De la solidarité à la vigilance
À propos de la responsabilité dans les organisations pluri-sociétaires
p. 37-51
Texte intégral
1Le droit du travail constitue un laboratoire précieux pour la réflexion sur la solidarité et ses déclinaisons et, à travers la solidarité, sur l’une des grandes problématiques qui traversent le droit de la responsabilité, celle de l’identification du responsable. En particulier, les groupes et les réseaux de société sont le théâtre d’une multiplication des pôles de pouvoir. Ces mutations donnent une acuité particulière à la nécessité de penser une responsabilité plurale, en d’autres termes, à la nécessité de construire une forme de solidarité saisie dans un sens général1. Deux constats en découlent.
2Le premier constat est celui de phénomènes de domination d’une société commerciale sur l’autre, à travers différentes techniques d’exercice du pouvoir2. Certaines sont sociétaires : détention de capital, désignation des mandataires de la société filiale par la société mère. D’autres techniques sont contractuelles, telle la fixation d’un objectif de rentabilité dans un contrat d’investissement. D’autres encore tiennent aux choix comptables opérés par la société mère, à la maîtrise par cette dernière des instruments techniques comptables3.
3Le second constat porte sur l’absence de responsabilité corrélative. À son tour, celle-ci découle de plusieurs facteurs. D’abord, la création d’une personne morale distincte permet celle d’un patrimoine propre, à l’abri de toute action en responsabilité relativement à un dommage créé par une autre personne juridique. Ensuite, l’interposition d’une personne juridique modifie la qualité juridique de la partie agissante. Le créancier de la filiale, partie au contrat avec cette filiale, ne l’est pas de la société mère qui est une autre personne juridique. La modification de la qualité de la personne juridique explique l’incapacité à agir des salariés d’une filiale contre la société mère, en raison du fait que le droit du travail s’ordonne autour d’une figure, celle de l’employeur, à la fois cocontractant du salarié, titulaire du pouvoir, et débiteur de l’ensemble des obligations nées du droit du travail.
4Pourtant, le droit du travail ménage une place à des espaces professionnels affranchis du cadre sociétaire. En témoigne l’obligation de reclasser les salariés au sein de l’espace de permutabilité d’un groupe de sociétés4, ou encore celle de mettre en place une représentation du personnel au sein de l’unité économique et sociale. Le droit s’accommode même de formes d’organisation assez décentralisées. L’« instance de dialogue social », née très récemment, est, à cet égard, digne d’attention, puisqu’elle doit être mise en place dans des réseaux de franchise5. En somme, la redéfinition d’espaces d’appréciation des droits et obligations est extrêmement familière du droit du travail. De ce point de vue, le fameux principe de l’autonomie de la personne morale n’a jamais désarmé ni la loi, ni la jurisprudence sociale. Le droit du travail sait aller au-delà des partitions sociétaires et dispose même d’une aptitude particulière à penser ce que l’on peut appeler « le choix organisationnel ».
5Mais, en réalité, si des espaces singuliers d’appréciation des droits des salariés ou de l’action de l’employeur sont dessinés, il n’en va pas de même lorsqu’il s’agit d’attribuer une responsabilité. Le droit du travail reste alors rivé à la notion d’« employeur », tant l’attribution d’une responsabilité à une autre personne juridique percuterait le sujet de droit de plein fouet, dans ce qui le constitue, son autonomie. C’est ce qu’avait rappelé la chambre sociale dans un arrêt resté fameux, l’arrêt Flodor6 : seul l’employeur est débiteur de l’obligation de reclasser les salariés. Les autres sociétés du groupe ne le sont pas, quand bien même elles appartiennent au périmètre de reclassement possible.
6Cette partition entre employeur et non employeur, cette vision binaire en quelque sorte, est confortée par le fait que le droit du travail ne pense pas la manière dont l’employeur est construit. L’entreprise a souvent été qualifiée de « boîte noire » par une certaine théorie économique, pour souligner sa seule fonction d’agent intervenant sur le marché, sans qu’aucune attention ne soit portée à son fonctionnement ou à sa composition interne. Cette qualification pourrait être appliquée à l’employeur. Ce dernier est ainsi réduit à ce que l’on pourrait appeler « un point d’imputation ». L’employeur, en tant que personne juridique, est débiteur d’obligations. Mais le droit ne pense pas la manière dont il est influencé par d’autres acteurs juridiques – actionnaires, bailleurs de fonds, sociétés, sociaux, investisseurs – qui sont, dès lors, étrangers à la relation de travail et auxquels aucune responsabilité ne peut être attribuée en cette qualité7. La conséquence de cette vision univoque de l’employeur est le rejet, hors du rapport d’emploi, des relations nouées par la société mère ou donneuse d’ordre avec les sociétés du groupe ou du réseau. La société mère, en particulier, ne constitue qu’un tiers au rapport d’emploi, à ce titre insusceptible d’être, en cette seule qualité, mise en cause par le salarié. Cette éviction des rapports sociétaires de la sphère du lien d’emploi a rendu le droit du travail tributaire de l’organisation sociétaire, laquelle permet à une personne juridique d’exercer un pouvoir sans que lui soit attribuée la qualité d’employeur.
