Chapitre 7 – Une parentalité controversée des mères célibataires au Maroc
p. 109-122
Texte intégral
1Définie comme concept moderne qui renvoie à une réalité ancienne (Légaré, Desjardins, 1992), la monoparentalité demeure encore une notion vaste et ambigüe. Elle est vaste parce qu’elle renvoie à des structures familiales multiformes fondées à l’issue d’expériences diverses (veuvage, divorce, maternité célibataire, séparation conjugale, etc.). Ces diverses structures familiales convergent, selon l’Insee1, vers le fait d’être dirigées par un parent isolé et un ou plusieurs enfants célibataires (n’ayant pas d’enfant). La notion de monoparentalité est ambigüe de par la pluralité des définitions proposées. Pour le cas français par exemple, les définitions varient en fonction des organismes. Selon l’Insee, une famille monoparentale est un ménage qui comprend un parent et un enfant dont l’âge ne dépasse pas 18 ans, vivant seuls sans que le logement soit partagé par d’autres personnes. Si cet organisme privilégie le concept de ménage et de co-résidence, les Caisses d’allocations familiales (CAF) s’intéressent plutôt aux dépenses des familles liées à la présence des enfants dont l’âge est de moins de 20 ans (Bonaïti, 2011). Les familles monoparentales peuvent aussi recouvrir les ménages ou les deux parents vivent séparément pour des raisons professionnelles sans pour autant être séparés au sens du droit civil. Or le critère de la séparation résidentielle n’implique pas forcément le désengagement absolu du parent de ses fonctions parentales auprès de ses enfants. De même pour la cohabitation qui ne renvoie pas systématiquement à des situations où le parent s’investit nécessairement dans la pratique de la parentalité (Algava, 2002).
2En dépit de toutes ces ambivalences, les familles monoparentales remettent en question les modèles familiaux normatifs. Résultant d’un choix délibéré ou d’une contrainte, les situations de monoparentalité témoignent de changements inéluctables au niveau des configurations traditionnelles des rapports familiaux notamment dans des contextes régis culturellement et historiquement par le système patriarcal.
3Au Maroc, les manifestations de ce système patriarcal se traduisent à la fois à un niveau microsociologique (rapports sociaux de sexe, disparités genrées, etc.) (Bourqia, 2015 ; HCP, 2011) et macrosociologique occultant sur le plan statistique (HCP, 2014 ; 2016 ; 2017) et académique (El Harras, 2006 ; CERED, 1996) l’existence de familles monoparentales dirigées par des mères célibataires. En effet, la monoparentalité au Maroc n’est évoquée qu’en référence à des familles dirigées par des femmes dont le statut matrimonial est reconnu juridiquement et statistiquement, en l’occurrence les divorcées, les veuves et les mariées2. Or, de facto, les mères célibataires sont des femmes chefs de familles monoparentales de jure. « Pouvoir dire, en effet, d’une femme qu’elle est chef de famille de jure ou de facto, c’est indiquer, selon Arlène Doumit-El Khoury, que sa situation est, ou n’est pas reconnue juridiquement et statistiquement » (Doumit-El Khoury, 1996, p. 17). La construction statistique et sociale de la catégorie des familles monoparentales au Maroc semble ainsi sous-tendue par des enjeux culturels qui occultent tout ce qui a trait à la transgression des normes en général, et à la reproduction hors mariage en particulier.
4Avec le ou les enfant(s) né(s) hors mariage, les mères célibataires font surgir un modèle familial qui s’écarte de celui de la famille nucléaire « qui faisait coïncider les géniteurs, le couple conjugal et le couple parental, les liens biologiques et les liens sociaux » (Boisson, Verjus, 2004, p. 7). Il s’agit plutôt d’une forme familiale où le parental s’écarte du conjugal. Ce n’est pas l’institution du mariage qui sous-tend l’instauration du lien familial au sein d’une famille monoparentale dirigée par une mère célibataire, mais plutôt les liens de parenté entretenus entre la mère et son enfant. La famille monoparentale dirigée par des mères célibataires est aussi la seule structure familiale définie par la lignée maternelle dans sa dimension juridique (filiation, succession) et sociale (vécu mère/enfant). La prise en charge de l’enfant n’est assurée formellement que par un seul géniteur : la mère.
5Les écrits sociologiques sur la maternité célibataire au Maroc tendent à être focalisés sur une approche individuelle mettant au centre de la réflexion les mères célibataires (Alami M’chichi, Benradi, Houfaidi, 1996 ; Naamane Guessous, Guessous, 2005 ; Cherkaoui, 2010 ; Bousbaa, 2014). Les rapports sociaux marquant la triade père, mère, enfant n’ont pas fait l’objet, jusqu’à présent, d’une étude sociologique approfondie. Nous partons ici du principe qu’une analyse se limitant à l’analyse d’une seule composante de cette triade, sans appréhender la dynamique avec les autres composantes, induit à une compréhension tronquée et partielle de l’expérience de la maternité célibataire.
6Ce chapitre se propose de s’arrêter sur ces aspects non explorés en les examinant à la lumière de la parentalité. Cette notion permet de repenser la monoparentalité sous une perspective multidimensionnelle et de comprendre le système d’organisation des liens intra-familiaux (Mellier, 2015). Qu’est-ce qui caractérise ces liens quand ils s’entretiennent en dehors de l’institution du mariage et de la famille « normative » ? Étant non régulée par la parenté, telle qu’elle est déterminée par les règles sociales, comment la parentalité se pratique-t-elle par les géniteurs et comment est-elle régie juridiquement ? Quels liens entretiennent-ils avec l’enfant conçu hors mariage ? Comment les mères célibataires en tant que dirigeantes de familles monoparentales gèrent-elles leur statut de chef de famille et de parent ?
7Notre propos s’articulera autour des trois axes proposés par Didier Houzel (1999) pour définir la parentalité : « “l’exercice”, qui renvoie à une définition juridique de la parentalité, celle de “l’expérience” d’être parent, qui renvoie plus à un sentiment subjectif, à un lien vécu avec l’enfant » (Mellier, 2015, p. 8) et celle de la « pratique », qui renvoie à la personne qui concrètement prend soin de l’enfant et assure son éducation.
