Épigraphie et identité. Autour de quelques lieux de mémoire dans la Crète d’époque romaine
p. 219-230
Texte intégral
1Les années 69 à 67 a.C. constituèrent un tournant majeur dans l’histoire de la Crète. C’est en effet à compter de la campagne de Q. Caecilius Metellus que l’île entre dans le giron romain. Pendant toute la période des guerres civiles, les insulaires sont ballotés entre les différentes forces en présence, de Pompée à César, et de Cassius et Brutus à Marc-Antoine et Cléopâtre, en attendant la réorganisation par Octave après Actium. La Crète, durablement rattachée à la Cyrénaïque1, connut pendant le Haut-Empire une période de prospérité économique2 et de paix, échappant notamment à la révolte juive qui ravagea Cyrène sous Trajan.
2L’un des phénomènes majeurs qui apparaît dès le ier siècle a.C. est l’arrivée et l’installation d’Italiens en Crète. Deux inscriptions (ier s. a.C. ou ier s. p. C.) attestent l’activité de marchands italiens signalés comme des cives Romani qui Gortynae negotiantur dans la capitale de la nouvelle province3, tandis qu’au moment de la fondation de la colonie de Cnossos, la cité de Capoue reçoit une partie de son territoire, entraînant l’arrivée de nombreux Italiens4. Les recherches prosopographiques de M. W. Baldwin Bowsky ont d’ailleurs montré toute l’importance qu’avaient revêtue ces immigrants dans l’évolution de la société et de l’économie insulaires5. L’installation d’Italiens, l’intégration à l’Empire et au réseau du grand commerce méditerranéen eurent pour conséquence la pénétration d’éléments romains en Crète, à partir des cités romanisées de Gortyne, de Hiérapytna, de Lyttos ou de Cnossos. Ces changements furent incarnés par le nouveau cadre administratif et politique qu’institua le ϰοινὸν τῶν Κρητῶν et entraînèrent à leur tour un cosmopolitisme inédit qui rendit nécessaire le dépassement des cadres proprement civiques et du patriotisme local hérité de l’époque hellénistique. La période romaine a donc modifié en profondeur les structures de la société crétoise et, en conséquence, les modes d’expression des identités qu’elles avaient jusqu’alors encadrées.
3Les historiens ont cherché à définir et à quantifier ces identités, en opposant ce qui était romain à ce qui restait crétois6. Dans le premier groupe se rangent, pêle-mêle, l’octroi de la citoyenneté romaine, la diffusion du latin, la pratique du culte impérial, les nouvelles opportunités de carrière dans l’Empire ou encore l’explosion du goût pour les spectacles à la romaine. Dans le deuxième, la persistance du grec et du dialecte dans les inscriptions, la relativement faible pénétration des cultes romains, mais surtout le maintien de la religion traditionnelle sont portés au crédit de la défense d’une identité crétoise face à la “romanisation”7. Ces faits sont indéniables, mais cette approche quelque peu manichéenne demeure néanmoins partielle et incomplète en ce sens qu’elle semble renvoyer dos à dos deux modèles de société imperméables l’un à l’autre. Bien plus, elle se fonde sur deux simplifications historiographiques que l’on s’accorde pourtant désormais à dépasser. Le premier topos consiste à tout faire remonter à l’éclat de la civilisation minoenne. À lire certaines études, la société crétoise, ses croyances et ses structures, trouveraient leur origine dans ce passé certes glorieux mais néanmoins distant d’un millénaire et demi ; Susan Alcock a bousculé cette vision des choses en insistant sur les évolutions chronologiques et historiques8. Le second ramène l’identité de la Crète à son insularité : l’irrédentisme crétois et la fierté supposée de ce peuple, thématiques qui reviennent souvent dans l’historiographie, constitueraient ainsi des caractéristiques immuables, en sorte que l’identité crétoise existerait de facto et que l’île serait réfractaire à toute influence extérieure9. Héritière du combat pour l’hellénisme au xixe siècle et de la résistance aux forces nazies après la bataille de Crète de 1941, cette vision des choses pose problème puisqu’elle nie toute évolution historique et toute notion d’échange culturel et d’interaction avec l’extérieur.
