrages portant sur des expériences fondamentales du théâtre moderne, il y a la traduction du Das politische Theater de Piscator, dont je suggère la lecture à tous ceux qui souhaitent approfondir ce moment.) ».]
17 [La date de la première représentation du Chat botté de Ludwig Tieck est 1797. Voir ci-dessus.]
18 [Il s’agissait de Luigi Nono (le « musicien »), d’Emilio Vedova (le « peintre »), de Luca Ronconi (le « metteur en scène ») et de Giuliano Scabia (l’« acteur-homme de lettres »).]
19 [D’Antonio Machado, Nono met en musique des Nouvelles chansons, dans « Ha venido ». Canciones para Silvia, et des Chansons à Guiomar, dans Canciones a Guiomar – voir, dans la bibliothèque de Nono, Poesie (Milan, Il balcone, 1947), Poesie (Milan, Lerici, 1959), et Prose (Milan, Lerici, 1968). De Jesus López Pacheco, Nono met en musique Cette nuit dans le deuxième mouvement des Canti di vita e d’amore – voir l’édition bilingue, annotée par Nono, Pongo la mano sobre España, Rome, Editori Rapporti Europei, 1961.]
20 [Sartre (Jean-Paul), Che cos’è la letteratura ? (1948), Milan, Il saggiatore, 1960, p. 150 (exemplaire annoté à l’ALN) ; texte original, Qu’est-ce que la littérature ?, Paris, Gallimard, coll. « Folio/Essais », 1985, p. 69.]
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