Chapitre V. Le problème de la transhumance
p. 391-397
Texte intégral
1L'étude de la place des bergers et du bétail dans les relations internationales invite à réexaminer un point qui a été placé au cœur des débats historiographiques sur l'élevage en Grèce ancienne : celui de la transhumance. Nous allons tenter ici une synthèse de la question en essayant de souligner ce que les inscriptions apportent. Il paraît cependant nécessaire d'insister sur le fait que ces controverses ont souvent abouti à obscurcir la recherche sur la vie pastorale des Grecs de l'Antiquité, en faisant passer au second plan une description pure et simple des pratiques des éleveurs. Si la transhumance est, là où elle est pratiquée, une forme à la fois très voyante (et parfois encombrante) de la vie pastorale, elle n'en reste pas moins un aspect marginal de l'élevage en Grèce ancienne.
1. Le débat sur la transhumance
2Longtemps, il a été admis que la Grèce antique n'avait pas connu la transhumance ovine1, la division entre cités et la multiplication des frontières ne le permettant pas2. La question était entendue sans discussion et, par ailleurs, la vie des bergers grecs, même dans l'Antiquité, ne semblait pas mériter que l'on s'y intéresse. Sous l'influence de L. Robert, de ses travaux sur les bergers grecs et, sans doute aussi, des passages consacrés par Braudel à la transhumance dans son livre sur la Méditerranée du xvie siècle3, le débat fut ouvert en 1974 par l’article de St. Georgoudi qui a déjà souvent été cité ici4. L'auteur y utilisait avec bonheur l'ensemble de la documentation (œuvres littéraires, inscriptions, informations sur la transhumance dans la Grèce moderne) pour démontrer que les conditions géographiques nécessitaient des déplacements réguliers du bétail et qu'il existait des moyens institutionnels pour surmonter l'obstacle des frontières. Cet article reçut un accueil favorable5 et l'existence de la transhumance sembla dès lors admise.
3Cependant, en 1988, un volume consacré aux “économies pastorales dans l'Antiquité classique”, qui comptait deux articles sur le sujet, l'un dû à St. Hodkinson et l’autre à J. E. Skydsgaard6, vint remettre les conclusions de St. Georgoudi en question. Hodkinson y expliquait que la Grèce n’avait pas connu de véritable transhumance, mais seulement des déplacements à petite échelle7 occasionnés, non par la volonté de combiner des pâturages de montagne et de plaine, mais par des nécessités économiques indépendantes de la volonté des éleveurs : concurrencés par les cultures, en été, les troupeaux ne trouvaient plus place dans les plaines, mais on les isolait dans les eschatiai. En revanche, J. E. Skydsgaard adoptait une position plus nuancée : il admettait l’existence de mouvements de transhumance, mais en minimisait l’ampleur. Niant la possibilité du mixed-farming dans l’Antiquité grecque, il en tirait la conclusion que les troupeaux devaient obligatoirement abandonner les plaines pendant une grande partie de l’année8.
4Le degré d’intégration de l’élevage dans l’ensemble des systèmes agraires est effectivement au cœur du débat sur la transhumance. Depuis les travaux de Jardé, on estimait que le bétail ne jouait qu’un rôle minime dans l’agriculture et que les troupeaux allaient chercher leur pâture hors des régions céréalières et arboricoles, donc sur les collines incultes et les montagnes. C’est le schéma d’une nette séparation entre l’ager et le saltus. En conséquence, les cultures ne profitaient pas des amendements que les animaux pouvaient fournir et les rendements restaient peu élevés. Les Grecs n’avaient donc pas connu ce que l’on appelle le mixed-farming9. Là encore, la vision pessimiste de Jardé a été contestée depuis quelques années par des savants, britanniques pour la plupart, qui se sont efforcés de montrer que le degré d’intégration de l’élevage était beaucoup plus grand qu’on ne l’affirmait : l’article d’Hodkinson est l’un de ceux qui vont le plus loin sur ce chemin, affirmant qu’il y avait toujours moyen de nourrir le bétail à la ferme et que les Grecs ont connu les plantes fourragères10. Cette nouvelle interprétation, qui aurait l’avantage d’expliquer certaines réussites de l’agriculture grecque comme dans les Cyclades, est loin d’avoir fait l’unanimité11.
