Chapitre V. Le groupe C de Los Encuentros
p. 73-85
Texte intégral
1La fouille de ce groupe a duré un mois, avec une moyenne de 10 ouvriers. Elle a été dirigée par Dominique Legrand, dont nous utilisons les notes de terrain et les dessins (1978). Deux seulement des 14 structures du groupe ont été étudiées.
2Le groupe C occupe, dans une boucle du Salamá, une terrasse naturelle orientée sud-ouest-nord-est, délimitée sur trois côtés par des pentes assez raides donnant sur la terrasse inférieure, parfois inondée en hiver. Du côté nord, la terrasse, dont l’altitude est sensiblement la même que celle du groupe A, est dominée par les pentes du massif de Santa Apolonia, culminant à 1300 m.
3Quatorze structures ont été relevées ; elles sont réparties sans grande régularité, en deux lignes parallèles suivant le grand axe de la terrasse. La plus importante par ses dimensions, C-8, est au centre ; c’est elle que nous avons choisi de fouiller, ainsi que la structure située le plus à l’ouest, C-1, que certaines caractéristiques distinguaient dès l’abord des autres.
4On peut distinguer dans le groupe C les plates-formes aux murs de soutènement nettement marqués (str. C-2, 4, 8, 9, 12) et les structures basses, au ras du sol, dont les limites sont souvent difficiles à préciser (toutes les autres structures, à l’exception de C-1). La dimension moyenne des plates-formes est de 5 x 7 m.
5Trois opérations ont été entreprises sur le groupe C :
– un puits stratigraphique entre les str. C-4, 5 et
– le dégagement complet de la str. C-8. L’intérieur de la substructure n’a pu être fouillé faute de temps ;
– la fouille complète de la str. C-1.
1/ – Le puits stratigraphique
6De 1,50 x 1,50 m, il n’a pas dépassé 80 cm de profondeur. Trois niveaux naturels ont été rencontrés : une couche humique brun foncé compacte, de 30 cm d’épaisseur moyenne, très riche en tessons ; une couche argilo-sableuse brun clair, irrégulière, qui n’existe que sur les côtés nord et est de la fouille (elle forme sur ce dernier côté une poche profonde) : cette couche a livré un seul tesson. Enfin, le sol stérile de talpetate blanc, qui forme parfois sur le site de petits monticules naturels (l’un d’entre eux a été utilisé pour construire la str. C-1).
2/ – Fouille de la structure C-8 (opération L)
7On s’est efforcé de dégager complètement les murs de cette structure, malgré un volume de déblais considérable, constitués d’énormes galets masquant la base de la construction sur une hauteur de 1 m à 1,80 m. La plate-forme était donc très haute : 2 m au moins.
8La substructure rectangulaire mesure 5,80 x 9,50 m. Son grand axe est orienté 18° à l’ouest du nord magnétique, fait dont nous aurons plus loin l’explication. Le nettoyage de la surface a fait apparaître une plate-forme surélevée, de 4 x 6,25 m, qui devait supporter l’habitation.
9Les pierres constituant les murs de soutènement sont des galets provenant de la rivière ; ils sont parfois de dimension impressionnante (jusqu’à 70 cm de longueur) ; le liant, plus clair dans les six premières assises, devient argileux vers le haut des murs, qui comportent 10 ou 11 assises. Les murs de soutènement reposent directement sur le talpetate.
Fig. 55 - Le groupe C. a/ vu de la colline au sud ; b/ plan du groupe.

Fig. 56 – Plan str. C-8, profils.

Fig. 56 – Plan str, C-8, profils.

