II - Autour de l’agora
p. 73-109
Texte intégral
1Le centre monumental, où autour d’une place s’ordonnent les lieux du gouvernement local, conforte l’existence même des communautés civiques, comme le montre la remarque de Pausanias sur Panopée. C’est également un lieu de rencontre entre citoyens, et avec les étrangers qui arrivent dans la cité. Les agoras, comme les temples, mais aussi les bouleutèria et tous les autres lieux dédiés à la réunion d’institutions civiques, ont formé à l’époque romaine des composantes essentielles du κόσμος de la cité. Leur intégration dans l’idée que l’on se fait du beau paysage urbain indique que la notion d’ornement de la cité touche au cœur même de l’hellénisme, car elle comprend au premier chef les monuments liés à la religion et à la vie politique.
Agoras
2Avant d’entamer notre parcours, quelques mots de Pausanias doivent permettre de préciser ce qu’un Grec cultivé remarque quand il regarde une agora. Son plan est important1 : “L’agora d’Élis n’est pas faite de la même manière que celles d’Ionie, ni que celles des cités des Grecs près d’Ionie ; elle est construite de la manière plus ancienne, avec des portiques séparés les uns des autres, et des rues qui passent entre eux”. La manière ionienne de construire paraît donc moderne. Elle tend également à isoler cet espace au sein de la cité, et à faire des portiques de l’agora l’élément qui la définit le plus nettement2. Ce passage de Pausanias suggère qu’il faut interpréter les évolutions planimétriques des agoras dans le monde grec selon une perception qui différencie les manières anciennes et récentes de construire, plutôt qu’en termes de liberté ou de soumission. Cette nouveauté, cette modernité des formes pour des bâtiments et espaces traditionnels plaît d’ailleurs aux Grecs, comme nous l’avons vu pour le cas des temples et des sanctuaires. Dans sa description de Panopée3, Pausanias énumère l’agora en quatrième position, avec des bâtiments plus cruciaux pour la justification du statut poliade, et avant la citation de la fontaine, belle et utile, sans être un monument essentiel pour la vie civique. Les trois premiers sont, dans la plus pure tradition grecque, le lieu d’administration de la cité (“les bâtiments administratifs”), le lieu de formation intellectuelle et militaire des jeunes citoyens (“le gymnase”), et le lieu de rencontre du peuple (“le théâtre”). L’agora accueille les bâtiments administratifs ; mais elle est citée de manière disjointe à ceux-ci et souvent les rhéteurs et les inscriptions associent plutôt l’agora à sa vocation commerciale et à un lieu où se croisent citoyens et non-citoyens, signe d’une attention à l’ouverture de la cité sur l’extérieur.
3Ces quelques éléments d’une réflexion théorique sur les agoras, à partir des remarques d’un défenseur passionné de l’identité grecque, invitent à s’interroger sur la continuité de l’importance des bâtiments où se déroule la vie politique de la cité, malgré une évolution des techniques architecturales et des plans utilisés, et à évaluer l’intégration dans le κόσμος civique de ces espaces – c’est-à-dire à replacer l’agora dans une perspective grecque, plutôt que comme une catégorie de forum. Ce faisant, l’agora apparaît aussi comme un espace cosmopolite et commercial, tandis que les bâtiments administratifs sur son pourtour incarnent le statut civique. Il convient même d’aller plus loin : dans une inscription publique – dans la dédicace d’un monument ou dans une inscription honorifique –, soumise au regard de la collectivité et passée par les différentes étapes de la procédure officielle conduisant à son affichage, le terme “agora” a pu conserver son sens précis, d’espace juridiquement défini et contrôlé par l’agoranome, où se déroule le commerce de détail. L’appellation d’agora pour la place d’Éphèse autour de laquelle s’ordonnent le bouleutèrion ou le premier temple néocore, accordée par les Modernes, est trompeuse. Il faut replacer cet espace dans la perspective adoptée et conservée par les Grecs : il n’est pas une seule inscription d’Éphèse qui désigne cette place comme agora.
L’agora, un élément nécessaire de l’“ornement” des cités
4À la différence des temples, Dion de Pruse cite l’agora comme un élément dépourvu de sens dans une cité en proie à la discorde : οἴεσθε ἀγορᾶς καὶ θεάτρου καὶ γυμνασίων καὶ στοῶν καὶ χρημάτων εἷναί τι ὄφελος τος στασιάζουσιν ; οὐ ταῦτά ἐστι τὰ ποιοῦντα πόλιν καλήν, ἀλλὰ σωφροσύνη, φιλία, τὸ πιστεύειν ἀλλήλοις4 (“pensez-vous qu’une agora, un théâtre, des gymnases, des portiques, de l’argent peuvent être utiles à des gens divisés ? Ce n’est pas cela qui fait la beauté d’une cité, mais la sagesse, l’amitié, la confiance mutuelle”). En dehors de ce cas précis, où Dion de Pruse appelle à ce que l’ornement de la cité soit bien doté de son sens culturel et politique profond, sans être une simple parure, l’agora est un passage obligé dans l’éloge des cités. Elle est citée comme un ornement nécessaire, comme le montre la description par Strabon de Sinope dans le Pont, fondée par les Milésiens : Αὐτὴ δ’ἡ πόλις τετείχισται καλῶς, καὶ γυμνασίῳ δὴ καὶ ἀγορᾷ καὶ στοαῖς κεκόσμηται λαμπρῶς5 (“la ville proprement dite est ceinte de beaux remparts ; elle s’orne surtout d’un gymnase, d’une agora, et de portiques splendides”). La description de la topographie si particulière de Nysa, séparée en deux par un ravin abrupt, comporte également la mention de l’agora, associée à celle des gymnases6. Aelius Aristide fait l’éloge de la beauté de Smyrne en ces termes, avant le tremblement de terre de 1777 : “Tout, jusqu’au rivage, resplendit de gymnases, d’agoras, de théâtres, d’enceintes de sanctuaires, de ports, de beautés naturelles et faites de main d’homme, rivalisant les unes avec les autres”. Dans ces passages, le théâtre et le gymnase, accolés à l’agora, sont associés ; ils doivent rendre la cité belle, καλήν, lorsque les habitants de la cité savent instaurer la concorde entre eux. La beauté de la cité, bien comprise, naît donc en premier lieu des temples, des agoras et des lieux de la formation du citoyen et de l’exercice politique. Elle n’est pas seulement une apparence séduisante. Il s’agit bien aussi d’une catégorie politique, relative à la cité, alors qu’aux yeux des Romains la beauté est plutôt rattachée à la majesté de l’empire.
5La contemplation de l’agora montre également l’attractivité et la richesse de la cité ; lieu cosmopolite, c’est d’abord là que les voyageurs et les étrangers peuvent admirer la beauté d’une cité. À Smyrne, la pluralité des agoras est une image utilisée pour décrire la démographie importante de la ville. Toute la description de Smyrne par Aelius Aristide veut montrer que la beauté de la cité est à couper le souffle8 et retient le regard9. L’agora est un spectacle magnifique. Aussi sa disparition est-elle déplorée dans la “Monodie pour Smyrne” prononcée après le violent tremblement de terre de 177 qui l’a détruite : “de quelle autre cité s’en fallait-il de peu qu’elle soit proche d’elle ? […] Aspect de l’agora, d’une beauté insurpassable10 !”. Cet ὑπερλάμπρου σχῆμα ἀγορᾶς marque l’apogée d’une caractérisation esthétique de cet espace monumental. De même dans une lettre aux empereurs Marc Aurèle et Commode, Aelius Aristide déplore : “Les beautés de l’agora ont disparu”, οἴχεται δὲ ἀγορᾶς κάλλη11. La beauté de l’agora est ainsi l’un des éléments qui fondent la réputation d’une cité : “En effet, une agora et un équipement magnifique de bâtiments illustrent une cité”, πόλιν γὰρ δὴ λαμπρύνει μὲν ἀγορὰ καὶ κατασκευὴ μεγαλοπρεπὴς οἰκοδομημάτων, explique Philostrate dans la vie de Polémon de Laodicée12. Pline décrit l’agora d’Amastris dans le Pont comme l’un des plus beaux ornements de la cité. Sa vision est celle d’un Romain, et elle traduit des différences avec l’appréciation de la beauté de l’agora par les Grecs, en rapport avec les autres édifices civiques ou avec une beauté donnée à voir aux visiteurs : “Maître, la cité d’Amastris, aussi élégante que jolie, possède, parmi ses plus beaux ornements, une place magnifique et très profonde, dont un des côtés sur toute sa longueur est bordé par ce qu’on appelle un fleuve, mais qui n’est en réalité que le plus affreux des cloaques : c’est une honte tant l’aspect est repoussant, une infection tant l’odeur est immonde. Il en résulte que le couvrir est une question d’hygiène autant que d’esthétique (decor)13.” En apparence, et parce qu’en français il est difficile de traduire κόσμος en restituant à cette idée toute sa profondeur, le souci esthétique est le même, Pline se souciant de l’elegantia de la place, de son esthétique, decor. Il la décrit également comme ornata. Mais le moyen de renforcer cette beauté est l’hygiène du lieu, la salubritas, étroitement associée au concept romain d’utilité publique, et qui n’apparaît pas dans les soucis premiers des Grecs (les sources épigraphiques, comme nous allons le voir, ne prennent pas soin de rapporter de telles opérations), même si Strabon admirait les égouts de Rome14.
L’agora remplie de monde, ἀγορὰ πλήθουσα
6Le passage suivant apporte un élément nouveau pour l’appréciation des agoras : “…est-ce pour la multitude des hommes, la richesse de l’agora, et la magnificence de ses édifices qu’il faut la féliciter15 ?”. Dion de Pruse, comme en d’autres lieux16, fait résider la valeur d’une cité non pas dans ses monuments mais dans ses habitants, leur concorde et leurs vertus. Cela montre a contrario que les monuments et espaces publics avaient effectivement une place essentielle dans les motifs de fierté des habitants d’une cité, et en particulier ici l’agora. L’agora est effectivement un ornement de la cité, mais deux thèmes supplémentaires s’y rapportent : abondance de biens et abondance d’hommes. Dans ce dernier extrait, la citation de la multitude des hommes avec celle de l’abondance en richesses de l’agora suggère un rapprochement logique : une ville populeuse a une agora pleine de monde, c’est le signe de sa bonne santé. Dans plusieurs éloges ce rapprochement est explicite. Ménandre le Rhéteur, originaire de Laodicée de Phrygie, donc au cœur de l’aire culturelle que nous étudions, parle dans son premier traité du maintien des femmes et des jeunes gens dans différentes cités17 : “dans d’autres cités, il n’est pas permis qu’un jeune paraisse devant l’agora pleine de monde (πρὸ πληθούσης ἀγορᾶς)…”. Cette agora populeuse, ἀγορὰ πλήθουσα, se retrouve chez Grégoire de Nazianze, quand il présente les arguments d’un habitant de Nazianze et d’un habitant de Constantinople en faveur de leur cité respective. L’habitant de Constantinople mentionne les différents motifs de fierté d’habiter une si belle cité : “Mais nous, dit-il, nous avons des remparts, des théâtres, des cirques, des palais, de beaux et grands portiques, cet ouvrage incroyable qu’est le fleuve coulant sous terre et à l’air libre, cette illustre colonne que l’on voit de si loin, une agora remplie de monde, ἀγορὰ πλήθουσα, un peuple tumultueux et une assemblée d’hommes de haute naissance”. Son adversaire réfute ses arguments, en persiflant sur le fait que l’agora attire surtout les bavards oisifs18 : “Feras-tu figurer dans tes accusations le fait (…) que je ne passe pas la plus grande partie du temps sur l’agora, que je ne suis pas un bavard, que je ne bavarde pas à l’entour avec ceux que je rencontre et comme cela se rencontre…”. Plutarque émet aussi quelques remarques critiques sur les gens qui perdent leur temps sur l’agora19 : “de même que ceux qui n’ont rien d’utile à faire chez eux passent sur la place publique (l’agora), même s’ils n’ont rien à y faire, la plus grande partie de leur temps, de même quelques-uns, faute d’avoir des affaires personnelles dignes d’attention, se jettent dans les affaires publiques en prenant la politique pour passe-temps”.
7Toujours est-il qu’une agora remplie de monde est un motif de fierté, du Haut-Empire à la fin de l’Antiquité. La conception grecque des espaces urbains est sensible à ces vastes espaces bordés de portiques, bien remplis (plutôt qu’à la visibilité plus ou moins grande des bâtiments administratifs de la cité derrière un portique), signes de puissance20. Le même effet positif créé par un espace rempli d’hommes est évident dans le cas d’Orcistos. Cette communauté de Phrygie a obtenu le statut de cité entre 325 et 331, alors qu’elle l’avait perdu à une date indéterminée entre 237 et 324, au profit de Nacolia. Plusieurs arguments ont été avancés par Orcistos pour obtenir sa promotion, dont la foule qui fréquente l’agora, comme le montre cet extrait du rescrit de Constantin à Ablabius21 : “[ce lieu] comporte une grande abondance d’eaux qui y affluent, ainsi que des bains publics et privés, un forum orné de statues des anciens princes, une population si nombreuse d’habitants que les sièges qui s’y trouvent sont aisément remplis et, en outre, grâce à la pente des eaux qui y ruissellent, une grande quantité de moulins à eau”22. Des aménagements spécifiques sont prévus pour accueillir cette foule qui se presse sur l’agora. Les bancs mentionnés ici peuvent être observés à Priène, où comme le remarque A. Chastagnol les piédestaux des statues étaient aménagés sur leur face antérieure en bancs par une avancée de leur partie inférieure23. Cette prédilection pour l’agora pleine de monde, bruissante des conversations, établie grâce aux sources littéraires, va à l’encontre de l’idée d’une désaffection pour les espaces civiques, parfois postulée pour l’époque romaine.
8Enfin, comme le suggérait l’expression d’“agora pleine de richesses”, l’agora peut susciter l’éloge pour les marchandises qu’elle recèle et pour la rencontre d’hommes et de biens d’horizons différents. L’agora est un élément cosmopolite dans le paysage urbain. Ménandre recommande ainsi de faire un sort dans l’éloge des cités à ce point précis24 : “tu parleras (dans l’épilogue) (…) des agoras qui regorgent de marchandises, des cités pleines de fêtes et de panégyries”. Dans le récit du martyre de Pionios, un détail évoque de manière très vivante l’activité commerciale de l’agora de Smyrne25 : “Quand ils furent arrivés à l’Agora dans le portique oriental de la dipulis (la double porte), toute l’agora et les étages des portiques étaient pleins de Grecs et de Juifs, et de femmes (…) et ils montèrent pour regarder sur les marches et les coffres”. Les fouilles ont permis de découvrir au centre de l’agora des reliefs où l’on voit Déméter debout à côté de Poséidon : d’après E. Akurgal, ces deux dieux côte à côte au centre de l’agora illustraient la domination de leur cité sur le commerce terrestre et maritime26. Ce lieu de réunion des citoyens, et plus largement des visiteurs de passage, donne donc l’image d’une cité riche. D’autres activités se déroulent dans l’agora, comme des rites du culte impérial27, des sacrifices, ou le cheminement des processions. S. Price souligne l’importance de la dimension cultuelle des places principales des cités : des petits espaces sacrés, des petits sanctuaires se trouvaient le long de ses côtés. Ainsi à Priène le long du portique de l’agora hellénistique se trouvait une série de pièces dont l’une abritait une copie du nouveau calendrier d’Asie et était probablement consacrée au culte d’Auguste28. Les fouilleurs de Hiérapolis émettent la même hypothèse pour le portique-basilique de l’agora de cette cité ; par ailleurs, le grand espace central était dédié à des combats de gladiateurs et des compétitions athlétiques, les marches de la basilique servant de gradins29. Ces dernières activités ne sont cependant pas celles qui transparaissent dans les éloges de cités et dans les commémorations d’interventions sur l’agora. L’agora est d’abord le lieu où l’on admire la cité et un lieu éminent de la vie en société, où l’on se presse pour toutes sortes d’activités. Ces points d’appui fournissent le contexte de l’intervention de la part des habitants des cités grecques d’Asie mineure occidentale sur les agoras30.
Bilan des interventions sur l’agora
9Les sources épigraphiques permettent de prendre la mesure respective de l’intervention de particuliers (à titre évergétique, ou en vue d’une fonction civique) et des projets menés par la cité, ainsi que de l’ampleur de chaque intervention réalisée. La diffusion du modèle urbain des grandes cités d’Ionie et de Carie vers la Phrygie ou la Mysie, ou au contraire le développement concomitant des projets, peuvent également être appréciés. Nous nous garderons de toute conclusion numérique pour cet espace comme pour les autres bâtiments étudiés31, car elles sont faussées dès le départ par le caractère hasardeux des découvertes épigraphiques, et par la nature même des inscriptions : alors que les interventions de particuliers peuvent être connues à la fois par les dédicaces sur le monument lui-même et par de multiples inscriptions honorifiques, celles commanditées par la cité ne peuvent l’être que par les inscriptions dédicatoires, ou les mentions d’ergépistatai, responsables des travaux, dans des inscriptions honorifiques. Il s’agit avant tout de mettre en évidence des tendances et des évolutions chronologiques, et d’indiquer les pratiques évergétiques vis-à-vis de l’agora dans les cités grecques d’Asie mineure occidentale.
Tableau 1. Interventions dans l’agora en Asie, jusqu’à la fin du ive s.