5Doit-on poser le problème de la transhumance et de l’intégration du bétail comme un tout, sans tenir compte de l’éventuelle diversité géographique et historique ? H. Forbes a récemment rappelé dans un article visant à aider les auteurs de surveys à mieux identifier les sites pastoraux que le débat doit tenir compte : a) de la définition que l’on donne de la transhumance, b) du contraste entre la réalité observée dans les faits, la marginalité et la fascination que la transhumance a exercée sur les chercheurs12.
2. La définition de la transhumance
6Une partie de ces malentendus aurait pu être évitée avec une définition précise de la transhumance13. Il suffisait pour cela de se tourner vers les géographes qui ont bien mis en évidence les différences avec le nomadisme pastoral : “L’élevage transhumant comporte un déplacement des troupeaux sous la conduite de bergers et non plus de toute la population ; c’est la différence fondamentale avec le nomadisme. La transhumance suppose l’existence d'une population sédentaire qui a d'autres activités que celles de l'élevage”14. Même s'il existe de nombreuses formes de transition entre nomadisme pastoral et transhumance, la frontière a cependant le mérite d'être bien tracée. Ajoutons que le nomadisme pastoral, qui est connu à d'autres époques ou en d'autres lieux de l'Antiquité classique15, n'est pas littérairement attesté en Grèce classique et hellénistique, ce qui ne signifie pas qu'il n'a pas existé16.
7La frontière entre la transhumance et les autres formes de vie pastorale où les troupeaux sont appelés à se déplacer est plus floue. Lorsque le bétail se contente d'aller d'un pâturage de plaine à un pâturage situé sur un versant dominant cette plaine, le déplacement n'affecte alors qu'un axe vertical simple ; la distance parcourue n'a plus rien à voir avec celles que l’on rencontre dans les cas de transhumance méditerranéenne : en Espagne, au xvie s., certains troupeaux traversaient toute la péninsule17 et, dans le sud-ouest de la France, où le phénomène avait certes une ampleur moindre, les déplacements conduisaient pourtant les animaux des rives de la Gironde aux vallées de l'Ossau18. La distance parcourue par le bétail est donc un premier critère de différenciation. Un autre tient à l'importance des troupeaux : à la belle époque de la transhumance castillane, c'étaient plus de trois millions de bêtes qui chaque année parcouraient la péninsule. Dans les années vingt du xxe siècle, alors qu'elle était déjà depuis longtemps en déclin, la transhumance provençale impliquait encore 300 000 moutons chaque année. Ce sont là des chiffres d'ensemble, mais un seul troupeau pouvait compter jusqu'à 20 000 animaux19.
8Ces rappels étaient nécessaires pour bien savoir de quoi l'on va parler. Lorsqu'au printemps, un berger conduit une centaine de moutons et de chèvres de leurs pâturages de plaine déjà desséchés aux versants qui les surplombent, à une distance de quelques kilomètres, et lorsque ce berger passe l’été avec ses chiens, dormant dans une roulotte ou un petit abri après avoir parqué ses moutons, il n’est pas possible de parler de transhumance véritable, mais seulement de vie pastorale de montagne ou d'estivage20. De telles pratiques, bien connues dans les Alpes où elles sont appelées inalpage, ont quelquefois été qualifiés de petite transhumance ou de transhumance verticale, mais l’expression doit être évitée pour ne pas prêter à confusion21. Pour la Grèce ancienne, il faut donc se poser la question suivante : les mouvements du bétail et l’importance des troupeaux mis en jeu dans la Grèce classique et hellénistique sont-ils suffisants pour que l’on puisse parler de transhumance22 ?