4Susan Alcock et Ilaria Romeo10 sont sorties de ces schémas et démontrent au contraire la singularité de la période impériale. Ces quelques siècles après la conquête de Metellus connaissent en effet une modification des représentations que les Crétois se faisaient de leur propre identité. S. Alcock11 oppose une époque hellénistique marquée par de continuels conflits entre les cités propices à générer des identités proprement locales, à une période romaine pendant laquelle l’appartenance à un espace méditerranéen élargi, l’intégration des élites et la participation au Panhellénion, entre autres, favorisèrent les échanges et débouchèrent sur la naissance d’une identité davantage pan-crétoise. I. Romeo a non seulement montré que les Romains s’étaient approprié de nombreux symboles crétois, en particulier le panthéon local, abondamment représenté sur les émissions monétaires, et les revenus de l’ancien sanctuaire de Diktynna, mais elle a également mis en évidence des évolutions chronologiques au sein même de la période impériale. À une époque julio-claudienne et flavienne pendant laquelle le pouvoir central tente de gagner les populations en mettant à son service les mythes locaux succède avec Trajan, et surtout avec l’intégration au Panhellénion, une période au cours de laquelle les identités crétoises se fondent dans un ensemble panhellénique : les Crétois sont amenés à réaffirmer leur grécité au moment où l’on redécouvre les liens avec Athènes et sa culture. La perception de la Crète par les Romains et l’expression de l’identité crétoise fluctuent bien selon les besoins changeants de l’élite dirigeante, celle de Gortyne comme celle de Rome, et elle se ressent différemment selon l’appartenance sociale, avec des notables qui se “romanisent” et des couches inférieures qui “résisteraient” davantage.
5Ces débats étaient utiles à résumer car ils autorisent un nouveau regard sur le sujet qui nous occupe. Ainsi, s’il est effectivement possible de distinguer des éléments italo-romains12 et d’autres proprement crétois, il est envisageable de les analyser en termes d’interaction culturelle et d’influence réciproque, plutôt que de les opposer. D’autre part, la construction des identités crétoises ne repose pas entièrement sur l’héritage minoen : la période hellénistique et la période romaine ont connu des changements nés du contexte politique et des évolutions sociales et, en réalité, le passé crétois est sans cesse réinventé et l’expression des identités est en constante évolution. Enfin, à côté du facteur chronologique, la prise en compte des espaces semble également être un important cadre d’analyse : les différentes échelles de rayonnement de l’expression d’une identité (sanctuaire, cité, île entière) sont mouvantes pendant le Haut-Empire, en raison de l’existence du koinon et d’une approche davantage pan-crétoise.
6La période romaine s’individualise donc grâce à une meilleure attention portée au temps et aux espaces, et elle connaît des évolutions, souvent niées, mais qui présentent pourtant un intérêt13. De nouvelles approches, empruntées à la sociologie ou à l’anthropologie sociale, notamment à travers l’étude des représentations, peuvent ainsi éclairer d’une autre manière les développements et les formulations d’une identité crétoise originale propre à la période allant du ier s. a.C. au iiie s. p.C.
7Nous avons choisi de nous intéresser, à partir de trois exemples, à la manière dont les monuments épigraphiques, dans leur matérialité ou par leur contenu, peuvent devenir des marqueurs d’identité et modifier l’image que les Crétois se faisaient d’eux-mêmes. À Gortyne, la conservation du “Code” dans l’odéon romain témoigne d’une volonté de perpétuation des anciennes lois de la cité, à une époque où elles semblent pourtant obsolètes. Dans le courant du iie ou du iiie s., les fidèles et le personnel religieux du sanctuaire de Zeus Diktaios à Palaikastro recopient un vieil hymne aux Courètes, pour démontrer leur attachement aux cultes traditionnels qui connaissent un renouveau sous l’Empire. À Hiérapytna enfin, le génos des Étéanorides revendique, par l’érection d’une inscription, son ancestralité, qu’il fait remonter à la fondation de la cité. Il nous a semblé que ces différents usages de l’inscription (conservation matérielle, republication d’un ancien texte, publicité familiale à valeur civique) lui donnaient la dimension d’un monument historique destiné à édifier la population, autrement dit, que les documents eux-mêmes agissaient comme autant de lieux de mémoire, concrets ou symboliques14. Si les horizons du discours touchent des publics plus ou moins éloignés géographiquement, si les acteurs qui produisent ces textes sont divers (cité, fidèles, famille), ils poursuivent cependant le même objectif : celui de renforcer une identité insulaire, locale ou pan-crétoise. Le document épigraphique est donc utilisé dans les stratégies d’affirmation ou d’amplification de l’identité de l’île et de ses cités, au même titre que peuvent l’être, par exemple, la réfection des bâtiments anciens ou la réécriture des mythes.
8La première inscription qui nous semble agir comme un marqueur identitaire des Gortyniens, et même des Crétois en général, est naturellement la “Grande Inscription” de Gortyne, qui est préservée et exposée au cœur de l’espace politique de la cité depuis sa rédaction vers le milieu du ve siècle a.C. jusqu’à la fin de l’Empire romain.
