Chapitre 8 – La maternité déléguée ou le recours à la parentalité d’appoint chez les mères célibataires en Algérie
p. 123-137
Texte intégral
1Le phénomène des mères célibataires en Algérie est souvent abordé à travers la question de l’enfance abandonnée. Le ministère de la Solidarité avance le nombre de 3 000 mères célibataires par an. Cette évaluation se base sur le nombre des grossesses hors mariage suivies d’abandons des nouveau-nés au sein des institutions de l’enfance (pouponnières). Le ministère de la Santé évoque pour sa part le nombre de 5 000 mères célibataires par an1. Il s’appuie sur les données recueillies au niveau des institutions accueillant des nouveau-nés et sur les données des registres de l’état civil. Les données sur cette catégorie sont difficiles2 à obtenir encore aujourd’hui et les institutions qui en ont la charge ne les rendent pas publiques de manière officielle que ce soit sous la forme de bilans ou de rapports.Seules des déclarations verbales à la presse donnent des indices sur ces dernières. Les seules données officielles sur les mères célibataires datent donc deplus de deux décennies, elles ont été rapportées par la presse à l’occasion d’une réponse de l’ancien ministre de la Solidarité nationale Djamel Ould Abbes à une question orale posée par un député islamiste à l’Assemlée nationale. Ce dernier a annoncé le nombre de 3 000 mères célibataires chaque année. Auparavant, certains articles de journaux arrivaient parfois à fournir des données officielles. À titre d’exemple, en 1977, 33 500 enfants abandonnés sont recensés3. Ils émanent dans leur majorité des mères célibataires. Et en juillet 2006, le quotidien d’Oran publie le nombre de 7 000 enfants nés hors mariage chaque année en Algérie, soit près de 1 % du total des naissances, estimé à 650 000. Il s’agit en réalité du nombre des mères célibataires qui émane d’une étude réalisée dans les trois pays du Maghreb4. Ce chiffre semble moindre par rapport au total des naissances légitimes, mais les risques psycho-sociaux qu’encourent les mères et leurs enfants en raison de leur marginalisation et de l’absence d’une reconnaissance institutionnelle demeurent très lourds. Par ailleurs, dans un décompte que nous avons mené auprès de la Direction de l’action sociale d’Oran (DAS), nous avons relevé que durant deux décennies, de 1984 à 2004, 5 588 mères célibataires ont été recensées, soit une moyenne de 280 mères célibataires par an. Ces dernières années, les services sociaux de la DAS, notamment ceux d’Oran, ont constaté un fait nouveau, celui de la baisse des abandons. De plus en plus de mères célibataires gardent leurs nouveau-nés.Il est clair que l’omerta observée sur la réalité des mères célibataires est liée au caractère tabou du phénomène, car parler des mères célibataires signifie le dévoilement de l’existence d’une sexualité hors mariage et révèle une transgression de l’ordre social culturel et religieux qui régit les relations hommes/femmes. En effet, la réalité des mères célibataires s’inscrit dans un contexte de transformations sociétales et culturelles survenues à l’échelle des personnes et de la société. L’urbanisation rapide aidant, se caractérise par la déségrégation sexuelle continue, la présence de plus en plus nombreuse des femmes dans des espaces desquels elles étaient exclues, espaces publics, corps des professions et métiers exercés par la gent masculine et l’accès des femmes à la formation et aux études plus longues. Ces changements au niveau des représentations et des pratiques sociales, souvent invisibles bousculent en profondeur la situation des femmes et leurs rapports aux hommes et à la famille. Ils sont corroborés par l’enquête nationale « femmes et intégration socioéconomique » menée en 2006 par une équipe de chercheurs du Centre national de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC)5. Ils se traduisent par le recul de l’âge du mariage6 et l’émergence du célibat définitif7 ; la prédominance des familles nucléaires et l’adoption de nouveaux comportements incompatibles avec la morale traditionnelle dont l’un des principaux indicateurs est l’apparition du sentiment amoureux comme élément constitutif du libre choix du conjoint (Adel, 1990 ; Kateb, 2015). Par conséquent, les modes anciens de régulation de la sexualité à travers le mariage précoce et la prise en charge des grossesses extraconjugales chez les femmes veuves ou divorcées8, justifiés par la théorie de « l’enfant endormi »9(Colin, 1998), sont devenus obsolètes. Les familles perdent de plus en plus le contrôle social de la sexualité des femmes et des naissances par le biais du mariage. Et la théorie de « l’enfant endormi » n’a plus de validité sociale ni de légitimité religieuse du fait du certificat de grossesse, un moyen qui permet d’attester scientifiquement la date exacte du début de la grossesse. Ces stratégies de justification, de contournement des pratiques sociales et de dénouement de conflits générés par la transgression des normes sociales ne sont plus opérationnelles. Elles ne constituent plus des facteurs de régulation de la sexualité hors mariage et de résolution et de légitimation des naissances survenues hors du cadre nuptial. Néanmoins, les individus s’ingénient toujours à adopter des stratégies de contournements et d’adaptations face aux contraintes et aux normes édictées par la société et l’exemple le plus édifiant est la reconquête de la virginité par le biais de la chirurgie réparatrice de l’hymen (Rahou, 2013).
Les mères célibataires, une parentalité « hors normes »
2En effet, si actuellement la majorité des mères célibataires abandonne leurs nouveau-nés, certaines d’entre elles assument leurs responsabilités de mères et élèvent seules leurs enfants. Leur existence révèle ces transformations en cours qui travaillent en profondeur les attitudes et les pratiques sociales. En apparence, le problème des naissances hors mariage et des mères célibataires est souvent occulté, cependant il pose avec acuité la pratique d’une sexualité extraconjugale et l’émergence d’une parentalité hors des normes socialement et institutionnellement admises. Par leurs maternités assumées, les mères célibataires remettent en cause les cadres sociaux et normatifs de la reproduction humaine, notamment ceux qui déterminent la filiation et la parenté, dont le mariage. De ce fait, elles bousculent les fondements constitutifs de la famille. Elles sont l’expression d’actes de subversion de l’ordre familial et social, une protestation sociale pour reprendre le terme de Abdelwahab Bouhdiba (1982). D’où nos questionnements : Qui sont ces mères qui élèvent seules leurs nouveau-nés ? Quelles sont leurs stratégies et leurs démarches dans un contexte d’hostilité sociale et de non-reconnaissance institutionnelle ? Le choix d’assumer le rôle de mère en dehors du mariage légal ne pose-t-il pas la problématique du processus d’individuation et d’émergence de l’individu autonome ? Ne révèle-t-il pas l’émergence d’une nouvelle catégorie de familles monoparentales autres que celles qui sont statutairement reconnues, celles des veuves et des divorcées ? L’existence des mères célibataires ne remet-elle pas en question l’institution du mariage en tant qu’unique cadre social, culturel et juridique légal de l’accès à la maternité et à la filiation légitime ? Le fait d’assumer leurs responsabilités de parent seul face à la démission du père géniteur ne participe-t-il pas à la fissuration de l’édifice de la parenté institutionnelle qui ne reconnaît que la filiation patrilinéaire ? Le fait de déléguer la prise en charge de leurs nouveau-nés à de tierces personnes ne participe-t-il pas à élargir et à construire des liens de parentalité au-delà du cercle institué par les liens de filiation ?
