Les routes d’Aquitaine dans les itinéraires antiques
p. 97-111
Note de l’éditeur
Geographica Historica, 1998, Ausonius Études 2, 225-238.
Texte intégral
1Fait du hasard ou de raisons particulières, l’Aquitaine1 est plutôt bien représentée dans les itinéraires antiques. On déplore, c’est vrai, la perte du segment occidental de la Table de Peutinger, qui a fait disparaître, vers le sud, les liaisons au départ de Bordeaux et d’Éauze, mais on supplée (dans quelle proportion ?) à ces manques par les données de l’Itinéraire d’Antonin et celles de l’Itinéraire de Bordeaux à Jérusalem. Reportées sur une carte générale (fig. 1), ces informations dessinent un état du réseau routier qui, bien que très lacunaire, frappe par sa remarquable densité, au moins pour le Nord et l’Ouest de la province. En fait, une telle image est à la fois exacte et trompeuse. Exacte, parce qu'elle nous transmet, à travers le travail des compilateurs qui l’ont reproduit, le schéma d’un programme, mais trompeuse parce que cette vision globale, laissant de côté les particularités propres à nos sources, estompe en même temps les incertitudes qui accompagnent chacune. Parler des itinéraires aquitains, c’est donc forcément commencer par établir un bilan du dossier.
2Il n’y a aucun doute que le dossier est suggestif : on voit se révéler, sur la figure 1, quelques grandes rocades, dans lesquelles je reconnais un état précoce du réseau, lié à la réforme augustéenne, celle qui a fait naître les cités2, puisque ces rocades unissent entre eux tous les chefs-lieux. C’est la Table qui rend le mieux compte de cette réalité, notamment dans la représentation des deux axes qui, par le centre (Clermont et Limoges puis Saintes ou Périgueux) et par le sud (Feurs, Ruessio, Javols, Rodez, Cahors et – malgré la lacune – Agen), permettent d’aller de Lyon à Bordeaux.
3Un projet d’une telle ampleur a demandé des travaux considérables et beaucoup de temps : probablement l’époque Julio-claudienne, celle que signalent les trouvailles de milliaires de Claude3 ; et aussi, j’imagine, les épitaphes de soldats retrouvées à Aulnay, Brioux, Néris, Vichy ou Eysses4.
4Peut-être devra-t-on admettre que l’achèvement ne s’est opéré que sous Trajan ou Hadrien5. En tout cas, je vois là un état très ancien du réseau aquitain : si la compilation ultime qui a donné la structure actuelle de la Table est assurément tardive, le compilateur n’en a pas moins mis en œuvre des sources de beaucoup antérieures à son temps.
5Autre élément intéressant, la Table et l’Itinéraire ont en commun plusieurs tronçons : Bordeaux - Saintes-Autun, Bordeaux - Agen, Lectoure - Lalinde, et Périgueux - Argenton, sans oublier le départ de Bordeaux vers le sud, à la coupure de la Table, qui, sur l'Itinéraire, correspond à la voie d’Espagne. Autant de similitudes qui révèlent l’utilisation de sources, sinon toujours identiques, car on rencontre des variations de détail (dans la liste des stations intermédiaires)6 du moins relativement proches7.
6Cette proximité est également frappante sur le plan chronologique. En effet, si les variations dont je parle désignent peut-être des états différents des documents mis en œuvre par les compilateurs8, ces états – A. Grenier l’avait bien compris – étaient sans doute assez proches dans le temps. Pour le savant auteur du Manuel d’archéologie gallo-romaine, “l’état de choses reflété par la Table de Peutinger paraît plus ancien que celui auquel se réfère l’Itinéraire dit d’Antonin”. Mais il ajoutait que l’intervalle de temps séparant les deux ouvrages “n’est pas bien considérable : une quarantaine d’années – un demi-siècle tout au plus”, assignant à la Table une datation approximativement antérieure aux invasions de la fin du règne conjoint de Valérien et de Gallien, et à l’Itinéraire la période tétrarchique9.
7Qu’une grande partie des informations est antérieure au ive siècle, c’est une évidence10, comme sont évidents aussi, dans l’Itinéraire, les emprunts à des sources de la fin du iiie siècle11. Dans la première série, on placera le fait que toujours, dans la Table et le plus souvent (selon la source recopiée) dans l’Itinéraire, les chefs-lieux de cité sont désignés par le toponyme originel et non par l’ethnique. C’est notamment le cas du réseau aquitain où – à l’exception de Boios, le chef-lieu de la cité de Boiates12 – ce dernier n’apparaît jamais : ainsi Lugdunum (des Convènes), Mediolanum (des Santons), Lemonum, Avaricum, Vesunna, Augustoritum et Elimberrum désignent-ils encore les capitales. Cela ne signifie pas forcément que le compilateur a suivi une source très ancienne, car le mouvement qui a fait passer du toponyme à l’ethnique (et parfois – c’est le cas notamment d’Autun, et d’Agen en Aquitaine – revenir ensuite au premier) a commencé très tôt et ne s’est achevé qu’assez tard13. Non qu’il y ait eu conflit entre les deux sortes de dénomination14, mais simplement parce que le langage administratif s’adaptait souvent avec retard à l’usage local, lequel variait sans doute aussi d’une cité à l’autre. Les exemples de ces hésitations ne sont pas rares dans les itinéraires, comme d’ailleurs dans les sources littéraires et sur les milliaires : P. Arnaud cite celui de Cologne, et ceux d’Amiens, de Boulogne de Soissons qui ne sont pas moins intéressants15.