9Le document, que les modernes appellent aussi le “Code” ou les “Lois” de Gortyne, est l’un des plus célèbres textes de la Grèce antique, depuis sa découverte en 1884 par F. Halbherr15. Il est rédigé en boustrophédon et court sur douze colonnes réparties sur quatre rangées de blocs de tuf, pour une longueur de 8,70 m et une hauteur d’environ 1,70 m. Une cinquième assise, toutefois, manque à l’ensemble, puisque des colonnes sont incomplètes ; ces dernières comptent environ 55 à 56 lignes : la longueur de l’inscription (plus de 620 lignes) est donc exceptionnelle.
10Le “Code” était à l’origine affiché dans un édifice circulaire que l’on suppose avoir été bâti spécialement à cet effet, aux côtés d’autres lois dont des fragments ont été retrouvés à proximité. Antonino di Vita suggère que cette structure servait de lieu de réunion pour des magistrats, avec un podium pour les orateurs et un autel de Zeus Agoraios16. L’ensemble fut démantelé au ive ou au iiie siècle pour laisser place à une structure quadrangulaire, dont un mur a été découvert dans un sondage de 2004. Celle-ci est interprétée comme un bouleutérion17 dans lequel la “Grande Inscription” fut réinstallée. Le bouleutérion hellénistique fut à son tour détruit au moment de la conquête romaine de l’île : quatre lettres gravées sur une marche de l’escalier portent le nom Πανά[ρης], qui est un personnage connu pour avoir participé à la résistance crétoise à la conquête romaine entre 74 et 67 a.C. La destruction de l’édifice et le démantèlement de l’inscription doivent donc certainement être mis en rapport avec l’arrivée des armées romaines dans l’île. À ce moment-là, survient un événement intéressant pour l’histoire de l’inscription : les plaques, désormais désolidarisées les unes des autres à cause de la démolition du bouleutérion, furent numérotées afin de pouvoir les réarranger à l’avenir18. Il s’agit en réalité d’une double numérotation, l’une pour la disposition physique des blocs, l’autre pour la succession des colonnes. Les lettres présentent certaines particularités paléographiques et une datation au ier s. a.C. est acceptée par les historiens. Keyser suggère que ce sont les blocs qui auraient d’abord été numérotés, puis que leur mauvais assemblage aurait obligé à faire de même pour les colonnes, peut-être dans un climat de précipitation dû à la conquête. La décision de numéroter les blocs et les colonnes servait en tout cas un dessein identitaire : elle témoigne d’une volonté de restituer le “Code” dans son état originel après les soubresauts politico-militaires de la fin de la période républicaine. À l’origine de ce souhait de préservation se trouvaient les élites de la cité, mais aussi certainement les Romains eux-mêmes, qui, préoccupés de se concilier les populations, auraient souhaité perpétuer un marqueur fort sur lequel reposaient, depuis l’époque archaïque, les structures sociales et institutionnelles crétoises tout en contrôlant sa réinstallation.
11Car l’inscription fut immédiatement remontée dans l’odéon, qui prend la place du bouleutérion hellénistique aux ier s. a.C.-ier s. p.C. dans la désormais nouvelle capitale de la province de Crète-Cyrénaïque. D’un édifice quadrangulaire, on passe à un monument circulaire qui réutilise certaines fondations du premier monument précédant le bouleutérion19. Au cœur de l’espace qui constituait l’ancienne agora et où était célébré le culte impérial, l’odéon présentait dix-huit rangées de gradins, avec une orchestra d’un peu plus de neuf mètres de diamètre pavée de plaques de marbre blanc et gris ; la scène comportait trois portes et quatre niches destinées à recevoir des statues dont un Hermès et une réplique de l’Héra Borghèse. Les plaques du “Code” furent alors encastrées dans le parement interne incurvé du déambulatoire extérieur de l’odéon, où on peut les admirer encore aujourd’hui, sous un auvent de protection moderne. La préservation, à l’époque augustéenne, d’une inscription portant d’anciennes lois révèle une claire volonté de conservation du patrimoine juridique et législatif de la cité. La thèse de C. Gorlin20, qui soutient que le “Code” fut “republié” au moment de la provincialisation parce que certaines de ses lois auraient encore servi pour les affaires ne ressortissant pas du tribunal provincial n’a pas emporté l’adhésion des historiens. Si C. Gorlin a raison de relever que de nombreuses institutions classiques existent encore sous l’Empire, A. Di Vita a bien montré que les “Lois” ne pouvaient plus posséder une quelconque valeur légale sous Auguste21. D’une part, si les blocs sont disposés dans un lieu de passage fréquenté par les magistrats et les dirigeants de Gortyne, ils se trouvaient dans un endroit peu éclairé et la lecture devait en être délicate. D’autre part, l’alphabet archaïque, la rédaction en boustrophédon et la langue ne pouvaient plus être réellement compris plusieurs siècles après la rédaction du texte. Enfin, il faut probablement suivre Strabon (10.4.22), qui affirme qu’“il ne reste pas grand-chose de ces coutumes [Strabon vient de décrire les institutions traditionnelles de la Crète] et les Crétois s’administrent aujourd’hui dans la plupart des domaines, comme toutes les provinces, selon les édits de Rome, οὐ πολλὰ δὲ διαμένει τούτων τῶν νομίμων, ἀλλὰ τοῖς Ῥωμαίων διατάγμασι τὰ πλεῖστα διοιϰεῖται, ϰαθάπερ ϰαὶ ἐν ταῖς ἄλλαις ἐπαρχίαις συμβαίνει”. Une telle modification de l’exercice de la justice dans les provinces nouvellement administrées est d’ailleurs bien attestée par les édits d’Auguste retrouvés sur l’agora de Cyrène, principale cité de l’autre partie de la province22.