10Le côté sud de la substructure a été agrandi en lui accolant une petite plateforme un peu plus basse, large de 90 cm, de construction plus soignée. Cette adjonction est plus tardive, car la base du mur n’atteint pas, comme l’autre, le sol stérile de talpetate (fig. 56). Enfin, un mur conservé seulement sur 50 cm de hauteur, fait de galets plus petits, a été construit parallèlement et à faible distance de la plate-forme annexe. Ce mur, long de 10 m, déborde largement les limites de la str. C-8 vers l’est et vers l’ouest. Peut-être s’agit-il de la partie nord d’une plate-forme, construite entre C-8 et la pente, qui aurait été emportée par l’érosion. Il est curieux toutefois que nous n’ayons trouvé aucune trace des murs ouest et est.
11La str. C-8 est dotée sur sa face ouest d’un escalier saillant, qui est à la fois très long (2,75 m) et très étroit (1,85 m), avec six marches et une sorte de palier intermédiaire. Il est possible que la partie nord de cet escalier ait été détruite, ce qui expliquerait sa disproportion, et aussi sa position décalée vers le sud par rapport à la façade principale avant son agrandissement. Cet escalier est simplement appliqué contre le mur de soutènement, selon une technique de construction assez habituelle à Los Encuentros.
12Deux petites cavités cylindriques ont été mises au jour à la base et au centre du mur est (fig. 57). Il s’agirait d’un silo double ; chacun des puits, de 25 cm de diamètre et 32 cm de profondeur, a un orifice soigneusement revêtu d’une couche d’argile durcie au feu, formant vers l’extérieur un bourrelet au niveau du sol d’occupation. L’utilisation de ces cavités comme silos n’est guère douteuse, mais on peut se demander, compte tenu de leur faible capacité – environ 20 1 chacun – quelle était la nature du produit emmagasiné. S’il s’agissait d’un produit relativement précieux, de graines de cacao par exemple, on comprend mal pourquoi il aurait été stocké à l’extérieur de l’habitation et de plus en arrière de celle-ci, donc hors de toute surveillance.
Fig. 57 – Fouille de la str. C-8. a/ face ouest ; b/détail de l’angle sud-ouest ; c/ silos au pied du mur est.

13Le dégagement de la str. C-8 a donné une quantité impressionnante de matériel ; 90% des quelque 5.000 tessons sont de céramique utilitaire. La quasi totalité est comparable au matériel du groupe A et date donc du Classique tardif. Il y a cependant une vingtaine au moins de tessons préclassiques, mais rien de postclassique.
14Cette opération de nettoyage de la str. C-8 a été si laborieuse que la fouille de la substructure proprement dite n’a pu être entreprise ; nous ne savons donc pas si elle contient des superpositions. Il est certain, en tout cas, que la plate-forme supportait une habitation, faite de matériaux périssables ; la petite plate-forme accolée plus au sud, la str. C-8a, était peut-être aussi une dépendance de C-8, à laquelle on accédait par un simple “pont” jeté sur le couloir étroit.
15Si tout indique que la str. C-8 supportait une habitation, ses dimensions, comme sa position centrale, prouvent qu’il ne s’agissait pas d’une habitation commune ; de plus, elle fait exactement face à la str. C-1 qui, nous le verrons, est le sanctuaire du groupe, alors que les autres structures ont une orientation différente.
Fig. 58 – Plan et profil des silos.

3/ – Fouille de la structure C-1. (Opération M)
16Située à l’extrémité et sur le rebord de la terrasse, cette butte naturelle de sable volcanique blanc, dit talpetate, tranche nettement sur les autres structures du groupe C ; sur ses flancs, plusieurs alignements de pierres étaient visibles, et les habitants du lieu avouaient y avoir trouvé des ossements.
17Les limites du monticule sont assez imprécises, compte tenu surtout du fait que seule une partie des façades est et sud paraît intacte. On peut penser que sa base mesurait environ 8 x 12 m. Le noyau naturel de talpetate était revêtu de murs de galets en gradins, conduisant à une plate-forme également empierrée, de quelque 4 x 4,50 m. L’orientation générale, proche de 20° ouest, est comparable à celle de la str. C-8.
18La façade est présente deux gradins, faits de trois ou quatre assises de galets, qui s’interrompent au centre à l’emplacement où devait être l’escalier ; de celui-ci n’est conservée que la partie haute, avec un angle portant encore son revêtement d’argile. À la base et dans le prolongement de l’escalier, un amas de pierres pourrait indiquer une sépulture.
Fig. 59 – La str. C-1. a/ face ouest b/ face sud.

19La face sud présente également deux gradins, le plus bas dessinant une avancée. L’angle sud-ouest a entièrement disparu.
20La plate-forme supérieure semble avoir été recouverte de pierres selon un axe diagonal, marqué par une rangée de petites dalles verticales sortant du sol ; la fouille prouvera qu’elle délimitait une sépulture.
21D. Legrand a organisé la fouille de la str. C-1 selon un quadrillage irrégulier (fig. 61), basé, au départ, sur l’arrangement des pierres visibles en surface, dont on pouvait supposer qu’elles signalaient des sépultures. Onze rectangles de fouille, C.1 à C.11, ont ainsi été tracés, le plus grand mesurant 1,50 x 2,75 m, le plus petit 1 x 1,50 m. Les rectangles C.1 et C.2 sont au pied de l’escalier, les rectangles C.3, 4 et 5 sur le gradin intermédiaire à l’est et au sud ; les autres rectangles couvrent la plate-forme. Les résultats de la fouille seront décrits dans cet ordre.
Fig. 60 Plan et profils de la str. C-1.