- IA 362-363 conduit de Durocortoro (Reims) à Gessoriaco (Boulogne) par Suessonas (Soissons) et Ambianis (Amiens) ;
- IA 380 est intitulé A Samarabriva Suessonas usque, mais on trouve Augusta Suessonum en 379.6 ;
- Boulogne est toujours Gessoriaco ou portus Gessoriacensis dans l’Itinéraire, mais la Table (corrigée, quand ?) dit nunc Bononia, conforme à la Notice des Gaules (civitas Bononensium). Or, Gesoriacum, présent dans le Panégyrique IV, a cédé la place, en 310 au Bononiense oppidum16 ;
- Amiens est encore S(amarobriua) lorsque, vers 305-309, est planté le milliaire dédié à Maximien César17, mais c’est sous le nom d’Ambianis que l’atelier monétaire signe ses produits au temps de Magnence.
8Il n’est donc pas possible de marquer avec précision le moment où aurait eu lieu un brusque changement, car tout – sauf cas particulier – démontre le contraire, et l'Itinéraire ne fait que restituer ces progressives modifications de l’usage commun18. D’autres traces de l’utilisation de sources anciennes se lisent d’ailleurs dans les mentions de chefs-lieux de cité : sauf correction (par exemple la signalisation – rajoutée – de Cosedia, déformation de Constantia/Coutances, comme chef-lieu sur la Table19,) nos routiers ne connaissent que la situation antérieure au moins à la réforme administrative de Dioclétien : à Noviomagus/Nimègue, Colonia Traiana/Xanten, Castellum Menapiorum/Cassel, Bagaco NerviorumlBavai ou Aregenua/Vieux de la Table, signalés par des vignettes, correspond, dans l’Itinéraire une liaison comme Gesoriacum - Bagacum, au tracé d’ailleurs étrange, mais peut-être révélateur, par Tarvenna/Thérouanne et le Castellum des Ménapes20, qui ignore que Turnacum/Tournai a remplacé Cassel et que Bavai a cédé son rang à Camaracum/Cambrai. En revanche, le passage de Brocomagus/Brumath à Argentorate/Strasbourg est enregistré sur la Table, preuve que le compilateur, ou sa source récente, a opéré, dans ce secteur précis, la correction nécessaire.
9Cela nous conduit à essayer de dater plus précisément nos documents, car – c’est encore une certitude – ils ont été retouchés après l’époque tétrarchique. Pour la Table, Desjardins et Miller proposaient déjà un moment avancé du ive siècle21. Avec de bons arguments, P. Arnaud tient pour le règne de Julien22. Reste la question de l'Itinéraire. En présentant cette communication, en 1995, j’avais annoncé que les observations de P. Arnaud sur la Table et mes propres réflexions me faisaient abandonner l’horizon tétrarchique qu’un examen insuffisant du document m’avait fait naguère hâtivement retenir23. Depuis a paru l’article de Geographia Antiqua, dans lequel P. Arnaud a fait le point sur toutes les questions que pose ce document, notamment sa structure et la date finale qu’on peut lui assigner. Celle-ci ne saurait être antérieure au règne de Constantin, et se placerait même plutôt sous celui de Constance, l’argument principal résidant en ceci que la formule De Hispania in Aquitaniam (453.4) ne peut que renvoyer à la nouvelle dénomination du diocèse méridional des Gaules opérée sous les fils de Constantin, comme l’a démontré A. Chastagnol24. Une telle conclusion m’était aussi apparue s’imposer, et pour la même raison. D’autres indices méritent peut-être, qu’on les prenne en compte : les itinéraires centrés sur Arles, les mêmes que sur la Table, me semblent renvoyer à la courte notice consacrée à cette ville par l'Expositio totius mundi, datée de 35925. Par ailleurs, l’abondance des itinéraires centrés sur Milan pourrait rappeler non pas le rôle politique et administratif de la grande cité sous la Tétrarchie26, mais, à une époque plus avancée (la seconde moitié du ive siècle), celui qu'elle tenait dans la préfecture centrale. Mais cela ne signifie pas que j’accorde à l'Itinéraire la valeur d’un document officiel.
10Je ne m’étendrai pas longuement sur ce thème dont P. Arnaud a commodément résumé les divers éléments dans son article de Geographia Antiqua27. Le fait que notre routier enregistre des données d’ordre politico-administratif ou des transformations intervenues lors d’une réforme, n’a rien en soi d’étonnant : ces faits sont précieux parce qu’ils constituent des repères chronologiques, ils ne signifient pas pour autant que la source qui les retient soit en rien officielle. D’ailleurs, même en sachant que l’administration ne tenait pas toujours avec une grande rigueur l’état de ses services – on le voit avec la Notice des Dignités —, on imagine mal un fonctionnaire du milieu du ive siècle voyageant par exemple d’Emerita à Trèves avec la seule aide des informations fournies par l’un ou l’autre de nos documents : s’il est vrai que Hispania, Aquitania, Galliae, désignent les diocèses, force est de constater aussi que la liaison Emerita - Burdigala - Trèves, dont l’existence est assurée (pensons, entre autres, à l’affaire Priscillien), ne figure sur aucun d’entre eux28 : l’itinéraire De Aquitania in Gallias, aboutit à Autun, et le réseau trévire n’est relié ni à cette ville, ni à un quelconque raccordement permettant de retrouver la direction de Bordeaux, car le réseau de la Gaule septentrionale et nord-orientale est centré sur Reims29.
