Troisième partie
p. 163-216
Texte intégral
III
De Padoue à Gênes – de Gênes à Bologne (septembre 1553-avril 1554) de Bologne à Rome (août-septembre 1554)
1Je demeurai donc à Padoue alors que tous les cours étaient suspendus à cause de la trop forte chaleur, et que l’on donnait un peu partout des fêtes, au gré des circonstances et du hasard, n’importe où, comme c’est l’habitude des étudiants en temps de fête. Comme l’occasion se présentait à moi ainsi que de la compagnie, je décidai, à la fois pour me divertir et pour voir l’Italie, de parcourir et de visiter la Lombardie qui est la plus belle région d’Italie, et la Ligurie. Accompagné de Maître Seyfrid Pfintzing1, je quittai Padoue le 25 septembre : ensemble, nous avons emprunté l’itinéraire suivant :
2Itinéraire de Padoue à Milan :
De Padoue à Vicence | 8 milles italiens |
3La ville de Vicence, possession de la république de Venise, est assez plaisante, mais elle est connue plus par son site et sa richesse que pour la beauté de ses édifices.
4Elle est agrémentée d’une assez belle cathédrale où l’on voit un très bel autel recouvert de marbres de diverses sortes2.
5On voit aussi en ville le très élégant jardin d’un chanoine, clos par des grilles de fer, où l’on a l’habitude d’élever quantité d’oiseaux de toutes les espèces3.
De Vicence à la Torre di Confine4 | 13 |
À Vérone | 17 |
6Vérone est une vaste cité, très connue par ses édifices et son site et fort belle ; elle est extrêmement bien fortifiée et toute proche des Alpes. L’Adige la traverse presque par le milieu, mais l’encercle tout autant qu’il la divise. Il en est le gardien en même temps que l’ornement et est très utile aux Véronais pour transporter les marchandises et les fruits, d’autant que la campagne tout autour est excellente, surtout dans le secteur qui est tourné vers le lac de Garde, qui porte une grande quantité d’oliviers, du raisin, des citrons et toutes sortes de fruits parmi les plus excellents.
7Il y a des ponts dans la ville, d’une superbe architecture, qui traversent l’Adige5.
8La ville possède trois forts. Elle est certes montueuse, mais n’en est pas moins elle-même extrêmement fortifiée par de très larges fossés remplis d’eau, des murs remarquablement épais et de solides portes6.
9Au pied du fort Saint-Barthélemy on peut voir un théâtre antique, ou plutôt les ruines d’un théâtre et des restes qui permettent encore d’imaginer nettement la taille et la magnificence de sa masse7.
10Il y a aussi un amphithéâtre certes menaçant ruine, mais qui reste l’édifice le plus parfait de tous ceux qui subsistent en Italie, excepté le Colisée de Rome, à admirer pour la magnificence de son architecture : il est divisé en trois rangs d’admirables arcades, l’inférieure, la médiane et la supérieure qui s’élève à une hauteur peu croyable, chacune possédant 72 arches ; les colonnes qui soutiennent les arcades sont en marbre de Rhétie d’une épaisseur étonnante. La paroi extérieure était autrefois ornée d’un meilleur marbre et de fort belles statues, mais elle s’est entièrement écroulée, à l’exception d’une petite partie8. Sur son architecture et ses dimensions, Torelli de Vérone a beaucoup écrit dans son livre 59.
11On rencontre partout dans cette ville nombre de monuments et vestiges de l’Antiquité, évoqués abondamment par le même Torelli dans ses livres sur les Antiquités de Vérone10. Avant tout l’on voit dans la rue principale un très vieil arc que le peuple appelle la porta (dei) Borsari, à propos duquel on raconte diverses choses et l’on peut encore y lire gravées les lettres suivantes :
Colonia.Augusta.Verona.nova.Gallieniana.Valeriano.II.et.Lucilio. Co(n)ss(ulibus). muri.
Veronensium.fabricati.ex.die.III.Non(is).April(is).dedicati.pr(idie).
Non(is).Decemb(ris).
iubente.sanctiss(imo).Gal(l)ieno.aug(usto).
N(ostro).insistente.Aur(elio).Marcellino.V(iro).
P(erfectissimo).Duc(e).
cura(n)te.Iul(io).Marcellino11.
12Vérone est parée de beaucoup d’églises et temples fort élégants, particulièrement d’une cathédrale qui est non moins remarquable par ses anciennes constructions que par les nouvelles et où l’on peut voir des colonnes de diverses sortes de marbres, blanc, rouge et d’une variété naturelle de marbre tachetée de couleurs si variées qu’on la croirait sortie de la main d’un peintre12.
13Dans le chœur – comme on dit – de cette église, on peut voir un coffret où l’on conserve l’eucharistie, soutenu par quatre statues d’anges de bronze de facture variée, d’un grand prix et d’une admirable habileté13.
14Sur la voie publique, près du prœtorium14 et de la chapelle Sainte-Marie l’Ancienne15, on voit quelques monuments en forme de pyramides d’une superbe facture, celui de Scaliger dit “le Grand Chien” qui avait usurpé le pouvoir à Vérone16, ceux de Mastino et d’autres membres de la même famille17, entièrement ornés de statues et de décors de marbre.
15Dans l’église San Fermo18 se voit le splendide et très coûteux mausolée privé d’une famille noble de Vérone, artistement décoré de sculptures de marbre et de bronze19.
De Vérone à Peschiera | 18 milles |
16Le bourg de Peschiera, avec son château-fort20 construit par les Scaligeri, anciens seigneurs de Vérone, aux bouches du lac Benacus, le plus célèbre lac d’Italie vulgairement nommé lago di Garda, sur la rive-même de son émissaire le Mincio, est chaque jour un peu plus fortifié par les Vénitiens auxquels il est soumis21.
De Peschiera à Luna | 11 |
De Luna à Brescia | 15 |
17Brixia, en langue vulgaire Bressa, est une ville vaste et très belle grâce à ses édifices ; sa forteresse est considérable et les Vénitiens, à qui ladite ville est assujettie, y entretiennent d’ordinaire une très forte garnison22. Elle est construite sur un rocher assez escarpé et est renfermée dans un cercle de murs, tandis que la ville elle-même, vaste et proche des montagnes, est baignée par un très joyeux concert de petits ruisseaux qui en jaillissent de toutes parts.
18Elle s’agrémente d’unprœtorium encore inachevé mais décoré de colonnes et d’ornements de marbre, de statues et de bustes des anciens empereurs de l’Antiquité23.
19Sur la place publique on peut voir tout autour, accrochés aux murs des maisons, des marbres et des plaques très vieilles de plusieurs anciens empereurs portant des inscriptions24. De Bressa à Orzi 15
20À Orzi, surnommé “le Neuf” pour le différencier de l’autre que l’on appelle “le Vieux”, et qui se trouve à peu de distance, se voit un bourg doté par les Vénitiens de fortifications incroyables25.
21D’Orzi à Soncino, une bourgade très peuplée et riche, qui a été construite dans le marquisat par Charles-Quint, qui le confia au Milanais Maximilien Stampa26.
22Par Soncino, nous sommes arrivés à Crema : d’Orzi à Crema, on compte 15 milles Crema, non loin de la rivière Seria, est peu étendue, mais c’est la ville la mieux fortifiée de toutes les possessions de la république de Venise27. Elle est assez belle et agréable et on y voit aussi un château assez puissant édifié par l’empereur Frédéric Barberousse après la chute de Crémone (sic). Il l’a édifié au détriment de cette dernière cité et pour la punir28.
23De Crema à Lodi 11
24La ville de Lauda était nommée par les Anciens Laus Pompeia29. Entièrement dévastée par les Milanais30, elle se trouve à trois milles de distance des anciennes ruines. L’actuelle Lauda est une ville tout à fait florissante construite et édifiée par l’empereur Frédéric Barberousse après qu’il eut détruit Milan31. Elle est belle par son site et ses édifices. Elle obéit maintenant au duc de Milan.
De Lodi à Marignan | 9 |
De Marignan à Milan | 10 |
25Milan est la plus grande ville d’Italie, la plus riche et la plus belle. Elle déborde d’une étonnante concentration de négoces de toutes les nations et de toutes sortes d’artisans. Elle se distingue par ses somptueux édifices, tant publics que privés. Avec son château aux murs admirablement épais, aux larges et profonds fossés remplis d’eau, aux puissants retranchements, avec ses machines de guerre de toutes sortes et sa triple rangée de murailles32, c’est une ville incroyablement forte, connue dans toute l’Europe pour sa solidité imprenable.
26La cité est ornée d’une remarquable et très belle cathédrale qui doit être comptée avec raison au nombre des plus somptueux édifices d’Europe. Avec ses colonnes de marbre, les murs et le pavement de l’église, ses incrustations de marbre blanc éclatant, elle est couverte de statues admirablement faites et de très somptueuses sculptures, et l’on ne saurait assez admirer, par Hercule, l’ampleur de la construction, sa beauté et son prix incroyables, bien qu’elle ne soit pas encore achevée33. On nous en a montré, chez les ouvriers du chantier, le plan à l’identique dans l’état où elle serait si elle était menée à son terme34.
27Il s’y trouve l’épitaphe (sic) du pape Martin V35 et, à sa droite, le monument du cardinal Caracciolo, gouverneur d’Insubrie au nom de l’empereur : il est constitué d’un superbe marbre très noir, et s’orne de quelques statues de marbre blanc éclatant. Son aspect est magnifique et tout à fait somptueux de beauté et de luxe36.
28Non loin de ce monument on voit le tombeau de marbre rouge de l’archevêque duc de Milan Jean, qui a réuni en ses mains les pouvoirs ecclésiastique et temporel : il s’orne d’une très élégante épitaphe37.
29Dans le chœur – pour ainsi dire – de ladite église, à un endroit surélevé, on peut voir des sarcophages fixés sur une rangée de colonnes, couverts de tissus d’or, où sont conservées les cendres des ducs de Milan et du marquis de Vasto (sic), commandant très éminent de l’armée impériale et de l’Insubrie au nom du roi38.
30Au sommet de sa voûte est fixé un clou qui a servi à crucifier le Christ notre Sauveur. L’empereur Constantin en avait confectionné un mors pour son cheval et on dit qu’il a été offert par l’empereur Théodose à Ambroise, évêque de Milan39.
31Non loin de cette église, dans l’atelier des statuaires et lapicides, on nous a montré une statue de marbre d’Adam, d’un travail inestimable quant au prix, sculptée de la main d’un artiste très habile bien qu’elle soit assez ancienne40.
32On voit dans la ville un hôpital des pauvres ou xenodochium, le plus fameux et le plus beau d’Italie, construit à grands frais et doté d’une admirable suite de voûtes41.
33Il y a également hors de la ville une demeure aussi spacieuse que belle qu’on appelle le Lazaret, où les Milanais rassemblent aux époques de peste menaçante ceux qui sont infectés par l’épidémie, afin que le poison ne se répande pas plus avant et pour les éloigner du contact des autres hommes42.
34Il y a en ville un monastère dédié à saint Ambroise, patron de la ville, autrefois évêque de Milan : il est remarquable tant par son grand âge que par ses constructions récentes43. Les moines affirmaient qu’il avait été autrefois consacré à Hercule, dont ils nous montrèrent l’image sculptée sur une plaque de marbre attachée à l’une des colonnes de l’église : d’allure juvénile et vêtu d’une peau de mouton, il tenait de la main gauche un chien par la queue, et sa main gauche brandissait un bâton menaçant44 ; sur leur opinion, de l’avis des historiens, la vérité permet de conclure ceci : ils écrivent en effet que l’empereur Maximien Hercule a élevé autrefois à Milan un très vaste temple en l’honneur d’Hercule et qu’il s’agit du même qui sera ensuite consacré au martyr saint Laurent. Du propylée ou péristyle de ce temple il reste seize colonnes cannelées, vestiges de l’ancien bâtiment45.
35On peut voir aussi un serpent de bronze posé sur une colonne de marbre qui serait, diton, celle-là même qui fut élevée par Moïse dans le désert, offerte par l’empereur Théodose à saint Ambroise46.
36Les moines nous montrèrent aussi dans la même église la tombe, disaient-ils, de Didier roi des Lombards, alors qu’il n’y avait sur ce monument aucune trace qui puisse l’indiquer. Il est certain que Charlemagne a envoyé le même Didier, vaincu au combat et fait prisonnier, en exil en Gaule47.
37On voit également au même endroit un autel consacré à saint Ambroise, entouré de quatre colonnes de porphyre très grosses et très belles : il est somptueux car il est tout entier recouvert de lamelles d’or48.
38Près de l’orgue de la même église, on peut voir le portrait de saint Ambroise peint sur le vif49.
39Dans le cloître de cette église, les moines nous ont fait de voir un très vieux livre, épais de trois doigts, qui contenait les huit livres du de bello Judaico de l’historien Josèphe, et dont les folios étaient constitués d’écorce d’arbre fort élégamment et soigneusement travaillée. L’histoire était écrite en lettres lombardes avec de très anciennes abréviations, au point qu’on pouvait à peine lire un traître mot : c’est là une chose assurément digne d’être remarquée pour son antiquité50.
40Les moines nous ont montré également une patère ou soucoupe en bois recouverte de lamelles d’argent, dont le bois était usé par l’âge et rongé par les vers. Ils affirmaient que saint Ambroise s’en était servi pour boire51.
41Dans le même édifice ambrosien se voit une table très large portant l’inscription suivante que j’ai transcrite en raison de son ancienneté et insérée ici :
C(aius). Plinius L(ucii).f(ilius). [B : F.O.] V.F. cœcilius Avcie [B : AVGVR] Legat. Proc. Pr. Provinciœ Pont. consulari Potestate in eam Provinciam ‘ET’imp : cæs : nerva Traiano aug : German : Curator. Alvei tiberis. et ripar(um). Et prœfecto Præœrarii saturni Prœf : cerarii milit. Leg : VI. Gallicœ. X. Vir. st. Litib. [B : ST.LITIB.] iudicavd. [B : IVDICAND.] Therm : adiectis in ornatum HS. CCC : Et hoc amplius in Tutela. HS. CC.T.F.IEt in Libertor(um) suor(um) nominibus sestercia XVIII [B : XVIII deest] LXVI Dedit Centum Quinquaginta sex Rei incrementum postea ad Epulum pleb(is) Urbanœ volait pertinere. Hoc amplius dedit in alime(n)ta Puerorum et puellar(um) Pleb(is) Urbanœ sestertia trece(n)ta in tutelam bibliothecæ Sestertia centum etc.52
42On avait découvert çà et là par la ville beaucoup de restes et de fragments de marbres antiques et de très anciennes inscriptions et épitaphes : entre autres l’épitaphe de l’historien Valerius Maximus, où on peut lire, gravée dans le marbre, l’inscription suivante :
M. Valerius Maximus Sacerdos D.S.I.M.
stud. Astrologiæ sibi, et Severiœ apr. Uxori. H.M.H.N.S.53
43À un autre endroit, gravé sur un tombeau :
D. M. Epituncham Μ. M. ser cisalpin et Transalpin. Patr naut. Cornes Hœred : Fac cur54
44En face l’église Saint-Ambroise se trouve une autre vieille église assez belle consacrée à saint François55, où l’on peut voir un très beau monument de marbre blanc d’une famille noble de Milan56.
45On voit aussi à Milan beaucoup d’églises fort somptueuses et belles ainsi que, dispersés çà et là dans la ville, des monastères qu’on ne peut tous se rappeler en raison de leur nombre et de leur diversité : parmi les plus importants et les plus somptueux de ces édifices, à coup sûr figure la très belle église, encore inachevée, de Sainte-Marie ad D. Celsum ; elle est ornée de colonnes de marbre dont les bases et les chapiteaux de bronze sont faits de façon on ne peut plus élégante et habile57.
46Le monastère des Dominicains Sainte-Marie des Grâces, situé non loin du château de la ville, conserve une bibliothèque très connue en Europe à cause de sa richesse en livres58. On peut voir dans l’église le tombeau de Louis Sforza, qui est très beau quoique inachevé, mais son corps n’y a pas été déposé car la France, où il est mort exilé, l’a conservé59.
47Dans son voisinage se voit un autre très beau monastère60.
48Dans l’église Saint-Nazaire61, on peut admirer des monuments de la très noble famille Trivulzio62.
49Il y a aussi le magnifique monastère dit Monasterio Maiore63.
50L’église Sainte-Tècle64 était autrefois un temple de Minerve fort célèbre dans le monde entier65.
51Dans l’ancien palais, qu’on appelle en langue vulgaire la Corte Vecchia66, se trouve une chapelle consacrée à saint Gothard67 où l’on peut voir les tombeaux très nobles et très anciens de certains vicomtes de Milan68.
52Après avoir passé six jours à Milan, nous avons pris la route de Gênes.
53Itinéraire de Milan à Gênes :
De Milan à Benasseque | 10 milles |
De Benasseque à Pavie | 10 |
54Avant d’arriver à Pavie, nous avons quitté la route ordinaire sur la gauche, en direction de l’est, et, à deux mille pas, avons visité un monastère de l’ordre des Chartreux, tout à fait superbe par son architecture, le plus fameux de toute l’Italie69. Cet édifice est remarquable par son admirable beauté et sa taille, par son église recouverte de marbre d’un blanc éclatant ; il est orné de statues et sculptures qui suscitent l’admiration par leur art et leur nombre ; on y voit sculptée sur un autel d’ivoire l’histoire sainte des deux Testaments, de la main d’un artiste très habile, avec deux corbeilles ou coffrets, en même matière très coûteuse70.
55Jean Galéas, premier duc de Milan et fondateur de cette chartreuse, y est enterré : on peut voir son très beau monument de marbre blanc avec une épitaphe71.
56C’est le même duc qui a entouré d’un mur de briques le fameux parc ou vivarium qui s’étend de ce monastère à Pavie, et dont on dit que sa circonférence dépasse dix huit mille pas72. Lors de la célèbre bataille de Pavie c’est là que le roi de France François fut fait prisonnier par l’empereur Charles Quint, ce qui est bien connu. À cet endroit apparaissent en divers lieux des traces du mur abattu lors de l’irruption des soldats73.
57Dans ce parc – on l’appelle Mirabellum – on voit la maison d’agrément où les ducs de Milan avaient autrefois coutume de se retirer après les fatigues de la chasse, et où a été emmené prisonnier le roi François74.
58Pavie est appelé par les auteurs antiques Ticinum75. C’était autrefois le siège des rois lombards76 et des ducs de Milan, situé à un endroit fort agréable arrosé par le Tessin. La ville a été parée par ces rois et ducs d’édifices et de palais très somptueux. Mais, lors des dernières guerres, elle a été attaquée par le roi de France à cause surtout du souvenir de sa récente captivité et s’est livrée à lui. Ses bâtiments et ses murs ont été abattus et elle a été dévastée au point de paraître désormais totalement ruinée77. On peut y voir un château encore assez intact, célèbre par l’épaisseur de ses murs, le nombre de ses tours et son architecture plus ancienne. Il a été construit par le vicomte Jean Galéas78.
59On conserve dans l’église San Pietro in Ciel d’Oro79 les ossements du bienheureux Augustin transportés de Sardaigne à Pavie par le roi des Lombards Luitprand : on a construit en son honneur un monument de marbre d’un blanc éclatant, d’un grand art et d’un grand prix. On nous y a montré son portrait peint sur le vif80.
60Non loin de ce monastère se trouve une demeure, ou plutôt une place couverte, longue de plus ou moins cent pas, dont la destination première pour laquelle elle a été édifiée est inconnue : aujourd’hui on y joue habituellement à la balle (pila manuaria). Nous tenons pour certain que, si l’on pousse un cri depuis sa porte ou dans son entrée, d’une voix claire, l’écho répond douze à quinze fois pour un seul son et que, plus le son émis est aigu, plus fréquente est la réponse habituellement reçue. C’est là chose assurément digne d’être consignée81.
61On voit à Pavie une statue de bronze vulgairement nommée Regisole, dont les historiens écrivent qu’elle fut faite selon des techniques magiques par le roi des Ostrogoths Théodoric et qu’elle représentait son effigie.
62Elle avait été élevée à Ravenne sur une colonne et on lui avait donné le nom de Rex Solis quand Charlemagne ordonna de la transférer en Gaule ; transportée jusqu’à Pavie, elle y est restée jusqu’à nos jours82.
63On voit également dans cette ville une tour de briques presque détruite par le feu, appelée la Tour de Boèce : le peuple a inventé bien des fables à son propos. Je n’ai pu chercher la vérité ni savoir s’il est sûr que Boèce ait été enterré à Pavie : j’ignore s’il y a vraiment été déposé83.
64Le jurisconsulte Jason, professeur à l’université de Pavie84, autrefois très florissante et illustrée dans notre mémoire par André Alciat85, a été enterré non loin de la ville où l’on peut voir encore sa demeure assez somptueuse86.
65Baldus, le très savant spécialiste du droit, est enterré chez les Frères Mineurs87.
66Dans l’église de la Sainte-Épiphanie88 repose André Alciat dans un très beau monument qu’ont élevé ses héritiers après sa mort avec l’épitaphe suivante :
D(eo). O(ptimo).M(aximo).
Andreœ Alciato Mediolanen(si) iurecons(ulto) comiti prothonotario. apostolico Cæsarioq(ue) senatori
Qui omniu(m) doctrinar(um) orbem absoluit. Prim(us) legum studia antiguo restituit decore. Vixit annos LVI [A : LX] mens(es) VIII. dies IIII.
Obiit Pridie Idus Ianuarii M.D.L.
Franciscas Alciatus. I.C.H.B.M.P.89
67Près de cette église et de la maison de ce même Alciat, on peut voir sa très riche bibliothèque et son portrait peint sur le vif90.
68De Pavie à Voghera 15 milles
69Voghera est une bourgade située sur le torrent Staffora, tout à fait opulente et appelée par les anciens Vicus Iriæ91.
70De Voghera à Tortona 10
71Dertona – c’est son nom latin – est une cité localisée au pied de l’Apennin, pleine de ruines fort anciennes92 et peu peuplée en raison des discordes incessantes entre ses citoyens93 ; elle a été autrefois dévastée par l’empereur Frédéric Barberousse94, et est protégée par un château installé sur le rocher95.
De Tortona à Serravalle | 13 |
72Cette bourgade située sur la rive gauche du Scrivia, jadis offerte par Philippe, troisième duc de Milan à un patricien de Gênes, a été fondée au pied de l’Apennin96. À cet endroit commence la Ligurie.
De Serravalle à Arquata | 2 |
D’Arquata à Busalla | 14 |
73De Busalla, après avoir franchi la cîme de l’Apennin, nous sommes parvenus à Gênes.
De Busalla à Gênes | 14 |
74Gênes est située sur le littoral de la mer de Ligurie, au pied des montagnes et parmi des rochers, au point qu’elle paraît occuper à la fois la plaine et la montagne. C’est une ville très noble, ornée d’édifices et de palais très beaux et dignes d’un roi, ce qui lui a valu à travers l’Italie le surnom de “Gênes la Superbe”97.
75Elle est aujourd’hui célèbre pour son port propice à la navigation et au trafic ; elle fut autrefois très puissante sur mer comme sur terre, car elle possédait de nombreuses îles et cités d’Asie et d’Europe : aujourd’hui il ne lui reste que la Corse98. La cité elle-même est assise en un lieu âpre dont on tirerait peu de choses sans travail de fertilisation. Son sol abonde en oliviers, cyprès, citronniers, grenadiers et orangers99 ; ses faubourgs ornés de jardins et de très beaux palais offrent, par Hercule, à la vue de tous leur admirable beauté et leurs délices. La ville voit ses défenses de jour en jour étonnamment renforcées, au point que tout le monde la croirait imprenable si son site ne lui portait pas préjudice100. On peut voir au sommet d’une montagne une forteresse, petite mais très puissante, défendue par une garnison de Génois. En ce lieu le roi de France Louis XII, quand il occupa Gênes, avait construit le château très bien fortifié appelé la Briglia en langue vulgaire, en latin “la bride” : avec ce mors on disait que ce cheval superbe et impétueux serait maîtrisé et ne pourrait plus regimber aussi souvent aux ordres de son maître. Mais finalement cette fortification fut entièrement détruite par les Génois, après qu’ils eurent recouvré leur liberté101.
76On affirme que la ville a été fondée par Janus, le premier roi d’Italie, dont on montre la très vieille effigie de marbre à la cathédrale102.
77On y voit aussi une plaque de bronze d’une admirable antiquité, découverte en 1507 (sic) par un agriculteur ; j’ai seulement voulu noter le début, parce que l’inscription est très longue et qu’on peut la trouver décrite en divers endroits par les écrivains.
Q. M. Minuteis. Q. F. Rufeis de Controversieis [B : controversiis] inter Genuateis et (lacune : Veiturios in re presente cognoverunt, et) coram inter eos con(tro)versias composueru(n)t, et (sic pro : ex) qua lege agrum possiderent et qua fineis fiere(n)t [A : fierant], dixerunt eos fineis [B : fines] facere terminos q(ue) statuijusser(un)t, ubi eafactæssent.
Romani cora(m) venire iusser(un)t Rom(œ) cora(m) sententiam ex Senati Consulto [B : ex Senaticonsultu] dixer(un)t. Idib(us) Decemb(ris) L(ucio) Cœcilio Q(uinti) f(ilio), Q(uinto) Minutio Q(uinti)f(ilio) Cos. Qua agerprivatus castelli Viturior(um) [B : Tituriorum] est, que(m) agrum eos venciere, hœredemq(ue) seq(ui) licet. Is ager vectigal nei [B : ager vectigalieni] fiet. Langatium fineis agri privati ab rivo infimo, q(ui) oritur ab fonte in Manicelo [B : qui oritur in Manicelo] adfioviu(m) ínfimo [infimo : ajouté par S. R.] eidem (sic pro : Edem) ibi terminus stat [B : ad fluvium eidem ibi terminus stat], inde flovio suso [B : inde fluvio Suso] vorsum in flovium Lemurum, indeflovio Lemuri susum usq(ue) ad rivum Combera(ne) et c(ætera)103.
78On voit également dans ladite église une chapelle Saint-Jean Baptiste ornée de statues de marbre célèbres par l’art et la sculpture, où, dit-on, est conservée une partie des cendres de ce saint104, avec un plat d’émeraude d’une valeur inestimable offert jadis aux Génois par Godefroid, roi de Jérusalem105.
79Andrea Doria, prince de Melfi, un enfant du pays, a apporté à cette ville, de nos jours, un grand renom106 ; lui qui a mérité chez tous les peuples le nom de “Nouveau Neptune’’, il nous a été donné de le voir et de lui parler. Bien qu’usé par l’âge, ce héros s’est conduit de façon très affable à notre égard.
80On voit sur la place du prétoire une statue de marbre élevée en son honneur, laurée, en vêtement de guerrier à l’antique, foulant au pied trois Turcs vaincus enchaînés. Cette œuvre élevée par la république de Gênes sur un piédestal de marbre carré est, par Hercule, d’un art magnifique107.
81On peut voir également la maison de ce prince en ville. Elle est très belle, avec ses jardins extrêmement agréables, qui abondent en toutes sortes d’arbres et de fruits, surtout des citronniers, orangers et grenadiers.108.
82À l’opposé de ce palais, quatre séries de jardins ont été taillés à grand peine, grands frais et force technique dans le rocher, de façon que chacun domine le suivant de la hauteur d’un arbre, et ils s’étendent en escalier jusqu’au sommet de la montagne ; ils sont séparés les uns des autres, en guise de murs, par la pierre naturelle qui est pour ainsi dire apparente à la surface ; ces mêmes pierres ont été transportées vers les hauteurs jusqu’au jardin le plus élevé à grand peine et habileté. Le tout est couvert de cédratiers et d’orangers toujours verts, été comme hiver, et produisant sans cesse quantité de fruits, pour le plus grand plaisir des visiteurs109.
83Non loin de ces jardins, dans une demeure privée, nous avons vu une fort belle fontaine, de forme ronde et voûtée, dont le décor mural et les statues étaient couverts de coquillages de différentes espèces et couleurs, d’une si belle facture que nous crûmes tous qu’ils avaient été peints de couleurs artificielles et de la main d’un peintre ; c’est là chose assurément belle. Quant aux autres motifs dignes d’admiration que l’on pouvait contempler dans l’ornementation de cette fontaine (par exemple des rochers vomissant de l’eau avec force, des grottes artificielles imitant étonnamment la nature, des statues répandant l’eau alentour, des pierres dégoutantes d’eau comme de la pluie, des arbres, et tout le reste fait avec un art si parfait que la nature du procédé nous plongeait dans la perplexité), tous ces artifices ne peuvent être racontés, tant ils sont nombreux et variés110. C’est bien là une chose digne d’être vue, par Hercule, tant pour l’art et le prix que pour la beauté et l’agrément.