7Ce modèle d’imputation a bien entendu partie liée avec un modèle d’organisation, un paradigme8, celui de l’entreprise, caractérisé par un lien entre une unité de direction et une collectivité de salariés, et inspiré d’une vision spécifique de l’entreprise, celle de l’entreprise fordiste. Forgé à l’ombre d’un tel modèle, le droit du travail peine à penser d’autres formes d’organisations, plus décentralisées, plus réticulaires, se caractérisant par l’existence de pôles de direction multiples.
8Cette fragmentation de l’entreprise est acérée par son inscription dans un contexte international et globalisé, qui autorise les filiales, rattachées à des systèmes juridiques différents « à se jouer des diverses lois applicables » et laisse le pouvoir de ces sociétés se développer « dans les espaces interstitiels laissés vide par le droit9 ». L’ordonnance no 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations du travail est, au demeurant, bien loin d’être à la hauteur de tels enjeux, lorsqu’elle réduit l’espace d’appréciation des difficultés économiques au seul territoire national.
9Ces observations conduisent à une interrogation aujourd’hui cruciale. Quels chemins emprunter pour ajuster le régime de responsabilité civile à l’éclatement national et international des structures sociétaires ? La quête des voies d’une responsabilité plurale peut trouver à s’alimenter dans l’étude des modes de régulation. L’installation dans le paysage juridique de l’entreprise transnationale10 a favorisé la réflexion sur les mutations des modes de régulation juridique11, guidée par l’ambition d’appréhender ce « marché sans frontières12 ». D’une part, les dernières années ont vu éclore de nombreux textes de valeur non contraignante, issus d’instances internationales publiques ou privées13. D’autre part, ces textes ont également accompagné un déplacement des lieux de production des normes de l’État vers les acteurs privés14 que sont notamment les entreprises transnationales, les organisations syndicales mondiales, les ONG et les associations de consommateurs, soit que ces derniers aient en charge le soin de réguler de manière autonome les comportements (les accords-cadres internationaux en constituent une illustration15), soit que la tentation soit plutôt celle d’une corégulation, à travers l’interaction de plusieurs instruments de nature différente, et en particulier l’association des acteurs privés et des pouvoirs publics16.
10Au-delà de leurs natures diverses, ces modes de régulation ont ceci de commun qu’ils visent à répondre à la question suivante : comment reconstituer les liens juridiques brisés par les découpages sociétaires et penser des formes de solidarités juridiques entre les différentes sociétés d’un groupe ou d’un réseau ? En réponse à cette interrogation, la notion d’« imputation de la responsabilité » offre une ressource précieuse et un terrain fertile à la réflexion. Ricœur la définissait comme le fait d’attribuer une action à quelqu’un comme à son véritable auteur17. Ainsi définie, l’imputation a une vertu indéniable, celle de rendre possible une dissociation entre l’auteur d’une action et celui qui va devoir répondre de cette action et en subir les conséquences juridiques. En autorisant cette disjonction, le droit ouvre la voie à la responsabilisation d’acteurs juridiques divers, qui n’ont pas nécessairement commis le fait dommageable, mais qui l’ont rendu possible ou inévitable.
11Dresser une typologie de ces formes de responsabilité plurale convie tout d’abord à une interrogation sur les mécanismes qui permettent de rendre plusieurs personnes responsables collectivement et, par conséquent, de reconstruire un lien de solidarité. Cette responsabilité plurale s’ordonne en premier lieu autour de l’idée de responsabilité commune, les deux débiteurs étant tenus ensemble, pour une même obligation (1). Mais la responsabilité plurale est également susceptible de se construire par l’articulation des responsabilités. Chaque sujet, chaque société, se voit alors imposer des obligations complémentaires et distributives, de sorte que les responsabilités afférentes à ces obligations sont ensuite disjointes et articulées (2). La compréhension des techniques d’imputation requiert ensuite de prêter attention aux logiques qui les sous-tendent, c’est-à-dire aux raisons qui président au choix normatif d’imputation. Cette analyse suppose de décaler le regard, en envisageant non pas les techniques d’imputation employées par le droit positif, mais les raisons qui, parfois, peuvent justifier qu’on les mette en œuvre. La société mère est-elle responsable car elle a commis une faute qui lui est personnelle ? L’est-elle parce qu’elle a participé à la prise de décision elle-même, ou encore parce qu’elle contrôle la structure de la filiale ? La variété des critères d’imputation est au fondement d’une réflexion sur ce que pourrait être une politique législative ou jurisprudentielle de la responsabilité solidaire (3).
1. Responsabilité commune
12La responsabilité commune constitue une manière de penser la responsabilité plurale. Elle a été construite à travers la notion d’« employeur conjoint », aujourd’hui plus communément appelé « coemployeur ». Il s’agit alors de penser la société mère par référence à la figure de l’employeur et de faire peser sur elle, en cette qualité, des obligations en droit du travail. Cette vertu substantielle en côtoie une autre, procédurale, puisque le coemploi permet non seulement d’attraire la société mère au cours d’une même procédure, devant le conseil des prud’hommes, mais aussi d’appliquer la loi française à la société mère étrangère coemployeur, du moins lorsque le contrat de base est soumis à la loi française18.