Cité | Date d’attestation | Commanditaires | Intervention réalisée | Référence | |
Éphèse | 66 a.C. | Timôn fils d’Artémidôros | Pavement au milieu de l’agora commerciale, où se dresse l’horologion | IK, 17.1-Ephesos, 3004 | |
Aphrodisias | Fin du ier a.C. | C. Iulius Zôilos | Nom au nominatif sur la dédicace d’un portique | Chaniotis 2004, 393 no 12 | |
Éphèse | 3 a.C. | Mazaios et Mithridatès | Porte monumentale pour entrer sur l’agora tétragone | IK, 17.1 – Ephesos, 3006 | |
Éphèse | Époque augustéenne | Hérakleidès Passalas | Entrée sur la rue des Courètes protégée de l’eau de pluie | Knibbe et al. 1993, 123-124 no 13 | |
Cyzique | 38 | Antonia Tryphaina | Travaux pour « maintenir le bon approvisionnement du marché » ; présence d’ergastéria sur l’agora | Joubin 1893, 8, l. 14-18 et 1. 25-26 | |
Apollonia du Rhyndacos | 40-41 | C. Saufeius Macer | Macellum | IGR IV, 1676 | |
Akmonia | 69-96 | Clodia Rufilla | Propylée de l’agora | MAMA VI, 251 | |
Éphèse | 85-96 | Ischyriôn d’Alexandrie | Rampe d’accès du portique à l’agora commerciale, revêtement du portique, exèdre | IK, 17.1- Ephesos, 3005 | |
Éphèse | Ier s. | Hésychos | Blanchiment des tableaux d’affichage du portique trapézite, revêtements en marbre pour les murs, cancelli et subsellia dans une exèdre | IK, 17.1- Ephesos, 3065 (agora tétragone) | |
Blaundos | Ier s. (époque flavienne ?) | C. Mummius Macer | Portique et ateliers | von Saldern 2006, no 9 | |
Tralles | Ier s. | Ti. Iulius Claudianus | Vingt colonnes pour l’agora | IK, 36.1- Tralleis, 145 | |
Smyrne | Début du iie s. ? | M. Om[-]os Hérakleidès et Nikomédès | Construction de portiques, marches et sièges | IK, 24-1- Smyrna, 682, 683 | |
Larisa | 117-138 | Revenus du village | Macellum | IK, 17.1- Ephesos, 3271 | |
Milet | 117-138 | ? | Inscription sur l’architrave du portique sud de l’agora sud, en latin | Milet, VI. 1, p. 17 et p. 199 | |
Iasos | 135-136 | Dionysios | Colonnes et architraves du portique est de l’agora | Pugliese Caratelli 1987 | |
Iasos | 138 | Hiéroklès et sa femme | Achèvement du portique est de l’agora | Pugliese Caratelli 1987 | |
Pergame | c. 150 | Nikodémos Nikôn | Restauration de parties des portiques de l’agora | IPergamon, 333 | |
Milet | 160-181 | ? | Porte nord de l’agora sud (τρίπυλον) | Milet, VI. 1, p. 64-65 et p. 206 | |
Iulia Gordos | 177-180 | Ménékratès fils de Sextianus | Dix colonnes pour l’obtention de l’agoranomie (le lien avec l’agora est cependant discutable) | TAM V, 1, 693 | |
Smyrne | Peu après 177 | Cité | Portique ouest de l’agora | IK, 24-1-Smyrna, 628 | |
Aphrodisias | iie s. | Iasôn et sa femme | Grammatophylakion associé à des portiques et des ateliers-boutiques : en rapport avec l’agora ? | MAMA VIII, 498 | |
Tralles | iie s. | Ti. Claudius Panychos Eutychès Koibilos | 12 étals en marbre pour les poissonniers | IK, 36.1-Tralleis, 77 | |
Stratonicée de Carie | iie s. | M. Ulpius Alexandros Héraklitos | Travaux sur le portique du marché alimentaire | IK, 22.1-Stratonikeia, 530 | |
Stratonicée de Carie (Lagina) | iie s. | Thrasôn Leôn | Utilisation de l’argent de la grande-prêtrise pour le pavement en marbre blanc de 1500 pieds sur l’agora | IK, 21-Stratonikeia, 229a, l. 5-7 | |
Environs de Philadelphie de Lydie | Début du iiie s. | Village (κώμη) | Construction d’une agora | Petzl 1990, 70 n. 34 (Bull. 1991, | |
Éphèse | Début du iiie s. | L. Cornelius Philosérapis | Statues d’Éros pour le marché de la ville ( ?) | IK, 17.1- Ephesos, 3015 | |
Éphèse | 213-217 | L. Aufidius Euphémos | Portique est de l’agora tétragone | IK, 17.1- Ephesos, 3001, 2 | |
Akmonia | iiie s. | Un bienfaiteur décédé | Zygostasia pour le macellum | Ramsay 1897, 646 no 549 | |
Thyatire | iiie s. | P. Aelius Aelianus | Installation d’un groupe statuaire de Dircé au macellum | TAM V, 2, 926 | |
Sardes | iiie s. | C. Asinnius Nikomachos Frugianus | Quatre macella construits par lui-même et ses ancêtres ? | Herrmann 1993, 248 | |
Aigai | Haut-Empire | ? | Réaménagement d’un « bâtiment du marché » selon R. Bohn | Bohn 1889, 23-24 | |
Tralles | Haut-Empire | Artémidôros et Diogénès | Construction sur l’agora d’une « promenade couverte » et du bureau de l’agoranome, du péristyle dorien, des magasins et ateliers-boutiques | IK, 36.1-Tralleis, 146 | |
Tralles | Haut-Empire | Alexandros fils de Nicias | Toit sud du portique, divisé en huit pièces, par cet agoranome : en rapport avec l’agora ? | IK, 36.1- Tralleis, 147 | |
Thyatire | Haut-Empire | Apollodotos | τρίπυλον et boutiques | TAM V, 2, 861 | |
Thyatire | Haut-Empire | Avec les surplus de la caisse de la magistrature de Pamphilos | τρίπυλον, portiques, boutiques | TAM V, 2, 862 | |
Maionia | Haut-Empire | Une famille | Propylée (pour l’agora ? un sanctuaire ?) | TAM V, 2, 518 | |
Synnada | Haut-Empire | Damas fils de Lysilos | Pavement de 2 000 pieds dans l’agora | MAMA VI, 371 | |
Synada | Haut-Empire | Zeuxis fils de Damas | Pavement de 2 000 pieds dans l’agora | Legrand & Chamonard 1893, 279 no 78 | |
Apollonia de la Salbakè | Haut-Empire | Damagoras fils de Iasôn et Attalos fils de Damas | Chacun un colonne sur l’agora ( ?) | Robert L. & J. 1954, 280-281 no 160 | |
Aizanoi | ? | ? | Boutiques dans des portiques (de l’agora) ? | MAMA IX, 39 | |
Aphrodisias | ive s. | Ménandros, bouleute et Fl. Pelagius Ioannes, gouverneur de Carie | Don par chacun d’une colonne | Roueché [1989] 2004, 29 et 30 |
10Peu de sources font connaître la mise en place d’une agora entière. Aphrodisias, qui connut une organisation largement sinon totalement nouvelle à la fin du ier s. a.C., paraît faire exception : A. Chaniotis a publié une inscription attestant l’implication de C. Iulius Zôilos dans l’organisation de l’agora de la ville32 et la construction de ses portiques, sans qu’on puisse donner davantage de détails. Par la suite, une inscription des environs de Philadelphie de Lydie, du début du iiie s., mentionne la construction d’une agora, mais on ignore si Hermokratès l’a financée à l’occasion de sa charge de secrétaire, ou s’il l’a supervisée en se servant des revenus du village33. Cette agora devait être une place de petite taille.
11En général, les anciennes agoras ont paru suffire et il est rare qu’on les ait déplacées ou entièrement réaménagées – sauf après un tremblement de terre, comme ce fut le cas par exemple à Hiérapolis sous les Flaviens et à Smyrne après 177. Les interventions que l’on y décèle sont ponctuelles, et concernent en premier lieu la fonction commerciale de la place. Éphèse connaît des aménagements de son “agora tétragone” aussitôt après l’établissement de la paix augustéenne34, tandis qu’elles ont lieu plus tardivement dans les autres cités, où le grand mouvement de construction ne commence qu’à l’époque flavienne, voire au iie s., rythme de construction que l’on retrouve dans la province d’Asie pour les autres aménagements urbains. Une inscription honorifique témoigne ainsi d’interventions en lien direct avec le commerce dans l’agora près du port35 : Hésychos “a promis au lieu des dépenses d’huile de blanchir les tableaux d’affichage du portique trapézite36, de faire des revêtements en marbre pour les murs en marbre multicolore37 et de faire réaliser les cancelli et les subsellia pour l’exèdre (faite) par Paulinus (…)”. Les subsellia mentionnées ici, par une transcription en grec d’un mot latin, sont peut-être des bancs, comme ceux mentionnés dans l’inscription d’Orcistos, et attestés archéologiquement à Priène.
Agoras, marchés alimentaires et vocation commerciale
12Parmi les interventions les plus caractéristiques et les plus importantes, à Tralles, à un moment indéterminé de l’époque impériale, les agoranomes Artémidôros et Diogénès élèvent sur l’agora une promenade couverte, κρυπτὸν περίπατον, avec le bureau de l’agoranome, τὸ ἀγορανόμιον, le péristyle dôrion ( ?), et les magasins qui se trouvent à l’intérieur : τὸ περίστυλον δώρ<ι>ον καὶ τὰ ἐν αὐτῷ ἀποδόχια38. Cent ateliers-boutiques, ἐργαστήρια, sont également mentionnés dans la dédicace. Dans la même cité au iie s., un agoranome, Ti. Claudius Panychos Eutychès Koibilos, “a offert à ses frais douze étals en marbre pour les poissonniers, avec leurs douze bases” : ἀναθέντα δὲ ἐκ τῶν ἰδίων καὶ τὰς ἐν τῇ ὀψαριοπώλει<δι>μαρμαρίνας τραπέζας ιβ’σ<ύν> ταῖς βάσεσιν <ι>β’(l. 18-21)39. La même fonction pratique est explicite à Lagina au iie s., quand des travaux furent entrepris par M. Ulpius Alexandros Héraklitos sur le portique du “marché alimentaire”, τῇ βιοτικῇ ἀγορᾷ40. Les autres mentions d’interventions dans l’agora utilisent un vocabulaire fonctionnel habituellement plus neutre et général.
13On relève néanmoins la construction régulière, dès le début de l’époque impériale, de macella, dans plusieurs petites cités d’Asie. En Mysie à Apollonia du Rhyndacos, en 40 ou 41, C. Saufeius Macer fit construire un macellum : κατεσκεύασεν τῇ πόλει τὸν μάκελλον (l. 7-9)41. Dans les environs d’Éphèse, à Larisa, un macellum fut construit sur les revenus du village, sous le règne d’Hadrien42. À Akmonia en Phrygie, un bienfaiteur décédé reçoit des honneurs de la part du Conseil, de la gérousie, du peuple, des néoi et des hymnodes, dans le courant du iiie s. ; la gérousie l’honore en particulier “pour avoir fait les zygostasia devant le macellum, à ses frais”, ἡ γερουσία τὰ ζυγοστάσια πρὸς τῷ μακέλλῳ ἐκ τῶν ἰδίων ποιήσαντα (l. 10-14). Les zygostasia sont probablement un outil pour la régulation ou le test des poids43. À Éphèse, L. Cornelius Philosérapis a semble-t-il offert des statues d’Éros pour le marché de la ville (il fut boularque au début du iiie s.) : [ἔ]ρ[ω]τ[α]ς[ἀ]νέθηκεν ἐν τῷ μακέλλῳ (l. 4)44. Cl. De Ruyt s’interroge cependant sur l’existence d’un macellum dans la cité au sens architectural, et se demande si ce mot ne désigna pas l’agora commerciale de la cité au iiie s. : cela paraît pourtant peu probable dans la mesure où l’“agora commerciale” des archéologues est désignée sous le vocable d’“agora”, ou “agora tétragone” de manière continue à l’époque romaine dans les inscriptions. À Thyatire, au iiie s., sa patrie honore P. Aelius Aelianus pour avoir décoré plusieurs monuments de la cité avec des statues : “pour l’hypèthre du macellum, l’ensemble de Dircé” (l. 4-5)45. À Sardes enfin, une statue de C. Asinnius Nikomachos Frugianus est élevée, sur décision du Conseil et du peuple, “dans ses quatre macella” (l. 46), [ἐν τοῖς τέ]σσαρσιν μ[α]κέλλοις. Ils auraient été construits par Frugianus et ses ancêtres46 : si la mention des “bâtiments construits par les ancêtres” n’est pas surprenante, en revanche la nature des bâtiments ici mentionnés et leur nombre le sont.
14L’ouvrage de Cl. De Ruyt permet de dresser un bilan des macella en Asie mineure, à partir des sources épigraphiques et archéologiques, à l’exception de l’inscription de Sardes, inédite lors de cette étude47. À Aizanoi fut ainsi découverte une tholos appartenant à un marché du courant du iie s.48 ; sur les orthostates de la tholos était gravé l’édit des prix de Dioclétien. À Magnésie du Méandre, une inscription honorifique cite le macellum où un agoranome exerçait sa fonction, au iie s.49 En général, indique P. Gros, “dans les provinces grecques de l’empire le schéma de l’agora commerciale, vaste péristyle entouré de boutiques, demeure prédominant”50. Si ce type de dispositif l’emporte dans la documentation épigraphique, ce modèle architectural importé de Rome rencontra néanmoins un certain succès dans la province d’Asie, dans les grandes cités comme dans les plus modestes, peut-être plus perméables à la pénétration romaine et à la nécessité de se pourvoir en équipements commerciaux qui n’existaient pas auparavant. Ce qui est intéressant pour notre réflexion sur la constitution du paysage urbain des cités de culture grecque d’Asie à l’époque romaine, est autant l’adoption du type architectural que du mot latin pour le désigner, et son emploi dans les inscriptions publiques. C’est un cas qui ne se présente que rarement en Asie.
15Même en dehors de ces dispositifs particuliers, la vocation commerciale de l’agora était assurée tout simplement par les boutiques qui s’ouvraient au fond des portiques. Plusieurs inscriptions datables du ier s. indiquent une continuité avec l’époque hellénistique51. Les boutiques peuvent être construites, entretenues ou restaurées par la cité, ou pour la cité, par des particuliers. À Aphrodisias, un décret honorifique du troisième quart du ier s., qui accorde à Adrastos des funérailles officielles, rapporte avec force détails comment il a refusé d’être enterré dans l’un “des ergastéria publics qui se trouvent en face du bouleutèrion”, ἐν τοῖς ἄντικρυς [τ]οῦ βουλευτηρίου δημοσίοις ἐργαστηρίοις, pour éviter d’amputer les revenus de la cité. Il a préféré être enterré dans l’un de ses ergastéria (selon une restitution probable)52. Quant à Iasôn il construisit avec sa femme un grammatophylakéion dont on ignore la localisation dans le tissu urbain. Il est associé à des portiques et il paraît probable qu’il se trouve sur l’agora de la cité, sur laquelle ouvre également le bouleutèrion. Dans le portique associé au bâtiment des archives, Iasôn a fait construire “deux ateliers-boutiques à deux étages le long du bâtiment”, tandis que d’autres ouvrent sur une exèdre53. Les ateliers boutiques d’Adrastos et les constructions d’Iasôn devaient ouvrir sur la même place, l’agora de la cité. À Milet, le portique oriental de l’agora sud comporte un portique long de 190 mètres, derrière lequel s’ouvrent trois rangées de boutiques. Il daterait du ier siècle54. Aucune mention épigraphique de ces ateliers n’est conservée.
16Des cités de Lydie et de Phrygie ont également connu des interventions similaires à cette époque, de manière assez précoce donc par rapport à d’autres types de constructions. À Blaundos, C. Mummius Macer au ier s. fait construire un propylée et des ateliers55. L’ensemble avait peut-être un rapport avec une agora. À Thyatire, les deux inscriptions mentionnant la construction d’une porte monumentale à trois passages évoquent également la construction de portiques avec des boutiques : τὰ ἐν αὐταῖς ἐργα[σ]τῶν οἰκητήρια et [τ]ὰ ἐν αὐτα[ῖς] οἰκ[η]τή[ρ] ια56. Une autre inscription de Thyatire retrouvée à une vingtaine de kilomètres de la cité57 évoque la construction par des Aurelii (donc après 212) d’un [–]ήριον dans un portique, ἐν τῇ στο. Selon L. Robert, il pourrait s’agir d’un ἐργαστήριον58. À Aizanoi, une stèle de marbre comporte une inscription très lacunaire59 : [– ἀνα]θέντα τά τε κατα[–]ρια τά ἐν ταῖς στοα[ῖς –], “qui a fait construire les [-]ria qui se trouvent dans les portiques [-]”. Des ateliers-boutiques, ergastéria, sont peut-être mentionnés. Cette inscription n’est pas datée.
17L’emploi de ce type de vocabulaire et l’emplacement généralement constaté d’ateliers-boutiques derrière les portiques de l’agora ou d’une rue ne vont pas de soi : M.-Chr. Hellmann montre que dans le vocabulaire délien, ce sont les οἰκήματα “qui ouvrent sur l’Agora et servent au commerce de détail”, tandis que les ἐργαστήρια “qui demandent plus de place, servent à la fabrication”. Elle souligne que l’Asie mineure montre un emploi différent, défini par L. Robert60 et dont nous avons rassemblé les principaux exemples, pour l’Asie. Nous verrons plus loin le cas des ateliers-boutiques qui se trouvent le long des portiques des rues, comme probablement ceux qu’a fait construire Dion de Pruse. Au total, la fonction commerciale des portiques de l’agora connaît en Asie mineure occidentale une grande continuité entre l’époque hellénistique et le début de l’époque impériale. Au cours du iie s. la mention des ateliers-boutiques sur l’agora disparaît des sources épigraphiques : il ne paraît guère probable qu’on doive y voir le signe d’une évolution fonctionnelle, visant à renforcer la dignitas de cet espace, à la manière romaine – comme le montre la belle unanimité des sources écrites sur le plaisir qu’il y a à considérer une agora remplie de monde, promeneurs, acheteurs, citoyens, étrangers.
