Introduction
p. 19-57
Texte intégral
1Le récit des voyages (Reisenotizen) du Silésien Seyfried Rybisch, dont sont ici publiés le texte latin (accessible en ligne), la traduction et le commentaire est conservé dans deux manuscrits inédits de la Bibliothèque Universitaire de Wroclaw, en Pologne.
2À l’origine, il avait été transmis par trois manuscrits distincts, l’un complet, deux autres partiels – deux conservés, un autre perdu.
3Le manuscrit le plus complet (A), autrefois conservé à la Bibliothèque municipale de Breslau (Breslauer Stadtbibliothek, provenant de la Maria Magdalenen-Bibliothek), fait partie, depuis 1945, du fonds de la Bibliothèque universitaire (Biblioteka Uniwersytecka) de Wroclaw, sous la cote inchangée M 1375, et le titre Itinerarium (f. 1r-146v). J’en ai obtenu un microfilm. Pour Foerster, ce manuscrit, “comme le montre sa ponctuation absurde", ne serait pas un autographe de Seyfried, mais une copie. Il a dû servir, selon lui, de modèle aux deux autres manuscrits.
4Un deuxième manuscrit (B), peut-être écrit par Nicolas Henel (sic Foerster 1907,218, η. 1)1, se trouve encore également à la Bibliothèque Universitaire de Wroclaw sous la cote R 2174 (anc. Bibliothèque municipale de Breslau), et sous le titre Iter ex Vienna Venetias (f. 1r-137r). Je l’ai également étudié sur microfilm. Codex de papier, 20,5 x 15 cm.
5Le troisième est perdu. Autrefois conservé à la Hochbergsche Majoratsbibliothek de Fürstenstein (act. Książ), sous le titre ltinerarium Italicum Siegfried Rybisch, Kayserl. Rath und Camer. Assessor in Schlesien nat. Breslau, d. 13. September 1530, † d. 17. August 1584 (cote 2°89055/II/XVIII/14), il s’achevait à l’arrivée de Rybisch à Rome, le 3 septembre 1554 (la suite, f. 369r, était constituée par une suite d’indications de distances). Il faisait partie (f. 8 = f. 298r-368v) d’un ensemble comprenant aussi une Cronica der Fürsten von Polen und Schlesie. Il avait appartenu, d’après la suscription qui y figurait, datée de 1560, à Daniel Rappold, jurisconsulte, bischöflicher Rat et Stifts-Syndikus de Breslau († 5 mars 1588), et fut acquis (cf. l’ex-libris Joannis Caroli Roppan d. 10 Martii 1799) par Johann Karl Roppan († 20 avril 1804). Le Dr. Andrzej Ladomirski, directeur de la Biblioteka Uniwersytecka de Wroclaw, m’a signalé (lettres des 23 mars et 20 juin 2000) que ce manuscrit ne semblait pas avoir figuré dans le fonds de Fürstenstein récupéré par la Bibliothèque universitaire de Wroclaw après 1945. Il ne se serait pas agi non plus d’un autographe de Seyfried Rybisch, selon Hermann Markgraf2.
6L’auteur, Seyfried Rybisch3, était né le 13 septembre 1530 à Breslau (nom allemand de Wroclaw), et décédé le 17 août 1584 dans la même ville. Il l’avait rédigé en latin (langue de tout homme cultivé de ce temps, langue de toutes les universités)4, au retour de longues années de voyages effectuées pour études à travers l’Europe, ce que l’on appelait alors une peregrinado academica5. Lors de son séjour à Poitiers, il avait relevé le texte de trois épitaphes romaines trouvées dans le soubassement de l’enceinte de l’Antiquité tardive6. Ces informations, remarquées au xixe siècle par un universitaire de Breslau, le philologue Richard Foerster7, avaient été transmises aux éditeurs du Corpus Inscriptionum Latinarum8. Leur découverte dans les colonnes de ce qui reste la Bible des épigraphistes a produit sur moi l’effet d’une véritable “bouteille à la mer”. Foerster ayant par ailleurs publié deux articles consacrés à Seyfried Rybisch et à son père Heinrich9, j’ai pu rapidement replacer ce minuscule événement dans l’époque où il s’était produit ; je recherchai en 1992 les manuscrits en question, qui étaient toujours conservés (deux sur trois du moins) en Silésie, en dépit des bouleversements de la fin de la seconde Guerre Mondiale, et je pus y vérifier la lettre même des relevés de Rybisch.
7J’obtins donc des microfilms des deux manuscrits et entrepris, sur une suggestion de Piotr Skubiszewski, d’en procurer une édition complète accompagnée du commentaire le plus approfondi possible. Les années ont passé, faites de recherches, de doutes et de découvertes. Pensant un instant avoir découvert une pépite, je dus peu à peu déchanter et me poser la question de l’originalité et de l’intérêt de ce texte. Je pris conscience du fait qu’il n’était qu’un exemple parmi de nombreux autres journaux et Reiseberichte qui dorment dans les bibliothèques et archives du monde, et émanent de voyageurs comparables à Rybisch, le plus souvent des studiosi ayant, comme lui, sillonné les routes d’Europe. Tous sont loin, hélas, d’être des Montaigne ou même des Thomas Platter ; la plupart, comme Rybisch, n’ont guère de talent littéraire, mais tous sont, à des degrés divers, des témoins singuliers des études poursuivies, des paysages contemplés, des villes et monuments visités, des usages, des croyances et de l’air du temps. Tous méritent d’être scrutés, comparés et, pourquoi pas, publiés10. En les fréquentant – du moins ceux qui avaient bénéficié d’une édition – je constatai que beaucoup répétaient des lieux communs transmis de génération en génération dans les sites visités, sous la conduite des mêmes guides, qu’un grand nombre faisaient les mêmes citations empruntées à Virgile, Tite Live ou Cicéron, que très peu étaient, somme toute, originaux. Ma déception s’accrut par ailleurs lorsque je découvris que Rybisch avait recopié, entre autres, pour l’Italie, des passages entiers d’un ouvrage récemment publié par l’inquisiteur bolonais Leandro Alberti (première édition en 1550, puis 1551, 1553, 1557, etc.), mais qu’il n’était pas le seul dans ce cas11. L’ampleur des emprunts à ce livre est telle que vouloir commenter le manuscrit de Rybisch revient en réalité, en beaucoup d’endroits – en Italie évidemment –, à éclairer l’œuvre d’Alberti. J’ai malgré tout persisté dans mon projet. Si médiocre soit-il littérairement, et si banal, dans l’ensemble, sur le plan documentaire, le récit rybischien constitue, je crois, un bon exemple de ce qu’étaient les études, la culture, les croyances, la méthode de travail, les fréquentations d’un jeune homme de la seconde moitié du xvie siècle. Au risque, dans certain cas, de me livrer à des développements attendus, j’ai voulu être complet, et dresser au fond à Seyfried Rybisch le monument qu’il me semblait, malgré tout, mériter. Les notes qui accompagnent l’édition-traduction du texte suivent pas à pas l’ordre géographique des manuscrits. Il n’était pas question d’en proposer une synthèse détaillée ni exhaustive. D’autres sauront en tirer la substantifique moelle. Je voudrais seulement, dans cette introduction, insister sur la biographie du personnage, les éléments nécessaires à la compréhension du texte et les points principaux de son récit qui me semblent originaux.
L’époque
8Les faits exposés ont eu lieu entre les années 1542 (mais surtout 1548) et 1554. Le héros en est un jeune homme issu de la meilleure société de Breslau, alors ville du Saint Empire12. C’était (c’est toujours) la capitale de la Silésie (act. Śląsk), alors dépendance (Nebenland) du royaume de Bohême, lui-même partie intégrante du Saint Empire. Seyfried Rybisch a donc tout naturellement évolué dans l’espace germanique et l’Italie qui en était, en quelque sorte, le prolongement méridional13. Charles Quint, élu roi des Romains le 28 juin 1519 puis sacré empereur à Aix-la-Chapelle le 23 octobre 1520, n’abdiquera qu’en 1556. La Bohême et ses dépendances sont régies, depuis décembre 1526, par l’archiduc d’Autriche Ferdinand Ier de Habsbourg14, frère de l’empereur, qui en a hérité (ainsi que de la Hongrie) après la mort de son beau-frère Louis II, tué à la bataille de Mohács, le 29 août précédent15. Le royaume est déclaré État héréditaire des Habsbourg en 1547. Ferdinand est par ailleurs rex Romanorum depuis le 5 janvier 153116. Il a désigné dès le printemps 1549 son fils Maximilien comme futur roi de Bohême, dignité que ce dernier ne revêtira vraiment que le 20 septembre 1562.
9Le trône pontifical romain est occupé, depuis le 1er novembre 1534, par Paul III (Alexandre Farnèse), successeur de Clément VII, puis, le 22 février 1550, Jules III (Giovanni Maria Ciocchi del Monte) lui succède à son tour. Le royaume de France, où notre studiosus va effectuer une partie de son cursus, est en train de changer de souverain : François Ier étant décédé le 31 mars 1547, son deuxième fils Henri II lui succède. L’Europe est alors pénétrée par les idées nouvelles répandues, entre autres, par Martin Luther, décédé le 18 février 1546, et Jean Calvin, installé depuis septembre 1541 à Genève. L’Empire est particulièrement secoué par ces événements depuis 1517. Bien que Charles Quint ait vaincu à Mühlberg, le 25 avril 1547, les princes protestants de la Ligue de Smalkalde (Schmalkalden), la situation est loin d’être stabilisée17. La papauté a de son côté organisé la riposte par le concile de Trente, ouvert le 13 décembre 1545, suspendu le 17 septembre 1549, rouvert par Jules III le 1er mai 1551 et levé le 28 avril 1552 à cause des événements guerriers. Ses séances ne reprendront que dix ans plus tard.
10Seyfried Rybisch a participé pleinement, comme son père mais à un moindre degré, à l’établissement de la Réforme dans sa ville natale et c’est en luthérien qu’il visite l’Europe. Même si ses options religieuses ne sont pas toujours clairement affirmées dans ses écrits, nous ne devrons jamais les perdre de vue. Comme son père, c’est aussi un parfait exemple d’homme nouveau, attentif à tous les progrès, passionné d’art et fasciné par la culture antique. Mais d’où venaient donc ces Rybisch ?
Le grand-père “Siffrit” : un manuel, maître-artisan et artiste
11Seyfried (le Jeune) est né dans l’une des plus importantes familles du patriciat de Breslau, anoblie (Adelsbrief impérial de date inconnue, très probablement en faveur d’Heinrich) et bien intégrée dans le Conseil de ville. Les origines, bien qu’aisées, étaient toutefois plus modestes. En effet, le grand-père paternel, qui se nommait lui aussi Seyfried (variante de Siegfried) (Siffrit Ribsche), était architecte et tailleur de pierre à Büdingen (act. Land de Hesse), petite ville de Wettéravie (Wetterau) située à quelque 50 km au nord-est de Francfort sur le Main18, dans le petit comté d’Ysenburg-Büdingen-Birstein19. Il ne faut donc pas se fier à une affirmation de son fils qui prétendra, en 1509, “s’estimer heureux, bien que pauvre.” Il s’agit là d’une formule chrétienne de modestie bien connue20. Seyfried l’Ancien faisait partie de la bourgeoisie aisée de sa ville où il avait fondé une école d’architecture. Il décéda vers 153521. On lui connaît trois enfants, un garçon, une fille et un second fils. Seul l’aîné est sorti de l’anonymat, puisqu’il s’agit d’Heinrich Rybisch, père de notre Seyfried.
L’ascension d’Heinrich, homme d’action et de culture
12Nous connaissons mieux la vie et la carrière du père de Seyfried le Jeune que les siennes propres et il vaut la peine d’insister sur la carrière et la personnalité de cet homme qui a naturellement fortement influencé le destin de son fils. Heinrich est né le 24 mars 1485 à Büdingen22. Il a bénéficié de hautes protections et d’encouragements23 qui lui ont permis d’aller étudier à l’université de Leipzig (à quelque 300 km de sa ville natale), où il se fait immatriculer dans la nation des Bavari pour le semestre d’hiver 1501, à l’âge de 16 ans24. Il y étudie les bonoe artes, la philosophie et le droit. Pendant le semestre d’été 1503, il est baccalaureus25, le 25 janvier 1507 magister artium26. À 24 ans, durant le semestre d’été 1509, il soutient une disceptatio “quodlibétique”27 sur le thème An uxor sit ducenda sapienti (“le sage doit-il se marier ?”), imprimée à Nuremberg en octobre 1509, chez Weissenburger28. Il s’y fait appeler : Henricus Ribsch Philocalos (“ami du Beau”), bonarum artium professor balbuciens, car on lui a confié pour ce même semestre le cours de grammaire29, de même pour le semestre d’hiver30. Le 28 décembre 1509, il est exclu de la faculté propter rebellionem, dans des circonstances que nous ignorons31. Le 9 février 1510, il est rétabli dans sa charge de magister et fait appel au duc Georges le Barbu pour que l’inscription infamante au registre de l’université ne lui cause aucun préjudice32.
13En 1512, il entre comme Stadtschreiber (ou notarius)33 au service de la ville de Bautzen, une des cités majeures de l’Hexapole de Haute-Lusace (Hexapolis lusatica – Oberlausitzer Sechsstadtebund)34. En 1514, son nom apparaît pour la première fois comme Stadtschreiber (ou syndicus) de Breslau, aux côtés de Gregorius Morenberg (1494-1518) et de Laurentius Corvinus (1465-1527). Il est chargé des “affaires étrangères” des relations avec les autres villes, les princes et le roi de Bohême35. À ce titre, il est présent le 31 mai 1518 à Cracovie pour le mariage de Sigismond l’Ancien, roi de Pologne, et de Bona Sforza, où il représente la noblesse. Mais il a aussi à défendre les intérêts de Breslau dans les affaires monétaires et les questions touchant au ban militaire.
14Depuis le 31 juillet 1516 il est chanoine prébendé de la cathédrale de Breslau36. Il ne siège jamais et résigne cette dignité le 2 juin 1518 pour se marier. Le mariage a lieu en juillet ou août 1518, puisque, le 19 août 1518, il offre 1000 Cuiden hongrois comme Morgengabe37 à son épouse Anna von Rindfleisch (née vers 1485), fille de Christoph von Rindfleisch38 et d’Hedwig Scholtz von Rosenthal († 1541). Il achète alors une maison sur le Ring (Ring, 14), puis, en 1519, une deuxième maison appartenant à Konrad Sauermann, située dans la Junkernstraβe (no 2), qu’il inscrit en 1525 sous le nom de sa femme39.
15En 1522 s’ouvre à Breslau une période troublée qui voit l’expulsion des bernardins par le Conseil de Breslau (20 juin) et l’introduction de la Réforme. Ces derniers ayant fait appel auprès de Louis II Jagellon, roi de Bohême et de Hongrie, Heinrich Rybisch est allé défendre (début juillet-début août 1522) au Hradcany de Prague les intérêts du patriciat protestant de Breslau. Le Conseil royal de Bohême, composé en majorité de catholiques, ayant voulu faire enlever Rybisch, ce dernier, prévenu du complot de façon rocambolesque par un des courtisans protestants de Prague40 s’enfuit immédiatement à Breslau, travesti en femme.
16Il démissionne, après le 18 octobre 1525, du service de la ville de Breslau pour des raisons qui nous échappent41. Il devient conseiller de l’archiduc Ferdinand, roi de Bohême et de Hongrie en 152642, et va le rester jusqu’à sa mort en 1544. Il reçoit alors un nouveau grade universitaire : le 14 octobre 1527 il signe pour la première fois comme doctor [utriusque]juris. A-t-il repris des études à l’âge de 42 ans ? C’est peu probable : il a dû être bullatus, c’est à dire nommé doctor par “bulle” impériale. Il s’occupe alors des affaires financières et, à ce titre, se rend souvent à Vienne pour livrer le produit de l’impôt à l’Hofzahlamt (trésor aulique) et déposer ses comptes à la Hofkammer (chambre aulique) et à la Hofbuchhalterei (comptabilité aulique). Le 1er août 1529, il est placé à la tête du service royal des finances nouvellement créé pour la Silésie avec le titre de Rentmeister (receveur ou questeur) fur Schlesien, et peu après il l’est également pour la Lusace43. Il se trouve à Vienne lors du siège de la ville par les Turcs (22 septembre-16 octobre 1529) et en publie le récit (en latin) à Leipzig dès 153044. La menace turque a été ressentie jusqu’en Silésie, puisque, en octobre 1529, le cloître Saint-Vincent de Breslau a été démoli, en prévision de la défense de la ville.