3Notre étude se base sur des entretiens approfondis auprès d’une vingtaine de mères célibataires qui ont décidé de garder leurs nouveau-nés. Sept d’entre elles ont délégué le maternage de leurs bébés à de tierces personnes pour une période limitée, le temps d’asseoir leur situation économique et sociale. Leurs trajectoires et leurs vécus révèlent qu’elles n’ont pas choisi d’être mères seules et que leur grossesse est la conséquence de relations amoureuses dont les rapports sexuels n’étaient ni programmés ou prévus ; autrement dit, elle est la résultante d’une pratique de la « sexualité de la dérobade » (Rahou, 1995). Devenues enceintes, les mères célibataires sont conscientes d’avoir transgressé les normes sociales et culturelles dominantes :« J’ai fait une bêtise, j’ai fauté » (Amel) ; « Chkaltha »10 (Sanaâ). Elles font non seulement face à la démission de leurs partenaires dans la prise de responsabilité, mais aussi à l’absence de soutien institutionnel. Hormis quelques associations11 à Alger qui apportent soutien et assistance à un nombre très limité d’entre elles, les structures des services sociaux dépendant du ministère de la Solidarité « Diar Rahma »12 ne prennent pas en charge, de manière spécifique, la mère et son nouveau-né ; la durée d’accueil des mères seules ne doit pas excéder six mois et les délais de réflexion pour reprendre leurs bébés recueillis à la pouponnière varient de deux à trois mois. Passé ce délai, elles sont contraintes à l’abandon définitif13. Pour assumer la garde de leurs enfants, certaines d’entre elles ont recours à la maternité déléguée.
La maternité déléguée ou le recours à une parentalité d’appoint
4Qu’entend-on par maternité déléguée ? Il s’agit du fait que les mères célibataires confient, pour une période limitée, la garde de leur nouveau-né à des personnes, des proches de la famille, souvent des cousines, des sœurs ou leur mère et, à défaut, à d’autres familles ou des nourrices moyennant rétribution. Elles délèguent le maternage à une tierce personne proche ou lointaine jusqu’à que l’enfant ait un certain âge. Une fois, les conditions matérielles réunies– telles qu’avoir un logement indépendant, l’acceptation de l’entourage familial (mère, frère aîné) –, elles reprennent leurs enfants :
« J’ai confié mon bébé à une ancienne amie de ma mère, une dame de confiance qui me l’a gardé durant six ans jusqu’au jour où j’ai pu avoir un toit et le récupérer définitivement. Durant ces années, je venais lui rendre visite quotidiennement, je le faisais sortir au jardin ; j’allais chez des amies » (Aïcha).
5Il s’agit en effet d’un recours à une parentalité d’appoint. Cette parentalité d’appoint n’est pas forcement puisée dans l’entourage familial et parental des mères célibataires, mais peut être sollicitée à travers le réseau relationnel et personnel. En réalité, ces mères célibataires ont pour souci majeur d’assurer le bien-être de leurs enfants. Les personnes à qui elles confient leurs enfants pour le maternage, les soins et l’éducation, remplissent une fonction sociale décisive pour leur projet de vie et celui de leur progéniture. La nature des liens entre ces personnes et les mères célibataires importe peu. Les mères privilégient la disponibilité et la qualité des personnes qui prennent en charge leurs nouveau-nés ou enfants. De ce fait, la maternité déléguée participe à la construction des liens sociaux au-delà du cercle institué par la filiation. Elle fonde et élargit le réseau de la parentalité.
Qui sont ces mères qui délèguent leur maternité ?14
6Les mères célibataires qui ont opté pour cette modalité de maternage et de prise en charge de leur nouveau-né ou de leur jeune enfant sont au nombre de sept (sur les vingt mères célibataires que nous avons interviewées). Elles sont âgées entre 33 ans et 62 ans (au moment de l’entretien). Elles appartiennent à deux catégories, celles de la première génération, socialisées dans les années 1970 et celles des années 1990 et 2000. Leur niveau d’instruction se situe entre le niveau moyen des collèges, le secondaire des lycées et le niveau universitaire, une mère avait le niveau de fin d’études primaires. Au moment de la grossesse, elles exerçaient toutes une activité, cela variait de la femme d’entretien, coiffeuse, professeur à l’exercice d’une fonction libérale sauf pour Hajira (20 ans) qui était jeune fille au foyer. L’âge au moment de la grossesse se situe entre 20 ans et 44 ans. Elles habitaient toutes dans le domicile parental au moment de la grossesse sauf pour l’une d’elles, Abla, qui résidait seule, car travaillant dans une autre ville.
La maternité déléguée, le recours à la solidarité des proches
7Toutes ont bénéficié de la solidarité de certains membres de leurs familles et de leur réseau relationnel. Lors des entretiens, nous constatons souvent que des femmes dans leur environnement familial manifestaient leur soutien. Mais un fait nouveau est observé ces dernières années : nous retrouvons aussi des membres de la gent masculine : « Lorsque j’étais enceinte mon frère m’a aidée financièrement et m’a même aidée pour des démarches au tribunal pour la reconnaissance de mon enfant, mais le père a refusé de reconnaître » (Zohra). En effet, la solidarité de la part des hommes a toujours existé, mais elle n’a pas été souvent ostentatoirement visible. Le témoignage recueilli d’une personne parente à une mère célibataire illustre bien cette pratique de solidarité des hommes :
« À l’époque coloniale, mon cousin a dû déménager de son village et fuir la pression de l’entourage et du qu’en-dira-t-on pour s’installer dans une autre ville lorsque sa jeune sœur est tombée enceinte. Elle a accouché d’une fille et l’a gardée, elle est restée dans le domicile familial jusqu’à son mariage avec un homme veuf » (Fatima).