L’agora comme élément du “kosmos” : propylées et portiques
18Les portiques apparaissent, de même que les propylées, comme un élément d’unification du paysage urbain, lui conférant, au-delà de ses fonctions pratiques, une “qualité cosmétique” – liée à la notion de kosmos : selon Ménandre le Rhéteur une cité entourée par d’autres, au milieu d’une région et non sur les côtes, peut tirer gloire d’être comme entourée de “propylées en guise d’ornement”, ἀντὶ κόσμου προπύλαια61. Cela vaut bien sûr pour les propylées d’espaces sacrés, comme pour ceux des agoras. La construction d’une entrée monumentale mettant en valeur l’arrivée à l’agora est ainsi une intervention assez fréquente. À Akmonia, Clodia Rufilla fit construire τὸ πρόπυλον ἐπὶ τῆς ἀ [γορᾶς ( ?)], à l’époque flavienne62. Cette construction, nous venons de le voir, est connue à Blaundos en Phrygie, à la même époque, de la part de C. Mummius Macer63.
19À Éphèse, la facilitation de l’accès à l’agora du port, appelée agora tétragone64 dans les inscriptions, est essentielle pour permettre aux personnes comme aux marchandises une arrivée rapide. Les affranchis impériaux Mazaios et Mithridatès construisirent en 3 a.C. la porte monumentale donnant sur la Triodos, en bas de la rue des Courètes, construction commémorée dans une inscription bilingue65. L’entrée sud fut protégée des ruissellements d’eau de pluie, à l’époque augustéenne, par Hérakleidès Passalas66. L’entrée occidentale, qui donnait accès directement au port, fit l’objet d’une intervention de la part d’un marchand égyptien. Sous Domitien, Ischyriôn d’Alexandrie et son fils ont “fait tailler et construire la rampe d’accès du portique à l’agora tétragone, et de même ils ont fait faire le revêtement du portique à leurs frais, et ils ont consacré l’exèdre avec ses statues et tout l’ornement qui s’y rapporte”, τὴν ἐκ τῆς στοᾶς ἀνάβασιν φέρουσαν ἰς τὴν τετράγωνον ἀγορὰν διέκοψαν καὶ [κ]ατεσκεύασαν, καὶ ὁμοίως [τ]ὴν στοὰν ἐκ τῶν ἰδίων ἐσκούτλωσαν καὶ ὁμοίως τὴν ἐξέδραν σὺν τοῖς ἀνδριᾶσι κ[α]ὶ παντὶ τῶι περὶ αὐτὴν κόσμωι καθιέρωσαν (l. 12-20)67. À l’origine, un escalier d’une dizaine de marches faisait la jonction entre la rue du port et l’agora68 ; il a été détruit par ce marchand alexandrin et transformé en rampe.
20À Milet, la porte nord de l’agora sud est désignée sous le terme τρίπυλον69. D’après le décor statuaire et le style des chapiteaux, la composition peut être datée du règne de Marc Aurèle70. L. Robert suggère que la construction à Thyatire d’un τρίπ[υλον], entrée monumentale à trois portes, et de portiques, sous la responsabilité d’Apollodotos (la dédicace est adressée aux Dieux Augustes) peut se rapporter à une agora, sur le modèle de la porte monumentale à trois passages de Milet71 ; un tripylon fut également construit pour l’agora de Thyatire, des marchands ayant supervisé la construction de “la porte à trois passages, des portiques, des auberges72, et des boutiques qui s’y trouvent”, τὸ τρίπυλον καὶ τὰς στοὰς, τάς τε καταγωγ[ὰς] καὶ τὰ ἐν αὐταῖς ἐργα[σ]τῶν οἰκητήρια (l. 3-6)73. Dans une autre ville de Lydie, à Maionia, une famille a fait construire un propylée (l. 2) ; il n’y a pas d’indication qu’il soit en rapport avec l’agora mais cela est possible74 (il peut aussi s’agir d’un sanctuaire75). Ce type d’intervention vise à embellir l’espace urbain, sans gêner pour autant la facilité du commerce, essentielle pour le bon approvisionnement de la cité.
21Les portiques des côtés de l’agora font également l’objet d’interventions, bien attestées surtout en Ionie et en Carie. Parmi les villes de taille modeste ou moyenne, on peut citer Métropolis d’Ionie où un bienfaiteur fut honoré76 car “pendant les pénuries de grain il a fait des ventes de blé à prix bas, en enlevant beaucoup au prix du marché77, et à ses frais il a fait construire le portique double dans l’agora (…)”. Le portique double, στοάν διπλῆν, est soit un portique à deux nefs soit un portique à deux étages78 ; sa fonction commerciale est logique dans l’esprit de l’inscription, selon laquelle le bienfaiteur a toujours cherché à procurer à la cité des marchandises à bon prix. À Iasos, les interventions sur l’agora, proche du port avec lequel elle communique par un accès direct, sont connues par les deux dédicaces du portique oriental. En 135-136 puis en 13879, Dionysios consacre les colonnes et l’épistyle, puis Hiéroklès et sa femme Énianè achèvent l’ensemble de la structure80. À Milet deux inscriptions semblent se rapporter à l’architrave du portique sud de l’agora sud81. Elles dateraient de l’époque d’Hadrien ; la première fait référence à un tremblement de terre et est en latin. Elles sont toutes deux très fragmentaires et aucun terme architectural n’est conservé. Il faut également rattacher aux interventions sur une partie de portique d’une agora les constructions d’Alexandros fils de Nicias à Tralles82, qui s’est occupé du toit sud du portique, τὴν μεσ<η>μβρινὴν στοᾷ ὀροφὴν, portique divisé en huit “chambres” : lui-même a occupé des fonctions importantes dans la cité (il a présidé la gérousie), et la base sur laquelle est gravée l’inscription qui l’honore comporte une autre inscription en l’honneur d’un ancien agoranome. Selon l’éditeur, les huit pièces mentionnées et les fonctions des deux personnages, ainsi que le fait que le portique fait évidemment partie d’un ensemble architectural plus vaste de par la manière dont il est mentionné, désignent les dispositions d’un gymnase ; il nous paraît plus vraisemblable qu’il s’agisse de l’agora, puisque plusieurs inscriptions de cette cité se rapportent également à des interventions par des agoranomes sur l’agora.
22À Smyrne, après le tremblement de terre qui a ravagé la cité, le portique ouest de l’agora fut inauguré peu après 177, par la cité de Smyrne elle-même, ce qui constitue l’une des rares attestations d’intervention financée sur fonds publics au centre de l’espace civique à l’époque impériale83. Mais d’autres inscriptions font référence à des interventions sans doute antérieures, et portant sur des portiques, des marches et des sièges. Deux d’entre elles impliquent d’anciens trésoriers, M. Om[-]os Hérakleidès et Nikomédès84. L’inscription mentionnant Hérakleidès est liée à une disposition de Philistès et d’Apollodôros, de même qu’une troisième inscription85, beaucoup plus fragmentaire. Enfin l’inscription de Nikomédès mentionne “les portiques d’Apollodôros”, ce qui suggère de manière cohérente la construction de portiques à partir d’une évergésie, les portiques prenant le nom du bienfaiteur. Les trois inscriptions suggèrent donc le dispositif monumental suivant : trente trois sièges, βάθρα, dans des gradins, σαλίσι, deux escaliers, τὰς β’ κλείμακας, l’élévation d’un remblai, πρόσχωσ[ιν]86 ; “trois socles de murs avec six marches à partir des portiques d’Apollodôros”, ἐκ τῶν Ἀπολλοδώρου στοῶν τὰ τρία θωρακῆα σὺν τοῖς βάθροις ἕξ ; “devant le Kyathos, sept autres marches”87, πρὸς τῷ κυάθῳ ἄλλα βάθρα ἑπτά. Les marches sont courantes pour séparer la place centrale des portiques alentour (par exemple à Hiérapolis88). Le “Kyathos” (une louche, en grec) peut être selon L. Robert “une agora ou un portique de marchand d’huile”89. L’ensemble renvoie donc à une agora ou un marché, avec des marches où les passants s’asseyaient (voire des bancs), plutôt qu’à un théâtre ou un édifice de spectacle pour lesquels est également commémorée fréquemment la construction de gradins. Enfin, une inscription indiquant un décret du Conseil approuvé par le proconsul Lollianus Auitus vers 225, concédant aux porteurs du port “les quatre marches à la suite”, βάθ<ρ>α τὰ ἑξῆς τέσσαρα90 doit peut-être être incluse dans ce dossier. À Pergame, vers 150, une partie du portique de l’agora fut restaurée par Nikodémos Nikôn, architecte91, d’après une inscription en vers isopséphiques : “Pour les artisans divins et sacrés, l’architecte I (ulius) Nikodémos, homme de bien, dit aussi Nikôn le jeune, a affermi et orné pour tous le portique situé sur l’agora, grâce à son zèle personnel ; durant la vie, il y a une seule belle œuvre : la bienfaisance”. À Éphèse, L. Aufidius Euphémos, asiarque, fit la dédicace entre 213 et 217 du portique oriental de l’agora tétragone, dont il avait promis la dépense alors qu’il était secrétaire92 (l’inscription est fragmentaire et le terme agora n’apparaît pas dans les parties conservées, mais le lieu de découverte de la pierre ne laisse pas de doute quant à son lien avec l’agora commerciale).
23D’autres interventions sont plus rarement attestées mais participent également de la beauté de cette place. À Éphèse, Timôn fils d’Artémidôros le jeune, agoranome, fit faire le pavement qui se trouve au milieu de l’agora commerciale, là où se dresse l’horologion, vers 66 a.C.93 ; à Synnada, deux inscriptions honorifiques (non datées) honorent Damas fils de Lysilos94 et Zeuxis fils de Damas95 (le père et le fils ?) qui ont tous deux été agoranomes et ont chacun fait faire 2 000 pieds de pavement de l’agora (plutôt que d’une longueur, il doit s’agir d’une surface de 2 000 pieds carrés). À Stratonicée de Carie, au iie s., un grand-prêtre de Panamara consacre l’argent de la grande-prêtrise à des actes d’évergétisme, dont le pavement “en marbre blanc”, λευκολίθῳ, de 1 500 pieds sur l’agora96. Des interventions plus ponctuelles peuvent avoir lieu, comme la construction de colonnes à Apollonia de la Salbakè, par Damagoras fils d’Iasôn et Attalos fils de Damas fils d’Iasôn97, dont le premier était agoranome de la cité. À Tralles Ti. Iulius Claudianus qui a exercé de nombreuses charges pour la cité, dont celle d’agoranome, exécuta sa promesse de donner “vingt colonnes pour l’agora”, εἰς τὴν ἀγορὰν κίονας εἴκοσι98, au ier s. Un agoranome de Iulia Gordos en Phrygie fit faire 10 colonnes pour l’obtention de cette magistrature, probablement sous le règne conjoint de Marc Aurèle et de Commode99. Des menus travaux d’entretien des portiques de l’agora sont encore attestés au ive s. à Aphrodisias. Un évergète local, Ménandros, qui est bouleute, et un gouverneur de Carie, Fl. Pelagius Ioannès, ont l’un et l’autre donné une colonne : le premier la septième colonne depuis l’est du portique sud de l’agora, le second la huitième colonne de ce portique100. Il s’agit bien de la place qui s’ouvre devant le bouleutèrion et où probablement se trouvait le grammatophylakion de Iasôn : la place adjacente au sud fonctionne probablement avec les “thermes d’Hadrien” avec lesquels elle communique à l’est101 et n’est donc pas une agora. L’agora d’Aphrodisias associe donc tout naturellement espaces commerciaux et activités politiques. En revanche une place comme celle d’Éphèse, appelée “agora civique”, paraît peu conforme à ce que sont habituellement les agoras dans les cités d’Asie mineure occidentale, car on n’y trouve que des espaces dédiés aux activités religieuses et politiques ; d’ailleurs elle n’est jamais désignée dans les inscriptions comme espace spécifique ni identifiée comme “agora”. Pour conclure ce bilan, il est donc essentiel de départager les inscriptions où l’agora est effectivement mentionnée dans le texte grec de celles où elle n’est pas mentionnée : des identifications abusives peuvent avoir lieu entre toute grande place à portiques et ce qui était réellement une agora, à savoir d’abord un espace où s’exerçait l’autorité de l’agoranome102. La mention de la construction de colonnes peut en particulier susciter la confusion103. Ainsi à Aphrodisias, quatre colonnes furent érigées par Papianus et Ménippos ; l’inscription a été retrouvée près des bains, donc non pas sur l’agora à proprement parler, mais dans l’espace appelé “portique de Tibère”, qui comporte un bassin très étendu en son centre, entre les “thermes d’Hadrien” (appellation moderne), le théâtre et l’agora avérée au nord104. Elle ne concerne donc pas une intervention sur l’agora. De même des portiques furent construits par des agonothètes à Métropolis d’Ionie entre 4 et 14105 ; à Iasos, des dédicaces de colonnes renvoient bien plus probablement au gymnase puisque les dédicants étaient des gymnasiarques et que les tambours qui portaient les deux inscriptions en question avaient également reçu la gravure de décrets honorifiques pour des éphébarques106.
24À Hiérapolis une inscription inédite est signalée par P. Barresi107 : un portique est dédié à Antonin le Pieux par un dédicant inconnu, au nord de la porte de Frontin, vers 150, sur l’agora avec portique-basilique à trois nefs le long du côté nord. L. Robert voulait également voir dans une inscription de Sébastopolis de Carie une intervention sur l’agora de la cité, mais le texte paraît très fragmentaire108.
Basiliques
25La forme particulière qu’ont prise les basiliques en Asie mineure est définie par P. Gros109 : “l’importance de la dimension longitudinale et la faible différenciation des nefs” rendent parfois difficile d’identifier ce monument au sein du groupe des portiques. R. Ginouvès souligne d’ailleurs l’identité de fonctions entre la basilique, “construction qui caractérise la ville romaine”, et le portique, caractéristique de la cité grecque, “avec des fonctions qui sont, au moins en partie, les mêmes, lieu de rencontres, de réunions, de négociations commerciales”. La basilique aurait cependant pour fonction spécifique de servir “presque obligatoirement à l’administration de la justice”110. Comme pour les bouleutèria étudiés par J.-Ch. Balty, P. Gros recommande de les identifier grâce à leur position dans le plan urbain et à leur association architecturale avec d’autres monuments, tels que le bouleutèrion, dans les cas d’Aphrodisias et d’Iasos notamment.
Tableau 2. Interventions sur des bâtiments identifiés comme des “basiliques”.
Cité | Date d’attestation | Commanditaires | Intervention réalisée | Référence |
Éphèse | Entre 11 et 14 | C. Sextilius Pollio | Basilique de la place civile | AE, 1993, 1498 |
Euménéia | Sous Néron | Cité | Porte ( ?) de la basilique | MAMA IV, 334 |
Éphèse | ier s. | Vipsania Olympias et Vipsania Polla | 5 000 deniers pour la restauration de la basilique, par chacune | IK, 13-Ephesos, 987 et 988 |
Smyrne | Peu après 123 | Claudius Bassus | Pavement de la basilique | IK, 24.1-Smyrna, 697 |
Smyrne | Peu après 123 | Lucius Vestinus | Pavement de la basilique devant le bouleutèrion, et portes en bronze | IK, 24.1-Smyrna, 697 |
Milet | Haut-Empire | Iasôn | “pièce intérieure de la basilique” | Didyma, 264 |
Philadelphie de Lydie | Haut-Empire | Héliodôros | 50 000 deniers pour la construction du propylée de la basilique | CIG 3419 |
26Dans la capitale de l’Asie, la basilique occupe le côté nord de l’agora civile. Elle fut construite entre 11 et 14 comme l’indique une dédicace bilingue qui courait sur une seule ligne, le grec après le latin111. Elle est due à une générosité de C. Sextilius Pollio. Le terme “basilique” apparaît dans les deux langues à la première place, avant même la mention des dédicataires Artémis, Auguste, Tibère et le peuple d’Éphèse : Basili[cam] et [Βασ]ιλι[κὴν στοçάν]. Cette basilique a fait l’objet de nombreuses études, notamment dans le cadre de réflexions sur les innovations urbanistiques d’Éphèse à l’époque augustéenne112. À l’époque hellénistique un portique à nef unique se trouvait à son emplacement. La nouvelle basilique est séparée de l’agora par cinq marches, et compte trois nefs, la nef centrale étant surélevée par rapport aux deux autres. À l’ouest s’élève une salle, le Chalcidicum, où étaient exposées les statues d’Auguste et Livie assis. La basilique d’Éphèse apparaît encore dans les sources épigraphiques : dans le courant du premier siècle (d’après la titulature de la cité qui ne comporte pas de néocorie) Vipsania Olympias a entre autres évergésies “donné pour la restauration de la basilique 5 000 deniers”, [ἐπ] ιδοῦσαν εἰς ἐπι[σκε]υὴν τῆς βασιλικῆς δη(νάρια) πεντακισχείλια113. Cette ancienne prêtresse d’Artémis est honorée par le Conseil et le peuple pour l’ensemble de ses bienfaits ; remarquons qu’avant la mention de la restauration de la basilique, vient celle de distributions “au Conseil et à la gérousie”, qui avaient toutes deux leur siège justement au nord de la basilique. Sa sœur Vipsania Polla est honorée en des termes semblables pour des faits similaires114. Ces deux prêtresses d’Artémis, filles d’un citoyen romain, ont accompli des évergésies cohérentes dans un système mettant au cœur de leur action les institutions les plus élitistes de la cité.