84Nous avons vu aussi, dans une petite église dont le nom m’échappe bien qu’elle ait été très belle, le monument avec mausolée du prince André de Auria ou Doria, en marbre d’un blanc éclatant, remarquable tant par l’art que par la beauté111.
85Non loin de cette chapelle, on contemple la très somptueuse demeure offerte par la république de Gênes à ce prince : dans le péristyle se lit l’inscription suivante : Andre de Auria P.P.SP.Q.G.D.D.112
86On voit aussi, parmi les principaux édifices de la ville, le très somptueux palais d’Antoine Doria (on peut voir plusieurs superbes palais tant en ville que dans les faubourgs, mais j’ai estimé qu’il serait trop fatigant de les énumérer). Son aspect et son entrée sont dignes d’un roi, et il est orné de fort belles pièces113.
87Nous vîmes à l’intérieur de celles-ci une statue de marbre très ancienne et fort belle, représentant un homme plus grand que la normale, en costume de mime. Extraite de la terre à Naples lors du creusement des fondations d’une maison et transportée à Gênes par Antoine Doria, elle a été élevée dans ses jardins, et elle portait l’inscription suivante en fort belles lettres romaines :
P. ÆLIVS Aug : Lib. Pylades pantomimus
Hieronica Instituit. L. Aurelius Aug. (sic)
Lib : Pylades HieronicaDiscipulus
consumauit114
88Je restai quelques jours à Gênes car, à cette époque y était rassemblée une flotte de 34 trirèmes et 28 navires de charge qui devait traverser sous le commandement d’André Doria en personne, pour gagner la Corse, afin d’en expulser les Français qui venaient d’occuper avec les Turcs la meilleure partie de l’île quelques mois auparavant115.
89Pourtant, nous manquâmes de temps pour attendre leur appareillage, et nous sommes partis en reprenant le même chemin qu’à l’aller jusqu’à Voghera. L’Apennin passé, nous avons regagné Pavie par une autre route.
90Itinéraire de Gênes à Pavie :
De Gênes à Voghera, il y a donc | 53 milles |
De Voghera à Chiestezo | 5 |
De Chiestezo à Stradella | 10 |
De Stradella à Castel San Giovanni | 5 |
91Le château Saint-Jean est une bourgade très plaisante et riche située au bord du torrent Avantus qui va se jeter dans la Trébie. Elle a été offerte par le pape Clément VII à Laurent II Salviati116.
De Castel San Giovanni à Plaisance | 12 |
92Plaisance est une ville de Lombardie extrêmement fortifiée, vaste et agréable, également dotée d’une université – il est vrai pas très célèbre aujourd’hui117. Elle est située à l’embouchure de la Trébie, à l’endroit où elle se jette dans le Pô. Cette rivière est surtout connue par la bataille de la Trébie entre Hannibal et les Romains. Le théâtre de ce combat se voit un peu au-delà de Plaisance118. La ville est puissamment défendue au point de pouvoir être comptée aujourd’hui et à juste titre au nombre des villes les plus fortes d’Italie119.
93Elle possède également une citadelle imprenable grâce ses équipements120, commencée par Petro Aloysio Tregosio (sic), tyran de Parme et de Plaisance, fils du pape Paul III (à cause de ses énormes vices, il a été assassiné lors d’une conjuration de citoyens de Plaisance, dans une pièce de son palais vulgairement nommé la Citadella, et son cadavre, précipité par une fenêtre, a été livré à la populace furieuse pour être traîné avec des crocs dans les rues de la ville)121. Mais maintenant, la citadelle est menée à son terme par l’empereur Charles au pouvoir de qui elle obéit, ainsi qu’au duché de Milan.
94Dans le palais de la ville, il nous a été donné de voir des aigles vivants, d’une taille immense122.
De Plaisance à Crémone | 18 milles |
95À mille pas peut-être de Crémone, nous avons traversé le Pô.
96Crémone est une grande ville très peuplée, située non loin des rives du Pô. Comme la cité en elle-même n’est pas complètement fortifiée, on l’a dotée d’un château très puissant123 et commise à la garde d’une garnison espagnole124.
97Elle s’orne d’une fort belle cathédrale, avec un campanile très élevé dont on dit qu’il n’y en a pas de semblable en Italie125.
98On y voit aussi un monastère Saint-Pierre, tout à fait superbe, somptueux par l’architecture et le prix126.
De Crémone à Marcaría | 26 |
De Marcaría à Mantoue | 14 |
99Mantoue est une vaste cité fortifiée de belle allure127 : elle s’orne de rues très larges, d’une admirable suite de places128, d’édifices harmonieux et de palais insignes.
100Elle est située non loin du lac de Garde d’où sort le Mincio qui, lorsqu’il déborde, inonde tout jusqu’à Mantoue où il forme un lac et entoure la ville qu’il isole au milieu des eaux129. Aussi dit-on que c’est la ville d’Italie la mieux protégée.
101Mantoue s’enorgueillit du plus célèbre des poètes et de leur plus illustre prince, Vergilius Maro, dont on montre dans le prœtorium le portrait sculpté dans le marbre130. Il est né à deux milles de Mantoue, dans une villa qui, dit-on, se nomme aujourd’hui Petula131.
102On peut voir à Mantoue une église Saint-Pierre, d’un très beau marbre, mais qui n’est pas encore achevée132.
103On y voit également les deux palais des ducs de Mantoue, l’un en ville133, l’autre hors les murs appelé le Palais du Té, où le prince a coutume de passer l’été : il est fort beau, extrêmement plaisant et possède des peintures remarquables134.
104Il y a dans cette même résidence ou palais d’été une pièce voûtée qui est décorée de peintures représentant la gigantomachie de la fable135. Si quelqu’un prononce, dans un angle de cette pièce, un mot à voix basse – nous en avons fait l’expérience – une autre personne placée l’oreille au mur dans l’autre angle pouvait facilement l’entendre et la percevoir ; et une troisième placée entre elles deux ne percevait absolument rien, alors que cette troisième personne était pourtant située beaucoup plus près de celui qui parlait que celui qui écoutait, qui se trouvait beaucoup plus loin. Ce phénomène, par Hercule, passe aux yeux de tous et à raison pour digne d’être vu et l’artifice vaut d’être admiré136.
105Non loin de ce palais, dans l’entrée même de la ville, on en voit un autre très ancien, dit le palais Saint-Sébastien137, où l’on peut voir une peinture fort élégante et habile quoique ancienne : elle représente en sept tableaux le triomphe de César de la main d’André Mantegna, un excellent peintre138.
106Dans le prœtorium de la ville qu’on appelle il Palagio dei Signori139, on conserve un trésor fait de divers joyaux très précieux déposé par Isabelle, l’épouse de François, marquis de Mantoue140 à l’endroit que le peuple appelle la Grotta où peuvent être contemplées les choses remarquables suivantes141 : Deux Amours, dont l’un se distingue par l’ancienneté, l’autre étant dû à une main extrêmement habile de notre époque142. Parmi la quantité considérable de vases d’or et d’argent, on y voit aussi une corne de licorne d’une taille immense et d’une grande beauté143, et un orgue d’albâtre doué d’une sonorité très harmonieuse144.
107À quelques milliers de pas de la ville se situe le fameux palais royal des ducs de Mantoue appelé Marmirollo, si remarquable tant par son art que par son prix145.
108Ayant quitté Mantoue, nous sommes revenus en territoire vénitien. Le Mincio constitue en effet la frontière entre la Lombardie et les Marches trévisanes du domaine vénitien146.
De Mantoue à Sanguinetto | 18 milles |
De Sanguinetto à Legnago | 9 |
109C’est une bourgade vénitienne très fortifiée147, appelée Liniacum par les Latins ; elle est traversée par l’Adige qui la divise en deux parties.
De Legnago à Bevilaqua | 6 |
À Montagnana | 3 |
110C’est un très beau bourg vénitien.
111À Este 7 Este était nommée Ateste et Aste par les Latins ; les roitelets de Ferrare en ont tiré leur nom et leur origine148, mais en réalité, enlevée à cette famille par les Vénitiens à la faveur des bouleversements guerriers, elle est soumise aujourd’hui à leur pouvoir149.
D’Este à Battaglia | 10 |
À Padoue | 7 |
112Après notre retour à Padoue à la fin du mois d’octobre, j’y suis resté tout l’hiver et n’ai quitté cette ville qu’une fois l’année 1553 achevée, en mars 1554, après avoir chargé tous mes bagages sur un bateau. Je suis arrivé à Venise pour les fêtes de Pâques150, et y ai fait une pause, puis j’ai finalement décidé de gagner Bologne.
113Je suis donc parti de Padoue le 21 mars.
114Itinéraire de Venise à Bologne :
115Ayant pris le bateau à Venise le 29 mars, nous sommes arrivés au très fameux port vénitien
de Malomocco, ce qui faisait | 10 milles |
116Ce port se situe sur le littoral naturel qui protège la lagune de la mer déchaînée ; il est appelé en latin Mathamacum.
De Malomocco à Chioggia | 15 |
117Ce bourg, en latin Fossa Clodia, est un port vénitien très commode situé dans le passage du Medoacus par où le fleuve se jette dans la mer151 ; il se divise en deux parties, l’une dite vulgairement Bacchiglione152, l’autre Brenta.
118De Chioggia, par le canal creusé artificiellement et à main d’homme153, nous sommes arrivés en bateau à Loreo.
De Chioggia à Loreo, il y a | 15 milles |
À Pomposa | 18 |
119Cette bourgade se situe sur la rive du Pô. De là, passant du canal au Pô, nous nous sommes transportés par le Pô jusqu’à Ferrare.
De Pomposa à Francolino | 25 |
De Frangelin à Ferrare | 5 |
120Ferrare est une grande ville, belle par ses édifices ; elle s’orne de rues très larges154. Sur la place centrale de la ville, il y a un château-fort où réside habituellement le duc de Ferrare155, bien qu’il possède également en divers lieux d’autres palais et résidences d’été très plaisants, tout remplis d’agréments, dotés de jardins à la beauté et au charme admirables156. Parmi eux, c’est une île située de l’autre côté du Pô qui occupe la première place (Ferrare se trouve en effet à côté du bras méridional du Pô, car le Pô se divise un peu au-dessus de Ferrare et atteint la mer Adriatique par trois bouches) : on la nomme en langue vulgaire le Belvedere, c’est à dire “Belle Vue.”157Elle tire tant d’éclat et de charme de la douceur de ses jardins et de l’agrément du bois dont elle est ornée, qu’on croirait voir le séjour authentique des Muses, mais l’incurie de l’actuel duc l’a menée quasiment à sa perte158.
121Il y a aussi à Ferrare une université fondée par l’empereur Frédéric II et tout à fait fameuse. Elle a été instituée et dotée de privilèges au grand dam des Bolonais auxquels cet empereur était tout à fait hostile159.
122La cité est aussi agrémentée d’une cathédrale aussi vaste qu’ancienne160 où l’on peut voir accrochés les rostres des navires et trirèmes, et les drapeaux saisis lors de la célèbre bataille de 1509 par Hippolyte, cardinal de Ferrare, sur les Vénitiens, déposés là en souvenir de sa noble victoire161.
123On voit sur la place deux statues de bronze élevées à l’entrée du prœtorium à l’effigie de Nicolas, marquis de Ferrare et d’Este, l’une où il est représenté trônant, l’autre où il est à cheval et d’allure pacffique. Il est mort à Milan en 1440162. Chez les Carmélites163 est enterré dans un tombeau de marbre Guarin de Vérone164.
124De Ferrare nous sommes revenus en bateau à Bologne en empruntant tantôt le Pô, tantôt le marais de Padusa165 et tantôt le Rino.
125De Ferrare, il y a donc 4 milles jusqu’à la Torre della Fossa166 située sur la rive du Pô, puis, quittant le Pô, nous avons ensuite pris le canal artificiel et sommes parvenus à Botifredus167, là où commence le marais Padusa qui règne jusqu’à Malabergo. De là le canal du Rino nous a conduits à Bentivoglio, et finalement nous sommes arrivés à Bologne.
126Il y a de Ferrare jusqu’à Bentivoglio (château-fort remarquable, tant par les dimensions que par l’équipement, le coût et les édifices, jadis construit par les Bentivogli, tyrans de Bologne, aujourd’hui dépourvu d’habitations)168 20 milles De Bentivoglio à Bologne 10
127Nous sommes arrivés à Bologne le 3 avril 1554. Là, je me suis soumis dès que possible aux soins du médecin Elidœus qui m’a donné assez bon espoir de pouvoir venir à bout de ma maladie. Que Dieu Tout-Puissant m’accorde la guérison souhaitée169 !
128Bologne est une ville située au pied de l’Apennin, au milieu de la voie Æmilia. Le torrent Aviso la traverse en son centre170. Elle est remarquable par les édifices tout à fait superbes, tant privés que publics, dont elle est on ne peut plus parée.
129Il y prospère une université très connue, célébrissime en Europe, recommandée surtout pour son ancienneté ; instituée par l’empereur Théodose, elle a été dotée ensuite par différents empereurs et papes – et encore aujourd’hui – de privilèges majeurs171.
130Elle possède une place centrale d’une beauté insigne172 où l’on peut voir un prœtorium qui est sans conteste l’un des premiers d’Italie par la taille173, où un légat de l’Église romaine (dont dépend cette ville) a coutume de résider, pour rendre la justice au peuple, protégé par une solide garnison de Suisses174.
131Sur la même place, on peut voir une église d’une taille insigne, dédiée à saint Pétrone, le patron de la ville175, où l’empereur Charles Quint a reçu des mains du pape Clément VII la couronne impériale176, comme nous l’apprend une pierre carrée en lettres dorées à droite de la porte du prœtorium177.
132On peut voir dans la ville une tour unique par sa hauteur, mais admirable surtout par sa forme élancée, où l’on pouvait voir, à l’époque où je suis venu à Bologne, un religieux dans une cage de bois grillagée. Il avait commis des maléfices avec une hostie consacrée, et était soumis à un supplice mérité, exposé à la chaleur, à la pluie et à toutes les atteintes du temps. Le peuple appelle cette tour l’Asinaria178.
133Près d’elle s’en trouve une autre, petite et inclinée, dite la Torre Garisenda, qui a été construite avec une telle habileté qu’elle semble aux yeux de tous menacer ruine, et a l’air d’une tour en train de tomber179.
134La cathédrale Saint-Pierre est particulièrement remarquable par son âge180.
135Le monastère Saint-Dominique est fort plaisant et très beau à contempler181. Dans son église se trouve le tombeau de ce saint en marbre d’un blanc éclatant, édifié avec un art étonnant et superbe, paré de sculptures à la ciselure admirable182. Dans la même chapelle, sur les parois plaquées de bois de différentes essences, selon la technique musive ou mosaïque, comme on dit, on peut voir dépeintes les histoires de l’ancien et du nouveau Testament selon cette technique remarquable, en petits morceaux de bois de couleur variée si habilement assemblés à la glu qu’on les croirait faites au pinceau, de la main d’un peintre avec des couleurs vives : c’est là, par Hercule, une œuvre d’art admirable pour notre temps183 !
136On peut voir dans le même monastère une bibliothèque insigne et très belle qui compte au nombre des plus célèbres d’Italie et des mieux pourvues en livres184. On y voit une Bible écrite, affirme-t-on, de la propre main du prophète Esdras sur du cuir blanc185.
137Ce monastère est décoré de plusieurs monuments variés de très savants personnages et des très beaux tombeaux de diverses personnes : il me paraît superflu de les citer tous ici. Toutefois, parmi les principaux, nommons Tadeus Pepulus, déposé dans un tombeau de marbre ; c’est lui qui autrefois s’est emparé du pouvoir dans cette ville avec la faveur suprême du peuple. Il porte l’épitaphe suivante : Tadeus Pepulus (sic pro : Pepolus) a populo Bononiensi eligitur m. ccc.xxxvii.186
138Dans l’église, on peut voir les monuments des très célèbres jurisconsultes suivants187 : Giovanni Lignani188, Giovanni d’Andrea189, Giovanni Calderini190, Bartolomeo Saliceti191, Alessandro de Imola Tartagno192, Pietro dAncorano (sic pro : Ancarano) de la famille Farnèse193, Giovanni Grotto di Monferrato194.
139Dans le monastère : Floriano da San-Pietro195, Dino de Mugello196, Cino da Pistoia197, tous trois, dit-on, déposés dans le même tombeau ; Giovanni da Imola198, Ippolito Marsilii199, Guilhelmo (sic) Zanetini200, Rolando Passaggerio201, Egidio Foscarari202.
140On conserve aussi dans le même monastère les cendres de Giacomo Pietra Melara, médecin et astrologue très éminent203.
141L’église consacrée, ainsi que le monastère, à saint François204 est ornée un peu partout, on peut le voir, de très beaux monuments de marbre et d’épitaphes : devant la porte de cette église, on voit trois sépultures en forme de pyramides, la première consacrée aux cendres du grammairien Accursius205 (fig. 1), la deuxième à celles de Rollando de Romantiis206 (fig. 2), la troisième à celles d’Odofredo207 (fig. 3 et 4), tous très célèbres jurisconsultes. Dans l’église on voit le monument du pape Alexandre V, originaire de Crète208.
142Dans le monastère des Servi209 sont enterrés les très éminents jurisconsultes Giovanni d’Anagni210 et Lodovico Gozzadini qui a été inhumé dans un très beau monument211.
143Dans l’église Saint-Jean du Mont212, au-dessus de la porte, se voit le tombeau du jurisconsulte Carlo Ruino213.
144Au monastère Saint-Sauveur, qui est remarquable de beauté et de luxe214, est enterré Antonio di Rubiera dit Codro215.
145À l’église Saint-Jacques où vivent les moines ermites216, on voit une chapelle très élégante, insigne par sa peinture plus ancienne et construite par Giovanni II Bentivoglio, tyran de Bologne, dont on peut voir au même endroit la statue équestre accompagnée de son épitaphe217.
146Dans la même église il y a une autre chapelle fort bien décorée de peintures artistement faites. Elle a été construite tout récemment par le cardinal Pogio de Bologne218. Il y a encore deux très beaux monastères hors les murs de la ville, dans les collines de l’Apennin ; l’un, dédié à Sainte-Marie du Mont, est perché sur un rocher élevé dans un beau site219 : comme on le sait, on y trouve représenté de la main d’un très noble peintre le portrait pris sur le vif du cardinal grec Bessarion220 et celui de Perotto221.
147L’autre, plus proche de la ville, et nommé Saint-Michel in Luco, est situé sur une colline d’une admirable douceur et entouré de partout par un bois très agréable ; il est fort remarquable et plaisant par son architecture d’une technique tout à fait superbe et par sa valeur, et est habité par des moines d’une grande richesse222.
148Je restai plusieurs jours à Bologne, non pas tant pour y étudier que pour y faire soigner chez des médecins ma mauvaise santé ; j’ai été guéri assez facilement grâce à leurs efforts et surtout à l’aide du Tout-Puissant, car les difficultés de ma maladie ont été à ce moment-là apaisées. Je songeai ardemment à regagner ma patrie, mais, comme je n’avais fait qu’aborder aux rives de l’Italie et que je n’avais pu ni voir ni visiter en détail le plus secret de ce pays, son cœur même (pour ainsi dire), en particulier ses principales curiosités, mon âme était encore étonnamment avide de voir cela et je perdais patience à force d’attendre. Aussi, quelque aimable compagnie s’offrant à moi, je décidai de façon irrévocable d’accomplir ce à quoi je m’étais résolu. Mais comme, à cette époque, la chaleur augmentait assez fortement (le soleil était alors près du cancer), j’ai décidé d’attendre dans la ville de Venise un moment plus propice au voyage, à la fois pour m’y reposer et pour envoyer mes bagages dans ma patrie (pour qu’ils y arrivent avant mon retour).
149J’ai donc quitté Bologne le 7 juin et je suis resté à Venise jusqu’au 15 août.
150De là je me suis transporté à Padoue, puis je suis revenu à Bologne où m’attendaient mes compagnons de voyage.
De Padoue à Rovigo | 20 |
À Ferrare | 30 |
À Bologne | 30 |
151Je suis parti de Bologne en prenant la route de Rome le 26 août, en compagnie du docteur Christophe Brandes223, de Maître Ernest, seigneur de Rechenberg224 et de Maître Louis Bœcklin de Bœcklisau225.
De Bologne à San Pietro | 13 |
à Imola | 7 |
152Aujourd’hui nommée Imola, c’est le Forum Comelii226 des Anciens, une ville située sur la voie Æmilia, pas très grande mais assez bien pourvue en édifices. Elle dispose du renfort d’un très puissant château227 gardé par une garnison pontificale, car elle appartient au pape228.
De Castel Bolognese, une bourgade très fortifiée229 | 5 |
À Fænza | 5 |
153Fænza, en latin Faventia, est une assez belle ville, coupée en deux par l’Anemo230, en langue vulgaire le Lamone. Elle est agrémentée d’une cathédrale qui est un édifice non négligeable231, et d’un très beau prœtorium232, mais cette ville est surtout célèbre pour ses céramiques qui, en raison de leur beauté et de leur élégance, sont colportées, non seulement dans toute l’Italie, car on n’en fait nulle part de plus belles, mais aussi dans presque toute l’Europe233.
À Russi, bourgade très bien fortifiée234 | 10 |
De Russi à Ravenne | 10 |
154Ravenne est une vaste ville qui comptait jadis au nombre des cités de premier rang en Italie ; aujourd’hui elle est pleine de ruines et peu peuplée ; elle est située à un endroit marécageux, et non sur le littoral marin comme autrefois, mais à une grande distance de la mer. Elle a subi le joug de différents seigneurs et obéit aujourd’hui au pape. Deux rivières l’entourent quasiment, celle de droite se nomme le Bedesus (sic pro : Bedesis)235, celle de gauche le Montone, c’est le Vitus (sic pro : Vitis)236 de Pline.
155Claudius Tiberius l’a entourée d’une enceinte qui existe encore aujourd’hui237, comme nous l’apprennent des lettres hautes d’une coudée à la Porta Clausa, dite encore Porte Dorée ; la belle apparence de ses pierres carrées (de son opus quadratum ?) est à peine visible actuellement à cause des éboulis238.
156Près de cette porte, de petits tas de marbres antiques sont visibles mais presque recouverts par de la terre : on dit que ce sont les ruines du superbe palais construit par Théodoric, roi des Ostrogoths239.
157La cathédrale est insigne par ses dimensions et sa beauté, avec sa quadruple rangée de colonnes de très noble marbre240. Dans sa chapelle majeure, on voit, figurés par des mosaïques, les archevêques de cette même église qui en ont assumé la charge grâce à un mystérieux secret, affirme-t-on, à la suite de l’apparition d’une colombe blanche241.
158L’église San Vitale, construite sur un plan circulaire, et dont la voûte est supportée par de très nobles colonnes de marbre, était autrefois entièrement décorée de mosaïques, de façon on ne peut plus habile ; elle était remarquable d’aspect par ses murs recouverts de marbres très précieux et par son pavement mosaïqué. Tout ce qu’elle contenait de splendeur ancienne est déjà détruit et ruiné par l’âge ; on peut voir aujourd’hui peu de choses de son ancienne structure : quatre colonnes très nobles s’élèvent toutefois à l’entrée du chœur, comme on dit ; celle de droite est tout à fait admirable par ses pierres précieuses variées, les gemmes, le porphyre, l’agate, la serpentine, le grenat, le jaspe rouge, vert, jaune et de diverses autres couleurs, la variété étonnante surtout de ses rubis, de ses calcédoines, le tout semé çà et là et animé : c’est bien là, par Hercule, chose aussi belle à contempler qu’inestimable par le prix et tous les connaisseurs en ces matières particulières affirment qu’on n’en trouve pas de semblables en Europe242.
159Près de ces colonnes sont visibles deux plaques de marbre antiques où apparaissent des dragons immolés sur un autel et des Amours combattant à l’aide de tridents243. Devant la porte septentrionale de l’église s’élève le cercueil où a été inhumé l’empereur Isaac et où est gravée l’épitaphe suivante :
ἐνταῦθα κεῖθαι (sic pro : κεῖται) ὁ ρατηγήσας (sic pro : στρατηγήσας) καλός (sic pro : καλῶς) (‘Ρώμην τε φυλάξας ἀβλάβῆ καί τῆν δύσιν τρὶς ἔξ ἐνιαυτοῖς τοῖς γαληνοῖς δεσπόταις Ί)σαάκιος, τῶν βασιλέων ό σύμμαχος, ό τής άπάσης Ἀρμενίας κόσμος μέγας· Ἀ ρμένιος γὰρ ἦν γὰρ οδτος έκ λαμπρού γένους. Τούτου θανόντος εύκλεώς ή σύβιος Σοσαννα (sic pro : Σώσαννα) σόφρων (sic pro : σώφρων) τρόπῳ σεμνής τρυγόνος (sic pro : σώφρων τρυγόνος σεμνής τρόπῳ) πυκνώς γενάξει (sicpro : στενάζει) άνδρος γερημένη (sic pro : στερημένη), ἀνδρòς λάξαντος (sic pro : λαχόντος) ἐκ λαματειν (sic pro : καμάτων) αὐδοξίαν (sic pro : ευδοξίαν) ἐν ταῖς ἀνατολαῖς ήλιου καί τη δύσει· σρωτοῦ (sic pro : στρατοῦ) γὰρ ἦρξε τής δύσεως καί τῆς ἔω.
160Ce qui, en latin, signifie littéralement :
Hic iacet, qui bonus fuit Imperator Romam indemnem seruans, et occidentem ter sex annis tranquillis Dominus Isaacius regum socius uniuersœ Armeniœ ornamentum magnum Armenius enim erat isto ex splendido genere. Quo mortuo gloriose contubernalis Sosanna modesta more castœ turturis, assidue gemit uiro priuata, uiro inquam, qui sortitus fuerat ex laboribus gloriam in oriente ac occidente sole. Exercitu enim prœfuit occidentis et aurorœ244
161Près de cette église, à peu de distance se trouve une petite église dédiée à saint Gervais et à saint Protais245 par la reine Galla Placidia, sœur des empereurs Arcadius et Honorius (elle fut la plus grande gloire de cette ville)246 ; elle est recouverte de marbres et se remarque surtout par un lithostroton d’une facture très élégante et d’un grand prix. Dans son entrée se dressent deux tombeaux de marbre de construction rustique élevés par la reine à son père nourricier et à sa nourrice (comme on dit) (sic). Au centre de l’église apparaissent deux autres monuments de marbre blanc où, affirme-t-on, sont conservées les cendres des deux fils (= enfants) de ladite reine. Au-dessus de l’autel, on peut voir enfin le tombeau personnel de la reine, composé de marbre précieux247.
162Dans l’église Saint-André, on peut voir neuf colonnes du plus beau marbre, dont deux placées face à face sont insignes par leurs taches de couleur rouge et blanche, et admirables de beauté par cet étonnant effet de la nature248.
163L’église Saint-Apollinaire, parfois nommée in Cælo Aureo249, a été construite et décorée par Théodoric, roi des Ostrogoths, avec deux rangs somptueux de colonnes de marbres très nobles qu’il avait fait transporter de Constantinople et de Rome, sans lésiner sur les frais pour la parer de façon parfaite de la beauté de diverses matières250. Il est vrai qu’aujourd’hui presque tous ces ornements sont presque écroulés de vieillesse ; parmi les œuvres anciennes se reconnaissent l’empereur Justinien et sa femme représentés en mosaïque au-dessus de la porte. On voit aussi dans la même église une chapelle très insigne par la beauté de ses ornements extrêmement variés, entre autres deux petites colonnes qui offrent l’aspect de l’agate plutôt que du marbre251.
164L’église Saint-Jean-l’Évangéliste, construite par la même reine Galla Placidia, est remarquable surtout par son ancienneté et sa magnificence : on peut y voir représentés en mosaïque tous les empereurs descendant de la famille de cette reine252.
165Le monastère Sainte-Marie in Pórtico, le plus beau de toute la ville, est très remarquable par son architecture, son art, son prix et sa magnificence253.