Enquêter sur les mères célibataires : démarche méthodologique
8Les données empiriques sont issues d’une enquête qualitative menée dans le cadre d’une thèse doctorale en sociologie sur les mères célibataires3. Le présent article se veut une analyse axée particulièrement sur la parentalité, un aspect central dans l’expérience de la maternité célibataire, mais que nous n’avons pas assez examiné dans nos travaux antérieurs. Réalisé à Casablanca4, le terrain a été approché par le biais d’entretiens semi-directifs et par l’observation directe et participante. Une triangulation des techniques d’enquête a été nécessaire pour rendre compte du vécu des mères célibataires dans sa complexité tout en préservant sa spontanéité. La chaîne des entretiens semi-directifs a été établie par la méthode de proche en proche en faisant parfois appel à des informatrices-relais5. L’observation directe et participante a été entreprise pour étudier de près les interactions quotidiennes des mères célibataires. La présence prolongée sur le terrain a permis de tisser un rapport de confiance avec les mères célibataires d’où la possibilité de passer de l’observation d’un groupe restreint de mères célibataires dans un espace réduit (les associations) à l’observation d’un groupe plus élargi de mères célibataires comprenant les bénéficiaires et les non-bénéficiaires des associations, et d’accéder à des espaces plus intéressants pour notre analyse, en l’occurrence les quartiers et les lieux d’habitation des mères célibataires.
9En somme, cinquante mères célibataires ont été interviewées appartenant à différentes tranches d’âge (la plus petite avait 14 ans, la plus âgée 41 ans), la catégorie d’âge la plus dominante allait de 20 ans à 30 ans. Hormis celles qui étaient en chômage ou prises en charge par une association, les mères célibataires qui étaient en activité occupaient majoritairement des emplois précaires (ouvrières, aides-domestiques, serveuses, etc.) de par leur analphabétisme et leur bas niveau d’instruction. La grande majorité des enquêtées étaient en situation de monoparentalité (38), certaines avaient dépassé cette situation et avaient d’autres états matrimoniaux au moment de l’entretien (3 mariées, 3 divorcées, 1 veuve et 5 fiancées). La majorité des mères célibataires avaient un seul enfant, seulement cinq mères célibataires étaient multipares. Celles-ci ont toutes été rencontrées en dehors des associations. Le marché de fruits et de légumes de Casablanca, les quartiers et les lieux d’habitation des mères célibataires ont aussi représenté pour nous des terrains à investir permettant de cibler principalement des mères célibataires non bénéficiaires de la prise en charge associative afin de rendre compte de l’expérience de la maternité célibataire au-delà d’une partialité susceptible d’être générée par la sélection préétablie par les associations de leurs bénéficiaires6.
10Des entretiens semi-directifs ont aussi été réalisés auprès d’acteurs qui, de par leur profession ou leur champ d’intérêt, ont un contact avec les mères célibataires (personnel associatif, personnel soignant, juristes, etc.).
11Les entretiens avec les mères célibataires se sont déroulés majoritairement dans leurs demeures, dans des cafés ou des jardins publics. Le guide d’entretien et la grille d’observation s’articulaient autour de plusieurs thèmes dont le but était de comprendre les implications de l’expérience de la maternité célibataire sur le vécu des mères célibataires en s’arrêtant principalement sur les processus d’exclusion et de solidarité et sur leurs manifestations dans les cercles sociaux des mères célibataires (familial, social, associatif, etc.). Le discours visait à rendre compte des représentations et des pratiques des mères célibataires, l’observation était plutôt axée sur les interactions des enquêtées au quotidien avec l’enfant et avec l’entourage social et associatif. Les données recueillies et analysées comprenaient des notes de terrains, des observations spontanées et structurées et les retranscriptions des entretiens avec les enquêtés.
L’exercice de la parentalité
12La monoparentalité des mères célibataires s’inscrit en dehors du cadre juridique prévu pour la famille au Maroc. Cette forme de monoparentalité dérange parce qu’elle rend manifeste un désordre généalogique, remet en cause la patrilinéarité, et témoigne de l’existence de la filiation naturelle7 (Turki, 1998). Associée à la fornication zinâ, au désordre social fitna, à l’interdit religieux harâm, à la honte hchûma (Tinouch-Stucki, 2004 ; Naamane Guessous, Guessous, 2005), cette filiation attribue à une femme qui enfante hors mariage un statut stigmatisant et lui confère un rôle parental brouillé. Elle l’expose même à une éventuelle poursuite judiciaire. La procédure judiciaire peut s’appliquer aux mères célibataires dans deux cas majeurs : si au moment de l’accouchement, elles sont dénoncées auprès des autorités par les structures hospitalières ; ou si la mère décide de porter plainte contre le père biologique présumé. Elle tombe de ce fait sous le coup de l’article 490 du Code pénal, à cause de son aveu devant le juge.
L’enfant conçu hors mariage et ses géniteurs : des rapports régis par le juridique
13Prouvées par un flagrant délit ou par l’aveu8, les relations sexuelles hors mariage exposent à des sanctions pénales comme stipulé dans l’article 490 du Code pénal9. Ce Code ne s’intéresse pas à la grossesse ni à l’enfant né hors mariage. Il a laissé cette charge au Code de la famille (La Moudawana) qui régule les rapports entre l’enfant conçu hors mariage et ses géniteurs. La reconnaissance de la paternité en cas de grossesse illégitime n’est pas une obligation pour le père10. L’enfant de filiation naturelle n’a droit ni à la reconnaissance de paternité ni à la pension alimentaire11. La loi n’oblige pas le père à reconnaître l’enfant naturel, mais lui donne la possibilité de l’istilhak (un aveu de paternité) à tout moment12. L’établissement de la filiation entraîne des empêchements à mariage et crée des droits et des obligations entre le père et l’enfant.