27À Smyrne, dans la liste de souscripteurs datant de peu après 123 après l’obtention d’une seconde néocorie de la part d’Hadrien, l’un des premiers donateurs dont le nom est conservé (le haut de la stèle est brisé) s’appelle Claudius Bassus ; cet agonothète des Néméséia a promis de “faire paver la basilique”, στρώσειν τὴν βασιλικήν (l. 5-6)115. Lucius Vestinus participe également à la réalisation du pavement de la basilique, “devant le bouleutèrion”, et il a promis de faire faire des portes en bronze, τὴν βασιλικὴν στρώσειν τὴν πρὸς τῷ βουλευτηρίῳ καὶ χαλκᾶς τὰς θύρας ποιήσειν (l. 11-13). Comme à Éphèse, la basilique est étroitement associée au centre civique de la cité et elle sert de vestibule au bouleutèrion. Les portes en bronze concernent plus probablement le bouleutèrion. À Smyrne, la cité de l’époque d’Hadrien a été en grande partie détruite par un tremblement de terre en 177116. Les bâtiments construits après 123 ont été touchés d’après les descriptions d’Aelius Aristide : l’embellissement apporté à l’agora à cette époque a disparu, οἴχεται δὲ ἀγορᾶς κάλλη117.
28Comme d’autres types d’édifices, la construction de basiliques, pour ambitieuse qu’elle soit, ne semble pas réservée uniquement aux grandes métropoles. À Aizanoi en 169, un bienfaiteur dont le nom est perdu a “également offert les objets sacrés qui se trouvent dans l’exèdre de la basilique”, ἀναθέντα καὶ τὰ ἱερὰ τὰ ἐν τῇ ἐξέδρᾳ τῆς βασιλικῆς (l. 13-15)118. Dans des circonstances difficiles sous le règne de Marc Aurèle, ce bienfaiteur n’a pas seulement pourvu à la sauvegarde spirituelle de la cité mais a aussi fourni des hommes en armes à Marc Aurèle combattant sur le Danube119, et il a donné de l’argent pour le ravitaillement en céréales. Une exèdre se trouvait dans la basilique, sans doute à l’une des extrémités de celle-ci. À Éphèse, le Chalcidicum qui se trouve à l’extrémité de la basilique contenait les statues d’Auguste et de Livie : l’inscription suggère un dispositif semblable à Aizanoi. Cette cité connaît une importance croissante : elle devient siège de conuentus à une date inconnue après le règne de Domitien. Il n’est pas possible de confronter cette inscription à des données archéologiques ou épigraphiques concernant une éventuelle agora. À Milet, Iasôn, qui a tenu la charge de prophète à Didymes – ou bien ses enfants en accomplissement d’une promesse de leur père – a fait construire au Haut-Empire (d’après la graphie) “la pièce intérieure de la basilique” (l. 8)120. La stèle commémorant ces travaux se trouve à Didymes et a été érigée lors de la charge de prophète d’Iasôn (l. 1). Cependant les travaux mentionnés ici correspondent mieux à un contexte urbain, civil, à la ville de Milet donc (mais Kl. Tuchelt comme A. Rehm considèrent que la basilique se trouve à Didymes). L’inscription est assez fragmentaire (le mot “basilique” est cependant préservé en entier) ; les lignes suivantes décrivent les embellissements réalisés dans cette pièce intérieure avec force détails sur les stylobates, les chapiteaux, les frises, les corniches.
29Des cités de l’arrière-pays furent également concernées par ce type de constructions. À Euménéia, sous Néron, Apollônios et Herméias furent “responsables des travaux de la porte ( ?) de la basilique”, [ἐργεπισ] τάται [τῆς πύλης τῆς βα]σιλικῆς121, sur l’injonction du légat d’Asie, après un tremblement de terre. À Philadelphie de Lydie Héliodôros a donné à l’occasion de sa grande-prêtrise 50 000 deniers destinés “à la construction du propylée de la basilique”, εἰς τὴν κατασκευὴν τοῦ προπυλαίου τῆς βασιλικῆς (l. 11-13)122. Héliodôros a également été agoranome, responsable de l’approvisionnement en blé : ces fonctions liées à l’agora, accompagnées de la construction du propylée de la basilique, esquissent une cohérence dans les interventions de ce personnage dans la cité. Il a pourvu à l’approvisionnement de la cité et à la nourriture des citoyens (il avait fait distribuer de la nourriture), et au cadre monumental de cet acte.
Conclusions
30Dans les sources épigraphiques, la basilique apparaît étroitement liée à l’agora et au bouleutèrion. Elle abrite des exèdres où sont exposées les statues des empereurs, des statues divines, et les interventions que nous avons signalées s’attachent à l’embellir, que ce soit en la pavant ou en réalisant une entrée monumentale qui permet d’accentuer le caractère majestueux de cet espace. Récemment, des fouilles ont permis de mettre au jour des édifices assimilés à des basiliques, mais sans désignation épigraphique, à Aphrodisias, à Hiérapolis, et, selon P. Gros, à Iasos123. À Smyrne, le portique nord de l’agora, sur deux étages avec cryptoportique, comportant trois nefs au sol, reconstruit à l’époque de Marc Aurèle a également des caractéristiques propres à une basilique124. À Aphrodisias, le portique nord de l’agora nord sur lequel s’ouvre le bouleutèrion serait une basilique125. Il est possible également que le grammatophylakion, le bâtiment des archives, ait ouvert sur ce portique. Cette topographie s’accorde avec le précédent éphésien, où tout un ensemble d’édifices civiques donne sur la basilique. Les publications sur Aphrodisias ne désignent cependant pas ce bâtiment comme tel. Un bâtiment d’époque flavienne au sud du “portique de Tibère” et à l’ouest du théâtre est en revanche désigné sous ce vocable par les archéologues qui ont fouillé le site126. Sa disposition dans le plan d’Aphrodisias surprend néanmoins : elle se trouve au sud du “portique de Tibère”, disposée de manière perpendiculaire à l’ensemble balnéaire désigné comme les “thermes d’Hadrien”. La zone au-delà, au sud, n’est pas fouillée. À Hiérapolis, la fouille de l’agora est récente et inachevée. Cependant une basilique a été reconnue à l’est, séparée du reste de la place par une volée de dix-sept marches127. Les chapiteaux de la façade de la basilique comportaient des lions attaquant des taureaux, motifs que l’on retrouve à Laodicée du Lycos voisine, qui dateraient de l’époque d’Hadrien128. Au centre se trouvait un propylée empiétant sur l’escalier. On ignore si des bâtiments ouvraient sur cette basilique129.
31Comme pour les macella, dont nous avons constaté la présence dans de nombreuses cités (plutôt celles de l’arrière-pays), il paraît difficile d’interpréter la présence de basiliques dans les cités d’Asie. Une influence directe de Rome est délicate à déceler, ou même un sens idéologique prononcé de ce monument. Ce sont toujours les notables de la cité, ses magistrats ou la cité elle-même, qui financent des interventions de construction ou d’embellissement. Bien éloignés des grandes entreprises romaines, même à Éphèse à l’époque augustéenne, il peut être utile de dépouiller ces bâtiments de leurs séduisants atours de fer de lance du contrôle central pour les examiner aussi à l’échelle des conceptions de leurs commanditaires et des idées de leurs usagers. Nous justifions cette lecture d’abord plus quotidienne dans la mesure où l’autorité centrale ne contrôle pas leur construction et où on ne trouve pas de source écrite validant une lecture idéologique de la construction de basiliques dans les agoras, servant d’accès monumental au bouleutèrion. Comme d’autres monuments, les discours des rhéteurs les considèrent comme un élément du kosmos civique.
32Revenons à la conception de l’agora à l’époque romaine dans les villes d’Asie. Si selon H. Halfmann il est possible que les élites pergaméniennes manifestent une certaine réticence à intervenir sur l’agora, en comparaison de celles d’Éphèse130, les documents d’Asie confirment que l’agora ne doit pas être perçue comme un lieu dédié de manière univoque au politique131, dans une grande continuité avec l’époque hellénistique. Derrière les portiques se trouvaient le bouleutèrion, et aussi souvent les bureaux des magistrats de la cité, ainsi que des espaces cultuels ; mais la vie de l’agora est surtout mêlée de contingences pratiques et on y rencontre des gens de toutes sortes qui viennent s’y livrer à diverses activités. De nombreux magistrats ou particuliers s’empressent d’y exécuter des travaux : la cité n’intervient qu’une fois de manière avérée comme commanditaire, et encore dans un contexte très particulier, à Smyrne après le tremblement de terre sous Marc Aurèle. D’après l’état actuel des sources épigraphiques, l’instance impériale n’a jamais mené à bien, en son nom propre, de chantiers importants sur les agoras dans les cités d’Asie. D’autre part, s’il est vrai que les sources épigraphiques relatives à l’agora se tarissent à la fin de l’Antiquité, les sources littéraires (Grégoire de Nazianze notamment) ne témoignent pas d’une rupture fondamentale dans la perception de cet espace largement voué aux activités commerciales, et que les sources décrivent volontiers comme le lieu où tous se retrouvent132, s’assoient, discutent et qui constitue de ce fait et par sa beauté (celle de l’entrée, des portiques, du pavement) un motif de fierté pour tous.
Les Bouleutèria
33Le catalogue des bouleutèria établi par J.-Ch. Balty montre que l’identification de ces bâtiments repose fréquemment sur leur emplacement133 : les salles dévolues aux réunions du Conseil de la cité s’ouvrent en général sur l’agora et se trouvent au centre de la cité, par exemple à Cnide ou à Iasos, contrairement aux odéons, disséminés dans l’espace urbain. Cependant la grandeur de certains bouleutèria (1400 places à Aphrodisias et à Éphèse134) conduit J.-Ch. Balty à souligner qu’ils ont pu remplir d’autres fonctions que politiques, comme salles de cours ou de conférences135. De plus leur emplacement peut en réalité varier : Pausanias indique136, sur la cité des Éléens, que “dans [leur] gymnase il y a le bouleutèrion, et ils y font des déclamations publiques, de discours improvisés et de discours écrits, de toutes sortes. Il est appelé le Lalichmion, d’après le nom de celui qui l’a dédié”. Cette ambivalence apparente doit être replacée dans le contexte culturel et politique de l’Asie romaine. Le bouleutèrion fut le centre de la vie politique civique à l’époque romaine, quand l’évolution vers un régime de notables semble marquée137 : les pratiques cultuelles et culturelles et le système oligarchique s’associaient pour le désigner comme l’un des lieux essentiels de la cité. Il faut vérifier dans quelle mesure il attira l’intervention des riches bienfaiteurs et poser les premiers éléments d’une comparaison avec d’autres lieux de la vie civique, comme le théâtre.
Art oratoire et activités politiques
34De nombreux récits montrent que le bouleutèrion reste un théâtre essentiel de la vie politique locale et devient même, d’un point de vue institutionnel, “le premier édifice de la cité”138. Dion de Pruse évoque ses allers-retours entre le théâtre pour parler au peuple et le bouleutèrion pour exprimer ses propositions sur l’urbanisme nouveau de la cité devant le Conseil139 : “et quand, plus tard, je vous ai de nouveau soumis cette affaire, plusieurs fois au bouleutèrion et plusieurs fois au théâtre afin que, en cas de désaccord et de refus de votre part, je n’importune plus personne – je pressentais en effet le travail qui en résulterait pour moi – le projet fut plusieurs fois ratifié par vous, plusieurs fois par les gouverneurs, sans que personne protestât”. Dans un autre discours, il montre qu’un patriote ne peut pas considérer avec indifférence les lieux de la vie politique de la cité, l’agora, le prytanée, le bouleutèrion. Il qualifie cet ensemble de “sacré” : en effet, le bouleutèrion devient le lieu d’activités cultuelles de plus en plus importantes140. Aelius Aristide, déclamant au bouleutèrion de Pergame, désigne le bâtiment par cette périphrase141 : ἐντεῦθεν ἔσχε τὴν ἀρχήν. La fonction politique du bâtiment n’est donc pas perdue de vue à l’époque romaine. Plutarque142 fait l’éloge du “citoyen sociable, altruiste, patriote, soucieux du bien public et vraiment politique” car “si en cas d’urgence ou sur un appel pressant il se rend au théâtre ou dans la salle du Conseil, ce n’est pas pour y occuper la première place ni non plus pour s’y divertir, une fois arrivé, comme à un spectacle ou à un récital”. Les affaires politiques se traitent également au bouleutèrion et au théâtre à l’époque de Plutarque, et même des affaires politiques importantes ; les notables, membres du Conseil, ont l’habitude d’aller sans cesse de l’un à l’autre pour suivre les affaires de la cité. Dans les Préceptes politiques143, l’homme politique qui veille aux intérêts de sa cité passe du temps “à la tribune ou sur la plate-forme de la scène”, ἐπὶ τοῦ βήματος ἢ τοῦ λογείου, évidemment la tribune du bouleutèrion et la scène du théâtre. Les sources attestent donc une activité politique continuée et exigeante à l’époque romaine dans les cités d’Asie144. Simplement, comme le théâtre, le bouleutèrion par sa forme architecturale se prête également pour le plaisir des bouleutes et d’un public cultivé à des récitals et des déclamations d’orateurs.
35Aelius Aristide se plaît ainsi à décrire la cohue suscitée dans ce bâtiment par ses exploits rhétoriques à Smyrne. Le passage vaut la peine d’être cité :
“Je rêvai que je voyais le soleil se lever au-dessus de l’agora et que j’avais ces mots dans la bouche : “Aristide déclamera aujourd’hui au Conseil à la quatrième heure”. Je me réveillai prononçant ces mots et les entendant, si bien que je me demandai si c’était songe ou état de veille. J’appelle les principaux de mes amis et je leur rapporte l’ordre. À l’heure même on posa une affiche : de fait, l’heure indiquée par le rêve approchait ; nous fûmes bientôt au lieu même. Or, bien que mon entrée en scène se fît ainsi à l’improviste et que la plupart eussent été tenus dans l’ignorance, néanmoins voilà la salle du Conseil si pleine qu’on ne pouvait rien voir que des têtes et qu’on n’eût même pas fait passer la main nulle part au travers de la foule. Alors certes, la clameur populaire, la bienveillance et plutôt même, s’il faut dire le vrai, l’enthousiasme furent tels de tous côtés qu’on ne voyait personne qui restât assis ni pour le prélude ni quand, m’étant levé, je concourus moi-même ; mais, dès le premier mot, les voilà tous dressés, qui expriment des angoisses d’enfantement, marquant leur joie, sont frappés de stupeur, font de la tête des signes d’approbation, poussent des cris comme jamais encore auparavant, chacun tenant pour un gain personnel tout ce qu’il peut m’attribuer des plus importants honneurs”.
36Dans le même temps un rival d’Aelius Aristide d’origine égyptienne faisait une déclamation dans “l’Odéon proche du port”. Aristide remarque avec ironie et contentement145 : “Alors que j’eus quitté le Conseil et que je me trouvais au bain, quelqu’un m’apprend que l’autre individu, bien qu’il eût affiché son affaire trois jours à l’avance pour ce jour même, n’avait réuni à l’Odéon que dix-sept auditeurs en tout”.
37J.-Ch. Balty analyse la tenue d’événements culturels dans le bouleutèrion comme le signe de l’affaiblissement des activités traditionnelles dans cet édifice146 : “avec le temps et un certain déclin de l’activité politique, d’autres manifestations de la vie publique des cités avaient peu à peu pris place dans le bouleutèrion, cours et conférences principalement, qui attiraient un plus large public que les seules séances de la boulé”. En réalité, les deux fonctions, culturelle et politique, du bouleutèrion, sont admises et ne sont pas pensées en termes de concurrence l’une par rapport à l’autre, la première affaiblissant la seconde. Ces deux champs de l’activité intellectuelle ne sont pas séparés aux yeux des Grecs : l’homme cultivé est normalement appelé à prendre les meilleures décisions, celui qui parle bien est le meilleur défenseur pour sa cité devant les autorités romaines ou peut faire entendre ses positions devant les autres bouleutes, puis devant le peuple à l’Assemblée. Pausanias écrit qu’au bouleutèrion des Éléens ont lieu des déclamations publiques147 : cette pratique est courante et communément admise, elle n’a rien de nouveau. Faire un bon discours peut être le meilleur moyen de servir la cité prise dans les difficultés, comme Rhodes après un tremblement de terre en 142 : Aelius Aristide prononce un discours dans le bouleutèrion pour encourager à la reconstruction de la cité, et précise que souvent des joutes oratoires s’y sont engagées auparavant148.
Bouleutèria, odéons et autres salles : des salles-musées ?
38Dans les cités se trouvaient en général plusieurs salles149 convenant à la réunion d’une assemblée plus ou moins nombreuse, moins importante en tout cas que l’ensemble des citoyens de la cité. Leur taille et leur disposition se prêtaient aussi bien aux activités d’un conseil de la cité, qu’à des activités culturelles telles que les déclamations, conformes aux attentes des notables, formés à la paidéia grecque où les talents oratoires et la culture étaient normalement des valeurs importantes. Dans les provinces orientales de l’Empire romain, la différenciation entre odéon et bouleutèrion ne paraît donc pas toujours valide. Des salles appelées odéons par les archéologues sont en réalité des bouleutèria, comme le montre J.-Ch. Balty : des salles qui ouvrent sur un portique et une place, entourées d’autres monuments de la vie politique de la cité, sont bel et bien des bouleutèria, sans que cela empêche que concerts et déclamations y aient lieu, comme l’a montré l’exemple d’Aelius Aristide à Smyrne, et le texte de La salle de Lucien. P. Gros réévalue les critères de cette typologie, pour l’Orient romain150 : “nous devons malgré tout distinguer deux catégories : celle qui semble avoir été réservée, de préférence, à des spectacles musicaux et celle qui, du fait de ses aménagements ou de son environnement urbain, paraît avoir été plutôt destinée, du moins au moment de sa construction, à des assemblées administratives ou consultatives”.