166Près de l’église Saint-François254 se voit le monument du poète Dante Alighieri, avec l’épitaphe suivante :
Jura Monarchiœ superos phlegetonta lacusq(ue)
Lustrando cecini, volueruntfata quousq(ue)
Sed quia pars cessit melioribus hospita castris
A(u)ctoremq(ue) suum petiit fœlicior astris
Hic claudor Da(n)tes, patriis extorris ab oris
Quem genuitparviFlore(n)tia mater amoris255.
167Non loin de ce monument se trouve un cercueil de marbre antique avec l’inscription suivante :
Flaviœ Q(uinti) F(iliœ) Salutari coniugi rarissimæ L(ucius) Publicius Italicus dec(urio) orn(atus) et sibi V(ivus) P(osuit) Hic coll(egio) fabr(um) M(unicipii) R(avennatis) HS XXX (milia) N(ummum) vivus dedit, ex quorum redditu quotannis (sic pro : quod annis) decurionib(us) coll(egii) fabr(um) M(unicipii) R(avennatis) in œde Nept(uni) q(uam) ipse extruxit die Neptunalior(um) p(rœ)sentib(us) sport(ulœ) (denarii) bini dividere(n)tur. et dec(urionibus)XXVIII suœ (denarii) centeniquinquageniquodannisdarentur, utexeasum(m) a sicuti soliti sunt arca(m) Publiciorum Flaviani, et Italicifiliorum et arcam, in qua posita e(st) Flavia Salutaris, uxor eius, rosis exorne(n)t, de (denariis) XXV sacrificentq(ue) ex (denariis) XIIS(emissem) et de reliq(ui)s ibi epulentur, ob q(uam) liberalitatem coll(egium) fabr(um) M(unicipii) R(avennatis) inter bene meritos quodannis rosas Publiciis supra S(criptis) et Flaviœ Salutari uxori eius mittendas, ex (denariis) XXVsacrificium (sic pro : sacrificiumque) faciundum, de (denariis) XIIS(emissem) per magistros decrevit256.
168Il y a aussi beaucoup d’autres églises où apparaissent çà et là de nombreuses autres épitaphes, pierres, inscriptions et vestiges de l’Antiquité que l’on doit omettre pour faire bref et parce qu’ils ne sont pas assez importants.
169Hors des murs de la ville de Ravenne, se rencontre le monastère Santa Maria Rotonda, ainsi nommé parce qu’il a été construit sur un plan circulaire avec un art et une science admirables, en opus réticulé d’énormes pierres carrées257. Son pavement est orné en opus musivum ou mosaïque ; un monolithe recouvre toute la construction (c’est une chose bien digne d’admiration) en guise de toiture ; un peu creusé en son centre, il comporte une large ouverture au sommet258. Cette cavité a reçu la tombe et le monument de porphyre de Théodoric, roi des Ostrogoths. Long de 8 pieds et large de 4, ce monument admirablement recouvert de bronze avec d’étonnantes sculptures d’un art fort somptueux, a été bâti pour son père par la reine Amalasuntha sa fille. Mais il a été en partie brisé par force à l’aide d’une machine de bronze (une bombarde) par des soldats avides à la recherche de butin, et il gît renversé à terre à l’endroit où on le voit aujourd’hui encore259.
170À trois mille pas de la ville et à faible distance de ce monastère, près d’une petite rivière vulgairement nommée le Ronco, a été commise une affreuse bataille fort connue entre les Espagnols et les Français où sont tombés plus de 18 000 hommes le jour de Pâques 1512260.
De Ravenne à Savio ro milles | 10 milles |
171C’est ici que se trouve la traversée de la rivière vulgairement appelée le Savio : c’est l’Isapis et le Sapis des Anciens261.
À Porto Cesenate262 | 10 |
172Avant d’arriver à Porto Cesenate, surgit vers le midi, à 1000 pas de la route ordinaire, la ville de Cervia263 située dans un endroit marécageux, vide d’habitants pour cause d’air vicié, mais assez commode par son site maritime. Dans ce bourg, on élabore chaque année tant de tas (de sel), et l’on en voit une telle quantité éparpillés çà et là dans les champs, qu’on les prendrait, en raison de leur nombre et de leur taille, non pour des tas de sel mais pour des tumulus de terre ou des collines264.
173Près de la cathédrale on voit un très beau tombeau de marbre blanc en forme de pyramide, long de 6 pieds, où sont sculptés deux enfants au visage triste, tenant d’une main un flambeau embrasé renversé et brandissant de l’autre une couronne de fleurs, entre lesquels on lit les mots suivants :
M Aur. Mace. Vet : Nat. Delin. ex sub : opt. sibi et anno victoriœ liberatœ, vivus posuit. si q(ui)s hanc arc. P. Ex. F.S.S.S.S.A.D.F.C. (sic)265
174Non loin de cette ville située au pied de l’Apennin, on peut voir la ville de Cesena, distante de 10 000 pas de Porto Cesenate, sur le Sapis que le peuple nomme il Savio. Elle possède une population abondante, à cause surtout de la commodité et de la fertilité de sa situation, est pourvue d’un château-fort ruiné par l’âge qui a été construit par l’empereur Frédéric II. Aujourd’hui tout ce territoire obéit au pontife romain266.
175Non loin de Cesena se trouve le monastère Sainte-Marie de Monte, ou Mons Mauri267 : sous l’autel principal de son église on peut voir un antique tombeau long de 6 pieds, large et profond de 2, avec l’épitaphe suivante :
Seia T. F. Marcellina sibi et Vibennio Marcellino filio vivaposuit.
Quod volait et potuit : Quod potuit et voluit268.
176Dans le pavement de l’église on lit ceci :
Balneum Aurelianum, ex liberalitate Imp(eratoris) Cœs(aris) M(arci). Aureli(i). P.l. [sic pro : pii fel(licis) Aug(usti)] : servata indulge(n)tia pecuniœ ei(us) Quam Deus Aurelianus concesserat, facta usurar(um) exactionem (sic pro : exactione) ; cura(n)te Statio Iuliano, V(iro) [E(gregio) omittum] curatore res [sic pro : res(p)(ublica)] : referai (sic pro : refecit)269.
177À un autre endroit, on lit :
Templum Pietatis270, et ensuite : D(is) M(anibus) P(ublio) Crassivo [A : Crus sito] (sic pro : Grasinio) Martinio (sic pro : Martino) Militi C(o)hor(tis) : III. Prœtoriœ S. T. M. [sic pro : st(ationis)...] Sextilia Semphicia (sic pro : Simplicia) (Artimisia omití.) Coniunx incomparabilis, coniugi suo charissimo dolens, posuit, et libertus. H. V. Crassini(us) (sic pro : Grasinius) F. et ipse dolens curavit271.
178Il en manque beaucoup car la pierre est brisée.
De Porto Cesenate à Rimini | 15 milles |
179La ville de Rimini, située sur le littoral de la mer Adriatique, est arrosée par l’Ariminus272 ; Octavien Auguste y a construit un pont qui existe encore aujourd’hui, composé d’une série de cinq arches en pierres carrées de marbre : c’est l’un des trois qu’il a construits sur la via Flaminia273. On y lit gravées les lettres suivantes :
Imp(erator) Cœsar D(ivi). F(ilius). [B : D(ivi). F(ilius). omitt.] Augustus Pontifex Max(imus). Co(n)s(ul). XIIII Imp(erator). XX. Tribunitiœ pot(estatis). XXXVII. P(ater).P(atriœ).
180De l’autre côté du pont :
Tib(erius) Cœsar Divi Augusti f ilius). Divi Iulii n(epos). Augusti Ponti(fex) Max(imus) Co(n) s(ul) IIIIImp(erator) VIII Trib(unicia) potest(ate) XVII dedere274.
181À cet endroit commence la voie Flaminia. Ce pont relie la Flaminie à l’Émilie275.
182À la porte orientale de cette ville on voit un arc de triomphe de marbre construit par César Auguste276 avec l’inscription suivante :
Co(n)s(uli) Septimio [sic pro : sept(imom)] designat octavo m. V. celeberrimeis [B : celeberrimis] Italiœ viis (sic pro : vieis) consilio Senat :Pop :277
183Dans la partie de la ville proche de la mer, on peut voir les ruines d’un théâtre de briques cuites278 et, çà et là, de nombreux fragments d’épitaphes et d’antiquités variées ainsi que les anciens palais de la famille des Malatesta qui furent autrefois les maîtres de cette ville279. Aujourd’hui elle obéit au pape280.
De Rimini à Cattolica | 15 |
À Pesaro | 10 |
184En latin Pisaurum, en langue vulgaire Pesaro, cette ville, très plaisante par son site et ses édifices, est située sur le littoral de la mer Adriatique. À l’ouest elle est arrosée par l’Isaurus, vulgairement nommé la Foglia (sic)281, qui, franchi par un pont, sert de frontière entre la Romagne et le marquisat d’Ancône. Elle possède un château-fort très bien équipé282, même si la ville elle-même a été admirablement fortifiée par les ducs d’Urbino au pouvoir de qui elle est soumise283.
185Elle a aussi un prœtorium sur sa place publique, dont la beauté n’est pas à négliger284.
186On voit aussi l’arsenal du duc d’Urbino où paraissent, non seulement différentes sortes d’armes285, mais aussi une foule considérable de choses singulières et diverses parmi lesquelles des monuments de l’Antiquité et surtout une très belle statue de bronze de Bacchus286 et les bustes des rois de Macédoine Philippe et Alexandre, sculptés dans le marbre avec un art admirable287, le tout se remarque par son étonnante ancienneté.
187Non loin de la ville se trouve le très beau palais des ducs d’Urbino, dit il Poggio Imperiale, orné d’édifices d’une admirable beauté, agrémenté de la douceur de ses jardins, de la variété de ses fontaines qui vomissent de l’eau selon des procédés merveilleux. Il est si riche en agréments qu’il figure aujourd’hui à bon droit au nombre des endroits les plus attrayants d’Italie, et pas à la dernière place288.
188De Pesaro à Fano 5 milles
189Fano est situé sur le littoral de la mer Adriatique ; c’est une ville qui ne manque pas d’élégance et que les Anciens appelaient Fanum Fortunæ, d’où elle a tiré son nom, parce qu’autrefois un temple tout à fait superbe y était dédié à la Fortune ; on peut en trouver encore aujourd’hui les vestiges289.
190On y voit aussi un fort somptueux arc de triomphe de marbre construit avec une grande adresse, d’une hauteur de presque trente coudées selon ce que l’on peut supposer car sa base est recouverte de terre, et d’une largeur de vingt coudées290. Y sont gravées les lettres suivantes, hautes d’une coudée :
Divo Augusto [B : Augustine sic] Pio Constantino Patri d(omi)no. (sic pro : dominorum) Q. Imp(erator) Cœsar. Divi F(ilius) Augustus Ponti(fex) Max(imus). Co(n)s(ul) XIII tribunale [sic etiam B] potest(ate) XXXII. Imp(erator). Pater. patriœ mur(um) dedit.
191Et au-dessous de cette inscription on lit en complément :
Cura(n)te L(ucio) Turcio Secundo Aproniani, Prœf(ecto). Urb(i). Fil Asterio. V. C. Corr Flam(iniœ) : et Piceni291.
192Le sommet de cet arc et son péristylion fait de très belle façon se sont écroulés, mais on peut assez facilement en contempler la forme et l’image, car il a été autrefois sculpté dans le marbre à proximité, afin de durer éternellement, par les habitants de Fano. On y voit inscrites les lettres suivantes :
Effigies arcus ab Augusto erecti, postea tormentis ex parte dirupti, bello Pauli contra Faneuses. m.cccc.lxiii. (290)292
193De Fano à Senigallia 15 Les Gaulois Sénons ont donné leur nom à cette ville lorsque, après avoir dévasté Rome et été bousculés par Camille, ils vinrent y habiter293. Certains Anciens l’appelaient Sena, d’autres Senogallia, et elle a aujourd’hui conservé ce nom294. Cette ville possède un château-fort très bien équipé, soumis en même temps qu’elle au pouvoir du duc d’Urbino295. Ici s’achève la Gaule Cisalpine.
194Non loin d’Ancône se trouve le promontoire appelé Cimeria par les Anciens296. Il était autrefois renommé pour le temple de Vénus qui se dressait au sommet de cette montagne297, aujourd’hui il est habité par des ermites298.
195Au pied de ce promontoire se trouve la ville d’Ancône, bâtie sur le rivage incurvé de la mer Adriatique qui ressemble à un coude plié, d’où son nom299 ; l’Apennin s’y étend magnifiquement jusqu’à la mer. La ville bénéficie des avantages d’un port extrêmement bien protégé, fort célèbre dans toute l’Europe pour sa commodité, son site et sa sécurité. Elle a été jadis décorée par l’empereur Trajan, lorsqu’il y construisit un grand nombre de degrés de marbre300 bien commodes pour charger et décharger les marchandises sur les bateaux, et un arc de triomphe à proximité pour l’ornement301. On voit encore ce très bel arc en marbre, intact, mais les marches sont presque toutes ruinées par l’âge et la négligence. On lit le texte suivant sur l’arc :
Imp(eratori). Cœs(ari). D(ivi). Nervœ F(ilio), Nervœ Traiano optu(m)o Aug(usto). Germanic(o). Dacico Pont(ifici). Max(imo). tr(ibunicia). Pot(estate). XIX Imp(eratori). XI (sic pro : IX) Co(n) s(uli). VII (sic pro : VI) P(atri). P(atriœ). Providentiss(im)o Principi S(enatus). P(opulus). Q(ue).R(omanus).
Quod adcessum Italiœ hoc est (sic pro : etiam) addito, ex pecunia sua, portum (sic pro : portu) tutiorem navigantibus reddiderit.
196À droite :
Plotinœ Aug(ustœ). coniugi Aug(usti).
197À gauche :
Divœ Marcianas Aug(usti). sorori Aug(ustœ)302.
D’Ancône à Lorette | 15 |
198Lorette est une bourgade située sur une colline en pente très douce, qui semble bien fortifiée par la nature et la technique. Une église y est consacrée à sainte Marie303 : c’est non seulement l’église la plus fameuse de toute l’Italie, et par conséquent d’Europe, mais, tous les ans, à des dates particulières, une foule immense venait de l’ensemble du monde chrétien, qui, ayant fait vœu de visiter cet endroit sacré, avait coutume de se prosterner dans la chambre de la Vierge Marie (on rapporte qu’elle y a été élevée et y a reçu l’ange de l’Annonciation). Elle est visible au centre de l’église, est tout particulièrement ancienne et sombre304. Les papes de notre époque ont orné cette chapelle avec un art admirable, de sculptures stupéfiantes d’habileté, de placages de marbres très précieux et d’une grande variété de statues d’une beauté incroyable. Je ne me rappelle pas avoir contemplé ouvrage plus élégant ni plus somptueux en aucun endroit d’Italie305. On dit qu’aucun de ces ornements récents ne peut être fixé aux murs sacrés de la chapelle, par aucun artifice, car elle semble avoir été apportée du ciel, et il ne faut pas mêler les choses profanes et les choses sacrées. Je ne dirai rien, en outre, de la quantité admirable des tableaux accrochés un peu partout, où l’on voit peintes et dessinées des fables – je veux dire des miracles : ceux en effet dont le vœu s’est réalisé en ce lieu consacré ont l’habitude d’offrir, dans cette église en manière d’ex-voto, la raison de leur vœu peinte sur un tableau306.
199Que dire en outre des offrandes de cire et d’argent307, et des statues au nombre desquelles on peut voir celle d’Anne – bénie soit sa mémoire – l’épouse de notre sérénissime roi Ferdinand : elle est haute d’une coudée et est en argent fondu308. Mais est-il nécessaire de rapporter tout cela en détail ? Reprenons à présent notre voyage.
De Lorette à Recanati | 3 |
200Recanati, autrefois Ricinetum309, est une très vaste ville située sur une montagne assez élevée : elle est remplie de ruines310.
À Passa di Macerata311 | 10 |
À Tolentino | 10 |
201Ces peuples sont appelés par Pline Tolentinates312.
202C’est une bourgade très belle et très plaisante par son site, patrie du très savant Francesco Filelfo.313
203Le duché de Spolète commence ici, et comprend la majeure partie de l’Ombrie.
À Valle Chemara | 8 |
À Muccia | 8 |
À Verchiano | 12 |
À Spolète | 14 |
204Toute la région jusqu’à Spolète recouvre une plaine très agréable et fort fertile, surtout connue pour ses vignes et ses oliviers. La ville de Spolète est en partie située en plaine et s’étend en partie sur une colline où elle possède une forteresse qui n’est pas à négliger314, réunie à la ville par un pont de pierre soutenu par des colonnes très élevées, tandis qu’une vallée très profonde mais pas très large sépare le château-fort de la ville315. On la disait jadis capitale et métropole de l’Ombrie. La ville par elle-même n’est pas laide et est très peuplée. Elle a possédé autrefois des ornements antiques, des théâtres, des temples, des cirques, mais tout a été détruit, démoli par les Goths316.
205Sur la place de la cathédrale, on peut voir une grande et fort belle fontaine crachant l’eau en quantité317.
206En sortant de Spolète et jusqu’à Terni on rencontre des montagnes et une route très pénible et étroite vulgairement nommée la Valle di Strettura318, mais en bien des endroits on peut voir une quantité étonnante de vignes et d’oliviers plantés à la façon de forêts. C’est ainsi qu’on compte
de Spolète jusqu’à Terni | 12 |
207Ces peuples étaient appelés par les Anciens Interamnates319, aujourd’hui la ville est nommée Terani ou Terni. Elle est très agréable par son site, sur le Negra, que Virgile nomme le Nar : il arrose les murs de la cité et est franchi par un pont de pierre320. De très vastes ruines se voient ici et là sur le pourtour de la ville321, ce qui montre assez nettement qu’elle était très étendue.
De Terni à Narni | 6 |
208Narnia est le nom que lui donnaient les Anciens, certains même l’appelaient Nequinum322 : elle est située sur un sommet très élevé et des monts escarpés et rocheux323, elle dont Martial dit :
Narnia sulphureo quam gurgite candidus amnis
Citant (sic pro : circuit), accipiti vix adeunda iugo324.
209Elle est très bien protégée au sud par un rocher escarpé au pied duquel se précipite le Nar à grand vacarme et dans un bruit terrible et retentissant325. Elle abonde, au nord, en vignes et oliviers. Lors du sac très récent de Rome, elle a subi une destruction presque totale, comme nous l’apprennent l’absence de toute population et la désolation des édifices326.
210Lorsqu’on sort de Narni, on rencontre une route taillée par la force et la technique dans les parois et les rochers de la montagne, pour mettre à la disposition des voyageurs un chemin plus facile ; c’est un travail admirable par l’ampleur de l’effort accompli327.
De Narni à Otricoli | 6 |
211Otriculum – c’est le nom que lui donnent les Anciens – est appelé par Strabon Ocriculum328 ; cette bourgade est située sur une colline, à mille pas des rives du Tibre. Non loin de ce bourg, on aperçoit dans une vallée voisine les ruines et vestiges de l’antique ville Sabine d’Ocrœe329 ; on peut y voir les restes d’un amphithéâtre330 et de divers édifices, ainsi que des décombres de murs et de colonnes immenses331. L’empereur Auguste avait édifié à Ocrœa un pont sur le Tibre qui était l’un des quatre dont on a parlé plus haut, sur la voie Flaminia. Les vestiges des arches de ce pont sont encore visibles332. Aujourd’hui on traverse habituellement en bateau.
D’Otricoli à Civita Castellana | 9 |
À Rignano | 7 |
À Castelnuovo | 7 |
212C’est là que l’on voit, jusqu’à Rome, les plus grands restes de la voie Flaminia333.
À Prima Porta | 7 |
À Rome | 7 |
213Je suis arrivé à Rome le 3 septembre 1554.
Notes de bas de page
1 Seyfried Pfintzing était consiliarius de la nation germanique de Padoue : Brugi, éd. 1912, 14, 18 et 494 ; Woolfson 1998, 18-19 (Zonta 2004 l’ignore). Les Pfintzing étaient une famille de Nuremberg dont une branche s’est installée à Breslau à la fin du xve siècle (Kneschke 1867, 127), mais Seyfried n’est mentionné ni par Pusch (Pusch 1988, 215-219) ni par Stein (Stein 1963, 221-222), et Woolfson considère Seyfried (Siegfried) comme Nurembergeois (Woolfson 1998, loc. cit.). Signalons toutefois qu’une nièce de R., Maria (fille d’Heinrich) épousera en 1567 un Ludwig Pfintzing (le Jeune), de Breslau probablement (Stein 1963, 222 ; Pusch 1988, 216 et 421).
2 La cathédrale Santa Maria Annunciata (ou Maggiore), s’élève sur l’emplacement d’une basilique paléochrétienne du ve siècle, reconstruite au viiie ou ixe siècle, puis aux xe-xie siècles, entièrement refaite en 1444-1480 et dotée d’une coupole de Palladio en 1557-1566. L’église actuelle est une reconstruction consécutive au bombardement de 1944. L’autel majeur, riche de marbres rares, issu de l’atelier de Giovanni da Porlezza (ou da Pedemuro) et Girolamo Pittoni (1534-35), s’élève aujourd’hui au presbytère (Caspary 1965, 87).
3 Il s’agissait probablement du jardin de Girolamo Gualdo il Vecchio (1492-1566), chanoine de la cathédrale de Vicence, et l’un des fondateurs de l’Accademia dei Costanti de cette ville, protonotaire apostolique depuis 1532. Il avait constitué dans son palazzo de Pustella (cha’Gualdo ou ca’Gualdo)
4 La Torre di Confine est située près de Gambellara, à la limite entre Vicence et Vérone. Elle possédait une fortification qui fut brûlée par les Impériaux pendant la guerre de la ligue de Cambrai (1513).
5 Il s’agit du Ponte Pietra (d’origine romaine), du Ponte Nuovo, du Ponte delle Navi, du Ponte Scaligero ou de Castelvecchio, bâti par les Scaligeri : Garavini, éd. 1983, 412, n. 315.
6 Ce sont le Castelvecchio (bâti par les Scaligeri, 1354-1376), les Castelli de San Pietro et San Felice (dus à Gian Galeazzo Visconti, 1393). La ville était par ailleurs pourvue d’une puissante enceinte collinaire précédée d’un fossé, remontant à l’époque des Scaligeri (1321-1324), et renforcée entre 1520 et 1578 par le système à bastions de Michele Sanmicheli, l’architecte de la Sérénissime (Barbetta 1970).
7 Nous ignorons ce qu’était ce “fort Saint Barthélemy.” Il semble correspondre au Castello de San Pietro : le théâtre romain est en effet établi au pied de la colline de San Pietro. Il a été daté de l’époque augustéenne (Mangani et al. 1981, 164-165 et plan, 163).
8 L’amphithéâtre de Vérone (l’Arena) est l’un des monuments romains de ce type les mieux conservés. Sa cavea a été reconstruite à partir de 1490, mais il avait connu des restaurations dès le xiiie siècle. Il mesure 152 sur 123 m. Il comportait effectivement 72 arcades en façade (ibid., 176-177, 2 fig. ; Golvin 1988, t. I, 169-171, no 150 ; t. II, pl. XXXIII).
9 Torello Saraina († 1550), jurisconsulte véronais, auteur de nombreux ouvrages sur les antiquités de sa ville, dont : Saraina, Torello, De origine et amplitudine civitatis Veronœ... Eiusdem de vins illustribus antiquis veronensibus. De his, qui potiti fuerunt dominio ciuitatis Veronœ. De monumentis antiquis l’une des plus belles collections de la Vénétie du xvie siècle, composée d’antiques, mais aussi d’un célèbre jardin-microcosme où, “parmi les cèdres, les jasmins, les orangers, les romarins et les lauriers, étaient placées des volières remplies d’oiseaux" (Pomian 1987, 89.) La deuxième moitié du siècle voit en effet leur apparition en Europe (Jourde 2008). vrbis, & agri Veronensis. De interpretatione litterarum antiquarum. Index prœterea huius operis in calce additus est, Vérone, Antonius Putelletus, 1540 : cf. Weiss 1969, 130 ; notice dans Daly Davis, éd. 1994, § 3. 4, 66-68, 2 fig.
10 Voir note précédente.
11 La Porta (dei), Borsari était l’entrée monumentale de la ville (Mangani et al., 1981, 174-175, fig.). Inscription CIL, V, 3329 (265 p.C.).
12 Le Duomo de Vérone est placé sous le vocable de Santa Maria Maggiore ou Matricolare. Construit en 1187, reconstruit dans la deuxième moitié du xiie siècle. Sa nef a connu une rénovation sous la conduite de l’évêque Gian Matteo Giberti : l’intérieur est divisé en trois par des pilastres de marbre rouge, et possède quatre chapelles de chaque côté ainsi qu’un presbiterio fermé par un jubé semi-circulaire de marbres polychromes dû à Michele Sanmicheli (1534) (Moore 1985).
13 Il s’agit sans doute d’un tabernacle antérieur à l’actuel – installé, depuis la seconde Guerre Mondiale, dans la sacristie, et qui date du xvie siècle.
14 C’est le Palazzo dei Podestà (ou Palazzo Cangrande della Scala), situé sur la piazza dei Signori (xive siècle).
15 Santa Maria Antica, église reconstruite en 1185, dotée d’un campanile roman.
16 Ce célèbre monument, situé au Sagrato de S. Maria Antica, est l’Arca de Cangrande della Scala, vicaire impérial de Vérone de 1311 à 1329 (Varanini 1989 ; Miller 2004). Il est couronné d’une statue équestre et date de 1332 (?) à 1359 (Panofsky 1995, 88, 98, fig. 316-318 ; Pope-Hennessy 1996, 123, 256 et pl. 121).
17 Mastino II della Scala (1308-1351), vicaire impérial de Vérone de 1329 à 1351 (Varanini 1989a). Le monument est du même type que le précédent (Pope-Hennessy 1996, 123, 256 et pl. 122). Le troisième monument est de Cansignorio, seigneur de Vérone de 1359 à 1375, par Bonino da Campione.
18 San Fermo Maggiore, basilique double commencée en 1065, achevée en 1143 par les bénédictins. Vers 1313, elle devient église supérieure des franciscains.
19 Probablement le monument Brenzoni, en marbre rouge et en pierre, œuvre du cercle de Nanni di Bartolo (actif de 1419 à 1451). Il contient le cénotaphe de Niccolò Brenzoni († 1422), daté de 1426 (PopeHennessy 1996, 275 et pl. 215).
20 Le bourg de Peschiera a été fortifié par les Scaligeri à partir de 1271.
21 Les Vénitiens, maîtres de Peschiera en 1440, ont poursuivi la fortification de ce site capital pour la défense de leur territoire.
22 Brescia a été conquise sur les Visconti par les Vénitiens en 1426. La ville est dominée par une forteresse du xiiie siècle, le Castello, sur le mont Cidneo (reconstruite par Venise au XIVe s.).
23 Le Palazzo della Loggia (ou del Comune) : d’époque vénitienne, construit de 1492 à 1574, sous la direction de Filippi de’Grassi, avec la participation de Sansovino et Palladio pour l’étage supérieur. L’ordre inférieur, terminé en 1501, se caractérise par des colonnes flanquées de pilastres soutenant de grandes arcades rythmées par des bustes d’empereurs romains, œuvres des Milanais Gaspare Coirano et Antonio della Porta, dit il Tamagnino.
24 Il s’agit du célèbre Lapidario situé sur la façade des palais du Monte Vecchio et du Monte Nuovo di Pietà, piazza della Loggia, premier musée lapidaire du monde constitué d’inscriptions, stèles funéraires, autels découverts dans les fondations des édifices de la place, autour du Duomo et lors de la démolition des fortifications médiévales. La décision fut prise en 1465 pro maiori ornamento nostrœ principalis plateœ, et encore en 1480 (Weiss 1969, 161 et η. 1 ; Garzetti 1975 et 1979, 182-189 ; Cavalieri Manasse et al. 1979, 249 ; Stella 1984, 326-327 et fig. 1). Parmi les inscriptions : CIL, V, 4305, 4308, 4318-19, 4325, 4328, 4339-4346, 4361. On note une dédicace à Auguste, des bases aux noms de Germanicus, Antonin le Pieux et Aurélien. Les bustes du Palazzo et les inscriptions du Lapidario entretiennent donc un dialogue muet.
25 Orzinuovi (cf. Alberti 1553, 359r), vénitien depuis la paix de Lodi (1454) a été pourvu d’une Rocca San Giorgio en 1477 (Magli et al. 1992).