17Heinrich Rybisch possède de nombreux domaines en Bohême. C’est ainsi qu’en 1536, il reçoit en gage des ducs de Münsterberg45 le domaine de Striese, près de Trebnitz46. Dans l’église du lieu, un tableau armorié le représentait avec une inscription datée de 1537, où il était qualifié de dieses guts Strisse freyer Pfandsherr (libre propriétaire du bien gagé de Striese), ce qui pourrait être à l’origine de son anoblissement47.
18De 1526 à 1531, après avoir fait démolir la maison de la Junkernstraβe, il y bâtit un “palais” à l’italienne, à toit plat, comprenant un corps de logis sur rue, un édifice médian, un arrière-bâtiment d’été et deux cours, ainsi qu’un jardin situé de l’autre côté de l’Ohle (Olawa) et relié au “palais” par un pont48. Par ailleurs, il fait élever, de 1534 à 1539, un magnifique monument funéraire à baldaquin dans l’église Sainte-Élisabeth-de-Hongrie49. On dit qu’il s’est servi des matériaux du cloître Saint-Vincent détruit en 1529. Il s’y fait représenter en haut relief de taille réelle, allongé et vêtu en bourgeois, un coude posé sur une sphère armillaire et l’autre maintenant un écritoire, posture jusqu’ici réservée aux rois, aux princes et aux évêques50. Devenu veuf en 1540, il se remarie, avant le 8 avril 1542, avec Catharina von Gelhorn (née vers 1495)51. En 1542-1543, il s’exile à Görlitz avec sa famille à cause de la peste52. Revenu à Breslau, il meurt le 10 novembre 154453.
19L’origine de sa descendance est discutée, la distinction entre les enfants du premier lit et ceux du second mariage n’étant pas facile à faire. De sa première union avec Anna von Rindfleisch (1518) sont nés, selon Foerster54, sept enfants, selon Pusch cinq enfants, les deux autres étant attribués par ce dernier à la seconde union55. Si nous suivons l’ordre proposé par Kundmann en 1738 (mais il ne connaît que cinq enfants et ignore le second mariage)56, nous obtenons la liste suivante :
- Anna, qui épousera Niklas Uthmann von Schmolz [Smolec, voïv. de Basse-Silésie] († 14 avril 1581), fils d’un conseiller de Breslau57 ; décédée le 24 avril 1547 ;
- Hedwige (Hedwig), qui épousera, après la mort de son père, Peter Nunhart, bourgeois de Breslau († 16 juillet 1557)58 ; décédée le 5 janvier 155359 ;
- Maria, qui épousera le marchand Hans von Monau († 9 mars 1563), seigneur de Grunau [Żerzuszyce, voïv. de Basse-Silésie] ; décédée le 6 juin 1551 ;
- Heinrich, époux de Martha Steyer (ou Steuer) en 1548 ; décédé à Breslau en 1574 ;
- Seyfried (1530-1584) (voir plus loin).
20Il convient d’y ajouter Gottfried et Catharina. S’il est probable que cette dernière portait le prénom de sa mère Catharina von Gelhorn, on est partagé quant à l’identité de la mère de Gottfried60. Compte tenu de l’âge de la seconde épouse au mariage (plus de 45 ans), il est toutefois douteux qu’elle ait pu enfanter plus d’une fois61. Catharina la Jeune épousera, le 3 octobre 1559, Lukas Uthmann von Schmolz (1523-1573) et décèdera le 7 novembre 1571. Gottfried épousera Martha von Hörnig dont il aura six enfants, et décèdera à Breslau en 1580.
21Il est impossible de retracer ici le rôle exact tenu par Heinrich Rybisch dans l’essor d’une ville dont les élites accueillirent avec enthousiasme en ces années la Réforme luthérienne et les idéaux humanistes62. On n’aura aucune peine à imaginer que, lui qui était l’un des artisans de cet élan, possédait une vaste culture classique : nous savons qu’il avait constitué dans son “palais” de Breslau une riche bibliothèque63 et des collections de monnaies et de tableaux, dont au moins un Lucas Cranach l’Ancien64.
Seyfried, l’intellectuel de la famille
22Tous les auteurs se sont plu à souligner la différence de caractère et de sensibilité qui existait entre Heinrich et son fils préféré Seyfried. Le premier, malgré sa grande culture, fut avant tout un homme d’action ; le second mena de longues études et parcourut l’Europe mais, de retour à Breslau où, fonctionnaire comme son père, il devait se mettre au service de plusieurs souverains, il fut surtout un savant qui mérita la réputation de “fondateur et premier compilateur des chroniques silésiennes65” Son Itinerarium, rédigé au retour de sa peregrinatio, représente bien ses centres d’intérêt : d’abord sa passion pour la science du droit et les grands juristes passés et présents ; ses choix religieux plus discrets, mais transparents au détour de maints folios ; sa grande culture classique et l’ampleur de la bibliothèque paternelle qu’il a contribué à accroître et où il puise largement (sans citer ses sources, comme la plupart de ses contemporains) ; son intérêt tout particulier pour l’architecture, mais aussi pour l’épigraphie et les tombeaux des hommes illustres, bien des points qu’il possède en commun avec de nombreux jeunes juristes de son temps. Ce manuscrit était sans doute destiné à être publié. Les circonstances ne le voulurent pas, mais il avait commencé à être recopié, puisque nous sommes assurés de l’existence d’au moins trois exemplaires plus ou moins complets, et j’ai acquis la quasi-certitude qu’il fut diffusé (à l’état de manuscrit) – au moins parmi quelques cercles proches de la Silésie. Ce qui rend en outre ce récit digne d’intérêt est le fait qu’il s’agisse – au moins en partie – du volume de texte qui aurait pu (ou dû ?) accompagner un recueil de gravures publié en 1574 à Breslau, à partir de dessins fournis par lui au peintre Tobias Fendt. J’aborderai in fine cet ouvrage qui allait faire l’essentiel de la renommée posthume de Seyfried.
L’Itinerarium
23La principale source – en fait, la seule – qui nous renseigne sur les premières années de sa vie est son Itinerarium. Le texte commence en effet en 1540 et s’achève à la fin de 1554 ou au début de 1555. On a lu, en tête de cette introduction, quelques remarques sur les manuscrits utilisés, consultés sur microfilms. Je n’ai pu aller vérifier à Wroclaw l’identité des auteurs des deux copies ayant survécu à la guerre. L’un d’entre eux était-il Seyfried Rybisch lui-même ? Les spécialistes en ont tous douté. La chose sera sans doute facile à élucider, les textes de sa main ne manquant pas dans les archives ou bibliothèques polonaises, tchèques, slovaques et autrichiennes. Le texte latin a été découpé par mes soins en cinq parties à peu près égales.
Date de composition et méthodes
24Il est évident que le récit a été constitué à partir de notes prises dans le cours du voyage, reprises, mises en forme et complétées après le retour de l’auteur dans sa patrie. Deux détails au moins ne peuvent qu’être postérieurs à 1555, et même dater des années 1570, et prouvent que le texte a dû être retravaillé longtemps après l’événement : 1) Rybisch mentionne à Rome une porta San Giovanni dans le mur d’Aurélien, dont le nom a été substitué à celui de porta Asinaria par Grégoire XIII (1572-1585), avec rénovation et inauguration en 157466 ; 2) lors de son passage à Naples, il admire dans les jardins du vice-roi le monument funéraire en marbre de Pierre de Tolède et ajoute : “à l’époque où j’étais à Naples, il n’avait pas encore été élevé”. Or, ce monument, qui était destiné à l’église San Giacomo degli Spagnoli, a été commencé en 1539, mais n’était pas achevé en 1553, à la mort de son commanditaire et ne sera placé dans l’abside de l’église en question qu’en 1570 (date portée sur l’inscription)67.
25Le récit ne revêt guère d’originalité : il se présente comme un journal de voyage où toutes les étapes sont notées ainsi que les distances qui les séparent, mais malheureusement accompagnées de trop peu de dates à notre gré. Dans les villes et sites intéressants, l’auteur décrit les monuments civils et religieux les plus importants, et quelques autres curiosités, et rapporte quelques anecdotes, ainsi que les noms des célébrités des lieux (en général des intellectuels) évoquées le plus souvent par leurs tombeaux. Le texte est émaillé par ailleurs de relevés d’inscriptions antiques ou post-antiques, complets ou abrégés (“faute de temps”) et, surtout en Italie, de citations des classiques ou de poètes néo-latins. De temps à autre une place est consacrée à l’évocation des compagnons de route, à des allusions à des soucis de santé, ou à des phénomènes naturels extraordinaires constatés par expérience personnelle. Plusieurs fois, Rybisch a eu recours à des ouvrages imprimés disponibles (ou acquis) sur place : à Paris, le livret publié à l’occasion des fêtes du couronnement de la reine et de l’entrée d’Henri II68 ; en Italie, l’ouvrage célèbre de l’inquisiteur bolonais Leandro Alberti intitulé Descrittione di tutta Italia...69, très souvent recopié jusque dans ses citations et ses erreurs, mais dans un ordre conforme aux étapes accomplies et sans doute à l’aide d’un savant système de fiches. Bien entendu, les noms d’Alberti et des autres auteurs utilisés ne sont pratiquement jamais mentionnés. À Rome, Rybisch s’est également servi de l’œuvre de Marliani (Topographia antiquoe Romoe)70 qu’il a décortiquée et adaptée à ses trajets, tout en commettant quelques confusions en mélangeant ses fiches ; peut-être connaissait-il aussi le plan de Rome réalisé par Leonardo Bufalini71. Il s’est assurément servi de la Roma instaurata de Flavio Biondo (1444-1446)72.
26À l’intérieur du tableau des antiquités romaines ainsi brossé sont intercalées, en proportions presque équivalentes, des notices concernant les édifices de la Rome chrétienne, médiévale et moderne, et des allusions aux grandes collections et cabinets de l’époque. J’ai été un moment tenté d’imaginer notre étudiant en train de rédiger entièrement son texte à Breslau – au moins pour l’Italie – en ayant sous la main les livres en question extraits de sa bibliothèque ou rapportés de voyage, tel un touriste moderne agrémentant ses photos de voyage d’emprunts aux notices d’un Guide Bleu. J’ai cependant acquis la certitude qu’il n’en était rien en ce qui concerne la Descrittione d’Alberti : Rybisch a en effet recopié dans le même ordre que lui les noms des jurisconsultes de Bologne dont il a pu voir les tombeaux, dans les églises ou sur les places de la ville ; il va éditer plus tard, revenu dans sa patrie, un recueil de gravures des mêmes tombeaux, réalisé à partir de croquis exécutés ou commandités par lui. L’impression très forte qui prévaut est qu’il aura manifestement souhaité publier les illustrations qui manquaient au livre d’Alberti et la conséquence logique et certaine qui en découle est qu’il devait avoir ce livre en main sur place pour pouvoir réaliser (ou faire réaliser) les croquis.
Les années de formation à travers l’Itinerarium
27Seyfried est né à Breslau le 13 septembre 153073. En 1542, à l’âge de douze ans, il est confié par son père au médecin de la ville (Stadtphysicus) de Görlitz Johannes Troger74 pour qu’il lui enseigne le latin et le grec. Au décès de son père en novembre 1544 on lui donne deux tuteurs (ou curateurs) en la personne d’un oncle, Siegmund Pucher, mari d’une sœur de sa mère et bourgeois de Breslau75, et Friedrich Gutteter, un marchand de Breslau originaire de Leipzig76. Ce sont eux qui vont l’autoriser à aller étudier à Strasbourg, puis en France. Lorsqu’il rentre de France en janvier 1553, âgé de 22 ans, il règle avec eux “le compte de ses biens. ” Sans doute l’héritage paternel – qui semble ne pas avoir été simple – fut-il alors apuré et l’on voit apparaître une allusion à un frère qui avait subi certaines mesures de rétorsion du vivant même de leur père77.
28En 1545, Seyfried se rend au Gymnase de Strasbourg78 où il cite l’inévitable Jean Sturm, un des maîtres de la pédagogie nouvelle79 ; il y reste deux ans et demi et loge chez le réformateur Martin Bucer80. Le 4 janvier 1548, il écrit de Strasbourg une lettre en grec à Troger, son ancien maître81.
29De retour à Breslau au printemps de 154882, il repart aussitôt (“14 jours après”)83 pour une peregrinado academica qui durera plus de six ans (jusqu’en décembre 1554 ou janvier 1555), en deux grandes phases84. Il se rend d’abord en France, séjourne un an à Paris85, six mois environ à Orléans86, quelques jours à Angers87, plus de deux ans à Poitiers88. Il est de retour à Breslau le 15 janvier 1553. Seconde phase : le 20 avril de la même année, il repart pour l’Italie cette fois-ci. Il séjourne pour études à Padoue et Bologne, et visite l’Italie du Nord et l’Italie Centrale jusqu’à Rome et Naples. Il est de retour à Breslau à la fin de l’année 1554 (31 décembre – ou début de 1555).
30Tous ses séjours un peu longs correspondent à des périodes d’étude – même à Paris où il n’existe pas d’enseignement qui l’intéresse vraiment. Bien qu’il ne le dise pas, il est évident qu’il suit des cours de droit, probablement, comme tous ses semblables, in utroque jure (droit civil et droit canon). Il semble n’avoir passé aucun examen car, au cours de sa vie professionnelle, il n’a jamais fait état de quelque grade que ce soit. Sans doute ses périodes d’étude, dont il a évidemment dû obtenir des attestations, jointes aux relations héritées de son père, ont-elles suffi à lui assurer une bonne carrière89. Quelques traces de son passage dans diverses universités ont toutefois été repérées. En France, rien d’officiel ne nous est connu pour Paris (mais “il y étudie”)90 et Poitiers (où les registres matricules sont perdus)91. En revanche, un document privé, le Stammbuch (ou album amicorum)92 du Styrien Christoph von Teuffenbach a conservé son nom et sa signature, apposés à Poitiers en 155193. À Orléans, par ailleurs, il est immatriculé la même année (à l’âge de 21 ans donc) sur le registre du procureur de la nation germanique (entre décembre 1550 et avril 1551)94. En ce qui concerne l’Italie95, la présence de Seyfried Rybisch est confirmée par les registres matricules de Padoue, le 19 février 155396 et de Bologne en 155497 (fig. 1).
31Notre studiosus n’est guère bavard sur sa participation à la vie universitaire et les seuls noms de professeurs cités par lui sont, lors de son excursion à Bourges, ceux, illustres, d’Eguinaire Baron (d’ailleurs décédé)98 et de François Le Duaren99. Il ne mentionne pas un seul nom pour Paris, Orléans, Angers, Poitiers, Padoue ou Bologne.
32Il est en revanche un peu plus disert sur les incidents du voyage (qu’il accomplit à cheval le plus souvent), comme lors de la descente du Rhin en bateau100. Tout au long de sa peregrinado, il signale à plusieurs reprises (en invoquant toujours la divine providence) de graves ennuis de santé101 et la fréquentation à Bologne (apparemment positive) d’un célèbre médecin, Elideo Padovani102.
33Les aspects les plus personnels de notre document concernent évidemment, en premier lieu les préférences religieuses de Seyfried que nous évoquerons plus amplement plus loin. En second lieu, il cite les noms de plusieurs compagnons de voyage, commilitones ou amis, et ceux de quelques personnages rencontrés, indices précieux qui nous permettent de le situer dans la vaste nébuleuse académique et de repérer quelques chaînons de sa peregrinatio. Il est certain que la publication du plus grand nombre possible de récits semblables au sien – ainsi que l’étude des alba amicorum – permettra de reconstituer une part non négligeable de l’enchevêtrement des parcours et d’en proposer des lectures renouvelées, attentives aux réseaux de relations.
