Ostia. Temple rond (I, XI, 1)
Texte intégral
1Temple de plan circulaire précédé d’une vaste cour, situé à l’ouest du forum et au sud du decumanus maximus (Calza 1925, 144-145 ; Briggs 1930 ; Marini 1998, 82 ; Rieger 2004, 173-214, 301-312 ; Pavolini 2006, 112-113 ; Pensabene 2007, 296-315 ; fig. 6, n° 3). Il s’agit selon toute vraisemblance d’un lieu de culte public, vu ses dimensions. Mis au jour par Petrini entre 1802 et 1804, refouillé par Calza au début des années 1920, il est alors identifié à un temple et interprété comme un Pantheon ou un Augusteum (pour l’histoire des fouilles, Rieger 2004, 173-176). Les chercheurs privilégient actuellement la seconde hypothèse, sur la base des nombreux portraits impériaux retrouvés dans ou à proximité de l’aire sacrée. Pensabene (2007, 297) suggère d’y reconnaître un lieu de culte dédié à la gens Seueriana.
Fig. 6

Carte des lieux de culte publics d’Ostie, de Trajan au milieu du iiie s. : 1. Capitole d’époque hadrienne ; 2. Temple de Rome et d’Auguste ; 3. Temple rond ; 4. Aire sacrée de la Via della Foce ; 5. Temple sur les naualia, attribué aux Dioscures ; 6. Temple de la Place des Corporations ; 7. Aire sacrée des quatre petits temples ; 8. Petit temple républicain ; 9. Temple de Sérapis ; 10. Aire sacrée de Mater Magna ; 11. Temple de Bellone ; 12. Temple du « forum » de Porta Marina ; 13. Temple de Bona Dea (IV, VIII, 3) ; 14. Temple de Bona Dea (V, X, 2) ; 15. Temple (?) de la Place de la Victoire
© DR
Sources épigraphiques
2CIL XIV, 4399 ; Rieger 2004, 311, TR46 ; EDR106396 (Raffaella Marchesini) Base de marbre (120 × 55 × 33 cm), trouvée dans le temple rond.
------ ?
Furiae Sab[iniae---]
Tranquill[inae]
------
« [---] à Furia Sabinia Tranquillina [---] ».
3La base dédiée à l’épouse de Gordien III est datable entre 241 et 244.
4CIL XIV, 4401 ; Rieger 2004, 311-312, TR47 ; EDR106398 (Raffaella Marchesini)
5Base de marbre, trouvée dans le temple rond (les mesures données par Rieger et par EDR ne coïncident pas du tout).
[[ [P(ublio)] Licinio]]
[[ [Corn]elio]]
[[Val[e]riano]]
nobilissimo
Caesare
Ostiens(es)
deuoti.
« À Publius Licinius Cornelius Valerianus, très noble César, les Ostiens qui lui sont dévoués (ont fait) ».
6Cette dédicace au fils aîné de Gallien peut être datée entre 256 et 258.
7Rieger (2004, 312, TR48, TR49) rapporte également au temple rond les inscriptions CIL XIV, 4403 et 4404. Elles ont cependant été trouvées ailleurs (à proximité du Capitole) et rien ne permet de les y rattacher, si ce n’est éventuellement qu’il s’agit de dédicaces à des empereurs tardifs (elles auraient cependant pu être placées ailleurs).
Sources archéologiques (fig. 274-276)
Fig. 274

Plan du temple rond (Top. gen. 1953)
© DR
Fig. 275

Reconstitution du temple rond (Briggs 1930)
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Fig. 276

Temple rond
© DR
8Le vaste espace occupé par le temple rond et la cour qui le précède remplace un édifice antérieur, situé à un niveau inférieur, qui était accessible depuis la basilique, par cinq ouvertures dans le mur est de la cour. Ce complexe antérieur correspondait vraisemblablement à une place à colonnade que certains proposent d’identifier à la crypta et au chalcidicium d’Ostie, attestés par l’épigraphie (Mar 2002, 117-120 ; voir Ep. lat. 2010, 122-124). À la fin de l’époque sévérienne, la colonnade est supprimée, la cour rehaussée et un temple rond construit au sud de celle-ci. La cour (35 × 41 m) est accessible depuis le decumanus maximus mais sa façade ne nous est pas connue ; quatre des ouvertures donnant sur la basilique sont alors supprimées, seule subsiste la porte centrale. La nouvelle cour, pavée d’épaisses plaques de travertin, ne semble pas avoir été pourvue de portiques mais ses côtés latéraux auraient présenté, selon la reconstitution de Pensabene, deux ordres surélevés de colonnes, entre les niches qui rythmaient les parois.