39Un autre type d’activité culturelle est attesté dans les sources, auquel on ne prête généralement pas une attention suffisante. Les bouleutèria (ou les salles avec hémicycle ou gradins) sont volontiers un lieu d’exposition d’œuvres d’art. Plusieurs textes le prouvent : tout d’abord La salle de Lucien, car la salle où ont lieu les déclamations est ornée de peintures représentant Persée et Andromède, le meurtre de Clytemnestre, Apollon et Branchos, Persée ; une statue d’Athéna est exposée au-dessus de la porte, puis suivent la peinture d’Athéna et Héphaistos, des scènes de la vie d’Orion, Ulysse démasqué par Palamède, Médée151. Les mythes évoqués ont tous une renommée panhellénique, sauf un, qui est un mythe de fondation local : Branchos est à l’origine de la famille qui a fondé le sanctuaire d’Apollon à Didymes. Il nous semble que cette particularité doit être soulignée : la vue de fresques racontant ce mythe de fondation avait un écho à Milet plus que partout ailleurs ; la “salle” pourrait-elle être celle d’une cité d’Ionie, voire de Milet même ? Le titre vague de l’œuvre peut laisser subsister une ambiguïté sur la nature du bâtiment. Mais le rapprochement avec d’autres textes suggère à notre sens qu’il s’agit bel et bien d’un bouleutèrion. En effet, dans les progymnasmata de Libanios, deux exercices s’intitulent152 : “commentaire d’une peinture dans le bouleutèrion”. Il s’agit, tout comme le discours de Lucien, d’un exercice de description d’une œuvre d’art, une ἔκφρασις. Libanios commence la correction du premier exercice proposé à ses élèves comme suit153 (le second exercice proposé ne comporte pas de description de l’endroit) : Ἐν δὲ τῇ αὐλῇ τοῦ βουλευτηρίου, ἥ δέ ἐστιν οὐ μεγάλη μέν, καλὴ δὲ στοῶν ἐν μέσῳ τεττάρων, ἃς ἐποίουν οἱ κίονες, εἷδον καὶ τοιάνδε γραφήν, “dans la salle du bouleutèrion, qui sans être grande est belle avec ses quatre portiques au milieu que forment les colonnes, j’ai également vu cette peinture”. On reconnaît la disposition habituelle des salles du Conseil : taille modeste mais beauté architecturale et picturale. Les “portiques” évoqués peuvent correspondre à des espaces de circulation délimités par des colonnes sur les côtés de l’hémicycle154, ou à des colonnes engagées155. Suit la description du tableau.
40L’emploi au pluriel du terme bouleutèrion tout comme la décoration de ces salles, ou l’usage qu’en fait facilement Aelius Aristide à Smyrne pour déclamer alors que l’odéon est déjà occupé, suggèrent une certaine souplesse de leur usage. Il n’est pas nécessaire d’en déduire que cela se produit aux dépens des activités politiques civiques : Plutarque, Aelius Aristide, Dion considèrent toujours le bouleutèrion comme un lieu d’exercice politique, y compris sur des sujets importants.
Bilan des interventions sur l’édifice du bouleutèrion
41Comme pour les agoras, il s’agit ici d’établir une typologie des interventions architecturales concernant les bouleutèria à l’époque romaine, connues par des inscriptions. Ne rentrent donc pas dans ce chapitre les inscriptions en l’honneur d’évergètes ou d’empereurs retrouvées au bouleutèrion, sans qu’elles mentionnent des interventions effectuées sur ces bâtiments.
Tableau 3. Interventions sur des bouleutèria en Asie au Haut-Empire.
Cité | Date d’attestation | Commanditaires | Intervention réalisée | Référence |
Éphèse | c. 50 a.C. ? | Zopyros fils de Balagros | Construction ou rénovation du bouleutèrion ? | IK, 13-Ephesos, 740B |
Tralles | ier s. | Ti. Iulius Claudianus | Exèdre (dans le bouleutèrion ?) | IK, 36.1-Tralleis, 145 |
Smyrne | Peu après 123 | Lucius Vestinus | Pavement de la basilique devant le bouleutèrion, et portes en bronze | IK, 24.1-Smyrna, 697 |
Éphèse | c. 145 | P. Vedius Antoninus et Flauia Papiana | Construction du bouleutèrion (ou restauration de très grande ampleur d’un bâtiment remontant à l’époque augustéenne) | IK, 12- Ephesos, 460 + SEG, 53, 1280 |
Stratonicée de Carie | Entre 150 et 200 | M. Sempronius Clemens | La “chapelle” dans le bouleutèrion et un ensemble de statues | IK, 21-Stratonikeia, 289 |
Sanaos, en Phrygie | Haut-Empire | Kallistratos fils de Diodôros | Construction du bouleutèrion | Ramsay 1895, 233 n o 83 |
42À Éphèse, P. Vedius Antoninus et sa femme Flauia Papiana ont fait construire le bouleutèrion vers 145. Deux inscriptions commémorent cette construction : l’une est placée sur une architrave, l’autre sur une frise murale156. Toutes deux sont très fragmentaires. L’identification de ce bâtiment comme bouleutèrion (le nom du bâtiment n’est pas cité dans la dédicace) est assurée par sa position qui l’associe étroitement à l’agora dite civile, d’après J.-Ch. Balty157, malgré son appellation moderne d’“odéon”. Dans ce monument furent affichées les lettres d’Antonin le Pieux aux archontes et au Conseil en 145 à propos de P. Vedius Antoninus Sabinianus158, qui serait l’auteur de la troisième phase de construction connue par les inscriptions. Smyrne est l’autre grande cité où des travaux pour embellir le bouleutèrion sont connus : ils portent sur les accès à cet édifice, derrière un large portique-basilique, et furent financés par un particulier159. À Stratonicée de Carie, M. Sempronius Clemens, parmi d’autres constructions ou restaurations, a notamment fait construire “la chapelle dans le bouleutèrion”, ναὸν κατασκευάσας ἐν τῷ βουλευτηρίῳ160. Il s’agit comme nous l’avons vu (I. 1) de statues de dieux dont M. Sempronius Clemens a pour la plupart exercé la prêtrise. Le récit détaillé dans cette première inscription est dû à M. Sempronius Clemens lui-même, et a été gravé sur une stèle du temple de Zeus Panamara. Cette action est résumée dans une autre inscription honorifique due au Conseil, au peuple et à la gérousie : “lui qui a fait construire une chapelle dans le péristyle du bouleutèrion avec ses statues dans tout son ornement”, κατεσκευακότα ναὸν ἐν τῷ περιστώῳ τοῦ βουλευτηρί<ου> σὺν τοῖς ἀγάλμασιν ἐν παντὶ τῷ κόσμῳ161. Ces statues sont peut-être mentionnées dans un règlement sur le culte de Zeus Panamaros et d’Hécate162 de la fin du iie siècle d’après L. Robert163, où l’on décide que des hymnes seront chantés par des enfants au bouleutèrion et au sanctuaire d’Hécate à Lagina. À la fin de cette inscription il est mentionné qu’elle doit être gravée ἐν τῇ ἐξέδρᾳ τοῦ βουλευτηρίου ἐν δεξιᾷ, “dans l’exèdre du bouleutèrion à droite” : il est possible que l’exèdre dans cette inscription et la “chapelle” construite et ornée par M. Sempronius Clemens soient identiques ; architecturalement, le dispositif est similaire. À Sanaos, cité du conuentus d’Apamée, Kallistratos fils de Diodôros achète le terrain et construit un bouleutèrion avec son père et ses fils, “avec tout son équipement”, σὺμ πάσῃ κατασκευῇ (l. 6)164 – cette formule que l’on trouve pour les autres types de monuments publics impliquant peut-être ici les machines de vote, un autel, soit le mobilier attendu dans un bâtiment de cette sorte. Cette inscription se termine par la mention “au peuple”, ce qui mérite d’être souligné en l’absence de la mention de toute divinité ou empereur au datif, et alors que le bouleutèrion n’a pas pour fonction d’accueillir le peuple.
43Deux cas enfin restent très incertains. À Tralles dans la vallée du Méandre, en Carie, Ti. Iulius Claudianus fait faire “le revêtement et la mosaïque de cette exèdre” (il faut sous-entendre : l’exèdre où est dressée la colonne portant l’inscription), σκουτλώσαντα δὲ καὶ μουσώσαντα καὶ ταύτην τὴν ἐξέδραν165, où les bouleutes devront recevoir chaque année le jour de son anniversaire 250 deniers ; la stèle a été faite au nom du Conseil, par un bouleute. Il est possible que l’exèdre se trouve dans le bouleutèrion lui-même. À Ancyre de l’Abbaïtide, la construction d’un bouleutèrion n’est pas attestée malgré une restitution communément admise, mais très incertaine166.
Conclusions
44Malgré son prestige supposé dans un régime de notables ainsi que l’attention portée à ces constructions à l’époque romaine, le bouleutèrion en tant que tel apparaît rarement dans les inscriptions faisaint connaître des interventions monumentales, qu’il s’agisse des dédicaces qui se trouvent sur le bâtiment lui-même comme pour P. Vedius Antoninus, ou de stèles commémorant toute la carrière d’un notable, comme celle portant une inscription rédigée par M. Sempronius Clemens167. Cette discrétion imputable en partie seulement au caractère hasardeux des découvertes montre que dans les cités d’Asie le bouleutèrion n’est pas la première préoccupation des notables lorsqu’ils entreprennent d’embellir leur cité. Un bouleutèrion bien fouillé comme celui de Milet ne comporte pas d’inscription architecturale d’époque romaine : les inscriptions de cette époque sont uniquement destinées à honorer les empereurs. L’évergétisme monumental à l’époque impériale dans les cités d’Asie comportait donc une dimension populaire, au sens où il n’est pas uniquement dû à des notables, pour des notables. Il ne s’agit pas seulement d’un comportement d’une classe qui satisfait ses ambitions sans se soucier des aspirations matérielles et culturelles du reste de la cité. Ainsi les interventions sur les édifices balnéaires sont bien plus nombreuses, et nous verrons que ce bâtiment en est venu à revêtir une dimension politique marquée. Préoccupation électorale ou souci réel du bien-être commun, cette orientation de l’argent des notables vers des édifices qui ne leur sont pas uniquement réservés est significative.
Le problème de la datation des bouleutèria
45L’époque antonine marque un mouvement général de restauration des bouleutèria, selon l’historiographie contemporaine : l’étude de J.-Ch. Balty montre que le bouleutèrion d’Iasos date de l’époque d’Hadrien168, celui de Nysa de l’époque d’Antonin le Pieux, entre 147 et 151, d’après les statues de la famille impériale qui y sont exposées169, celui de Cnide probablement de l’époque d’Hadrien, quand la terrasse où il se trouve connaît un ensemble de réaménagements170 ; celui de Stratonicée de Carie, embelli à l’époque des Sévères par M. Sempronius Clemens, ne serait pas antérieur au iie siècle171 (cependant une étude récente propose qu’il remonterait, pour des raisons stylistiques, à la fin de l’époque hellénistique172). Le bouleutèrion de Laodicée du Lycos, qui ouvre sur l’agora “civile” de la cité, a fait l’objet de nouvelles études depuis l’ouvrage de J.-Ch. Balty173 : d’après son décor il daterait de l’époque d’Hadrien174. L’époque des Sévères compléterait ce premier élan : le bouleutèrion d’Aphrodisias, orné de statues, Claudia Antonia Tatiana et son oncle L. Antonius Claudius Dometinus Diogénès, daterait du iiie siècle175, de même que celui de Cibyra176. À Ilion, à cause de la signification particulière de la cité dans l’idéologie familiale julio-claudienne, le bouleutèrion serait l’une des nombreuses entreprises lancées par Auguste dans la cité177. Le grand mouvement, au iie siècle, de construction des bouleutèria est généralement considéré comme un effet de la politique d’Hadrien et de ses successeurs en faveur des cités grecques178. Si un contexte général favorable est indéniable, cependant l’intervention directe de l’empereur est rarement, sinon jamais, décelable.
46Les monuments de l’époque hellénistique furent embellis par des statues et autres programmes iconographiques, comme on peut le voir à Milet, ou à Stratonicée d’après les inscriptions. Beaucoup de bouleutèria néanmoins auraient été des constructions nouvelles : selon J.-Ch. Balty, à Éphèse comme à Aphrodisias et dans d’autres cités, le Conseil de la cité se réunissait dans le théâtre de la cité avant la grande vague de constructions sous les Antonins179 que nous venons d’énumérer. On peut ajouter les monuments suivants à cette liste : à Nysa on ne trouverait pas d’état hellénistique du bâtiment ; le bouleutèrion d’Alabanda, à l’angle nord-ouest de l’agora180, daterait également de l’époque romaine, ainsi qu’à Magnésie du Méandre, où le bouleutèrion s’ouvre au sud-est de l’agora181. À Téos les notations de J.-Ch. Balty suggèrent une datation d’époque romaine182. À Iasos en revanche les inscriptions montrent qu’il y avait bien un monument d’époque hellénistique183, à un autre endroit que celui d’époque romaine qui a été construit sur la muraille hellénistique. À Milet, le bouleutèrion date de l’époque hellénistique184, entre 175 et 164 ; celui de Priène de 200 a.C. environ185 ; celui de Métropolis dont des fouilles récentes ont révélé l’excellent état de conservation, malgré la superposition à cet emplacement de la muraille byzantine entre les xiie et xive siècles, daterait de la fin de l’époque hellénistique. Les rangées de sièges du bouleutèrion de Priène sont de forme carrée de même que dans les salles du Conseil d’Héraclée du Latmos et Notion186, mode qui devait paraître archaïque à l’époque romaine : ces trois dernières cités ont toutes eu un éclat à l’époque hellénistique qu’elles ne conservent pas à l’époque romaine, ce qui a conduit à la préservation du bouleutèrion dans son état de l’époque hellénistique. Le bouleutèrion de Bargylia n’est pas daté187, ni l’éventuel bouleutèrion de Hiérapolis, dont l’identification sur le terrain n’est pas sûre188. À Smyrne le bouleutèrion n’est connu que par des passages d’Aelius Aristide et une inscription qui précise qu’il s’ouvrait sur une basilique189.
47Si l’on s’en tient à ces données, la vision des constructions du iie siècle risque d’être faussée. J.-Ch. Balty écrit : “Qu’à Aphrodisias comme à Éphèse le bouleutèrion ne remonte qu’au iie siècle de notre ère ne surprendra pas davantage et constitue un exemple de plus d’un phénomène de politique municipale à présent bien établi ; jusqu’à ce moment, c’est au théâtre que devaient se réunir les diverses assemblées locales ainsi que suffisent à en assurer les très nombreux documents d’archive inscrits sur le mur sud de la parodos nord [à Aphrodisias] puis, lorsque la place fit défaut, sur l’analemma nord”. Cette assertion est problématique à double titre. Tout d’abord, que le théâtre ou un autre lieu de la cité serve de lieu d’exposition des lettres impériales reçues et de “lieu le plus en vue de la cité” pour la gravure de documents importants n’indique pas l’absence de bouleutèrion. D’ailleurs cet argument ne serait valable que si après la construction du bouleutèrion d’Aphrodisias, les lettres impériales, lisibles sur le mur sud de la parodos nord du théâtre, y étaient désormais gravées ; or comme le remarque J.-Ch. Balty lui-même, les lettres impériales à Aphrodisias au théâtre vont d’Octave à Gordien III et Trajan Dèce, et ont été gravées à partir de l’époque d’Hadrien190.
48Ensuite, le bouleutèrion est souvent mentionné dans des textes épigraphiques191 plus anciens que les bouleutèria archéologiquement attestés, ce qui prouve leur existence antérieure, au même endroit ou à un autre dans la cité, sans que les découvertes archéologiques aient permis de les étudier. À Éphèse, J.-Ch. Balty penche pour la création ex nihilo du bouleutèrion par P. Vedius Antoninus, tandis que pour d’autres savants192, il serait une création d’époque augustéenne, lors de la grande vague de constructions à cette époque dans la capitale d’Asie comme la basilique sur laquelle il s’ouvre193. D’après les suggestions de J.-Ch. Balty, la boulè se serait auparavant réunie au théâtre : “en 104 encore la βουλὴ était confinée à l’un des cunei du théâtre lors des assemblées”, d’après l’inscription de C. Vibius Salutaris qui parle du cuneus du Conseil194. Or la boulè bénéficiait normalement d’emplacements réservés au théâtre, lorsque toute la cité s’y réunissait pour des célébrations exceptionnelles. Cet argument n’est donc pas suffisant et il est effectivement logique de supposer l’existence d’un bouleutèrion au moins à partir de 11 p.C., que P. Vedius Antoninus se soit ensuite livré à une reconstruction totale ou partielle du bâtiment. Mais un bouleutèrion a existé à Éphèse auparavant, comme le prouve clairement une inscription du premier siècle a. C.195 :
ὁ δῆ [μος –]
Ζώπυρον Βαλάγ[ρου –]
τὸ βουλευτήριον [–]
“Le peuple [-] (a honoré ?) Zôpyros fils de Balagros [-] le bouleutèrion”.
49L’inscription a été découverte utilisée en remploi dans le mur nord de la salle d’Hestia, au prytanée196. Le prytanée est une des entreprises d’époque augustéenne de la cité197 : le remploi date donc de la fin de l’époque hellénistique, et suggère l’existence d’un bouleutèrion antérieur, probablement sur la place haute d’Éphèse comme le suggère l’éditeur de l’inscription198. La simple cohérence historique invite d’ailleurs à supposer (mais il n’existe pas de preuve) l’existence d’un bouleutèrion à Éphèse bien auparavant. Cela n’a rien pour surprendre dans les cités de l’époque hellénistique. L’évolution d’époque romaine vers un régime oligarchique plus marqué n’a pas fait surgir du néant, en Asie mineure occidentale, l’institution du Conseil et son lieu de réunion. Dans les cités où le paysage urbain est resté comme figé à l’époque romaine, comme Priène et Héraclée du Latmos, on constate la place essentielle de cette salle à l’époque hellénistique autour de l’agora.