11Autre fait étonnant, l'Itinéraire, pour aller “dans les Gaules” (c’est-à-dire à Trèves) ne connaît que le long détour qui passe par Saintes et Poitiers, et pas la route plus directe par Vesunna/Périgueux et Augustoritum/Limoges, qui figure, elle, sur la Table. Enfin il est frappant que, sur cette dernière, la “voie d’Agrippa” dont le tracé rectiligne est assez bien connu, n’est restituée qu’à travers les deux détours d’Acitodunum/Ahun et Aunedonnacum/Aulnay-de-Saintonge.
12Bref, si nos documents répercutent logiquement à l’occasion telle ou telle information issue des réalités administratives d’une époque, leurs insuffisances et leurs lacunes les éloignent largement des documents officiels, et il est très excessif de vouloir les ranger dans cette catégorie. Mais cela ne leur ôte pas tout intérêt, loin de là.
13Les remarques qui précèdent invitent à revenir sur la structure de nos routiers. La disparition du segment occidental de la Table est certes un inconvénient grave, mais ce qui subsiste du réseau aquitain30 autorise un certain nombre de remarques.
14En premier lieu sur la structure de l'Itinéraire, c’est-à-dire la manière dont il a été réalisé, la façon dont les différentes pièces qui le composent ont été assemblées. Une fois abandonnée l’idée qu’il s’agit d’un document officiel dont on serait en droit d’attendre une meilleure qualité, l’œuvre se signale par une certaine logique qui peut se résumer ainsi : un peu comme dans un indicateur de chemin de fer moderne, un “Chaix”, le compilateur va d’une tête d’itinéraire à un terminus qui est généralement lui-même un point d’éclatement de la circulation, et donc, à son tour, tête de nouvel itinéraire. Sur ces itinéraires qui sont souvent des liaisons à longue distance viennent se greffer des relations secondaires, fréquemment simples raccordements entre deux itinéraires principaux, qui mettent en valeur des carrefours de moindre importance : ainsi, Bordeaux (ce n’est probablement pas un hasard) est le point d’arrivée du tronçon De Hispania in Aquitaniam et le point de départ du tronçon de Aquitania in Gallias qui emprunte d’ailleurs, j’en reparlerai, deux directions différentes. Aquae/Dax et Aginnum/Agen constituent des têtes de raccords (vers Toulouse et vers Lyon des Convènes, l’actuelle Saint-Bertrand-de-Comminges) greffés sur des axes plus importants. Il en va pareillement pour les villes-terminus : à Augustodunum/Autun, la voie venue de Bordeaux rencontre le grand itinéraire de Boulogne à Lyon ; à Argentomagus/Argenton-sur-Creuse aboutit, sur la route de Poitiers à Bourges, le grand chemin venu du sud de la province, tandis que le segment Caesaraugusta/Saragosse - Beneharnum/Lescar unit à la rocade sud de l’Aquitaine (Dax - Toulouse) la rocade nord de la Péninsule (Asturica/Astorga - Tarraco/Tarragone). Même chose sur la Table avec le tronçon Lactora/Lectoure - Toulouse. On a ainsi un double mouvement : d’une part des points de fixation des réseaux retenus – sans doute d’après des sources régionales – par les compilateurs : Reims, par exemple, ou Bordeaux, accessoirement Vesunna/Périgueux, en Gaule, ou, dans les Espagnes, Asturica/Astorga ou Caesaraugusta/Saragosse, et, d’autre part, des centres secondaires placés à des points d’éclatement de la circulation, tels Argenton, Dax ou Agen.
15Résumons : la Table et l'Itinéraire restituent deux types de liaisons routières : d’abord des itinéraires de long parcours, comme Lyon - Saintes, Milan - Espagne, dont la description est confirmée par les gobelets de Vicarello, ou Bordeaux - Lyon, mais ces itinéraires sont souvent morcelés et ne se reconstituent que par tronçons aboutés ou bien présentés avec détours inattendus. En second lieu, on y rencontre – et c’est peut-être une des raisons qui expliquent l’état des premiers – des itinéraires issus de corpus régionaux, centrés souvent sur de grandes capitales (Milan, Reims, Bordeaux, Arles) mais également sur des villes moins illustres à qui seule leur position géographique a valu de tenir dans le recueil une place importante : ainsi Astorga, mais aussi, en Aquitaine, Périgueux, Dax ou Agen. Les compilateurs vont ainsi de carrefour en carrefour, s’arrêtent pour décrire un branchement, abandonnant parfois même la direction qu’ils avaient précédemment empruntée. Il s’ensuit que s’il y a une certaine logique dans la présentation des réseaux, les choses changent quand on entre dans le détail. Il faut nous arrêter un moment sur ce point.