26 Massimiliano Stampa, qui avait été nommé châtelain de Milan par Francesco II Sforza, résista à Charles Quint après la mort du duc (24 oct. 1535) jusqu’en novembre 1536. Il livra ensuite le castello Sforzesco à l’empereur, en échange de 50 000 écus d’or et du titre de marquis de Soncino, obtenu le 3 novembre 1536. Il est mort en 1552. La domination de sa famille sur la rocca et le bourg durera jusqu’en 1876 (Sacchi 2005, t. I, 389-390 et fig. 81).
27 La ville possède une enceinte depuis 1082-1084, reconstruite en 1185. Elle a été prise par Bartolomeo Colleoni pour le compte de Venise (conquête reconnue en 1454).
28 Lapsus de R. qui a écrit Cremona à la place de Crema. Crema rebelle a en effet été détruite par Frédéric Barberousse le 3 février 1160.
29 Son nom est probablement lié au consul Gn. Pompeius Strabo (consul en 89, mort en 87 a.C.), père de Pompée le Grand.
30 Lodi Vecchio a été prise d’assaut et rasée par les milices milanaises en 1111, après une guerre de quatre années. Les ruines disparaissent entièrement en 1158 (Dartmann 2004 ; cf. Alberti 1553, 369r). Les habitants ont été dispersés dans six villages non fortifiés.
31 Le 3 août 1158, Frédéric Barberousse décide de réédifier Lodi (Lodi Nuova) à 6 km à l’est de l’emplacement de Lodi Vecchio, et la dote d’une enceinte à partir de 1160 (Opll 1987 ; Dartmann 2004, 646). Au xiiie siècle, déchirée par les luttes de clans, la ville dut se soumettre à la domination des Visconti et à partir du xve siècle elle fit partie du duché de Milan.
32 Le Castello Sforzesco, construit en 1450 (sur un ancien château des Visconti), “le plus grand d’Italie et peut-être de la chrétienté”, vaste quadrilatère de briques limité aux angles de la façade par deux tours cylindriques, avec ses fossés, ses murs, ses casemates souterraines et l’annexe de la Rocchetta. Il a suscité l’admiration de tous les visiteurs : De Beatis [Aragon (HM), 291-292 ; Aragon (AC), 195-196], Heinrich Schickhardt (1599) [Schickhardt (AB), 88] ; Montaigne en parlera (voir aussi Boucheron 1998, 200-218).
33 L’illustre Duomo de Milan, consacré à Maria Nascente (la Nativité de la Vierge), et commencé en 1386, poursuivi aux xve et xvie siècles. Il a été construit sur l’emplacement de Santa Maria Maggiore, dont la façade est demeurée en l’état jusqu’au xvie siècle (on ne pensera à la remplacer qu’en 1567). Il est couvert de 2245 statues et a été réalisé par des architectes, sculpteurs et verriers étrangers. C’est un exemple de gothique transalpin, l’une des plus vastes églises du monde (11700 m2). L’édifice, inachevé, sera de nouveau consacré en 1577 (Morel et al. 1997, 540-541 ; Boucheron 1998, 159 et n. 8 ; 158, fig. 17).
34 Le Duomo n’est évidemment pas achevé lors du passage de R. (voir note précédente).
35 Le pape Otto Colonna, mort à Rome le 20 février 1431, a consacré le Duomo en octobre 1418. Il ne s’agit pas de son tombeau (qui se trouve à Saint-Jean-de-Latran), mais de sa statue par Jacopino da Tradate (1424) (Forcella 1889, 7, no 6, inscr. de 29 lignes due à Giuseppe Brivio, gravée par Tommaso da Caponago ; Panofsky 1995, fig. 327). Au-dessous se trouvent les épitaphes des condottieri Francesco et Niccolò Piccinino († 1449 et 1444), qui furent au service de Filippo Maria Visconti.
36 Le cardinal Marino Ascanio Caracciolo (1469-1538) fut gouverneur du Milanais (l’Insubrie) pour Charles Quint du 15 septembre 1536 à janvier 1538 (De Caro 1976). Son monument funéraire, situé dans le déambulatoire de l’abside et attribué au Bambaia (Agostino Busti, 1483-1548), est spectaculaire, avec ses contrastes entre les marbres blancs et noirs (gisant accoudé du cardinal ; statues en pied de saint Pierre, Jésus ressuscité et saint Paul) (épitaphe dans Forcella 1889, 20, no 25).
37 Giovanni Visconti (c. 1290-1354), évêque et seigneur de Novare, vicaire impérial (1319) puis archevêque de Milan (1339, reconnu par le pape en 1342), seigneur (duc) de Milan (1349-1354) oncle d’Azzone V (Cappelli 1969, 329 ; Cadili 2007). Le tombeau, très simple, entièrement en marbre rouge, est un sarcophage quadrangulaire qui s’élève sur deux colonnes. Sa face antérieure est recouverte par une très longue épitaphe en vers, due à Sabino de’Zamorii (Forcella 1889, 5, no 3 ; Faragiana 1984, 241-242).
38 Le “marquis del Vasto”, était don Alfonso III d’Ávalos d’Aquino d’Aragona (1502-1546), gouverneur du Milanais de 1538 à 1546. Il a succédé en 1525 au marquis de Pescara (Fernando Francesco d’Ávalos) au commandement des armées de Charles Quint ; à la mort de Caracciolo, en 1538, il a pris aussi le gouvernement du duché de Milan. Il fut également mécène, et protégea des artistes et hommes de lettres comme le Titien ou Pietro Aretino (De Caro 1962). Sa sépulture se trouvait “dans une boîte couverte de brocarts dans la cathédrale de Milan, entre deux colonnes, à côté des ducs, avec six bannières portant ses armes tout autour ; avec l’abréviation en dessous : al. da. mar. va. (Alfonso d’Avila – sic – Marchio Vasti)” : f. Francesco Vinta au duc de Florence, 31 juill. 1546 (Leydi 2006, 128, n. 14). La cathédrale de Milan a longtemps contenu, hissés dans les hauteurs et suspendus par des chaînes de fer, les cercueils des ducs et de leurs proches parents, enveloppés d’étoffes en décomposition (jadis resplendissantes de broderies). Parmi eux se trouvaient également les cercueils de Gaston de Foix (1512) et d’Alfonso d’Ávalos (1546) (ibid., 113). Ces trophées seront retirés sur l’ordre de Charles Borromée, archevêque de 1564 à 1584. Des tableaux de marbre noir comportent les noms de tous ces personnages : Polydore Sforza (f 1475), Élise Sforza († 1471), Conrad (f 1470), Bosio Sforza (f 1476), le pronotaire Léonard († 1484), Lucie, épouse de Francesco Sforza (f 1450), Jean-Marie Visconti, Philippe-Marie Visconti, Francesco Sforza et Bianca Maria, Jean Galéas II, Maximilien et François II et plusieurs gouverneurs de Milan (Artaria 1830, 122-123, et η. 1).
39 Le Saint Clou était très célèbre et a suscité les sarcasmes de Calvin : Jean Calvin : Angliviel, éd. 1962, 55.
40 En 1502, Cristoforo Solari (dit il Gobbo) a exécuté pour le Duomo les statues d’Adam et Ève que put voir Vasari sur la façade. Comme on ne s’est occupé de cette façade qu’à partir de 1567, il est possible que ces statues aient effectivement été longtemps conservées à l’atelier des sculpteurs. Adam, d’allure apollinienne, appuie le poids de son corps sur sa jambe droite. À ses pieds se trouvent Abel et un putto. La statue fut peut-être achevée par Girolamo da Novara ou Della Porta (il Novarino), que les fabriciens avaient donné comme collaborateur à Solari (Malaguzzi-Valeri 1922, fig. 81).
41 L’Ospedale Maggiore, ou Magna Domus Hospitalis (Ca’Grande) a été fondé en 1456 par Francesco Sforza et sa femme Bianca Maria Visconti, et construit par Filarete, de 1456 à 1495. Ce fut un modèle d’architecture : voir Schickhardt (AB), 91-92 ; Anon. 1981a ; Boucheron 1998, 218-238 et plan d’après Filarete, p. 229, fig. 22. Aujourd’hui siège de l’université.
42 Le Lazzaretto di San Gregorio pour les pestiférés, construit en 1488, inauguré en 1513, accueillera les pauvres à la fin du xvie siècle. L’architecte était Lazzaro Palazzi. L’édifice était un quadrilatère presque carré de 375 m de côté, prévu pour 288 cellules. Il était entièrement entouré d’un fossé plein d’eau. Il a été démoli (sauf quelques arcades) en 1880 : voir Fichard (1536/1537), 124 ; Boucheron 1998, 264-268, plan 266 (fig. 24).
43 C’est l’antique basílica Martyrum, ou basilique Sant’Ambrogio, installée à l’emplacement d’un temple païen. Reconstruite et agrandie entre le xe et le xiie siècle.
44 L. A. Muratori écrit en 1837 que, selon Angelo Decembrio da Vigevano (1415-après 1467), il y avait là sculpté non pas Bacchus ou une bacchanale, comme on le prétendait, mais Hercule : Itaque hoc in toco Herculem lœva manu leonem per caudam humo tollere, tamquam gygas immanis, simili ac eumdem elata dextra nodoso stipite, idest clava, exanimare videtur, et ajoutait : Atcidem illum nunc versisjacere vestigiis cernuo recumbentur capite. Il s’agissait d’un bas-relief païen et le personnage ne tenait pas un chien, mais un lion (mentionné par Alberti 1553, 390v ; Muratori 1837 ; Giulini 1854, II, 9-10).
45 Le “temple d’Hercule” est censé correspondre à San Lorenzo Maggiore, l’antique basílica Palatina ou Portiana. Les seize colonnes colonnes correspondent à un propylée construit à l’aide de matériaux récupérés sur un édifice public antique. Elles sont hautes de 8, 50 m, et comprennent aussi leurs chapiteaux et des morceaux de l’architrave. Le tout est fait de marbre et date probablement de l’époque flavienne. Au centre de la colonnade, un inter-colonnement plus large est surmonté d’un arc de latericium. La colonnade précédait un grand quadriportique avec tours aux angles sud-ouest et nord-ouest, le tout étant relié à une basilique (Cavalieri Menasse et al. 1982, 315-316, et plan, 317 ; plan dans Boucheron 1998, 88, fig. 3).
46 Une colonne de granit antique de l’île d’Elbe, datée du ive siècle, porte le serpent d’airain de Moïse, d’après la tradition (œuvre hellénistique ou byzantine d’importation, avec trace de corne occipitale). Sa présence in situ est attestée dès Ennodius (473/74-521) (Mączak 2002, 335 ; Cupperi 2002, 155 et fig. 67, ceraste).
47 En effet, R. a raison de ne pas faire confiance aux moines. Didier, roi des Lombards (756-774), déposé par Charlemagne en 774, fut emmené prisonnier au monastère de Corbie, où il mourut vers 786 (Delogu 1991).
48 Le maître-autel de 835, couvert de feuilles d’or et d’argent incrustées d’émaux, de pierres précieuses et de camées, de style carolingien, est l’œuvre du maître Vuolvinio (Morel et al. 1997, 540).
49 “In faccia al pulpito sta l’organo il cui murato sostegno si crede designato dal Bramante. Nel pilone vicino dalla destra parte vedesi in alto il pregevole ritratto di sant’Ambrogio” (Zucoli 1841, 34).
50 Est-ce l’Ambrosianus D 50 sup. (gr. 234), parchemin, du début du xie siècle (289 folios) ? Pelletier, éd. 1975. 8.
51 L’humaniste Bernardino Corio (1459-1519) évoquait “parimente in argento si vedeno per lo ornato de la lignea scutella ne la quale bevea il memorato santo (= Ambroise)” (Meschini 1995, 22).
52 CIL, V, 5262 (provient de Côme). Des trois blocs retrouvés, le premier seul subsiste dans le portique de Saint-Ambroise. L’inscription est ainsi complétée par les auteurs du Corpus : C. Plinius. L(ucii) f(ilius). Ouf(entina tribu). Cœcilius [Secundus co(n)s(ul)] / augur. legat(us). pro pr(ætore). provinciœ Pon[ti et Bithyniœ] / consutari. potest(ate). in. eam. provinciam. e[x. s(enatus). c(onsulto). missus ab] / Imp(eratore). Cœsar(e). Nerva(e). Traiano. Aug(usto). German[ico Dacico p(atre). p(atriæ)] / curator. alvei. Ti[b]eris. et. riparum. e[t cloacar(um). urb(is)] / prœf(ectus). œrari(i). Satu[r]ni. prœf(ectus). œrari. mil[it(aris). pr(ætor). trib(unus). pl(ebis)] / quœstor. imp(eratoris) sevir. equitum [— Romanorum] / trib(unus). milit(um). leg(ionis) [III]. Gallica(e) [— Xvir stli-]ltib(us). iudicand(is). therm[as —] adiectis. In / ornatum. HS. CCC[— et eo amp]lius. in tutela[m] / HS. CC.T.F.I [— item in alimenta] libertor(um). suorum. homin(um). C / HS. [XVIII] LXVIDCLXVI. Rei[p(ublicæ) legavit quorum inc]rement(um). postea. ad. Epulum / [pl]eb(is). urban(æ). voluit. pertin[ere — item vivu]s. dedit. in. aliment(a). pueror(um) / et. puellar(um). pleb(is). urban(æ). HS [D item bybliothecam et] in tutelam. bybliothe-/cœ. HS. C. Cette inscription célèbre Pline le Jeune et ses œuvres : voir Lomas 1996, 241, no 406 et Gonzalès 2003, 15-16.
53 L’historien Valère Maxime a composé un manuel d’Exempla historiques, les Facta et dicta memorabilia, dédié à l’empereur Tibère, et qui devait connaître un énorme succès au Moyen Âge et à l’époque de l’humanisme, si l’on en juge d’après les quelque 350 manuscrits complets conservés, les commentaires depuis le xive siècle, et les traductions en italien (par Boccace), etc. (Schmidt 1975). Mais l’inscription découverte à Milan dans l’église San Simpliciano concerne un homonyme, prêtre de Mithra et étudiant en astrologie (= astronomie) : M(arcus). Valeri[us] / Maximu[s] / sacerdo[s] / D(ei). S(olis). I(nvicti). M(ithræ). stu[di(osus)] / astrologia[e] / sibi. Et / Severiœ. Apr[æ] \uxori / H(oc). M(onumentum). H(eredes). N(on). [s(equitur).] Cette inscription (CIL, V, 5893) et le monument ont été gravés par Tobias Fendt (Fendt 1574, pl. 8 [a]). C’est en lisant Alberti que R. a cru y voir l’épitaphe de l’historien (Alberti 1553, 391r).
54 Cette “inscription” est en fait composée de deux textes funéraires plus ou moins complets trouvés in muro urbico fossœ et rapprochés artificiellement par Alciat (CIL, V, 5858 et 5911). Le premier (5858) se rapporte à un esclave public (du municipe de Milan), nommé Epitynchanus : D(is) M(anibus) / Epitynchan[i] / m(unicipii). M(ediolanensis). ser[vi] / vilic(i). ark(arii vel -æ) (Weiss 2004, 213, no 164 ; cf. un Epitynchanus Telesinorum ser[vus arkarius] : CIL, IX, 2244). Le second (5911) concerne un inconnu qui était un responsable de l’association des commerçants cisalpins et transalpins, en même temps que patron des nautes du lac de Côme, en résidence à Milan apparemment : [— / … corpo] ris. Cisalpin(orum). et. Transalpin(orum) / patr(ono). coll(egii). naut(arum). Comens(ium) / hered(es). fac(iendum). cur(averunt) (Walser 1994, 78, extr. de Museum Helveticum, 48, 1991). Noter que le montage ancien des deux pierres (celui que restitue R.) figure dans le recueil d’Apianus et Amantius en 1534 avec la localisation : Ad S. Nazarium Porta Romana in Propyleo (Apianus & Amantius 1534, XXVII).
55 San Francesco Grande : grande église franciscaine où les chapelles princières côtoient les chapelles gentilices du xve siècle (Boucheron 1998, 148 et fig. 14, p. 149).
56 On a l’embarras du choix : l’église contient une chapelle de S. Liborio (pour le lignage Maggi), une chapelle S. Giovanni Evangelista (pour le lignage Borromeo), une chapelle S. Giovanni Battista (pour les Della Torre). Voir la note précédente.
57 Santa Maria dei Miracolipresso S. Celso : église construite entre 1490 et 1506 par Giovanni Dolcebuono, Cristoforo Solari, etc. Elle n’était, en effet, pas achevée car la façade date de 1569-1572.
58 Santa Maria delle Grazie : église dominicaine tardo-gothique, dont les nefs ont été commencées en 1464. C’est la dernière opération d’envergure de Ludovic le More qui voulut en faire le nouveau mausolée dynastique des Sforza, une “église palatine” sur le mode antique. Une tribune Renaissance de 1492 est probablement de Bramante. L’établissement est célèbre par la présence de la Cène de Léonard de Vinci (1495-1497) dans le réfectoire du couvent (Cenacolo). La bibliothèque (aujourd’hui disparue) a été fondée en 1463 par l’humaniste Gaspare de Vicomercato qui l’a léguée à l’église (Boucheron 1998, 591-598, plan, 593, fig. 37). Voir Alberti 1553, 390v. C’était une salle à trois nefs, la centrale plus élevée et plus étroite, les deux latérales abritant les bancs et les pupitres.
59 Ludovic Sforza, dit le More (1451-1508), s’est fait reconnaître duc de Milan par Maximilien en 1494. En septembre 1499, il fuit devant Louis XII. Revenu en février 1500, il est déposé le 10 avril et emmené captif en France. Il meurt au château de Loches, le 17 mai 1508. Son corps sera transféré à Milan (Balard 1998). En 1497, il avait chargé Cristoforo Solari de réaliser le monument funéraire de Béatrice d’Este qui venait de mourir. Puis la Tribuna fut transformée en chapelle ducale pour lui et son épouse. En 1564, le célèbre double gisant sera transporté à la Chartreuse de Pavie (Boucheron 1998, pl. XXV ; Giordano 2005).
60 Nous n’avons pas trouvé ce à quoi R. fait allusion.
61 San Nazaro Maggiore (ou in Broto) : c’est l’antique basílica Apostolorum de saint Ambroise, reconstruite au xie siècle.
62 La chapelle Trivulzio (1512-1550) a été réalisée par Bartolomeo Suardi (il Bramantino) pour le maréchal des troupes françaises Gian Giacomo Trivulzio (1440 ou 1441-1518) (épitaphe dans Chytræus 1594, 318). De plan octogonal, elle rassemble sous des arcatures superposées, les membres du lignage, à la manière d’un columbarium romain (Baroni 1968, 134 sq.).
63 Sans doute San Maurizio al Monastero Maggiore alle Colonne, construit, à partir de 1503, à l’intérieur du monastère des bénédictines.
64 Santa Tecla : ancienne basílica Nova, fondée en 340, ancienne cathédrale. La troisième église Sainte Tècle a été détruite en 1548 (Cavalieri Manasse et al. 1982, 309-310 ; Boucheron 1998, 554).
65 La tradition voulait que cette église se soit élevée sur les ruines du temple de Minerve : Culta Minerva fuit, nunc est ubi numine Tecla mutato, Matris Virginis ante Domum (Alciat 1621, Mediolanum, Emblema 2).
66 La Corte Vecchia est l’ancien palazzo Reale (ou Palazzo di Corte) des Visconti et des Sforza. Elle remonte au xive siècle. Elle a disparu, et se trouvait à l’emplacement du Palazzo Reale de 1788.
67 San Gottardo in Corte a été édifiée de 1330 à 1336, comme chapelle ducale, pour Azzone Visconti. R. semble ici très proche d’Alberti 1553, 390v.
68 Monument funéraire d’Azzone Visconti, seigneur de Milan en 1329, mort le 16 août 1339 (Forcella 1889, 100-101, no 74).
69 La Chartreuse (Certosa) de Pavie, fondée en 1396 par Gian Galeazzo Visconti, complétée par les Sforza vers 1450 et encore enrichie par la suite, est l’un des monuments les plus grandioses de la Renaissance lombarde (maîtres d’œuvre : Bemardino de Venise, puis Giovanni Solari et son fils ; façade commencée par Giovanni Antonio Amadeo en 1473 et les Mantegazza, terminée par Cristoforo Lombardo en 1560). Elle était pourvue de deux cloîtres. À l’époque de R., la tombe double de Ludovic le More et Béatrice d’Este ne s’y trouvait pas encore. Tous les voyageurs ont été frappés par sa splendeur : par exemple Fichard (1536/37), 125 ; Schickhardt (AB), 92 ; De Beatis [Aragon (HM), 295] ; Audebert (AO) I, 151, et commentaire, 294, n. 41.
70 Polyptyque d’ivoire représentant 66 scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament, exécuté vers 1400 dans l’atelier du sculpteur florentin Baldassare degli Embriachi (admiré par De Beatis : loc. cit.).
71 Gian Galeazzo Visconti (1351-1402), premier duc de Milan (1395) (Gamberini 2000), a été inhumé dans un très célèbre mausolée, par Gian Cristoforo Romano et son atelier (1497). Le gisant est de Benedetto Briosco (Panofsky 1995, 89). Il a été admiré, entre autres, par De Beatis [Aragon (HM), p. 296 et Aragon (AC), 138-139] ; inscription chez Chytræus 1594, 293-294.
72 Le grand parc (ou parc de chasse) de Mirabello, ceint de murs, situé au nord de Pavie, et dont Gian Galeazzo Visconti a hérité en 1379, forme un gigantesque domaine. Il a été décrit ainsi par De Beatis : “À peine a-t-on quitté la Chartreuse, on traverse le grand parc, puis un parc plus petit, par où l’on chevauche jusqu’à Pavie ; et bien que ces parcs soient fort abîmés, il est facile de voir qu’ils ont été jadis très beaux” : Aragon (HM), p. 297. Voir également Fichard (1536/37), 125 (der Thiergartt) ; et Schickhardt, ioc. cit. ; Calvi 1966.
73 La bataille de Pavie s’est déroulée, le 24 février 1525, en grande partie dans cet immense parc (Knecht 1998, 221-226 et carte, 220).
74 Situé dans l’angle nord-occidental du parc, s’élevait le Castello di Mirabello, relais pour les parcours princiers et résidence du capitano del parco. Le jardin qui l’entourait servait aussi à relier le château à la Chartreuse, fondée en 1396. En fait, François Ier a été conduit, après la bataille, à la Chartreuse de Pavie (Knecht 1998, 226).
75 Plin., Nat., 3.124 ; Tac., Hist., 2.17 ; Ann., 3.5. Le nom Ticinus est resté pour désigner le Tessin.
76 Pavie fut capitale du royaume lombard de 572 à 774.
77 En juin-juillet 1527, une armée française de 40 000 hommes, commandée par Lautrec, a passé les Alpes et envahi le Milanais, bousculant devant elle les Impériaux. Plusieurs villes furent prises, dont Pavie qui fut mise à sac, en souvenir de la journée du 24 février 1525 (Lobrichon et al 2001, 490).
78 Le Castello Visconteo est une vaste construction à tours d’angles, bâti pour Galeazzo II Visconti (et non Gian Galeazzo), de 1360 à 1365. De Beatis indique qu’il n’est pas fortifié, mais possède de commodes et somptueux appartements : Aragon (HM), 297.
79 Église de style romano-lombard, reconstruite en 1100 à l’emplacement d’une basilique du vie siècle.
80 L’Arca de saint Augustin renferme le corps du docteur africain, transporté à Pavie par Luitprand en 722-725 et enterré à San Pietro. Vers 1350, on décida de constmire une nouvelle Arca, ce qui fut fait en 1362. Le principal sculpteur fut un épigone de Giovanni di Balduccio. La tombe comporte 95 statuettes et 50 reliefs. Le “portrait” d’Augustin y figure à divers moments de sa vie : Havard de la Montagne, éd. 1913, 298 et Chastel 1986, 139-140 ; Wolters 1976, cat. no 10 ; Pope-Hennessy 1996, 255 et pl. 117 et 118.
81 C’est le jeu de paume, en allemand Katzball (Grimm 1873, 279 et 302, art. Katzball et Katzenspiel, d’après Chytræus 1582). Nous n’avons rien trouvé sur ce phénomène d’écho.
82 Le Regisole (ou Mirasole) : statue équestre romaine en bronze doré provenant de Ravenne et représentant Marc Aurèle ou Septime Sévère, détruite en 1796 par les Jacobins, à l’instigation d’Augereau. Elle s’élevait au sommet d’une colonne, sur la place du Duomo, depuis le xie siècle. Certains y ont vu la représentation d’Antonin le Pieux, ou de Théodoric, ou d’Odoacre. Les circonstances qui l’amenèrent de Ravenne à Pavie au haut Moyen Âge sont controversées : fut-ce le fait d’un roi lombard ou de Charlemagne, désireux de l’installer à Aix-la-Chapelle ? On peut raisonnablement penser que ce fut une prise de guerre des Pavesans. Durant l’attaque de Pavie en 1528, des Ravennates s’en emparèrent et la chargèrent sur un bateau sur le Pô, mais le duc François II Sforza la fit séquestrer à Crémone et on la ramena à Pavie. Elle devrait son nom au fait qu’elle reflétait les rayons du soleil. Les voyageurs sont nombreux à mentionner cette statue : De Beatis [Aragon (HM), 297-298] ; Audebert (AO) I, 151-152, 294, n. 42-43 ; Alberti 1553, 376v-377r ; Fichard (1536/37), 125 ; Schickhardt (AB), 93 et n. 48] (voir Bovini 1863 et 1863a ; Magenta 1883, 716-717 et n. 2 ; Chevallier 1968 (= Chevallier 1984, 196-199) ; Cavalieri Menasse et al. 1982, 342 ; Cuzin et al., comm. 2000, 187, fig. 3).
83 L’écrivain et philosophe Boèce, Severinus Bœthius (c. 480-524), accusé de défendre la libertas romaine (il fut consul en 510) (Léonard et al. 1969), fut emprisonné dans une tour de Pavie où il mourut en 524, sur ordre de Théodoric. Sa tombe se trouvait à San Pietro in Ciel d’Oro [à Saint-Sauveur, selon Fichard (1536/37), 125], où une épitaphe fut placée par Otton III et son tuteur Gerbert en 998 (Weiss 1969, 27). La fameuse tour de briques sera détruite en 1584, car elle menaçait de s’écrouler. Elle se trouvait à l’emplacement de l’actuelle piazza Petrarca. On en possède des dessins, par Bramantino et par Giuliano di Sangallo (cod. Barb. Vat. lat. 4424, Bibl. Apost. Vatic., f. 13V) (Gianani 1925). C’était une construction polygonale, probablement romaine, richement décorée de caryatides, d’atlantes et de frises (Greenhalgh 1989, 80). R. dit ignorer s’il a été enterré à Pavie, mais il donne une épitaphe à graver à Fendt (Fendt 1574, pl. 33, en haut).
84 Université fondée en 1361 par Galeazzo II Visconti, par autorisation impériale.
85 Andrea Alciato (1492-1550), le grand philologue et réformateur de la jurisprudence, a enseigné à Pavie en 1533-1537 et 1546-1550 (Abbondanza 1969 ; Russell 1997).
86 Giasone del Maino (1435-1519), jurisconsulte, professeur de droit à Pavie en 1467, puis à Padoue, Venise et de nouveau Pavie, maître d’Alciat. Conseiller de Ludovic Sforza (Gabotto 1888). Son tombeau se trouve en l’église Saint-Jacques, hors la ville : Audebert (AO) 1, 150 et 293, n. 37 ; Chytræus 1594, 292 ; Fichard (1536/37), 125 ; Fendt 1574, pl. 50. Fichard mentionne sa domus (loc. cit. : Duxerunt etiam me in œdes Jasonis Magni satis elegantes et magnificas, habent turriculam, quœ inversa videtur).
87 Baldo degli Ubaldi (1319 ?-1400), disciple de Barthole, et l’un des plus grands jurisconsultes du xive siècle. Son œuvre est le produit de l’école dite “des Commentateurs.” Il a été enterré dans l’église San Francesco Grande. Le tombeau et son épitaphe seront transportés au xviiie siècle sous un portique de l’université, avec ceux d’Alciat : Fendt 1574, pl. 49 ; Audebert (AO) I, 150 et 293, n. 37 (voir la remarque de la note 89, infra).