8Quitter son village et fuir le bannissement exercé par les siens est une pratique des sociétés méditerranéennes (Tillon, 1966), car la sauvegarde de l’honneur est toujours dévolue aux hommes même si dans certains cas, cela semble n’être qu’un artifice :
« Les hommes sont souvent mis au courant, mais font semblant d’ignorer ce qui se passe. Mon frère savait que j’avais eu un bébé à une époque où c’était très sévère, pas comme maintenant, mais il ne le montrait pas et faisait comme s’il ne savait rien du tout » (Rabéa).
9Actuellement, certains hommes de la famille des mères célibataires, notamment celles issues de la deuxième génération témoignent de moins d’hostilités que ceux d’auparavant. À titre d’exemple, Sourour, qui a reçu lors de son accouchement la visite de son frère âgé de 20 ans à la clinique, relate : « Mon frère est venu me voir et a pris la petite dans ses bras et m’a donné de l’argent pour acheter des provisions ». Dans ce contexte, la décision de ces mères célibataires de déléguer la responsabilité de leurs maternités provisoirement, s’inscrit dans une démarche de consolidation de leur situation matérielle afin de mieux assurer la prise en charge de leur nouveau-né. Quatre d’entre elles ont confié leurs nourrissons aux membres les plus proches de la famille (mère, sœur). C’est le cas de Houria qui a confié son bébé à sa sœur aînée qui était célibataire. Cette dernière a avancé à son entourage familial et au voisinage le prétexte qu’elle exerçait la fonction de nourrice à domicile moyennant un salaire mensuel. C’est ainsi qu’elle justifiait le maternage du nouveau-né de sa sœur. Au début, Houria qui avait quitté le domicile parental durant sa grossesse avait le soutien de sa sœur aînée. Elle raconte :
« Lorsque, j’ai accouché, j’ai confié mon bébé à ma sœur célibataire qui au début a dit à mes parents qu’elle le gardait comme nourrice moyennant paiement. Et pour justifier le fait qu’il n’a pas été repris par sa maman, elle leur a dit que la mère travaillait, mais quand la période s’est étalée sur plusieurs mois, elle leur a dit que la maman n’avait plus donné signe de vie. Mais par la suite, elle a fini par dire à ma mère la vérité. Quand mon enfant a grandi un peu, il me ressemblait beaucoup, ils ont fini par le savoir, y compris mon frère aîné qui était marié et qui avait un fils du même âge à peu près que mon fils. Et plus tard, mon frère lui-même s’est chargé de l’élever au même titre que son enfant. Mon fils s’est tellement habitué à lui qu’il l’appelait “abi” papa »15.
10L’exemple de Hajira corrobore ce changement d’attitudes et de comportements de la part des parents à l’égard des mères célibataires de la deuxième génération. Cette dernière n’a pas quitté le domicile parental durant sa grossesse et son nouveau-né vit avec elle, il est élevé par sa mère, mais sans que personne de son entourage et de son voisinage ne sache que c’est le sien. Elles ont prétexté que c’est un orphelin qu’elles ont recueilli : « C’est ma mère qui s’est chargée de l’élever et qui me le gardait pendant mes absences, mon père était au courant ». À ce propos, elle précise que ses parents ont été compréhensifs et l’ont soutenue : « Mes parents se sont connus avant de se marier et ils s’entendent bien entre eux. Ma mère est courageuse, “maâla balhash bal hadra taâ nass, même min ârfûal haqiqa” (elle ne se soucie pas des paroles des gens et même plus tard, quand ils ont su la vérité) ». Cette attitude des parents reflète cette évolution caractérisée par l’émergence de l’autonomie dans la vie du couple vis-à-vis du groupe familial et social. Certes, ces changements profonds dans les pratiques sociales des acteurs sociaux ne sont pas toujours visibles, mais ils transparaissent et se révèlent dans la prise de décision au moment des situations difficiles. Ces changements expriment des attitudes de compréhension et d’adaptation aux situations nouvelles qui caractérisent les relations parents/enfants. Nous décelons ces mutations au niveau de l’exercice des responsabilités du couple conjugal vis-à-vis de leurs enfants et notamment dans ces situations de transgression des normes sociales telles qu’une naissance hors mariage et, à ce titre, le crime d’honneur jadis encouru par les jeunes filles coupables d’une grossesse survenue hors du couple conjugal est une pratique désuète.
11Dans le même sillage du recours à la maternité déléguée, nous avons le cas de Rabéa qui au début de sa grossesse a eu le soutien d’une amie qui résidait en France et qui l’a dissuadée d’avorter. Elle a pu quitter le pays pour la rejoindre. Elle l’a accueillie dès les premiers mois de grossesse chez elle jusqu’à son accouchement. La situation d’éloignement du groupe familial l’a aidée et lui a permis de garder son enfant. Rabéa témoigne de cette période :
« À la naissance de mon enfant, ma mère a annoncé à la famille que je m’étais mariée par Fatiha16 en France. J’ai gardé mon fils jusqu’à l’âge de 3 ans, ensuite je l’ai ramené au pays et je l’ai confié à ma mère qui l’a élevé avec l’aide de mon frère jusqu’à l’âge de 16 ans. Durant cette période, j’envoyais de l’argent chaque mois, et aussi des habits pour mon fils, enfin pour toute la famille. Je venais pendant les vacances d’été et des fois quand je pouvais à l’occasion des fêtes de l’Aïd. Mon fils savait que j’étais sa mère. Et pour l’entourage, le fait de venir sans mari, j’ai expliqué que, ne m’entendant pas avec le père de mon enfant, j’avais divorcé ».