Les compagnons de route103
34Circuler sur les routes de l’Europe du xvie siècle n’était pas un exercice dépourvu de dangers104. On devait donc le faire avec des compagnons choisis. Dans l’enfance de Seyfried Rybisch, ce sont des groupes de marchands habitués à se rendre aux foires de Francfort en suivant des trajets familiers et sans doute protégés. Les distances augmentant avec l’âge, Rybisch va opter ensuite pour la compagnie de quelques parents désireux de voir du pays, ou, plus habituellement, d’autres étudiants, silésiens ou non. Il ne voyage en tout cas jamais seul, semble-t-il, à part quelques exceptions apparentes (son récit n’est pas toujours précis à ce sujet, il manie parfois le “nous” sans donner l’identité des personnes qui sont comprises dans ce mot).
35Lors des premiers déplacements qui ont amené Seyfried à Strasbourg en 1545 – il a alors 15 ans – il profite d’un convoi de marchands de Gorlitz se rendant à Francfort105, qui le confient ensuite aux Prechter, des marchands de Strasbourg rentrant dans leur patrie106. Sur la route du retour, deux ans et demi plus tard, il utilise la même filière, rejoint Francfort avec des marchands “de ses compatriotes” (de Görlitz ou de Breslau ?)107 et gagne la Silésie. On voit ici sans doute le rôle joué naguère par Rybisch père dans un réseau marchand à l’échelle de l’Empire.
36Lorsque Seyfried décide, très peu de temps après, de partir pour la France, c’est à dire de commencer une véritable peregrinatio, il le fait – et par la suite, il devait en être toujours de même – en compagnie de quelques camarades. Ici le voyage de formation prend une dimension beaucoup plus vaste et probablement angoissante – c’est une véritable aventure – mais l’intéressé a atteint sa dix-huitième année. C’est d’abord, à la faveur du “courrier de Nuremberg”108, un voyage effectué avec un ami sans doute très proche, Sébastien Willinger le jeune, fils d’un conseiller de Breslau, qui sera, de loin, le camarade le plus fréquemment cité par la suite109. Il reste avec lui trois mois à Strasbourg puis, toujours en sa compagnie, gagne Francfort en bateau. Là, ils louent des chevaux et s’adjoignent Sebald Sauermann le jeune, un autre compatriote110. On reste entre "pays.” Embarqués à Mayence sur le Rhin avec leurs chevaux, ils ont à surmonter un incident tragi-comique (le seul de ce genre à figurer dans l’Itinerarium, à part l’accident de joute ou de quintaine de Poitiers) mais qui aurait pu s’avérer très grave si Willinger ne les avait pas tirés d’affaire111. C’est donc ensemble que les trois compagnons arrivent à Saint-Denis et Paris en octobre 1548. Rybisch va visiter Saint-Denis avec Willinger et “d’autres compagnons112. Sans doute faut-il imaginer que ce pluriel comprend Sauermann et de nouveaux condisciples rencontrés à Paris, véritable creuset universitaire. Ensuite, Rybisch séjourne longuement dans la capitale du royaume et évoque les spectacles auxquels il a assisté, seul semble-t-il.
37Lorsqu’il décide, en septembre 1549, de quitter Paris pour Orléans, ville universitaire très prisée des étudiants germanophones, c’est en compagnie, toujours, de Willinger et de Sauermann, auxquels s’est joint, cette fois-ci, l’Alsacien Sébastien Schultheiβ, rejeton d’une famille d’échevins de Haguenau113. En février 1550, il retrouve à Paris Willinger, qui se prépare à rentrer à Breslau pour raisons de santé114. Revenu à Orléans, et souhaitant ardemment se rendre à Poitiers – ce qui pose la question des réseaux de relations et/ou du “bouche à oreille”, la réputation de l’université poitevine n’expliquant sans doute pas tout – il s’embarque le 8 mars sur la Loire pour gagner Angers, visiter la Bretagne avant de se rendre en Poitou, en compagnie d’un Misnien, Melchior de Salhausen, qui fait alors ses études à Orléans115. Ils sont rejoints à Angers par trois étudiants venus de Poitiers, déjà rencontrés auparavant à Paris, liés à eux par des relations d’amitié et qui se disposent à les accompagner jusqu’au Mont Saint-Michel. Il s’agit du Franconien Jean-Baptiste Daum116, de Schultheiβ de nouveau, et du Strasbourgeois Caspar Hedio, fils du célèbre réformateur (sans doute connu de Rybisch depuis 1545-1548)117. C’est donc à cinq apparemment qu’ils continuent à descendre la Loire en bateau jusqu’à Nantes, puis gagnent le Mont Saint-Michel, site qui attire beaucoup de jeunes Allemands118, et finalement reviennent à Angers. Il semble bien que les mêmes cinq jeunes gens aient ensuite rejoint de conserve Poitiers où ils sont arrivés le 10 avril.
38De là, Rybisch a fait trois “excursions” : une première le mène à La Rochelle en août 1550 (du 18 au 28), “en compagnie fort agréable” – mais il ne nous dit pas laquelle. En février 1551, nouvelle “excursion”, cette fois-ci à Orléans, parce que Willinger vient d’y revenir (il y sera, beaucoup plus tard – le 28 mars 1553 – procureur de la nation germanique). Il est, cette fois-ci, accompagné par le Strasbourgeois Ludwig Böcklin von Böcklinsau, fils d’un Stättmeister119. Le retour se fait en bateau jusqu’à Angers, toujours avec Böcklin, auquel se sont joints Ludwig von Frauenberg, un Wurtembergeois120, et un von Dienheim probable, Rhénan de Mayence121. Il semble que Rybisch soit ensuite revenu seul à Poitiers (le 25 mars), mais nous allons voir que, Böcklin étant signalé sur les bords du Clain quelques mois après122, on peut douter de la véracité de ce détail. Dernière excursion : du 18 juin au 6 juillet 1551, à la suite de l’arrivée à Poitiers, venant de Bourges, d’un Luxembourgeois, peut-être un Hœcklin123, et d’un Nordgovien, Gaspar Schenck124, qui lui vantent la qualité de l’université berrichonne. Rybisch se dirige vers l’est, en compagnie de Schultheiβ et de Böcklin125, avec lesquels il visite Bourges, puis tous trois rentrent ensemble à Poitiers.
39En août 1552, Rybisch quitte Poitiers pour rejoindre sa ville natale. Il voyage à cheval et apparemment seul, ce qui est étonnant, jusqu’à Lyon. Les routes du centre de la France étaient-elles si sûres ? De Lyon, il se dirige ensuite vers Strasbourg en compagnie de Sébastien Boschmann, originaire de Haguenau126. Le 22 septembre, il semble assuré que ce soit seul qu’il quitte Strasbourg pour Nuremberg, laissant derrière lui son compagnon de route alsacien. Pourtant, un peu plus tard, lorsqu’il arrive à Schorndorf, il déclare : “on ne nous a pas permis d’entrer [dans la ville fortifiée]127” On voit en tout cas que, dorénavant, la situation par rapport à la France s’est fortement modifiée : nous ne retrouverons plus, en Allemagne du moins, les petites compagnies d’étudiants voyageurs : Rybisch voyage avec un seul compagnon, il est vrai de qualité (et probablement accompagné de serviteurs).
40À Nuremberg il rencontre en effet un ami de son père, personnage considérable, juste arrivé de Prague, le Tyrolien Florian Griesbeck von Griesbach, conseiller du royaume de Bohême, venu régler quelque affaire d’importance à Ansbach128. Voyageant en voiture en sa compagnie, il va ensuite “faire la tournée des grands-ducs en Bohême : il y est magnifiquement reçu chez les amis de ce Griesbeck, va à la chasse avec eux et réside dans les châteaux des uns et des autres à travers le royaume129. Il est possible que son compagnon et hôte l’ait conduit jusqu’à Raudnitz (Roudnice nad Labem), car il utilise le pluriel lorsqu’il écrit : “nous sommes restés deux jours chez le capitaine de ce château130”. C’est enfin seul, et attristé par l’annonce du décès de sa sœur, qu’il arrive à Breslau en janvier 1553. Vient ensuite une nouvelle, grande (et dernière) phase de sa peregrinatio : l’Italie. Cette fois-ci, c’est en compagnie de parents qu’il quitte Breslau en avril 1553. Son frère – probablement Heinrich131 – et son beau-frère, veuf depuis peu – Peter Nunhart132, vont l’accompagner jusqu’à Venise. Le 18 mai, lui et son frère s’embarquent à Venise pour Padoue, puis le second rentre à Venise et repart pour Breslau le 30 mai133. Nous ignorons ce qu’il est advenu de leur beau-frère commun. On peut douter qu’il soit reste étudier à Padoue, car il était trop âgé pour cela.
41Depuis Padoue, où il étudie, Rybisch entreprend le 25 septembre le tour de l’Italie du Nord jusqu’à Gênes, pour le plaisir semble-t-il. Il se fait accompagner par Seyfried Pfintzing, probablement un Nurembergeois qui était conseiller de la nation germanique de Padoue134. Tous deux vont rendre visite à Gênes à Andrea Doria dans son palais135. Notre héros et son compagnon font bien partie d’une élite. Fin octobre 1553, il sont revenus à Padoue. Le 21 mars 1554, Rybisch prend la route de Bologne : ici, son récit est incomplet puisqu’après avoir déclaré : “je suis parti de Padoue”, il écrit aussitôt : “nous sommes arrivés au port vénitien de Malomocco” et il va constamment utiliser la première personne du pluriel jusqu’à son entrée dans Bologne, le 3 avril. Voyage-t-il encore avec Pfintzing, ou bien avec un autre étudiant, nous l’ignorons. Le 26 août, il quitte Bologne pour Rome avec Christophe Brandes (ou Brandis), le fils d’un Bürgermeister de Hildesheim136, Ernst von Rechenberg, un Silésio-Lusacien137, et une vieille connaissance, le Strasbourgeois Böcklin von Böcklinsau138. Tous les quatre vont visiter Rome puis la Campanie avant de revenir à Bologne, Venise et Padoue139.
42Nous trouverons encore une fois cité Rechenberg, puisqu’il va accompagner Rybisch sur la route du retour vers la mère patrie silésienne140.
Visites, hôtes, relations
43Le texte du manuscrit mentionne, en dehors des compagnons de route et d’étude de Seyfried, les noms d’un certain nombre de personnes qui l’ont accueilli en cours de route, lui ont offert l’hospitalité, ou à qui ils ont tenu à rendre visite. Dès son séjour à Strasbourg, il est recommandé par les Prechter à Martin Bucer, le célèbre réformateur, et prend pension chez lui141. Il se constitue là un réseau d’amis, avec lesquels il entrera de nouveau en contact lorsqu’en août-septembre 1552 il rentrera de France à Breslau142. Bucer ne peut faire alors partie de ceux-ci, car il a quitté Strasbourg pour l’Angleterre le 5 mars 1549. Les relations contactées n’appartenaient pas toujours aux milieux intellectuels ; il fallait renouveler ses finances et ceci est un aspect rarement évoqué dans les récits de voyage de formation. En juillet 1548, passant par Strasbourg pour se rendre en France, et y demeurant presque trois mois pour “je ne sais quelle raison” (peut-être une question d’argent), il s’était déjà résolu à aller à Francfort à l’occasion des foires d’automne, assuré qu’il était d’y rencontrer Nicolas Uthmann, un marchand drapier conseiller de Breslau143 auquel les Rybisch étaient liés, écrivait-il, “par des questions d’argent.” On voit ici par quels intermédiaires fonctionnaient les transferts de fonds entre la Silésie et la Rhénanie.
44En France, les contacts sont rares, en dehors sans doute du milieu des étudiants allemands. Aucune mention n’est faite de condisciples français, pas plus que de professeurs auxquels on aurait pu se lier d’amitié. Une exception toutefois, mais étrangère au milieu universitaire : sur la route du Mont Saint-Michel à Poitiers, un peu après Angers, Rybisch et ses camarades sont reçus, sans doute par hasard, au château de Brissac par le maître des lieux, Charles de Cossé, qui avait accompli diverses missions diplomatiques en Allemagne et devait donc comprendre leur langue144. À Poitiers, aucun contact n’est mentionné, sinon une discussion avec des “indigènes” à propos de la bataille de 732145.
45Un événement de taille, pourtant, est à souligner : sur la route entre Lyon et Strasbourg, lors de l’étape de Genève, Rybisch va écouter l’enseignement de Calvin, mais ne semble pas s’être fait connaître146.
46La rencontre de Florian Griespeck (ou Griesbeck) à Nuremberg change complètement les conditions du voyage. Il bénéficie d’un confort nouveau (peut-être en voiture, assurément après la halte à Katzerau) et est reçu et “magnifiquement traité” par les amis, parents et contacts de son nouveau compagnon de route. À Ansbach, c’est “le plus jeune fils du margrave de Brandebourg”147, avec qui Griesbeck doit régler des affaires officielles, qui les accueille ; à Reichenschwand, c’est le propriétaire, un riche Nurembergeois148 ; à Neustadt an der Waldnaab, le seigneur du lieu, peut-être Hans-Ulrich von Heideck149. Lorsqu’on est entré en Bohême, sur les terres administrées par Griesbeck donc, ce ne sont ensuite que banquets et chasses. À Gottschau, un cousin de Griesbeck les invite à la chasse150. À Plan, ils sont reçus par un comte von Schlick151, au château de Weseritz par un Elbogen152. Au château de Breitenstein, propriété de Griesbeck, on chasse de nouveau153, et l’on s’arrête six jours au château de Katzerau, un domaine appartenant au même seigneur, avec toutes les terres environnantes154. Après Prague, seul ou en compagnie de Griesbeck, Rybisch fait halte à Raudnitz où il est très bien reçu. C’est seul enfin qu’il aborde la Lusace où il souhaite rencontrer des amis ; n’oublions pas qu’il a fait dans son jeune âge des études à Görlitz. Il s’arrête à proximité. Les gens qu’il veut voir ont fui la ville où sévit de nouveau la peste et se sont réfugiés à la campagne. Il rencontre alors Franz Schnitter, membre du Conseil de la ville et beau-père de Johann Troger (décédé en 1550)155 – comme le monde est petit ! Il se rend aussi chez un Frentzel von Konigshain, possessionné dans la région156, et se prépare à participer à un mariage lorsqu’il apprend la mort de sa sœur Hedwige157.
47Le voyage en Italie n’a guère donné lieu, apparemment, à rencontres ou visites. Du moins ne nous en informe-t-il pas. Il faut toutefois rappeler à nouveau la visite rendue au vieil Andrea Doria à Gênes158, et, bien qu’il s’agisse de tout autre chose, le rendez-vous pris à Bologne en avril 1554 auprès du médecin Elideo Padovani (mais il s’agissait d’une célébrité)159. Bien entendu, Rybisch n’aura sans doute pas trouvé intéressant de transcrire les noms de tous les Welsches, importants ou pas, qu’il a eu l’occasion de croiser sur sa route. Nous ne pouvons que le déplorer.
Les événements vécus
48À plusieurs reprises, Seyfried Rybisch a croisé l’Histoire en action, ou relevé des traces, stigmates ou séquelles d’événements récents. Ils constituent la trame de son récit et permettent de le nourrir de dates précises, lui qui en est si dépourvu. Le premier événement notable qui le fait dévier de sa route lorsqu’il se rend de Breslau à Strasbourg en 1548 (au printemps) est la Diète réunie à Augsbourg par Charles Quint ; aussi reste-t-il plus de quinze jours dans la capitale de la Souabe, par pure curiosité et pour en admirer les fastes160. À Bruxelles, il croise de nouveau la route de Charles Quint, arrivé depuis le mois d’août auprès de Marie de Hongrie, gouvernante des Pays-Bas, et tramant derrière lui un illustre prisonnier, le duc de Saxe Jean Frédéric, capturé à Mühlberg161. Parmi sa suite se trouve une mystérieuse géante, comme on aimait à en exhiber à cette époque162. À Malines, il observe les traces d’une terrible catastrophe survenue en 1546, l’explosion bien connue d’une poudrière163.