88 Sant’Epifanio (ou dell’Epifania).
89 L’épitaphe se trouve maintenant sous sa statue en pied, sous un portique de l’université : Fendt en a gravé le texte : D. Ο. Μ. | ANDREÆ ALCIATO MEDIOLANENSIIVRECONS. COMITI | PROTONOTARIO APOSTOLICO, CÆSAREOQVE SENATORI | QVI OMNIVM DOCTRINARVM ORBEM ABSOLVIT, PRIMVS I LEGVM STVDIA ANTIQVO RESTITVIT DECORI | VIXIT ANNOS LVI [en réalité, sur la stèle : LVII].M.VIII.D.IIII.OBIIT PRIDIE IDVS | IANVARII. M.D.L. | FRANCISCVS ALCIATVS I.C.H.B.M.P. [Fendt 1574, pl. 34 ; cf. aussi Chytræus 1594, 292 ; Audebert (AO) I, 150, cf. 293, n. 38, mais il croit que Baldo et Alciat étaient enterrés au même endroit].
90 Nous n’avons rien trouvé sur la maison, la bibliothèque et le portrait d’Alciat.
91 Iria chez Plin., Nat., 3, 49. La titulature Forum Iulium Iriensium (CIL, V, 785 et 7375) est sans doute augustéenne.
92 L’antique lulia Dertona conserve un long mur romain derrière S. Matteo et des restes d’aqueduc au sud (Cavalieri Manasse et al 1982, 15-17).
93 La cité, affiliée aux Guelfes, fut plusieurs fois détruite au Moyen Âge. De 1260 à 1347, elle passa sous la domination de plusieurs rejetons de familles nobles, dont Facino Cane. En 1347, elle fut incorporée au duché de Milan.
94 Détruite en 1155 par Frédéric Barberousse.
95 Le Castello, élevé en 1372 par Gian Galeazzo Visconti.
96 Serravalle Scrivia a été offerte par Filippo Maria Visconti troisième duc de Milan de 1412 à 1447, en fief, avec le titre de vicomte, à Biagio Assereto (c. 1383-1456), amiral au service de la république de Gênes, fils de patriciens gênois (Balbi 1962).
97 Ce surnom était universellement connu. “La beauté de ceste ville faict que, entrant au proverbe [...] qui se dict de celles d’Italie, l’on l’a nommée Genova la Superba” [Alberti 1553, 14r ; Audebert (AO) I, 224].
98 Gênes a possédé de nombreux territoires et comptoirs en Méditerranée, Mer Égée, Mer Noire, Crimée et Mer d’Azov, sur les côtes du Levant et de Tunisie, en particulier à la faveur de la quatrième croisade (1202-1204). Au xvie siècle, elle a pratiquement tout perdu, sauf la Corse, qu’elle a enlevée aux Pisans en 1284 et qu’elle va conserver, tant bien que mal, jusqu’en 1768.
99 Ce passage est proche de celui d’Alberti 1553, 12v. Nous préférons traduire cedri par “citronniers” plutôt que par “cèdres.”
100 Gênes était dotée d’un système défensif impressionnant bordant le littoral et se prolongeant sur toutes les hauteurs environnantes, et ce, dès 1158 (époque de Frédéric Barberousse) (Dellepiane 1984 ; voir De Beatis [Aragon (HM), 279]).
101 Aussi nommée parfois “la Lanterne”, mais il y avait sans doute deux forteresses, la Briglia et la Lanterna : “La Lanterne est vraiment comme un mors et des plus serrés. (...) On l’appelle ainsi parce qu’auparavant c’était un phare avec une lanterne allumée de nuit pour guider les navigateurs vers le port. Le Doge [Fregoso], fils loyal de Gênes, la fit entièrement détruire avant de la céder aux Français, en racontant qu’il n’avait pu s’opposer à la furie populaire” (Chastel 1986, 193-194). Louis XII installa ses troupes dans la nouvelle forteresse de la Briglia, élevée à côté de la Lanterna (1507). Au départ des Français, les Gênois rasèrent ce symbole de leur servitude récente (1514). Ce fort s’élevait sur un récif avançant dans la mer (Alberti 1553, 16v).
102 Une étymologie légendaire explique le nom de Gênes par celui de Janus, “roi d’Italie” [Alberti 1553, 12v-13r ; Audebert (AO) I, 227 et 311, n. 31]. Un buste de Janus en marbre blanc se trouvait depuis le Moyen Âge dans la cathédrale San Lorenzo (édifice de style gothique normand construit du début du xiiie siècle à la Renaissance) (Chytræus 1594, 323).
103 Cette table de bronze (37, 5 x 47, 5 cm) est la Tavola di Polcevera sur laquelle est gravée la Sententia Minuciorum, un règlement prononcé à Rome concernant le bornage des territoires de deux communautés ligures, les Viturii Langenses et les Genuates (117 a.C.) (CIL, I2, 584 = CIL, V, 7749 = D. 5946 = ILLRP II, 517 = FIRA III, 163). Il n’est pas question de développer les enseignements de ce très important et célèbre document. On se reportera, entre autres, à Cavalieri Manasse et ai. 1982, 133-134 (fig.) ; Stahl 1986 ; Boccaleri 1993 ; Pastorino, éd. 1995 ; Mennella 1995 ; Calderazzo 1996, 34 sq. La table provient d’Isola, dans le torrent Pernecco, commune de Serrà Riccò (dans la Vallepolcevera), et a été trouvée en 1506 (et non en 1507) par un certain Antonio Pedemonte. Dès 1507, elle fut transportée, sur décret des Padri del Comune, à l’intérieur du Duomo (Ratti 1780, 124 sq., rappelle les termes mêmes de la Storia de Giustiniani : et il Senato a fece riporre in luogo publico in la Giesia di S. Lorenzo nel muro circondato di bianchi marmi, acanto alla capella dei glorioso S. Gio. Baptista dalla parte orientale per memoria perpetua), car elle était la preuve de la grande antiquité de Gênes et de sa domination sur les terres environnantes. Elle subira, à partir de 1594, divers transferts pour aboutir, en 1978, au Museo Cívico di Archeologia Ligure (Villa Pallavicini di Genova Pegli, inv. 577). Le texte transmis par les manuscrits de R. reproduit les sept premières lignes d’une inscription qui en comporte 46 : Q(uintus) (et) M(arcus) Minucieis Q(uinti)f(ilii) Rufeis de controvorsieis inter / Genuateis et Veiturios in re præsente cognaverunt, et coram inter eos controvosias (sic) composeiverunt, / et qua lege agrum possiderent et qua fineis fierent dixserunt. Eos fineis facere terminosque statui iuserunt / ubei ea facta essent, Romam coram venire iouserunt. Romæ coram sententiam ex senati consulto dixerunt eidib(us) / Decemb(ribus)L(ucio) Cæcilio Q(uinti)f(ilio) (et) Q(uinto) Muucio Q(uinti)f(ilio) co(n)s(ulibus). – Qua ager privatus casteli Vituriorum est, quem agrum eos vendere heredemque / sequi licet, is ager vectigal nei siet. – Langatium fineis agri privati. Ab rivo infimo qui oritur ab fontei in Mannicelo adfiovium / Edem ; ibi terminus stat. Inde flovio suso vorsum in fiovium Lemurim. Inde flovio Lemuri susum usque ad rivom Comberane(am)... : texte d’après CIL, V, 7749 ; photographie dans Pastorino, éd. 1995, 100-101. Voir la traduction proposée par G. Petracco Sicardi, in : Pastorino, éd. 1995, 101-102 et G. Mennella, in : Sena Chiesa & Lavizzari Pedrazzini, éd. 1998, 268-270. Il n’est pas douteux que notre Silésien a vu la table, mais il nous semble évident qu’il s’est servi de la Descrittione d’Alberti pour rédiger sa notice, tant les deux formulations sont proches. Il n’y a, certes, qu’une faute commune (& pour ex à la ligne 2), mais les deux transcriptions s’arrêtent semblablement au bout de la 7e ligne et, comme sur nos manuscrits silésiens, Alberti ajoute (Alberti 1553, 18r) : L’haverei tutta descritta, come ella iace, & parimentefatta volgare, se la non fosse stata descritta, & volgareggiata dal Vescovo di Nebbio, & postea nell’historie di Genova. R. se contente de dire qu’il s’est limité à recopier le début, “parce que l’inscription est très longue et qu’on peut la trouver décrite en divers endroits par les écrivains”. L’évêque de Nebbio en Corse est Agostino Giustiniani (1470-1536), un protégé de François Ier qui enseigna un temps l’hébreu et l’arabe à l’université de Paris, et publia le texte latin de la Tavola à Paris en 1520, et une traduction italienne dans ses Annali de ta Republica di Genoa (Gênes, 1537, fol. f. 22-23), qui doivent correspondre aux historie di Genova.
104 La chapelle de S. Giovanni Battista, au Duomo, est l’œuvre de Jacopo della Porta, avec des statues de Matteo Civitali et du Sansovino, de Guglielmo della Porta et Nicolò da Corte. Saint Jean Baptiste était le patron de Gênes et ses reliques étaient conservées à la cathédrale.
105 Le sacro catino (ou Catino di Smeraldo) (Jean d’Auton, sous Louis XII, le nomme, dans sa Chronique, “vaisseau smaragdin” ou “Sainct Grahal”) se trouvait au xie siècle à Césarée de Palestine (il proviendrait du temple d’Auguste), dont les croisés firent le sac en 1101. Il fit partie du butin attribué aux Gênois, avec les cendres de Jean Baptiste (mais d’autres pensent que ces dernières leur furent données en 1098). La légende voudrait qu’il ait été offert par la reine de Saba à Salomon, puis serait devenu la propriété du roi Hérode, et aurait été utilisé par le Christ pour la Cène. Nicodème l’aurait gardé et transporté à Césarée. Certains proposent d’y voir le vase où l’on aurait recueilli le sang du Christ au pied de la croix. On le croyait taillé dans une émeraude très transparente : il comptait six faces unies, deux petites anses rondes et un pied travaillé ; l’intérieur était sans facettes. En fait d’émeraude, il s’agissait d’un vase antique en verre d’une belle couleur verte, étudié à Paris en 1805 par Millin, rendu brisé en 1816 (Alberti 1553, 14r ; De Beatis [Aragon (HM), 280-282] ; Leclercq 1924, col. 900-903 ; Quilliet 1986, 280-281 ; Heers 2007, 86).
106 Andrea Doria (1466-1560), le très célèbre amiral gênois, surnommé il Principe, comparé à Neptune. D’abord au service d’innocent VIII, puis des rois de Naples Ferdinand Ier et Alphonse II, il rallia ensuite le francophile Giovanni della Rovere, devint commandant des galères françaises de François Ier (1524), passa dans le camp de Charles Quint en 1528 et chassa les Français de Gênes, où il instaura une constitution dogale élective de deux ans (septembre 1528), tout en refusant cette dignité. Il a souvent combattu victorieusement les Barbaresques en Méditerranée (Khayr ed-Din Barberousse) (Grendi 1992 ; Graziani 2008). Il n’est peut-être pas étonnant qu’un aussi puissant personnage ait reçu R., car, ne l’oublions pas, il accompagnait un consiliarius de la nation germanique de Padoue : supra, η. 1.
107 Cette statue s’élevait devant l’entrée du palais des Doges (Palazzo Ducale, sur la Piazza Matteotti). Un premier contrat d’une statue de marbre fut passé en août 1529 avec Baccio Bandinelli, qui y travailla jusqu’en 1535. Mais il laissa la statue inachevée à Carrare, où elle se trouve encore (Doria en Neptune). La commande passa en 1538 à Frate Giovan Angelo Montorsoli, qui réalisa une sculpture figurant Doria à l’antique, érigée en 1541. Selon Vasari, elle était destinée à la piazza Doria, mais fut élevée sur la piazza della Signoria (= area prætorii), contre un mur (sul lato destro del portone di Palazzo Ducale nel 1541). Elle sera abattue par les jacobins le 14 juin 1797. Les restes (un tronc et quelques restes des figures de Turcs aux pieds de la statue ; h 3, 50 m) sont actuellement conservés au Musée de Sant’Agostino (une reconstitution se dresse depuis mai 2000 à l’entrée du Palais Ducal). Vasari (Le vite de’più eccellenti scultori, pittori e architetti, Florence, 1568) la décrit ainsi : E se bene la detta statua era stata fatta per dovere essere posta in sulla piazza Doria, fecero nondimeno tanto igenovesi, che a dispetto del frate [Montorsoli\ella fu posta in sulla piazza della Signoria, non estante che esso frate dicesse che avendola lavorata perché stesse isolata sopra un basamento, ella non poteva star bene, né aver la sua veduta a canto a un muro (Nos remerciements à Diane Bodart ; voir Parma Armani 1970, 39, fig. 21, et détail, 40, fig. 22 ; Laschke 1993, Kat. 5, 39-41 ; Polleross 2001). Et Nicolas Audebert (1574-1578) : “Et tout là auprès est le Palais de la Seigneurie, tres grand et spatieux, et gardé par Suisses qui y sont en grand nombre. Au milieu d’iceluy, y a une cour quarrée, capable de huict à dix mil hommes, en laquelle y a à un bout une statue de marbre eslevée sur un enbassement de marbre pareil, qui est l’effigie de André D’Orias, gentilhomme du lieu et de la plus grande maison ; là se void [...] contre le marbre de la base cest’inscription vac” : Audebert (AO) I, 224 et 310, n. 23.
108 C’est le Palazzo del Principe. En réalité, il se trouvait dans le bourg de Fassolo, à l’ouest de Gênes, dominant le port, à proximité de la porte fortifiée de San Tommaso. Doria a acheté, entre 1521 et 1529, trois propriétés en amphithéâtre, et fait détruire les maisons des Giustinani. L’édifice en forme de pi grec, sorte de forteresse qui donne sur le port privé des galères, est achevé en 1533, mais en réalité on y travaillera jusqu’à la mort de Giovanni Andrea Doria, au début du xviie siècle. C’est un vrai palais, dû à Montorsoli et Pietro Buonaccorsi (Perin del Vaga, un élève de Raphaël), qui y resta de 1528 à 1538. Étonnamment, R. n’en souffle mot, sinon pour évoquer ses jardins, probablement le jardin méridional qui descendait vers la mer et sur lequel donnaient ses galeries latérales (Belgrano 1884 ; Parma Armani 1970 ; Gorse 1980 et 1983 ; Boccardo 1989 ; Azzi Visentini 1996, 144-156 ; Morel et ai. 1997, 541-542 ; Stagno 2005 ; Graziani 2008, 213-217).
109 Réalisé de 1539 à 1545, le jardin septentrional, sur les flancs de la colline de Granarolo, a presque entièrement disparu lors de l’aménagement du chemin de fer et du quartier environnant (1854). Un voyageur anglais, William Thomas, l’a décrit rapidement, lors de son passage en 1549 : Amongest all other the palaice of Andrea Doria, without the gate of S. Thomas, is a notable thyng, verie fayre, sumptuouse and large : And above his house (a thyng wonderfull) he hath made his slaves to hew out of the hard rockie mountaine, as muche space, as hath made.VI. gardeins one above an other : and hath caused so muche earth to be caried uppe, as suffiseth for the growth of all manerfruites and herbes, verie pleasant to beholde ([Thomas] 1549, f. 161r ; cf. Azzi Visentini 1996, 153-154). Par ailleurs, on dispose d’une représentation de ce jardin sur le fond d’un tableau de Jean Massys (Flora [ ?], 1561, musée de Stockholm), présent à Gênes en 1550 (Azzi Visentini 1996, 151, fig.). L’ensemble rappelle le jardin de la villa Medicis à Fiésole, avec ses trois terrasses taillées dans le rocher et dotées de puissants murs de soutènement (fin du xve siècle). La description de R. est l’une des plus fournies que l’on connaisse. Il évoque “quatre séries de jardins” et non pas six (mais ne pourrait-il y avoir eu erreur sur le nombre chez W. Thomas -.VI. au lieu de .IV. ?). Seraient-ce déjà ces amenissimi giardini qui accueillirent Charles Quint lors de son séjour génois, en 1533, selon Paolo Partenopeo ; ce Napolitain naturalisé génois, Paolo Bruto ou de’Bruti (1490-1544), a composé en latin des Annales allant de 1527 à 1541, et demeurées à l’état de manuscrit jusqu’à leur édition par Stefano Bacigalupo en 1847.
110 La description de la fontaine (fonte Doria) nous semble un unicum. Vasari la nomme fonte del capitan Larcaro et l’attribue à l’architecte Galeazzo Alessi, originaire de Pérouse. Ce texte prouve qu’elle existait bien en 1553 : d’ailleurs, Damonte 1971 et Magnani 1999 la datent d’avant 1548-1549. Elle a été heureusement redécouverte en 1984 sous un immeuble de la colline de Fassolo et est en voie de restauration. Elle comportait un atrium bi-absidé (détruit) et une salle octogonale à coupole éclairée par des fenestrelles. Le pourtour de la salle voit alterner décors de mosaïques de diverses matières représentant des divinités fluviales et des paysages, et niches ornées de coquillages et surtout de pierres calcaires. En face de l’entrée au fond, s’ouvre une profonde cavité “rustique” à arcades décorées de stalactites et mosaïques où se mêlent tesselles de majolique, galets, cristal, coquillages, corail. De grands hermès ou télamons, une corbeille de fruits sur la tête, se dressent entre les arcades. Alessi a privilégié une représentation de la nature conçue comme une structure architectonique mêlant êtres inanimés, minéraux et figures de fleuve, en un fantastique “royaume des eaux” (Lauro Magnani). Huit scènes figurent Neptune conduisant des chevaux marins, L’enlèvement d’Europe, Calatée, Polyphème, Persée tuant le monstre marin et libérant Andromède, Pélée et Thétys (ou plutôt, selon St. Hanke, Vénus et Triton), Nessus enlevant Déjanire et une figure perdue. Autour de l’oculus au centre de la coupole, se trouvent les figures des huit Vents symbolisés par des mascarons. Beaucoup de détails – et l’esprit même de cette “grotte” – renvoient aux Métamorphoses d’Ovide et à la passion pour l’Antiquité. Tout rappelle l’architecture thermale romaine et ses décors de coquillages : Magnani, éd. 1984 ; Stagno 2005 ; Brunon 2007 : http://halshs.archives-0uvertes.fr/halshs-00179123/en/p. 11-12 ; Hanke 2008, 128-152 et 253-264 (remerciements à Diane Bodart et Stephanie Hanke).
111 Le mausolée d’Andrea Doria se trouve dans la crypte de l’église San Matteo, fondée en 1125 par Marino Doria. C’est l’église de la famille. Sa façade est coupée de cinq doubles bandeaux portant des inscriptions célébrant ses fastes militaires du xiiie au xvie siècle (Petrucci 1993, 24-25, fig. 7). Chytræus a relevé l’inscription suivante : ad Matthœi. Maiorum nostrorum memoria Andreas/Dorias afflictam patriam non deseruit (Chytræus 1594, 321). Le tombeau d’Andrea Doria est l’œuvre du moine toscan Giovanni Angelo Montorsoli (1543) (Azzi Visentini 1996, 153).
112 Fichard la signale : vidi cedes Dorice a Republica donatas cum inscriptione. Illustri principe Andreœ Dorece liberatori Patrice S(enatus). P(opulus). Q(ue). G(enuatensium) munus publicum : Fichard (1536/37), 126.
113 Le palais Doria Spinola (en 1624 Palazzo Spinola, actuelle Préfecture), construit de 1541 à 1543, pour Antonio Doria (1495-1577), le plus jeune cousin d’Andrea. Au service de Charles Quint à partir de 1533 (commandant de la marine de guerre génoise), et, plus tard, de Philippe II (au titre du royaume de Naples). Après la conjuration des Fieschi, il obtint le titre de marquis de Santo Stefano d’Aveto (1547). En 1553, il est nommé conseiller du futur duc de Savoie Emmanuel Philibert. Il a reçu la Toison d’or pour ses succès miltaires sur terre et sur mer. Il est l’auteur du fameux Discorso sopra le cose turchesche per via di mare (1539) : Savelli 1992 ; Borghesi, éd. 1997, 33, n. 70.
114 CIL, V, 7753 = D. 5185 : Genuœ domo Antonii Doriœ in limite [immo limine] portœ sub terra, ubi et statua M. Aurelii inventa. MORILLON. Le texte est conservé dans le ms. Amstelæd. 111 (f. 75) de Morillon (Antoine Morillon : Louvain, début des années 1520-Bruxelles 1556 ; secrétaire du cardinal Granvelle). La copie de R. est en partie fautive. Il faut lire : p. ælivs. avg. lib. pylades. pantomimvs. hieronica. insitvit / l. avrelivs. avgg. lib. pylades. hieronica. discipvlvs. consvmmavit. : P(ublius) Ælius Aug(usti) lib(ertus) Pylades, pantomimus hieronica, instituit / L(ucius) Aurelius Augg(ustorum duorum) lib(ertus) Pylades, hieronica, discipulus, consummavit. Le texte concerne deux célèbres affranchis impériaux vainqueurs dans des concours religieux (agones hieroi) à la pantomime. P. Ælius Pylades est un affranchi d’Hadrien, L. Aurelius Pylades un affranchi de Marc Aurèle et Lucius Verus, et l’élève du premier. La lettre de Lucius Verus à Fronton, datée d’entre la fin de 161 et le début de 162 (ad Front, 1.10.1) se rapporterait au second. L’intérêt du relevé de R. est d’indiquer que le texte a été apporté de Naples à Gênes, fait jusqu’ici inconnu. Et de fait, la plupart des témoignages épigraphiques concernant le nom Pylades, étalés de l’époque augustéenne à celle de Gallien (on en compterait sept), sont localisés en Campanie où Naples organisait des Sebasta comprenant des concours de pantomime, et Pouzzoles des Eusebeia comprenant un agon musicus. Quant à la statue de marbre qui semble avoir été liée à ce titulus, il pourrait s’agir, non d’un mime, mais, si l’on en croit Morillon, de l’empereur Marc Aurèle, ce qui concorde bien avec sa datation. Rappelons enfin qu’Antoine Doria a souvent séjourné à Naples, par ses fonctions mêmes (Caldelli 2005, 63-71).
115 La Corse, sauf Calvi, a été occupée par les Français, avec l’appui d’une flotte turque (commandée par Dragut) qui servit au transport des troupes, à partir d’août 1553, en un mois et demi (l’île d’Elbe fut prise au passage ; Bastia a capitulé le 22). Cela représentait une véritable déclaration de guerre à la République de Gênes. Le 25 septembre, Andrea Doria fut nommé commandant suprême des forces de terre et de mer de la République. Il était alors âgé de 87 ans, mais il organisa une expédition. 11 rassembla environ 12 000 hommes. Une trentaine de galères (26 ou 27) et 15 transports prenaient part à l’entreprise (le texte de R. permet de préciser). Des flottes impériales devaient les rejoindre, venues d’Espagne, de Naples, de Sicile. Doria reçut l’étendard de la République sur le parvis du Duomo, au milieu des prières publiques et des processions. Le départ de Doria ayant eu lieu le 9 novembre, et celui de la flotte le 14 novembre, on peut en conclure que R. quitta Gênes avant ces dates (sur ces événements : Joly 1942, 58-72 et 93-95 ; Braudel 1990, t. II, 245-248 ; Grendi 1992, 273 ; Vergé-Franceschi 2001, 83-84).
116 L’information est directement tirée d’Alberti 1553, 335v. Il s’agissait de Lorenzo di Jacopo Salviati (1492-1539), sénateur de Florence et mécène.
117 Gian Galeazzo Visconti a relocalisé brièvement l’université de Pavie à Plaisance de 1398 à 1402. Elle a donc normalement disparu à l’époque où R. y passe.
118 La bataille de la Trébie eut lieu en 218 a.C., au lieu dit Campus mortuus (Marchetti & Dall’Aglio 1982 ; Brizzi 2000, 412-413). Le toponyme (moderne) est donné par Audebert (AO) I, 152.
119 Cf. Nicolas Audebert : “La ville très forte, de grand et spatieux tour, les murs tous en bricques garnyz de belles et grosses tours de pareille matiere, avec boullevards, remparts et fossez plains d’eau” : Audebert (AO) I, 152.
120 La Cittadella, commencée sur les dessins de F. Paciotti, continuée par Vignole, est aussi dite Palazzo Farnese.
121 R. modifie étrangement son nom : Pier Luigi Farnese était le fils d’Alexandre Farnèse (Paul III), duc de Castro et comte de Ronciglione (1537), marquis de Novare (1538), duc de Parme et Plaisance (1545-1547). Le 10 septembre 1547, le comte Anguissola le poignarda dans la Cittadella, puis présenta son cadavre à la foule, aux cris de Liberté et Empire, et le jeta dans le fossé entourant la forteresse. Le lendemain, Ferrante Gonzaga, gouverneur de Milan, prit possession de la Cittadella au nom de Charles Quint. Plaisance avait été propriété pontificale de 1512 à 1547. Elle restera milanaise jusqu’en 1556 (Cappelli 1968, 369).
122 Nous n’avons rien trouvé sur ces rapaces.
123 Forteresse de Santa Croce, construite sur ordre de Barnabo Visconti à partir de 1370.
124 Crémone a suivi le sort de Milan à partir du 2 novembre 1535 et appartient donc aux Espagnols.
125 Le Duomo est un chef-d’œuvre roman des xiie-viiie siècles (commencé en 1107, consacré en 1190), avec un transept gothique ajouté au xive siècle. De Beatis : “J’y ai discerné une tour très haute" (le campanile de la cathédrale) : Aragon (HM), 300 ; Nicolas Audebert : "Cremona, au milieu de laquelle apparoist la haulte tour du Dome, tant estimée par toute l’Italie” : Audebert (AO) I, 153. Il s’agit du Torrazzo, haut de 111 m.
126 Monastère Saint-Pierre : église édifiée en 1064 (mais l’aspect actuel date de 1573) (Filippini 2002).
127 Les fortifications de Mantoue, qui remontaient au xie siècle, ont aujourd’hui disparu (sur les monuments de Mantoue : Vantaggi 1978).
128 L’urbanisme de Mantoue a frappé tous les visiteurs qui l’ont jugé avant-gardiste (Delfante 1997, 153-155, fig. 65). Ville du Moyen Âge agrandie à partir de 1526 sous l’impulsion du duc Frédéric de Gonzague, qui chargea Giulio Romano du plan et de la réalisation des fortifications permettant l’extension de la ville vers le sud, en direction du château, selon un système de voies presque parallèles qui menaient aux portes, coupées par un axe perpendiculaire conduisant à la place du Marché (belle vue prospective de Mantoue, xylographie de Sébastien Münster, deuxième moitié du xvie siècle, dans Malacame 2004, 219).
129 Avant de rejoindre le Pô, le Mincio forme une étendue lacustre ceignant Mantoue, comme posée sur une péninsule entre des lacs (lac supérieur, lac moyen, lac inférieur).
130 P. Vergilius Maro, né à Pietole ou Andes, près de Mantoue, en 70 ou 69 a.C., mort à Brindes en 19 a.C., était une sorte de numen littéraire de la cité. Sur la façade nord du palais dit Broletto (Palazzo del Comune) se dresse la statue de Virgile assis dans une niche (1227). Au-dessous est gravée l’inscription : virgilivs mantvanvs pœtarvm clarissimvs et le célèbre distique mantva me genvit : calabri rapvere : tenet nvnc / partinope : cecini pascva rvra dvces (Rodolfo Signorini, in : Ferino-Pagden 1994, 130, Kat. Nr. 57 ; Malacarne 2004, 325-327, fig. et 328).
131 Les biographies anciennes s’accordent à le faire naître le 15 octobre 70 a.C. à Andes, localité mal définie. Des traditions médiévales remontant sans doute au-delà du xiie siècle ont incité nombre d’historiens modernes à la situer à 5 km environ au sud de Mantoue, sur la frontière de Pietole (Brisson 1966, 21-23). Alberti donne la forme Petula (Alberti 1553, p. 352v), Nicolas Audebert Pietol : Audebert (AO) I, 211 et commentaire, 306, n. 34. Diane Bodart me signale qu’il existe une villa à Pietole, dite “La Virgiliana”, Renaissance dans sa configuration actuelle, aujourd’hui transformée en ferme.