3. Les attestations littéraires d'une transhumance à longue distance dans le monde grec
9Les témoignages littéraires invoqués en faveur de la transhumance sont un extrait de l'Œdipe Roi de Sophocle et un passage d'un discours de Dion Chrysostome. Dans Sophocle, il est question d'un berger corinthien mis en présence d'un vieux serviteur du roi Laïos : “Je suis bien sûr, dit-il, qu'il se souvient du temps où, sur le Cithéron, lui avec deux troupeaux, et moi avec un, nous avons tous les deux vécu côte à côte, à trois reprises pendant six mois, du début du printemps au lever de l'Arcture. L'hiver venu, nous ramenions nos bêtes, moi dans ma bergerie, lui aux étables de son maître”23. Dion Chrysostome témoigne d'une pratique semblable dans l'Eubée de la fin du ier s. p.C. : l'hiver les troupeaux d'un riche propriétaire restaient en plaine, mais l'été, des bergers salariés les conduisaient vers les pâturages de montagne (λειμῶνες) où l'herbe était toujours verte et où l'eau ne manquait pas. La description de cet estivage est particulièrement réaliste : on y voit les chiens qui surveillent le troupeau et accompagnent leurs maîtres à la chasse, les cabanes (σκηναί) où les bergers passent la nuit et le parc de bois pour les jeunes animaux (αὐλὴ διὰ ξύλων)24.
10Ces deux passages appellent cependant quelques réserves. Le témoignage de Dion Chrysostome est hors des limites chronologiques. La scène est en effet assez précisément datée à une époque où l'affaiblissement du peuplement et l'intégration de la Grèce à l'Empire avaient profondément modifié la vie agricole25. De plus, il n'est pas certain que le genre de vie pastorale décrit corresponde à la véritable transhumance méditerranéenne : les deux bergers de Dion sont des bouviers alors que l'on attendrait plutôt du petit bétail26. Enfin, nous ignorons quelle distance séparait les pâturages de montagne de ceux de plaine : nous n'avons peut-être là qu'un cas de vie pastorale de montagne.
11Reste donc un seul témoignage explicite : celui de Sophocle. La description est particulièrement réaliste et tous les éléments d'une véritable transhumance sont là. Pour autant, peut-on considérer cet unique témoignage littéraire comme une source imposant l'existence de la transhumance dans la Grèce classique et hellénistique ?
4. Les sources épigraphiques et la transhumance
12Les partisans de la transhumance telle que nous l'avons définie s'appuient également sur la documentation épigraphique que nous avons rassemblée ici. Selon eux, elle prouve que les frontières internes du monde grec n'étaient pas un obstacle au développement de la transhumance, car des accords pouvaient être conclus, permettant le passage des troupeaux. Entendons-nous bien sur le type de documents qui prouveraient incontestablement l'existence de mouvements de transhumance : ce devraient être des traités contenant des clauses pour faciliter les déplacements des troupeaux et liant entre elles trois cités ou plus ou bien deux cités non limitrophes. En effet, de telles clauses entre deux cités voisines ne prouvent tout au plus que le désir d'éviter des querelles entre bergers lorsque les animaux, en été, sont en train de paître en montagne, dans la zone frontalière.
13St. Georgoudi s'est plus spécialement attachée aux traités liant Myania avec Hypnia et Aigai avec les Olympènoi (no 15 et 51), ainsi qu'à l'inscription sur les droits de pâturage de Tégée (no 6). Mais les deux premiers documents ne correspondent pas aux critères fixés, car ils lient deux cités limitrophes. Le traité entre Myania et Hypnia ne concerne que les bergers des deux cités voisines et ne prévoit rien pour ceux qui ne sont ni Myaniens ni Hypniens. Prétendre que leur bétail continuait sa route pour se rendre sur des pâturages plus éloignés relève de l'extrapolation27.
14Le traité entre Aigai et les Olympènoi n'accorde d'exemption fiscale qu'à des catégories très précises de petit bétail (chevrettes, agneaux) ; les béliers et les brebis ne seront exemptés que des taxes sur la laine. Les déplacements de bétail concernés par ce texte ne sont peut-être pas liés à la vie pastorale, mais plutôt au commerce de la laine28. Les facilités accordées par ce texte à d'éventuels bergers transhumants paraissent donc bien réduites29.