49Arrivé à Paris, il a la chance d’assister à toute une série de cérémonies grandioses. C’est d’abord, le 4 décembre 1548, à Saint-Germain-en-Laye, le mariage d’Anne d’Este, fille d’Hercule II, duc de Ferrare, cousine germaine du roi Henri II, avec François, duc d’Aumale. Rybisch dit avoir été témoin de l’entrée d’Anne dans Paris164. En mai 1549, il assiste ensuite à un tournoi organisé dans les prés du château de Madrid. Cet événement, qu’il décrit par le menu, paraît inédit et était certainement destiné à fêter le baptême, le 29 mai, du deuxième fils du roi, Louis de France, duc d’Orléans165. Le g juin 1549 (en réalité le 10), il se rend à Saint-Denis, pour la cérémonie du sacre et du couronnement de la reine Catherine de Médicis. Il ne la décrit pas166. Mais le 16 juin suivant, il assiste à l’entrée d’Henri II dans Paris, et en dépeint la pompe en détail, ainsi que les monuments provisoires dressés à cette occasion. Pour ce faire, il suit servilement le célèbre livret publié avant les fêtes et accompagné de gravures : il l’adapte et le résume en latin167. Il n’y a aucune raison de penser qu’il riait pas été présent à cette cérémonie. Le 18 juin, a lieu l’entrée de la reine dans Paris. Rybisch continue d’utiliser le livret officiel qu’il s’est procuré168. Les deux récits qui précèdent n’apportent absolument rien de nouveau (malheureusement) à la connaissance que nous avons de ces mémorables fêtes. Seul le procédé employé par le Silésien et la résolution des problèmes liés à la traduction du texte français en latin sont d’un relatif intérêt.
50Rybisch décrit ensuite sommairement le cadeau offert par les Parisiens au roi, une magnifique pièce d’orfèvrerie. Là encore, le manuscrit, trop vague, n’apporte rien à ce que nous savons de cet objet aujourd’hui disparu. Notre Silésien déclare simplement qu’il a pu le voir, d’abord chez l’orfèvre, puis dans la chambre du roi169.
51Des joutes ont lieu le 23 juin rue Saint-Antoine : Rybisch ne semble pas y assister (en tout cas il ne le mentionne pas). Il se contente de décrire les lices et les arcs provisoires élevés à cet effet. Là encore, c’est le livret qui est sa source unique170.
52Le 23 juin au soir, veille de la Saint-Jean-Baptiste, un bûcher est enflammé sur la place de Grève, conformément à une très ancienne tradition. L’anecdote n’est pas à sa place dans la chronologie des festivités171. Rybisch semble bien avoir vu la bataille navale organisée le 3 juillet à l’île Louviers sur la Seine. Il donne même un détail qui semble inédit sur un épisode tragique lié à l’événement172.
53Il renonce à décrire “plusieurs autres spectacles fort plaisants.” Ce n’était certainement pas la procession du 4 juillet, à l’issue de laquelle furent brûlés vifs “plusieurs hérétiques sacramentaires...173” Il se garde bien d’en souffler mot.
54Par la suite, il ne se passe plus rien qui soit digne, apparemment, d’être noté. L’Ouest français est calme. La tempête des guerres de Religion n’est pas encore prévisible. Lorsque Rybisch décide de quitter la France, il est rattrapé par l’Histoire. Il déclare renoncer à traverser la Lorraine à cause des guerres et décide de passer par Lyon174. Charles Quint se prépare alors, en effet, à reconquérir les Trois Évêchés. Lorsque Rybisch arrive à Strasbourg à la fin du mois d’août, il y reste jusqu’à la mi-septembre pour assister au passage de l’empereur et de son armée et va même visiter ses campements175.
55Il gagne ensuite Nuremberg et tombe sur les stigmates affreux des destructions dues aux armées d’Albert Alcibiade, margrave de Brandebourg-Kulmbach. Les faits sont récents : nous sommes en septembre 1552 ; la Première guerre margraviale remonte à avril-mai176. Puis, plus rien jusqu’à Breslau, sinon – mais il s’agit d’une catastrophe accidentelle – les traces du terrible incendie qui a frappé Prague en 1541, réduisant en cendres une bonne partie du Hradcany et de Mala Strana177.
56Le voyage d’Italie va apporter son lot d’observations liées à l’histoire récente, ou à l’actualité. Laissons de côté les catastrophes naturelles de Moravie178, et gagnons avec Rybisch et ses deux parents Vienne puis Wiener Neustadt. Il y signale la présence de Marie, la fille de Charles Quint, et de Catherine, veuve de François III de Gonzague et future reine de Pologne179. À Venise, il va assister aux obsèques du doge Francesco Donà, décédé le 23 mai’180, et au couronnement de son successeur, Marcantonio Trevisan, le 4 juin 1553181.
57Lors de son voyage en Italie du Nord en compagnie de Pfintzing, il observe près de Pavie, dans le parc de Mirabello, les traces de la bataille de 1525182 et celles du sac de la ville en 1527183. À Gênes, il note qu’une puissante flotte se prépare à traverser la mer sous le commandement d’Andrea Doria pour aller déloger les Français et les Turcs de Corse où ils ont débarqué en août 1553. Les deux voyageurs ne peuvent toutefois pas la voir appareiller, ils quittent la ville bien avant (le départ de la flotte aura lieu le 14 novembre 1553) ; Rybisch et Pfintzing seront de retour à Padoue à la fin du mois d’octobre184.
58Sur la route menant à Rome, les voyageurs remarquent à Narni les traces des destructions dues aux soldats impériaux en juin 1527185. Mais les tensions guerrières sont toujours actuelles : arrivé à Naples avec ses compagnons le 20 septembre 1554, il constate que la flotte d’Andrea Doria a pris ses quartiers d’hiver dans le port, mais a ensuite appareillé pour Gênes186. Enfin, à la violence des hommes s’ajoute en Campanie celle de la nature : l’éruption du Monte Nuovo de 1538 (du 29 septembre au 6 octobre) a bouleversé la région de Pouzzoles. Rybisch ne manque pas de décrire les effets de ce “désastre de Tripergola187”.
59Le dernier événement historique dont Rybisch retrouve les traces est très récent : dans l’église Saint-Laurent de Florence, il peut contempler suspendues les enseignes récupérées par Cosme Ier sur les Français de Strozzi pendant la guerre de Sienne, lors de la bataille de Marciano188. Nos voyageurs sont présents à Florence en octobre ou novembre 1554 et la bataille en question a eu lieu le 2 août : les faits sont donc récents.
Les centres d’intérêt de Seyfried
60Nous l’avons vu : les études que poursuit notre pèlerin intellectuel – sans jamais prendre de grades – sont à l’évidence juridiques, même s’il ne le dit pas. Tout dans son manuscrit, dans sa carrière ultérieure, le laisse deviner. Il a certainement étudié les deux droits, mais c’est au droit romain (Jus civile) qu’il prête une particulière attention. C’est le droit de l’Empire, ressuscité depuis longtemps dans les écoles d’Italie et qui connaît alors, sous l’influence de l’humanisme et des philologues, un essor remarquable dans toute l’Europe, en particulier en Allemagne189. Il brosse un impressionnant tableau des juristes célèbres dans son Journal de voyage et, plus tard à Breslau, l’album de gravures dont il procurera la matière leur fera la part belle. Les étudiants allemands viennent alors se former au mos Gallicus enseigné dans beaucoup d’universités françaises (mais non à Paris), et surtout se retrouvent tous sur les bancs des écoles italiennes, à Padoue, université de la Sérénissime, ou dans la Bologne des papes, mère de toutes les Universités. Papistes ou réformés de toutes confessions et de tous pays s’y côtoient sans difficultés, à quelques pas des gardes suisses. Nul besoin apparemment de montrer patte blanche. Le retour au pays ouvre toutes grandes à ces jeunes bourgeois et aristocrates les portes des carrières ecclésiastiques, les canonicats juteux et les grands services de l’Empire et des principautés.
61En dehors de ces préoccupations, professionnelles dirions-nous, l’Itinerarium reflète la culture classique de Rybisch : innombrables sont les citations d’auteurs grecs ou romains, sans doute écrites livres en main, mais souvent aussi empruntées, surtout en Italie, aux ouvrages de Marliani ou d’Alberti.
Citations d’auteurs classiques (dans l’ordre du texte)
Lyon | |
Strabon [errore : Sénèque] : Géogr., 4.3.2 (trad. lat.) | [II, n. 7] |
Terni | |
Virgile : Aen., 7.517 | [III, n. 320] |
Narni | |
Martial : Epigr., 93.1-2 | [III, n. 324] |
Otricoli | |
Strabon : Géogr., 5.2.10 | [III, n. 328] |
Rome | |
Pline : Nat., 16.201-202 ; 36.74 | [IV, n. 7-8] |
Id. : Nat., 36.4 | [IV, n. 49] |
Procope : Goth., 1.22 | [IV, n. 63 et 67] |
Pline : Nat., 36.102 (24), version corrompue | [IV, n. 149] |
Martial : 7.34.4-5 | [IV, n. 164] |
Aulu Gelle [errore : Dion Cassius] : 13.25.1 (allusion) | [IV, n. 181] |
Ammien Marcellin : 16.10.15-16 | [IV, n. 183-184] |
Pline : Nat, 36.71 | [IV, n. 199] |
pseudo-Cicéron : Ad populum | [IV, n. 221] |
Cassiodore : Var., 7.6.1 | [IV, n. 222] |
Pline : Nat., 34.10 et 78-79 | [IV, n. 231] |
Cicéron : Div., 2.45 ; Cat, 3.19 | [IV, n. 265] |
Virgile : Aen., 8.630-634 | [IV, n. 265] |
Tite-Live : 10.23.11-12 | [IV, n. 266] |
Pline : cf. Nat., 34 et 35 | [IV, n. 274] |
Tite-Live : 1.33.8 | [IV, n. 275] |
Salluste : Cat., 55.3-4 | [IV, n. 276] |
HA (pseudo-Lampridius) : AL Sev., 6.2 | [IV, n. 289] |
Pline : Nat., 34.73,77, 80, 89-90 | [IV, n. 290] |
Pline : Nat., 3.66 | [IV, n. 293] |
Tacite : Hist, 1.27 | [IV, n. 294] |
Stace : Silv., 1.1 | [IV, n. 302 et 305] |
Pline : Nat., 36,102 | [IV, n. 308] |
Plutarque : Caes., 29.3 | [IV, n. 309] |
Hérodien : Hist. rom., 1.14.2 | [IV, n. 326] |
Suétone : Ner., 31 | [IV, n. 338] |
Ammien Marcellin [errore : Pline] : 16.10.14 | [IV, n. 341] |
Pline : Nat., 7.121 | [IV, n. 387] |
Cicéron : Dom., 139 etc. | [IV, n. 428] |
Cicéron : Tusc., 1.7.13 | [IV, n. 458] |
Frontín :Aq., 14 | [IV, n. 473] |
Pline : Nat., 36.24.122 | [IV, n. 492] |
Suétone : Caes., 11 | [IV, n. 557] |
Pline : Nat., 36.37 | [IV, n. 569] |
Ammien Marcellin : 16.10.14 | [IV, n. 592] |
Ostie | |
Suétone : Claud., 20.4-5 | [V, n. 10] |
via Tiburtina | |
Virgile : Aen., 7.82-84 | [V, n. 22] |
Tivoli | |
Virgile : Aen., 7.630 | [V, n. 24] |
Strabon : Géogr., 5.3.11 | [V n. 25] |
Stace : Silv., 1.3 | [V n. 30] |
HA (pseudo-Spartien) : Hadr., 26.5 | [V, n. 35] |
Oppidum Labicum | |
Athénée [errore : Pline] : Deipnosophistes, 1.24 | [V n. 59] |
Anagni | |
Strabon : Géogr., 5.3.10 | [V, n. 60] |
Virgile : Aen., 7.684 | [V, n. 61] |
Frosinone | |
Silius Italicus : 8.398 | [V, n. 63] |
le Liris | |
Martial : 13.83.1-2 | [V, n. 73] |
Campanie | |
Pline : Nat., 3.60 | [V, n. 78] |
Tite-Live : 26.16.7 | [V, n. 79] |
Cicéron : Leg. agr., 2.76 | [V, n. 80] |
mont Gaurus | |
Virgile : G., 2.143 | [V n. 89] |
Lago della Patria | |
Silius Italicus : 7.278 et 8.530-531 | [V n. 93] |
Tite-Live : 38.56 | [V, n. 96] |
Rome | |
Valère Maxime : 5.3.26 | [V, n. 98] |
grotta di Napoli | |
Strabon : Géogr., 5.4.5 | [V, n. 102] |
Sénèque : Ep., 57.1-2 | [V, n. 103] |
Strabon [errore : Pline] : Géogr., 5.4.7 | [V, n. 105] |
pseudo-tombe de Virgile | |
Servius : Vita Serviana, 2.42 et suiv. | [V, n. 107] |
Naples | |
Silius Italicus : 12.33.36 | [V, n. 120] |
Vésuve | |
pseudo-Bérose : Antiquitates, 5 | [V, n. 185-186] |
Suétone : Tit., 8.7 | [V, n. 187] |
Dion Cassius, d’apr. Xyphilin : 66.21-23 | [V, n. 188] |
Pline le Jeune :Ep., 16 et 20 | [V, n. 189] |
Martial : 4.44 | [V, n. 191] |
Silius Italicus : 12.152-154 | [V, n. 192] |
grotte du Chien | |
Pline : Nat., 2.95 | [V, n. 199] |
Villa de Cicéron | |
HA (pseudo-Spartien) : Hadr., 25.6-7 | [V, n. 204] |
Solfatare | |
Pline : Nat., 35.174 | [V, n. 209] |
Strabon : Géogr., 5.4.6 | [V, n. 210] |
Pline : Nat., 3.61 | [V, n. 211] |
Champs Phlégréens | |
Silius Italicus : 8.537-538 | [V, n. 212] |
Pouzzoles | |
Strabon : Géogr., 5.4.6 | [V, n. 226] |
Pline : Nat., 35.47.166 | [V, n. 227] |
Suétone : Calig., 19.1-2 | [V, n. 229] |
golfe Lucrin | |
Martial : 13.90 | [V, n. 237] |
Pline : Nat., 9.54·79 | [V, n. 236] |
Martial : 13.82 | [V, n. 238] |
Virgile : G., 2.161-164 | [V, n. 239] |
Achéron | |
Virgile : Aen., 6.106-107 | [V, n. 242] |
Silius Italicus : 12.126-127 | [V, n. 243] |
Averne | |
Nonius Marcellus : De compendiosa doctrina, I, p. 20 (éd. Lindsay) | [V, n. 245] |
Lucrèce : 6.740-741 | [V, n. 246] |
Virgile : Aen., 6.201-202 | [V, n. 247] |
Virgile : Aen., 6.239-242 | [V, n. 248] |
Baules | |
Tacite : Ann., 14.4.3-6 | [V, n. 255] |
Silius Italicus : 12.156 | [V, n. 256] |
“piscine d’Hortensius” | |
Pline : Nat., 9·55(81).172 | [V, n. 258] |
“piscine de Néron” | |
Suétone : Ner., 31.5 | [V, n. 260] |
canal Averne-Ostie (projet) | |
Suétone : Ner., 31.3 | [V, n. 261] |
“antre de la Sibylle” | |
Virgile : Aen., 6.9-11 | [V, n. 263] |
Virgile : Aen., 6.42-44 | [V, n. 264] |
Virgile : Aen., 6.98-100 | [V, n. 265] |
Agathias : Historiarum, 1.10 (trad. lat.) | [V, n. 266] |
Virgile : Aen., 6.42-44 | [V, n. 268] |
temple d’Apollon | |
Virgile : Aen., 6.9-11 | [V, n. 273] |
Baïes | |
Horace : Ars P., 1.1.83 | [V, n. 283] |
Villa de Lucullus | |
Plutarque : Luc., 39 | [V, n. 294] |
Tacite : Ann., 6.50.2 | [V, n. 295] |
flotte de Misène | |
Suétone : Aug., 49.1 | [V, n. 297] |
promontoire de Misène | |
Ptolémée : 3.1.6 | [V, n. 301] |
Virgile : Aen., 6.149 | [V, n. 304] |
Virgile : Aen., 6.161-163 | [V, n. 305] |
Virgile : Aen., 6.212 | [V, n. 306] |
Virgile : Aen., 6.232-235 | [V, n. 307] |
Trevi | |
Virgile : Aen., 7.711 | [V, n. 321] |
Assise | |
Pline : Nat., 3.113 | [V, n. 334] |
Pérouse | |
Appien : B Civ., 5.205-206 (trad. lat.) | [V, n. 346] |
Lac Trasimène | |
Polybe : 3.3.80-85 | [V, n. 377] |
Tite-Live : 22.4-7 | [V n. 378] |
Plutarque : Fab. Max., 2-3 | [V, n. 379] |
Cortone | |
Virgile : Aen., 7.209 | [V, n. 386] |
Virgile : Aen., 9.11 et 10.719 | [V, n. 387-388] |
Ponte di Sena | |
Strabon : mauv. éd. de Géogr., 5.2.9 | [V, n. 395] |
62Permanent est son souci de l’épigraphie : recopier des inscriptions constitue un véritable exercice de “travaux pratiques”, même si beaucoup de lectures sont interrompues parce trop longues, même lorsqu’on triche en les empruntant à quelque bon traité. Certaines ont vraiment été vues et lues, quelques-unes, trop rares à notre goût, étaient même inédites (comme à Poitiers). À Gênes, son témoignage permet de rendre à Pouzzoles une inscription qui y avait été transportée par Antonio Doria, cousin du Principe190.