50Pour Aphrodisias également, J.-Ch. Balty a conclu à l’inexistence d’un bâtiment du Conseil avant le iie s. en expliquant cette absence par la réunion du Conseil au théâtre. Or une inscription publiée en 1996 prouve qu’un bouleutèrion existait dans la cité avant celui qui est attesté archéologiquement : il s’agit de l’inscription sur les funérailles d’Adrastos, entre 50 et 75, où la cité avait d’abord proposé que son bienfaiteur fût enterré dans “les ateliers-boutiques publics, face au bouleutèrion”199, ἐν τοῖς ἄντικρυς [τ]οῦ βουλευτηρίου δημοσίοις ἐργαστηρίοις (l. 5-6). Ni Éphèse ni Aphrodisias ne constituent donc des cas particuliers ; les liens entretenus par ces cités avec les Romains n’ont pas conduit à des interventions hors normes visant la salle du Conseil. En conséquence de ces remarques, le phénomène de construction ou de restauration des bouleutèria au iie s. doit être décrit non comme la conséquence d’une politique particulière des Antonins, mais comme visant l’un des éléments fondamentaux du paysage urbain à cette époque, à l’instar d’autres bâtiments, et comme le terme d’une évolution entamée depuis l’époque hellénistique200.
La discrétion des bouleutèria dans l’espace urbain
51Au total, la vague de constructions du iie s. attestée par l’archéologie doit être réévaluée dans le sens où les bouleutèria n’ont pas constitué un élément nouveau dans le paysage urbain des cités. Ils existaient déjà et ne sont pas apparus subitement à la faveur d’un changement dans le régime municipal qui aurait été particulièrement favorable aux notables. La rénovation des bouleutèria doit être plus volontiers inscrite dans le mouvement général de rénovation de la parure monumentale des cités, plutôt que recevoir un sens politique particulier. Les inscriptions honorifiques restent assez silencieuses sur les entreprises des grands évergètes dans ces bâtiments : les notables des cités se font gloire d’intervenir sur des bains, des portiques, l’agora ou même des temples plutôt que sur le bouleutèrion de leur cité. Les grands évergètes de la cité n’ont pas montré de passion particulière à l’époque romaine pour le bâtiment du Conseil ; il est également suggestif qu’aucune source épigraphique n’indique un financement public civique de ces bâtiments.
52Le bouleutèrion reste discret dans le paysage urbain. Aelius Aristide ne le cite pas dans les cinq discours qu’il a prononcés pour plaindre la cité de Smyrne après le tremblement de terre qui l’a dévastée en 177, alors qu’il cite de nombreux autres monuments et espaces de la cité : port, acropole, fontaines, agoras, rues, théâtres, gymnases, temples201. De même Aelius Aristide ne cite pas ce monument quand il décrit les nouveaux bâtiments de son époque : il cite les gymnases, les fontaines, les temples dans son Éloge de Rome202. Habituellement le bouleutèrion est placé dans un des angles de l’agora, derrière un portique, ce qui le rend également peu visible203. Cette discrétion, dans l’espace urbain comme dans le discours épigraphique, s’explique par un intérêt plus grand pour d’autres bâtiments, qui paraissaient plus essentiels à la définition de la cité et à la manifestation d’une culture grecque d’époque romaine, et où pouvaient également s’accomplir des activités politiques, comme le théâtre. C’est vers ces bâtiments que l’action évergétique s’orientait.
Autres lieux de réunion des collèges de magistrats
53Dans les discours d’Aelius Aristide, l’emploi au pluriel du mot bouleutèrion pourrait désigner des salles servant de lieu de réunion de la gérousie, du Conseil, des prytanes, selon les institutions des cités. Est-il possible de trouver trace de ces autres lieux de réunion dans les inscriptions ? L’historiographie s’est peu intéressée à cet ensemble de bâtiments qui attestent la permanence d’une activité politique à l’époque romaine au sein de la cité. Cependant les sources épigraphiques montrent que tout comme les bouleutèria, ces salles ont reçu des ornements et des embellissements, sans être au centre de l’activité évergétique et édilitaire.
Tableau 4. Interventions dans les lieux de réunion des collèges de magistrats et du Conseil
Cité | Date d’attestation | Commanditaires | Intervention réalisée | Référence |
Éphèse | Époque augustéenne | ? | Prytanée | IK, 12-Ephesos, 437 |
Éphèse | Époque augustéenne | Thémistios fils de Thémistios | Antigraphèion | IK, 11-Ephesos, 14 |
Pergame | Époque augustéenne | Trois nomophylakes | Porte, piliers, équipement dans le bureau et portes secondaires du nomophy | IPergamon, 237 |
Thyatire | c. 170 | Cité (et Laebianus ?) | Supervision par Laebianus du revêtement des murs de l’οἰκοβασιλικόν dans l’Hadrianeum, et restauration et achèvement du bâtiment en six mois | TAM V, 2, 982 |
Thyatire | c. 170 | Cité | Marcus fils de Ménandros est responsable de l’installation de 25 statues d’Éros dans l’οἰκοβασιλικόν de la gérousie | TAM V, 2, 991 |
Aphrodisias | iie s. | Iasôn et sa femme | Achèvement du grammatophylakion | MAMA VIII, 498 ; IAph2007 12.1006 |
Sardes | Peu après 212 | Aelius Théodôros | Construction et revêtement des murs de l’οἰκοβασιλικόν | Sardis VII, 1, 63 |
Éphèse | 222-235 | M. Aurelius Artemidôros Metrodorianus | À l’occasion de sa prytanie, fait paver la descente entre le prytanée et la rue | IK, 17.1-Ephesos, 3071 |
Nysa | Haut-Empire | Un couple de particuliers | Construction d’un bâtiment des archives, χρεοφυλάκιον | von Diest 1913, 9 no 2, corrigé par Kourouniotes 1921-1922, 82 (Bull. 1924, 355) |
Éphèse | Haut-Empire | Magistrat | Sol, toit, chambres voûtées, cadran solaire dans le prytanée | IK, 12-Ephesos, 462 |
Éphèse | Haut-Empire | T. Flauius [-] | Réparations dans le prytanée | IK, 12-Ephesos, 528 |
Τὸ οἰκοβασιλικόν204
54Ce terme désigne à plusieurs reprises, uniquement en Asie mineure, cette salle de réunion, dans un cas dévolue clairement à la gérousie. L’attestation sur laquelle L. Robert proposait de fonder le genre masculin de ce terme205 paraît devoir être écartée : la publication des carnets de J. P. Gandy-Deering, dont les lectures sont fiables206, indique que dans l’inscription CIG, 2782 d’Aphrodisias la pierre portait vraisemblablement le mot embasilikon à l. 25-26207, bien que le sens de ce mot ne paraisse pas entièrement clair. Cette salle se trouvait dans les “bains d’Hadrien”.
55On sait donc qu’à Thyatire, Laebianus est honoré par le Conseil et le peuple vers 170 pour “avoir été responsable du revêtement des murs de la salle de réunion dans l’Hadrianéion, et pour avoir restauré et achevé le bâtiment en six mois”, ἐργεπι[στά]την σκουτλώσεως οἰκο[β]ασιλικοῦ τοῦ ἐν τῷ Ἁδρια[ν]είῳ, ἀποκαταστήσαντα [τ]ὸ ἔργον τέλειον ἐν μη[σ]ὶν ἕξ (l. 17-22)208. La salle de réunion se trouvait donc peut-être dans un sanctuaire d’Hadrien, ce qui n’aurait rien de surprenant dans la mesure où les temples pouvaient se trouver dans une cour à portiques abritant ce genre de salle. Une autre inscription209 nous apprend que cette salle de réunion servait à la gérousie de la cité : les teinturiers honorent Marcus fils de Ménandros qui parmi d’autres évergésies a été “responsable de la mise en place des 25 statues d’Éros dans le portique aux cent colonnes et de la salle de réunion de la gérousie”, ἐργεπιστά[τη]ν Ἐρώτων τῶν ἐν τῷ Ἑκα[το]νταστύλῳ κε’καὶ οἰκοβ[ασ]ιλικοῦ τοῦ τῆς γερουσίας. On a vu néanmoins (I.1) qu’on devait également envisager l’hypothèse de l’identification de l’Hadrianéion avec un édifice balnéaire, propre également à accueillir des salles de réunion. À Sardes, le début de ce mot est restitué dans une inscription sur le piédestal en marbre de la statue d’Aelius Théodôros, datée de peu après 212. Cet évergète aurait été “responsable de la construction et du revêtement des murs du lieu de réunion”, ὁ ἐργεπισ[τάτης] τῆς τε οἰκοδομήσ[εως καὶ] σκουτλώσεως τοῦ [οἰκοβα] σιλικοῦ210. Dans les attestations en provenance de la province d’Asie, il est frappant de constater que cette salle fait l’objet d’une opération architecturale bien attestée par ailleurs mais qui n’est pas des plus fréquentes : la skoutlôsis211 ou décoration des murs par un placage de marbre. Il s’agit selon L. Robert d’incrustations polychromes sur les murs (mais une inscription d’Aphrodisias212 emploie ce terme et spécifie : “revêtement du mur et du sol”). On retrouve ici une esthétique comparable à celle de la salle de Lucien : les reflets de lumière jouent sur les murs et leur marbre brillant. Enfin, à Sardes comme à Thyatire le financement fut public puisque les personnages mentionnés sont “responsables des travaux”, ergépistatai ; ils n’ont pas financé les travaux mais supervisé l’ornement des murs.
Τὸ ἀρχεῖον, τὸ γραμματοφυλακεῖον, τὸ χρεοφυλάκιον
56Des bureaux sont prévus pour être le lieu d’exercice de collèges de magistrats (τὰ ἀρχεῖα) et la salle où sont conservées les archives de la cité (τὸ γραμματοφυλακεῖον, τὸ χρεοφυλάκιον)213. Les sources littéraires, épigraphiques, archéologiques, suggèrent de manière unanime qu’ils se trouvent autour de l’agora. Dion dans son discours sur l’Eubée décrit ainsi l’abandon où se trouve le centre civique de la cité214 : “Vous pouvez voir également, chaque jour, les moutons que possède cet orateur envahir l’agora dès l’aube et paître autour du bouleutèrion et des bureaux administratifs” (περὶ τὸ βουλευτήριον καὶ τὰ ἀρχεῖα). Ces bâtiments, assez abondamment attestés par des inscriptions concentrées sur quelques cités (par exemple, à Aphrodisias et dans les plus grandes cités), devaient être assez largement répandus. Ce qui nous occupe ici, est qu’on porta attention à leur embellissement à l’époque romaine.
57À Aphrodisias, une inscription honorifique du Conseil et du peuple du iie s. pour Iasôn fils de Ménodotos215 mentionne qu’“il a achevé à ses frais une partie du grammatophylakion”, le bâtiment des archives, τετελειωκότα [δὲ καὶ] ἐκ τῶν ἰδίων τοῦ γραμματοφυλακίου (l. 8-9). Le reste de l’inscription détaille des interventions précises de restauration et de construction sur des portiques. Cette inscription n’est pas commentée dans les études récentes sur Aphrodisias ; elle suggère une intervention sur un espace délimité par des portiques entouré de bâtiments officiels (le bâtiment des archives) ou semi-officiels (les ateliers-boutiques, ergastéria, dont une autre inscription d’Aphrodisias du premier siècle montre que certains se trouvaient près du bouleutèrion216). Selon L. Robert, il s’agit des portiques du bâtiment des archives217. Cette configuration suggère également la présence du bâtiment des archives sur l’agora d’Aphrodisias (non pas le “portique de Tibère”, mais l’agora nord, sur laquelle ouvre le bouleutèrion). Iasôn fils de Ménodotos aurait concouru à l’embellissement de toute cette zone, d’après cette inscription qui décrit un remaniement de portiques déjà existants, par l’achèvement à ses frais d’une partie de la salle du bâtiment des archives et le remploi de colonnes devant le bâtiment auxquelles auraient été ajoutés, pour unifier la décoration, divers décors (épistyles, frises) : Iasôn et sa femme, en plus de l’achèvement du bâtiment nouveau des archives, se seraient occupés de le raccorder harmonieusement à une place à portiques déjà existante. Ce terme de grammatophylakion est un hapax à Aphrodisias : dans les inscriptions qui mentionnent le lieu de dépôt officiel des archives de la cité, il est question du chréophylakion.
Autres lieux de réunion
58À Éphèse, l’inscription sur l’arc d’entrée du prytanée à l’époque impériale détaille la construction de “quatorze piliers avec leurs stylobates et les ambulatoria218 construits en marbre [-] et le propylée219 du prytanée avec tout son décor de marbre blanc (…)”220. Avec l’argent prévu pour les dépenses de la prytanie, est commémorée dans une autre inscription, en deux fragments, provenant du prytanée, la construction d’un sol, d’un toit, de salles voûtées (σὺν ταῖς κέλλα[ις]), d’un σωλά[ριον] (il peut s’agir d’un cadran solaire ou d’une pièce exposée au soleil221), et de colonnes devant la salle222. La découverte de l’inscription au prytanée, ainsi que l’accomplissement de la construction en échange de dépenses prévues pour la prytanie, suggère des dépenses liées au prytanée lui-même. À l’époque flavienne ou par la suite, T. Flauius [-] a supervisé des réparations dans ce même bâtiment223 (des colonnes du prytanée, [– κίον]ας τοῦ πρυτανείου, sont mentionnées). Puis, sous Sévère Alexandre, M. Aurelius Artémidôros Metrodorianus a entre autres évergésies, “à l’occasion de sa prytanie, fait paver la rampe d’accès entre le prytanée et la marche de la rue”, ἔν τε τῷ καιρῷ τῆς πρυτανείας στρώσαντος τὴν ἀπὸ τοῦ πρυτανείου κάθοδον ἕως τῆς ἐνβάσεως τῆς πλατείας224.
59Dans le décret de consolation à l’occasion de la mort d’Apollonis à Cyzique225, l’une des résolutions porte sur le point suivant : “que l’on consacre une statue d’elle dans une des pièces de l’agora tétragone dans le portique oriental, celle qui se trouve entre le bureau des timètes et l’agoranomion, et une fois arrangée elle servira à perpétuité de bureau au cosmophylaque et à ses successeurs”. Le portique oriental de l’agora tétragone comportait à Cyzique un ensemble de bureaux : celui des agoranomes, des timètes, désormais des cosmophylaques. D’autres bureaux pouvaient encore s’y trouver, comme le suggère l’expression “dans une des pièces du portique”. En raison de la présence de ces bureaux dans les portiques de l’agora tétragone, M. Sève l’identifie comme étant la plus ancienne de la cité226. Ces bureaux, abrités derrière les portiques, sont disposés de manière similaire au bouleutèrion dans d’autres cités. Le terme οἴκημα est habituel dans le sens de pièces destinées à être des magasins ou des boutiques227 : à Délos, sur l’agora, ce sont des boutiques louées aux marchands228. À Pergame, à l’époque augustéenne, le nomophylakion de l’agora fut embelli229 : trois nomophylaques firent faire “la porte, les piliers230, l’équipement dans le bureau et les portes secondaires”, τό τε θύρωμα καὶ τὰς παραστάδας [κ]αὶ τὴν ἐν τῶι νομοφυλακίωι ἐπισκευὴν καὶ τὰς παραθύρ[ας].
60En général, les salles de réunion étaient financées sur les fonds de la cité et à partir des summae honorariae des magistrats, plutôt que par des évergésies libres. Il existait un rapport cohérent entre la nature de la source de financement et la fonction et le sens du bâtiment. Dans l’étude du κόσμος de la cité, l’origine des fonds qui permettent de construire les monuments publics est déterminante. Ici, l’origine du financement indique qu’il faut détacher le lien trop souvent établi entre la construction dans les cités d’Asie mineure occidentale, notamment à l’époque augustéenne, et l’influence impériale. Le paysage urbain – et notamment ses éléments relatifs à la vie politique locale, animée désormais par les notables – est dû à des initiatives issues des cités : il faut donc d’abord l’interpréter en fonction des valeurs de l’hellénisme d’époque impériale, plutôt qu’au miroir de Rome.
Bibliothèques et autres lieux dédiés prioritairement à des activités culturelles
61Nous avons déjà reconnu combien la taxinomie des différents édifices de l’espace urbain était délicate à réaliser. Notre classement présente une solution qui nous paraît conforme à ce que les discours sur l’espace urbain nous permettent d’entrevoir d’une vision particulière des villes d’Asie à l’époque romaine. Parfois, les critères manquent. L’étude des bibliothèques et autres espaces à fonction culturelle aurait pu, également, venir dans le chapitre des gymnases et des établissements balnéaires, lieu traditionnel de la formation des jeunes gens dans le monde grec à l’époque classique et hellénistique231. Néanmoins, l’exemple de Smyrne, ville emblématique de la vision grecque d’époque impériale du paysage urbain232, nous invite à considérer à présent ces édifices particuliers. C’est en effet autour de l’agora que dans cette grande cité se concentrent plusieurs lieux prestigieux de culture et d’éducation – le cheminement de la foule sur la place, les activités commerciales et les visiteurs récemment débarqués dans le port formant l’arrière-plan de ce tableau. Au total, assez peu d’exemples d’interventions sur ces bâtiments sont attestées par l’épigraphie.
Τὸ ἀκροατήριον
62À Aigai en Éolide, une inscription non datée, découverte, selon les indications de L. Robert, sur la terrasse occidentale où se trouvent également un temple de Déméter et Korè, le théâtre et ce que L. Robert identifie comme un gymnase, commémore la dédicace d’une telle salle : – γυμνασιαρ] χήσας ἀνέθηκε τὸ ἀκρο[ατήριον –233. Selon P. Gros234, le terme est la traduction du latin auditorium, dont il propose comme traduction “salle d’audience”. Comme à Éphèse où l’auditorium est mentionné dans une inscription datant de 230235, cette salle peut être associée à une bibliothèque. Ici elle l’est probablement à un gymnase et paraît de ce fait plutôt être une salle de conférence, dans la tradition des édifices d’éducation grecs définie par R. Ginouvès236. Signalons à Chios la présence d’une telle salle de conférence dans le gymnase, d’après un décret du peuple en l’honneur de Lucius Nassius, qui reçoit l’autorisation de dresser des statues de ses fils dans le gymnase et “dans l’endroit qu’il lui plaira dans l’akroatèrion” (l. 14), ἐν ὧι ἂν βούληται τοῦ ἀκροατηρίου τόπωι237.