1.1. Les critères du coemploi
13Si le coemploi a plus récemment défrayé la chronique, la notion a en réalité été depuis longtemps mise en lumière19. Dès 1965, certains arrêts y font référence. L’attribution de la qualité de coemployeur peut s’opérer selon deux critères alternatifs. Le premier suppose que le salarié soit dans un lien de subordination avec la société mère et que cette dernière, par conséquent, exerce véritablement un pouvoir de direction sur le salarié. Ce sont alors les actes de la société mère qui s’avèrent déterminants dans cette recherche, son implication dans les décisions concernant le salarié en question, et non pas seulement de manière générale, dans la politique de gestion du personnel de la filiale20. Le second critère est celui parfois dit de la « triple confusion21 », la preuve devant être rapportée d’une confusion d’intérêts, d’activités et de direction entre deux sociétés qui auront alors la qualité de coemployeurs. La mise en œuvre de ce critère conduit aux relations unissant deux personnes morales. Le coemploi, dans cette version sociétaire, a connu une période de prospérité22. Mais ce critère, plus audacieux, s’est attiré la critique de certains auteurs ou avocats, en raison de sa grande puissance normative et théorique. D’une part, car il signifie que la relation sociétaire rejaillit sur le rapport d’emploi lui-même. D’autre part, car l’ampleur de ses effets a effrayé jusqu’à ceux qui l’avaient créé23. Indexer la responsabilité sur la qualité d’employeur fait en effet obstacle à toute modulation possible des effets du coemploi puisque, par définition, le coemployeur est potentiellement débiteur de toutes les obligations en droit du travail.
1.2. L’avenir compromis du coemploi
14Progressivement, les magistrats de la chambre sociale, sensibles aux discours relatifs à l’aptitude destructrice du coemploi24, en ont considérablement restreint la notion. Ils l’ont fait à travers une exigence, celle d’anormalité. Sans être exprimée par les arrêts eux-mêmes, elle se trouve en effet au cœur de la motivation des juges, le coemploi constituant la sanction de l’exercice anormal d’un pouvoir25. Il ne peut donc résulter que de l’immixtion anormale de la société mère dans la gestion économique et sociale de sa filiale. Cette exigence d’immixtion anormale s’est traduite par le fait que les juges ont progressivement rendu quasiment impossible la caractérisation d’une situation de coemploi par l’affirmation qu’il était nécessaire de constater l’anormalité « au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques des sociétés appartenant à un même groupe et de la domination économique que cette appartenance peut engendrer26 ». Il s’est ainsi produit un phénomène de normalisation des relations de pouvoir au sein d’un groupe27, tandis que, dans le même temps, la responsabilité n’a été pensée que rapportée à l’anormalité de l’exercice du pouvoir. Ce déplacement des frontières de la normalité a été tel que, aujourd’hui, bien des manifestations de la domination d’une société mère sur sa filiale sont considérées par les magistrats comme relevant du fonctionnement normal d’un groupe de sociétés. Ainsi, la détention de la totalité du capital d’une filiale, le fait que le mandataire social de la filiale ait été désigné par la société mère, ou encore le fait que celle-ci ait pris des décisions visant à la réorganisation de la filiale, ne suffisent pas à caractériser une situation de coemploi28, dès lors, notamment, que la décision de réorganisation ou de destruction de la filiale avait été prise « dans le cadre de la politique du groupe29 ». Le groupe, dans une conception quasi-institutionnelle, vient ainsi soutenir et renforcer l’autonomie sociétaire.
15En définitive, la référence à l’exercice anormal du pouvoir a entraîné le coemploi dans une spirale dont il ne pouvait sortir indemne. Elle a également abouti à une pensée binaire dont le droit peine à s’extraire. Au fond, la sanction ne survient que lorsque la personnalité juridique de la filiale a été niée, sans que ne soient pensées les autres relations de pouvoir. Face à la difficile reconnaissance du coemploi, d’autres règles ont émergé, qui tendent à l’articulation des responsabilités.
2. Responsabilités articulées
16La distribution de la responsabilité peut emprunter deux chemins. Le premier est celui de la responsabilité délictuelle de la société mère ou donneuse d’ordre. Le second suppose que l’on définisse, en amont, une ou des obligations à la charge de la société amirale, complémentaires à celles qui sont à la charge de l’employeur lui-même.
2.1. La responsabilité civile délictuelle
17Confrontés à la difficile reconnaissance d’une conjonction d’employeurs, certains protagonistes du droit se sont tournés vers les règles de la responsabilité civile et ont invoqué l’article 1382 (aujourd’hui l’article 1240) du Code civil pour pouvoir engager la responsabilité de la société mère. Cette responsabilité civile a été admise par la Chambre sociale progressivement, à partir des années 2000. Divers indices peuvent être retenus pour établir la faute de la société mère. De manière générale, la décision prise par cette dernière doit être confrontée à l’intérêt social de la filiale30.