63Contempler les ruines de l’Antiquité, particulièrement à Rome, est pour lui un plaisir toujours renouvelé, même si, là encore, le recours massif aux livres alors disponibles – et pratiquement jamais cités – est flagrant : le bref séjour à Rome a ainsi donné lieu à bien plus d’observations qu’il n’était possible d’en effectuer réellement. Nul doute toutefois qu’il a visité la ville sainte, de même que ses visites aux grands sites de Campanie et aux sempiternelles curiosités touristiques que constituent la Grotta del Cane ou les sudatoria des environs de Pouzzoles ne sauraient être suspectées. Rien là que de très banal. Plus intéressant sans doute est le fait que notre jeune homme ne se limite pas à l’Antiquité. Les inscriptions, monuments et tombeaux du Moyen Âge et des Temps modernes sont loin d’être négligés par lui et la périodisation dont nous usons avec excès ne semble pas le préoccuper. Il est même fascinant de le voir, recherchant les “grands hommes”, citer parmi ses presque contemporains des noms d’artistes qui sont demeurés célèbres. Sergiusz Michalski a bien vu que ses goûts sont orientés vers les hommes de pensée, les savants, médecins, philosophes, juristes, et qu’il évite les guerriers et les princes, laïcs ou religieux - sauf lorsqu’il se trouve devant quelque belle statue équestre, ou bien lorsqu’il assiste - car c’est un esthète - au spectacle magnifique d’une entrée royale, aux obsèques et au couronnement d’un doge, ou rend visite à un homme de la qualité d’Andrea Doria. Ce jeune patricien humaniste croit au fond en “la domination morale de la loi sur l’épée” ; ses Viri illustres personnifient “la force et l’ethos du droit” en plein essor dans les grandes villes, en Italie comme au-delà des Alpes.
64Il faudrait pouvoir évoquer aussi les innombrables mentions d’édifices, médiévaux ou plus récents, religieux ou laïcs, les sculptures et les tableaux, les collections, cabinets de curiosités avant la lettre, jardins, volières, qui témoignent de la passion de Seyfried pour l’art, en particulier sous ses formes les plus contemporaines qui renouent si souvent avec les modèles de l’Antiquité191. Les nouveautés ne sont pas légion, c’est la masse qui fait sens, mais il faut tout de même mentionner une belle description des jardins du Principe Doria à Gênes, qui me semble surpasser en longueur et en précision toutes celles actuellement connues192.
65Last but not least, ses préférences religieuses, qui transparaissent rarement sous sa plume, ne sauraient être passées sous silence. La prudence était au silence, mais elles ne peuvent pas toujours être réprimées, comme dans les grands centres de pèlerinage où il abuse du mot “superstition” – à Notre-Dame de Cléry (“culte superstitieux à la Vierge Marie”)193, devant les ex-voto de Lorette194, les “reliques” du Latran, qualifiées d’enfantillages195 ou les “fétiches” de l’Annunziata de Florence, “série ridicule196” Pour le reste, il va écouter Calvin à Genève197, et cette mention, malgré son laconisme, est particulièrement éloquente, quand on sait qu’il ne cite jamais par ailleurs le nom du moindre prédicateur ou professeur dont il a pourtant suivi l’enseignement. On pourrait s’étonner qu’il semble finalement si fasciné par les images et les usages papistes : mais il n’est pas le seul dans ce cas parmi ses coreligionnaires198, et procède presque en ethnologue, en tout cas en curieux, comme il est curieux des merveilles ou des monstres de la nature, ou des naissances difformes199.
Reliques et ex-voto
1. Nuremberg : tombeau de saint Sebald | I, n. 25 |
2. Cologne : rois Mages | I, n. 46 |
3. ibid. : vase d’onyx | I, n. 47 |
4. ibid. : trois coupes d’or | I, n. 48 |
5. ibid. : le reste du trésor | I, n. 4g |
6. ibid : corps de sainte Ursule | I, n. 50 |
7. ibid. : ossements des onze mille Vierges | I, n. 50 |
8. Saint-Denis : Denis l’Aréopagite | I, n. 91 |
9. ibid. : coupe de Salomon | I, n. 100 |
10. ibid., trésor du monastère : reliques de saints | I, n. 107 |
11. ibid. : clou du Christ | I, n. 108 |
12. ibid. : couronne d’épines | I, n. 109 |
13. Paris, Sainte-Chapelle : reliques | après I, n. 116 |
14. ibid. : griffe de griffon | I, n. 117 |
15. Tours : corps de saint Martin | I, n. 215 |
16. Mont-Saint-Michel : bouclier et scutio de saint Michel | I, n. 282 |
17. ibid. : nombreuses reliques | I, n. 282 |
18. Notre-Dame-de-Cléry : pèlerinage à la Vierge Marie | I, n. 305 |
19. Soleure : saint Ursus | II, n. 25 |
20. Venise, San Marco : colonnes du temple de Salomon | II, n. 105 |
21. ibid. : colonnes du temple de Salomon ou du palais de Pilate | II, n. 109 |
22. Milan : clou du Christ | III, n. 39 |
23. ibid. : colonne au serpent de Moïse | III, n. 46 |
24. ibid. : patère de bois de saint Ambroise | III, n. 51 |
25. Pavie : ossements de saint Augustin | III, n. 80 |
26. Gênes, cathédrale : cendres de saint Jean Baptiste | III, n. 104 |
27. ibid. : sacro catino | III, n. 105 |
28. Bologne : tombeau de saint Dominique | III, n. 182 |
29. ibid. : bible de la main du prophète Esdras | III, n. 185 |
30. Lorette : chambre (maison) de la Vierge (Santa Casa) | III, n. 304 |
31. ibid. : ex-voto | III, n. 306-308 |
32. Rome, San Pietro in Vaticano : reliques | avant IV, n. 26 |
33. ibid. : saint Suaire | IV, n. 26 et 70 |
34. ibid. : fer de la lance de Longin | IV, n. 27 |
35. ibid., templum Pacis : vases et ornements du Temple de Jérusalem | IV, n. 322, 324 – voir η. 502 |
36. ibid., Forum Boarium : maison de Pilate | IV, n. 378 |
37. ibid., Saint-Jean de Latran : têtes de saint Pierre et saint Paul | IV, n. 497 |
38. ibid. : colonnes du temple de Salomon | IV, n. 498 |
39. ibid. : arche d’alliance | IV, n. 499 |
40. ibid. : verge d’Aaron | IV, n. 504 |
41. ibid. : table de la Cène | IV, n. 505 |
42. ibid. : chambre de Constantin | IV, n. 508 |
43. ibid. : marches du palais de Pilate | IV, n. 510 |
44. ibid., Sancta Sanctorum : sièges de porphyre | IV, n. 513 |
45. ibid. : colonne de la taille du Christ | IV, n. 514 |
46. ibid. : pierre aux trente deniers | IV, n. 515 |
47. ibid. : “enfantillages” | IV, n. 516 |
48. ibid., Santa Croce in Gerusalemme : vasque de pierre de Lydie contenant des reliques | IV, n. 523 |
49. ibid. : morceau de la croix | IV, n. 524 |
50. ibid. : titulus | IV, n. 525 |
51. ibid. : denier de Judas | IV, n. 526 |
52. ibid., San Lorenzo fuori Le mura : cendres d’Étienne et de Laurent | IV, n. 546 |
53. ibid, Santa Prassede : colonne de la flagellation | IV, n. 575 |
54. ibid., San Vito : pierre des martyrs | IV, n. 578 |
55. ibid., Santa Maria Maggiore : tombe du patrice Jean | IV, n. 581 |
56. ibid. : corps de saint Matthieu | IV, n. 582 |
57. ibid. : ossements de saint Jérôme | IV, n. 583 |
58. ibid. : crèche | IV, n. 584 |
59. ibid, Santa Costanza : tombeau de sainte Constance | IV, n. 610 |
60. Santa Maria degli Angelí : pèlerinage | V, n. 331-332 |
61. Florence, Santissima Annunziata : ex-voto | V, n. 437 |
62. Pise, cathédrale : cendres de Gamaliel et Nicomède | V, n. 479 |
63. ibid., Camp Santo : terre de la Terre Sainte | V, n. 491-492 |
66Un esprit averti sait cependant que sa très longue station devant le tombeau de l’évêque Jean Olivier dans la cathédrale d’Angers200 n’est pas due au hasard, ni à la seule passion de l’épigraphie : le monument a fasciné les évangéliques ; Nathan Chytraeus, qui ne l’a jamais vu, en a probablement emprunté les textes à une copie de l’Itinerarium rybischien ; Gôlnitz jouera plus tard des italiques pour souligner discrètement les passages de sensibilité réformée201.
Après 1554 : vie personnelle et carrière
67Après son retour en Silésie, nous ne disposons plus d’une source comparable à l’Itinerarium et nous en savons nettement moins sur la vie et la carrière de Seyfried Rybisch que sur celles de son père. Comme ce dernier, il obtient à une date inconnue – mais sûrement après son retour – sur présentation de l’empereur (bien que luthérien) un canonicat prébendé à l’église Sainte-Croix de Breslau. Le 5 juin 1560, l’évêque Balthasar von Promnitz prie le chapitre de le remplacer par Vincentius Salinus parce qu’il va se marier. Il est attaché à la Chambre aulique (Hofkammer) de Silésie de 1559 à 1568 comme conseiller au service du roi Ferdinand, empereur depuis 1556, puis négocie son transfert à la Chambre de Hongrie202. Il s’installe à Presbourg (Preβburg, act. Bratislava) avec sa famille en septembre 1568203. La préface des Gentis Silesioe Annales de Joachim Cureus (Scheer) publiées en 1571 à Wittenberg l’appelle per Pannoniam [Hongrie] consiliarius. Lui-même écrit de Presbourg au médecin Crato von Kraftheim204 le 14 octobre 1570 : “La tâche consistant à débrouiller les comptes de Pest que m’a confiée l’empereur m’a épuisé ; ce que d’autres ont mélangé et mis en pièces, je dois y remettre de l’ordre et le réparer205 ” Enfin, le peintre et graveur Tobias Fendt, dans la préface des Monumenta sepulcrorum cum epigraphis (1574) publiés à partir des dessins que lui a procurés Rybisch, écrit, s’adressant à Rodolphe de Habsbourg, roi de Hongrie depuis 1572 : “Comme il [Rybisch] m’avait, par son extrême bienveillance, permis de les voir [les modèles] depuis longtemps, au retour de ton auguste royaume de Hongrie, où il avait exercé pendant quelques années la fonction de conseiller du fisc du très sacré prince, le divin Maximilien II [roi de 1564 à 1572], père de ton illustre Majesté...206” Il rentre à Breslau à la fin de l’année 1571207, âgé de 42 ans, à la suite d’un drame familial et il semble qu’il soit alors nommé, à sa demande, de nouveau conseiller impérial à la Chambre de Haute et Basse-Silésie208. Maximilien II le récompense de ses loyaux services en 1573 en lui offrant une maison à Breslau – une seconde – dans la Junkernstraβe, complétée par l’octroi par le Conseil de la ville, contre un loyer modique, d’un terrain situé à l’arrière. Ces dons bénéficient également à ses deux fils Seyfried et Gottfried. Son frère aîné Heinrich lui ayant cédé en août 1573 la maison paternelle, il se trouve donc posséder deux demeures dans la même rue209.
68Manifestement, Seyfried Rybisch ne s’est guère accompli dans sa profession. Foerster a mis l’accent, avec l’aide de divers archivistes, sur plusieurs lettres où il se plaint vivement de ses difficultés et des calomnies répandues sur lui :
“On m’accuse de ne pas avoir mené assez sagement dans ma patrie les affaires de l’empereur ? Rien de nouveau à ce que la foule ait ce jugement vicieux. Peut-être ceux qui diront cela sont-ils ceux qui n’ont pas une claire notion de l’affaire. Quant à moi, fort de ma conscience et de ma bonne volonté, dans des affaires aussi sacrées et utiles à la patrie, j’affirme avoir avancé, mais n’avoir pu franchir les limites du pouvoir qui m’était confié : que tous ces braves gens qui jugent ainsi le sachent” (7 nov. 1571, lettre à Crato, de Presbourg)210. “Lui [un certain Hoffmann] ne cesse de me harceler de ses calomnies perfides, et s’apprête à me rendre suspect et odieux à l’extrême auprès des conseillers. Il ne s’abstient pas non plus de porter sur moi les plus grossières et honteuses calomnies ; Dieu sera juge et de mon innocence et de sa malhonnêteté : c’est à Lui que j’ai confié ma cause” (Noël 1580)211.
69Mais il faudrait enquêter davantage pour se faire une idée des raisons exactes de cette amertume, semble-t-il persistante. Peut-être ne se sentait-il pas à sa place dans ces tâches obscures et ingrates, lui qui avait côtoyé les grands hommes du passé et Andrea Doria lui-même.
La famille
70Il serait bien nécessaire et urgent aussi que des recherches soient menées sur sa vie privée, car elle est encore embrouillée, tant en ce qui concerne ses mariages successifs que pour ce qui touche à sa descendance. En août 1560, il a épousé Katharina, fille de Kaspar von Czeschau (ou Zeschau) [famille du pays de Glatz, Klodzko, voïv. de Basse-Silésie]212, qui est décédée le 15 septembre 1572 et a été inhumée à Sainte-Élisabeth213. À une date inconnue mais postérieure à octobre 1575, il s’est remarié avec Maria von Redern, issue d’une famille noble originaire de l’Altmark214. Le 6 octobre 1575 en effet, il est toujours veuf, car il commande ce jour-là au Conseil de Breslau une place à Sainte-Élisabeth où il désire construire un “banc pour les femmes destiné à ses filles, pour qu’elles puissent y écouter et honorer la Parole de Dieu215. ” Son second mariage est l’occasion pour Georges Tilenus216 de composer un épithalame latin où l’on peut voir que les voyages de Seyfried étaient connus (et, donc, son Itinerarium consulté), au moins dans le cercle de ses relations217. Maria est décédée en 1597. Kundmann lui attribue six enfants, du premier mariage, Seyfried, Gottfried, Katharina et Maria, du second, Liebfried et Ehrenfried218, ce que reprend Blazek, sans préciser de quelle union ils sont issus : deux filles et quatre fils (Seyfried, Gottfried, Liebfried et Ehrenfried)219, tandis que Foerster et Pusch ne comptent que quatre enfants, tous nés du premier lit220. Seule la première union aurait été, selon eux, féconde (tandis que Kundmann faisait toutefois naître deux fils supplémentaires du second mariage). Du premier lit seraient donc nés, selon Kundmann et Foerster, deux fils et deux filles221 :1) Siegfried (ou Seyfried), qui semble être mort jeune ; 2) Maria (ignorée de Pusch), qui épousera (1576) Ludwig Pfinzing auf Höfchen und Benckwitz [Bieńkowice, voïv. de Silésie]222 ; 3) Katharina, décédée le 7 novembre 1571223 ; 4) Gottfried (né en 1572 - † 11 novembre 1621), seigneur de Dobraslawitz [Dobrostawice, voïv. d’Opole], Koritau [Korytów, voïv. de Basse-Silésie], (Nieder-) Schwedelsdorf [Szalejów Dolny, voïv. de Basse-Silésie], Zauditz [Sudice, distr. tchèque d’Opava], près de Glatz [Klodzko, voïv. de Basse-Silésie] ; il épousera en 1588 Martha Uthmann von Schmolz († 1589), puis en 1616 Anna Margarethe von Falkenhayn († 1632).