Bibliothèques et Mouséia
63Selon Aelius Aristide238, les bibliothèques sont l’ornement propre d’Athènes, τν Ἀθηνν κόσμος οἰκεος ; aucune autre cité ne peut rivaliser avec elle dans ce domaine. Aelius Aristide désigne ces bibliothèques par une périphrase : τὰ βιβλίων ταμιεῖα. Il est vrai que ni cet orateur ni aucun autre n’évoque les bibliothèques dans des cités d’Asie mineure. Cependant l’épigraphie et quelques autres sources permettent de savoir que de tels lieux de formation intellectuelle se trouvaient en particulier dans les plus grandes cités d’Asie, Éphèse, Smyrne, Pergame. Dans la plupart des cités, des salles non spécifiées du gymnase étaient le lieu habituel de l’éducation des jeunes gens.
64La bibliothèque de Celsus à Éphèse est particulièrement bien connue. Elle constitue un cas intéressant parce que selon P. Gros239 c’est elle “qui, pour la première fois, acquiert une autonomie monumentale complète puisqu’elle domine l’un des lieux de convergence les plus importants” d’Éphèse, au bas de la rue des Courètes et sur la place devant l’entrée de l’agora commerciale. Cet édifice sert également d’héroôn pour son fondateur, Ti. Iulius Celsus Polemaeanus. Dans l’épigraphie d’Éphèse, ce monument est appelé tout naturellement “la bibliothèque de Celsus”, ἡ Κέλσου βιβλιοθήκη, ou “bibliothèque Celsiane”, ἡ Κελσι[αν]ὴ βιβλιοθήκη240. La dédicace indique que la construction de la bibliothèque fut financée grâce au legs de Celsus ; son fils Ti. Iulius Aquila, qui fut également consul, a supervisé sa construction, et les héritiers de ce dernier l’ont parachevée241. La présence de deux statues équestres de Celsus devant la bibliothèque marque le caractère honorifique et funéraire du monument242 ; d’autres statues encore le représentaient243 ou personnifiaient ses vertus244. Sur la façade l’acte de fondation de la bibliothèque détaillait les différentes mesures pour son financement245. Également dans la capitale d’Asie, sous Hadrien ou Antonin le Pieux, C. Iulius Pontianus “a fait construire les statues des dieux et l’autel, et il a orné le Mouséion, et il l’a consacré au Conseil”, τὰ ἀγάλματα τῶν θεῶν καὶ τὸν βωμὸν κατεσκεύασεν καὶ τὸ Μουσεῖον ἐκόσμησεν καὶ τῇ βουλῇ καθιέρωσεν (l. 17-21)246. Selon L. Robert247, “à l’imitation du Musée d’Alexandrie existait un Musée à Éphèse”. Il n’est pas localisé dans le tissu urbain. B. Puech définit ce qu’est un Mouséion dans le monde grec248 : “l’emploi du mot n’implique pas nécessairement une référence à Alexandrie : tout lieu, public ou privé, consacré aux activités intellectuelles, et donc au culte des Muses, pouvait porter ce nom. Les mouséia étaient une réalité familière du paysage de la Grèce hellénistique et impériale” ; “un autel des Muses, une bibliothèque, un portique, une exèdre, quelques arbres, sont les seuls éléments indispensables d’un Mouséion”. La consécration au Conseil indique-t-elle une fréquentation privilégiée, voire exclusive de ce lieu par les bouleutes à Éphèse ?
65À Héraclée de la Salbakè, la fondation d’une bibliothèque par T. Statilius Apollinarius est un cas très incertain. Les restitutions paraissent hasardeuses249. D’autres édifices tout à fait remarquables sur le terrain n’ont pas laissé de trace épigraphique, comme la bibliothèque de Nysa en Carie. P. Barresi250 en a attribué la construction à un évergète de la cité connu pour son action au iie s., T. Aelius Alkibiadès. Mais un bloc trouvé à Nysa et publié par M. Clerc en 1885 comprend une longue liste de bienfaits de ce personnage envers les artistes de Rome et d’Éphèse, un décret de Nysa faisant l’éloge d’Alkibiadès, mais sans mention d’une telle construction (il est vrai que la fin des considérants est perdue)251. L’attribution de la construction à ce personnage reste donc du domaine de la conjecture. À Téos, une fondation pour une bibliothèque n’a pas reçu de proposition de datation ; à la ligne 14, [δ]οκιμαζέτω “fait songer à un examen scolaire dirigé par un des surveillants252”.
66Il est rare d’avoir des informations sur la construction de ces bâtiments, mais il est possible dans quelques cités de connaître quelques-uns de ces centres de formation intellectuelle et leur position dans la topographie urbaine. À Smyrne, un ensemble de documents prouve la présence d’un centre de formation intellectuelle et d’une bibliothèque près de l’agora. Strabon écrit que dans la cité253, “il y a aussi une bibliothèque et l’Homéréion, un portique quadrangulaire, avec un temple et une statue en bois d’Homère”254. Dans la biographie d’Hippodromos de Thessalie, Philostrate raconte qu’à son arrivée à Smyrne il se dirigea vers l’agora dans l’espoir de rencontrer des orateurs. Il y vit un sanctuaire (ἱερὸν) où se trouvaient des “pédagogues” avec leurs serviteurs portant des sacs de livres255. Un Mouséion de Smyrne est mentionné dans une inscription de Téménothyrai en l’honneur du juriste M. Aristonikos Timokratès256. Il s’agit du bâtiment des archives de Smyrne, comme le montre L. Robert257. Le Musée et l’Homéréion se trouvaient-ils à proximité l’un de l’autre, faisaient-ils partie du même ensemble monumental ou s’agissait-il de deux monuments séparés ? Enfin, dans le Martyre de Pionios258, Pionios engage la conversation sur l’agora de Smyrne avec “un certain Rufinus, qui se trouvait là, ayant la réputation d’être un des meilleurs rhéteurs”. L. Robert suggère que la présence de Rufinus sur l’agora est due au sanctuaire et à l’école évoqués par Philostrate ; “il est arrivé que lors des travaux de canalisation effectués dans la petite place au sud de la fouille de l’Agora, on a trouvé ‘des degrés de marbre d’un théâtre, ou d’un édifice ressemblant à un théâtre’259(…). Cet édifice fait sans doute partie du sanctuaire mentionné par Philostrate”.
67À Mylasa, une inscription fragmentaire260 mentionne des colonnes corinthiennes “autour de la bibliothèque”, περὶ τὴν βυβλιοθήκην. À la ligne suivante (l. 5) de l’inscription, est mentionnée la “paradromis”, qui est la partie à l’air libre d’une piste de course dans un gymnase261. Il est donc possible que bibliothèque et gymnase soient associés, la première se trouvant dans le second. L’emplacement des bibliothèques de Smyrne, sur l’agora, de Pergame, dans un sanctuaire, et de Mylasa, en association avec le gymnase, indique combien ces édifices, attendus dans les cités d’Asie, pouvaient être facilement associés à différentes sphères d’activité : politique, ou de formation des jeunes gens, ou encore dans un sanctuaire consacré à la médecine. Les attestations épigraphiques de bibliothèques sont peu nombreuses. L’édifice était en réalité la plupart du temps, sauf à Éphèse avec la bibliothèque de Celsus, lié à un ensemble plus vaste, sanctuaire, gymnase notamment, ou d’autres bâtiments sur l’agora. L’absence d’autonomie du bâtiment et la multiplicité des lieux de formation intellectuelle dans la cité, le bouleutèrion, le théâtre, des salles de différentes tailles, des salles du gymnase… montrent qu’au total, la présence de la composante culturelle et éducative dans la cité est particulièrement importante même si le vocabulaire pour désigner ces lieux de formation est divers. L’ornement de la cité ne prend toute son ampleur qu’au regard d’un spectateur éduqué, qui connaît les mythes de la cité et la culture grecque. Cet aspect du κόσμος le rend encore une fois différent de la notion romaine de beauté des monuments publics, plus étroitement alliée à leur utilité. Avec le gymnase, l’agora paraît un lieu propice à l’installation d’un dispositif réunissant un Mouséion et une bibliothèque : à Antioche, Jean Malalas rappelle qu’un incendie à l’époque de Tibère a détruit “la plus grande part de l’agora, le bouleutèrion et le temple des Muses, qui fut fondé par Antiochos Philopator avec l’argent laissé dans le testament de Maron d’Antioche, qui avait déménagé à Athènes et ordonné que le temple des Muses et une bibliothèque soient fondés à partir de ce qui lui appartenait”262. Une disposition comparable existe à Smyrne ; il ne s’agit pas d’un genre nouveau à l’époque romaine.
Conclusions
68La présence de bureaux de collèges de magistrats, du bouleutèrion, des bâtiments d’archives derrière les portiques ou les basiliques complète la description de l’agora dans les sources littéraires, où elle doit être remplie d’une foule nombreuse venue observer le spectacle qu’elle se donne à elle-même aussi bien qu’acheter ou vendre. Les interventions commémorées par des inscriptions mentionnant l’agora confirment ce caractère de lieu de rencontre pour la cité. Sur l’agora se déroulent également des événements marquants de la vie civique. C’est sur l’agora de Smyrne que Pionios harangue la foule avant son martyre263. L’agora est un centre névralgique de la vie de la cité, fêtes, événements politiques, attroupements, marché.
69Sur le pourtour, les portiques abritent aussi bien des bureaux politiques que des boutiques, ergastéria, en particulier dans le cas où la ville ne compte qu’une agora. À Éphèse les espaces commerciaux et politiques sont clairement dissociés (agora commerciale près du port, place dédiée à l’activité politique en haut de la rue des Courètes). Cette belle ordonnance n’a rien de systématique. À Cyzique, deux agoras sont mentionnées dans le décret de consolation pour la mort d’Apollonis, l’agora sacrée et l’agora tétragone ; une troisième encore est connue, “l’agora des hommes”264. Cependant les bureaux des magistrats se trouvent sur l’agora tétragone, probablement dédiée également aux activités commerciales (en tout cas son plan, d’après son nom, est semblable à celui de l’agora qui se trouve près du port à Éphèse). M. Sève montre que l’agora sacrée de Cyzique est bordée d’un ou plusieurs sanctuaires, en précisant le sens d’un passage du Panégyrique de Cyzique d’Aelius Aristide265. Le sanctuaire des Charites, le Χαριτήσιον, se trouvait sur cette place. D’après Ch. Picard266, à Pergame aussi une “agora des dieux” se trouve sur l’esplanade du sanctuaire de Déméter, où se trouvaient “divers petits autels consacrés à des divinités multiples”267. Mais ce type de dénomination tombe en désuétude à l’époque impériale.
70Enfin, signe de la vitalité des institutions civiques et de la vie culturelle locale, le fourmillement de petites salles différentes vouées à la réunion de collèges de magistrats ou au rassemblement des mêmes notables en leur qualité cette fois de pépaideuménoi et non plus de magistrats, est tout à fait frappant. Réparties de préférence (mais pas uniquement) autour de l’agora, comme à Smyrne, elles indiquent la complexité du paysage urbain. Distinguant particulièrement cette région268, l’entrecroisement des activités culturelles et politiques, dans des lieux anciens de la cité mais dans des bâtiments parfois “modernes” par leur date de construction, divers par leur dénomination et leur fonction précise, mais tous dus aux initiatives locales, assemble un écheveau de significations bien loin d’être réductibles à une “romanisation”. Le démêler implique de se référer au contexte particulier de cette région de l’Empire romain.
71L’interprétation selon laquelle l’agora et les bouleutèria auraient bénéficié d’une politique favorable au iie s. de la part de l’empereur pour leur construction et leur embellissement résulte d’un schéma interprétatif considérant les cités grecques comme passives sous le joug de Rome. Un nouvel examen de la documentation montre que la construction des bouleutèria n’est pas une conséquence d’un caractère plus marqué de l’importance des notables dans la vie politique ; de plus, le ier s. concentre beaucoup d’interventions autour de l’agora, ce qui est précoce et marque à notre sens non pas une nouveauté d’époque romaine, mais une continuité des activités traditionnelles de l’agora – commerciales, politiques, culturelles – avec l’époque hellénistique. En revanche, presque tout exemple d’une intervention au ive s. sur ces lieux manque, alors que les bains, les théâtres, les fontaines, les murailles bénéficient d’interventions continues. La véritable rupture chronologique concernant la place de l’agora (portiques latéraux, boutiques, lieux de la vie civique et place centrale) dans la vie de la cité doit donc être placée au début du ive s. plutôt qu’au moment de la transition entre l’époque hellénistique et l’époque romaine. Elle est le signe de l’appauvrissement de l’initiative politique des notables au Conseil à cette époque et d’une évolution des espaces et monuments constitutifs du κόσμος de la cité (les temples des dieux traditionnels se sont eux aussi effacés).
Notes de bas de page
1 Paus. 6.24.2 : ἡ δὲ ἀγορὰ τοῖς Ἠλείοις οὐ κατὰ τὰς Ἰώνων καὶ ὅσαι πρὸς Ἰωνίᾳ πόλεις εἰσὶν Ἑλλήνων, τρόπῳ δὲ πεποίηται τῷ ἀρχαιοτέρῳ στοαῖς τε ἀπὸ ἀλλήλων διεστώσαις καὶ ἀγυιαῖς δι’αὐτῶν.
2 Paus. 10.4.1.
3 Waelkens 1989, 82 relève que le développement des agoras à portiques en Asie mineure ne signifie pas une perte d’autonomie des cités grecques. Pour une interprétation différente, voir Gros 1996a.
4 D. Chr. 48.9 (trad. Cuvigny 1994).
5 Str. 12.3.11. À l’époque où écrit Strabon, Sinope avait été dotée par Pompée d’un vaste territoire civique (c’était une ancienne cité grecque) ; puis à partir de César elle accueillit une colonie romaine, implantée à côté de la cité grecque (Sartre 1995, 138140.)
6 Str. 14.1.43.
7 Aristid., Or., 17.11.
8 Aristid., Or., 18.10.
9 Aristid., Or., 17.8.
10 Aristid., Or., 18.5.
11 Aristid., Or., 19.3.
12 Philostr., VS, 1.25 [532].
13 Plin., Ep., 10.98. (éd. et trad. M. Durry, Paris, CUF, 1948).
14 Str. 5.3.8.
15 D.Chr. 79.1, ἐπὶ δὲ ἀνθρώπων πλήθει καὶ ἀγορᾶς ἀφθονίᾳ καὶ τῇ πολυτελείᾳ τῶν οἰκοδομημάτων δεῖ μακαρίζειν αὐττήν.
16 Voir D.Chr. 38.17 et 28 ; 39.5 ; 48.9.
17 Men. Rh. 1.364.
18 Gr. Naz., Carm., 33.6 et 8 (trad. par P. Gallay, Paris, 1985).
19 Plut., Moralia, 798 C (éd. et trad. J.-Cl. Carrière, Paris, CUF, 1984).
20 Dans le même esprit, Vitruve recommande de proportionner les dimensions du forum de type italien au nombre d’hommes susceptibles de le remplir : “Il convient que les dimensions soient proportionnées au nombre d’hommes, pour que l’espace ne soit pas petit à l’usage, et pour éviter que, à cause du manque de fréquentation, le forum ne semble vide” (Vitr. 5.1.1).
21 Voir le commentaire et la traduction de cette inscription dans Chastagnol 1981.
22 MAMA, VII, 305, I, l. 26-29 :… aquaru[m] ibi abundantem aflu[en]tiam, labacra quoqu[e] publica priua[taqu] e, forum statuis ueterum principum ornatum, populum comm[a] nentium adeo celebrem [ut se]dilia [qu]ae ibidem sunt [fa]cile conpleantur, pr[aeter]ea ex decursibus praeterfluentium [a]quarum aquim<o>lin[a]rum numerum copiosum.
23 Voir fig. 9.
24 Men. Rh. 2.377 : μετὰ τὴν σύγκρισιν οἱ ἐπίλογοι. ἐν τούτοις ἐρεῖς (…) ὅτι πλήρεις μὲν ὠνίων αἱ ἀγοραί, πλήρεις δὲ ἑορτῶν καὶ πανηγύρεων αἱ πόλεις.
25 Martyrium Pionii, 3.6-7 : Καὶ ἐλθόντων εἰς τὴν ἀγορὰν ἐν τῇ στοᾷ τῇ ἀνατολικῇ ἐν τῇ διπυλίδι ἐγεμίσθη πᾶσα ἡ ἀγορὰ καὶ αἱ ὑπερῷαι στοαὶ Ἑλλήνων τε καὶ Ἰουδαίων καὶ γυναικῶν (…). Ἀνῄεσαν δὲ καὶ ἐπὶ τὰ βάθρα καὶ ἐπὶ τὰ κιβώτια σκοποῦντες. Voir Robert 1994, 8 et 54.
26 Akurgal 1986, 31 ; Naumann & Kantar 1950.
27 Price 1984, 109.
28 Price 1984, 140-141. Cf. I. 1.
29 D’Andria 2003, 109-110.
30 L’analyse planimétrique de P. Gros, qui s’inscrit dans le contexte de l’étude de ces espaces dans l’ensemble du bassin méditerranéen, tend à donner une vision “impériale” et idéologique, de ces lieux qui restent l’objet d’une vision grecque et plus quotidienne, au niveau de la cité, à la lecture des sources écrites qui en proviennent (Gros 1996a). Hellmann 2002, 347, donne une définition simple, plus souple et moins idéologique de cet espace, encore valable à l’époque romaine : “Lieu de rassemblement. Dans une cité grecque, désigne la place principale, à fonction politique, religieuse et (surtout à partir de l’époque hellénistique) commerciale”.
31 Les calculs en pourcentage au dixième près de P. Barresi, à partir d’inscriptions largement surinterprétées, montrent le danger de telles conclusions (Barresi 2003, passim ; voir Pont 2007a à ce sujet).