12Ainsi, en plus de la prise en charge des frais inhérents à l’éducation de son fils, elle assurait une aide financière régulière à ses parents. Elle a financé le pèlerinage de son père à la Mecque et a participé à l’achat d’un haûsh, une maison traditionnelle, à ses parents qui vivaient à l’étroit. Et quand son fils a atteint l’âge de 16 ans, elle a décidé de l’emmener vivre avec elle en France et l’a inscrit dans un centre de formation professionnelle. À la question de savoir pourquoi elle a confié la garde de son enfant à sa mère alors qu’il ya, en France, des possibilités de garde de la petite enfance, elle répond : « Je travaillais beaucoup et comme je vivais seule, j’avais peur qu’il grandisse et qu’il dévie du droit chemin. Un enfant a besoin d’un homme dans la maison ». Elle ajoute : « Je voulais le préserver des crises de l’absence du père ». Elle pensait à une autorité masculine pour veiller sur son enfant. À l’âge de 30 ans, Rabéa marie son fils avec une jeune fille qu’il a connue, en organisant « une fête grandiose ». Actuellement, son fils est père de deux enfants. Rabéa, âgée de 62 ans et retraitée, vient souvent chez son fils. Elle s’occupe de temps en temps de la garde de ses deux petits-enfants. Ses parents sont décédés. Elle continue à soutenir financièrement son frère aîné et même son fils participe à cette contribution financière et aide son oncle avec qui il a vécu quand il était enfant. « En fait, il le considère comme son père » (Rabéa). L’expérience de Rabéa nous indique que cette parentalité était d’un apport important et bénéfique pour l’épanouissement de son enfant. Son frère aîné a constitué le référent parental de son fils. À ce propos, elle nous dit : « Al hamdûllah waldi rah radjal17 et grâce à l’aide mon frère, mon fils est devenu un homme, il a beaucoup de qualités qu’il a prises de mon frère aîné ». Ces propos reflètent le sens d’une parentalité comme une mission accomplie. Par son attitude envers sa famille et son frère, Rabéa exprime une loyauté, elle se sent comme une personne redevable d’une dette envers sa famille dont elle doit s’acquitter, plus particulièrement envers son frère qui l’a aidée à élever son enfant dans un contexte social où il n’était pas admis de cautionner et de prendre en charge l’enfant d’une sœur, né de la violation d’un interdit : à savoir un enfant né hors mariage, signe de l’honneur bafoué. Cette attitude reflète aussi son besoin de reconquérir une reconnaissance sociale. Car consciente d’avoir enfreint les règles sociales, Rabéa compense ou répare cette infraction par un dévouement et une solidarité envers ses parents et sa famille. Le regard, les attitudes de certains membres du groupe social au courant de l’absence de filiation paternelle de son fils donc d’une naissance hors mariage18 sont moins hostiles du fait de son indépendance économique et de la réussite sociale de son fils. Pour l’ensemble des mères célibataires interviewées, l’aisance matérielle constitue un facteur de considération majeure.
La maternité déléguée, le recours au maternage rémunéré
13Le recours au maternage rémunéré concerne les mères célibataires qui ont confié leurs nouveau-nés dès la naissance à des nourrices qui se chargent de les élever et de leur prodiguer des soins moyennant une rétribution mensuelle. Il ne s’agit pas d’une garde à la journée, mais de confier le maternage du bébé pour une durée déterminée pouvant s’étaler parfois sur plusieurs années, jusqu’au moment où les mères célibataires réunissent les conditions matérielles adéquates pour reprendre leurs enfants. Notre étude révèle que le recours à cette pratique est le fait de femmes qui ont un niveau d’instruction élevé, exerçant une profession et jouissant d’une autonomie financière. Et pour certaines, ayant eu une grossesse à un âge tardif.
14Elle renseigne aussi que ces mères célibataires issues de la ville d’Oran ont été confrontées aux difficultés engendrées par l’absence de structures spécifiques chargées de l’accueil des mères et de leurs nouveau-nés, en plus des difficultés dues au manque de logement, à la cherté des loyers19 et à la non-reconnaissance institutionnelle de leur statut. Ainsi, celles qui exerçaient une activité professionnelle, ne pouvant pas prendre de congé de maternité pour éviter la stigmatisation sociale, n’ont pas déclaré leur grossesse à l’organisme de sécurité sociale. Elles ont placé leurs bébés dès l’accouchement chez des familles ou chez de tierces personnes tout en subvenant aux besoins nécessaires à la garde et au maternage de leurs enfants. L’élément déterminant, en plus de leur esprit de maturité et de la prise de conscience de leur responsabilité, qui leur a permis de ne pas abandonner leurs nouveau-nés en optant pour la garde rémunérée, a consisté en la possession d’un revenu financier conséquent et régulier. C’est le cas de Fatima et de Nadia. Ces mamans effectuaient des visites périodiques, le week-end ou lors des congés pour celles qui travaillent loin du lieu de résidence des familles d’accueil. D’autres effectuaient des visites quotidiennes. C’est le cas d’Aïcha qui a allaité son bébé après le travail, tous les jours, durant les premiers mois. Nous insistons sur l’importance des conditions matérielles, car elles constituent des éléments structurants dans la trajectoire des mères célibataires (Neyrand, 2004). Nous avons rencontré, en effet, des mères célibataires qui travaillaient, mais qui avaient des salaires insuffisants et non assurés. De fait, quand elles voulaient faire garder leur bébé, elles ne pouvaient pas le faire, faute de ressources suffisantes.