12L’odéon fut ensuite partiellement restauré en 100 p.C. par le proconsul L. Elufrius Severus (odeum ruina conlapsum restituit) probablement à la suite du séisme de 66 p. C.23. A. Di Vita a distingué une nouvelle réfection à la fin du iie ou au début du iiie s. de notre ère. Là encore, un tremblement de terre avait dû jeter bas le monument : la “Grande Inscription” fut détruite avec l’édifice avant d’être une nouvelle fois réinstallée, probablement grâce à la numérotation effectuée au ier s. a.C. ; les blocs qui n’avaient pas pu être replacés furent toutefois, semble-t-il, remployés dans des murs. Il s’agit ici de la troisième et dernière restauration du “Code”, qui devait rester exposé jusqu’au démantèlement définitif de l’odéon que les équipes italiennes situent aux alentours du règne de Justinien.
13L’histoire matérielle des blocs du “Code de Gortyne” est donc exceptionnelle. Les clauses juridiques et les principes de l’organisation sociale contenus dans le document devaient revêtir une importance symbolique suffisamment suggestive pour que les habitants de Gortyne aient souhaité les conserver et les laisser à la vue de tous pendant un millénaire, dans des bâtiments qui, tour à tour, constituèrent le centre de la vie publique de la cité. Malgré l’obsolescence des lois, les élites dirigeantes, désireuses de conserver leurs valeurs traditionnelles, et ce en plein accord avec les autorités romaines, choisirent de préserver cet élément patrimonial qui représente en lui-même tout ce que la Crète a apporté au monde hellénique, puisque les institutions crétoises étaient considérées comme les inspiratrices de nombreuses constitutions grecques, en particulier celle de Sparte (Hdt. 1.65 ; Arist., Pol., 2.1271b-1272b). Sa conservation témoignerait également de l’aspiration à préserver et à glorifier la figure de Minos dans son aspect de législateur : l’écriture en boustrophédon et la paléographie archaïque rappelleraient ainsi l’époque de l’antique roi de Crète24.
14Nous avons déjà rappelé que la langue et l’alphabet empêchaient certainement la majorité de la population de comprendre le texte : c’est donc moins le contenu que le support qui est ici considéré comme un vecteur essentiel de l’identité civique. L’inscription, dans sa matérialité, possède une dimension identitaire et patrimoniale à vocation désormais purement mémorielle. Point d’ancrage de la mémoire de Gortyne, le “Code” range la cité qui l’abrite au rang des plus hauts lieux de l’hellénisme puisqu’elle peut se prévaloir de l’origine des nomoi dans le monde grec. Lieu de passage pour la classe dirigeante de Gortyne, le déambulatoire de l’odéon, qui renfermait la “Grande Inscription” à l’époque impériale, était ainsi devenu un lieu de commémoration qui disposait d’un pouvoir évocateur non seulement pour les citoyens de Gortyne, mais également pour l’ensemble des Crétois, voire de tous les Grecs.