14L’enfant conçu hors mariage est affilié à la mère, en raison du lien naturel qui les unit. La filiation à l’égard de la mère s’établit par le fait de donner naissance, par un aveu de la mère ou par une décision judiciaire. Dans son rapport à la mère, l’enfant naturel a les mêmes droits qu’un enfant légitime. Outre le droit à la filiation et à la pension alimentaire, une mère célibataire assure aussi la représentation légale13 et la garde de l’enfant hadâna14. Elle transmet à l’enfant sa nationalité15 et son héritage, conformément aux règles du droit successoral. La mère a désormais la possibilité de choisir un nom à l’enfant ou lui transmettre son propre nom de famille16 ce qui lui évite le stigmate d’« accouchement sous X ».
De la dimension juridique à la dimension « sociale » de l’exercice de la parentalité
15Les raisons qui sous-tendent le désengagement du père biologique quant à ses responsabilités (juridiques, morales, sociales) demeurent non explorées jusque-là par les chercheurs. Le rapport père/enfant est couramment considéré comme radicalement rompu. La déclaration de la grossesse hors mariage au partenaire est souvent associée à « sa disparition », et à son refus de reconnaître l’enfant. Les données empiriques révèlent, toutefois, que la position du père vis-à-vis à l’enfant n’est pas systématiquement radicale. Les mères célibataires persévèrent afin d’amener le partenaire à reconnaître juridiquement l’enfant. Le contact entre les géniteurs peut être direct ou indirect, entrepris par une médiation informelle ou formelle. La première est menée principalement par les réseaux féminins (sœurs, cousines, tantes, mères, etc.), la deuxième est structurée, assurée par les associations de prise en charge des mères célibataires. L’intervention des assistantes sociales auprès des pères biologiques est décrite comme plus efficace eu égard au cadre institutionnel qui exerce une sorte de violence symbolique sur les pères biologiques. Aussi, l’expérience accumulée par les assistantes sociales les amène à identifier la nature du discours à utiliser auprès des pères biologiques. Ce discours change en fonction du profil de chacun. Il se fond sur un référentiel religieux, des valeurs sociales ou sur l’image de l’enfant « victime » des parents.
16Les pères biologiques refusent l’imbrication socialement et juridiquement établie entre parenté et parentalité, mais choisissent parfois d’exercer leur parentalité de façon officieuse. Ainsi des aides temporaires (argent, vêtements, frais de scolarité, etc.) peuvent être fournies à la mère, notamment aux moments de crises ou pendant les fêtes religieuses. La logique de ces « dons » est différente de celle qui régit la sphère de la parenté (Godbout, 2007 ; Godbout, Charbonneau, Lemieux,1996), étant conçue comme une faveur. La monoparentalité pour le cas des mères célibataires rend ainsi manifeste la fragilité de la pratique de la parentalité en l’absence de lien de parenté. Le rapport père biologique/enfant se réduit à une « parentalité partielle » « limité[e] dans le temps ou sur certains aspects » (Barbe, 2012, p. 1).
17La place du père biologique dans la pratique de la parentalité peut être remplacée par « un père social » (Théry, Leroyer, 2014). Ainsi, des hommes peuvent pratiquer la « fonction parentale », ou quelques-uns de ses aspects auprès de l’enfant. Certains, étant des proches (frères et oncles maternels, conjoint de la mère, etc.), ils ont plus de légitimité à exercer le pouvoir d’autorité auprès de l’enfant ; d’autres (amis, partenaires, voisins) peuvent aussi se mobiliser pour aider la mère et participer aux responsabilités et aux charges propres à l’enfant. Cela ressort des propos de l’une des enquêtées qui témoigne ainsi :
« Je suis avec mon copain17 depuis 4 ans […] il m’aide beaucoup, il me paye le loyer et la puéricultrice. Comme j’avais des problèmes avec mon patron, il m’a demandé de quitter le travail et s’est engagé à m’aider. Et c’est exactement ce qu’il fait. Il me donne l’argent nécessaire pour payer le loyer et répondre à tous mes besoins, il me prend en charge (hazni) » (Karima, 23 ans, mariée, 1 enfant).
18Contrairement à l’image prototype souvent associée à une mère célibataire et à son enfant en tant qu’entité constamment indissociée, la pratique de la parentalité peut être assurée par de tierces personnes qui entretiennent généralement un lien de parenté avec la mère (parents, grands-parents, sœurs, etc.). L’enfant est placé, ne serait-ce que de façon ponctuelle, chez des proches qui assurent les fonctions de soin et d’éducation. Les mères demeurent, toutefois, les principales pourvoyeuses des besoins de l’enfant. Le contact avec ce dernier peut être maintenu sans pour autant être conditionné par la cohabitation.
19L’enfant peut ainsi être « donné »18 officieusement à une personne ou à une famille qui s’occupe de lui. Au cours d’un entretien, l’une des interviewées a relaté sa propre expérience dans ce sens :
« La femme qui s’occupe de ma fille est contente de le faire. Elle considère que c’est un acte de bienfaisance la rapprochant de Dieu […] elle aime ma fille et lui achète tout ce qui lui manque. Maintenant, ma fille ne peut pas passer la nuit loin d’elle. Ma fille ne peut plus vivre dans une chambre, elle s’est habituée à un appartement spacieux où elle peut jouer comme elle veut. Ma fille l’aime beaucoup, elle l’appelle maman elle aussi » (Nawal, 26 ans, ouvrière, 1 enfant).
20Il est important de préciser ici que la mère « adoptive » évoquée par Nawal est une célibataire quadragénaire. Sa décision de prendre en charge la fille était sous-tendue au départ par le désir de venir en aide à Nawal qui venait de quitter l’association de prise en charge et avait besoin de quelqu’un qui s’occupe de sa fille le temps de retrouver un travail. La confiance et l’affinité instaurées au fil du temps ont rapproché les deux femmes, mais aussi la fille qui grandissait, selon Nawal, dans une ambiance « normale » étant entourée par une famille. Les frères de la mère adoptive incarnent auprès de la fille des aspects du rôle paternel. De crainte qu’ils refusent la présence de la fille parmi eux, leur sœur ne les a pas mis au courant que la fille qu’elle s’apprêtait à adopter « officieusement » était « sans père » (ma’andhach bbaha).