71Mais les choses ne sont peut-être pas aussi claires : en 1575, Seyfried ne parle-t-il pas de “ses filles” à propos de la Frauenbank, alors que Katharina est décédée quatre ans plus tôt ? Il faut croire qu’il avait alors une fille vivante dont nous ignorons l’existence. D’autre part, une chercheuse slovaque, Zuzana Ludiková, vient de découvrir qu’il avait perdu deux très jeunes enfants, Ernfried (ou Ehrenfried) et Mariana, morts de la peste à Presbourg vers 1570, lorsqu’il était en fonction dans la capitale de la Hongrie. Ils ont été inhumés dans la cathédrale Saint-Martin et nous étaient jusqu’à présent totalement inconnus224.
72Selon Kundmann, Liebfried et Ehrenfried seraient nés de Maria von Redern. Pusch, quant à lui, mentionne un Seifried né en 1578 et décédé en 1613 (études à l’Université de Marbourg)225 : ce doit être l’un de ces deux garçons et l’auteur a pu (ou dû) se tromper de prénom - ce que l’on peut comprendre.
L’homme de cabinet
73Seyfried, à l’inverse de son père, est un véritable intellectuel. Écoutons Salomon Frenzel von Friedenthal lui dédier en 1593, dans ses Tumuli, les vers suivants : “Il se consacra totalement aux Muses ; il en tira les plus hautes voluptés : sa bibliothèque fit ses délices. Il aimait débattre avec les savants, et donc, sa demeure ne fut rien d’autre qu’une école de Sagesse226” Formé par dix années de voyages, comme jamais aucun Silésien avant lui (Foerster)227, il allait s’efforcer de rassembler tous les documents concernant l’histoire de la Silésie. Mais sans doute préféra-t-il la recherche à la rédaction. Il ne put élaborer les matériaux dont il disposait et les confia à Joachim Cureus [Scheer] (1532-1573) qui les intégra dans ses Gentis Silesiœ Annales et lui rendit hommage dans sa préface :
“Nous devons beaucoup à Franciscus Faber [Franz Köckritz, 1497-1565, auteur d’Origines Wratislavienses inédites], homme zélé et érudit qui a scrupuleusement recherché les textes anciens, mais si cette lecture aura plu à certains, qu’ils sachent qu’ils doivent en être surtout reconnaissants à un homme remarquable par sa sagesse, sa science et sa grande dignité, Seyfried Rybisch de Breslau... C’est lui qui, après avoir consacré de nombreuses années à ces études, et élaboré avec clairvoyance l’esquisse de cette histoire depuis les origines, a recherché par la suite avec une admirable sagacité et application tous les anciens monuments qui existent dans la province chez les princes, dans les villes, les monastères et les collèges, m’a communiqué libéralement le tout, et m’a éclairé, avec sagesse et amour, sur tout ce qui était nécessaire. C’est donc sa mémoire que la postérité reconnaissante retiendra, s’il y a quelque chose à tirer de ce travail qui est nôtre228”
74Mais Rybisch ne s’estima guère satisfait du résultat229. Ses efforts érudits ne semblent pas l’avoir plus comblé que sa vie professionnelle. Il est pourtant une œuvre qui lui valut indirectement la célébrité et retient de nouveau aujourd’hui toute l’attention des chercheurs. En 1574 paraissait à Breslau, sorti de l’officine de Krispin Scharffenberg, un luxueux album de 129 gravures sur cuivre réalisées par un artiste de la ville, Tobias Fendt (1520/30-1576), un peintre formé en Flandre230. Le thème en était : les tombeaux des grands hommes de tous les temps dotés d’une inscription. Rybisch avait fourni à l’artiste des dessins en partie rapportés de sa peregrinado et semble par ailleurs avoir financé l’édition de ses deniers (cf. le titre de la3e édition ci-dessous). Le titre-fleuve de la première édition ne dissimulait nullement la dette de l’auteur envers le Conseiller Rybisch :
Monumenta | sepulcrorum cum epigra-|phis ingenio et doctrina | excellentium virorum : | aliorumq(ue) tam prisci | quant nostri seculi me-|morabilium hominum : | de arcketypis|expressa. |Ex liberalitate| Nob(ilis) et Clariss(imi) Viri D(omini) | Sigefridi Rybisch &c. Coe-|sarei Consiliarii. |Per Tobiam Fendt, Pictorem & | Civem Vratislaviensem, in œs | incisa et œdita. || Anno Chr(isti) : M.D.LXXIIII. (“Monuments funéraires inscrits des hommes éminents par le génie et la science et autres personnages dignes de mémoire, tant des temps anciens que de notre époque, inspirés de modèles. Par la libéralité de Noble et Illustre Seigneur Seyfried Rybisch, conseiller impérial. Gravés dans le cuivre et édités par Tobias Fendt, peintre et citoyen de Breslau. L’an du Christ 1574”). (fig. 2)
75Cet album a connu un grand succès puisqu’il a été réédité plusieurs fois et même plagié de 1584 à 1671. Une deuxième édition est sortie, sans modification, à Breslau en 1584, de l’officine de Krispin Scharffenberg (?) ; une troisième, sous un titre nouveau (page gravée par Jost Ammann), à Francfort-sur-le-Main en 1585, des presses de Sigismund Feyerabend231 ; une quatrième édition, sans modification, chez le même imprimeur en 1589 ; une cinquième édition, intitulée Monumenta illustrium virorum et elogia [...], signée Marcus Zuerius Boxhornius232 à Amsterdam (officine de Johann Jansen), en 1638233 ; une sixième édition, enfin, à Utrecht en 1671, sortie de l’officine de Gijsbert van Zijll, reproduction de l’édition précédente avec deux gravures supplémentaires représentant des inscriptions romaines trouvées dans la région d’Utrecht.
76L’ouvrage a été remarqué et loué depuis longtemps234, mais il a fallu attendre 1977 pour que paraisse une analyse scientifique de l’édition princeps, publiée en polonais par Sergiusz Michalski235, peu après que John Sparrow lui eût accordé une belle place dans son ouvrage consacré à l’histoire des livres d’épigraphie236. Tout récemment encore, il figure au chapitre consacré à “La naissance de l’épigraphie moderne” par Florence Vuilleumier-Laurens et Pierre Laurens dans leur ouvrage intitulé L’âge de l’inscription où ils le qualifient “d’intéressant essai de tourisme littéraire autour des monuments les plus fameux d’Europe237” Une historienne de l’art tchèque, Blanka Kubíková, vient enfin de lui rendre un hommage mérité en lui consacrant une exposition à la Galerie nationale de Prague238.
77Le recueil de Fendt/Rybisch est à placer dans la lignée des ouvrages traitant des hommes illustres, comme ceux de Paolo Giovio et de Fulvio Orsini239, mais, à la différence de ceux-ci, il n’en propose pas des portraits, mais la représentation de leurs tombeaux dotés d’épitaphes. Il s’agit en effet de l’un des plus anciens et des plus beaux recueils d’inscriptions du xvie siècle, succédant plus précisément aux Epigrammata de Jacopo Mazzochi240, aux Inscriptiones Sacrosanctoe Vetustatis d’Apianus et Amantius241, aux récoltes de Lorenz Schrader (effectuées au milieu du siècle, publiées en 1592)242, et précédant les Delicioe de Nathan Chytraeus243. Mais sa double originalité tient surtout au fait qu’il associe en un même corpus inscriptions antiques et épigraphes médiévales et modernes, d’Italie et du Nord des Alpes, et qu’il fait représenter les monuments qui portent les textes gravés, souvent superbes, faisant ainsi œuvre d’archéologue ou d’historien d’art autant que d’épigraphiste. Il ne saurait être question de l’étudier ici dans le détail. Je voudrais seulement évoquer ses points de contact avec l’Itinerarium de Rybisch, qui ne concernent d’ailleurs qu’une partie du recueil.
78L’ensemble comprend 129 planches (125 numéros et quatre bis) reproduisant 187 objets. On peut les répartir en trois groupes. Un premier groupe est composé de 59 gravures représentant les monuments funéraires de grands écrivains de l’Antiquité, de héros mythiques, de poètes et humanistes du Moyen Âge italien et de la Renaissance, neuf inscriptions du Tempietto Pontaniano de Naples, enfin de plusieurs humanistes et réformateurs d’Europe du Nord. Le deuxième groupe, très homogène, rassemble 32 monuments funéraires de Bologne : tous concernent de célèbres juristes, du xiie au xvie siècle. Le troisième groupe est composé de 38 gravures concernant des épitaphes antiques, surtout de la ville de Rome, caractérisées par les rapports d’affection entre membres d’une même famille qu’elles expriment, et la qualité de leur rédaction ; mais il est plus que douteux que la plupart d’entre elles aient pu être vues par Rybisch ou Fendt ; beaucoup sont soit fausses, soit d’attribution erronée244 : la plupart se rencontrent dans bien d’autres manuscrits de l’époque, qui se sont recopiés les uns les autres. Presque tous ont été pris en compte par les Carmina Latina Epigraphica et le Corpus Inscriptionum Latinarum, sauf l’ouvrage de Fendt/Rybisch qui a échappé à Theodor Mommsen et à ses collègues245.
79On se plaît à dire depuis longtemps que ce recueil a été composé par Fendt à partir de dessins – de croquis, de modèles – rapportés par Rybisch de ses voyages. Cette affirmation ne résout rien. Toute une partie des sujets traités ne se trouvait pas sur l’itinéraire suivi par Rybisch, et les dessins proviennent donc d’autres sources (à commencer par les textes poétiques présents dans d’innombrables recueils comme celui d’Apianus et Amantius). La composition tardive du recueil (édité vingt ans après le retour d’Italie) a donc été très hétérogène. L’hommage rendu par Fendt à Rybisch n’implique d’ailleurs pas que ce dernier ait apporté la totalité de la documentation : Fendt lui-même a pu payer de sa personne dans la recherche des modèles, et ses compliments peuvent s’adresser plus généralement au bailleur de fonds que fut le Conseiller impérial. Une thèse méconnue, soutenue en 1946 à Gratz246, a proposé de voir dans un manuscrit des Archives du Land de Styrie traditionnellement attribué à Jean-Jacques Boissard, les dessins originaux ayant servi à l’établissement du recueil de Fendt. La question mériterait d’être creusée. Il reste qu’une partie au moins des monuments gravés par le peintre silésien a sûrement été vue par Rybisch et que des croquis en auront été établis, par lui-même, par quelques compagnons de route ou quelques artistes de rencontre (mais le style de l’ensemble paraît assez homogène). Ce qui est le plus frappant se rapporte au deuxième groupe bolonais : il semblerait que Rybisch ait visité la ville puis rédigé les passages la concernant en se guidant sur l’ouvrage de l’inquisiteur Alberti. Les tombeaux des jurisconsultes l’ont particulièrement fasciné : il recopie la liste d’Alberti dans son Itinerarium et probablement a-t-il eu à cœur d’illustrer cet ouvrage dans une partie des Monumenta. Mais il est également vrai que certains monuments qu’il cite dans son manuscrit, pourtant fort intéressants, ont été négligés ou oubliés par lui dans le recueil de gravures. On en trouvera la liste détaillée en appendice247.
80Pour conclure, les Monumenta n’ont sans doute pas été conçus dans leur ensemble comme devant constituer les planches d’un Itinerarium dont l’édition aurait été prévue. Les deux entreprises ne comportent qu’en partie des points de convergence. En 1574, le temps avait passé, et le projet, s’il avait jamais existé, avait évolué. Je doute que les deuils subis par Rybisch aient été l’élément déclenchant248. Les Monumenta sont un exercice humaniste dû à la rencontre d’un passionné d’épigraphie et d’art et d’un peintre-graveur d’un certain talent. Le résultat est assez hétérogène et de valeur inégale sur le plan artistique, mais d’un grand intérêt historique.
81Il est possible, avons-nous dit, que le texte que nous publions ait été, dès l’origine, destiné à être imprimé. On aura remarqué que Rybisch avait été un velléitaire et n’avait publié aucun de ses travaux. Sans doute la personnalité de Fendt a-t-elle été décisive dans l’élaboration des Monumenta. Il n’en reste pas moins que, bien que resté à l’état de manuscrit, l’Itinerarium a circulé dans le cercle des relations de l’auteur, qu’il contribua à sa célébrité d’érudit, et bénéficia sans doute de diverses copies manuscrites qui circulèrent de main en main. Nous en trouvons suffisamment d’indices dans le poème de Tilenus ou le long passage consacré par Chytraeus à l’épitaphe de l’évêque Jean Olivier249.
82Seyfried est décédé le 17 août 1584, âgé de 53 ans. Nous ignorons où il fut inhumé, lui qui fut amateur de tombeaux tout au long de son existence : probablement dans le mausolée familial de Sainte-Élisabeth250. Ses traits nous sont aussi inconnus, alors que nous possédons bon nombre de portraits de son père251.
83Voici donc un savant, un érudit, attentif aux élans et progrès de son temps, qui n’aura passé aucun examen et publié aucun ouvrage, alors qu’il accomplissait une tâche considérable d’historien et d’amateur d’art. Il m’a semblé bon de faire renaître un peu de sa personne et avec lui ces passions qui, au fond, nous sont communes, les doutes et les joies qui forment le quotidien du métier d’historien.
Notes de bas de page
1 Nicolas Henel von Hennenfeld (1582-1656), auteur d’une Silesiographia (1613) et d’une Breslographia (1613). On lui doit aussi une Silesia Togata (manuscrite), composée de plus de 600 biographies d’humanistes et d’aristocrates silésiens. Sur ses études en Italie : Zonta 2004, 219, no 515.
2 Markgraf, éd. 1877, VII et XII. Sur ces manuscrits, se reporter à Foerster 1907,217, n. 2 ; 218, n. 1-2 ; 221, n. 1 ; 222, n. 2 ; 223, n. 2-3 ; et Foerster 1907a, 107, n. 4.
3 J’ai retenu cette orthographe, bien qu’il en existe plusieurs autres dont la forme Ribisch (que j’ai utilisée aussi dans divers articles). Autres formes attestées : Ribsch, Ribsche, Rebsch, Reybisch, Riebisch, etc.
4 Sur la place du latin à cette époque, récemment parus : Waquet 1998 ; Hoffmann 2000 ; Leonhardt 2010. Sur la littérature latine des voyages : Ludwig 2007.
5 Sur ce phénomène fondamental, entre autres : Frijhoff 2011 ; Hiernard et al., éd. 2011. La formule latine va céder la place à partir du xviie siècle au “Grand Tour”, de caractère plus aristocratique et moins universitaire : Boutier 2004.
6 Je renvoie aux notes accompagnant la partie Traduction du présent ouvrage : I, n. 329-333 ; Hiernard 1999.
7 Richard Foerster (1843-1922), spécialiste de Libanius (Libanii Opera, 12 volumes, Leipzig 1903-1927) et de Choricius de Gaza (édition, avec Eberhard Richtsteig, des Choricii Gazoei opera, à Leipzig, Teubner, 1929).
8 Supra, n. 5.
9 Foerster 1907 et 1907a. Ces deux articles vont constituer pendant longtemps notre principale source d’informations, jusqu’à ce que Rudolf Lenz (Univ. Marbourg) se consacre à la réhabilitation des sites rybischiens de Wroclaw et publie plusieurs travaux qui renouvellent notre vision de ces personnages et de leur environnement historique et culturel.
10 Une bibliographie commode des récits de voyage allemands a été compilée par Lucia Tresoldi, mais seulement pour l’Italie : Tresoldi 1975-1977. Cf. également Schudt 1959 (sur les origines du phénomène : p. 18-21).
11 Un cas tout à fait comparable au nôtre, y compris en ce qui concerne les sources d’information et le recours proche du plagiat à l’ouvrage d’Alherti, est celui de Roland von Waldenburg en Italie en 1566-1567, récemment étudié par Ulrich Seelbach dans un remarquable article (Seelbach 2003).