15En Crète orientale se trouvait l’un des plus importants et des plus anciens lieux sacrés de l’île. Le sanctuaire de Zeus Diktaios à Palaikastro, fondé vers le viiie s. a.C. mais héritier d’un haut lieu minoen, était considéré comme le centre religieux du peuple des Étéocrétois, dont Strabon (10.4.6) souligne l’autochtonie25. Caractéristique des sanctuaires ruraux de frontières très fréquents en Crète, il se situait sur le territoire de la cité de Praisos, avant que celle-ci ne soit détruite par Hiérapytna au milieu du iie siècle avant notre ère, toujours selon le témoignage de Strabon (10.4.12) ; la terre sacrée fut ensuite disputée entre Itanos et Hiéraptyna, vraisemblablement au bénéfice de cette dernière26. Là fut découverte en 1904 une stèle brisée en cinq fragments sur laquelle est inscrit un texte versifié que l’on interprète comme un hymne au Zeus Dictéen27. Le dieu est comparé à un kouros, et on y rappelle l’histoire des Courètes, qui dissimulèrent, sur la demande de Rhéa, le jeune Zeus pour le soustraire à la rage de son père Cronos. L’hymne était chanté autour d’un autel lors d’un rite de passage à l’âge adulte lié aux cycles de la végétation par de jeunes hommes (kouroi) qui avaient reçu l’éducation crétoise et qui étaient assimilés aux Courètes. Une seconde fonction de la déclamation devait être la confirmation des ententes territoriales entre les cités. La double volonté de préservation sociale et territoriale ne devait pas surprendre dans un sanctuaire extra-urbain28.
16La forme des lettres a conduit M. Guarducci à placer la gravure de l’inscription au iie ou plutôt au iiie s. de notre ère. Toutefois, il est admis que le texte lui-même remonte au ive ou au iiie s. a.C., en raison de l’usage du dialecte, du mètre utilisé et du style du poème. Les Crétois de l’époque du Haut-Empire avaient donc souhaité recopier et redonner à lire un hymne consacré à Zeus, qui avait été gravé une première fois durant la haute époque hellénistique et dont les rites et les croyances remontaient certainement plus haut encore dans le temps. Cette démarche trouve un écho dans deux phénomènes contemporains, eux aussi porteurs d’identité : le renouveau des cultes de Zeus et la résurrection de certaines structures sociales collectives qui avaient pourtant périclité à la fin de l’époque grecque.
17L’hymne témoigne donc, d’une part, du renouveau du culte de Zeus Diktaios et plus généralement de la vénération de cette divinité sous l’Empire. Cet aspect a déjà été relativement bien étudié et nous nous contenterons ici de rappeler que le culte du Mont Ida est réactivé à cette période29, et que certaines épiclèses locales, en particulier celle de Zeus Crétagénès, connaissent une ferveur importante30.
18L’hymne du sanctuaire de Zeus Diktaios renvoie, d’autre part, à l’éducation crétoise aristocratique, à vocation traditionnellement militaire, telle qu’elle est décrite dans le “Code” de Gortyne et chez plusieurs auteurs31. Les chants de Palaikastro rappellent les danses armées et l’instruction musicale qui avaient pour objectif l’apprentissage par les éphèbes des mythes locaux. L’époque impériale aurait donc connu une renaissance des usages sociaux antiques, ce qui semble confirmé par une inscription de Lyttos32. Des dons aux startoi y sont prévus à l’occasion des Théodaisia et des Velchania, deux fêtes vraisemblablement associées à l’initiation des jeunes gens, et les distributions doivent être réalisées ϰατὰ τὰ πάτρια, c’est-à-dire selon les pratiques ancestrales. Les startoi sont, en Crète, d’anciennes divisions du corps civique33 qui correspondent plus ou moins à la tribu qui existe ailleurs. Outre cette réapparition d’un terme archaïque, la distribution rappelle la pratique ancienne du financement des syssities en Crète, loué par Aristote34. La contribution aux repas était collective grâce aux terres et aux troupeaux possédés en commun par l’ensemble des citoyens, et la cité se chargeait de la redistribution sous la forme, notamment, de repas communautaires35. À l’époque de l’inscription de Lyttos, dans la seconde moitié du iie ou la première moitié du iiie s. p.C., les distributions sont publiques, surveillées par les magistrats, mais elles relevaient alors plutôt de la générosité des notables, qui concentraient dans leurs mains la propriété foncière. Indirectement, le texte montrerait donc la renaissance des syssities, abandonnées depuis longtemps, à l’époque impériale36. Lors de ces banquets, les hommes se réunissaient suivant des rituels codifiés, initiaient les plus jeunes et se remémoraient les événements marquants du passé local.