21L’unicité des ressources, financières et relationnelles, et la concentration des tâches à accomplir (garde de l’enfant, entretien du foyer, conciliation du travail salarié et du travail domestique) font de la pluriparentalité une alternative permettant à la fois de rester près de l’enfant et de mieux assurer ses charges (Corpart, 2006 ; Marquet, 2010). Elle est aussi une alternative plus supportable à une situation qui s’avérait dichotomique au départ (abandon/garde de l’enfant). En se basant souvent sur un choix rationnel, des mères célibataires préfèrent confier leur enfant à des personnes manifestant le désir de le prendre en charge. Cette prise en charge peut se limiter aux soins et aux charges de l’éducation auprès de l’enfant. Ce fut le cas de Nawal qui s’est engagée à couvrir les besoins économiques de sa fille en ayant désormais plus de temps et de flexibilité pour avoir un emploi. En l’absence de personnes-ressources qui s’occupent « bénévolement » du bébé et dans l’impossibilité de faire appel aux services rémunérés des puéricultrices, une mère célibataire trouve une grande difficulté à décrocher du travail. Dans certaines situations, le ou les parent(s) qui s’occupe(nt) de l’enfant investissent complètement le rôle parental. Le contact de la mère célibataire avec son enfant se limite ainsi dans une dimension affective. Toutefois, ces configurations ne sont aucunement figées. Le degré d’engagement et d’accomplissement du rôle parental d’une mère célibataire peut varier en fonction des différentes phases de la vie. Les besoins d’un jeune enfant et la perception du rôle de sa mère pendant la petite enfance ne sont pas les mêmes quand il commence à grandir.
L’expérience de la parentalité
La conception de l’enfant : entre fatalité et finalité
22La maternité célibataire est souvent présentée comme une expérience dramatique qui chamboule le vécu de la femme enceinte hors mariage (Zirari, Cherkaoui, 2002 ; Ech-Channa, 2000). La grossesse est généralement conçue comme non désirée, résultant de viol, d’inceste et du désengagement du partenaire. Elle trouve son sens dans les conditions précaires des filles19 et dans l’absence d’une éducation sexuelle (Alami M’chichi, Benradi, Houfaidi, 1996 ; Naamane Guessous et Guessous, 2005). Toutefois, la conception de l’enfant hors mariage ne résulte pas toujours d’une fatalité. Une femme peut choisir délibérément de tomber enceinte et de garder l’enfant. Celui-ci peut représenter un enjeu dans le cadre de la relation amoureuse en vue d’amener le partenaire à la formaliser. Parfois, l’enjeu n’est pas le partenaire, mais l’enfant. Atteindre un âge avancé amène des femmes à décider d’avoir un enfant à tout prix, même hors mariage. Elles favorisent leur volonté de jouir de l’expérience de la maternité (avant qu’il ne soit trop tard) bien qu’elles s’inscrivent dans l’illégalité. Entre une parenté « adoptive » et une parenté « naturelle », ces femmes optent pour la consanguinité qui rend le lien à l’enfant indissoluble.
23Hormis le facteur de l’âge, l’enfant hors mariage peut être conçu pour conférer à la mère une raison d’être. Menant une trajectoire marquée par une double précarité, objective (emploi précaire, chômage, migration par nécessité, transferts familiaux obligatoires20), et subjective (familles disloquées, liens sociaux fragilisés, représentation négative de soi, rapports familiaux principalement utilitaires), des femmes décident d’avoir un enfant même hors mariage. Fonder sa propre famille est une façon de s’affirmer par rapport à leur vécu difficile. L’enfant donne sens à leur lutte au quotidien, à leurs efforts, voire même à leur vie. Une mère célibataire ne cherche plus la reconnaissance et la protection auprès des autres. De par sa fonction de mère et son statut de chef de famille, c’est elle, désormais, qui assure la protection à l’enfant. La reconnaissance principale n’est plus chez les autres, mais chez soi. Elle se crée un monde qui se concrétise par la famille formée avec l’enfant. Les autres rapports sociaux (famille, amis, voisins) demeurent nécessaires, mais ne requièrent plus la même importance. L’enfant introduit ainsi une sorte de repositionnement quant à la perception de la mère, de ses liens de parenté : ceux qui étaient auparavant « primaires » deviennent, après l’expérience de la maternité célibataire, « secondaires ».
24Le rapport de la mère avec son enfant semble être déterminé par le contexte général qui a marqué la grossesse (désirée, non désirée, raisons du non-avortement, origine de la grossesse, etc.). Ce rapport peut être marqué par le rejet, notamment juste après l’accouchement. Ce rejet s’opère quand l’enfant incarne aux yeux de sa mère la cause (délitement des rapports sociaux antérieurs, chamboulement de son vécu, etc.) ou la manifestation concrète de « son malheur » (l’enfant issu de viol ou de rapports incestueux). Des mères refusent alors tout échange de contact avec le bébé (regards, allaitement).
25Garder l’enfant n’est pas forcément un choix. L’enfant peut être gardé faute de moyens permettant le recours à l’avortement clandestin21, ou suite à une découverte tardive de la grossesse. L’indécision du partenaire ou ses promesses d’une reconnaissance ultérieure de l’enfant amènent aussi des femmes enceintes hors mariage à garder l’enfant. Le rejet du partenaire, la rupture avec le milieu familial, et la prise en charge médicale marquée par les répercussions du stigmate22 représentent autant de facteurs qui affectent le rapport mère/bébé. Toutefois, ce rapport peut évoluer progressivement pour prendre une forme plus harmonieuse, comme il peut persister amenant à un abandon légal ou sauvage23 ou, dans certains cas, à un infanticide (Tinouch-Stucki, 2004 ; Cherkaoui, 2010). L’abandon légal peut avoir lieu au moment de l’accouchement, suite à un consentement officiel de la mère. Les enfants nés hors mariage se placent dans des institutions pour nouveau-nés abandonnés comme ils peuvent être pris en charge par une famille adoptive dans le cadre de la kafâla24.