12 La ville était située, alors comme aujourd’hui, près d’un important carrefour de routes transeuropéennes (Dresde-Wroclaw-Katowice-Cracovie-Lvov et Gdańsk-Katowice-Žilina). Sur l’histoire de l’implantation allemande en Silésie au Moyen Âge : Higounet 1989 (à côté d’une importante bibliographie allemande et polonaise).
13 Rappelons que les empereurs, d’abord couronnés rois de Germanie, sont presque tous venus recevoir la couronne du Saint Empire (et Fonction) des mains des papes, à Rome. Mais Charles Quint fut le dernier souverain dans ce cas, et l’événement eut d’ailleurs lieu à Bologne.
14 Il est archiduc depuis mai 1521, après la renonciation de Charles Quint (= Ier d’Autriche), le 28 avril. Sur cet illustre souverain et tous les aspects de ses règnes, on consultera le magnifique catalogue de l’exposition de Vienne : Seipel, éd. 2003.
15 Louis Il avait épousé en 1522 sa sœur Marie d’Autriche (puis de Hongrie). Ferdinand a lui-même épousé Anne Jagellon, sœur de Louis II, le 25 mai 1521. Elle est décédée le 27 janvier 1547 à Prague.
16 Cette dignité est conférée par les princes électeurs de l’Empire et fait de son titulaire l’héritier présomptif de l’empereur régnant. Il sera empereur le 16 janvier 1556, après l’abdication de son frère.
17 Interim d’Augsbourg du 15 mai 1548, aboli par le traité de Passau le 15 août 1552.
18 À quelque 640 km à vol d’oiseau à l’ouest de Wroclaw.
19 Kobler 1995,284-285.
20 Lenz 2007, 99.
21 On a découvert en 1993, au cours de travaux de voirie à Büdingen l’épitaphe gravée à sa mémoire en 1536 par son fils Heinrich (elle est conservée dans l’église Saint-Rémi) : Epitaphium Henrici / ab Ribisch iurisdoc-/toris in laudem Sifri-/di Ribisch patris sui di-/l[e]cti erectum // Sifrido Ribisch Henricus / ab Ribisch iurisconsultus / Ferd[ina]ndi regis Romanor[um] / consi[liari]us, questor per S[ile]-/siam, p[er L]usaciam, genitori / suo ch[ar]issimo in memo-/riam, hunc lapidem huc vivu[s]/statuit, anno MDXXXVI. Le texte est surmonté des armoiries du père (en fait, les outils de son métier) et du fils (Lenz 1997,190-191 ; Lenz 2007,107). Sur cette épitaphe, on se reportera maintenant à Sulej 2011,102-103 (avec quelques erreurs de transcription) et fig. 69-72.
22 Se reporter à I, n. 1. La date de sa naissance a été reconstituée par Foerster à partir d’un portrait d’Heinrich Rybisch où sont indiqués la date de son décès et son âge (59 ans, 7 mois et 17 jours) : Foerster 1907, sur Heinrich Rybisch : 183-217 ; le portrait : Foerster 1907a, pl. III (après la p. 104).
23 Lenz 2007,100.
24 Erler 1895,444 : Hinricus Rippesch de Budingen.
25 Erler 1897, 394 : Henricus Ribsch de Budingen.
26 Erler 1897,427 : Henricus Ribβ de Bodingen.
27 Littéralement : “discussion à volonté”.
28 Numérisé : urn:nbn:de:bvb:12-bsb00013152-7 ; Díaz de Bustamante & Lage Cotos 1999.
29 Erler 1897,445 : Henricus Rebsch Budingensis.
30 Erler 1897,452 : magister Henricus Budingensis.
31 Erler 1897, 454.
32 Erler 1897, 467.
33 Le Stadtschreiber (greffier) avait un rôle capital dans l’administration municipale.
34 Cette ligue, créée le 21 août 1346, comprend les villes de Bautzen, Gôrlitz, Kamenz, Lauban, Lobau et Zittau.
35 Le 7 avril 1348, le roi Charles IV a incorporé les duchés composant la Silésie (sauf Schweidnitz-Jauer) aux pays de la couronne de Bohême et les a introduits ainsi au sein de l’Empire. Ce statut de Nebenland der Krone Böhmen (“dépendance de la couronne de Bohême”) ne cessera qu’en 1742.
36 Zimmermann 1938,465.
37 Littéralement : “cadeau du matin”, ou dot.
38 Pusch 1988, 389-391, suivi par Lenz 1997,181, n. 48, a corrigé Foerster 1907, 210, qui identifiait le père d’Anna à Peter Rindfleisch. Il s’agissait en réalité, comme l’indique le testament d’Heinrich, de Christoph Rindfleisch auf Raβlawitz. Les Rindfleisch constituaient une famille très aisée de Breslau, attestée depuis le xve siècle, mais ils n’eurent jamais accès, semble-t-il, au Conseil. La personnalité la plus célèbre de cette famille sera Daniel Bucretius (Rindfleisch) (1562-1621), médecin de la ville de Breslau.
39 Actuelle ulica Ofiar Oświęcimskich.
40 Ne voulant pas risquer sa vie en trahissant le secret du conseil royal, celui-ci aurait déclaré qu’il ne faisait que parler à l’une des statues de pierre du pont Charles au moment où Rybisch passait.
41 Lenz 2007, 104.
42 Dans une lettre datée du 14 février 1527, il se dit Rat und Diener de Ferdinand.
43 En 1367, le roi Charles Ier a incorporé le margraviat de Lusace à la couronne de Bohême dont il est resté Nebenland jusqu’à la paix de Prague de 1635. Pendant toute cette période, les rois de Bohême ont été margraves de Lusace.
44 De re Turcica ad Wiennam Austrioe, Lipsiae [Leipzig], excud. Nicolaus Faber, M.D.XXX.
45 Act. Ziębice.
46 Act. Strzeszów, près de Trzebnica (au nord de Wroclaw).
47 Dès 1538, le bien passera aux Liegnitz-Brieg, en 1559 aux Rehdiger, qui le conserveront jusqu’en 1945. Les Rybisch possèdent des armoiries dont trois variantes sont connues (Foerster 1907a, 103-105) ; la principale peut être blasonnée ainsi, en français, coupé, au 1 : d’or à la chape de sable chargée d’un tête de léopard tenant dans sa gueule un anneau d’or ; au 2 : d’or à deux fasces de sable ; l’écu surmonté d’un heaume taré de front, à 4 vanteaux d’or, aux lambrequins d’or et de sable ; cimier : une tête de léopard tenant dans sa gueule un anneau d’or, entre deux proboscides coupées d’or sur sable. Ces armes figurent en particulier sur la façade de la domus de la Junkernstraβe (et une version écartelée sur le monument funéraire de Sainte-Elisabeth).
48 La maison est visible sur la carte de Breslau de Barthel Weihner (1562) : détail reproduit par Jan Harasimowicz dans : Das Bild von Wroclaw/Breslau im Laufe der Geschichte (exposition de RatingenHösel, 16.05-9.11.2009) http://www.oberschlesischeslandesmuseum.de/attachments/262_vortrag_prof_drjan_harasimowicz_uni_breslau.pdf (consulté le 25 mars 2012). Elle a subi de très graves dommages au printemps de 1945, et bénéficié d’une restauration exemplaire dont l’initiative revient à la Forschungsstelle für Personalschriften de la Philipps Universität de Marbourg sous la direction du professeur Rudolf Lenz, et la réalisation aux efforts communs de la République de Pologne et de la République fédérale d’Allemagne (1997) : Lenz 1997, passim. Sur ce “palais”, consulter également Grębowiec 2014,139-145.
49 Cet étonnant monument, l’un des plus beaux tombeaux Renaissance au nord des Alpes, a failli disparaître dans les deux incendies de l’église en 1975 et 1976. Il a été restauré, comme la façade de la domus des Rybisch, en 1998, dans le cadre de la coopération germano-polonaise (cf. note précédente). On y admire, entre autres, une belle représentation sculptée dans le marbre d’Heinrich Rybisch, en vêtement civil, allongé, le coude appuyé sur une mappemonde. La tombe a également accueilli la dépouille de sa première épouse, décédée en 1540, comme le montre son blason qui fait pendant à celui des Rybisch.
50 Harasimowicz 2010, 187, fig. 35. L’auteur souligne avec raison que ce tombeau “avait plus à voir avec le culte de la gloire propre aux hommes de la Renaissance qu’avec les idées de rénovation du christianisme répandues par la Réforme.”
51 Voir I, n. 2. Les comtes de Gelhorn sont une ancienne famille noble des principautés de Schweidnitz et Brieg.
52 I, n. 5.
53 I, n. 8.
54 Foerster 1907,215 ; il considère la seconde union comme stérile (ibid., 216 et n. 1).
55 Pusch 1988,420-422 (mais avec des interpolations entre les enfants d’Heinrich et ceux de Seyfried).
56 Kundmann 1738, pl. XXVIII, entre les p. 222 et 223.
57 Stein 1963,209.
58 II, n. 82.
59 Il y a une incohérence chez Pusch 1988 (420) : décédée en 1553, elle ne peut s’être remariée après la mort de P. Nunhart. Sur son décès : II, n. 78.
60 Voir la discussion en II, n. 81.
61 Je remercie Denise Turrel d’avoir attiré mon attention sur ce détail.
62 On consultera avec profit à ce sujet Fleischer 1992. La Silésie – et Breslau en particulier – fut riche en savants et humanistes. Philippe Melanchthon la qualifiait de domicilium humanitatis dans une lettre adressée à Heinrich Rybisch le 15 mai 1538 : Bretschneider (éd.) 1836, col. 523, n. 1674 : “je félicite cette nation de posséder une telle ville [Breslau] qui l’emporte sur ses voisines en modèle de vertu et qui est une sorte de domicilium humanitatis.” Les travaux consacrés à la Silésie n’étant pas nombreux en français, signalons un tout récent et important article concernant un album amicorum de Breslau datant du début du xviie siècle, qui montre bien toute l’importance des générations précédentes : Bousquet & Bousquet-Bressolier 2011.
63 Petersen 2001.
64 Heinrich fait allusion à l’achat d’un tableau de Lucas Cranach dans une lettre du 22 novembre 1529 à Stromer. Foerster pensait qu’il s’agissait d’un des trois tableaux du maître qui se trouvaient en Silésie au xvie siècle, et penchait en faveur de la Lucretia qui figurerait plus tard dans l’Orangerie du médecin Laurentius Scholz von Rosenau, dont les collections seront dispersées en 1613 (Foerster 1907a, 103 et n. 2 ; Fleischer 1992, 61). Sur les fondations artistiques d’Heinrich Rybisch, voir maintenant Sulej 2011.
65 “Der Schlesischen Chronica Stiffter und ersten Collektor” : Schickfuβ [1625], 233 (cité par Foerster 1907, 227 et n. 2).
66 IV, η. 517.
67 V, n. 174-175. Voir aussi le monument de Bartole : V, n. 369.
68 Anon. 1549.
69 Ouvrage paru en 1550, œuvre du premier géographe important d’Italie. J’ai utilisé l’édition de 1553 (Alberti 1553). Noter que paraîtront deux traductions en latin par Kyriander Hœninger à Cologne (1566 et 1567), mais on verra plus bas que je suis pratiquement sûr qu’il a utilisé sur place une édition italienne.
70 Marliani 1534.
71 Premier dessin planimétrique exact de la ville de Rome réalisé en 1551 (gravures sur bois) ; Ehrle 1911 ; http://www3.iath.virginia.edu/waters/bufalini.html
72 1444-1446 : nous avons utilisé l’édition procurée par Anne Raffarin-Dupuis (éd. et trad.) 2005.
73 Cf. son Itinerarium et Johann-Karl Roppan, note manuscrite en marge de la copie de Fürstenstein, Fol. 8 (2.8.9055./II/XVIII/14.) au début du fol. 298 : Itinerarium Italicum Siegfried Rybisch, Kayserl. Rath und Camer. Assessor in Schlesien nat. Breslau, d. 13. september 1530, † d. 17. August. 1584.
74 I, n. 6.
75 I. n. 10.
76 Ibid.
77 Avant II, n. 80. On notera qu’en la circonstance, le “Sénat” de Breslau (c’est à dire le Conseil) fut consulté. Le frère en question était Heinrich, le fils aîné, qui avait causé des soucis à son père à cause de sa prodigalité, et qui fut réduit à la “réserve légale” dans son testament, le reste devant être confié aux curateurs “jusqu’à ce qu’il s’améliore” (Foerster 1907, 215).
78 À l’occasion des foires d’automne de Francfort ; il va rester quelques jours dans cette ville, “jusqu’à la fin des foires.” “Né en 1530, j’avais atteint ma quinzième année depuis septembre [1545], le mois même où nous étions arrivés à Francfort.” Son séjour à Strasbourg va durer deux ans et demi (de 15 ans à 17 ans et demi). Le Gymnase vivait comme une université en suivant un rythme semestriel. Deux fois par an, à Pâques et à la Saint-Michel (29 septembre), les élèves pouvaient passer d’une classe à l’autre : Schang & Livet, éd. 1988,172.
79 I, n. 12.
80 I, n. 18.
81 Reproduite par Foerster 1907, 219-220. Seyfried y évoque avec joie les progrès du mouvement évangélique en Angleterre.
82 Il est parti de Strasbourg lors des foires de Francfort de printemps, après Pâques (qui tombe le 1er avril 1548).
83 Vers mai.
84 Il a accompli au total plus de 14 000 km (en y incluant ses études en Allemagne). Voir infra l’itinéraire de Seyfried Rybisch.
85 Rybisch parle “d’études” à Paris, donc entre le 12 octobre 1548 et le 25 septembre 1549, soit presque un an. N.B. l’année académique y commence le 1er octobre.
86 Lors de son départ de Paris, il a 19 ans depuis 12 jours. Il séjourne un semestre à Orléans, mais sans immatriculation connue. N.B. : à Orléans, le semestre d’hiver courait du 1er octobre jusqu’à Pâques, le semestre d’été de Pâques jusqu’à la fin de l’année scolaire, le 13 septembre (Fournier 1890, no 26, alinéa 26). En 1550, Pâques tombait le 6 avril : Rybisch n’aura donc pas attendu la fin du semestre pour quitter Orléans le 8 mars.
87 “Environ un mois” : en réalité moins de 15 jours.
88 Arrivé à Poitiers le 10 avril 1550 (Pâques tombe le 6 avril), Rybisch va y fêter ses 20e et 21e anniversaires (13 septembre 1550 et 1551). Son séjour sera de presque deux ans et 4 mois.
89 Ulrich Seelbach a défini clairement les durées usuelles des peregrinationes. Il semble que deux années aient été exigées pour un office de conseiller ou de juge, un an seulement pour une prébende de chanoine de cathédrale ; mais, les voyages pouvaient excéder considérablement ces laps de temps, comme dans le cas de l’étudiant auquel il se consacre, qui a effectué six années de voyage : Seelbach 2003,139-140.
90 Voir après I, η. 130. L’enseignement du droit civil est interdit par la papauté à Paris depuis la décrétale Super specula d’Honorius III (16 novembre 1219). Il ne sera autorisé qu’en avril 1679 (édit de Saint-Germain-en-Laye).
91 Les registres de collation des grades de la Faculté de Droit ne sont conservés pour Poitiers qu’à partir de 1575 (Hiernard 2006, 229 et n. 4).
92 Sur les alba amicorum (ou Stammbücher), se reporter, entre autres, à Klose 1988 ; Heesakkers 2007 ; Spadafora 2009.
93 I, n. 293.
94 I, n. 306.
95 Claudia Zonta a consacré sa thèse aux étudiants silésiens en Italie (Zonta 2004).
96 II, n. 140.
97 III, n. 169 et après la n. 222. Il se fait immatriculer à Bologne en 1554 ; l’année universitaire commençant à la Saint-Luc, le 18 octobre, Rybisch y arrive donc, le 3 avril, dans le courant du second semestre, une semaine après Pâques, qui tombe le 25 mars cette année-là. Il déclare pourtant ne séjourner que pour s’y soigner. Cependant, son nom figure bien dans les Actes de la Nation germanique de 1554, à une date non précisée : Friedländer & Malagola, éd. 1887, 333, l. 22 (Nobilis dominus Seufridus Rybisch Silesius).