16Sans partager complètement les jugements indignés de Desjardins (qui en voulait d’ailleurs plus apparemment aux copistes du Moyen Âge qu’aux auteurs eux-mêmes31) ou de Jullian, il est bien certain que les fautes, les lacunes et les bizarreries que nous offrent la Table et l’Itinéraire ont de quoi étonner. Ces erreurs et ces fantaisies ont arrêté et désarçonné des générations de chercheurs, plongé l’érudition locale dans des abîmes de perplexité, déclenchant même à l’occasion des guerres jamais terminées. Ces luttes sont généralement parties de la détermination des tracés : parce qu’on prenait au pied de la lettre les données des deux documents, il fallait retrouver, à la distance marquée, les arrêts intermédiaires placés entre deux sites identifiés, généralement les chefs-lieux de cité. Cela revenait prioritairement à identifier les stations, entreprise ardue entre toutes car, si certaines (comme Acitodunum/Ahun, Cassinomagus/Chassenon, Aunedonnacum/Aulnay, Excisum/Eysses, Varatedo/Vayres, Corterate/Coutras), et un grand nombre d’autres encore se laissent facilement reconnaître – généralement parce que le toponyme s’est maintenu au cours des siècles – un tiers à peu près d’entre elles sont encore des énigmes à résoudre32. À cette difficulté viennent s’en ajouter deux autres : la première est liée aux cheminements indiqués sur les itinéraires, la seconde est liée à la découverte de ruines anonymes, parfois imposantes, qui ont contribué à relancer débats et querelles. Je ne donnerai qu’un exemple de chaque, mais significatif. À la première série se rattache le tronçon Aginnum - Divona figurant sur la Table. Celle-ci fait passer le voyageur par Excisum/Eysses (au passage du Lot) et Diolindum, l’actuelle Lalinde, sur la Dordogne. Un tel détour a été évidemment considéré comme une monstruosité par les commentateurs33, qui ont tenté de corriger cette aberration pour placer coûte que coûte la station dans la direction de Cahors. Cette logique sommaire et le campanilisme lotois ont abouti à faire triompher – contre toute vraisemblance – sa localisation à Duravel. La solution est pourtant relativement simple. En comparant la Table et l'Itinéraire, on remarque vite que, au départ d’Agen, vers le nord, ils décrivent le même parcours, ce dont témoigne le calcul des distances emprunté à l’un et à l’autre :
Etapes | TP | IA |
Aginnum/Excisum | 13 lieues | 13 lieues |
Excisum/Diolindum | 21 lieues | - |
Excisum/Traiectus | - | 21 lieues |
Traiectus/Vesunna | - | 18 lieues |
17À l’évidence, Diolindum et Traiectus désignent la même réalité, mais le premier toponyme nomme le relais, tandis que le second s’applique au passage de la rivière34. La différence entre la Table et l'Itinéraire vient de ce que la première ne donne qu’un fragment de la liaison à longue distance que le second décrit complètement, quoiqu’en deux tronçons. Il s’agit d’un grand axe sud-nord qui, parti de Lyon des Convènes, au pied des Pyrénées, rattrape à Argenton la rocade nord Poitiers - Autun. Cette grande dorsale de l’Aquitaine impériale, d’origine préromaine, qui traversait six chefs-lieux de cité, ne pouvait pas ne pas figurer dans les sources de nos compilateurs, mais elle a été fragmentée au point de devenir méconnaissable35. Quant au segment Diolindum - Cahors, il représente la deuxième partie d’un cheminement venant de Saintes, sur lequel je reviendrai plus loin.
18Une autre source de complications vient de ce que l’on connaît aussi des champs de ruines isolées, vestiges parfois puissants d’agglomérations secondaires disparues, par où la tentation est grande de faire passer les itinéraires, ce qui entraîne celle de corriger en conséquence les données de nos routiers. Parmi les sites qui ont ainsi “accaparé” les itinéraires, on peut mentionner Saint-Goussaud en Creuse, tenu sans raison pour le Praetorium de la Table36, et surtout les Bouchauds à Saint-Cybardeaux (Charente), devenu, sans davantage de fondement le Germanicomagus de la même Table37.
19Pour résoudre les difficultés, avant même de recourir à l’aide d’autres disciplines, il faut reconsidérer sans a priori les informations qui nous sont livrées par la Table et l'Itinéraire. Que disent-elles ? Simplement que – malgré quelques aberrations (ainsi le tracé curieux de la voie d’Agrippa) – ces documents nous livrent un certain état du réseau aquitain, probablement assez ancien. Lorsque l’on fond toutes les données sur une même carte (fig. 1), on voit bien que les erreurs se corrigent et que les lacunes se comblent. Ce qui s’est passé, c’est que, décrivant des itinéraires, nos sources, par négligence, oubli ou distraction, les traitent fréquemment comme des fractions et mélangent souvent aussi des données appartenant à plusieurs liaisons différentes. La Table en produit un exemple caractéristique avec le parcours complexe Tolosa - Sarrali - Lactora - Aginnum - Excisum – Diolindum - Divona où se télescopent trois tracés :
- Le début de la route de Toulouse à Bordeaux, par Agen et la vallée de la Garonne ;
- Une section de la Peyrigne, entre Lectoure et Lalinde ;
- Un axe Saintes - Méditerranée dont la Table ne fournit que la partie LalindeCessero/Saint-Thibéry.