18Cette responsabilité civile pour faute a été admise, puis, progressivement érigée en voie privilégiée, voire quasi-exclusive, d’engagement de la responsabilité des sociétés mères. Au point qu’aujourd’hui, le contentieux relatif à la responsabilité civile a comme absorbé celui sur le coemploi. Pourtant, la possibilité d’agir contre la société mère par la voie de la responsabilité civile délictuelle n’a ni les mêmes vertus, ni la même signification. En premier lieu, les limites de l’action en responsabilité contre la société mère sont nombreuses. Sur le plan procédural, elles tiennent à l’incompétence des conseils des prud’hommes et la dispersion du contentieux qui en résulte31. Sur le fond, elles résultent des incertitudes liées à l’appréciation des conditions d’invocation de la responsabilité pour faute, en particulier à la définition du préjudice ou du lien de causalité32. Inévitablement, les diverses problématiques causales, contre lesquelles le droit du travail s’était construit, sont réintroduites. En second lieu, la responsabilité délictuelle réduit l’action des salariés à une somme d’actions individuelles, chacun des salariés devant faire la preuve d’un préjudice spécial, tandis que le coemploi, dans sa version sociétaire, charrie une dimension proprement collective. Enfin, sur un plan plus symbolique, l’action en responsabilité civile implique que les salariés agissent en tant que tiers par rapport à la société mère, ce qui suppose de « dépouiller l’action de sa composante de droits sociaux33 ». Saisie de la sorte, la société mère est érigée en personne juridique extérieure au rapport d’emploi, et non en acteur de la relation d’emploi.
19Au-delà de la responsabilité civile du fait personnel, la doctrine a proposé à plusieurs reprises que les sociétés mères puissent voir engager leur responsabilité du fait de la filiale. Il s’agissait donc de consacrer une responsabilité du fait d’autrui. En matière environnementale, des projets s’étaient emparés de cette idée. L’avant-projet de réforme du droit des obligations et de la prescription34 avait suggéré l’introduction d’un article 1360, instituant une responsabilité des sociétés mères du fait de leurs filiales. Mais ces suggestions sont en réalité restées lettre morte.
20À côté de ces actions en responsabilité, d’autres techniques d’imputation ont émergé, qui consistent en la distribution des obligations entre les différentes sociétés d’un groupe ou d’un réseau.
2.2. Les obligations distributives
21Il s’agit, ici, non pas de rendre responsable la société en raison d’une faute conçue selon le modèle de l’article 1240 du Code civil (ex-article 1382), mais de définir des obligations différentes à la charge de chaque société, complémentaires à celles de la société employeur. Cette distribution des obligations permet une articulation des responsabilités.
22Cette technique est intéressante, car elle induit la possibilité de prendre en considération des rapports de contrôle ou de pouvoir entre les sociétés moins évidents, et plus sophistiqués, tandis que le coemploi suppose une confusion entre les personnes morales, laquelle exclut, de fait, les organisations plus décentralisées.
23Le droit français donne quelques exemples de recours à cette technique. En matière de transports routiers, un décret relatif à la sous-traitance de 1992, intégré au Code de la route (art. R.121-5) prohibe « le fait pour tout expéditeur, commissionnaire, affréteur, mandataire, destinataire, ou tout autre donneur d’ordre, en connaissance de cause, de donner à tout transporteur routier de marchandises, ou à tout préposé de celui-ci, des instructions incompatibles avec le respect de dispositions légales citées par le décret, comme celles relatives à la durée du travail par exemple ». Si l’infraction relative à la méconnaissance des règles est imputable au sous-traitant, la responsabilité liée à l’incitation à la violation de celles-ci revient au donneur d’ordre.
24Dans le même sens, la loi du 10 juillet 201435, visant à lutter contre la concurrence déloyale, prévoit une obligation de vigilance du donneur d’ordre en matière d’application de la législation du travail. Au-delà du travail dissimulé visé depuis 201136, l’article mentionne des irrégularités en matière de « libertés individuelles et collectives », de « discriminations et égalité professionnelle entre les femmes et le hommes », de « protection de la maternité », « [d’]exercice du droit de grève », de « durée du travail », etc. Le donneur d’ordre est ainsi sollicité par le législateur comme garant de l’application effective par son sous-traitant de certaines règles du droit du travail dès lors qu’un agent de contrôle l’informe d’une infraction.
25C’est aussi dans ce cadre d’analyse que s’inscrit la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre du 27 mars 201737 qui a fait suite à l’initiative de groupes parlementaires consécutivement à l’effondrement de l’immeuble du Rana Plaza au Bengladesh en 2013. Aux termes de cette loi, il est fait obligation aux sociétés mères et donneuses d’ordre d’une certaine taille d’établir et de mettre en œuvre un plan de vigilance visant à identifier et prévenir la réalisation de risques envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l’environnement, résultant de l’activité des filiales qu’elles contrôlent ou de celles de leurs sous-traitants. Ce devoir de vigilance éclot dans un contexte international et européen propice, en s’inspirant de principes non contraignants consacrés à ces niveaux38.