22C. 2 : la sépulture est délimitée par une ligne de pierres nord-sud, et par l’amas de pierres au bas de l’escalier. Le squelette mis au jour à 30 cm de profondeur est réduit au crâne, au bras gauche étendu, à la partie gauche du pelvis et aux deux fémurs brisés. C’est un adulte en décubitus dorsal, orienté sud-nord (même orientation que la str. C-8). Il n’y a pas d’offrande.
23C.3 et C’.4 : un peu au-dessous de la plate-forme et au nord de l’axe de l’escalier, ces deux rectangles n’ont livré que des ossements très dispersés, à faible profondeur (10 à 30 cm), correspondant semble-t-il à un ou deux squelettes. Dans la partie sud, un récipient d’argile contenait une lame d’obsidienne ; deux autres lames étaient disposées à l’extérieur.
24C.4 : immédiatement au-dessous de la plate-forme, un squelette d’adulte en décubitus dorsal, axe nord-sud ; manquent le bas des jambes et le bras gauche. Le bras droit est allongé, avant-bras en pronation. Plusieurs objets sont associés à cette sépulture : les fragments d’une poterie grossière, et deux petits cylindres d’os finement travaillés en guilloché, l’un contre le poignet droit, l’autre (en trois morceaux) contre la mandibule.
25C. 5 : sur la façade sud, à hauteur du deuxième gradin, deux gros galets placés de champ protègent le crâne d’un squelette enfoui à mi-pente, presque à fleur de terre. Il est réduit à sa partie supérieure, le bas du corps n’étant plus qu’une poussière d’os. La position probable est en décubitus dorsal, axe est-ouest ; la tête repose sur le côté droit.
26C. 7 et 8 : c’est la partie sud-ouest de la plate-forme. Deux ollas rustiques, dont une retournée sous une grande pierre, à 70 cm de profondeur, ont été mises au jour en C.7, avec un crâne isolé et quelques côtes. Deux autres poteries proviennent de C.8. Dans ce rectangle apparaît, en diagonale, la limite de la fouille pratiquée par les fossoyeurs dans le talpetate. La partie fouillée contient, à 25 cm de profondeur, des os longs, une calotte crânienne et une clavicule : le squelette a été perturbé. Un peu plus bas, autre amas d’os en désordre et très fragmentaires. Dans la partie ouest du rectangle, deux crânes et des os longs sont accompagnés d’une olla coincée sous de grosses pierres ; un peu plus au nord, ce sont quatre crânes entassés, avec une autre poterie. L’un des crânes semble artificiellement déformé.
27C’.7 : Dans la partie sud-est de la plate-forme, non empierrée, le sol d’argile est encore visible. Deux squelettes en connexion et les restes d’un troisième individu proviennent de ce rectangle. Ce sont des adultes, en décubitus dorsal, orientés à peu près selon l’axe de la structure, tête au nord. L’un de squelettes a ses bras le long du corps ; l’autre a le bras droit replié, main près du crâne, alors que le bras gauche est étendu, avant-bras en pronation (fig. 62). Il ne reste du troisième individu qu’un morceau de crâne contre la jambe droite du premier squelette, et des os longs près du bras droit du second. Il n’y a pas d’offrande associée à ces sépultures.
28C.9 et 11 : cette zone se trouve déjà sur le versant ouest du monticule, hors de l’espace empierré ; elle est limitée, en diagonale, par la paroi de la fosse creusée dans le talpetate, qui dessine un arc de cercle épousant la forme du corps enterré à 45 cm de profondeur. Le squelette d’adulte est en décubitus dorsal, orienté nord-sud ; la tête est sur le côté gauche. Il est incomplet : manquent une partie du bras droit et de la jambe gauche. La fosse a été comblée de blocs de talpetate provenant sans doute du creusement de la fosse, contrairement aux autres qui étaient remplies d’une terre brun clair sablonneuse, assurant aux os une meilleure conservation.
29C.10 (fig. 63) : ce rectangle correspond au centre de la plate-forme. Quatre squelettes plus ou moins complets et deux crânes, tous d’adultes, y ont été mis au jour. Trois des squelettes (No. 1, 2 et 4) sont en décubitus dorsal, dans l’axe du monticule, avec la tête au nord (No. 1) ou au sud (No. 2 et 4). Sur le premier, le bras droit est allongé, avant-bras en supination ; les deux autres ont perdu leur bras droit, mais les bras gauches sont repliés, main à hauteur de l’épaule. La partie centrale de ces deux squelettes a été détruite par une sépulture ultérieure (No. 3) : le corps a été placé dans le fond de la fosse en position assise et repliée, face à l’est, les bras croisés sur la poitrine, mains aux épaules. Trois petits cylindres d’os travaillé, identiques à ceux de la sépulture C.4, étaient associés au squelette No. 4, l’un contre le temporal gauche, un autre sur le front, le troisième sous la mandibule.
30La fouille de la str. C-1 a livré au total les restes d’au moins 22 individus, tous adultes, dont 7 seulement sont plus ou moins complets et en connexion ; 5 autres sont en connexion, mais incomplets ; les 10 derniers (dont 8 crânes) sont très fragmentaires. Le sexe des individus n’a pu être déterminé étant donné le mauvais état général des ossements. On note que les squelettes les plus perturbés sont à très faible profondeur, fait à rapprocher des fouilles récentes entreprises par les habitants du lieu.
31La position des corps en décubitus dorsal, axe du corps nord-sud ou nord-ouest-sud-est, c’est-à-dire orienté comme la str. C-1, est la plus fréquente ; la tête peut être au nord (5 cas) ou au sud (3 cas). Dans un cas, l’orientation est est-ouest. Il n’y a qu’un exemple de position repliée assise, face à l’est ; la sépulture est tardive.
32Les bras sont généralement allongés contre le corps, l’avant-bras en pronation ou en supination. Trois des squelettes ont cependant l’un des bras replié, main à hauteur de l’épaule ; il peut s’agir du bras droit (1 cas) ou du bras gauche (2 cas). Cette position du bras nous paraît spécialement digne d’intérêt : elle ne se rencontre dans notre zone que dans des sépultures du Classique tardif, comme nous avons pu le constater à Chitomax et à El Jocote. Quelle pourrait être la signification de cette position du bras, qui est loin d’être générale, ou même fréquente ? Elle ne semble pas refléter un statut social particulier, puisqu’on la trouve aussi bien dans une sépulture à même le sol, sous une habitation (Chitomax), que dans une sépulture en ciste, à l’intérieur d’une structure cérémonielle (El Jocote). Peut-on en rapprocher le fait que souvent dans les sépultures de cette période, l’un des deux bras manque complètement ? Notons que, chez les Mayas des Basses Terres, la position de la main sur l’épaule (opposée) indique une attitude de soumission, de respect.
33Le mobilier des sépultures de la str. C-1 est pauvre : au total 6 ollas communes, provenant toutes de la partie centrale de la plate-forme, au milieu d’ossements très dispersés. Deux des squelettes portaient des objets de parure : petits cylindres d’os ajourés et finement travaillés. Ces objets sont trouvés à proximité du crâne, à une exception près (au poignet) ; ils n’ont cependant guère la forme d’ornements d’oreille ou de labrets. Peut-être s’agit-il d’éléments de collier. Il est remarquable en tout cas que les 4 sépultures qui se distinguent des autres, soit par la position du bras, soit par la présence des objets d’os, soient groupées dans la même partie de la structure, en haut de l’escalier.
Fig. 61 – Plan de la str. C-1 et des sépultures.