9La cella du temple (diam. 18,30 m) se dresse sur un haut podium (haut. 3,80 m). De plan circulaire, elle comporte sept niches, quatre semi-circulaires et trois rectangulaires, qui devaient abriter des statues. La cella était couverte d’une coupole ouverte en son centre, comme l’attestent, au centre du pavement, les restes d’un dispositif pour l’écoulement des eaux. Deux escaliers en colimaçon, sur les côtés de l’entrée, permettaient d’accéder à la coupole. La cella est précédée d’un ample pronaos décastyle (colonnes en cipollin et chapiteaux corinthiens asiatiques), auquel on accède par un large escalier de 11 marches, bordé d’absides.
10L’architecture « scénographique » du temple rond, précédé d’une vaste cour, a été, de longue date, comparée au Panthéon, mais aussi à des temples de tradition orientale (Asklepieion de Pergame et « temple de Vénus » à Baalbeek ; Pensabene 2007, 296-315).
11La richesse des revêtements en marbre de la cella et des parois de la cour, ou encore des éléments architectoniques du pronaos, pourrait témoigner d’une intervention impériale (Meiggs 1973, 81-82 ; Pensabene 2007, 297, 312). Le temple rond n’en reste pas moins le premier édifice public d’Ostie à réutiliser, en nombre, des éléments architectoniques plus anciens (certains d’entre eux provenant selon toute vraisemblance de la place à portique que remplace le temple).
12Une série de têtes colossales d’empereurs, appartenant à des statues qui pouvaient mesurer jusqu’à 3,50 m de haut, ont été retrouvées dans le temple, dans la cour ou à proximité, dès les fouilles menées par Petrini en 1804 (Rieger 2004, 173-214, 306-311 ; Pensabene 2007, 297). Le lieu exact de découverte n’est malheureusement que rarement documenté mais plusieurs savants rapportent ces statues au temple rond et suggèrent ainsi de l’identifier à un Augusteum ou lieu de culte de la gens Seueriana (Pensabene 2007, 297). Les statues d’empereurs antonins auraient, selon Rieger, appartenu à l’édifice antérieur au temple rond et à sa cour (qu’elle identifie également à un lieu de culte impérial). Pensabene observe toutefois que certaines de ces statues au moins doivent, sur la base de critères stylistiques, être datées de la fin de l’époque sévérienne. Elles auraient eu leur place dans un temple consacré à la famille sévérienne, puisque les Sévères se présentaient et s’auto-légitimaient, par le biais d’une parenté fictive, dans la lignée des Antonins (les tentatives de Rieger de les dater du iie s. semblent, relève Pensabene, conditionnées par sa volonté de les rattacher à l’édifice antérieur au temple).
13Voici la liste des portraits repris par Rieger (qu’on consultera pour davantage d’informations), avec les lieux de provenance, quand ils sont connus, et les datations fournies par elle et, en cas de discordance, par Pensabene (ne sont pas repris ici ses n° TR35-36-37-40-41, trouvés durant les fouilles Petrini, dans des lieux identifiés qui ne correspondent pas au temple rond) :
Rieger 2004, 306, TR27, fig. 170 : tête colossale de Trajan (haut. 85 cm avec le cou), trouvée dans le temple rond ou sur le forum. Datation : époque de Trajan.