15La loi sacrée d'Aléa Athéna à Tégée (no 6) peut difficilement être prise en considération. Ce texte pose de graves problèmes de compréhension et les animaux dont il est question dans la clause utilisée par St. Georgoudi (1. 15-19) sont clairement désignés comme du bétail sacré (hιερὰ πρόβατα, 1. 15). Il n'y a pas de raison de croire qu'ils n'appartenaient pas au sanctuaire30 et que leurs déplacements les conduisaient hors de la cité de Tégée. Les autres animaux concernés par ce texte étaient propriété du personnel du sanctuaire et peut-être des pèlerins.
16Si l'on élargit encore cette enquête, on constatera que tous les textes (sauf un peut-être) mettent en jeu deux cités voisines : c'est le cas dans le traité entre Milet et Héraclée du Latmos. La seule exception éventuelle est fournie par celui que Hiérapytna a conclu avec Priansos (no 45). Les deux cités sont situées sur la côte méridionale de la Crète, mais peut-être séparées entre elles par les territoires de trois autres cités. Mallos, celle des Arcadiens et celle de Biannos, si l’on s'en tient à la géographie des cités crétoises proposée par un bon connaisseur de ces problèmes, A. Chaniotis31. Le point est d'importance, car il a des conséquences sur notre compréhension de la vie pastorale en Crète orientale. Si l’on écarte la possibilité d’une frontière commune entre Priansos et Hiérapytna32, il est évident que dans ce cas, les bergers de la seconde ne pouvaient pas profiter de leur droit de pâturage sur le territoire des Priansiens sans passer par celui de deux autres cités. Le passage du bétail pouvait être facilité par des accord d'isopolitie passés entre Hiérapytna et les cités qui séparaient son territoire de celui de Priansos33. Tout se passe donc comme si, à l'époque hellénistique, Hiérapytna avait mené une politique active visant à obtenir l'usage des pâturages situés sur les flancs méridionaux des montagnes de Crète orientale.
17A l'exception donc des quelques vers extraits de l'Œdipe Roi de Sophocle et peut-être du traité entre Hiérapytna et Priansos, aucun document ne prouve l’existence de la transhumance dans la Grèce classique et hellénistique. Notre sentiment est que la vraie transhumance était effectivement inconnue d'une grande partie du monde grec au ier millénaire a.C. et que la vie pastorale était alors dominée par des déplacements à courte échelle, semblables en cela à l'inalpage34.
18Pour apporter un ultime argument, il faut chercher la raison d’une telle absence dans l'objection soulevée il y a un siècle par Sorlin-Dorligny dans le Dictionnaire des Antiquités, celle qui a trait aux frontières politiques qui seraient un obstacle à la transhumance. En effet, la carte des routes de la transhumance dans la Méditerranée du milieu du xxe siècle, telle que l'a fournie Braudel35, permet de constater que, dans la péninsule ibérique, les routes de transhumance ne franchissent pas la frontière hispano-portugaise. Le cas de l'Italie est encore plus intéressant : à une époque où l'unité italienne avait été réalisée depuis un demi-siècle, les anciennes frontières semblent encore former un barrage aux itinéraires des troupeaux. En Italie centrale et méridionale, ces déplacements respectent toujours la frontière qui séparait les États pontificaux du Royaume de Naples36. L'existence d'un État centralisé semble donc avoir été une condition indispensable au développement de la transhumance : dans les Balkans, par exemple, elle n'a pris son essor qu'avec la constitution de l'Empire ottoman et a commencé à décliner au rythme des indépendances nationales.