La maternité déléguée, une parentalité compensatrice
15Parmi nos interviewées qui ont mené à bien la prise en charge de leur enfant à distance, l’exemple de Fatima est édifiant. Elle nous explique qu’à la naissance, elle voulait garder son enfant. Le père, un universitaire, s’est désisté et ne voulait pas le reconnaître, mais vivant en famille, elle ne pouvait pas le garder en raison de la présence de son père et de ses grands frères. Selon elle, l’obstacle qui l’a dissuadée de recueillir son enfant à la naissance et de le garder chez elle – et donc de l’élever en tant que mère célibataire –est le sentiment de honte vis-à-vis de son père (Tisseron, 2006). Dans cette situation, la notion de pudeur et de honte avait plus de poids dans la prise de décision. Elle voulait éviter à son père de vivre l’épreuve du déshonneur, celle d’une maternité hors mariage. Et surtout, elle craignait de : « créer un choc pour mon père qui était âgé et un peu malade ». Issue d’une famille aisée, elle exerçait déjà un travail au moment de la naissance de son enfant. Soutenue par sa mère, elle a placé son nouveau-né chez une famille qui l’a élevé jusqu’à l’âge de 13 ans moyennant un salaire mensuel, en plus des achats d’équipements (tel que le lit pour bébé), le lait, la nourriture ; s’ajoutent à cela les dons en nature offerts à la famille et l’achat de denrées alimentaires et de cadeaux à l’occasion des fêtes. À titre d’exemple, au moment de l’apparition de nouveaux appareils électroménagers, Fatima leur a acheté une télévision à écran plasma et leur a installé un climatiseur pour faire face aux chaleurs de l’été. Cette mère célibataire veillait beaucoup au confort de son enfant et aux conditions de vie de cette famille. Ainsi, elle rendait visite périodiquement à son enfant et suivait sa scolarité. Pendant les vacances d’été et les vacances scolaires, elle l’emmenait avec elle en voyage. Entre temps, elle s’est installée à son compte et a acquis un logement personnel. Suite au décès de son père, elle a décidé de reprendre son enfant et de vivre avec lui en compagnie de sa mère. Il était à ce moment-là au collège. Elle déclare que son enfant savait qu’un jour ou l’autre, il allait vivre en sa compagnie. Le secret était maintenu y compris par son enfant (Tisseron, 2011). Elle révèle aussi qu’il était tellement habitué à cette famille qu’il avait du mal à s’en séparer. Depuis son installation chez sa mère, il continuait de leur rendre visite de temps en temps et les considérait comme ses grands-parents : « Il est très attaché à eux et pour moi, pour mon fils, cette famille occupait la place des grands-parents ». Il s’agit en quelque sorte d’une parentalité compensatrice. Pour cette mère célibataire, le décès de son père a été l’occasion décisive pour reprendre son enfant et s’occuper pleinement de lui. À ce propos, elle affirme :
« Au moment de reprendre définitivement mon enfant, je me suis dit, la personne que je craignais et que je respectais le plus et pour qui j’éprouvais de la pudeur c’était mon père, Ba li kûnt nahcham manah, mat, dûrk libqaû maândi alah nahcham manhûm (j’avais honte par rapport à mon père, il est décédé, alors maintenant le reste m’importe peu, je n’ai honte de personne) 20 ».
16Ainsi, confortée dans son statut d’universitaire et jouissant d’une indépendance économique, elle a pu s’émanciper de la pression morale symbolique qu’incarnaient ses frères et aussi l’entourage.
17Dans la même optique, celle d’asseoir sa situation économique pour reprendre la garde définitive de son enfant, Nadia, devenue mère à 44 ans, a placé son nouveau-né chez une famille moyennant une rétribution financière mensuelle. Institutrice de profession, elle disposait de temps libre et des périodes de vacances pour s’en occuper. Elle lui rendait visite régulièrement. Sa famille n’a pas été au courant, à l’exception de sa sœur. Elle a pris une retraite anticipée à 52 ans21, ensuite, elle a attendu trois années et, dès l’acquisition d’un logement dans le cadre du nouveau dispositif de l’accès au logement social participatif (LSP), elle a décidé de le reprendre et de vivre avec son fils âgé à ce moment-là de 11 ans. Elle nous précise : « Par la suite, la famille, l’entourage a appris que j’avais un garçon, mais n’étant pas mariée et vu mon âge, personne n’a trouvé à dire quoique ce soit. Heureusement, j’ai gardé mon enfant, Ana jabtah laâqaibi22 ». Pour Fatima et Nadia, avoir un enfant a été vécu comme l’aboutissement d’une carrière, la réalisation d’un projet de vie qu’elles n’ont pas pu réaliser dans les normes requises. Et dans le cas de la situation de ces mères célibataires, la maternité a constitué la réalisation de ce projet, la conquête d’une existence en tant que sujet où le mariage en tant qu’institution perd sa signification comme l’ultime projet par lequel devrait se réaliser le projet de la maternité. Elle utilise cette expression « Ana jabtah laâqaibi » que beaucoup de mères issues de couples légitimes utilisent en pensant qu’en ayant des enfants, elles ne vivront pas dans la solitude. Or, pour Nadia, avoir un enfant ne s’inscrit pas dans l’optique de l’enfant comme source de revenus ou une assurance vieillesse. Il ressort qu’avoir un enfant, c’est réaliser un désir et aussi compléter un parcours de vie. Il représente aussi un élément constitutif d’une nouvelle identité sociale de mère construite en dehors du couple conjugal légalement constitué. Cette attitude est également observée chez des mères célibataires objet d’une étude en France :
« Amélie déclare qu’elle peut concevoir de ne jamais rencontrer la bonne personne, mais pas de ne pas avoir d’enfant. Maintenant, je sais que ça va être très dur. Mais de toute façon ne pas avoir d’enfant ça va être très dur aussi. […] Moi je suis incapable de vivre sans enfant. Ça, je sais une chose, c’est que je ne vieillirai pas sans enfant. C’est ma seule certitude » (Interviewée dans Gomez, 2013).
Assumer sa maternité célibataire : déconstruire les représentations sur la maternité « illégitime »
18Les mères célibataires, objet de notre étude, vont déployer tous leurs efforts pour réussir l’éducation et l’épanouissement personnel de leurs enfants. Elles s’inscrivent dans la quête de l’excellence, voire dans la performance pour déconstruire les préjugés et les stéréotypes entachant la réalité des mères célibataires comme des personnes « déviantes ». Tout au long de leurs trajectoires, elles veillent au confort, à la scolarité, à l’équilibre et au bien-être de leurs enfants. C’est comme s’il s’agissait d’un pari, d’un défi à relever dans un contexte social et institutionnel défavorable. Il s’agit non seulement de reconquérir un statut social, mais de déconstruire les représentations sur la maternité « illégitime ». Dans ce sens, leur prise de responsabilité d’élever seules leurs enfants va contribuer à réajuster et à redéfinir les visions et les attitudes sociales à leur égard et à l’égard de leurs enfants.