132 Duomo San Pietro : une première basilique d’époque constantinienne fut remplacée par une deuxième, à la fin du xive siècle, qui fut détruite par un incendie en 1545. Un nouvel édifice vit alors le jour, par la volonté du cardinal Ercole Gonzaga, sur des dessins de Giulio Romano. À la mort de ce dernier (1547), l’église possède ses sept nefs (la centrale inspirée de Saint-Pierre de Rome), mais n’est pas achevée. Elle sera complétée par G. B. Bertani (transept, coupole centrale). Quant à la façade, elle ne sera construite qu’au xviiie siècle.
133 Le Palazzo Ducale ou Résidence des Gonzague, au nord-est de la ville, un “monstre architectural” de 32 000 m2, l’un des plus fastueux et vastes d’Italie, édifié de 1302 à 1707. Il est marqué par l’empreinte d’Isabelle d’Este et composé d’édifices, églises, places intérieures, jardins, loggias. La partie réunissant le château primitif à la Magna domus a été décorée par Giulio Romano, Bertani et Viani (Cottafavi 1939. 5-24 et 37-63 ; Morel et al. 1997, 538-539).
134 Palazzo del Te (1525-1535) : villa suburbaine du duc Federico II Gonzaga, chef-d’œuvre de Giulio Romano, préfet des Eaux et des Édifices à la cour des Gonzague. Audebert (AO) I, 210 et commentaire, 306, n. 32 : “Hors la ville, assez, près de la porte, sur un chemin en forme de longue allée, bordée d’un costé et d’aultre de haultz arbres plantez à la ligne... se voit un tres beau palais du Duc, environné de fossez plains d’eau” ; voir Azzi Visentini 1996, 116-134.
135 La célèbre Gigantomachie de Giulio Romano, dans les appartements de l’aile orientale (1530-1535), impressionnante fresque recouvrant toute la salle (Azzi Visentini 1996, 132 ; Morel et al. 1997, 539-540).
136 Le phénomène d’écho est décrit par beaucoup, en particulier par Nicolas Audebert et Heinrich Schickhardt : Audebert (AO) I, 210 ; Schickhardt (AB), 196-197.
137 Le palais Saint-Sébastien a été construit en 1506-1508, sur un projet de Girolamo Arcari, par la volonté de Francesco le mari d’Isabelle d’Este, qui en fit sa résidence.
138 Jusqu’en 1600, le palais Saint-Sébastien a abrité le fameux cycle de Mantegna intitulé “Les Triomphes de César” (vers i486). Ensuite, les toiles (au nombre de neuf en réalité, et non sept) furent transférées au Palazzo Ducale. Aujourd’hui elles sont conservées à Hampton Court. Elles ont été vendues au roi d’Angleterre Charles Ier en 1627-1628 (Alberti 1553, 352r ; Hentzner 1617, 388, au prætorium ; Martindale 1979).
139 Il s’agit du Palazzo Ducale, vu supra, à la η. 133.
140 Isabelle d’Este (1474-1539), fille d’Hercule Ier d’Este, duc de Ferrare, Modène et Reggio, et d’Eléonore d’Aragon, a épousé en 1490 Francesco II Gonzaga, marquis de Mantoue depuis 1484.
141 Il faut distinguer le Studiolo, commencé en 1491 et la Grotta d’Isabelle d’Este, prévue dès 1498 sous le Studiolo, au Castel San Giorgio. En 1519, ils ont été déplacés dans la partie du Paiazzo Ducale appelée la Corte Vecchia. Ils formaient l’un des plus illustres “cabinets de curiosités” de la Renaissance, dispersé par vente au roi d’Angleterre en 1627 et par le sac de Mantoue de 1630 (Brown 1985 ; Ferino-Pagden 1994, 145-181, dont plan, 153 ; Pizzagalli 2002, 127-128).
142 Ces deux sculptures ont suscité l’admiration de nombreux visiteurs : Schickhardt (AB), 196, Hentzner 1617, 388, etc. Alberti en fait aussi mention, dans des termes dont R. a pu s’inspirer : tra l’altri due Cupidini, un’antico, & l’altro moderno (Alberti 1553, 352r). Après son retour de Bologne à Florence (fin 1495 ou début 1496), Michel-Ange “si pose a far di marmo un Dio d’amore, d’età di sei anni in sette, a iacere in guisa d’uom che dorma.” Cette contrefaçon de l’antique (exécutée à partir d’un modèle hellénistique) fut portée à Rome et vendue au cardinal Riario (elle est passée ensuite au cardinal Ascanio Sforza et à César Borgia, enfin au duc d’Urbino). Son caractère moderne fut connu dès 1496. En fait le grand sculpteur n’aurait pas voulu réaliser un faux, mais “se mesurer à l’antique” (mais Paolo Giovio signale toutefois “qu’on l’aurait enterré dans une vigne” et qu’il y aurait eu scandale). Quand César Borgia chassa les Montefeltre d’Urbino, Isabelle demanda le Putto, par l’intermédiaire de son frère Ippolito, et le garda. La sculpture est arrivée à Mantoue en 1502, où elle signalée dans l’inventaire de 1542 (en marbre de Carrare) (il s’agit de l’inventaire du notaire Odoardo Stivini). Ce même inventaire signale la présence d’un autre Cupido dormiente sopra una pelle di leone, attribué à Praxytèle et acheté à Rome en 1505 (grâce à l’intervention du pape). Il est arrivé à Mantoue en 1506. Isabelle souhaitait ainsi disposer de deux chefs-d’œuvre que l’on puisse comparer. Ces putti figurent sur des dessins manuscrits de Windsor, comme sculptures de la collection Gonzague achetées par l’Angleterre (en 1627). Ils ont disparu à la fin du xviie siècle : Ferino-Pagden 1994, 310-316, no 101-102 ; Barkan 1999, 201 ; Baldini et al. 1999, 149-152 ; Weil-Garris Brandt et al., éd. 1999 ; Pizzagalli 2002, 214, et 563-564 ; Pidatella 2006.
143 “Un corno d’unicorno lungo palmi sette e mezzo” (inventaire Stivini) : Hentzner 1617, 388 (cornu Monocerotis) ; Schickhardt (AB), 195 ; Pizzagalli 2002, 564.
144 Hentzner écrit (1617) : “Organa musica solido ex alabastro peringenti sumptu facta, suavissimam harmoniam edentia” (loc. cit.).
145 La villa Gonzaga à Marmirolo était un ensemble de bâtiments construits en 1435 par Gianfrancesco Gonzaga, agrandis en 1480 par Federico I, décorés par Mantegna entre autres. Le dernier fut la première grande commande de Frédéric II Gonzague pour Giulio Romano entre 1531 et 1539. Elle sera détruite en 1798 : Alberti 1553, 353r (qui l’attribue au marquis Federico I) ; Audebert (AO) I, 211 et 306-307, n. 35 (remerciements à Diane Bodart).
146 Les Marches Trévisanes sont une très ancienne dénomination qui, dans son acception maximale, correspondait à la Marche de Vérone médiévale, c’est à dire à la région située entre le lac de Garde et le karst (soit la future Terre-Ferme vénitienne).
147 Audebert remarque : “Lignago (...) grosse ville et forte, frontiere des Venitiens du costé du Mantouan. Ceinte de bons murs et espais tout pareils à ceux de Padoue, remparée par dedans de gros boullevers, et garnye par dehors de fossez à fond de cuve plains d’eau (...). La ville (...) est située sur le fleuve appellé Ladice, que le vulguaire prononce Ladeze, en latin Athesis ou Atrianus, un des bras duquel passe par dedans” : Audebert (AO) I, 208-209.
148 Les ducs de Ferrare sont les seigneurs d’Este depuis 1209. Ateste est le nom latin d’Este (Plin., Nat., 3.130 ; Tac., Hist., 3.6) : cf. Audebert (AO) I, 208. Asta, en revanche, était le nom d’une ville de Ligurie (Plin., Nat., 3.49).
149 La République de Venise occupe Este depuis 1405, mais n’a tenu Ferrare que du 27 novembre 1308 au 28 août 1309.
150 Pâques tombait le 25 mars.
151 Le Meduacus est le nom antique de la Brenta. Il se jetait dans la lagune de Venise en deux bras, le Meduacus maior au nord, et le Meduacus minor au sud (Plin., Nat, 3.121). Fossa Claudia est le nom antique de Chioggia chez Ρlin., Nat., 3.121.
152 En réalité, le Bacchiglione n’a rien de commun avec le Meduacus : c’est l’antique voie fluviale unissant Vicence à Padoue.
153 Une liaison existait par canal de Chioggia à Loreo. D’une part, au xiiie siècle avait été creusé le Canale Naviglio, de Tornova sur l’Adige, à Loreo. De la fossa della Beba, près San Lazzaro, sur la rive gauche de l’Adige et en face de Tornova, courait un tronçon de l’Adige, dit Adese Vecchio. D’autre part, les navires venant du Pô et arrivés à Torre di Bebe, gagnaient Chioggia par la Fossa (actuel canale Lombardo).
154 L’urbaniste Biagio Rossetti réalisa vers 1490 la grandiose addizione Erculea, voulue par le duc Ercole I et structurée autour de deux grands axes rectilignes, avec des rues mesurant entre 12 et 18 m de largeur, ce qui permit de doubler la superficie de Ferrare : Schickhardt (AB), 182 et n. 235 ; Zevi 1971.
155 Le Castello Estense, fut commencé en 1385 pour le marquis Niccolò II par l’architecte Bartolino Ploti ; il est doté de quatre tours d’angle et de fossés, et se situe au centre exact de la ville : Schickhardt (AB), 181.
156 Citons le Palazzo Schifanoia, bâti à la fin du xive siècle, agrandi au xve siècle, maison de plaisance des ducs d’Este ; le Palazzo di Lodovico il Moro, construit à la fin du xve siècle ; le Palazzo dei Diamanti, commencé pour Sigismond d’Este en 1492, achevé au xvie siècle pour le cardinal Luigi d’Este.
157 Le Belvedere (ou Boschetto) est un îlot sablonneux transformé en jardins des délices par Alphonse Ier d’Este entre 1514 et 1516, puis par ses successeurs. Il comportait des édifices, des jeux d’eau et des jardins connus partiellement par un dessin de c. 1580, peut-être dû à Marcantonio Pasi (Modène, Archivio di Stato, Mappario Estense, Topografie di Città, no 96). Il a été célébré par deux sonnets de l’Arioste et du Tasse : Venturi 1985. Voir la description d’Audebert (AO) I, 156 et 199, 295 (n. 52) et 304 (n. 7). Il sera détruit en 1599.
158 Il faut croire, si l’on se fie à cette remarque, que le Belvedere était déjà à l’abandon sous le règne d’Ercole II (1534-1559).
159 L’université de Ferrare fut fondée en 1388 ou 1391. R. se trompe en la datant de Frédéric II (1220-1250). En 1391, l’empereur était Wenceslas IV de Luxembourg, mais il ne joua aucun rôle, le demandeur étant le marquis Alberto V d’Este. Elle disparut en 1394, mais renaquit en 1422 grâce aux soins de Lionello d’Este. Elle ne joua jamais un très grand rôle, à cause de la concurrence des toutes proches Padoue et Bologne (Zonta 2004, 80).
160 La Cattedrale San Giorgio, commencée en 1135, achevée au xive siècle, subit de nombreuses transformations.
161 Allusion à la victoire de Polesella (sur le Pô) remportée par les fantassins ferrarais sur la flotte vénitienne, le 22 décembre 1509 (guerre de la Ligue de Cambrai). Les vainqueurs étaient Alphonse Ier d’Este et son frère, le cardinal Hippolyte d’Este (1479-1520). Ils combattaient du côté du pape, dont le duché de Ferrare était vassal (Simeoni 1951, 397). Les Ferrarais prirent 15 galères et de nombreux autres vaisseaux. Les Vénitiens perdirent 60 drapeaux.
162 Le prœtorium était le Palazzo Municipale (commencé en 1245), résidence des Este jusqu’au xvie siècle, quand la cour fut transférée au Castello Estense. Les statues qu’a vues R. ne représentaient pas le même souverain. L’accès principal, dit Voûte du Cheval, par où l’on arrivait de la Piazza del Duomo pour entrer dans le Cortile Ducale, était flanqué en effet de deux statues de bronze doré, copies d’œuvres du xve siècle : à droite, sur un arc de Leon Battista Alberti, la statue équestre de Niccolò III d’Este, avantdernier marquis de Ferrare et d’Este (1393-1441) [il n’est pas mort en 1440, mais le 26 décembre 1441] ; à gauche, sur une colonne, son fils Borso (1413-1471), marquis en 1450, nommé duc de Ferrare en 1471 par Paul II, et représenté assis. L’identification des personnages reposait sans doute sur les inscriptions placées dessous. Toutefois, il faut signaler que Nicolas Audebert identifiera les personnages à Lionetto (sic), le dernier marquis (1441-1450), et à Borso, le premier duc : Audebert (AO) I, 197, commentaires 304 (n. 5). Ces statues seront détruites au xviiie siècle, comme symboles de tyrannie (Weiss 1969, 51). La statue équestre de Niccolò III était l’œuvre d’Antonio di Cristoforo et Niccolô Baroncelli (1443-1451), et sera détruite en 1796. Quant à Borso trônant, œuvre de Niccolô Baroncelli, de ses héritiers et de son beau-frère Domenico di Paris da Padova, il a été commencé en 1451, érigé en 1454 et complété en 1459 (Rosenberg 1997) (merci à Diane Bodart pour ces précisions).
163 L’église San Paolo, remontant au xiie siècle, fut concédée à la fin du xive siècle aux carmélites. L’édifice sera gravement endommagé par un tremblement de terre en 1570 et réédifié.
164 Guarino Guarini ou G. de Vérone (1374-1460), l’un des fondateurs du système éducatif de la Renaissance, ayant appris le grec à Constantinople de 1403 à 1408, fut enterré aux carmélites dans une tombe provisoire, puis on lui construisit un mausolée (décidé en 1461) : H[olmes] 1997 ; Verger 1997. Cette construction de porphyre, supportée par quatre colonnes, décorée de bas-reliefs illustrant les vertus du défunt et pourvue d’une épitaphe en vers de Tito Vespasiano Strozzi, sera détruite en 1570 (Rosmini 1805, 126-127) ; seule l’inscription serait conservée.
165 Valle Padusa : vaste marais situé à l’embouchure du Pô, en Émilie-Romagne, s’étendant de Cervia/Ravenne à la lagune de Venise (Verg., Aen., 11.457 ; Plin., Nat, 3.119).
166 Station d’embarquement sur le Pô di Primare (l’une des branches du delta), à l’embouchure du canal de navigation unissant Ferrare à Bologne : cette fossa est mentionnée depuis le viiie siècle et serait due à Félix, archevêque de Ravenne († 723) (Alberti 1553, 306r). Audebert : “Icy finist [à l’Argellina] le fossé, qui n’est separé que d’un bouleverd d’un aultre qui suit, sur lequel l’on va jusques au Pau, où y a un gros bourg nommé La Torre della Fossa 4 mil. Depuis Bentivoglio jusques icy, sont tous marescages et mesmes tout le Duché et terres de Ferrare” : Audebert (AO) I, 197.
167 Audebert : “Il Buttofreddo 5 mil. ; maison sur le bord de l’eau, où se prend une nouvelle Sandelle sur le mesme fossé” (ibid.).
168 Audebert : “un chasteau et village... nommé Bentivoglio, assiz sur le bord du Rein [le Reno]. Le chasteau est beau et fort, appartenant al S.or Giovanni Bentivoglio qui demeure à Modena et se dict et prétend seigneur de Boulongne d’où ont esté chassez ses prédécesseurs” : Audebert (AO) I, 196. Les Bentivogli furent tyrans de Bologne de 1401 à 1402 et de 1435 à 1507.
169 L’enseignement de la médecine (en particulier de l’anatomie) à Bologne était fameux, et y attirait de nombreux étudiants : Bouvard, éd. 2002, 147, n. 171 ; Zonta 2004, 46-51. Le médecin consulté par R. était Elideo (ou Alideo) Padovani (encore appelé Helidæus de Padovanis), issu d’une famille patricienne de Forli († 28. 01.1576). Il avait longuement étudié à Bologne (doct. med. 1535), puis en Allemagne. Il dirigeait à Bologne le Nosocomium Vitœ (Hôpital de Vie), où les étudiants pouvaient se livrer à des exercices cliniques. Plusieurs d’entre eux l’ont souvent cité, dont Pieter van Foreest (1522-1597), médecin de la ville de Delft qui soignera Guillaume d’Orange, et Melchior Adam de Heidelberg (c. 1575-1622), auteur de célèbres Vitœ germanorum medicorum. Elideo sera inhumé au cloître des Augustins de Saint-Jacques de Bologne (Dondi 1951 ; Houtzager 1997). Sur l’inscription de R. dans la Nation germanique de Bologne : cf. supra, Introduction, n. 96.
170 L’Aposa (en bolonais Avvsa) est un torrent prenant sa source près de Roncrio, et traversant (en un parcours aujourd’hui souterrain) le centre historique de Bologne, pour rejoindre au nord de la cité le Canale dette Moline puis le Canale Navile.
171 L’importance en Europe, depuis le Moyen Âge, de l’université de Bologne est bien connue. La légende voulait qu’elle ait été fondée en 423 par Théodose (faux privilège gravé dans l’église San Domenico) [Audebert (AO) I, 170-173]. En réalité, elle est apparue à la fin du xie siècle (1088), et cette légende fut inventée entre 1226 et 1234 (cf. la glose d’Odofredo), à des fins politiques, pour montrer que l’université avait été créée par un empereur bien plus puissant que Frédéric II, et surtout plus en accord avec l’autorité pontificale (Dolcini 1987, 18 ; Rüegg 1992, 7). On rattache sa fondation à la migration des juristes de Rome après le sac normand de 1084.
172 L’actuelle Piazza Maggiore, lieu emblématique de la cité.
173 Sur le côté gauche de la Piazza Maggiore et de la Piazza Nettuno, l’actuel Hôtel de Ville (Palazzo Comunale) est l’ancien palais d’Accursio, dit “palais apostolique” sous la domination des papes. Y siégeait un cardinal-légat. L’édifice remonte à 1287, dans sa partie la plus ancienne.
174 Bologne a été annexée aux Etats pontificaux en 1513, par Jules II. Un cardinal-légat gouverne la ville. Il dispose d’une garde du corps de cent Suisses alémaniques logés dans le palais [cf. Schickhardt (AB), 150 ; Audebert (AO) I, 178].
175 La basilique San Petronio, construite à partir de 1390 sur la Piazza Maggiore, était un lieu de cérémonies officielles, et le siège du Tribunal de la Commune. La façade est inachevée.
176 Charles Quint fut couronné à San Petronio le 24 février 1530 (jour anniversaire de sa naissance et de la bataille de Pavie) par Clément VII [cf. Audebert (AO) I, 177-178, commentaires 298-299 (n. 43) ; Chastel 1984, 253-256]. Le pape était arrivé le 25 septembre 1529, l’empereur le 5 novembre.
177 Une grande inscription sur la façade du Palazzo del Comune commémorait l’événement. Elle sera transportée en 1887 sous un portique du Cortile du même palais (texte dans Audebert : loc. cit.).
178 Bologne aurait possédé, à l’époque où Dante y fit ses études (1304-1306), 170 tours, expression de la fierté et de la rivalité des grands lignages (Miller 1989, 26-33). Deux d’entre elles sont devenues emblématiques de la cité. La Torre Asinelli, construite en briques de 1109 à 1119 par Gerardo Asinelli, membre d’une famille éminente. Elle mesure 98 m. La Commune en devint proprétaire en 1398 : Audebert (AO) I, 181. On y exposait les condamnés suspendus dans des cages (la pratique ne concernait pas cette seule tour) (Miller 1989, 27-28 et 32).
179 La Torre Garisenda (1110), haute de 47,80 m, a été chantée par Dante (Inferno, chant XXXI, vv. 136-138), puis Gœthe, entre autres, et mentionnée par Montaigne. Elle a été raccourcie au milieu du xive siècle. Son inclinaison (de 3,20 m) est due au tremblement de terre de 1505 et à un affaissement du sol (d’où son surnom de Torre Pendente). On a longtemps répandu l’idée que ce phénomène était volontaire, dû à un artifice du constructeur [Audebert (AO) I, 182 et commentaire 300, n. 55].
180 La cathédrale San Pietro est mentionnée pour la première fois au xe siècle, mais était bien antérieure à cette date. Elle a été reconstruite, après un incendie, en 1141 et consacrée en 1184.
181 Le monastère San Domenico Maggiore : son église a été construite en 1235, en l’honneur de saint Dominique (consécration en 1251).
182 L’église abrite le tombeau (Arca) de saint Dominique (Dominique Guzman), le fondateur de l’ordre des prêcheurs, mort à Bologne en 1221, canonisé en 1234. En 1264, un sarcophage de marbre a été commandé pour remplacer sa simple tombe. Il a été édifié de 1264 à 1267. C’est une œuvre de Nicola Pisano, Arnolfo di Cambio, Lapo Fra Guglielmo, agrandie à la fin du xve siècle par Niccolò dell’Arca († 1494), puis par Michel Ange, à qui l’on doit un célèbre ange porteur de candélabre. Il s’agit du premier sarcophage sur lequel est figurée systématiquement la vie d’un saint, en contraste total avec les peintures narratives du troisième quart du xiiie siècle (Pope-Hennessy 1951 et 1996, 239 et pl. 49, 50 ; Moskowitz 1994).
183 Le décor de marqueterie de San Domenico était localisé dans la chapelle du saint, contre le mur (c’est celui que décrit, semble-t-il, R.), et dans le chœur, où il orne 102 stalles de bois. Dans la chapelle, 16 panneaux (1531-1535) représentaient des scènes de l’Ancien Testament et de la vie de saint Dominique. Ils y sont restés jusqu’en 1597. Dans le chœur, il y a 56 tableaux de l’Ancien et du Nouveau Testament et 102 panneaux à marqueteries décoratives, achevés en 1551. Le tout a été réalisé par l’intarsiatore Fra Damiano di Antoniolo de Zambelli de Bergame (1480-1549) (Morassi 1949 ; Alce 1991) et quatre frères convers du couvent (Alce 1969, 144-145, 311-316, 319-332 et pl. 41-56 et 76-131 ; Raggio 1972, 35 et 38). Mais R. semble mélanger les deux ensembles pour les thèmes abordés ; cf. aussi Audebert (AO) I, 166 et 173, commentaires 297 (n. 19) ; Fichard (1536/37), 121-122.
184 La bibliothèque du couvent, construite à nefs comme une basilique, date de 1466 [Audebert (AO) I, 173 et comment., 298 (n. 36) ; Alce & D’Amato 1961]. En cas de défaut de restitution des livres et des codices, on prononçait l’excommunication de l’emprunteur.
185 C’est la phrase même d’Alberti 1553, 293r. Le Rotolo di Esdra est en fait une version du Pentateuque mosaïque, dont le scribe n’est pas le prêtre juif considéré comme l’auteur d’Esdras I, comme l’établira Bernard de Montfaucon en 1703 [Audebert (AO) I, 169-170, commentaire 298 (n. 33)].
186 “Tadeus Pepolus a été choisi par le peuple de Bologne en 1337.” Taddeo Pepoli fut capitaine général de Bologne d’août 1337 à août 1340, puis vicaire pontifical et conservateur de la paix et de la justice d’août 1340 à septembre 1347 (Cappelli 1969, 385). Son mausolée (1346) est attribué à Jacopo Lanfrani, de Venise. Fendt l’a reproduit en 1574, mais avec un lapsus dans l’épitaphe (M.D.XXXVII au lieu de M.CCC. XXXVII) : Fendt 1574, pl. 67 ; Michalski 1977, 100-101 (fig. 10-11) ; Grandi 1982, 159-163, no 39 et fig. 39 (détails aux pl. 125-138) ; cf. Audebert (AO) I, 167 et commentaire, 297 (n. 21).
187 Suit une litanie de noms d’universitaires de Bologne dont les épitaphes se voyaient dans la basilique San Domenico. R. les a lus, mais il est évident aussi qu’il a littéralement traduit le passage suivant d’Alberti (Alberti 1553, 293V) : In questo tempio [San Domenico] si riposano l’ossa di Giovanni Lignani, Giovanni di Andrea, Giovanni Calderini, Bartolomeo Saliceti, Alessandro Tartagno, Pietro d’Ancarano, Giovan(n)i Grotto di Monferrato. Et net chiostro è sepolto Floriano da S. Pietro, Dino di Mugello, Zino da Pistoia, Giovanni da Imola, Ippolito Marsilii, Girolamo Zanetini, tutti dottori eccellenti di leggi. [R. a sauté ici les noms de trois oratori, & omati di lettere grece, & latine] Sonovi anche le cineri de Giacomo Pietra Melara medico, et ottimo astrologo (...) Vedesi poifuori della chiesa la sepoltura di Rotando Passaggiero, & quella di Egidio Foscarari digniβimi giureconsulti. Il n’a commis que deux erreurs de recopiage : il prénomme Zanetini Guilhelmus au lieu de Girolamo ; en changeant un peu l’ordre des derniers cités, il place à la suite des tombeaux vus “dans le monastère” ceux de Passaggiero et de Foscarari qui se trouvent en réalité sur la place. Par ailleurs, il ajoute de brèves précisions que ne comporte pas le texte d’Alberti (par exemple le fait que F. de San Pietro, P. de Mugello et C. de Pistoia soient enterrés dans le même tombeau). Ces seize personnages, tous juristes ou intellectuels, ont illustré l’École de Bologne. Il importe de rappeler que R. a rapporté de son voyage des croquis qui ont servi au peintre Fendt pour la confection des planches de son ouvrage de 1574 (Fendt 1574, dans l’ordre du ms. de R., avec des lacunes ; manquent les monuments de Giovanni Lignani, Giovanni Calderini, “Guilhelmus” Zanetinus et Giacomo Pietra Melara ; pl. 56, 57, 64, 68, 59, 50 pour les trois juristes enterrés ensemble, 71, 72, 70, 69). Ce sont de précieux documents, qui ont été scrutés à la fois par les historiens du droit (comme Savigny) et les historiens d’art (Grandi). Merci au frère Tarcisio Zanette pour son aide.
188 Giovanni da Legnano (déb. xive s.-1383), canoniste, précurseur du droit international (cité par Chaucer dans ses Canterbury Tales) (Savigny 1850, t. III, 141, 208a, 244, 249a ; t. VI, 109d, 278 ; Zaccagnini 1930, 19-22, tombe 23, fig. 3 ; Horn 1973, 275 ; Grandi 1982, 62 ; De Matteis 1987, 157-171 ; Breccia Frata Docchi 2001). Fendt ne donne pas d’illustration de son tombeau. Il se trouvait sur la paroi latérale de la chapelle Saint-Jérôme, puis, en 1498, sur la paroi du campanile (jusqu’au xviiie s.). Il a disparu, sauf quelques fragments au Museo Cívico Medievale de Bologne. Il était signé Jacobello et Pier Paolo Dalle Masegne.
189 Giovanni d’Andrea (c. 1270-1348), décrétaliste illustre (a enseigné à Padoue et Bologne), la Commune lui a confié d’importantes charges politiques. Son tombeau se trouve aujourd’hui au Museo Cívico de Bologne [Fendt 1574, pl. 56, le monument restauré en 1501 ; Audebert (AO) I, 168 et comment., 297 (n. 26) ; Savigny 1850, t. VI, chapitre LI ; Stelling-Michaud 1957 ; Michalski 1977, 96-97 (fig. 8-9) ; Grandi 1982, 52, 123, 156 ; Tamba 2000 ; Parmiggiani 2004, 77, fig. 6]. Le monument a été sculpté en 1348 par Jacopo Lanfrani de Venise, selon Vasari.
190 Giovanni Calderini (déb. xive s.-1365), lecteur au Studio Bolognese, contemporain de G. da Legnano (Zaccagnini 1930, 23 ; Becker 1973). Fendt ne donne pas d’illustration de son monument.
191 Bartolomeo da Saliceto (première moitié xive s.-1411), juriste (a enseigné à Padoue, Bologne et Ferrare). Il fut le maître d’Ancarano [Fendt 1574, pl. 57 ; Audebert (AO) I, 167-168, comment. 297 (n. 23) ; Savigny 1850, t. VI, 259-269 ; Zaccagnini 1930, 6-7, 13-14, sa tombe 15 (fig. 2) ; Orlandelli 1964 ; Horn 1973, 274 ; De Matteis 1987, 170-171]. Son monument n’est plus à S. Domenico, mais au Museo Cívico Medievale. Il est l’œuvre d’Andrea da Fiesole (1411).