19Il y a donc des conditions politiques et sociales indispensables pour le développement de la transhumance : il faut pouvoir imposer la primauté des intérêts d'éleveurs qui ne sont pas, en même temps, impliqués dans l'agriculture37. Force est de constater que ces conditions n'étaient pas réunies dans le monde des cités grecques avant l'époque impériale. Seul le cas de la Crète orientale à l'époque hellénistique montre une évolution possible des mouvements pastoraux habituels entre pâturages de plaine et de montagne proches vers une véritable transhumance. Mais la cité d'Hiérapytna, pour y parvenir, a dû mettre en œuvre une véritable politique expansionniste, notamment par la conclusion de traités de sympolitie. Vouloir introduire de toute force la transhumance dans la Grèce classique et hellénistique, c'est se laisser aveugler par l'idée qu'il s'agit là d'une pratique pastorale inhérente au contexte géographique du monde méditerranéen, comme si seul comptait le déterminisme géographique. Il y a aussi là une conséquence de la fascination exercée sur les anthropologues par l'élevage nomade, considéré comme la forme à la fois la plus noble et la plus achevée de la vie pastorale38.
20Une autre leçon pourrait être tirée : c'est que la cité est bien une structure essentielle de la civilisation grecque puisque l'élevage a dû s’y adapter39. La vie pastorale dans le monde grec a dû trouver d'autres solutions, notamment par le biais d'une plus grande intégration entre agriculture et élevage : le cas des Cyclades, comme nous avons essayé de le montrer plus haut, est révélateur de l'intensité que ces liens ont pu prendre, tandis qu'ailleurs, on se contentait de mouvements à plus faible échelle.
Notes de bas de page
1 Il a existé d'autres formes de transhumance en Europe : la transhumance des porcs et celle des abeilles par exemple, voir Moriceau 1999, 184-189, pour celle des porcs. La transhumance des abeilles est connue pour l'Antiquité classique, voir Columelle 9.14.18-19, qui en cite des exemples dans le monde grec (ainsi entre l'Achaïe d'une part et l'Attique et l'Eubée d'autre part).
2 Sorlin-Dorligny 1918, 926, n. 18 : “la transhumance n'existe point en Grèce jusqu'à l’unification par les Romains”.
3 Braudel 1966, 1.76-92.
4 Georgoudi 1974.
5 Voir J. et L. Robert, Bull. ép., 1975, 114. Daverio-Rocchi 1988a 220-225, reprend les conclusions de St. Georgoudi.
6 Hodkinson 1988 et Skydsgaard 1988.
7 Hodkinson 1988, 56, parle de “short-range infield-outfield movements of stock”, position réaffirmée dans Hodkinson 1996.
8 Opinion qui se retrouve naturellement dans Isager & Skydsgaard 1992, 99-101.
9 Jardé 1925, 25-30, conclut son étude des conditions de production et des amendements sur une note pessimiste : “De l'étude des techniques, il ressort que l'agriculture grecque n'a jamais été intensive et que, très vraisemblablement, les progrès agricoles ont été insuffisants à modifier la production”. Amouretti 1986, 62-63, allait dans le même sens : “Certes la fumure animale n'est pas ignorée, mais la stabulation du gros bétail est rare, le pacage des troupeaux dans les chaumes souvent interdit par crainte des dégâts aux arbres, probablement. La fumure animale devient minoritaire” (mais fauteur pense que les fumures végétales venaient compenser ce manque et amélioraient les rendements). Osborne 1987, 47-52 (“Ancient literature tends to treat pastoralism and arable farming as exclusive options”, p, 47) s'inscrit dans cette même optique.
10 Hodkinson 1988, 38-51, spécialement.
11 L'article de Skydsgaard 1988 est la preuve de cette opposition que l'on retrouve dans Sallares 1991, 382-386 : “Thus it is correct to maintain that animal husbandry and cultivation of arable land were not properly integrated in antiquity”.
12 Forbes 1994 qui suggère en outre de tenir compte de la classification que l'office national grec de statistiques fait des têtes de bétail, les répartissant entre : animaux élevés à la ferme, animaux élevés en troupeaux, animaux élevés de façon nomade. Voir aussi Forbes 1995 : cette dernière étude est parue après la soutenance de notre thèse. Les conclusions qu'elle indique rencontrent les nôtres, vers lesquelles d'autres chemins nous avaient conduit. Des réflexions allant dans le même sens figurent dans la synthèse du colloque de Cambridge sur la vie pastorale : Garnsey 1988, en particulier p. 198 sq.