26Ce texte inspire plusieurs remarques. D’abord, le dispositif se caractérise par une articulation des sphères de l’hétéronomie et de l’autorégulation. La loi fixe l’existence d’une obligation d’établir un plan de vigilance, mais laisse le soin aux entreprises de définir les voies qu’elles estiment devoir emprunter pour adopter des processus de vigilance, le contrat devenant l’instrument d’une juridisation du devoir de vigilance39. Cet espace dédié à l’autorégulation implique de donner un contenu à ce plan de vigilance, par l’instauration d’un inventaire des risques éventuels, l’organisation d’audits sociaux et environnementaux, de procédures de traitements des risques, telles les procédures d’alertes, ou encore de mesures protectrices des lanceurs d’alerte. Ensuite, l’obligation d’établir un plan de vigilance correspond à un mode de contrôle particulier. La détermination d’un mode d’action raisonnable est préférée au contrôle de la conformité d’une décision à une norme. Il ne s’agit donc pas de définir un but à poursuivre ou des conséquences à éviter, mais d’instaurer un cadre de réflexivité, afin de contraindre l’entreprise à repenser la façon dont elle va agir et organiser son activité. Son efficacité dépendra donc pour beaucoup du contrôle qui sera opéré sur la consistance du plan de vigilance. En outre, la référence aux droits du salarié est extrêmement diluée, un tel décrochement étant révélateur de ce que le droit de l’environnement est aujourd’hui le droit moteur dans le processus de réinvention de la responsabilité. Enfin, la loi est très en retrait par rapport aux premières versions, qui instauraient une présomption de responsabilité à la charge de la société mère ou donneuse d’ordre40. L’obligation de vigilance demeure ainsi inscrite dans un cadre subjectif impropre à saisir la dimension collective, massive et extraterritoriale des dommages causés41, et s’éloigne d’une obligation de garantie42 dont la présomption de responsabilité l’aurait rapprochée.
27En dépit de ses faiblesses et des incertitudes dont elle est porteuse, cette réforme retient l’attention. D’une part, elle est susceptible de produire des effets au-delà de ceux qui sont escomptés, tels ceux qui pourraient se déployer à travers la prise en compte de cette obligation par les assureurs. D’autre part, elle repose sur une idée intéressante qui consiste à créer une obligation en amont, à la charge de la société principale, dont le manquement constitue la source de la responsabilité.
28Une relation sociétaire, ou contractuelle, entre deux sociétés, ne suffit pas, à elle seule, à justifier une responsabilité plurale. L’étude des techniques d’imputation de responsabilité doit ainsi s’accompagner de celle des logiques qui les sous-tendent et qui président au choix normatif d’imputation.
3. Les raisons d’une responsabilité plurale
29L’imputation de responsabilité à une société du groupe ou du réseau résulte d’un jugement, le jugement d’imputation. Ce jugement d’imputation, qui procède d’un choix normatif, doit également être adossé à une justification, de sorte que soient préservées sa légitimité et son acceptabilité sociale. Différentes justifications peuvent être distinguées et classées, selon leur aptitude à retranscrire un processus décisionnel, c’est-à-dire selon leur ancrage dans la recherche du lieu ou de la prise de décision. Dans la bataille de justifications se logent ainsi des enjeux cruciaux. Plus la responsabilité de la société mère est inféodée à la quête de sa décision, moins le système laisse de place à une véritable responsabilité du fait d’autrui.
3.1. Typologie des critères de la responsabilité plurale
3.1.1. Le contrôle
30La première catégorie de cette typologie se rattache à la notion de « contrôle ». C’est le contrôle, ou le pouvoir de la société mère sur la filiale43 qui justifie que la première se voie imputer la responsabilité corrélative à l’action de la seconde. Le contrôle peut être celui de la structure. Dans une telle optique peuvent être retenus tous les critères relatifs au pourcentage de détention du capital, ou encore le fait qu’un salarié de la société mère soit mandataire social de la filiale. L’attention portée à ces techniques d’exercice du pouvoir autorise ainsi à retracer un processus décisionnel. Parce que la structure est contrôlée, les décisions de la filiale vont être, en réalité, comme prises par la société mère. Le contrôle peut également porter sur l’activité de la filiale et, par conséquent, sur la décision de la filiale génératrice du dommage. Un glissement est alors opéré, qui place au cœur des exigences le lien entre l’action de la société mère et le dommage. Cette dernière doit avoir eu un rôle dans la décision même, elle doit avoir participé à l’activité dommageable. L’on rappellera qu’une telle responsabilité, puisant à la source de l'article 1242 (ex-article 1384), alinéa premier du Code civil, est référée à « la mission d'organiser, de diriger et de contrôler l’activité44 » d'autrui. Ces exigences témoignent de la reproduction d’une logique de l’acteur, dans laquelle la responsabilité est couplée à la recherche de celui qui a effectivement contrôlé l’activité, la décision ayant conduit au dommage45.
3.1.2. De l’influence à la sphère d’influence
31L’influence se distingue du contrôle. À travers le contrôle de l’activité, le décideur, le sujet réel de la décision, est recherché. Avec l’influence est recherché celui qui a, par ses activités, par les normes qu’il a imposées, influencé les décisions d’autrui. Ce sont alors les effets d’une décision de la société mère, ou de son comportement, qui modifient la décision de la société filiale ou sous-traitante. L’influence génère en quelque sorte une décision contrainte. C’est ce dont témoigne le décret dit de « coresponsabilité46 », la société donneuse d’ordre contraignant, de fait, par les instructions économiques, par les délais imposés, la société sous-traitante à ne pas respecter les durées légales de travail par exemple. Chacune des entités conserve son autonomie, le droit s’accommodant davantage de la complexité du processus décisionnel. La norme ISO 26000 évoque, quant à elle, la sphère d’influence par laquelle est déterminé un cadre, un espace, dans lequel les décisions d’une société mère peuvent avoir une influence sur autrui. La recherche de l’impact effectif d’une décision est délaissée, au profit de l’influence potentielle. La sphère d’influence objectivise un espace à l’intérieur duquel une influence est potentiellement ressentie. Ainsi pourrait-on ne pas exclure que le financeur soit considéré comme ayant une influence sur les décisions ou activités d’une autre entreprise. De même, les choix comptables d’une société mère, la manière dont elle distribue les charges, les produits, seraient alors susceptibles d’être considérés comme susceptibles d’influencer les décisions de la filiale.