192 Alessandro de Imola Tartagni (1424-1477), civiliste et canoniste au Studio Bolognese (a enseigné aussi à Pavie et Ferrare) [Fendt 1574, pl. 64 ; Fichard (1536/37), 122 ; Audebert (AO) I, 167, et comment. 297 (n. 22) ; Savigny 1850, t. VI, 312-319 ; Zaccagnini 1930, 97-100 ; Horn 1973, 273 ; Michalski 1977, 110-111 (fig. 18-19) ; Vasina 1987, 42 ; Ricci 1988, 124 ; Parmiggiani 2004, 74 (fig. 1), 76 (fig. 3), 86 (fig. 19)]. Le monument (1482-1483) est toujours en place à S. Domenico et a été sculpté par Francesco di Simone da Fiesole. Il était à l’origine in pariete sinistro chori veteris selon Fendt, et y est resté jusqu’en 1629.
193 Pietro Farnese d’Ancarano (1333-1416), décrétaliste, lecteur au Studio Botognese ; élève de Saliceto et de Baldo ; a participé au concile de Pise. Sa dalle funéraire se trouve aujourd’hui au Museo Cívico de Bologne [Fendt 1574, pl. 68 ; Audebert (AO) I, 168 et comment. 297 (n. 27) ; Michalski 1977, 102-103 (fig. 12-13) : Zaccagnini 1930, 13, 82-84, sa tombe fig. 12 (83) ; Vasina 1987, 57].
194 Giovanni Crotto di Monferrato (né à Casale † après 1522), professeur (lecteur de droit civil et canon) à Bologne, Pavie et Pise [Fendt 1574, pl. 59 ; Chytræus 1594, 232 ; Fichard (1536/37), 122 (prope fores) ; Savigny 1850, t. VI, 485].
195 Floriano di Gino da Castel San Pietro (ou Sampiero) († 1441), civiliste, enseigne à Sienne, lecteur au Studio Botognese en 1396 (dans le même tombeau que D. del Mugello et C. da Pistoia : Fendt 1574, pl. 50 ; Savigny 1850, VI, 487 ; Zaccagnini 1930, 87).
196 Dino Rossoni, dit Dino del Mugello († après 1298), professeur de droit à Bologne (dans le même tombeau que Fl. da San Pietro et C. da Pistoia : Fendt 1574, pl. 50 ; Savigny 1850, VI, 447-464 ; Horn 1973, 275)·
197 Cino da Pistoia (ou dei Sighibuldi) (c. 1270-1336), poète, ami de Dante et Pétrarque, un des plus illustres juristes (postglossateurs) de son temps (dans le même tombeau que Fl. da San Pietro et D. del Mugello : Fendt 1574, pl. 50 ; Savigny 1850, VI, 71-97 ; Horn 1973, 274).
198 Giovanni Nicoletti dit Giovanni da Imola († 1436), élève de G. da Legnano, lecteur au Studio Botognese [Fendt 1574, pl. 71 (à dr.) ; Chytræus 1594, 234 ; Zaccagnini 1930, 84 ; Audebert (AO) I, 168 et comment. 297 (n. 24)].
199 Ippolito dei Marsigli (1450-1529), criminaliste, enseigne de 1482 à 1524 le droit civil et le droit canon. À partir de 1509, il donne des cours quotidiens de droit pénal (Fendt 1574, pl. 72 ; Mazzetti 1847, 201).
200 Girolamo Zanetini a enseigné à Pavie (fait partie du jury de laurea in utroque jure de Filippo Decio après 1471). Fendt ne donne pas d’illustration de son tombeau (Belloni 1986, 190).
201 Rolandino dei Passaggeri (f 1300). R. se trompe en recopiant Alberti. Son monument funéraire, achevé en 1305 par le maître marbrier Giovanni, se trouve sur la Piazza San Domenico ; c’est un mausolée sur colonnes, surmonté d’une pyramide et orné d’un bas-relief représentant un cours de droit (la première œuvre du genre) [Fendt 1574, pl. 70 ; Savigny 1850, V, 539-548 ; Cencetti 1950 ; Horn 1973, 276 ; Michalski 1977, 92-93 (fig· 6-7) ; Grandi 1982, 118-121 (cat. no 7), fig. 7 et pl. VI, pl. 19-22 (détails) ; Vasina 1987, 39, 40, 47, 48, 50-51, 58 ; Ferrara 1987, 68, 82-83 ; Pini 1987, 105, fig. 15 ; Panofski 1995, 83, fig. 242 ; Byrne 2004a].
202 Egidio dei Foscherari (c. 1278-1289). Même remarque que pour le précédent : son mausolée se dresse sur la Piazza San Domenico, sur un piédestal ; six colonnettes supportent une voûte et une pyramide recouvrant un sarcophage. Le tombeau réutilise des éléments d’un arc en marbre orné de reliefs du ixe s. (Fendt 1574, pl. 69 ; Savigny 1850, V, 520 sq. ; Grandi 1982,113-115, cat. no 5, fig. 5, pl. V ; Bukowska Gorgoni 1997).
203 Giacomo Pietramellara (1474-1533), de Naples, médecin, astrologue et mathématicien (D’Amato 1988, 426).
204 L’église et le monastère San Francesco furent édifiés par les franciscains entre 1236 et 1263, en style gothique français (Morel et al. 1997, 548 ; cf. Alberti 1553, 293v).
205 Guilelmo Accorso († vers 1263) est le célèbre glossateur du Corpus Juris Civilis. Son monument pyramidal où il est enterré avec son fils Francesco, construit vers 1250, s’élève près de l’église [Alberti 1553, loc. cit. ; Fendt 1574, pl. 79 ; Audebert (AO) I, 174 ; Fiorelli 1960 ; Grandi 1982, 116-118 (cat. no 6), fig. 6 et pl. II ; Vasina 1987, 42, 44 ; Ferrara 1987, 63-64, 66, 74, 79, 82].
206 En réalité Rolandino de’Romanzi († 1284) : son monument a été élevé près de l’église San Francesco en 1285 par Alberto di Guidobono et Albertino di Enrico [Alberti 1553, loc. cit. ; Fendt 1574, pl. 81 ; Michalski 1977, 88-89 (fig. 4 et 5) ; Grandi 1982, 111-113 (cat. no 4), fig. 4, pl. III, IV, pl. 8-10 (détails) ; Ferrara 1987, 79 ; Panofsky 1995, fig. 241].
207 Odofredo Denari (début XIIIe S.-1265) : son monument est le plus ancien mausolée à pyramide dressé pour un docteur bolonais (en 1268) [Fendt 1574, pl. 80 ; Chytræus 1594, 233 ; Audebert (AO) I, 174 ; Grandi 1982, 107-111 (cat. no 3), fig. 3, pl. I ; Spagnesi 1990].
208 Alexandre V : Pietro Philarges ou Candiota (vers 1340-1410), né à Kari, au nord de la Crète, antipape en 1409 [Audebert (AO) I, 173 et comment. 298 (n. 37) ; Petrucci 1969]. Le monument funéraire, de terre cuite polychrome, est toujours à San Francesco, le long du bas-côté gauche. Il est dû à Sperandio da Mantova (le socle ; 1482) et Nicola di Pietro Lamberti (la partie supérieure, 1424).
209 Santa Maria dei Servi : monastère construit par les Servi di Maria entre 1386 et 1437, en style gothique.
210 Giovanni d’Anagni (fin xive s.-† entre 1453 et 1457) : civiliste, a étudié et enseigné à Bologne (Alberti 1553, 293V ; Bukowska Gorgoni 2000).
211 Ludovico Gozzadini (ou de Gozadinis) (1479-1536) : juriste de Bologne, successeur de Carlo Ruini en 1505, conseiller privé de Charles Quint qui le fit chevalier en 1530, sénateur de Bologne en 1532 ; a facilité le divorce d’Henry VIII (Alberti 1553, 293v ; Zaccagnini 1930, 203, n. 4 ; Bedouelle & Le Gal 1987, 358-359 ; Magoni 2002). Le monument, œuvre de G. Zacchi, est toujours dans l’église des Servi (Fendt 1574, pl. 76 ; Michalski 1977, 132-133, fig. 30-31).
212 San Giovanni in Monte Oliveto : église attestée pour la première fois en 1045 [Alberti 1553, loc. cit. ; Audebert (AO) I, 176, et comment. 298, n. 40].
213 Carlo Ruini, de Reggio (1456-1530) : lecteur de droit au Studio Bolognese ; a aussi enseigné à Pise, Ferrare, Pavie, Padoue ; maître d’Alciat (Alberti 1553, loc. cit. ; Fendt 1574, pl. 84 ; Savigny 1850, VI, 496 ; Zaccagnini 1930, 198-203 ; Tabarroni 1987, 185 ; Brizzi 1988a, 59 ; Ricci 1988, 130 ; Grendler 2002, 16).
214 Monastère San Salvatore : abrite depuis le xiie siècle les chanoines réguliers de Santa Maria di Reno qui transforment l’édifice au xiie siècle (Alberti 1553, loc. cit.).
215 Antonio Cortesi Urceo di Rubiera, dit il Codro (1446-1500) : professeur de lettres latines et grecques à Forli puis Bologne (Alberti 1553, loc. cit. ; Raimondi 1950 ; Tabarroni 1987, 173, 184, 190n, 203n ; Ricci 1988, 126, 129).
216 San Giacomo Maggiore : église des frères ermites de Saint-Augustin, construite entre 1267 et 1315 (façade de 1295). Les Bentivoglio dont le palais est tout proche l’enrichirent dans la seconde moitié du xve siècle en y construisant leur chapelle privée (1445), le plus bel exemple de chapelle nobiliaire bolonaise de cette époque.
217 La Cappella Bentivoglio, acquise en 1445 par Annibale Bentivoglio pour en faire la chapelle familiale, comporte un magnifique et célèbre cycle de peintures de la première Renaissance bolonaise, dû à Lorenzo Costa et à Francesco Francia. Elle a été consacrée en 1486, à l’époque de Giovanni II Bentivoglio (De Caro 1966), mais la statue équestre (un haut-relief) que l’on peut voir sous une arcade n’est pas la sienne, mais celle de son père, Annibale I, seigneur de Bologne de 1443 à 1445, mort assassiné. Cette œuvre, en marbre peint ultérieurement, et attribuée à Niccolò di Puglia dit dell’Arca, est datée M CCCC LVIII et surmonte une épitaphe au nom d’Annibale.
218 La Cappella Poggi fut construite et décorée par Pellegrino Tibaldi (dit il Pellegrino) (1527-1596), pour le cardinal Giovanni Poggio (1493-1556), créé cardinal en novembre 1551, et décédé en février 1556. Elle lui a servi de chapelle funéraire.
219 Il s’agit de la basílica di San Luca, au Monte della Guardia (à 300 m au-dessus de la plaine), créée à la fin du xiie siècle pour une communauté féminine, autour d’une icône d’influence byzantine attribuée à saint Luc l’Evangéliste en personne. L’édifice a été restructuré en 1481.
220 C’est Bessarion qui aurait donné, vers 1462, l’icône de San Luca. Le cardinal Bessarion (1403-1472) a été légat pontifical à Bologne de 1450 à 1455 (Labowsky 1967 ; Congourdeau 1997). Dans l’édition 1846 de Vasari, il est précisé qu’une chapelle de San Luca avait été élevée par Bessarion en 1450, et contenait les portraits du cardinal et de Niccoló Perotto, son secrétaire. Tout semble avoir disparu. Selon Gætano Sgarzi, il seraient dus à un certain Gelasio (Vasari 1846, s.u. “Galasso Galassi”, 214, n. 3).
221 Niccoló Perotto (1429-1480), humaniste, au service de Bessarion, secrétaire apostolique en 1455, archevêque de Siponto en 1458, traducteur de Martial, etc. Sur son portrait, voir note précédente (Sabbadini 1935 ; Ricci 1988, 127).
222 San Michele in Bosco : église et couvent détruits par les Espagnols lors du siège de 1512, reconstruits en 1517 pour les moines olivétains (moines blancs) (portail de 1522). Fichard, Audebert et d’autres ont vanté l’amœnitas des lieux et la beauté de l’église, tota marmorea, et de sa bibliothèque [Audebert (AO) I, 180 et comment. 300, n. 53 ; Fichard (1536/37), 123].
223 Christophe Brandes (ou Brandis), de Hildesheim (1523-1584) : fils du Bürgermeister Henning Brandes et d’Adelheid von Blum, il étudie en 1538 à Erfurt, en 1540 à Wittenberg, à Bologne en 1550-1551 (Knod 1899, 60, no 408 :1550 : d. Christophorus Brandes patritius Hildesheymensis ; 1551 : Christophorus Brandes, procurator substitutus, comes palatinus), à Ferrare en 1551 (Knod 1899, 667 : Chph Brandis Hildenshem. Germanicæ nationis Bononie procurator, 16 mars 1551) ; en 1554, il est docteur in utroque iure à Bologne (le 25 août) (Guerrini 2005, 195, no 1347). Il rentrera à Hildesheim le 18 avril 1555 († 3 sept. 1584). On le trouve aussi immatriculé à Orléans (nation germanique) en 1548 (Ridderikhoff 1988, 67). Lorsqu’il quitte Bologne avec R., il est donc docteur depuis la veille : Knod 1899, 60, no 408 (notice biographique) et 667 ; voir Chytræus 1594, 229.
224 Ernst von Rechenberg († 1594) : d’une famille silésio-lusacienne. Fils d’Ernst (I) von Rechenberg zu Oppach. Études à Leipzig (1546 et encore en 1549), à Ingolstadt (1550), à Bologne (1553), à Padoue (le 8 janvier 1554), de nouveau à Bologne (procurator en 1554). En 1562, il sera conseiller impérial, puis Landeshauptmann en Lusace en 1575 jusqu’à sa mort. Il y a introduit le calendrier grégorien : Knod 1899, 433, no 2945 (à Bologne : nobilis d. Emestus a Rechenberg Slesius).
225 Ludwig Böcklin von Böcklisau : voir supra, I, η. 303. Le nom de Ludouicus Bocklein à Bocklinsauu figure juste après celui de S. Rybisch sur le registre d’inscriptions de la Nation germanique de Bologne, en 1554·
226 Forum Comelii (Str. 5, 216 ; Plin. HN, 3, 116 ; etc), du nom de P. Cornelius Cethegus, consul en 181 a.C. ( ?) : Radke 1975, col. 602. Le nom moderne, Imola, apparaît pour la première fois chez Pierre le Diacre (xiie siècle).
227 Le château d’Imola est la Rocca, commencée en 1259 et agrandie par le cardinal Bertrando del Poggetto en 1332. Reconstruite à la fin du xve siècle, sous Gian Galeazzo Sforza, avant que César Borgia n’occupe la ville en 1499 : Schickhardt (AB), 146, η. 170.
228 Imola est réuni définitivement aux États de l’Église en décembre 1503 (Cappelli 1969, 389).
229 La Rocca de Castel Bolognese date de 1388-1394.
230 Anemo : Plin., Nat., 3.115 (l’actuel Lamone).
231 Le Duomo de Fænza est une création de la Renaissance romagnole, due à Giuliano da Maiano, de 1474 à 1515 (consacrée en 1581 à San Pietro Apostolo).
232 Le Palazzo del Capitano del Popolo (transformé au xviiie siècle).
233 Il n’est pas utile de s’appesantir sur les majoliques de Fænza, dont les débuts remontent au xiiie siècle.
234 La Rocca de Russi date du xive siècle, et a été agrandie par Astorgio II Manfredi au xve siècle.
235 Bedesis est le nom antique du Ronco (Plin., Nat., 3.115). Cf. Alberti 1553, 278r (R. s’inspire étroitement de lui).
236 Vitis est le nom antique du Montone (Plin., Nat., 3.115). Cf. Alberti 1553, ibid.
237 L’enceinte romaine républicaine de Ravenne a été remaniée sous Auguste et probablement complétée aux ive et ve siècles, quand Ravenne devint capitale de l’empire romain d’Occident, sous Valentinien III : Mauro s.d. (en partic. p. 25-51, par Valentina Manzelli et Maria Grazia Maioli). Sur l’enceinte tardive : Christie 1989. Il est probable que R. a vu des tronçons tardo-antiques.
238 La Porta Clausa (ou Porta Aurea) est la porte sud-occidentale de la ville, élevée par Claude en 43, détruite en 1582 par les Français. Les fragments de son décor architectonique sont conservés au Museo Nazionale (Kàhler 1935 ; Mangani et al. 1981, 57-58 et fig. 57). Dédicace : ti. clavdivs drvsi f. cæsar avg. germanicvs pont. max. tr. pot. ii cos. design. iii imp. p. p. dedit (CIL, XI, 4) (voir le dessin de Sangallo dans Mauro s.d., 29, fig. 5). R. s’inspire encore du texte d’Alberti 1553, 275V.
239 Cf. Alberti 1553, 276r. Ce que R. décrit (en copiant Alberti) ne correspond pas à ce que l’on nomme aujourd’hui, sans doute à tort, Palais de Théodoric et qui consiste en une grande façade des vie-viie siècles.
240 C’est la basílica Ursiana, à cinq nefs, quatre rangs de colonnes et deux chœurs délimités par des enclos de marbre, sans transept ; elle a été élevée par l’évêque Orso vers 390 (elle sera rasée entre 1733 et 1743 pour céder la place à un nouvel édifice). Fichard en donne une importante description (1536) : Fichard (1536/37). 114 ; Chastel 1963, 38 ; Novara 1995, 551.
241 Veggo(n)si dipinti (ò sia alla mosaica effigiati nel nichio della Capella maggiore) quegli Arcivescovi santi, che per apparitione della Colomba sopra il loro capo furono creati Arcivescovi di questa città, cioè S. Aderico, Eleucadio, Calocero, Marciano, Proculo, Probo, Dato, Liberio, Agabito, Marcellino, & Severo (Alberti 1553, 275v). L’abside sur laquelle s’achevait la nef centrale présentait une mosaïque figurant la Résurrection, et au-dessous, la série des premiers archevêques de Ravenne, dont les onze “colombini”, c’est à dire désignés par une colombe (on rappellera que la basilique fut consacrée un dimanche 17 mai, ce qui correspond à la Pentecôte, en 582 et 593) (Benericetti 1994, 194 ; Novara 1995, 552).
242 Tout ce passage consacré à San Vitale est une traduction quasi littérale et sans aucune originalité d’un paragraphe d’Alberti (Alberti 1553, 275v). Cette église illustre, de plan octogonal, a été élevée par Julien l’Argentier (Julianus Argentarius, un banquier grec proche de Justinien), sur l’emplacement d’une memoria du ve siècle consacrée par l’archevêque Maximien en 547 (Mangani et al. 1981, 61). Elle a été commencée en 522-532 (sous Ecclesius).
243 Il s’agit de remplois antiques situés sur le côté interne de deux pilastres de l’abside, sections d’une frise dite “le Trône de Neptune” : des Amours transportent vers un trône les attributs de Neptune (tridents et coquillages) ; sous le trône : monstres marins. Datation : époque claudienne (Mangani et al. 1981, 62 ; Hagenweiler 2003, 24, fig. 12-13 ; La Rocca 2007, 93 et fig. 14, avec bibliographie).
244 Il s’agit du couvercle de marbre portant l’épitaphe de l’exarque Isaac, Arménien d’origine (en fonction de 625 à 643) ; il a été tué par les Lombards qui envahissaient la Ligurie et inhumé en 643 à San Vitale (Chytræus 1594, 257-258 ; Bertolini 1953 ; Ferluga 1991, 363 ; Cavallo 1992, 120, fig. 34 ; Venning 2006, 163, 164 et 166). L’inscription a été traduite en latin par R. (CIG IV, 9869 = Guillou 1996, 116-117, no 109, pl. 108). Ce couvercle est remployé sur un sarcophage du ve siècle.
245 C’est en fait le presbytère de San Vitale (Mangani et al. 1981, 62). R. traduit Alberti 1553, 275v. Il semble bien qu’Alberti ait confondu cette “église” et le prétendu “mausolée de Galla Placidia”, auquel s’attache la tradition funéraire qu’il va développer.
246 Galla Placidia (c. 390-450), fille de Théodose Ier, épouse (en secondes noces) de Constance III, sœur d’Honorius et Arcadius (Lippold 1975).
247 Le prétendu “mausolée de Galla Placidia” (et non “l’église” Saint-Gervais et Saint-Protais) a été l’objet d’une longue tradition voulant y voir la chapelle funéraire de la dynastie théodosienne (d’où son appellation de mausolée). Il s’agissait d’un oratoire cruciforme San Lorenzo, puis église SS. Nazario e Celso du milieu du Ve siècle, sans doute fondée par Galla Placidia et liée au narthex de Santa Croce. La reine n’y fut jamais inhumée (elle le fut probablement dans la chapelle Sainte-Pétronille de Saint-Pierre de Rome, puisqu’elle est morte à Rome, le 27 novembre 450). On persista cependant à vouloir identifier – à tort – les cinq sarcophages qu’il contenait aux tombeaux de la reine et de ses proches (il semble que ces sarcophages y aient en réalité été introduits entre le ixe et le xive siècle) : 1) le plus grand sarcophage, massif et en marbre grec, situé dans le bras sud, a été attribué à Galla Placidia (tradition remontant aux xiiie-xive siècles ; il aurait été introduit sous l’archevêque Renaud de Concorregio) ; 2) le sarcophage du bras gauche (oriental) à Constance III († 421) ; 3) celui du bras droit (occidental) à Valentinien III, son fils (419-455, empereur en 425) ; il date en fait du début du vi e siècle ; ou bien à Honoria (née en 418) ; mais pas à Honorius, † 423, enterré à Saint-Pierre de Rome ; 4) et 5) enfin les parents nourriciers (ou tuteurs) de Valentinien et Honoria seraient enterrés dans deux petits sarcophages inserrés dans les murs latéraux de l’entrée (Bovini 1991, 13).
248 Sant’Andrea Maggiore : oratoire décoré de mosaïques, construit au ve siècle en forme de croix, et faisant partie du palais archiépiscopal. L’archevêque Massimiano (546-557) aurait modifié l’église, y installant de superbes colonnes de marbre sur lesquelles insistent tous les visiteurs à partir du xvie siècle, en particulier deux fûts de marbre africain caractérisés par des taches blanches et rouges, transportés à l’époque de l’archevêque Codronchi (1785-1826) au Duomo (chapelle Saint-Ursicin) (Alberti 1553, 276r ; Novara 1995, 554).
249 Il s’agit de Sant’Apollinare Nuovo, commencé par Théodoric : église arienne dédiée au Christ. En 560, elle devint catholique et fut dédiée à saint Martin. Elle est aussi connue sous le nom de San Martine ai Ciel d’Auro. Elle se nomme définitivement Sant’Apollinare (Nuovo par opposition à Sant’Apollinare in Classe) au ixe siècle.
250 R. suit pas à pas Alberti 1553, loc. cit.
251 Le registre inféreur, dans sa version primitive, avant les modifications de Justinien, montrait le roi Théodoric, sa famille et la cour s’approchant du Christ en Majesté (ou de Marie en Majesté), dressé dans l’abside. Est-ce un élément de ce groupe que vit R. ? Il y a aussi à SantApollinare un fragment de mosaïque représentant un portrait royal couronné, identifié par l’inscription à Justinien, mais peutêtre, à l’origine, Théodoric (Alberti 1553 est muet sur ce fait ; voir Grabar 1966, 153).
252 San Giovanni Evangelista : basilique fondée par Galla Placidia au ve siècle, à proximité du palais impérial. R. a traduit Alberti 1553, loc. cit. Ce décor était destiné à affirmer la légitimité de la dynastie. Sur l’arc triomphal, une série de clipei contenaient les portraits des empereurs de la dynastie valentinianothéodosienne, dont Théodose Ier, Arcadius, Honorius, Valentinien Ier, Gratien et Constantin le Grand (dont Théodose II se considérait comme le successeur légitime). Dans le bas de l’abside étaient représentés Théodose II et Eudocie, ainsi qu’Arcadius et Eudoxie. Selon Gerolamo Rossi, les mosaïques étaient encore visibles en 1568. Quelques-unes semblent avoir subsisté jusqu’au xviiie siècle (Novara 1995, 553-554).
253 Santa Maria in Porto : les chanoines du Latran de Santa Maria in Porto Fuori firent construire, à partir de 1496, une grande demeure intra muros sur la via di Roma actuelle. Ils avaient abandonné leur église suburbaine, sur le littoral, pour obéir aux Vénitiens. En 1525, il y ajoutèrent un cloître trilatéral (détruit en 1885), sur un projet de Bernardo Tavella (Alberti 1553 ne mentionne que l’église Santa Maria in Portico, da Classe tre miglia discosto, 278r, en fait Santa Maria in Porto Fuori, rasée par un bombardement en 1944 : elle était située à l’entrée du port de Classe, in litore maris ; Ricci 1994, 154-155).
254 San Francesco, église fondée au ve siècle par l’archevêque Néon, sous le vocable des saints Apôtres, puis de San Pietro Maggiore ; elle fut entièrement refaite avec campanile lombard aux xe-xie siècles. En 1261, elle passa aux Frati Conventuali et prit son nom définitif.
255 Banni de Florence, Dante est mort à Ravenne le 14 septembre 1321. Ses restes furent dissimulés par les moines et redécouverts en 1865. Un mausolée lui a été élevé près de l’église San Francesco en 1483 sur des dessins de Pietro Lombardo, à la demande du podestà vénitien Bernardo Bembo. Fendt publiera en 1574 une gravure le représentant (Fendt 1574, pl. 20 ; Michalski 1977, 124-125, fig. 26-27). Il avait luimême composé cette épitaphe avant de mourir, aux dires de Paolo Giovio (Elogia Doctorum Virorum, c. 4) [Alberti 1553, 276r ; Schickhardt (AB), 146 et n. 169].
256 CIL, XI, 126 (ier-iie s.). Inscription funéraire sur marbre, perdue : Lenzi, éd. 2006, 181-182.
257 Santa Maria della Rotonda : il s’agit du Mausolée de Théodoric, construit au vie siècle en pierre d’Istrie (sur ce nom : Weiss 1969, 125, d’après Desiderio Spreti, 1414-c. 1474).
258 Il est couvert d’un énorme coupole monolithique de 11 m de diamètre et de 300 tonnes.
259 Tombe de Théodoric, roi des Ostrogoths de 475 à 526, mort le 30 août 526. Sa fille Amalasuntha fut régente en 526. Du sarcophage, il ne reste que la vasque de porphyre. Il a été mentionné pour la première fois par Agnello (Liber pontificalis), qui indique qu’il se trouve en terre, à l’extérieur du mausolée. Il sera vu au même endroit de nouveau en 1346. En 1564, il sera transféré à l’église San Sebastiano. R. l’a donc bien vu “à terre”. Il se fait aussi l’écho de la tradition érudite locale, qui veut que le sarcophage se soit trouvé à l’origine sur la coupole du mausolée jusqu’en 1509, année de l’assaut des troupes de Francesco Maria della Rovere. En fait R. reprend, en la traduisant, la lettre du texte d’Alberti 1553. 278r : cf. Novara 1995, 554-556).
260 La bataille de Ravenne (ou du Ronco) a eu lieu le 11 avril 1512 (jour de Pâques), entre les troupes hispano-pontificales (la Sainte-Ligue) et l’armée française de Gaston de Foix. Cette dernière, après avoir échoué le 9 avril à prendre Ravenne, remporta la victoire en rase campagne aux portes de la ville, mais des pertes terribles furent subies par les deux camps (Gaston de Foix y fut tué), et Louis XII dut malgré tout abandonner la Lombardie. Ravenne fut alors saccagée (cf. Arnold 2002, p. 147-150). Le texte s’inspire d’Alberti pour le nombre des morts (Alberti 1553, 278r-v ; Casanova 1994, 39-41). Un monument (un pilastre couvert d’inscriptions) sera élevé en 1557 sur ordre de Pietro Donato Cesi, évêque de Narni et gouverneur de la province, en mémoire de cet événement, à l’endroit où serait mort Gaston (Fontana 1994, 206). On notera que Fendt reçut de R. un modèle (un croquis ?) lui permettant de graver ce monument, aujourd’hui disparu : Fendt 1574, pl. 89 (cette planche sera reproduite telle quelle dans le Thesaurus Antiquitatum de Grævius, en 1722 ; cf. Fontana 1994, 205, fig. 9).