13 L'effort de définition que l'on note chez Waldherr 1999, 564-565, qui traite de la transhumance dans l'Antiquité classique, a le défaut de baptiser toute forme de déplacements de troupeaux de ce nom et oblige à distinguer de nombreuses sous-catégories de transhumance. Cette tendance, que l'on trouvait déjà chez Pasquinucci 1979, 80-84, à propos de l'Italie romaine, ne peut que conduire à des confusions.
14 Wolkowitsch 1966, 119. Voir aussi, parmi bien d'autres, Veyret 1951, 171-172, et Blache 1933, 17.
15 Le nomadisme pastoral est typique des confins de la zone tempérée avec la zone désertique : voir Texidor 1987. A l'époque impériale, le nomadisme était peut-être pratiqué par une tribu syrienne, les Safaïtes, mais cela reste l'objet de discussion : voir Sartre s.d.
16 Les fouilles de la nécropole de Vitsa en Épire semblent bien montrer qu'elle appartenait à des pasteurs nomades : voir ci-dessous p. 403-404.
17 Voir Braudel 1966, 1. 82 : la grande transhumance en Espagne entraînait des parcours de plus de 800 km. Seuls les moutons élevés pour la laine peuvent endurer de tels trajets que ne supportaient ni des bovins ni des ovins élevés pour le lait : Veyret 1951, 180. Le développement de la transhumance et celui de l'industrie lainière vont de pair, leçon qu'il faut retenir pour l'étude de ce phénomène dans l'Antiquité.
18 Derruau 1975, 1949.
19 Derruau 1975, 1198, et Veyret 1951, 182. Arbos 1923, 575-576, pour la description du voyage d'un troupeau transhumant (il cite le cas, en 1790, d'un troupeau de 12 000 têtes conduit par 35 hommes, ce qui fait en moyenne un berger pour s'occuper de 350 animaux).
20 L'expression “vie pastorale de montagne” est d'Arbos 1923, 12-15. Une grande partie de cette thèse est consacrée à la description de cette forme particulière de vie pastorale qui est attestée bien au-delà des Alpes comme dans le Massif Central ou les montagnes balkaniques. Voir aussi Wolkowitsch 1966, 125-131. En Pamphylie et Pisidie, les choses se présentent sous un aspect différent dans la mesure où la transhumance apparaît comme très marginale : l'opposition se situe plutôt entre la pratique de l'estivage et celle du véritable nomadisme, voir Planhol 1958, 187-190 (il définit l'estivage comme des migrations pastorales effectuées au sein d'une même commune, en direction des hauteurs dominant le terroir, alors que le nomadisme, comme la transhumance, se déroule “par-delà des territoires intermédiaires”).
21 L'expression est employée par Pasquinucci 1979, 82. Ces problèmes de vocabulaire et de définition sont importants et l'on ne peut guère se faire comprendre lorsque l'on utilise une définition de la transhumance aussi imprécise que celle qui figure dans l'ouvrage de Isager & Skydsgaard 1992, 99 : “Transhumance is a type of cattlebreeding where cattle change between summer grazing in the mountains [...] and in the winter season grazing in the lowland [...]”.
22 Hodkinson 1988, 52-54, est, à notre connaissance, le seul à avoir signalé que la faiblesse des distances parcourues par les troupeaux dans la Grèce antique empêche de parler de transhumance : “Even in cases where some vertical movement is likely or certain, it appears that the scale of movement was often relatively short-distance”. Dans un autre article, il parle de “infield-outfield movements”, Hodkinson 1990, 144.
23 Sophocle, Œdipe Roi, 1133-1 139 : Εὖ γὰρ οἶδ᾿ὅτι ǀ κάτοιδεν, ἦμος τὸν Κιθαιρῶνος τόπον ǀ ὁ μεν διπλοῖσι ποιμνίοις. ἐγὼ δ᾿ἑνὶ ǀ ἐπλησίαζον τῷδε τἀνδρὶ τρεῖς ὅλους ǀ ἐξἦρος εἰς ἀρκτοῦρον ἑκμήνους χρόνους· ǀ χειμῶνα δ᾿ ἤδη τἀμά τ’εἰς ἔπαυλ’ἐγὼ ǀ ἤλαυνον οὖτός τ᾿εἰς Λαΐου σταθμά. (trad. P. Mazon, CUF). Voir Georgoudi 1974, 167-169, pour l'étude de ce passage.