20On supposera, sans grand risque de se tromper, que c’est par négligence ou par impossibilité matérielle de le faire, compte tenu du schéma de composition de l’œuvre dans son ensemble, que le dessinateur a omis d’inscrire les liaisons manquantes. Avec l'Itinéraire, les procédés de composition autant que les faiblesses de l’auteur paraissent avoir déterminé un certain nombre d’erreurs. J’en donnerai un exemple, celui de l’itinéraire “D’Aquitaine dans les Gaules” : parti (je le suppose) pour décrire la voie méridionale de Bordeaux à Lyon, le rédacteur s’arrête à Agen, parce que, là, il bute sur un carrefour, celui de la Peyrigne. Il s’engage alors sur cette route, en choisissant la direction du nord, et décrit le parcours Agen - Argenton, qui aboutit à l’étrange résultat que nous connaissons, qui, de surcroît, a été placé sous un titre qui ne convient qu’incomplètement au sujet. Avec une certaine logique, il revient ensuite à Agen pour décrire cette fois la partie sud de la Peyrigne, insensible apparemment, à l’unité et à l’importance de cet axe38 (mais ces choses sont probablement des conceptions qu’imposent à nos esprits les techniques de la cartographie moderne).
21Ce qui me paraît encourageant dans les observations qui précèdent, c’est que, à condition de ne pas faire de fixation bornée sur les calculs de distances, l’identification des stations encore indéterminées, ou les détours incompréhensibles, il y a déjà moyen, avec les seules ressources offertes par les documents réunis, de rendre ceux-ci intelligibles et même, de les améliorer sensiblement. Il me paraît plus profitable de ne considérer leurs erreurs que comme des informations que, provisoirement, nous ne savons pas interpréter, d’autant plus que, en mettant en œuvre toutes les méthodes d’investigation utilisables, certaines de ces erreurs peuvent être assez facilement redressées.
22Parmi les soutiens qui permettent de compléter les manques, il est évident que la prospection archéologique joue un rôle essentiel, ne serait-ce que pour cette raison fondamentale qu’avant de discuter sur les routes, il faut d’abord les retrouver. Il est évident aussi que la prospection aérienne, là où elle peut être utilisée (mais l’amélioration des techniques de prises de vues étend toujours davantage ses possibilités), rend les plus grands services : c’est ainsi que C. Petit a reconnu une section de la route Lectoure - Toulouse de la Table39, ou que, à la limite des Pyrénées-Atlantiques et des Landes, au sud d’Aire-sur l’Adour, F. Didierjean a reconnu sur tout son parcours ou presque, jusqu’à Lescar, la voie qui permet de relier à la rocade Dax - Toulouse de l’Itinéraire, le segment Eauze - Aire de la Table40. Dans nombre d’autres régions, en Saintonge, Poitou, Berry etc., des recherches toujours plus fructueuses apportent de précieuses informations.
1. | Alisincum |
2. | Decetia |
3. | Tincontium |
4. | Ernodurum |
5. | Alerta |
6. | Argentomagus |
7. | Fines |
8. | Segora |
9. | Rauranum |
10. | Brigiosum |
11. | Aunedonnacum |
12. | Germanicomagus ? |
13. | Cassinomagus |
14. | Praetorium |
15. | Acitodunum |
16. | Mediolanum |
17. | Aquis Neri |
18. | Fines |
19. | Cantilia |
20. | Ubrivum |
21. | Aquis Calidis |
22. | Vorogilum |
23. | Ariolica |
24. | Rodomna |
25. | Mediolanum |
26. | Aquae Segetae |
27. | Iciomagus |
28. | Condate |
29. | Ad Silanum |
30. | Carantomagus |
31. | Varatedo |
32. | Diolindum |
33. | Fines |
34. | Calembrio* |
35. | Sarrum |
36. | Condate |
37. | Novioregum |
38. | Tammum |
39. | Blavia |
40. | Corterate |
41. | Varatedo |
42. | Ad Stomatas |
43. | Serione |
44. | Sirione |
45. | Cossio |
46. | Tres Arbores |
47. | Ussubium |
48. | Oscineio |
49. | Scittio |
50. | Fines |
51. | Excisum |
52. | Cosa |
53. | Sarali |
54. | Ad Iovem |
55. | Mutatio Bucconis |
56. | Cassinomago |
57. | Hungunverro |
58. | Ad Sextum |
59. | Belsinum |
60. | Losa |
61. | Salomagus |
62. | Segosa |
63. | Telonnum |
64. | Mosconnum |
65. | Coaequosa |
66. | Carasa |
67. | Imus Pyrenaeus |
68. | Iturissa |
69. | Benearnum |
70. | Iluro |
71. | Aspalluca |
72. | Foro Ligneo |
73. | Summo Pyrenaeo |
74. | Oppido Novo |
75. | Calagurris |
76. | Aquis Siccis |
77. | Vernosole |
78. | Condatomago |
23Cela n’empêche pas que la prospection au sol reste une nécessité absolue car c’est là que s’opèrent les indispensables contrôles objectifs des hypothèses, notamment celles de la recherche en salle, sur les cadastres et les cartes, dans les documents d’archives ou d’après la toponymie. J.-M. Desbordes a montré, par des exemples limousins, comment, dans la seconde moitié du premier millénaire de notre ère, l’effacement des relations transversales à longue distance (du type Lyon - Bordeaux par la voie d’Agrippa) au profit des liaisons sud-nord a entraîné la disparition des voies “romaines”, tandis que se sont conservées les “pouges” d’interfluves, plus anciennes, qui ont guidé ensuite, et elles seules, l’organisation des parcellaires et des limites administratives41. Dans le même ouvrage, d’ailleurs, il livre, sur les routes antiques du Limousin les résultats d’une recherche exemplaire, faite d’analyses minutieuses et d’observations cent fois vérifiées, qui, étudiant à la fois les structures et les tracés, font actuellement de cette région la mieux connue de l’ancienne province d’Aquitaine. Seules de telles enquêtes, parce qu’elles sont systématiques, c’est-à-dire quelles ne négligent aucun des aspects de la recherche, permettront d’avancer dans notre connaissance du réseau routier antique et donc, en fin de compte, de revenir aux sources écrites, c’est-à-dire à nos itinéraires.