19L’expérience vécue de la maternité par les femmes célibataires devient un processus de reconstruction de soi en tant que sujet dans un contexte où les normes sociales prescrivent au préalable le rôle et la place dans la collectivité. Cette expérience participe de l’exercice de l’autonomie. « Le sujet, l’acteur social cesse désormais d’être considéré comme un “imbécile culturel”, selon l’expression de Harold Garfinkel (Ogien, 2001), tout entier soumis à la détermination du social. Sa définition ne se réduisant plus ni à l’intériorisation des normes et de valeurs par la socialisation, ni à une articulation de rôles et de statuts, il n’en reste pas moins soumis aux contraintes du social. Mais ces contraintes inscrivent son action dans des registres divers qui ne sont pas forcément congruents. D’où il résulte qu’un espace est laissé au jeu de la subjectivité pour élaborer, dans son expérience particulière, la multiplicité des perspectives qui s’offrent à elle » (Jodelet, 2015, p. 30). Néanmoins, cette subjectivité demeure façonnée par les facultés psychologiques acquises lors d’une socialisation, puisant dans de multiples sources ; familiales, sociales et institutionnelles. Une subjectivité qui, en plus, subit les aléas et les contraintes du fait d’être mère élevant seule son enfant. Par ailleurs, un fait qualitatif caractérise les mères célibataires : l’ingéniosité de l’agir ou l’agency (Butler, 2005). Ces mères célibataires veulent rompre avec l’attitude de la fatalité résultant du sentiment de culpabilité et des effets de la stigmatisation. Elles contournent les attitudes de rejet et d’hostilité sociale et aussi celle, de la non-reconnaissance par les pouvoirs publics de leur existence en tant que mères hors du cadre nuptial en utilisant différents subterfuges et stratagèmes pour se construire une nouvelle situation. Elles ont recours au prétexte d’un mariage religieux pour justifier la naissance de leur enfant en organisant comme nous l’a affirmé Amel une cérémonie de Fatiha (Goffman, 1973) ou en cherchant la reconnaissance de la paternité par une autre personne autre que le père biologique non seulement afin d’éviter les effets dévalorisants de la mention (néant ou père inconnu) inscrite sur l’extrait de naissance de son enfant, mais aussi pour parer aux difficultés qu’endurent les mères seules et leurs enfants. Elles ont également recours, comme nous venons de le voir, à de tierces personnes pour le maternage de leurs bébés, une voie de construction d’une parentalité en dehors des liens de sang.
Les mères célibataires et la recherche de la paternité pour leurs enfants
20La filiation maternelle peut être attribuée à l’enfant né hors mariage lorsqu’il est reconnu par sa mère. Mais dans le contexte sociétal et institutionnel algérien, la légitimité de l’enfant revient à la filiation paternelle. Or, pour les mères célibataires, la recherche de paternité n’est pas garantie par la législation algérienne. Elle ne l’est que dans le cadre du mariage valide. L’article 40 du Code de la famille, amendé en 2005 stipule :
« La filiation est établie par le mariage valide, la reconnaissance de paternité, la preuve, le mariage apparent ou vicié et tout mariage annulé après consommation, conformément aux articles 32, 33 et 34 de la présente loi. Le juge peut recourir aux moyens de preuves scientifiques en matière de filiation ».
21L’article 40 du Code de la famille de 1984est demeuré inchangé. Il a juste été complété par une modalité pour appuyer la preuve de cette filiation par le recours à l’expertise génétique (ADN) dans le cadre d’un mariage légitime. La procédure admise au tribunal pour la reconnaissance de la paternité consiste au préalable en l’établissement d’un acte de mariage suivi de la confirmation de la filiation paternelle de l’enfant « ilhaq nassab », qui signifie : « rattachement de la filiation ». Cette procédure est utilisée pour régulariser la filiation paternelle des enfants nés hors mariage en invoquant le motif que le mariage a été célébré par la coutume religieuse Fatiha et que l’enfant est né après la célébration de ce mariage, en s’appuyant sur les témoignages écrits de deux personnes qui attestent avoir assisté à ce mariage par Fatiha.
22La majorité des mères célibataires insistent sur la demande de reconnaissance de la paternité de leur enfant pour prévenir toute stigmatisation et tout problème sur l’origine de leur naissance. Ce souci de préserver leur enfant du rejet et de l’exclusion est tellement fort qu’elles ont recours à des procédures de contournement de la loi. Ce qui dénote de cette capacité d’agir que nous avons mentionnée ci-dessus. À titre d’exemple, une mère célibataire a pu établir la reconnaissance de la paternité par un autre homme de sa connaissance autre que le géniteur moyennant une somme d’argent :
« Je l’ai fait juste pour avoir des papiers pour mon fils, car son père ne voulait pas le reconnaître et aussi pour ma famille, car je leur ai dit que j’étais mariée par Fatiha et que je m’étais séparée, car je ne m’étais plus entendu avec mon mari (ma tfahamnash, talaqt). Je ne voulais pas de cette inscription sur l’acte de naissance de mon fils “néant” (ab majhûl), “père inconnu”, je voulais qu’il ait un nom et que je puisse l’inscrire à l’école sans qu’on vienne lui dire tu n’as pas de père » (Souad, 30 ans).
23Cet exemple nous renseigne sur l’ingéniosité des acteurs et de leurs pratiques et aussi sur la forte volonté d’en découdre avec les obstacles institutionnels encore en vigueur. Pour elles, la gravité de leurs actes de contournement ne réside pas dans la transgression de la législation. Elles pensent beaucoup plus à l’intérêt de leur enfant. Quatre mères célibataires de la première génération dont les enfants ont réussi socialement, dont deux d’entre eux sont devenus cadres universitaires, nous disent que leurs enfants, devenus adultes et sachant les difficultés administratives rencontrées pour l’établissement de la filiation paternelle, ne cherchent plus à effectuer la procédure :
« Ma fille ne cherche plus à entamer les démarches ; elle a rencontré son père qui a accepté de la reconnaître et de mettre en œuvre la procédure, mais par la suite il s’est rétracté, car on lui a dit que la loi allait lui exiger la nafâqa, la pension alimentaire de vingt-cinq années. Alors que ma fille l’a rassuré qu’elle ne lui demanderait rien, aucun sou, juste son nom, mais il a refusé. Maintenant, ma fille est mariée et vit confortablement, elle a un enfant et attend son deuxième » (Aïcha).
24Pour Aïcha, il était important qu’elle dévoile à sa fille qui est son père et qu’elle comprenne maintenant son attitude du refus de la reconnaissance paternelle pour des raisons pécuniaires. Elle souligne :
« Je savais qu’il était incapable d’accepter de faire les démarches, car dès sa naissance, il s’est dérobé et a nié, car il était directeur et avait peur pour son prestige. Ma fille bardat (elle s’est refroidie). Elle sait qui est son père, elle porte toujours mon nom, la reconnaissance paternelle est juste un papier ».