3.1.3. Le territoire
32Aux côtés de ces critères, d’autres notions témoignent de la recherche de justifications plus horizontales, permettant de saisir des relations de coopération ou de domination plus feutrées. La première justification, la plus immédiate, est constituée par la communauté de territoire. En matière d’hygiène et de sécurité, lorsque des salariés d’une entreprise sous-traitante travaillent dans les locaux d’une entreprise donneuse d’ordre, l’employeur de cette dernière est responsable du respect de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité pour l’ensemble des salariés travaillant dans les locaux de son entreprise. Le site, le territoire, autorise la reconstitution d’un lien, non pas contractuel, mais géographique, physique, à l’image du lien traditionnel d’établissement47. C’est là un retour à une conception fruste d’un droit du travail visant le lieu de production, tels l’usine, l’atelier, ou encore la fabrique48. En l’absence de territoire ou de site commun, d’autres critères peuvent être identifiés, et peut-être utilisés lorsque les relations se tissent par-delà le territoire, et même par-delà les territoires nationaux.
3.1.4. La chaîne de valeur
33La chaîne de valeur, terme repris par les principes directeurs des Nations unies49, vise, de manière beaucoup plus horizontale, les relations que l’entreprise entretient « avec ses partenaires commerciaux, les entités de sa chaîne de valeur et toute autre entité non étatique ou étatique directement liée à ses activités, ses produits ou ses services commerciaux ». Cette notion rappelle celle de participation à un processus d’activité, et saisit la relation contractuelle, non pas d’en haut, par la manière dont l’activité est menée et dirigée, mais de manière totalement horizontale, à partir des activités qui sont tissées.
3.1.5. D’un critère à l’autre
34Bien souvent, ces critères sont combinés. La loi relative au devoir de vigilance en constitue une illustration. Certes, il est fait mention du contrôle des filiales au sens de l’article L 233-16 du Code de commerce, ou des activités des sous-traitants avec qui la société donneuse d’ordre entretient des relations commerciales établies. Mais cet élément ne constitue en réalité qu’un critère d’applicabilité de la règle. L’institution d’une obligation de vigilance permet d’introduire une chaîne de causalité différente, afin de construire un autre processus de causalité. La société mère n’est pas responsable en en sa seule qualité de société mère. Elle l’est en raison du manquement à une obligation qui lui est propre. Une responsabilité personnelle est réintroduite, comme une manière de préserver une certaine conception du sujet de droit, autonome et responsable, qui est celle du Code civil.
3.2. Au-delà des critères
35Dans ces justifications se loge un choix normatif et politique. Et les arguments pour rejeter tout mécanisme de mise en cause de la responsabilité des sociétés mères sont en réalité d’ordre docrinal. La Cour de cassation l’exprime elle-même, lorsque, dans un rapport, elle évoque, à propos de la responsabilité des sociétés mères du fait de leur filiale, le « risque de dépaysement des holdings50 ». À cet égard, le droit de la concurrence ne s’embarrasse pas de ce type d’arguments. La CJUE considère ainsi que les pratiques anticoncurrentielles d’une filiale peuvent être imputées à la société mère, dès lors que la filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché et institue même l’existence d’une présomption d’influence, lorsque la filiale est détenue à 100 % par la société mère51. La seule existence d’un contrôle sociétaire, restrictivement défini, suffit à imputer à la société mère un comportement et, partant, une responsabilité. Le droit de la concurrence, par sa finalité protectrice du marché, autorise des mécanismes qui seraient largement décriés s’ils étaient admis dans le domaine du droit du travail.
36Il n’existe donc pas d’impossibilité juridique d’imputer à une société mère l’action d’une société filiale. C’est au contraire en concevant la responsabilité à travers la reconstitution des liens juridiques entre sociétés dominantes et salariés que l’on parviendra à penser l’organisation, par-delà le morcellement sociétaire, et que le regard du juriste se décentrera de la société vers l’organisation52.
Notes de bas de page
1 Sur les sens, les invariants de la solidarité, P. Musso, « La solidarité : généalogie d’un concept sociologique », in A. Supiot (dir.), La Solidarité. Enquête sur un principe juridique, Paris, Odile Jacob / Collège de France, 2015, p. 93.
2 Voir S. Vernac, Le Pouvoir d’organisation. Au croisement du droit du travail et du droit des sociétés, thèse, Paris-Ouest Nanterre La Défense, 2012.
3 Voir la contribution de S. Jubé dans cet ouvrage, « Le démantèlement des instruments comptables de la solidarité », infra, chapitre 4 ; ainsi que S. Jubé, Droit social et normalisation comptable, Paris, LGDJ, 2011.
4 Art. L. 1233-4, C. trav.
5 Depuis la loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels précise du 8 août 2016 (loi 2016-1088).
6 Cass. soc. 13 janvier 2010, no 08-15.776 ; RDT, 2010, 230, obs. F. Gea ; Dr. soc., 2010, 774, obs. G. Couturier ; voir également E. Serverin et T. Grumbach, « La saga Flodor », RDT, 2009.