34En résumé, la str. C-1 est une butte naturelle de talpetate aménagée, et utilisée comme monticule funéraire. Les morts y étaient enterrés à même le sol, dans des fosses sommairement creusées, à faible profondeur. Parfois, de gros galets protégeaient le crâne, ou indiquaient en surface la position approximative du corps. Les inhumations pouvaient être simultanées (c’est le cas des individus 2 et 4 du rectangle C.10) ; la plupart du temps elles ont été successives, ce qui explique la destruction partielle des squelettes anciens.
35D. Legrand estime “qu’il y a eu utilisation du monticule comme monument funéraire, et que ce n’est qu’ensuite qu’il fut aménagé et empierré avec terrasse et gradin, peut-être pour perpétuer le culte des morts” (1978 : 54). Pourtant, si l’on superpose les fig. 60 et 61, il est évident qu’il y a entre les amas de pierres en surface et les sépultures découvertes plus bas entre 10 et 80 cm de profondeur, une correspondance assez nette. Je pense que le monticule C-1 a été utilisé jusqu’au bout, à la fois comme “cimetière” et pour le culte des morts ; la partie ouest de la plate-forme aurait sans doute servi à son tour pour les inhumations ultérieures si le site n’avait pas été abandonné au Postclassique, à la suite des invasions mexicaines.
Fig. 62 – Les fosses creusées dans le talpetate sont vidées de leur contenu. On voit ici l’un des squelettes du rectangle C’7, dont le bras droit est replié, main sur l’épaule.