25D’autres propos confirment cet état de fait :
« Ma fille est cadre ingénieur, son mari est aussi cadre ; elle l’a connu dans son travail, il est ouvert et compréhensif, c’est lui qui l’a soutenue et qui l’a encouragée à ne pas s’entêter pour les démarches » (Zohra).
26Il ressort que les cadres sociaux d’une socialisation primaire assurée dans le cadre d’une famille légitime et légale sont compensés par d’autres modalités de socialisation. Et l’apport d’une parentalité autre que filiale et patrilinéaire qui offre protection et bien-être à l’enfant est décisif. (Murard, 2004). De ce fait, la réussite sociale de l’enfant devenu adulte permet d’atténuer les effets de la stigmatisation sociale et le sentiment d’être une personne dévalorisée parce que née hors mariage. Il ressort des représentations et des pratiques sociales des individus que la vision patriarcale appuyée par la caution religieuse et soutenue par la législation en vigueur est malmenée. Les faits suivent d’autres logiques sociales dans un contexte en évolution permanente.
27En effet, la quête de la filiation paternelle au niveau institutionnel est une formalité qui a son poids dans la famille et la société. Même si cette reconnaissance de la paternité n’est suivie d’aucun effet de prise en charge de l’enfant en termes de soins et d’entretien par le père géniteur, elle reste néanmoins, chargée d’une grande importance sociale et symbolique et son absence pose souvent des problèmes administratifs pour l’établissement des pièces d’identité. Certaines mères de la première génération nous ont fait part des réflexions des agents de la police des frontières lors des voyages avec leurs enfants qui leur demandaient l’autorisation paternelle pour la sortie de l’enfant du territoire national et qui se montraient scandalisés par les réponses des mères célibataires : « Je n’ai pas besoin d’autorisation paternelle, car il est inscrit en mon nom » ; la réponse du policier fut : « Alors quoi, il n’a pas de père ? » (Rabéa).
28Actuellement, les choses ont évolué, attestent d’autres mères célibataires, notamment au niveau des agents des aéroports. « Il existe des fonctionnaires compréhensifs et je voyage avec mon fils sans problème » (Fatima). Il semblerait que les attitudes ont évolué grâce aux comportements des mères célibataires plus particulièrement pour celles qui assument leurs responsabilités et qui élèvent seules leurs enfants. Elles n’adoptent plus le profil bas :« Au début, ça me gênait, mais après je présentais les papiers de mon enfant inscrit en mon nom, sans complexe » (Rabéa). Cela est dû aussi à leur situation socioéconomique et à leur aisance puisqu’elles ont les moyens de voyager à l’étranger avec leurs enfants.
La recherche de la paternité, un blocage de la législation
29Le blocage par l’absence d’une législation qui permet la reconnaissance de la filiation paternelle par les géniteurs demeure jusqu’à l’heure actuelle. Depuis 2006, un projet de loi permettant la recherche de la paternité a maintes fois été évoqué à travers la presse écrite et la radio par l’ex-ministre de la Solidarité nationale, Djamel Ould Abbas23, mais il n’a pas pu le mener à terme. Il a soulevé l’hostilité des députés conservateurs et islamistes qui considéraient cette mesure comme une incitation et un encouragement à « la prostitution ». Pourtant ce ministre avait précisé qu’aucune condition n’était soumise au père géniteur mis à part la reconnaissance et l’octroi de son nom patronymique à l’enfant et cela dans l’objectif de protéger cette catégorie d’enfants innocents.
30En 2010, lors d’un débat sur la prise en charge de l’enfance, le problème des enfants nés sous X a été posé au sein de l’Assemblée nationale. Le ministre a annoncé la proposition d’un projet de loi relatif à la détermination de la paternité des enfants nés hors mariage et sa soumission pour examen au cours de la même année au niveau du conseil de gouvernement24. Cela est demeuré sans résultat. En Tunisie, la recherche de paternité par test ADN est reconnue et est appliquée depuis 1999. La loi n° 98-75 du 28 octobre 1998 permet aux mères célibataires de rechercher la paternité de leur enfant. Elle permet à l’enfant d’avoir droit à la filiation du père, d’avoir un nom patronymique et de bénéficier d’une pension alimentaire. La reconnaissance de la paternité passe par l’aveu et le témoignage du géniteur ou par l’expertise scientifique d’empreintes génétiques, depuis 2003 et suite à l’amendement de la précédente loi de 1998 cité ci-dessus, la loin° 51-2003 du 7 juillet 2003 rend le test ADN obligatoire et le refus du père de subir l’examen d’expertise médicale est considéré d’office par le tribunal comme un fait avéré de paternité et l’accorde systématiquement à l’enfant. L’exemple tunisien nous démontre que les changements au niveau de la législation peuvent avoir lieu quand la volonté politique existe.
Les mères célibataires face au déni institutionnel
31Les pouvoirs publics n’accordent aucun soutien ni aide légale ou reconnaissance juridique aux mères célibataires qui assument leurs responsabilités envers leurs enfants, car elles s’inscrivent en dehors du modèle familial monoparental composé de mères veuves ou divorcées. La seule aide officielle est celle de recueillir leurs nouveau-nés en cas d’abandons. Cette attitude exprime un déni institutionnel de reconnaissance de cette catégorie sociale. Un déni qui accentue la vulnérabilité des mères célibataires et de leurs progénitures. Et dont les conséquences participent de leur marginalisation.
32Par cette attitude, les pouvoirs publics s’inscrivent dans le maintien de la logique patriarcale, à savoir la filiation patrilinéaire, mais le paradoxe est que, par ce refus et cette obstruction par la législation, ils refusent en même temps, aux mères célibataires et à leurs enfants, la possibilité de réintégrer le « giron » institutionnel du système patriarcal. Par conséquent, ce système concourt à sa propre fissuration pour ne pas dire son éclatement. Car en fait, les enfants des mères célibataires sont rattachés à la filiation maternelle et ces dernières, quoiqu’en nombre limité, conquièrent, malgré les entraves, une reconnaissance sociétale à défaut d’une reconnaissance juridique. Leur existence témoigne d’une nouvelle parentalité, celle de familles monoparentales autres que celles qui sont composées de mères veuves ou divorcées.