Rieger 2004, 307, TR28, fig. 171 : tête colossale de Trajan (haut. 63 cm avec le cou), trouvée dans le portique du temple rond. Datation : règne d’Hadrien, selon Rieger. Pensabene (2007, 297) signale que le style permet une datation tardo-sévérienne (à la différence du portrait précédent, contemporain de l’empereur).
Rieger 2004, 307, TR29, fig. 172 : buste idéalisé de Plotine ou Matidie (haut. 30 cm), trouvé dans le temple rond ou dans la basilique. Datation : fin du règne d’Hadrien-début du règne d’Antonin.
Rieger 2004, 307, TR30, fig. 173 : tête colossale d’Hadrien (haut. 64 cm avec le cou ; type Chiaramonti 392), trouvée dans le temple rond. Datation : règne d’Hadrien. Selon Pensabene (2007, 297), le style de ce portrait renvoie plutôt à l’époque tardo-sévérienne.
Rieger 2004, 307-308, TR31, fig. 174 : tête colossale d’Antonin le Pieux (haut. 42 cm), trouvée à l’ouest du Capitole, peut-être dans le temple rond. Datation : milieu du iie s.
Rieger 2004, 308, TR32, fig. 175 : tête de Domitia Lucilla (haut. 34 cm), trouvée à l’ouest du forum.
Datation : époque antonine.Rieger 2004, 308, TR33, fig. 180a-b : tête colossale d’Alexandre Sévère (haut. 59 cm avec le cou), trouvée dans la zone du temple rond (?). Datation : époque sévérienne tardive, retravaillée après le milieu du iiie s. (selon Steuernagel [2004, 86], renvoyant aux recherches menées dans les archives par Marini Recchia, Pacchiani, Panico 2002, 266-267, ce portrait et le suivant ont été trouvés dans le Piccolo Mercato et ne peuvent être rattachés avec certitude au temple rond, même si l’hypothèse demeure attrayante ; voir aussi Pensabene 2007, 297).
Rieger 2004, 309, TR34, fig. 181a-b : tête colossale de Gordien III, provenant peut-être de la zone du temple rond (haut. 63 cm avec le cou). Datation : retravaillée après le milieu du iiie s. (sur les incertitudes quant à la provenance voir note ci-dessus).
Rieger 2004, 310, TR38 : tête de Faustine Majeure (haut. 22 cm), perdue, provenant du temple rond.
Rieger 2004, 310, TR39 : tête de Faustine Mineure, plus grande que nature, perdue, provenant du temple rond.
Bibliographie
Briggs 1930 : C.R. Briggs, « The Pantheon of Ostia », in MAAR, 8, 1930, 161-169 et pl.
Calza 1925 : G. Calza, Ostia, guida storico-monumentale, Roma-Milano 1925.
Ep. lat. 2010 : M. Cébeillac-Gervasoni, M.-L. Caldelli, F. Zevi, Epigrafia latina : Ostia, cento iscrizioni in contesto, Roma 2010.
Mar 2002 : R. Mar, « Una ciudad modelada por el comercio : la construcción del centro de Ostia », in MEFRA, 114, 2002, 111-180.
Marini Recchia 1998 : F. Marini Recchia, « La grande escavazione ostiense di Papa Pio VII », in RIASA, 53, 1998, 61-110.
Meiggs 1973 : R. Meiggs, Roman Ostia, Oxford 1973.
Pavolini 2006 : C. Pavolini, Ostia, Rome 2006.
Pensabene 2007 : P. Pensabene, Ostiensium marmorum decus et decor : studi architettonici, decorativi e archeometrici, Roma 2007.
Marini Recchia, Pacchiani, Panico 2002 : F. Marini Recchia, D. Pacchiani, F. Panico, « Scavi ad Ostia nell’Ottocento. Dalle escavazioni pontificie alle indagini di Rodolfo Lanciani », in Ostia e Portus, 2002, 247-270.
Rieger 2004 : A.K. Rieger, Heiligtümer in Ostia, Münich 2004.
Steuernagel 2004 : D. Steuernagel, Kult und Alltag in römischen Hafenstädten. Soziale Prozesse in archäologischer Perspektive, Stuttgart 2004.
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