26D’autres mères célibataires cèdent aux tentations proposées par des intermédiaires (argent, payement des frais d’accouchement, la promesse de permettre à la mère de maintenir le contact avec l’enfant) ou des personnes exprimant leur désir d’adopter l’enfant (des femmes non mariées, des couples mariés). Comme mentionné plus haut, le désarroi que ressent une femme suite au rejet du partenaire, la crainte d’être expulsée par la famille25, la peur de la stigmatisation sociale et le manque de toute visibilité d’un avenir avec l’enfant précipitent des femmes enceintes hors mariage vers l’abandon, légal ou sauvage, une alternative qui leur permet de retrouver la normalité et d’effacer la transgression commise. Cependant, ces liens se trouvent davantage dissociés quand une mère célibataire décide de garder l’enfant. Une telle décision cristallise le stigmate et le rend persistant sur le long terme comme le révèle le discours d’une enquêtée :
« Il m’est très difficile de reprendre maintenant le contact avec ma famille. Quand je leur ai raconté le problème qui m’est arrivé elle fait allusion à la grossesse hors mariage leur réaction a été très brutale. Ils m’ont imposé d’avorter, je me suis donc enfuie parce que je tenais à mon bébé. Je sais qu’ils ne me pardonneront jamais après ce que j’ai fait » (Khadija, 28 ans, bénéficiaire d’une prise en charge au sein d’une association, 1 enfant).
27C’est au moment de l’accouchement que le risque de l’abandon sauvage de l’enfant s’avère important comme le confirme l’une des assistantes sociales interviewées :
« Il ne faut pas que l’accouchée célibataire reste longtemps à l’hôpital, c’est le moment où elle est très fragile et le plus susceptible d’abandonner son enfant. Il faut la faire sortir rapidement pour éviter l’abandon sauvage à l’hôpital » (AS 1, Femme, 38 ans).
28L’intervention des associations pendant la période du post accouchement est déterminante dans la prise de décision quant à la garde ou l’abandon de l’enfant. L’hébergement assuré et l’accompagnement pendant et après l’accouchement (médical, psychologique, etc.) permettent à une mère célibataire de se ressaisir et aussi de comprendre que son expérience, souvent perçue comme dramatique, est partagée par d’autres femmes qui ont décidé elles aussi de garder l’enfant. En effet, outre le caractère objectif de la prise en charge associative (services assurés auprès des mères célibataires bénéficiaires), une dimension subjective est très intéressante à soulever. Intégrer un groupe où tous les membres portent le même stigmate épargne à la nouvelle arrivante la stigmatisation sociale et favorise une dynamique de solidarité dans le sens large du terme (écoute active, soutien moral et affectif, conseils, échange d’informations, création d’un réseau social, etc.).
29À l’opposé du sentiment de rejet, des mères célibataires entretiennent parfois un rapport fusionnel avec l’enfant marqué notamment par l’hyper-protection. Ces mères se projettent dans l’enfant censé être à l’image de leurs rêves et leurs aspirations non réalisées. L’enfant est conçu comme une récompense divine des troubles endurés avant et après la maternité célibataire. Le lien mère/enfant peut être aussi parfois tendu à cause de la susceptibilité de la mère suite à des facteurs objectifs (conditions de vie difficiles, sur-responsabilités relatives au statut de chef de famille, solidarités défaillantes, etc.) et subjectifs (déception quant au désengagement du père, stigmatisation sociale, etc.). La mère peut ainsi mettre du temps pour s’adapter à son expérience (la maternité célibataire), à son statut (chef de famille monoparentale) et à sa fonction de mère (rapport affectif à l’enfant).
Une perception évolutive de l’expérience de la parentalité
30La conception d’un enfant ne requiert pas toujours la même importance socialement. Conjuguer mariage et reproduction confère à une femme une valeur sociale et lui permet de mieux négocier sa place auprès du conjoint et de la belle-famille (Bourqia, 2015). La reproduction hors mariage, toutefois, expose la mère à la stigmatisation sociale, l’enfant, aussi, se voit attribuer des jugements péjoratifs l’associant au péché et à la malédiction divine. Il représente l’identificateur du stigmate (Goffman, 1975) et rend la transgression visible, d’où la réprobation sociale à son égard et à l’égard de sa mère (Becker, 1985). Une mère célibataire peut être rejetée par la famille et l’entourage social, ses rapports et ses repères habituels se trouvent souvent bouleversés.
31Renouer le lien avec la famille n’implique pas nécessairement une acceptation de l’enfant qui représente la honte et incarne le déshonneur familial (Turki, 1998). Cependant, la réaction de la famille quant à la transgression commise par la fille évolue au fil du temps, son acuité s’atténue progressivement. La réintégration familiale se trouve, parfois, facilitée par l’intermédiaire de l’enfant qui ouvre la voie à plus d’échanges, plus de contacts et, par voie de conséquence, à plus de tolérance familiale. Par l’enfant, le lien social peut se dissocier, se restaurer et se recréer dans de nouveaux cercles sociaux (amicale, voisinage, associatif, etc.).
La pratique de la parentalité
D’une monoparentalité précaire à une mobilisation des ressources
32La monoparentalité renvoie souvent à une expérience qui bascule ou enfonce les familles dans la précarité et la pauvreté (Neyrand, 2005). Les femmes, plus nombreuses à vivre une situation de monoparentalité, se trouvent plus exposées à l’appauvrissement de leurs ménages (Le Bourdais, Damaris, 1986 ; Wright, 1991). Leur position socio-économique et la façon de percevoir et de vivre leur monoparentalité sont étroitement reliées (Neyrand, Rossi, 2004). Numa Murard (2004) affirme dans ce sens que la pauvreté et le manque de ressources représentent les principaux facteurs qui affectent le mode de vie et la nature des relations intra-familiales plutôt que la forme familiale. Eu égard à la précarité de leur profil (niveau bas d’instruction, manque de qualification professionnelle, chômage, etc.), les mères célibataires au Maroc vivent dans une précarité multidimensionnelle (économique, sociale, affective, relationnelle, etc.) dont les retombées se font surtout sentir sur l’enfant.
33Contrairement aux idées reçues, ce n’est pas l’expérience de la maternité célibataire qui bascule « brutalement » les mères célibataires dans la pauvreté. Très souvent, leurs trajectoires s’avèrent antérieurement marquées par un processus de précarité et d’exclusion. Insuffisance de ressources matérielles, liens parentaux distendus ou conflictuels, carences affectives, précarité professionnelle sont autant de manifestations de ce processus. La situation de monoparentalité n’en représente qu’une étape parmi d’autres antérieures marquées aussi par des facteurs socio-économiques défavorables (Bousbaa, 2014). La présence de l’enfant engendre des turbulences dans le vécu d’une femme à qui incombe, socialement26 et juridiquement, l’attribution de la garde avec toutes les responsabilités qui lui sont reliées (soins, charges éducatives, besoins matériels, etc.).