24Avec l’archéologie, les trouvailles épigraphiques apportent à la connaissance des routes de remarquables compléments. Il y a d’abord les milliaires. Il est à peine besoin d’insister sur l’importance de leur témoignage : leur présence atteste à coup sûr le passage d’une route, date le moment où celle-ci a été créée ou restaurée et aussi l’époque pendant laquelle elle était fréquentée42. Après eux, il faut mettre en avant les inscriptions mentionnant des vici, et le passage de “voyageurs”, c’est-à-dire de civils ou de militaires immobilisés (souvent par la mort) loin de leur cité d’origine ou de leur lieu de garnison43. Reportés sur la carte des itinéraires, ces précieux éléments procurent deux sortes d’informations :
- Ils confirment qu’un certain nombre de liaisons décrites par les itinéraires appartenaient à la catégorie des routes les plus importantes, viae publicae ou militares : ainsi pour les liaisons Blaye - Saintes, Saintes - Poitiers, Poitiers - Argenton - Bourges, Clermont - Ahun, Ahun - Limoges, Feurs - Saint-Paulien - Javols - Rodez, Saint-Bertrand-de-Comminges - Agen et Eauze - Bordeaux (par le milliaire de Sos). La trouvaille dans le rempart de Dax d’une borne datable de la seconde moitié du iiie siècle, confirme les indications de l’Itinéraire : la cité des Tarbelles était bien une étape importante sur la route des Espagnes.
- L’apport le plus intéressant de ces documents est cependant ailleurs. Il réside en ceci que leur présence permet de compléter utilement quelques-unes des anomalies que montrent la Table et l'Itinéraire : entre Saintes et Limoges, des découvertes récentes s’ajoutant aux informations déjà connues par l’archéologie, confirment un trac (direct de la voie d’Agrippa qui a pu d’ailleurs emprunter, au iie siècle, la rive droite de la Vienne, comme le fait l’actuelle route nationale (RN 141). Entre Agen et Cahors, le milliaire de Roudoulous restitue le chaînon manquant sur la Table. Le cas le plus remarquable est sans doute celui de la liaison Saintes - Cahors, dont la Table ne connaît que la section terminale Diolindum - Divona. Sur le tronçon Saintes - Ribérac, bien attesté archéologiquement, les milliaires de Pons et de Chadenac confirment à la fois la direction de la route et son importance, comme celui de Rignac, en Rouergue, signale un probable tronçon de la route Saintes - Rodez.
25Au total, les rectifications et les compléments qu’apportent aux informations fournies par la Table et l'Itinéraire les résultats de la recherche moderne, font apparaître plusieurs faits qui plaident plutôt en faveur de ces sources si critiquées. Je n’oublie pas les insuffisances dont elles font preuve en abondance, mais je pense que, sans lever toutes les incertitudes, les enquêtes d’aujourd’hui permettent de conclure à leur relative véracité : les informations quelles livrent sont certes fragmentaires, mais elles peuvent être complétées. Les énigmes que constituent souvent l’identification et la localisation des stations ne relèvent pas seulement de la faute des compilateurs : si pour nombre d’entre elles la question reste entière, c’est parce qu’elles sont mortes, et elles sont mortes parce que les courants de circulation qui les animaient se sont déplacés. Expression de formes de relations elles-mêmes souvent directement liées au fonctionnement de l’appareil d’Etat, ces courants se sont arrêtés avec la ruine de celui-ci. Les routes – certaines routes – ont perdu alors de leur nécessité, les relais ont définitivement disparu sans laisser de traces, notamment dans la toponymie.
26Je retiendrai aussi que les itinéraires apportent deux données de grande importance : ils montrent d’abord, je le disais en commençant, combien était dense le réseau des routes d’Aquitaine. Des prospections systématiques comme celles qu’a conduites J.-M. Desbordes en Limousin, ne pourront que confirmer cette réalité. Ce faisant, on verra encore mieux s’en révéler une autre : celle du programme administratif romain dont nos sources – indiscutablement – donne un aperçu maladroit mais suggestif. Il n’est pas utile d’en faire des documents officiels pour lire même à travers leurs faiblesses, comment, par le quadrillage caractéristique du réseau centré sur les cités et les liaisons interprovinciales, a été mise en place très tôt, par la volonté de l’Etat romain, la structuration de l’espace gaulois.