19En se situant dans une renaissance religieuse et sociale, la republication de l’hymne du sanctuaire de Zeus Diktaios s’inscrit dans un contexte de réaffirmation des usages sociaux, éducatifs et culturels traditionnels dans les cités crétoises des iie et iiie siècles de notre ère. Elle indique qu’il importait aux fidèles de revivifier les anciennes coutumes et de retrouver la portée communautaire des pratiques religieuses, désormais dans un sens plus culturel que territorial et politique comme à l’époque hellénistique. L’hymne, et l’inscription qui le porte, deviennent ainsi les symboles de ce passé réactivé et de véritables lieux de la mémoire collective régionale, à cette date avancée de l’Empire.
20Les inscriptions peuvent, enfin, servir à glorifier l’identité d’une famille. Au tournant de notre ère, le génos des Étéanorides fait graver sur la pierre la généalogie de la famille, en la faisant remonter jusqu’à la fondation de Hiérapytna : Ἐτεάνωρ Μελανθύρω. Οὗτος οἰϰιζομένας τᾶς Ἱεραπύτνας ἄϰμαζε. Τούτω γυνὰ Πύρρα ϰαὶ τέϰνα [….]νεων, Μελάνθυ[ος,.]λαρος, Ἐχοίτας, [……]υλίς, Ἐτύμα. Ἀπὸ Μελανθύρω [τ]ὸ ἐπ’ἀμὲ γένος· Μελάνθυρος, [….]ρανος Μελανθύρω, [---] : Etéanôr fils de Mélanthyros. Celui-ci resplendissait au moment où Hiéraptyna était fondée. Sa femme était Pyrra et ses enfants (…)néôn, Mélanthyros, (…)alaros, Echoitas, (…)ylis, Etyma. Généalogie depuis Mélanthyros jusqu’à moi : Mélanthyros, (…)ranos fils de Mélanthyros (…)37. Actuellement conservée au museo Maffeiano de Vérone, la stèle était ornée d’un fronton, mais la partie inférieure est malheureusement perdue, de sorte que nous restons dans l’ignorance du nombre total des descendants qui étaient mentionnés.
21La famille à l’origine de cette généalogie liste, depuis l’ancêtre mythique présent au moment de la naissance de la cité, les générations successives, jusqu’au personnage contemporain de l’érection du monument dont le nom n’a pas survécu. Le texte fait partie de la série des inscriptions généalogiques, bien connue de l’épigraphie grecque, qui appartiennent souvent à un contexte de tombe collective ou d’héroôn familial. Dans le cas du texte crétois en revanche, elle devait plutôt être érigée dans une tombe individuelle ([τ]ὸ ἐπ’ ἀμὲ γένος). Angelos Chaniotis fait le relevé des inscriptions généalogiques à partir de l’épitaphe milésienne du navarque Antigonos, datée c. 100 a.C. ou peu après38. Il rappelle les documents de Chios c. 450 a. C.39 et d’Oinoanda qui décrit la [γενεαλ]ογία de Licinia Flavilla40 ainsi que l’inscription généalogique de Cyrène, qu’il convient désormais de placer aux iie-iiie s. p.C. et non à l’époque hellénistique41. Le nom Etéanôr lui-même devait posséder une signification propre, puisqu’on ne le trouve, en dehors de Théra, qu’en Crète, et même uniquement à Hiérapytna42.
22En remontant à l’âge du mythe, la famille choisissait de s’inscrire dans l’Histoire et proclamait de la sorte une identité propre, à caractère privé et héroïque. Or, la cité de Hiérapytna, à cette époque, tentait de se faire reconnaître comme membre à part entière du peuple étéocrétois à travers un mythe de fondation complexe, que nous avons déjà rencontré à propos de l’hymne du sanctuaire de Zeus Diktaios43. Francesco Guizzi a bien remarqué que l’inscription des Étéanorides dépassait le cadre restreint de la glorification gentilice d’une famille et de la valorisation du lignage. Elle comportait également une dimension civique : en faisant remonter l’origine familiale à la naissance de la cité, elle proposait à ses concitoyens une nouvelle lecture de leur propre histoire, autrement dit, un cadre symbolique inédit propre à modifier la représentation que les citoyens de Hiéraptyna avaient d’eux-mêmes. L’inscription devient ainsi un monument commun et prend une dimension publique en garantissant la continuité de la cité à travers la généalogie d’une famille et en créant une mémoire partagée. Dans ce processus, la volonté d’autopromotion des Etéanorides et leur objectif de domination sociale demeurent prégnants, mais le destin parallèle de la famille et de la cité crée un “panthéon” civique renouvelé, à partir d’une initiative privée.