7 E. Peskine et S. Vernac, « Pouvoirs et responsabilités dans les organisations multi-sociétaires », in G. Borenfreund et E. Peskine (dir.), Licenciements économiques et restructurations, vers une redistribution des responsabilités, Paris, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2015.
8 A. Supiot, « Groupes de sociétés et paradigme de l’entreprise », Revue trimestrielle de droit commercial, 1985, p. 624 ; E. Peskine, Réseaux d’entreprises et droit du travail, Paris, LGDJ, 2008.
9 M. Lafargue, Les Relations de travail dans l’entreprise transnationale, thèse, université de Bordeaux, 2015, sous la direction de G. Auzero et I. Daugareilh, p. 29.
10 Ibid.
11 Voir notamment I. Daugareilh, « La responsabilité sociale des entreprises en quête d’opposabilité », in A. Supiot et M. Delmas-Marty (dir.), Prendre la responsabilité au sérieux, Paris, PUF, 2015, p. 183.
12 I. Vacarie, « Le travail dans un marché sans frontières », RDT, 2015, p. 634.
13 Voir la Déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable du 10 juin 2008 (http://www.ilo.org/global/about-the-ilo/mission-and-objectives/WCMS_099767/lang--fr/index.htm, consulté le 23 novembre 2017) ; Les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme du 21 mars 2011 (http://www.ohchr.org/Documents/Issues/Business/A.HRC.17.31_fr.pdf, consulté le 23 novembre 2017) ; les différents instruments internationaux relatifs à la responsabilité sociale des entreprises (RSE) ; Les Principes de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales, du 25 mai 2011 (http://www.oecd.org/fr/investissement/mne/principesdirecteursdelocdealintentiondesentreprisesmultinationales.htm, consulté le 23 novembre 2017) ; la norme internationale ISO 26 000 intitulée « Lignes directrices relatives à la responsabilité sociétale » (2010), https://goo.gl/jCLmCE, consulté le 3 septembre 2017.
14 A. Lamine, La Négociation collective au-delà de l’État ? – Étude des accords d’entreprise transnationaux. À la recherche d’un cadre herméneutique et juridique, thèse, université catholique de Louvain, 2016.
15 Sur ces derniers, voir I. Daugareilh, « Les accords-cadres internationaux : une réponse européenne à la mondialisation de l’économie ? », in M. Descolonges et B. Saincy (dir.), Les Nouveaux enjeux de la négociation sociale internationale, Paris, La Découverte, 2006, p. 130 ; G. Marain, La Juridicisation de la responsabilité sociétale des entreprises, thèse, université Paris-Dauphine, 2014, p. 522 sq.
16 T. Berns, P.-F. Docquir, F. Frydman, L. Hennebel et G. Lewkowicz, Responsabilité des entreprises et corégulation, Bruxelles, Bruylant, 2007.
17 Dictionnaire de Trévoux [1771], cité par P. Ricœur, « Le concept de responsabilité. Essai d’analyse sémantique » [1994], in : Le Juste, Paris, Esprit, 2001, p. 60.
18 Sur ces questions, voir notamment E. Pataute, « Le licenciement dans les groupes internationaux de sociétés. Aspects de droit international privé et de droit de l’Union européenne », RDT, 2011, p. 14.
19 I. Vacarie, L’Employeur, Paris, Sirey, 1979, p. 116 sq.
20 Cass. soc. 23 septembre 1992, Dr. soc. 1992, p. 918.
21 P. Morvan, « Le licenciement des salariés d’une filiale (action Aspocom) entre employeur et coemployeurs », JCP S, 2010, 1407, spécialement no 11.
22 A. Auzero, « La qualité de coemployeur », note sous Cass. soc. 22 juin 2011, no 09-69.021, RDT, 2011, p. 634 ; Cass. soc. 28 septembre 2011, no 10-12278 à 10-13386.
23 Comme en témoigne l’usage de la métaphore de la monstruosité ; voir notamment, en ce sens : « le coemploi est devenu indomptable, la créature ayant échappé à son créateur » (G. Loiseau, « Le coemploi est mort, vive la responsabilité délictuelle », JCP S, 2014, no 29).
24 Voir notamment Y. Pagnerre, « L’extension de la théorie des coemployeurs, source de destruction du droit du travail ? », JCP S, 2011, 1423.
25 Voir notamment P. Bailly, « Le coemploi n’est ni une « baguette magique » ni une aberration juridique », SSL no 1600, p. 11 ; G. Auzero, « Coemploi, le rappel à l’ordre de la Cour de cassation », SSL no 1645, p. 7.
26 Cass. soc. 2 juillet 2014, nos 13-15.208 s. [P].
27 E. Peskine et S. Vernac, « Pouvoirs et responsabilités dans les organisations multi-sociétaires », in Borenfreund et E. Peskine (dir.), Licenciements économiques et restructurations, vers une redistribution des responsabilités, Paris, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2015.
28 Cass. soc. 2 juillet 2014, Molex, no 13-15.208, Bull. civ. V, no 159, Dr. ouvr., 2014, p. 653 n. ; M. Castel ; M. Kocher, « Le coemploi à l’âge de raison », RDT, 2014, p. 625. ; Cass. soc. 10 décembre 2015, Fayat, no 14-19938 ; Cass. soc. 6 juillet 2016, Continental, no 14-27.266 [P].