34Les pourvoyeuses des familles monoparentales s’enfoncent généralement dans une précarité plus accentuée après la séparation avec le conjoint (Neyrand, 2005). Toutefois, ce qui rend les conditions des mères célibataires enquêtées particulières est que la précarité de leur vécu se trouve accentuée par la fragilité de leur tissu relationnel. La rupture et la dissociation des liens sociaux antérieurs (famille, proche, amis, etc.) rendent la possibilité de rebondir pour une mère célibataire très difficile. D’où sa tendance à la création, la négociation et l’entretien de nouveaux rapports sociaux susceptibles d’être mobilisables si nécessaire.
35La pratique de la parentalité par les mères célibataires les amène à chercher toutes les ressources pouvant les aider à réorganiser leur existence. Le réseau familial peut être mobilisé dans ce sens bien qu’il soit mis à l’épreuve à cause de la transgression commise par la fille devenue mère célibataire. Les pratiques de solidarité se traduisent notamment pendant les périodes de transition et de crise (perte d’emploi, maladie, accident, etc.). Toutefois, ces solidarités « traditionnelles » s’avèrent ponctuelles et insuffisantes. Majoritairement issues de milieux sociaux modestes, le niveau socio-économique faible des familles des mères célibataires ne permet pas de fournir des aides permanentes.
36Comme mentionné plus tôt, une mère célibataire peut aussi compter sur le soutien des colocatrices, des voisines et des paires vivantes elles aussi une situation de monoparentalité hors mariage, notamment en ce qui concerne l’entretien et la garde de l’enfant. Elle tisse et consolide ses rapports avec les hommes qui l’entourent (voisins, amis, collègues) pour être aidée financièrement aux moments de crise et pour mieux réguler sa présence dans l’espace public. Quand le stigmate de la maternité célibataire est dévoilé à l’entourage social, l’image de la mère célibataire se trouve inéluctablement affectée. Souvent assimilées à des professionnelles de sexe ou à « des filles faciles », les mères célibataires enquêtées rapportent la nécessité d’avoir un homme pour assurer leur protection dans l’espace public. Ce fut surtout le cas des mères célibataires rencontrées au marché de gros des fruits et légumes de Casablanca dont l’une d’elles partage avec nous le témoignage suivant : « Ici si tu n’as pas un homme qui te protège (ykali a’lik) tu deviens une proie facile pour tout le monde ». La quête des mères célibataires de la protection et des ressources dans toutes leurs formes (services, soutien affectif, argent, etc.) auprès des hommes est une façon, selon Numa Murard (2005), de combler un manque non pas de la présence de l’homme, mais plutôt d’un pourvoyeur de ressources et de protection. Un rôle qui s’avère primordial dans les situations de monoparentalité/pauvreté.
Le couple mère/enfant : éléments de vécu
37La non-institutionnalisation du lien de parenté au sein des familles monoparentales dirigées par des mères célibataires a des implications sur la parentalité. On passe d’une configuration traditionnelle fondée sur la coparentalité, où les devoirs et les tâches sont répartis entre les deux géniteurs, à une autre configuration non normative où la mère assure seule l’ensemble des responsabilités vis-à-vis de l’enfant (autorité parentale, garde, entretien, soin, éducation, contribution économique au foyer). La pratique de la parentalité devient alors complexe et pesante pour la mère surtout quand elle est primipare. Accoucher pour la première fois sans pouvoir compter sur le soutien des proches (famille, belle-famille, etc.) rend difficile la pratique de la parentalité. La femme se voit propulsée dans la fonction maternelle sans forcément détenir les compétences nécessaires pour l’exercer, d’où la difficulté à gérer son quotidien et à répondre aux besoins de l’enfant.
38Une mère célibataire se trouve confrontée à la responsabilité de garder l’enfant et à la difficulté de concilier travail domestique et travail salarié. Ses responsabilités et ses charges financières s’alourdissent pour subvenir aux besoins de l’enfant. Une part considérable des revenus des mères va aux puéricultrices et aux crèches, une autre couvre les frais du loyer. Le travail de la mère est souvent conditionné par la disponibilité d’une personne qui garde l’enfant et par la possibilité de pouvoir payer cette personne. Le cas échéant, une mère célibataire est contrainte de trouver d’autres alternatives pour survivre : se dépanner (prêt, épargne, avance sur salaire), mobiliser des solidarités familiales et sociales (paires, voisins, père biologique, etc.), recourir à la prostitution intermittente ou professionnelle, etc.
39Sur-responsabilisation, instabilité professionnelle et insuffisance du revenu de la mère se répercutent inéluctablement sur le vécu de l’enfant en matière de logement, d’habillement, de nourriture, et de qualité d’éducation. Tous ces facteurs poussent plusieurs mères célibataires à la pluriactivité comme recours pour arrondir leur revenu, tout en ayant comme contrainte de trouver un emploi qui offre une flexibilité au niveau des horaires de travail.
Les associations : un soutien professionnel de la parentalité
40L’affaiblissement des solidarités traditionnelles ainsi que l’absence de toute politique sociale destinée aux mères célibataires ont cédé la place à l’intervention des associations travaillant sur la thématique des mères célibataires (Bousbaa, Anbi, 2016). Leur action comprend un ensemble de prestations qui visent à assurer une prise en charge multidimensionnelle aux mères célibataires afin de les soutenir dans l’exercice et la pratique de la parentalité27.