23Les trois textes, dans toute leur diversité, agissaient non seulement comme des marqueurs visuels par leur affichage dans l’espace urbain, sacré ou funéraire, en particulier dans le cas du “Code”, mais ils dépassaient cette simple fonction en spatialisant également la mémoire ; ils concrétisaient le souvenir en mettant en place une nouvelle géographie imaginaire44. Ils peuvent donc être érigés au statut de lieux de mémoire, en ce sens qu’ils répondent aux trois critères définis par P. Nora45. Ils possèdent, d’abord, une dimension symbolique et collective, puisqu’ils permettent aux populations de s’identifier à un texte, un chant ou une famille, modifiant de la sorte la perception de leur propre identité collective. Les différents usages que nous avons relevés : conservation matérielle, réécriture d’un vieux texte religieux et création d’une ascendance mythique et fictive, sont autant d’indices de la mise en place d’un processus de commémoration, et donc d’une volonté de conserver la mémoire, second critère défini par P. Nora. Enfin, on constate que la signification des inscriptions étudiées ici se modifie et s’autonomise à l’époque romaine : ce ne sont plus les “Lois” elles-mêmes qui font sens sous l’Empire, puisqu’elles ne sont plus utilisées dans le système judiciaire crétois, mais bien leur puissance commémorative d’un temps ancien où l’île était considérée comme le berceau des codes judiciaires du monde grec ; de même, la republication de l’hymne s’ancre dans un contexte de renouveau des cultes de Zeus propre à l’Empire, alors que la généalogie des Etéanorides vient revendiquer une identité crétoise venue du fond des âges à une époque où les sociétés insulaires se trouvaient à un tournant de leur histoire.
24En outre, trois échelles géographiques d’expression de l’identité paraissent se mêler à cette époque. Si l’on remarque encore un travail sur l’identité locale et civique (inscription des Étéanorides), il semble y avoir une volonté d’élargir les horizons : l’hymne renoue avec une supposée particularité régionale des Étéocrétois, qui englobe l’ensemble de la Crète orientale, tandis que la remarquable conservation de la “Grande Inscription” donne plutôt l’impression d’un rayonnement pan-crétois. Les Crétois de l’époque romaine s’inscrivaient donc dans des cercles identitaires plus ou moins larges qui ne sont pas contradictoires les uns avec les autres : aux identités locales s’ajoute à partir d’Auguste un sentiment pan-crétois représenté par le koinon, auquel toutes les cités ne participaient cependant probablement pas46.
25De cette recherche peuvent également se dégager deux autres conclusions préliminaires. Il semble en premier lieu que la conquête romaine ne soit pas tout à fait innocente dans les choix de conservation de la mémoire crétoise que nous avons examinés : c’est précisément à un moment où l’île risquait de connaître une crise identitaire en raison de l’arrivée d’éléments italiens que les Étéanorides ont choisi de se resituer dans l’histoire locale et que l’élite gortynienne a décidé de préserver son patrimoine séculaire. Ce phénomène, toutefois, ne nous semble pas devoir être interprété en termes de “résistance à la romanisation”, pour reprendre la célèbre formule de M. Bénabou47. Le développement, réel, de nouvelles formes identitaires en Crète ne se fait pas contre les modes romaines, qui sont bien acceptées et intégrées. L’île entre dans une ère d’acculturation et de coexistence de différentes identités, profondément gréco-romaines, qui s’enrichissent plus qu’elles ne se combattent. En second lieu, l’analyse a démontré que les références au passé dans l’imaginaire des anciens Crétois n’appartiennent pas systématiquement au monde minoen : l’hymne reprend un texte de la haute époque hellénistique et le “Code” préserve des pratiques du ve siècle a.C. Les lieux de mémoire de la Crète impériale renvoient donc à des époques variées et non à la seule civilisation minoenne, si brillante fût-elle.
26L’usage des inscriptions dans la construction de l’identité crétoise à l’époque impériale ne constitue qu’un thème parmi d’autres au sein d’un champ de recherches beaucoup plus large. Il a toutefois permis de constater, d’une part, la multiplicité des identités crétoises sous l’Empire et, d’autre part, la singularité de la période romaine dans l’histoire sociale et culturelle de la Crète antique.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Str. 17.3.25 et D. C. 53.12 indiquent un terminus ante quem en 27 a.C. pour le regroupement de la Crète et de la Cyrénaïque, mais l’analyse d’autres sources, en particulier numismatiques, tend à prouver que celle-ci avait eu lieu plus tôt : cf. Carrier & Chevrollier, à paraître. L’union dure au moins jusqu’aux Sévères et très probablement jusqu’à la séparation définitive sous le règne de Dioclétien.