Notes de bas de page
1 J’entends ici l’Aquitaine dans ses limites augustéennes, de la Loire aux Pyrénées et aux Cévennes.
2 Si Agrippa a jeté dès son premier voyage, en 40-37 (Roddaz 1984, 393), les bases du réseau gaulois tel que le présente Strabon 4.6.11, c’est cependant la création des cités – Saintes, la capitale, naît seulement vers 20 a.C. (Maurin 1978, 50 ; Maurin 1995, 39) – qui a finalement décidé de la configuration définitive de celui-ci : routes et cités sont étroitement unies dans la mise en place de la réforme de 16-13 a.C. Voir aussi Bost 1982,63 ; Bost & Boyrie-Fénié 1988, 16 ; Sillières 1992, 434-436.
3 CIL, XVII, 328, 344, 348, 349, 352, 381, 428.
4 En 1990, j’avais proposé d’interpréter ces stèles, dont la plupart sont précoces, comme des témoins du passage des troupes venues occuper certains points stratégiques (= les carrefours routiers !) après la révolte de 21 (Bost 1990a, 120, avec références des inscriptions). Il est plus raisonnable de les mettre en relation avec l’avancement du programme routier.
5 CIL, XVII, 325, 343, 350, 378, 426, 430a, 439, 441, à moins que cçs pierres ne rappellent que des réfections. À la liste, ajouter le fragment publié par Basasse & Picotin 1978, 33-34 :[---] NERVA TRAIANVS [---]/[---] IX ( ?).
6 Les différences sont particulièrement nettes sur l’axe Burdigala - Augustodunum : entre Burdigala et Mediolanum des Santons, l'Itinéraire fait un détour ( ?) par Novioregum (Barzan - Talmont ?) tandis que, au delà, la Table seule mentionne l’étape de Brigiosum (Brioux). Après Argentomagus (Argenton-sur-Creuse), la Table annonce six étapes avant Augustodunum (Autun), dont deux ne figurent pas dans l’Itinéraire, qui, avant Avaricum (Bourges), fait s’arrêter le voyageur à Ernodurum (Saint-Ambroix), tandis que la Table fait étape à Alerta (Ardentes), au passage de l’Indre.
7 Miller 1916, col. 26 ; Grenier 1934, 128, 134 et 138, encore que tous deux croient, derrière W. Kubitscheck, à des documents dérivés de la carte peinte sur le mur de la porticus Vipsania. En dernier lieu, voir Arnaud 1988 ; Arnaud 1992 ; Arnaud 1993a.
8 Ce n’est pas non plus absolument certain : il s’agit de documents simplifiés à l’extrême et on peut imaginer que, utilisant la même source, les auteurs ont parfois opéré dans celle-ci un tri différent. C’est ce que suggère avec raison Arnaud 1993a, 35. Ainsi s’expliqueraient simplement (sans parler des erreurs commises par les copistes du Moyen Âge) les particularités relevées dans l’exemple cité à la note 6.
9 Grenier 1934, 135-136.
10 Déjà Miller 1916. col. 25. Desjardins IV, 79-80, identifiait dans la Table six époques principales à partir du règne d’Auguste.
11 Sur ces emprunts, voir, en dernier lieu, Arnaud 1993a, 40-42. En me fondant sur ces évidences, j’avais soutenu une attribution de l’œuvre à cette période (Bost & Boyré-Fénié 1988, 13-20). D’autres indices me sont apparus depuis, et je soucris tout à fait aux propositions de P. Arnaud d’attribuer l'Itinéraire comme la Table à la seconde moitié du ive siècle.
12 IA 456. 4.
13 Bost & Fabre 1983, 30-36.
14 Jullian, IV, 529-530.
15 Arnaud 1993a, 42 et n. 47.
16 Paneg. lat. 4, prononcé le1er mars 297 : muri Gesoriacenses ; 14.4 : Gesoriacense litus ; mais Bononiense oppidum dans Paneg. lat. 7.5.2.
17 CIL, XVII, 508.
18 Le cas particulier de Boulogne correspond justement à une transformation caractéristique de la ville. Il n’y a d’ailleurs pas de différence sur ce point entre les itinéraires signalés par la formule A... usque et ceux qui placent seulement la préposition devant la ville de départ. La première série donne 32 fois le toponyme, 4 fois le nom mixte et 4 fois l’ethnique (2 fois Trèves, 365.7 ; 366.4 : Treveros civitas ; et 2 fois Soissons, 380.1 et 6 : Suessonas). Dans la seconde série, le toponyme est employé à 24 reprises, contre 4 pour le nom mixte, et 7 pour l’ethnique (dont 4 fois Trèves, 363.3 ; 371.5 ; 372.3 ; 374.1) et une fois Soissons (362.2). Les autres mentions concernent Troyes (Tricasis, 361.3) et Amiens (Ambianis, 362.4). J’observe d’ailleurs que les formes mixtes supposées représenter la transition du toponyme à l’ethnique appartiennent moins à celui-ci qu’à celui-là : en effet, pour les capitales, c’était d’abord le nom de fondation. Ensuite, des noms comme Augusta (Suessionum, Treverorum, Viromanduorum). Mediolanum (Santonum, Aulercorum), Portus (Namnetum), Foro (Segusiavorum), Castellum (Menapiorum), Tullo (Leucorum), et même Divodurum (des Médiomatriques = Metz, mais Holder en cite quatre) ne pouvaient pas, excepté sur place, s’employer seuls, sous peine de rendre éventuellement impossible l’identification de la ville concernée. L’adjonction de l’ethnique apportait à celle-ci une précision évidemment indispensable. Durocortorum (une seule mention avec Remorum – IA, 380.7 – contre 7 sans l’ethnique), Lutécia Parisiorum (IA, 366.5, mais 3 autres citations sans l’ethnique), Aduatuca Tungrorum (IA, 378.5) et Bagaco Nerviorum (IA, 380.7, contre trois utilisations du seul toponyme) n’entrent pas dans cette catégorie, mais, par exemple, CIL, III, 4466 [Carnuntum, épitaphe de T. Flavius Crensces (sic), eques alae Tampianae... domo Durcor(toro) Rem(orum)... ] prouve de toute façon que l’usage du nom mixte était ancien (la pierre, aujourd’hui perdue, est datable de la fin du ier s. p.C., voir Spaul 1994a, 215-216).