29 Cass. soc. 10 décembre 2015, Fayat, no 14-19938, précité.
30 A. Fabre, « La responsabilité délictuelle pour faute au secours des salariés victimes d’une société tierce », RDT, 2014, p. 672. Voir, pour différentes illustrations de la faute, Cass. soc. 8 avril 2014, nos 13-15.573 et 13-15470 : la Cour de cassation relève que la décision avait été dans l’intérêt de l’unique actionnaire de la société employeur, et avait aggravé les difficultés économiques de cette dernière, concouru à sa déconfiture et à la disparition des emplois qui en avait résulté. Voir également CA Versailles, 31 octobre 2011, Klarius, RG no 10/00578 : les juges ont considéré que la cessation d’activité de la filiale ne résultait que de « choix stratégiques décidés au niveau du groupe » et « d’une volonté délibérée des sociétés du groupe d’abandonner la filiale ».
31 A. Fabre, « La responsabilité délictuelle pour faute au secours des salariés victimes d’une société tierce », RDT, 2014, p. 672.
32 Ibid.
33 E. Serverin et T. Grumbach, « La saga judiciaire Flodor », RDT, 2009, p. 693.
34 Projet Catala, 2005, http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/054000622/index.shtml, consulté le 23 novembre 2017.
35 Loi du 10 juillet 2014, no 2014-790, visant à lutter contre la concurrence déloyale.
36 Art. L. 8222-1 du Code du travail.
37 Loi no 2017-399 du 27 mars 2017 ; sur cette loi, voir notamment T. Sachs, « La loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères et sociétés donneuses d’ordre : les ingrédients d’une corégulation », Revue de droit du travail, 2017, p. 380.
38 Les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme du 21 mars 2011 (https://lc.cx/ZC5E, consulté le 23 novembre 2017) consacrent le devoir de diligence raisonnable ; Principes de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales, du 25 mai 2011 (http://www.oecd.org/fr/investissement/mne/principesdirecteursdelocdealintentiondesentreprisesmultinationales.htm, consulté le 23 novembre 2017 ) ; les principes issus de la norme ISO 26000 qui ajoute au devoir de vigilance un concept, celui de sphère d’influence, qui définit un champ d’action du devoir de vigilance ; voir également avis de la Commission des affaires étrangères du 5 décembre 2012 prônant que des règles de diligence raisonnable en matière de droits de l’homme et de chance d’approvisionnement soient établies au niveau de l’Union.
39 M. Mekki, « Contrat et devoir de vigilance », in : Le Bing Bang des devoirs de vigilance ESG : les nouveaux enjeux de RSE et de droits de l’homme, RLDA, numéro spécial, 2015, p. 86.
40 Sur ce point, voir S. Cossart et M.-L. Guislain, « Le devoir de vigilance pour les entreprises multinationales, un impératif juridique pour une économie durable », in : Le Bing Bang des devoirs de vigilance ESG…, op. cit., p. 104.
41 I. Daugareilh, « La responsabilité sociale des entreprises en quête d’opposabilité », in A. Supiot et M. Delmas-Marty (dir.), Prendre la responsabilité au sérieux, Paris, PUF, 2015, p. 183 ; voir également N. Cuzacq, « Le Devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre : acte II, scène 1 », Paris, Dalloz, 2015, no 18, p. 1049.
42 C. Hannoun, « Pour un dispositif de vigilance mesuré et efficace, Controverse avec S. Schiller, Quel devoir de vigilance des sociétés mères et des sociétés donneuses d’ordre ? », RDT, 2014, 441.
43 S. Vernac, Le Pouvoir d'organisation. Au croisement du droit du travail et du droit des sociétés, op. cit.
44 Cass. civ. 2e, 22 mai 1995, Bull. civ. II, no 155 ; JCP, 1995, no 22550, note J. Mouly ; RDTCiv. 1995, p. 899, note P. Jourdain.
45 Voir C. Hannoun, « La responsabilité environnementale des sociétés mères », Environnement. Revue mensuelle du jurisclasseur, juin 2009, p. 37.
46 Décret précité et intégré à l’article R 125-1 du Code de la route.
47 F. Gaudu, « Entreprise et établissement », in : Dialogues avec Michel Jeantin, Paris, Dalloz, 1999, p. 51.
48 Par exemple, l’article 1er de la loi de 1841 autorise le travail des enfants « 1. Dans les manufactures, usines et ateliers à moteur mécanique ou à feu continu, et dans leurs dépendances ; 2. Dans toutes les fabriques occupant plus de vingt ouvriers réunies en atelier ».
49 Principes précités.
50 Rapport du groupe de travail de la Cour de cassation sur l’avant-projet de réforme du droit des obligations et de la prescription, 15 juin 2007.
51 CJCE, 19 septembre 2009, aff. C-97/08, Akzo Nobel, pts 61 à 65.
52 Voir depuis quelques années, les travaux menés au Collège des Bernardins, R. Baudoin (dir.), L’Entreprise : formes de la propriété et responsabilités sociales, Paris, Collège des Bernardins / Lethielleux, 2011.
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