2 Chaniotis 1999.
3 IC, 4.290 et 291. Sur les conséquences de la présence romaine en Crète : Chaniotis 2008.
4 Rigsby 1976.
5 Baldwin Bowsky 1999.
6 Sonnabend 2004.
7 Sur les identités crétoises aux époques archaïque et classique : Wallace 2010, 363-375.
8 Alcock 2002, 99-101, 130-131, 179-180.
9 Sur ce sujet : Guizzi 2009.
10 Romeo 2010.
11 Alcock 2002, 121-130.
12 Martínez Fernández 2007.
13 Le thème des identités locales dans l’Orient romain a donné lieu récemment à de nombreux ouvrages, entre autres Alcock 2002 ; Revell 2009 ; Whitmarsh 2010 ; Lefebvre 2013.
14 Sur la notion de lieu de mémoire : Nora [1984-1994] 1997. Pour l’Antiquité : Gangloff 2013.
15 IC, 4.72 ; cf. Bile 1988, 22-27 (bibliographie jusqu’à la date de parution de l’ouvrage, parmi lesquelles on signalera surtout Willetts 1967). Plus récemment : Greco & Lombardo 2005 ; Di Vita 2010, 44-52.
16 Di Vita 2005, 19.
17 Di Vita 2010, 107-108.
18 Sur cet aspect : Keyser 1987.
19 Sur l’odéon de Gortyne : Di Vita 2010, 108-119.
20 Gorlin 1991.
21 Di Vita 2005, 37-38.
22 SEG, 9.8.
23 IC, 4.331.
24 Romeo 2010, 74-75. Les Grecs de l’époque classique – et a fortiori les Romains – ignoraient l’usage des syllabaires (linéaires A et B) en Crète avant l’introduction de l’écriture alphabétique empruntée aux Phéniciens.
25 Sur l’identité ethnique des Étéocrétois, le choix assumé d’inscrire des textes dans ce dialecte à Dréros et à Praisos à l’époque archaïque et l’utilisation de la langue et de l’écrit comme stratégies identitaires dans un espace où le sentiment régional est prégnant, voir Hall 1997, 177-179.
26 IC, 3.4.9 et 3.2.1 et Perlman 1995, 163-165.
27 IC, 3.2.2 ; cf. Perlman 1995, avec la bibliographie antérieure. Texte grec et traduction française dans Chapot & Laurot 2001, no G71. Sur le culte : Guizzi 2001, 300-301 ; Sporn 2002, 45-50.
28 De Polignac 1984, 66-85 et Chaniotis 1988.
29 Chaniotis 2004, 117 et 121 ; cf. aussi Di Branco 2004.
30 Zeus Crétagénès est très souvent représenté sur le monnayage d’époque impériale : Alcock 2002, 124-128 ; Vikela 2003 ; Romeo 2010.
31 Chaniotis 2004, 68-70.
32 IC, 1.18.11 ; cf. Pałuchowski 2005.
33 Hésychius, s.u. : οἱ τάξεις τοῦ πλήθους.
34 Pol., 2.1272a.
35 Sur tout ceci : Schmitt-Pantel 1992, 59-69.
36 Guizzi 1999, qui rappelle à juste titre un extrait de l’auteur hellénistique Dosiadas (dans Ath., 4.22.143ab = FGH 458 F2), qui explique le financement des syssities à son époque.
37 IC, 3.3.8 ; cf. Ritti 1981, 71, n ° 30.
38 SEG, 37.992 ; cf. Chaniotis 1987.
39 SGDI, 5656.
40 IGR, 3.500.
41 CIG, 5147 ; cf. Masson 1974 (datation à l’époque impériale). L’inscription de Cyrénaïque SEG, 9.243, nous semble devoir être ajoutée à la liste, de même que le texte de Commagène publié par Schmitz et al. 1988.
42 Les inscriptions de Théra sont IG, XII, 3, 578 (époque archaïque) et 843 (époque impériale). Un Pheidôn fils d’Etéanôr apparaît à la première ligne de IC, 3.4.10.
43 Guizzi 2001, 302-303 (sur l’inscription des Étéanorides) et 366-382 (sur l’expansion du territoire de Hiérapytna en Crète orientale et le rôle du sanctuaire de Zeus Diktaios).
44 Gangloff 2013, 7, 15.
45 Repris par Gangloff 2013, 6.
46 Voir les remarques de Wallace 2010, 375 pour la période antérieure.
47 Bénabou [1976] 2005.
Auteur
Université de la Sorbonne, Paris IV
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