Conclusion
33Les mères célibataires vivant dans un contexte dépourvu d’aides et de soutiens institutionnels et de reconnaissance juridique ont recours à la maternité déléguée en confiant leurs enfants à des parents proches ou à de tierces personnes moyennant une rétribution le temps d’asseoir leur situation socioéconomique. Ensuite, elles reprennent à nouveau leurs enfants. Ces stratégies dénotent de cette capacité d’adaptation où l’enjeu est la recherche et la garantie de l’épanouissement et du bien-être de leurs enfants. Par ces pratiques, elles œuvrent à la construction de liens de parentalité autres que celles définies par les liens du sang et les liens de filiation, déterminés exclusivement par le mariage. Cette capacité est tributaire des possibilités économiques, des ressources financières, mais aussi d’une certaine maturité et d’une prise de conscience de soi en tant que sujet autonome. Ces mères déploient maints efforts pour assumer leurs responsabilités maternelles. Elles s’inscrivent dans un processus de réhabilitation sociale et de quête d’un statut social qui déconstruit les stéréotypes liés aux mères hors du couple marital. Conscientes de leurs démarches transgressives par rapport à la norme sociale dominante, elles témoignent des mutations profondes qui sont à l’œuvre dans la société et démontrent que la maternité et les liens de parenté ne relèvent pas seulement de l’exclusivité des liens du mariage. Elles attestent aussi de l’émergence d’une parentalité plus large en dépit des pouvoirs publics qui veulent continuellement les maintenir à la marge. Une parentalité, dont le processus l’inscrit indéniablement dans une configuration en devenir ; un processus qu’ont connu d’autres sociétés que la nôtre et qui a soulevé également maints obstacles sociaux et juridiques (Fine, 2016).
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10.3917/puf.tisse.2019.01 :Notes de bas de page
1 Intervention du Dr Keddad du ministère de la Santé lors du colloque national sur « l’impact de l’avortement à risque sur la santé et le bien-être des femmes et de la société » organisé à Alger, le 23 avril 2005, par l’Association algérienne de planification familiale.
2 Elles sont soumises à une autorisation des responsables des institutions qui en ont la charge.
3 Voir Bouzeghnane, N. (1980), « L’enfant abandonné- la mère célibataire : un sujet tabou ou une réalité », in El Moudjahid, 12 mars 1980, p. 14.
4 Article signé S.M dans le Quotidien d’Oran du 26 juillet 2006 relatant la journée d’étude organisée à Alger, sur les droits humains de la femme en matière d’accès aux soins.
5 Enquête nationale « femmes et intégration socioéconomique », du CRASC en 2006, commandée par le ministère délégué de la Famille et de la Condition féminine, dirigée par Nouria Benghabrit-Remaoun.
6 29,9 ans pour les femmes et 33 ans pour les hommes selon l’ONS.
7 Le célibat définitif désigne, selon l’ONS, les femmes célibataires âgées de 49 ans et plus, qui ont atteint l’âge limite de la fertilité. Il renvoie plus à la fécondité des femmes qu’à leur statut matrimonial.
8 Dans notre étude de terrain, nous avons rencontré de jeunes femmes divorcées et veuves enceintes en dehors du lien matrimonial légalement institué.
9 Croyance ancestrale qui justifie une grossesse qui se révèle lors de l’absence ou après le décès du mari et dont la gestation du fœtus s’est arrêtée avant de reprendre son développement.
10 Chkaltha, terme en arabe dialectal qui signifie, j’ai dérapé avec une connotation moins grave que les propos « j’ai fauté » des mères célibataires de la première génération des années 1970.
11 Dans les autres grandes villes, les associations d’aide et de soutien sont généralistes et touchent les personnes défavorisées de toutes catégories confondues.
12 Diar Rahma se situe dans la localité de Misserghin à l’ouest d’Oran et dépend du ministère de la Solidarité nationale. Cette structure d’accueil a été construite grâce à un Téléthon organisé en 1994 et a ouvert ses portes en 2003. Elle reçoit des personnes démunies issues de toutes les catégories confondues d’adultes, hommes et femmes ou jeunes filles enceintes sans domicile fixe. Parfois, cette structure accueille pour une période déterminée des mères accompagnées de leurs enfants et non de leurs nouveau-nés. Les jeunes filles enceintes doivent quitter le centre une fois accouchées, elles ont un délai de deux mois, le temps de trouver une solution pour reprendre leurs bébés et durant cette période elles sont séparées de leurs nouveau-nés qu’elles doivent laisser à la pouponnière car dans les textes, ces structures n’ont pas pour mission d’accueillir les mères célibataires avec leurs nouveau-nés. Elles n’ont pas d’infrastructures ni de personnels dédiés à cette catégorie.
13 Les enfants sont, par la suite, placés en kafâla, le recueil légal auprès de parents adoptifs. La kafâla se distingue de l’adoption plénière.
14 Les prénoms des mères célibataires, que nous utilisons ont été modifiés et choisis par les mères elles-mêmes.
15 Abi est un terme de l’arabe classique qui veut dire papa ou mon père, mais qui n’était pas utilisé dans le langage courant des Algériens, cette appellation a commencé à être utilisée avec l’émergence des mouvements islamistes car généralement les Algériens pour dire papa, disaient « Ba, Baba ou Bouya » et dans certaines familles, ils utilisent le terme « papa ».
16 Le mariage par Fatiha est un mariage religieux.
17 « Grâce à Dieu, mon fils est devenu un homme ».
18 Le fils non reconnu par le père porte le nom de sa mère.
19 Le prix des loyers est très onéreux, en plus les propriétaires exigent des loyers payés une année à l’avance.
20 Sur la pudeur et la honte, voir Carmel Cassar (2005) et Didier Drieu et Régine Scelles (2010).
21 Elle a commencé à enseigner à 20 ans, et totalisait 32 ans de service, lui permettant de bénéficier d’une retraite anticipée.
22 « Jabtah laâqaibi », expression qu’utilisent les femmes pour signifier qu’elles ont des enfants pour leurs vieux jours, pas forcément pour un soutien financier. Pour certaines mères célibataires, c’est beaucoup plus pour ne pas vivre et finir seules.
23 Ce ministre, médecin de profession, est actuellement le patron du Front de libération nationale (FLN).
24 Le projet de loi a été déposé au Conseil des ministres.
Auteur
Sociologue, chercheure au Centre national de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC). Ses recherches portent sur les femmes, l’entreprenariat féminin, les mères célibataires et la transgression de l’interdit en parallèle, elle mène des recherches sur la problématique de la santé publique, l’accès aux soins et les inégalités en matière de santé.
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