261 Isapis (Lucan. 2.406) ; Sapis (Plin., Nat., 3.115) (Alberti 1553, 270v, qui cite aussi Strabon et Silius Italicus). C’est l’actuel Savio.
262 Porto del Cesenatico : aujourd’hui Cesenatico.
263 La ville appartint à Venise jusqu’en 1509, puis à l’État pontifical.
264 R. suit servilement Alberti, tant sur l’air vicié des marais que sur l’“or blanc” des salines (Alberti 1553, 270r-v).
265 CIL, XI, 349 = D. 2860 (disparu). R. tire ses informations d’Alberti 1553, p. 27or. Le texte exact est (CIL) : M(arcus) Aurel(ius) Macedo vet(eranus) nat(ione) Delm(ata) ex subopt(ione) sibi et Aurel(iæ) Victoriœ libertœ vivus posuit, si quis hanc arc(am) po[s]t excess(um) s(upra) s(criptorum) a(peruerit) d(abit) fisco) C(æsaris) [—] (voir Chevallier 1973 = Chevallier 1984, 213).
266 Cesena a été dotée de fortifications sur les hauteurs à partir des viiie-ixe siècles, démolies par Frédéric II en 1241, pour édifier une forteresse plus importante, la Rocca Vecchia. En 1327, une nouvelle construction fut ordonnée par Jean XXII, incluse en 1334 dans l’enceinte du Monte Garampo (la Murata). L’ensemble fut dévasté lors du sac des Bretons en 1377, et les Malatesta construisirent une Rocca Nuova au xve siècle. En 1526, elle bénéficia d’améliorations de la part de Sangallo il Giovane et de Michele Sanmicheli. Cesena a appartenu aux États de l’Église de 1465 à 1796.
267 Abbaye de la Madonna del Monte, monastère construit sur le Monte Mauro (par. San Pietro in Cesena) entre 1001 et 1026. Le nom de Santa Maria remonte à 1318, lorsque l’abbé Odondeo lui fit don d’une statue de la Madonne. En partie reconstruite en 1400 et restructurée à partir de 1548 par Domenico Garavini da Brisighella (peut-être sur un plan de Bramante) (Alberti 1553, 270v).
268 Le texte est emprunté à Alberti (ibid.). CIL, XI, 568 (disparu après 1873) : sous l’autel de San Mauro, sur un sarcophage de marbre.
269 Emprunt à Alberti (y compris les erreurs) (ibid). CIL, XI, 556 = D. 5687 (disparue ; Probus ou Carus, 276-283) : Mrozek 2001, 102, n. 345 ; Nakagawa 2006-2007, 115, no VIII-15) [N.B. : une ligne semble manquer, ou bien le nom de l’empereur a été effacé].
270 Ce fragment, relevé par Alberti, et disparu, ne figure pas au CIL (Alberti 1553, loc. cit.).
271 CIL, XI, 557 (disparue). Texte traduit par R. d’après Alberti 1553, loc. cit. Le CIL ne retient pas les derniers mots, car lapis fractus est, suivant en cela Bembo.
272 Ariminus (Plin., Nat., 3.115) : actuel Marecchia.
273 En réalité c’est un pont de Tibère (il a été élevé entre 14 et 21). Il franchit le Marrecchia, à l’ouest de la ville, et comporte cinq arches en pierre d’Istrie (Mangani et al. 1981, 25-26, fig.). R. indique que “c’est l’un des trois qu’il [Octavien Auguste] a construits sur la voie Flaminia”, alors que sa source, Alberti, écrit : Quest è un de’quattro ponti fatti da Augusto nella via Flaminia (Alberti 1553, 268v). Il y avait bien quatre ponts : celui de Rimini ; celui qui était proche de Narni, sur la Negra ; le pont situé sous Otricoli ; le pont Milvius ou ponte Mole.
274 CIL, XI, 367 : R. (et Alberti) ont fait une synthèse des deux inscriptions, incomplètes, mais identiques. Le CIL donne : a) a sinistra venienti ex urbe : Imple.rator) Ca[e]sar divi f(ilius) Augustu[s pontifex m] axim(us) [co(n)s(ul) XIII imp(erator) X]X tribunic(ia) potest(ate) XXXVII p(ater) p(atriæ) / Ti(berius) Cœsar divi Augusti f(ilius) d[ivi Iuli n(epos) Au]g(ustus) pontif(ex) [maxim(us) co(n)]s(ul) IIII impi(erator) VIII trib(unicia)potest(ate) XXII / deder[e].b) a dextra venienti ex urbe : [Imp(erator) Cœsar d]ivi f(ilius) Augustus pontifex max[i]m(us) co(n)s(ul) XIII imp(erator) XX tribunic(ia) potest(ate) XXXVII p(ater) p(atriæ)/[7Y(berius) Cœs]ar divi Augustif(ilius) d[ivi luli n(epos) August(us) pontif(ex) maxim(us) co(n)s(ul) LUI imp(erator) VIII trib(unicia) potest(ate) XXII / dedere (voir la datation à la note précédente).
275 R. veut dire : “les voies Æmilia et Flaminia”.
276 L’arc d’Auguste a été élevé en 27 a.C. pour célébrer l’organisation de la via Flaminia. Il correspondait à un autre arc (disparu) situé à Rome, près du pont Milvius (Mansuelli 1960 ; Mangani et al. 1981, 23-25, fig.).
277 CIL, XI, 365. Il s’agit d’un texte incomplet (à l’origine en lettres de bronze encastrées), restituable comme suit : Senatus.Populusq[ue. Romanus / Imp(eratori). Cœsari divi Iuliif(ilio) Augusto imp(eratori) sept(imom)] / co(n)s(uli). sept(imom). designat(o). octavom. v[ia Flaminia et reliquei]s (?) / celeberrimeis. Italiœ. vieis. consilio [et auctoritate ei]us [muni]teis (date : 27 a.C). R. et Alberti n’ont pas respecté cet ordre : ils placent les éléments du bloc supérieur (Senat pop) à la fin du texte, ce qui pourrait faire penser que le remontage des morceaux de la dédicace était alors erroné et a été modifié par la suite. Voici la fin du “relevé” d’Alberti : Italiœ vieis consilio Senatus. Pop. (Alberti 1553, 267v).
278 C’est plus vraisemblablement l’amphithéâtre, car le théâtre est au cœur de la ville (R. traduit littéralement Alberti 1553, loc. cit. ; Golvin 1988,t. I, 197-198, no 172 et t. II, pl. XVII, 6).
279 Notre Silésien suit Alberti à la lettre (loc. cit.). Il n’y a qu’un palais, le Castel Sismondo (ou Rocca Malatestiana), palais-forteresse élevé entre 1437 et 1446 par Sigismondo Pandolfo Malatesta (1417-1468).
280 Après avoir été soumis à Venise de décembre 1503 à mai 1509, Rimini est passé sous diverses dominations avant d’être rattaché aux États de l’Église le 17 juin 1528 (il le restera jusqu’en 1797) (Cappelli 1969, 396).
281 R. suit, comme Alberti, la forme Isaurus donnée par Lucain (Lucan. 2.406), mais on peut lui préférer Pisaurum d’après les Scholies de Berne (2.405) (Agnati 1999, 112). Le nom moderne du fleuve, Foglia, est du genre masculin.
282 La Rocca Costanza, forteresse construite au xve siècle (entre 1474 et 1483 ; ultimes travaux en 1505) par Luciano Laurana sur ordre de Costanzo Sforza, maître de Pesaro de 1445 à 1512.
283 Les ducs d’Urbino sont seigneurs de Pesaro de 1512 à 1516 et de décembre 1521 à 1631 (Cappelli 1969, 401).
284 La place publique est la Piazza del Popolo. Le prœtorium correspond à la Corte di Pesaro, ou Patazzo Ducale : Valazzi, éd. 1986, dont Eiche 1986.
285 Armería du palais ducal.
286 C’est l’Idolino, statue de bronze de 148 cm, d’époque augustéenne, trouvée à Pesaro, derrière le jardin du Patazzo Ducale des Montefeltre en 1530 par A. Barignani qui le donna au duc Francesco Maria I della Rovere (1508-1538), lequel le dota d’une base (1537) et le fit restaurer. Guidobaldo II (1538-1574) l’exposa en 1540 dans la Sala Scoverta de la Villa Imperiale. Puis il fut transféré, “à la fin du siècle”, dans l’Armeria. Il sera envoyé à Florence en 1630 (à l’Armeria, puis aux Offices, enfin, en 1890, au Museo Archeologico) (Gaggiotti et al. 1980, 200 ; un moulage se trouve au Museo Oliveriano de Pesaro). Lorsqu’elle fut découverte, la statue portait dans la main gauche un fragment de rameau de vigne, d’où l’on a conclu qu’il s’agissait d’un Bacchus. Le mot Idolino n’apparaîtra qu’en 1779. Il pourrait s’agir d’un lychnouchos, ou lampadophore, destiné à éclairer les banquets du soir (Beschi 1983, avec bibl.).
287 Nous n’avons rien trouvé concernant ces bustes de marbre.
288 Il s’agit du Poggio (ou Villa) Imperiale, situé au sommet de la colline San Bartolo, construit au xve siècle pour Alexandre Sforza (c. 1452), agrandi par les Della Rovere en 1529-1530 : Marchini, éd. [1965] ; Azzi Visentini 1996, 134-144.
289 L’affirmation vient d’Alberti 1553, 258r. Nous n’avons aucune preuve de l’existence de ces vestiges. Le nom de Fanum Fortunæ est peut-être à mettre en rapport avec un fanum commémorant la victoire romaine de 207 a.C. au Métaure sur les troupes d’Asdrubal, frère d’Annibal.
290 Arco di Augusto : cet arc à trois passages (en réalité une porte), dont seules les parties basses sont conservées, marquait le départ de la via Flaminia. Toute la description suit servilement celle d’Alberti 1553, 258r-v. La partie supérieure a été détruite en 1464, à la suite d’un bombardement pendant le siège de la ville par Federico da Montefeltro, à la tête des troupes pontificales. La porte se compose actuellement d’un arc central large et de deux passages latéraux plus petits. Le tout était autrefois surmonté d’un attique rythmé par une série de sept petites arcades, couronné par une forte corniche moulurée.
291 Il y a là trois textes de dates différentes (CIL, XI, 6218, 6219) : l’inscription supérieure (disparue) (a) courait au sommet de l’attique, sur l’architrave, et date de l’époque de Constantin (un bloc est inséré dans le côté gauche de la façade de l’église San Michele qui fait face à la porte). La deuxième et la troisième (conservées) (b) (c) se trouvent à l’architrave des trois passages du bas, et datent respectivement de 9-10 de notre ère, et d’après le 14 juillet 339. Les deux premiers et le troisième textes sont donc quasi contemporains. Comme l’ensemble a été reproduit sur un bas-relief en 1513 (voir rubrique suivante), y compris les inscriptions, il est probable que les visiteurs s’en inspiraient, au moins pour restituer la première inscription disparue. Ce fut le cas d’Alberti, copié comme d’habitude par R. (Alberti 1553, 258v). Un album conservé en Angleterre et datant du milieu du xve siècle montre un état ancien de l’“arc”, avec ses inscriptions (Nesselrath 1986, 102-104 et fig.·54-57).
a) Divo Augusto Pio Constantino patri Dominorum ;
b) Imp(erator) Cœsar divi f(ilius) Augustus, pontifex Maximus, co(n)s(ul) XIII, tribunicia potes[t(ate) XXXII],/imp(erator) XXVI, paterpatriœ, murum dedit ;
c) Curante L(ucio) Turcio Secundo, Aproniani prœf(ecti) Urb(i) f(ilio), Asterio, v(íro) c(larissimo), corr(ectore) Flam(iniæ) et Piceni.
L’inscription b) est la première chronologiquement : elle marque la construction de l’enceinte par Auguste, qui venait de fonder la colonie de Fanum Fortunœ entre 31 et 27 a.C. Elle est datable d’entre le 1“juillet 9 et le 1er juillet 10. Une erreur a été commise dans le comput des acclamations “impératoriales” : XXVI, au lieu de XIX.
L’inscription a) a été gravée à la mémoire de Constantin, après sa mort le 22 mai 337. Il est dit “père des domini”, c’est à dire ses trois fils Constantin II, Constance et Constant.
Le texte c) rappelle une reconstruction d’une partie de l’enceinte urbaine (ou de la porte), sous le contrôle de L. Turcius Secundus Asterius, sénateur, fils du célèbre préfet de Rome de 339, L. Turcius Apronianus. Ce personnage a agi en qualité de corrector (gouverneur) de Flaminia-Picenum, charge qu’il assume jusqu’en 350. Les inscriptions a et c peuvent être contemporaines, et dater des environs de 339 (Trevisiol 1999, 138-139).
292 Ce texte est célèbre dans l’histoire de l’épigraphie. Après la destruction d’une partie de l’“arc”, on décida en 1513 de représenter le monument intact par un relief sur la façade de la nouvelle église San Michele, accompagné d’un texte précisant le fait, correctement recopié par Alberti, évidemment suivi par notre Silésien : “Image de l’arc construit par Auguste, détruit ensuite en partie par les engins, lors de la guerre de Paul [II] contre les habitants de Fano, en 1463” (il y a une erreur d’un an dans la date : 1464) (Weiss 1965 et 1969, 118 et pl. 12, face à 149 ; Nesselrath 1986, fig. 55 ; Di Stefano Manzella 1987, 266, fig. 38 et 72, n. 84 ; Greenhalgh 1989, 116-117).
293 Les Gaulois qui s’étaient emparés de Rome ne furent pas battus par Camille. La bataille remportée sur des Gaulois par le dictateur eut lieu en 367, à Albanum.
294 La colonie romaine de Sena Gallica fut fondée en 283, après l’écrasement des Sénons (Plb. 2.19.12 ; Liv., Epit., 11).
295 La Rocca Roveresca de Senigallia est un château doté de quatre tours cylindriques, construit en 1480 par Baccio Pontelli pour Giovanni Della Rovere. À l’époque de R., la cité était soumise à Guidobaldo II della Rovere, duc d’Urbino de 1538 à 1574.
296 Alberti (Alberti 1553, 254r, traduit par R.) identifie le Monte d’Ancona au Promontorium Cimeria ou Cumerum de Strabon (5.241) et Pline (Plin., Nat., 3.111), endroit où des Syracusains fondèrent au début du ive siècle a.C. (a. 387) une colonie dorienne. Il correspondrait, selon la tradition, au sommet du Monte Guasco, acropole dominant la mer, au cœur de l’actuelle cité.
297 Un célèbre sanctuaire d’Aphrodite Euploia s’élevait à Ancône (Catull. 36.13 et Juv. 4.40). Des fouilles en ont révélé la présence sous la cathédrale San Ciríaco (première moitié du iiie siècle a.C. selon G. Annibaldi) (Gaggiotti et ai. 1980, 229-230, fig. ; Sebastiani 1996, 29-33, plan du temple 32, fig. 25 ; il est aussi mentionné par Alberti, loc. cit.).
298 Alberti, loc. cit. Ici, il y a confusion chez nos visiteurs : l’érémitisme a concerné le Monte Conero (alt. 572 m à pic au-dessus de la mer), à une vingtaine de km au sud-est d’Ancône, devenu “montagne des ermites.” L’erreur doit venir de la ressemblance du nom avec Cimeria ou Cumerum des Anciens. Les ermites ont apprécié très tôt ce lieu sauvage et grandiose et occupé des grottes, puis des bénédictins se sont installés avant l’an 1000, et deux églises appartiennent au monastère : la Badia di San Pietro (au moins xiie siècle) et San Benedetto. En 1518 l’abbaye San Pietro al Conero est donnée aux Eremiti di Santa Maria di Gonzaga (près de Mantoue) qui restent jusqu’en 1558, alors que des camaldules de San Salvatore di Monte Acuto (ou Monte Corona) en Ombrie (prov. Pérouse) s’étaient installés dès 1514 à San Benedetto. Ces derniers, prenant la place des gonzaghisti, resteront sur place jusqu’en 1880.
299 Le nom d’Ancône vient du grec ἀγκών, “coude” : voir les monnaies d’Ancône représentant un bras plié (Alberti 1553, loc. cit. ; EI, III, 1929, 156, fig. ; Sebastiani 1996, 24, fig. 20-21).
300 Le texte de R. est un décalque de celui d’Alberti (Alberti 1553, 254V). Les degrés sont sans doute une allusion aux marches qui permettent d’accéder au niveau de l’arc et du môle antiques.
301 L’arc a été construit en 115, si l’on en croit les données de la dédicace (Luni 1996).
302 CIL, IX, 5894 (inscription autrefois en lettres de bronze, lisible grâce aux trous de fixation). Le texte de R. est pratiquement identique à celui d’Alberti, erreurs comprises (loc. cit.). Un même texte est répété sur chaque face de l’arc. On lit : Imp(eratori) Cœsari divi Nervœ filio) Nervœ / Traiano, optimo Aug(usto), Germanic(o), / Dacico, pont(ifici) Max(imo), tr(ibunicia) pot(estate) XVIIII, imp(eratori) IX, co(n)s(uli) VI, p(atri) p(atriæ), providentissimo principi, / Senatus P(opulus)q(ue) R(omanus), quod accessum / Italiœ hoc, etiam addito ex pecunia sua / portu, tutiorem navigantibus reddiderit (Gaggiotti et al. 1980, 233-234 – mate). Aux extrémités de l’attique (mais dans l’ordre inverse de celui qu’a indiqué Alberti) : Plotinœ / Aug(ustæ) / coniugiAug(usti) (àg.) ; Divœ / Marcianœ / Aug(ustæ) / sororiAug(usti) (à dr.).
303 Santa Maria di Loreto (Loreto vient de “bois de laurier”) : il n’est pas nécessaire de présenter longuement ce sanctuaire en plein essor au xvie siècle, constitué autour de la Santa Casa, la maison de la Vierge à Nazareth, portée miraculeusement par des anges en Esclavonie (à Tersatto, près de Fiume), puis à Recanati, enfin à Lorette même, vers 1291-1294. Le culte s’est développé et diffusé dès le xve siècle, acquérant un rayonnement universel grâce à la papauté : Jules II l’a en effet soustrait à l’autorité de l’évêque de Recanati pour y installer un gouverneur. On peut considérer l’endroit comme “un lieu métaphorique, substitut des Lieux Saints devenus inaccessibles” (D. Julia). Lorette est une cité-sanctuaire et un immense chantier (l’église et la cité fortifiée sont l’œuvre de Baccio Pontelli au xve siècle, puis de Francesco di Giorgio Martini et Bramante de 1518 à 1521). En 1586 Sixte Quint l’agrandira en une Felix civitas Lauretana (avec une communauté de desservants). L’influence du sanctuaire sur les élites nobiliaires d’Allemagne du Sud et d’Autriche va se développer à partir de 1571 par l’intermédiaire des jésuites (en particulier dans les États des Habsbourg et en Suisse). Pierre Canisius se rendra à Lorette en 1556 et 1558 (Barker & Kleinhenz 2004 ; Julia 2000, 271-276, avec bibl. ; sur l’influence de Lorette dans les pays germaniques : 279 ; Bercé 2011). Déjà Fichard en donne une longue description : Fichard (1536/1537), 118-120.
304 L’humble maison, dans son écrin de marbre, est bien connue en France grâce à la visite qu’y fera Montaigne.
305 Sur le grand chantier artistique, on pourra se reporter aux recueils publiés par Grimaldi et al., éd. 1994 et Citterio & Vaccaro, dir. 1997 ; cf. Bruschi 1997·
306 R. se permet une critique (qui ne se trouve évidemment pas chez Alberti) à propos des innombrables ex-voto qu’il a observés dans le sanctuaire, bien propres à susciter la colère d’un luthérien. Fichard donne une longue description de ces tabulæ votivœ : Fichard [1536/37], 118-120.
307 Voir le Journal de voyage de Montaigne.
308 Cette reine était Anna (1503-1547), sœur du roi Louis II de Hongrie. Elle avait épousé en 1521 Ferdinand Ier (roi des Romains en 1531). La statue est un ex-voto de son mari, déposé à sa mémoire. L’inscription en a été relevée par Nathan Chytræus : Ferdin(andus) Rom(anorum) Ung(ariæ), Bohem(iæ) rex, Arch(idux) Austr(iæ) ex voto pro salute, & in memoriam dulcissimœ coniugis Annæ, hanc eius argenteam effigiem D(ivæ) Mariœ virgini dedit consecravitq(ue) ; Q (= obiit) Anno sal(utis) 1547, d(ie) 27 Ian(uarii), œt(ate) 43, m(enses) 7, d(ies) 5 (Chytræus 1594, 262).
309 Dans l’Antiquité Recina (ou Ricina) : Pline (Plin., Nat., 3.111) parle des Ricinenses ; puis Helvia Recina lorsqu’elle fut promue au rang de colonie, en 205, par Septime Sévère (du nom, Helvius, de son prédécesseur Pertinax) ; en latin médiéval Ricinetum ou Recinetum.
310 Ce sont probablement les restes de la ville antique (théâtre, me, pont), abandonnée peu à peu lors de l’invasion des Goths (ve-vie siècles) et qui se trouvent aujourd’hui à Villapotenza (fraction de la commune de Macerata).
311 Passe di Macerata, ou Campo delíe Porche, actuelle Villapotenza.
312 Plin., Nat., 3.111.
313 Francesco Filelfo est né le 25 juillet 1398 à Tolentino. Érudit, helléniste, titulaire d’une chaire à Florence en 142g, réfugié à Milan en 1434 et protégé par les Visconti puis les Sforza. Il est décédé en 1481 : Avesani & Billanovich, éd. 1986.
314 Rocca di Albornoz (du nom du cardinal et condottiere Gil Álvarez Carrillo de Albornoz, 1310-1367). C’est le centre de l’administration pontificale dans le duché de Spolète. La construction de la forteresse a commencé en 1359. Elle domine la cité, dont les murs convergent vers elle. Y résident les gouverneurs pontificaux (voir note suivante).
315 Le Ponte dette Torri qui enjambe le ravin du Tessino, est un aqueduc (-viaduc) qui amène l’eau à la forteresse. Élevé au xiie sècle, réaménagé au xive siècle par l’architecte Gattapone, il mesure environ 90 m de hauteur et 236 m de longueur. Alberti parle du pont et de la Rocca en ces termes : Ella [Spoleto] è situata parte sopra il colle, & parte nella pianura, havendo una fortiβima Rocca sopra il cotte da riporre fra leforti d’Italia (qualefufabricata d’uno anfiteatro antico) ch’era nella città (come scrive Blondo net 6. lib. delta prima Deça dell’hist.) alta quale si passa dalla Città per un’artificioso Ponte di pietra, sostentato da 24. groβi pilloni, con gran maggisterio disposti (Alberti 1553, 83v).
316 Ils sont nombreux : un théâtre du Ier siècle de notre ère ; une porte romaine du iiie siècle a.C. ; un arc de Drusus et Germanicus (23 p.C.) ; les restes d’un temple du Ier siècle (sous l’église Sant’Ansano) ; des restes de l’enceinte de la colonie fondée en 241 a.C. ; un amphithéâtre du iie siècle transformé en forteresse par Totila en 545 ; les restes (3 arches) d’un pont du Ier siècle sur la via Flaminia (le Ponte Sanguinaro) (Gaggiotti et al. 1980, 105-118). Alberti précise : E gli è ben vero che doppo Teodorico ju roinato [il pallagio di Teodorico] da’detti Gotti insieme co(n) ta città mapoifu ristorata da Narse Eunuco (Alberti 1553, 83r).
317 Cette fontaine semble avoir disparu.
318 Da Spoleto adunque caminando lungo la via Flaminia entrasi nella Valle di Strettura tutta sassosa posta tra altissime rupi (Alberti 1553, 85r). Strettura est un lieu-dit de la commune de Spolète ; ce sera aussi une étape, entre Spolète et Otricoli, dans le voyage de Brackenhoffer, en 1646 : Brackenhoffer (EL I), 153·
319 Interamnates : Cic., Att., 4.15.5 ; Plin., Nat., 3.113 ; la ville s’appelais Interamna (Nahars) : Cic., Mil., 46 ; Tac., Hist., 3.63.2.
320 Le Nar de Virgile (Aen., 7.517) est l’actuel Nera. Le pont romain a été détruit par les bombardements de la seconde Guerre Mondiale.
321 Terni (anc. Nahars, puis Interamna Nahars) est un municipe romain établi sur un site conquis par Rome en 299 a.C. Les mines consistent en un amphithéâtre datant de 32 p.C., des temples, un théâtre, des thermes, une enceinte d’époque impériale (Gaggiotti et al. 1980, 40-45).
322 (Liv. 10.9.10 ; Plin., Nat., 3.113) est l’ancien nom de Narnia (Liv. 10.10 ; Tac., Ann., 3.9).
323 La ville est perchée sur une colline de 240 m d’altitude.
324 Mart. 7.93.1-2 : Narnia, sulphureo quam gurgite candidus amnis / circuit, ancipiti vix adeunda tugo : “Narnia, qu’une rivière blanchâtre encercle de ses tourbilllons sulfureux, et dont la double hauteur est à peine accessible” : trad. Izaac, CUF.
325 La cascade du Nar, ou Cascata delle Marmore, fut créée par le consul romain Manius Curius Dentatus (290 a.C.). Elle est haute de 165 m (voir Alberti 1553, 92r, texte non suivi par R.).
326 La ville fut mise à sac en 1527 par la soldatesque impériale unie aux habitants de Terni, ennemis des Narniates, qui saccagea la cité pendant trois mois. Ses très riches archives dispamrent alors (Degli Azzi Vitelleschi 1934). Alberti développe ces événements bien davantage que R. qui reste laconique, sans doute parce que les Impériaux étaient les principaux responsables (Alberti 1553, toc. cit.).
327 Alberti a signalé cette tagliata (aujourd’hui disparue) : Uscendo fuori delta Città, & seguitando la Via Flaminia, incontenenti vedesi il sassoso Monte col’ferro tagliato per poter passare fra le precipitose rupi del’fiume Negra & l’alto Monte delta sinestra. Veramente ella è cosa meravigliosa à considerare sfaldato il sasso in alto da 30. piedi & da 15. in largo, & anche più (Alberti 1553, 92v ; T. Ashby et R. Fell pensent que ces travaux ont été oblitérés par des élargissements ultérieurs : Ashby & Fell 1921, 166).
328 Str. 5.2.10 : οἱ τε’Όκρίκλοι (Ocriculum) ; voir aussi Liv. 22.11.5.
329 Alberti confond le site d’Ocriculum avec l’ancienne ville d’Ocrea (nom de l’oppidum primitif), mais c’est bien Ocriculum qu’il décrit (et R. à sa suite) (Castner 1998, 98 et n. 14).
330 L’amphithéâtre d’Ocriculum date de l’époque julio-claudienne (il mesure 120 x 98 m) (Gaggiotti et al. 1980, 29, plan de G. Pannini ; Golvin 1988, I, 166, no 142).
331 On connaît des thermes augustéens et des thermes d’hiver du ive siècle, un sanctuaire du culte capitolin, un théâtre d’époque julio-claudienne, une basilique à deux rangs de colonnes (époque de Claude) (Gaggiotti et al. 1980, 20-30 ; en général, sur le site : Richardson 1979).
332 Le pont sur le Rio Maggiore (Pite di Augusto), a été construit par Q. Minucius Thermus entre 70 et 65 a.C. et restauré par Auguste. Connu dès le xve siècle. Il n’en reste plus aucune trace (Gaggiotti et αl. 1980, 29).
333 Jean Tarde, quittant Rome en 1614, écrira : “Depuis la Prima Porta jusques à Rignano, avons trouvé la voie Flaminia presque toute entière et encore bien pavée de grandes pierres noires” : Moureau & Tetel, éd. 1984, 81. Il y avait, près de Castelnuovo di Porto, des restes antiques d’une station routière (Ad vicesimum [milliarium]), un tunnel avec dallage antique de la voie à Pietra pertusa et des restes de dallage à S. Sebastiano : Radke 1975, col. 134.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Tradition et innovation dans l’épopée latine, de l’Antiquité au Moyen Âge
Aline Estèves et Jean Meyers (dir.)
2014
Afti inè i Kriti ! Identités, altérités et figures crétoises
Patrick Louvier, Philippe Monbrun et Antoine Pierrot (dir.)
2015
Pour une histoire de l’archéologie xviiie siècle - 1945
Hommage de ses collègues et amis à Ève Gran-Aymerich
Annick Fenet et Natacha Lubtchansky (dir.)
2015