19 Chez les Unelli, à la place de Crociatonum, Carentan.
20 376.1 - 377.1.
21 Vers 365 pour Miller 1916, p. XXXVI, col. 1.
22 Arnaud 1988, 312.
23 Arnaud 1993a : cf. supra, n. 11.
24 Arnaud 1993a, 43 ; Chastagnol 1970, 272-290.
25 Rougé 1966, 19.
26 Je n’ai pas pu consulter sur ce point le récent travail de Calzolari 1996.
27 Arnaud 1993a, 33-34.
28 La partie Emerita - Summo Pyrenaeo (col de Bentarté, à l’est de Roncevaux) n’apparaît qu’à condition de remonter jusqu’à Asturica par le camino de la plata. lui-même tronçonné en deux morceaux dont le premier (Emerita-Ocello Duri/Zamora) appartient à la route ab Emerita Caesaraugustam (IA 433.1-434.6) et l’autre à une route ab Asturica Caesaraugustam (IA 439.5-9) qui descend presque jusqu’à Tolède. À partir d’Asturica, on emprumte l’itinéraire De Hispania in Aquitaniam.
29 Les mêmes remarques valent pour la péninsule Ibérique où, pour la partie qui nous intéresse, l’auteur a retenu des parties de réseaux centrées sur Asturica/Astorga et Bracara/Braga.
30 Dans l’état où il nous est parvenu, car il faut compter, en plus des erreurs du compilateur antique, avec les maladresses et les négligences des copistes du Moyen Âge.
31 Desjardins IV, 83, à propos de la Table : “Le moine a tout copié sans rien comprendre”.
32 Sur l’ensemble de la documentation, en comptant l'Itinéraire de Bordeaux (13 arrêts entre Bordeaux Toulouse, dont 5 sont identifiés), les stations reconnues sont au nombre de 53 (environ 63 %), les autres sont 31 (environ 37 %).
33 Pas par tous. Desjardins IV, 149, place sans discussion Diolindum à Belvès (à exactement 24 lieues Cahors et 21 d’Eysses...).
34 Traiectus est un toponyme commun pour désigner l’endroit de franchissement d’un cours d’eau : cf. Traiectum/Utrecht ou, en Aquitaine, Trie-sur-Baïse, Trageyt, à Bordeaux, sur la rive droite de la Garonne. On trouve en Limousin des lieux-dits Le Trait, le Treix, et, à Rempnat (Haute-Vienne), Le Treich : voir Villoutreix 1981. Traiectus est aujourd’hui les Drayaux, commune de Lalinde, à peu de distance à l’est du village actuel.
35 Cette ancienne grande piste protohistorique est encore désignée en Agenais et en Périgord sous le nom de Peyrigne. L'Itinéraire la décrit en 461.6-462.3 (au nord d’Agen) et 462.4-463.2 (au sud).
36 J’ai essayé (Bost 1977, 686-700) de ramener à de plus raisonnables proportions les trouvailles faites sur ce site, simple sanctuaire de hauteur ; sur le passage de la route, cf. Desbordes 1994, 17-22.
37 Sur ce dossier voir Maurin 1978, et notamment p. 306, la liste des sites antiques non identifiés de la Saintonge, et surtout, celle, abondante (8 noms au moins) de villages ou villes modernes recélant des vestiges non identifiés.
38 Peut-être (ce n’est pas sûr) faut-il voir là un argument supplémentaire pour refuser à notre document une origine officielle. Le même cas de figure se trouve, sur la Table, dans la description de l’itinéraire méridional de Lyon à Bordeaux : arrivé à Cahors, celui-ci éclate dans deux directions, celle de Toujouse, au sud, et une autre, vers le nord-ouest, qui s’arrête à Diolindum, on l’a vu, mais qui, en fait, se prolonge bien au delà.
39 Lapart & Petit 1993 [CAG 32-Gers], 36.
40 Boyrie-Fénié 1994 [CAG 40-Landes], 105. no 185 et ill. p. 96.
41 Desbordes 1995, 44-55.
42 Contrairement à ce qu’on dit parfois en Auvergne, en Limousin ou en Charente, je ne crois pas que des routes aient pu être tracées et construites au iiie siècle, a fortiori sous Valérien et Gallien. Le réseau, centré sur les chefs-lieux de cité a été établi dès l’époque julio-claudienne, et les milliaires du iiie siècle, notamment les milliaires au datif, ne signalent pas autre chose que d’éventuelles opérations de réfection des bornages ou la promotion d’une route au statut de voie du cursus publicus, voire seulement les hommages d’une cité au prince régnant.
43 Bost 1990b, 117-120.
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