4/ – Conclusion sur le groupe C
36Selon D. Legrand, la str. C-8 “devait avoir un rôle dans l’organisation du petit groupe. Sûrement porter la maison d’un chef de clan et s’intégrer à la vie politico-religieuse du groupe. Le fait que l’escalier principal donne directement sur la str. C-1 par son orientation, structure qui s’est révélée être un monticule à fonction uniquement funéraire, prête à penser que la vie de la petite collectivité s’organisait autour de ces deux pôles, sans oublier bien sûr que celle-ci dépendait, pour les cérémonies religieuses de quelque importance, du groupe central de Los Encuentros” (op. cit : 43).
37Je pense que l’ensemble C peut être considéré comme typique des petits hameaux dispersés autour d’un centre politico-religieux au Classique tardif. Les données fournies par l’étude des str. C-1 et C-8 sont donc particulièrement importantes pour reconstituer l’organisation de ces ensembles d’habitation ; on peut seulement déplorer qu’elles n’aient pas été complétées, faute de temps, par la fouille intérieure de la str. C-8 et par celle d’une ou plusieurs autres structures plus simples.
38Nous avons relevé sur la terrasse 14 structures, dont une exclusivement funéraire, les autres d’habitation. On peut en conclure que ce hameau groupait entre 70 et 100 habitants, nombre relativement élevé qui dépasse celui d’une famille étendue, et indiquerait l’existence d’un groupement de familles apparentées reconnaissant l’autorité d’un chef unique, c’est-à-dire d’un lignage. Nous retrouvons ici les conclusions d’une étude ethno-historique de M.C. Arnauld sur le peuplement préhistorique en Alta Verapaz : “Le lignage est le groupement social qui rend le mieux compte de l’habitat du Classique récent” (1978 : 58).
Fig. 63 – Les sépultures du rectangle C-10.

39Les habitations ne sont pas réparties au hasard, mais selon un plan relativement ordonné : elles forment grosso modo deux rangées de maisons se faisant face et encadrant la structure la plus haute, sans nul doute celle du chef qui occupe la position centrale. Le monticule funéraire se trouve isolé à l’extérieur de cet ensemble, sur le rebord du plateau. Le fait qu’il soit placé exactement en face de la structure principale et qu’il ait la même orientation n’est sans doute pas fortuit : les str. C-8 et C-1 sont véritablement “les deux pôles”, autour desquels s’organisent la vie du groupe et le culte de ses morts.
40L’existence d’une forte hiérarchie à l’intérieur de ce petit groupe n’est pas seulement indiquée par l’importance physique de la demeure de son chef. Les quelque 22 individus inhumés dans la str. C-1 n’ont pas eu droit au même traitement : certains ne sont accompagnés d’aucune offrande ; d’autres ont été enterrés avec une ou deux poteries simples. Deux des squelettes portent de fins ornements d’os travaillé : ils occupent sur le monticule une “place d’honneur”, et nous y verrions volontiers deux des dirigeants successifs du groupe.
41Le monticule funéraire n’abrite que des adultes. Leur nombre, même si on le double pour tenir compte des sépultures qui auraient été détruites avant notre arrivée, ne correspond pas à la mortalité normale d’un groupe d’une centaine de personnes, qui aurait occupé les lieux pendant une période assez longue, comme le prouve l’abondance du matériel céramique, et d’ailleurs tout ce que nous savons du centre cérémoniel A. Il faut en conclure que, même à cet échelon, existait une élite – sans doute le chef du lignage et sa famille – qui seule avait droit aux honneurs funéraires du monticule C.1. Nous ne savons rien, par contre, du rôle réservé après leur mort aux adultes moins favorisés et aux enfants.
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