98 I, n. 320.
99 I, n. 321.
100 I, n. 41.
101 I, n. 325 ; Il, n. 3, 55, 139 ; III, n. 169 et après la n. 222.
102 III, n. 169.
103 J’ai déjà eu l’occasion d’étudier une partie au moins des déplacements de Seyfried Rybisch et de préciser l’identité de ses compagnons successifs : Hiernard 2003,408-411.
104 On consultera avec beaucoup de profit Mączak 2002 et Roche 2003.
105 I, n. 13 et 16.
106 I, n. 16 et 17.
107 Après I, n. 19.
108 I, n. 21.
109 I, n. 20, après 32, cf. 33, après 41, après go, 186, 197, après 303. Il n’a jamais été accompagné d’un précepteur (Hofmeister), contrairement à une pratique si répandue chez les Allemands de bonne famille.
110 I, n. 36 [et 187].
111 I, n. 41 et après 41.
112 Après I, n. 90.
113 I, n. 188, 267, 312.
114 I, n. 197.
115 I, n. 198.
116 I, n. 266.
117 I, n. 268.
118 I, n. 281.
119 I, n. 303, 309, après 312 ; III, n. 225 ; V, n. 510.
120 I, n. 307.
121 I, n. 308.
122 I, n. 312 ; Böcklin s’était fait immatriculer dans la nation germanique d’Orléans entre décembre 1548 et avril 1549.
123 I, n. 310.
124 I, n. 311.
125 I, n. 312 et après 312.
126 II, n. 10.
127 II, n. 45.
128 II, n. 57 et 58.
129 Griesbeck est cité en II, n. 56,57, après 59,66, 67, après 67,73.
130 II, n. 74.
131 II, n. 81.
132 II, n. 82.
133 Après II, n. 134.
134 III, n. 1.
135 Après III, n. 106.
136 III, n. 223.
137 III, n. 224.
138 III, n. 225 ; son nom figure sur la matricule de Bologne en 1554.
139 V, n. 510 : la formule “avec mes compagnons habituels” dissimule leurs noms.
140 V, n. 511.
141 I, n. 18.
142 Après II, n. 10.
143 I, n. 35.
144 I, n. 292.
145 I, n. 334.
146 II, n. 12.
147 II, n. 58.
148 II, n. 60.
149 II, n. 61.
150 II, n. 62.
151 II, n. 63.
152 II, n. 65.
153 Après II, n. 66.
154 II, n. 67.
155 II, n. 76.
156 II, n. 77.
157 II, n. 78.
158 Après III, n. 106.
159 III, n. 169.
160 I, n. 30,31 et après : septembre 1547 à mai-juin 1548.
161 I, n. 73-75.
162 I, n. 75.
163 I, n. 76.
164 I, n. 185. La mention n’est pas placée à sa date exacte, Rybisch ayant oublié de la faire figurer en son temps, c’est à dire avant (“quelques mois” avant) les fêtes de l’entrée d’Henri II dans sa capitale.
165 I, n. 135 et 136.
166 I, n. 137.
167 I, n. 138-163.
168 I, n. 164-177.
169 I, n. 178. Jusqu’à Henri III, on pouvait entrer dans la chambre du roi (merci à Denise Turrel pour cette précision).
170 I, n. 179-181.
171 I, n. 184.
172 I, n. 182.
173 I, n. 183.
174 II, n. 1.
175 II, n. 39.
176 II, n. 53-54.
177 II, n. 70.
178 II, n. 85 : les séquelles d’une terrible tempête que je n’ai pu dater.
179 II, n. 99-100. Elle sera couronnée le 30 juin 1553 à Cracovie.
180 II, n. 135.
181 II, n. 137.
182 III, n. 73.
183 III, n. 77.
184 III, n. 115.
185 III, n. 326. Spello a été aussi détruit en 1529 par les troupes de Philibert de Chalon : V, n. 328.
186 V, n. (121). L’événement semble inconnu.
187 V, n. 233.
188 V, n. 431-433·
189 Stein 2004.
190 III, n. 114.
191 On utilisera l’Index du texte latin (en ligne).
192 III, η. 109-110.
193 I, η. 305.
194 III, n. 306.
195 IV, n. 516
196 V, n. 437
197 II, n. 12.
198 Mączak 2002,323-347.
199 I, n. 335.
200 I, n. 226-234.
201 I, n. 227.
202 Ludiková 2008,548.
203 Prefiburg (slov. Bratislava ; hongr. Poszony) est capitale du royaume de Hongrie depuis 1536.
204 Johannes Krafft (1519-1585) était un ami de Luther et de Melanchthon, natif de Breslau, qui avait étudié à Wittenberg et en Italie (Padoue) et était revenu exercer la médecine dans sa ville natale en 1550 (il en était le second Stadtphysicus). De 1560 à 1564, il fut médecin personnel de l’empereur Ferdinand Ier puis, par la suite, de Maximilien II à Vienne, enfin de Rodolphe II à Prague. Sur le plan religieux, il fut plutôt séduit par l’enseignement de Calvin. C’était la personnalité intellectuelle la plus célèbre de Breslau. Cf. l’ouvrage classique de Gillet 1860-1861.
205 Foerster 1907,224 : Labor expticandoe rationis Pestianae mihi a Coesare impositus me molestavit ; id enim quod alii confuderunt et dilacerarunt, ego restituere ordini et resarcire debeo.
206 Fendt 1574 : Quorum cum mihi videndorum copiam iampridem ex augusto tuo Hungarioe regno, ubi aliquot annis Consiliariumfisci sacratissimi Principis Divi Coesaris Maximiliani II. Inclytœ Maiestatis tuce Augustissimi parentis egerat, reversus, pro sua eximia humanitate facilitateque ultro fecisset.
207 Ludiková 2008, 549.
208 Foerster 1907, 224 et n. 3 et 4. Une chambre de Silésie a été créée en 1558, surtout compétente en matière financière : Zonta 2004,148 et n. 30-31.
209 Foerster 1907, 225.
210 Me parum cordate domi res Coesaris egisse quod insimular, nil novi, Vulgus perversum habere iudicium illiforsan hoec dicturi sunt quibus negocium non constat, Ego fretus mea optima consciencia bono zelo, in re tam pia et patrioe utili, progressum me fuisse attestor, mihi autem limites potestatis traditoe excedere non licuisse illi boni viri qui ita iudicant, noverint : Foerster 1907, 226, η. 1.
211 Ille me non cessat per insidiosas calumnias infestare et conatur me ad extremum apud consiliarios suspectum et invidiosum reddere. Er underlest nicht auch die grobsten unvorschembten calumnien auff mich zu legen, Deus erit Vindex et innocencias meoe et improbitatis suce, huic vindictam commisi : Foerster 1907, ibid.
212 Noter qu’un Christoph von Czeschau est décédé le 3 mars 1561. Son épitaphe se trouvait à Strehlen (Strzelin), à 38 km au sud de Breslau : D.M.S. Christoph à Czeschaw V. Nobili, Militiae munerib. Praefectura, fide, fortibusq(ue) factis Splendido, Sigfridus Ribisch Adfini suo posuit. Vixit ann. 35. Mens. 1. d 13. Mortuus an. 1561.3. Mart. (Johann Heinrich Zedler, Johann Peter von Ludewig et Carl Günther Ludovici, Grosses vollständiges Universal-Lexicon Aller Wissenschafften und Künste, t. 61,1749, col. 1752).
213 Sa tombe se trouve en face de celle d’Heinrich l’Ancien. Son épitaphe a été récemment restaurée, grâce à la coopération germano-polonaise déjà évoquée pour la restauration de la maison des Rybisch et du monument d’Heinrich (http://www.uni-marburg.de/fbo6/forschung/projekte/lenz/rybisch.katharina.epitaph.pdf). Texte : Bonœ memoriœ, Katharinœ, ex antiquiss(ima) de Czescha fam(ilia) feminœ rariss(imoe), pietatis eximiae, formae et pudicitiœ singularis, incomparabilis erga maritum adfectus sanctitatisque, in ipso flore iuventutis cum nondum XXX annum implesset extinctœ, Sigefridus Rybisch, Sacr(i) Coes(aris) Maximil(iani) Consiliarius Camerœ regni Hung(ariae) etprovinn(ciae) Slesioe maritus, coniugi charissimœ, et bene merentissimae, posuit cum qua vixit amantiss(ime) annos XII, dies ΧΧΙΙII, ob(iit) XVII (die ante) Cal(endas) Octob(res), Ann(o) MDLXXII ; trad. : “À l’excellente mémoire de Catherine, de la très ancienne famille de Czeschau, femme exceptionnelle, d’une éminente piété, d’une beauté et une chasteté uniques, qui manifesta un amour et une vertu incomparables envers son époux, et mourut dans la fleur de sa jeunesse – elle n’avait pas achevé sa trentième année – Siegfried Rybisch, conseiller de l’empereur Maximilien à la chambre du royaume de Hongrie et de la province de Silésie, son mari, a déposé (ce monument) à sa femme très aimée et très méritante, avec laquelle il a vécu en grand amour douze ans et 24 jours. Elle est décédée le 15 septembre 1572”.
214 Foerster la nomme Marina von Reder (suivant en cela Georges Tilenus). C’était la fille de Friedrich von Redern, seigneur d’Ober-Schwedelsdorf (Szalejów Górny – Basse-Silésie), et d’Helene Donig von Zdanitz (Ždánice, à 166 km au SE de Prague).
215 Foerster 1907,225 et n. 5 : eine Frauenbankfür seine Töchter zur anhörung unnd besuchung der Predigten und Wort Gottes.
216 Georges Tilenus, de Goldberg [act. Zlotoryja] (1556-1590), après des études en Allemagne et en Italie, est devenu conseiller du duché de Münsterberg (pol. Ziębice, en Basse-Silésie). Ses œuvres ont été publiées par Johann Mehlius en 1591 et insérées dans les Deliciae Poetarum Germanorum de jan Gruter, pars VI, Francfort/M., 1612, 690-870.
217 Georgii Tileni Aurimontani Silesii I.V.D. Poëmatum libri octo, Johann Mehl (éd.), Leipzig, Franciscus Schnelholtz [Liber IV : Epithalamia & Genethliaca complectens], 1597,181-189 : Magnifico et Nobili viro, doctrina, virtute, sapientia, & multiplicirerum usupraestantissimo, Domino Sigefrido Rybisch, S. Caes. Mai. In Camera Silesiaca à Consiliis, &c. et nobilissimae atque lectissimae virgini Marinae, nobilis ac strenui viri Dn. Ioannis à Rhederfiliae, &c. Le texte est difficile à traduire et semé de coquilles d’imprimerie. Voici cependant ce qui concerne le passage de Rybisch en Poitou (700) : placuitque tuis urbs splendida Musis | Pictavum, Cererem dum tertia poneret aestas : | Clavus [sic pro Clanus] eam circum pene omnem labitur inde | Amne Vienna, tuo iunctis qui profluit undis (“et la splendide ville des Pictaves fut agréable à tes Muses, alors qu’un troisième été apportait ses moissons : le Clain l’encercle presque complètement, lui qui s’écoule vers toi (?) [Rybisch est sur la Loire] après avoir mêlé ses eaux à la Vienne.” On remarquera les similitudes de vocabulaire. Dans l’Itinerarium, on lit (29v-30r) : Clanus fluvius eam [urbem] pene circumdat, qui inde in Viennam fluvium labitur.
218 Kundmann 1738, Tab. XXVIII.
219 Blazek 1890,103.
220 Foerster 1907, 225 ; Pusch 1988, 421-422.
221 Foerster 1907 ne cite que les prénoms des fils et détaille la carrière du second (p. 229-230) ; Kundmann 1738 donne (Tab. XXVIII) les prénoms des quatre enfants ; quant à Pusch 1988, il mélange en réalité les enfants du premier et du second mariage (420-422) et ignore Maria. Nous ne suivons pas l’ordre donné par Kundmann (Seyfried, Gottfried, Katharina, Maria).
222 Kundmann 1738, tab. XXVIII, donne la date évidemment erronée de 1567 pour son mariage.
223 Foerster 1907,225 et n. 3 (lettre à Crato).
224 Ludiková 2008, en particulier 549 et fig. 1. Ces faits sont attestés par des documents d’archives et par leur épitaphe, certes très usée, mais identifiable.
225 Pusch 1988, 421 (il l’attribue à la première union, ce qui est impossible).
226 Naviter incubuit Musís ; hinc summa voluptas : | Inter delitias Bibliotheca fuit. | Cum doctis certare viris gaudebat, et inde | Nil domus ipsius quam Schola doctafuit : Frenzel 1593, p. 280 (cité par Foerster 1907, 226).
227 Foerster 1907, ibid.
228 Curaeus 1571 (cité par Foerster 1907,228) : Multa debemus viro industrio et doctissimo Francisco Fabro qui diligenter inquisivit veteres historias, sed si quem haec lectio iuvabit, is sciat se praecipue debere grattant viro sapientia, doctrina et magna dignitate praestantissimo D. Sigefrido Ribischio Vratislaviensi... Is enim, cum in hoc studium incubuisset multos annos, etiam delineationem historias a primis exordiis prudenter instituisset, postea mira sagacitate et sedulitate omnia vetera monumenta, quaecunque extant in Provincia apud Principes, urbes, monasterio et collegia, inquisivit, et mihi omnia communicavit liberalissime, et monuit de rebus necessariis sapienter et amanten Huius igitur memoriam grata posteritas, si quae nostro hoc labore fruetur, retinebit.
229 Foerster 1907, 228-229 (lettre à Crato du 7 novembre 1571).
230 Il avait fait un stage à Anvers et Liège, dans les ateliers de Lambert Lombard et Frans Fions : Rohrschneider 2003.
231 Monumenta clarorum virorum praecipue toto orbe terrarum virorum collecta passim et maximo impendio cura et industria in aes incisa sumptu et studio nobilis viri D(omini) SigefridiRybisch, opera vero Tobie Fendt civis et pictoris Vratislaviensis etc. Editio tertia longe absolutissima Francofurti ad Mœnum impensis Sigismundi Feyerabendi 1585. C’est l’édition décrite par Andresen 1865,32-49.
232 Professeur d’éloquence à l’université de Leyde.
233 Boxhorn a adjoint à une partie des gravures des elogia sans logique, commentant la vie et les œuvres des personnages immortalisés par leurs tombeaux.
234 Savigny 1839,17-19 ; Savigny 1850. Mais bien avant déjà : Wolf 1764,7-15.
235 Michalski 1977. Je remercie Barbara Jablonska († Poitiers) de m’en avoir effectué la traduction. Auparavant, l’album de Fendt/Rybisch avait été souvent vanté, en particulier par Foerster 1907a.
236 Sparrow 1969, 28-30, fig. 10.
237 Vuilleumier-Laurens & Laurens 2010,48 et n. 132 et 133. Voir aussi Petrucci 1998,85.
238 Kubíková 2010 et 2010a.
239 Giovio 1546, 1549, 1551 et 1554, Orsini 1570 et 1570a.
240 Mazzochi 1521.
241 Apianus & Amantius 1534.
242 Schrader 1592.
243 Chytraeus 1594.
244 Calabi Limentani 1971, 928 : “per rappresentare il sepolcro e l’epitaffio di Euripide (in latino), di Cicerone, di Plinio ‘Veronese’, bisognava naturalmente inventarli. Nessuno pero fu inventato da Fendt, pittore di Breslavia : essi avevano già una lunga storia, della quale quest’opera rappresenta un momento”.
245 Ibid.
246 Schomandl-Kromer 1946 (non consultée), citée par Rohrschneider 2003. Le “Boissard-Codex” est le manuscrit 205 du Steiermärkisches Landesarchiv (Gratz).
247 Cf. infra, appendice II.
248 C’est l’opinion de Ludiková 2008, reprise par Kubíková 2010 et 2010a.
249 J’ai acquis la certitude que Chytraeus s’est fait communiquer – peut-être par Jakob Monau – le manuscrit de Rybisch et qu’il lui a emprunté jusque dans le moindre détail les textes du spectaculaire tombeau d’Angers : cf I, n. 226-234.
250 Foerster 1907,229.
251 La médaille de Seyfried dont la gravure a été publiée par Kundmann 1738, Tab. XIX, no 59, est apocryphe. Sur les portraits d’Heinrich Rybisch (tableaux, tombeau, médaille) : Foerster 1907a, passim.
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