41La prise en charge s’articule autour de trois phases principales. La première consiste en la protection de toute mère célibataire juste avant et après l’accouchement. La deuxième est la consolidation qui se traduit par l’accompagnement social, juridique et administratif de la mère célibataire, et par la médiation auprès du père biologique et de la famille. La troisième phase vise l’intégration des mères célibataires bénéficiaires en facilitant leur insertion professionnelle et leur autonomisation (tamkin). L’autonomisation est décrite comme l’objectif primordial de l’ensemble des services proposés par les associations. Elle vise principalement le renforcement du sentiment de confiance en soi et de la prise de pouvoir sur sa situation. Amener une bénéficiaire à faire des choix, à décider de son sort, à proposer des solutions à ses problèmes, à surmonter son statut de « victime » et à affronter sa culpabilité, sont autant de démarches entreprises par le personnel associatif pour améliorer le vécu mère/enfant.
42Le passage par les associations permet la rencontre de femmes qui partagent toutes l’expérience de la maternité célibataire. En effet, la garde de l’enfant représente une condition sine qua non pour accéder aux associations dont l’action s’articule autour du couple mère/enfant. Outre les prestations assurées aux bénéficiaires, les associations favorisent le « regroupement » des mères célibataires grâce à l’hébergement intra-associatif ou en dehors des associations28. L’échange de contact avec les autres mères célibataires atténue, considérablement, l’isolement et la détresse vécue et diminue le risque d’abandon sauvage de l’enfant. La prise en charge associative favorise la mise en place d’un réseau féminin qui s’entraide mutuellement notamment aux moments de crise (maladie, chômage, absence de moyens financiers, etc.). Ce réseau féminin joue un rôle déterminant dans l’initiation de la femme au « métier de parent » (Boisson, Verjus, 2004) et l’aide à développer ses compétences et ses capacités parentales (allaitement, changement de vêtements, soins prénataux, démarches en cas de maladie, etc.) (Berger, 2003).
Conclusion
43Les familles monoparentales dirigées par des mères célibataires amènent à réfléchir sur la responsabilité de l’État quant à la protection des intérêts des enfants sur le plan juridique et social. La généralisation de l’expertise comme moyen de restauration de la filiation légitime s’avère nécessaire dans un contexte où parenté et parentalité sont indissociables. Une parenté non régulée par les règles communément admises fragilise la pratique et l’exercice de la parentalité, ce qui n’est pas sans répercussion sur le bien-être de l’enfant. Aussi revient-il aux chercheurs de rendre intelligibles les raisons du désengagement des pères biologiques à l’égard de leurs progénitures. Comprendre leurs motivations favoriserait le passage vers une co-parentalité, non « imposée » par le juridique, mais fondée sur des relations interpersonnelles solides et affinitaires. Pérenniser ces relations amène à concevoir la parentalité en termes de processus qui accompagne l’enfant depuis sa naissance jusqu’à l’âge adulte. D’où l’importance de réinterroger toutes les phases de ce processus dans leurs articulations avec le rôle parental des deux géniteurs.
44En dépit de la conjonction de plusieurs supports (institutionnels, traditionnels), la situation des mères célibataires demeure difficile, ce qui rend nécessaire le passage d’une gestion relevant d’actes de charité, de devoir moral, et d’inclinations individuelles, à une gestion institutionnalisée transcrite dans la loi par des politiques sociales.
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Notes de bas de page
1 Institut national de la statistique et des études économiques : https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1936 [consulté le 20 août 2018].
2 Selon le Haut-Commissariat au plan (HCP), près d’un ménage sur six est dirigé par une femme (16,2 %) soit 1 186 901 sur 7 313 806 de l’ensemble des ménages recensés en 2014 (HCP, 2017). 55 % de ces femmes chefs de ménage sont veuves, 14 % sont divorcées et 20 % sont mariées. La proportion de ménages dont le chef est de sexe féminin passe de 11,2 % en 1960, à 15,3 % en 1982 et à 15,4 % en 1994. (CERED, 1996). Elle se stabilise depuis et ne dépasse pas 16,3 % en 2004 et 16,2 % en 2014 (HCP, 2016, p. 4).
3 Intitulée Les formes d’exclusion et de solidarité à l’égard des mères célibataires, cette thèse a été menée sous la direction de Khalil Jamal et a été soutenue en 2014 à la Faculté des lettres et des sciences humaines Ain Chock, Université Hassan II de Casablanca (Maroc).
4 Casablanca a été choisie comme terrain de notre enquête parce qu’elle comprend un nombre élevé de mères célibataires qui ne cesse d’augmenter. En effet, l’effectif total des mères célibataires est passé de 5 040 de janvier 1996 à juin 2002 (Zirari, Cherkaoui, 2002) à 21 135 entre 2003 et 2009 (Cherkaoui, 2010). Cette ville comprend par ailleurs le plus grand nombre d’associations de prise en charge des mères célibataires au Maroc.
5 Pour les informatrices-relais, elles étaient principalement recrutées pour nous mettre en contact avec les mères célibataires non prises en charge par les associations.
6 Multipares, toxicomanes, professionnelles de sexe, quadragénaires, mineures, etc. sont des femmes qui n’accèdent pas, ou qui trouvent une grande difficulté à accéder aux associations de prise en charge des mères célibataires.
7 Dans la Moudawana, deux types de filiations sont distingués. La filiation parentale qui se réalise par la procréation de l’enfant par ses parents. Elle peut être légitime ou illégitime (art. 142). La filiation paternelle, par contre, ne peut s’établir que si l’enfant « d’origine inconnue » est reconnu juridiquement suite à une reconnaissance de parenté ou d’une décision du juge. Cette filiation a des effets légaux tels que l’héritage, elle entraîne les empêchements à mariage et crée des droits et des devoirs entre le père et l’enfant (art. 145).
8 L’article 493 du Code pénal prévoit : « La preuve des infractions réprimées par les articles 490 et 491 s’établit soit par procès-verbal de flagrant délit dressé par un officier de police judiciaire, soit par l’aveu relaté dans des lettres ou documents émanés du prévenu ou par l’aveu judiciaire ».
9 Selon cet article « Sont punies de l’emprisonnement d’un mois à un an, toutes les personnes de sexe différent qui, n’étant pas unies par les liens du mariage, ont entre elles des relations sexuelles ».
10 Le nouveau Code de la famille (2004) a introduit une nouvelle disposition relative à la reconnaissance de la paternité des enfants conçus pendant la période des fiançailles. L’article 156 prévoit la possibilité d’établir la filiation à l’égard du père, en cas de conception d’un enfant au cours des fiançailles.