24 Dion Chrysostome 7 (Euboïque). 11-22, mais c'est presque tout ce discours qu'il faut lire. Voir Georgoudi 1974, 169-170.
25 Voir les réflexions d'Hodkinson 1988, 58, et la remise de ce passage dans son contexte chronologique et démographique par Alcock 1989 et Alcock 1993, 87-88.
26 Dion Chrysostome 7 (Euboïque). 11 : les bergers sont des μισθοῦ βουκόλοι, βοῦς νέμοντες, 13 : ils disposent d’un parc μόσχων ἕνεκεν.
27 Georgoudi 1974, 175-176, croit y voir les signes d'un “déplacement par étapes” vers des pâturages d'été plus éloignés.
28 Georgoudi 1974, 177, semble avoir été induite en erreur en liant ἐρίων au mot qui précède, ἀρνηάδες, et non à celui qui suit, ἀτέλεες (1. 15-16) comprenant ainsi qu'il était question de “moutons à laine” et n'apercevant donc pas que l'exemption fiscale portait sur les laines (ἐρίων ἀτέλεες).
29 Voir aussi les remarques d'Hodkinson 1988, 53.
30 Georgoudi 1974, 179, semble croire le contraire.
31 Chaniotis 1996, 1 17 et 259-260. Voir aussi les conclusions de deux articles consacrés par ce même auteur à la question de l’élevage en Crète classique et hellénistique : Chaniotis 1995, 72-77, et Chaniotis 1999b, 202-205.
32 Pendant longtemps, l'existence d'une frontière commune était admise : voir par exemple Gauthier 1972, 316. Guizzi 1999, 239, reste prudent au sujet de l'absence de frontière entre Priansos et Hiérapytna et en ce qui concerne les conséquences qu'en tire A. Chaniotis.
33 On connaît un accord d'isopolitie entre Hiérapytna et les Arcadiens, et une autre inscription semble attester d'un traité du même genre liant Hiérapytna et Biannos (Chaniotis 1996, no 14 pour le traité avec les Arcadiens, et no 35 pour celui avec Biannos).
34 En d'autres termes, nous admettons l'existence de ce que certains appellent petite transhumance ou transhumance verticale, même si nous récusons l'expression.
35 Braudel 1966, 1.88-89.
36 Wolkowitsch 1966, 121, opposant le cas de l'Italie à celui de l'Espagne, écrit : “Au contraire, le fractionnement politique en Italie a limité les déplacements et. de ce fait, amoindri un essor de la transhumance que les conditions naturelles appelaient tout autant que dans les péninsules voisines”.
37 C'est une remarque faite à plusieurs reprises, comme par Halstead 1987a, 79-81, ou par Cherry 1988. Ce dernier étudie certes une période nettement antérieure (viiie millénaire-fin des âges obscurs), mais constate que les circonstances historiques et socio-économiques nécessaires à la mise en place de la transhumance ne furent réunies qu'à l'époque mycénienne. L’histoire de la transhumance italienne à la fin de l'époque républicaine est liée au développement de l'ager publicus après la deuxième Guerre punique : voir Sabattini 1977 qui souligne les causes politiques de la transhumance. Corbier 1991 et Corbier 1999 pose le problème de la continuité entre la transhumance antique et moderne en Italie en insistant sur l'importance des débouchés de la laine.
38 C'est la constatation que fait Forbes 1995, 325-338. Halstead 1987b, 79-81, avait déjà essayé de montrer les dangers de l'idée selon laquelle la transhumance s’était s'imposée d'elle-même dans le monde méditerranéen.
39 Il n'est guère probable que les royaumes hellénistiques aient pu pallier cet inconvénient.
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