11 L’article 148 du Code de la famille stipule que « La filiation illégitime ne produit aucun des effets de la filiation parentale légitime vis-à-vis du père ».
12 Le nouveau Code de la famille (2004) a rendu possible aux pères biologiques de reconnaître l’enfant sans être dans l’obligation d’épouser la mère.
13 Selon l’article 235 « Le représentant légal veille sur les affaires personnelles de l’interdit, en lui assurant une orientation religieuse et une formation et en le préparant à s'assumer dans la vie. Il se charge, en outre, de la gestion courante de ses biens. Le représentant légal doit informer le juge chargé des tutelles de l'existence de tous fonds, documents, bijoux et biens meubles de valeur appartenant au mineur, faute de quoi sa responsabilité est engagée. Les fonds et les valeurs mobilières du mineur sont déposés, par ordonnance du juge, dans un compte du mineur ouvert auprès d’un établissement public, en vue de les préserver ».
14 L'article 163 stipule que « La garde de l’enfant consiste à préserver celui-ci de ce qui pourrait lui être préjudiciable, à l’éduquer et à veiller à ses intérêts. La personne chargée de la garde doit, dans la mesure du possible, prendre toutes dispositions nécessaires à la préservation et à la sécurité, tant physique que morale, de l’enfant soumis à la garde, et veiller à ses intérêts en cas d’absence de son représentant légal et en cas de nécessité, si les intérêts de l’enfant risquent d'être compromis ».
15 Conformément à l'article 6 du Code de la nationalité : « Est marocain l'enfant né d'un père marocain ou d'une mère marocaine ».
16 L’article 16 de la loi n° 37-99 relative à l’état civil prévoit que « (…) L’enfant de père inconnu est déclaré par la mère ou par la personne en tenant lieu ; elle lui choisit un prénom, un prénom de père comprenant l’épithète ‘Abd’ ainsi qu’un nom de famille qui lui est propre. ». Une liste de prénoms et de noms patronymiques existe à cet effet auprès de l’officier de l’état civil.
17 L’enquêtée fait allusion ici à un homme autre que le père biologique de son enfant.
18 Terme utilisé par les enquêtées au cours des entretiens. L’une d’elles parle ainsi justement de l’action de donner l’enfant (n’atih, a’tato).
19 Nous citons à titre d’exemple le profil présenté par Soumaya Naamane Guessous et Chakib Guessous (2005) qui porte sur les « petites bonnes ». Ce sont généralement des filles mineures, issues de milieux défavorisés et qui sont placées chez des familles pour accomplir des tâches ménagères. Outre la pénibilité de ce travail, ces filles subissent parfois la violence physique et sexuelle de leur employeur.
20 Les migrantes autonomes à Casablanca avancent souvent comme raison majeure de leur migration le désir d’aider financièrement leurs familles. Une part conséquente de leurs revenus est consacrée aux transferts familiaux (argent, cadeaux, dons, etc.) expliqués en tant que contre-don, altruisme et sacrifice en faveur de la famille (Zouhairi, Bousbaa, 2014).
21 De par la non-légalisation de l’avortement médicalisé, l’avortement s’opère clandestinement à des coûts souvent décrits comme exorbitants par nos enquêtées. En dépit de l’interdiction de l’interruption volontaire de grossesse par le Code pénal, elle est décrite comme une pratique courante. En effet, selon l’Association marocaine de lutte contre l’avortement clandestin, entre 600 et 800 avortements clandestins sont pratiqués par jour à l’échelle nationale.
22 Les structures hospitalières se transforment en des structures où le contrôle social s’exerce formellement et officieusement. Le contrôle est formel quand les autorités sont convoquées pour interroger les mères célibataires parturientes. Il est officieux à travers les pratiques et les attitudes stigmatisantes du personnel soignant (Bousbaa, 2017).
23 L’abandon sauvage se fait quand une mère décide d’abandonner l’enfant sans suivre la procédure légale mise en œuvre dans ce sens.
24 L’adoption usuelle au Maroc (kafâla ) ne correspond pas à l’attribution complète de la filiation à l’enfant adopté, elle ne donne pas de droit à la filiation ni à la succession. La kafâla consiste en un engagement à prendre en charge la protection, l’éducation, et l’entretien d’un enfant abandonné.
25 Bon nombre de nos interviewées déclarent ne pas mettre leurs familles au courant de leur grossesse. C’est le cas surtout des migrantes qui ont quitté le milieu d’origine bien avant leur grossesse hors mariage.
26 Gérard Neyrand parle dans ce sens de processus de monoparentalisation relationnelle précoce à l’enfant qui résulte d’une construction sociale et culturelle des rôles parentaux et qui fait incomber principalement aux mères les charges éducatives et les soins des enfants, même avec la présence des pères qui occupent une position secondaire, voire inexistante (Neyrand, 2005, p. 53). Cette dimension asymétrique entre les parents dans la pratique de la parentalité s’explique par le système traditionnel qui demeure jusqu’alors ancré dans les représentations et les pratiques parentales ; elle trouve son sens aussi selon Gérard Neyrand et Patricia Rossi (2004) dans l’effet de classe. Un décalage existe entre les valeurs familiales véhiculées par les classes les plus aisées en vue de promouvoir l’égalité entre les sexes, notamment en matière de parentalité et les classes populaires marquées par une asymétrisation des places parentales.
27 Accueil, écoute, orientation, hébergement, formation et insertion professionnelle, soutien psychologique, accompagnement et suivi administratif, juridique, médical, médiation auprès du père biologique et de la famille sont autant de composantes de cette prise en charge.
28 Les mères célibataires co-louent, généralement, dans les quartiers avoisinant l’association pour rendre plus facile le déplacement avec l’enfant et épargner les dépenses quotidiennes du transport.
Auteur
Sociologue, elle est enseignante-chercheure au département de sociologie de la Faculté des lettres et des sciences humaines Aïn Chock (Université Hassan II de Casablanca), membre du Laboratoire de recherche sur les différenciations sociales et les identités sexuelles (LADSIS). Ses travaux de recherche portent sur les thèmes de la maternité célibataire, du handicap, des rapports de genre et de la précarité.
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