32 Chaniotis 2004, 393 no 12.
33 Petzl 1990, 70 n ° 34 (SEG, 40, 1057 ; Bull., 1991, 83). L’éditeur indique la solution ἐκ τῶν τῆς κώμης χρημάτων, tandis que M. Sève préfère l’hypothèse d’une summa honoraria.
34 L’édit du proconsul M. Herennius Picens indique des aménagements dans cette zone à cette époque : il constate la disparition d’un mur entre l’agora et le port, peut-être en relation avec la perception du portorium (IK, 15-Ephesos, 1521).
35 IK, 17.1-Ephesos, 3065, l. 6-14 (ὑποσχόμενον ἀντὶ ἐλαιο[θεσί]ας λευκᾶναι τὰ λευκ[ώματ]α τῆς τραπεζειτικ[ῆς στ]οᾶς καὶ σκουτλῶσα[ι τοὺς] τοίχους σκούτ[λῃ] ῥαντῇ καὶ κανκέλλους καὶ συμψέλια ποιῆσαι εἰς τὴν ὑπὸ Παυλείνου ἐξέδραν).
36 Cf. Robert 1950b, 48.
37 Cf. IK, 1-Erythrai, 222, l. 4.
38 Laum, Stiftungen, no 98 ; IK, 36.1-Tralleis, 146. Cf. Hellmann 2002, 122 : “les adjectifs δωρικός et ἰωνικός sont pour le moins rares en grec”, et Hellmann 1992, 116-117 : seul Pausanias utilise δώριος (5.10.2).
39 IK, 36.1-Tralleis, 77.
40 Hatzfeld 1920, 74-75 no 5, l. 13 ; IK, 22.1-Stratonikeia, 530. Comme le rappelle J. Matzfeld, ce marché devait servir lors des panégyries qui se tenaient au sanctuaire de Lagina. Cette attestation complète les interventions mentionnées en I. 1.
41 IGR IV, 1676.
42 IK, 17.1-Ephesos, 3271.
43 Ramsay 1897, 646, no 549. Bresson 2000, 164-166 indique que le zygostasion est le support de la balance publique de référence utilisée en cas de litige.
44 IK, 17.1-Ephesos, 3015. Voir De Ruyt 1983, 71.
45 TAM V, 2, 926. Il est intéressant que ce choix iconographique paraisse approprié pour un marché alimentaire.
46 Herrmann 1993a, 248 (SEG 43, 865 ; AE 1993, 1506) et 254 et n. 73 (l’auteur ne donne pas d’autres précisions sur ces quatre macella) ; voir Bull. 1994, 506.
47 De Ruyt 1983, 263-264. L’auteur ne mentionne pas l’inscription Didyma, 280 où le mot macellum a été restitué (iie s.) : selon Tuchelt 1973, 56-58, un macellum aurait existé à Didymes même.
48 De Ruyt 1983, 22-25.
49 IMagnesia, 179 (voir De Ruyt 1983, 107).
50 Gros 1996b, 462.
51 Antonia Tryphaina a voulu améliorer l’approvisionnement du marché de Cyzique en entreprenant des travaux dans le port ; le Conseil et le peuple ont donc décidé que pendant la durée des travaux, en cas d’obstruction par un marchand, “sa boutique sera mise sous scellés jusqu’à la fin des travaux, avec un écriteau portant mention de l’amende”, τό τε ἐργαστήριον αὐτοῦ σανιδίοι[ς] προσηλοῦσθαι, ἄχρι οὖ συντελεσθῇ τὸ ἔργον, ἔχον καὶ τὴν τῆς ζημίας ἐπιγραφή[ν] (l. 25-26) (Joubin 1893, 8, édition et traduction).
52 Reynolds 1996, 121-126.
53 MAMA VIII, 498.
54 A. Rehm dans Milet I.7, 64-69.
55 Von Saldern 2006, no 9. Dans cette nouvelle édition des inscriptions de Blaundos, l’auteur propose l’hypothèse que cette inscription concerne le propylée du temple au nord de la ville. La mention d’ergastèria nous paraît mieux attestée en relation avec une agora mais leur présence dans un sanctuaire ou sur une voie menant du centre-ville au temple n’a rien d’impossible.
56 Respectivement TAM V, 2, 861 et 862.
57 TAM V, 2, 868.
58 Bull. 1977, 450.
59 MAMA IX, 39. Selon les éditeurs, ce texte est sûrement une inscription honorifique (le nom de la personne citée est à l’accusatif).
60 Hellmann 1992, 140.
61 Men. Rh. 1.350 (l. 13).
62 MAMA VI, 251 (photographie des trois fragments pl. 44). Le commentaire propose que M. Clodius Postumus soit le fils ou le petit-fils du M. Clodius Postumus qui gouverna la Thébaïde sous Auguste (OGIS 659 ; PIR² C 1178.)
63 Von Saldern 2006, no 9.
64 Voir par exemple dans IK, 17.1-Ephesos, 3005 ; IK, 17.2-Ephesos, 4123.
65 IK, 17.1-Ephesos, 3006.
66 Knibbe et al. 1993, 123-124 no 13 (SEG 43, 791.)
67 IK, 17.1-Ephesos, 3005.
68 Scherrer et al. 2000, 142-144.
69 A. Rehm dans Milet I.7, 58-64 ; Milet VI. 1, 64-65 et 206.
70 A. Rehm dans Milet I.7, 69.
71 TAM V, 2, 861 ; Robert 1937, 532 n. 2.
72 Hellmann 1992, 188-192, s.v. καταγώγιον.
73 TAM V, 2, 862.
74 TAM V, 1, 518.
75 Voir les exemples proposés par Hellmann 1992, 352.
76 Merkelbach 1977, 152-153 ; IK, 17.1-Ephesos, 3419. La date de cette inscription demeure incertaine ; elle doit peut-être être attribuée à l’époque hellénistique.
77 R. Merkelbach pense que le dédicataire était un marchand de grain ; mais selon SEG 27, 758, le langage du décret renverrait plutôt à un propriétaire terrien qui aurait joué le rôle de bienfaiteur pour sa cité. J. et L. Robert opinent pour cette seconde hypothèse (Bull. 1978, 413).
78 Robert 1950b, 31.
79 IK, 28.1-Iasos, 8 et IK, 28.2-Iasos, 254 (incomplet) ; édition complète dans Pugliese Caratelli 1987 (SEG 36, 987).
80 Pagello 1987.
81 Milet VI. 1, 17 et 199.
82 IK, 36.1-Tralleis, 147. Aucune date n’est proposée.
83 IK, 24.1-Smyrna, 628 (photographie).
84 IK, 24.1-Smyrna, 682 et 683. S’agit-il dans la première inscription d’un M. U[lpi]us Herakleidès ?
85 IK, 24.1-Smyrna, 682, b.
86 IK, 24.1-Smyrna, 682.
87 IK, 24.1-Smyrna, 683.
88 Voir les côtés est et ouest de l’agora d’Hiérapolis : D’Andria 2003, 91-96 et 98-106.
89 Bull. 1978, 408 ; “on voit figurer ces louches sur les bas-reliefs et les monnaies en rapport avec la distribution publique d’huile. L’objet sert à transvaser le liquide d’un grand vase dans un autre”.
90 IK, 24.1-Smyrna, 713.
91 IPergamon, 333 (Hellmann 1994, 155 no 13 ; Donderer 1996, A 51).
92 IK, 17.1-Ephesos, 3001, 2.
93 IK, 17.1-Ephesos, 3004. L’horloge en question doit être l’horloge à eau retrouvée dans le bâtiment circulaire hellénistique à l’extrémité sud du portique est de l’agora (Hüber et al. 1997, 71).
94 MAMA VI, 371.
95 Legrand & Chamonard 1893, 279 no 78. C’est cette inscription qui mentionne l’agora, la première ne fait que la sous-entendre (l. 9-12) : [σ]τρώσαντα [ἐν τ] ῇ ἀγορᾷ [ἐκ] τ[ῶν ἰδ]ίων πόδας δ[ισχ]ιλίους.
96 IK, 21-Stratonikeia, 229a, l. 5-7.
97 Robert L. & J. 1954, 280-281 no 160, ill. pl. 59, 3. Voir également Rumscheid 1999, 48. Comme L. Robert, il souligne le lien probable qui existe entre l’édifice et la fonction des dédicants, et l’appartenance probable de ces colonnes à un portique de l’agora.
98 Laum, Stiftungen, no 95 ; IK, 36.1-Tralleis, 145.
99 TAM V, 1, 693. Voir Rumscheid 1999, 46-47.
100 Roueché [1989] 2004, 29 et 30.
101 Malgré le nom qui lui est parfois donné de “South Agora” et la porte qui se trouve à l’ouest de la place dénommée “Agora Gate”, ce dispositif devra être examiné au chapitre des établissements gymniques et balnéaires.
102 Martin 1974, 268 sur l’existence de plusieurs places dans certaines cités expliquée par la spécialisation des fonctions, les fonctions politiques “restant sur l’agora traditionnelle, les autres étant refoulées sur l’emporion”. À Éphèse et Milet, plusieurs places sont associées, les agoras marchandes (la seule appelée “agora” dans les sources à Éphèse) se trouvant près du port. À Cyzique, on connaît une “agora sacrée”, l’“agora des hommes”, et l’“agora tétragone”, sans doute la plus ancienne (Sève 1979, 346-348).
103 Rumscheid 1999, 19-63.
104 Cormack 1964, 22 no 21 et 23 no 22. Voir le plan d’Aphrodisias.
105 IK, 17.1-Ephesos, 3420.
106 IK, 28.2-Iasos, 256 ; Rumscheid 1999, 48.
107 Barresi 2003, 320-321, sur communication orale de Fr. D’Andria.
108 Robert L. & J. 1954, 323-324, no 173. Je cite les lignes 13 à 16 en question ici : χρήμα[τα δὲ δόντα ? εἰς τὴν σκ]ούτλωσιν κα[ὶ τὴν – τοῦ τετ]ραστόου τῆς [ἀγορᾶς ? τῆς –] ίδος. Selon J. et L. Robert, le tétrastôon est une “cour à péristyle avec quatre colonnades, un atrium” ; “ce quadruple portique faisait partie d’un édifice, sans doute d’une agora, dont la spécialisation était précisée par un adjectif en ίς”.
109 Gros 1996b, 245-248.
110 Ginouvès & Martin 1998, 88.
111 Reprise de l’ensemble des fragments retrouvés à ce jour et traduction dans AE, 1993, 1498.
112 Bibliographie reprise par Gros 1996b, 260 ; analyse du bâtiment, ibid., 245-246 ; voir aussi Gros 2005b, 186-187 ; Halfmann [2001] 2004, 40, qui met également l’accent sur l’influence de l’idéologie impériale.
113 IK, 13-Ephesos, 987. Le verbe utilisé suggère la participation à une souscription (voir III. 1).
114 IK, 13-Ephesos, 988.
115 IK, 24.1-Smyrna, 697.
116 Behr 1981, 358 n. 1.
117 Aristid., Or., 19.3.
118 LBW, 992 (CIG 3831a8, OGIS 511 ; IGR IV, 580).
119 Jones 1971, 47 n. 8.
120 Didyma, 264. Restitutions de la ligne 8 d’après Robert 1959, 665. Voir Tuchelt 1973, 58 n. 44 et n. 52 (indications topographiques).
121 MAMA IV, 334 et Haensch 1997, 641 n. 105.
122 CIG 3419 ; LBW, 647 (IGR IV, 1637).
123 Gros 1996b, 246. Mais Pagello 1987 parle plus volontiers des portiques de l’agora, y compris du côté sud où se trouve le bouleutèrion, bien que ce portique présente la particularité de comporter deux nefs.
124 Gros 1996b, 247 et fig. 295.
125 Gros 1996b, 246.
126 Reynolds 1987, 81-85, n. 26 ; de Chaisemartin 1989. Le bilan des dernières fouilles est fait par Ratté & Smith, 2004, 166. Le bâtiment a été construit à l’époque flavienne, ou sous le règne de Trajan ; il reçoit un nouveau pavement de mosaïque au milieu du ive s. sous la direction de Flauius Constantius. Sur la façade nord (reconstituée fig. 20, p. 167), l’édit des prix de Dioclétien était affiché. Voir le plan d’Aphrodisias (fig. 4).
127 Description précise alors que les fouilles n’étaient pas encore publiées par Gros 1996b, 248 et fig. 296. D’Andria 2001, 104 n. 20 indique devoir publier les Ricerche sull’agora di Hierapolis.
128 Sperti 2000, 45-50 ; photographies dans D’Andria 2003, 103 fig. 83.
129 F. D’Andria indique qu’entres autres activités, le tribut était payé dans la basilique (D’Andria 2001, 107-108).
130 Halfmann [2001] 2004, 81-82. Néanmoins, il faut rappeler que l’agora romaine de la ville n’a pas été fouillée, ce qui peut fausser les conclusions.
131 Voir Chandezon 2000 (Bull. 2001, 345), 76, sur le sens du mot ἀγορά comme réunion de commerçants à l’occasion des grandes fêtes religieuses. L’extrait cité plus haut de Ménandre le Rhéteur (2.377) joue probablement sur la polysémie du mot.
132 Voir encore l’anecdote rapportée par Plutarque (Moralia, 817 A), qui montre l’agora comme la place de la cité où l’on est observé par ses concitoyens. Plutarque donne des préceptes politiques applicables à son temps, cette remarque est donc significative pour la cité grecque d’époque romaine. L’agora était le lieu du spectacle que la cité s’offrait à elle-même, il fallait s’y montrer et les comportements qu’on y adoptait au vu de tous montraient son attachement à la vie civique.
133 Balty 1991, 569.
134 Bier 1999 : le bâtiment d’Éphèse aurait eu les deux fonctions de bouleutèrion et d’odéon.
135 Balty 1991, 562-563.
136 Paus. 6.23.7.
137 Voir Sartre 1995, 126-133 ; Fröhlich 2002, 75-92 ; Hamon 2005, 324-325.
138 Hamon 2005, 325.
139 D.Chr. 40.6 (trad. Cuvigny 1994).
140 D.Chr. 50.1.6 et Hamon 2005, 325-327. Le bouleutèrion pouvait ainsi être le lieu de passage ou d’aboutissement de processions lors de fêtes religieuses civiques : selon Laumonier 1958, 335, la procession des Panamaréia aboutissait au bouleutèrion de Stratonicée.
141 Aristid., Or., 23.13.
142 Plut., Moralia, 796 F (trad. M. Cuvigny, Paris, CUF, 1984).
143 Plut., Moralia, 823 B.
144 Ce point s’inscrit dans la continuité de l’évolution du régime des cités depuis l’époque hellénistique. Il doit néanmoins être clairement posé, dans la mesure où l’on a eu tendance à surévaluer le rôle des “loisirs” dans les cités grecques d’époque romaine, au détriment des activités politiques traditionnelles.
145 Aristid., Or., 51.31-34 (trad. Festugière 1986).
146 Balty 1991, 562.
147 Paus. 6.23.7.
148 Aristid., Or., 25.53.
149 Aelius Aristide et Libanios emploient le mot bouleutèrion au pluriel. Aelius Aristide dans le Discours pour l’anniversaire d’Apellas prononcé en 147 proclame que toute la cité est reconnaissante à Quadratus : “Cependant ce ne sont pas que mes mots, mais la cité elle-même est d’accord, et elle l’a proclamé dans les bouleutèria, dans les théâtres, dans les assemblées, dans n’importe quel endroit que l’on puisse citer, puisque tout a été orné par cet homme” (Or., 30.9). L’emploi au pluriel peut désigner l’ensemble des salles dans lesquelles le Conseil peut se réunir. On retrouve ce pluriel dans le discours de Libanios après le tremblement de terre qui a dévasté Nicomédie en 358 (Or., 61.7) : les bouleutèria de la cité, dit Libanios, ont été détruits.
150 Gros 1996b, 313.
151 Luc., Dom., 21-31.
152 Lib., Progymnasmata, 12.2 et 4.
153 Lib., Progymnasmata, 12.2.1.
154 Voir la restitution de l’Odéon d’Agrippa à Athènes, dans Gros 1996, 311 fig. 367.
155 Voir le plan du bouleutèrion de Priène, dans Schede 1936.
156 IK, 12-Ephesos, 460 (à compléter avec SEG, 53, 1280). La date peut être déduite de la lettre (IK, 15-Ephesos 1491) adressée par Antonin aux Éphésiens sur les travaux de Vedius : elle date de 145, les travaux furent donc achevés peu après.
157 Balty 1991, 511-514 n. 1.
158 IK, 15-Ephesos, 1491.
159 IK, 24.1-Smyrna, 697.
160 IK, 21-Stratonikeia, 289. Voir I. 1.
161 IK, 21-Stratonikeia, 293.
162 IK, 22.1-Stratonikeia, 1101, ligne 5 en particulier : καθίδρυται δὲ ἀγάλματα ἐν τῷ σεβαστῷ βουλευτηρίῳ τῶν προειρημένω[ν θεῶν].
163 Robert 1937, 516-523.
164 Ramsay 1895, 233 no 83.
165 Laum, Stiftungen, 99 no 95 ; IK, 36.1-Tralleis, 145.
166 LBW, 1011 (IGR IV, 555).
167 Voir le cas incertain d’une inscription d’Iasos, Pugliese Caratelli 1993, 265-268 (AE 1993, 1533, avec traduction ; M. Sève, Bull., 1994, 102). Cette inscription honorifique en l’honneur de M. Aurelius Daphnos, de 209-211, indique qu’il avait “composé un catalogue (des éponymes ?) dans le portique et le lusorium qu’il avait construits”. Il ordonne également des distributions aux bouleutes dans son propre bâtiment, ἐν τῷ ἰδίῳ αὐτοῦ ἔργῳ (l. 21-24). Ce monument est-il en rapport avec le bouleutèrion ?
168 Balty 1991, 444-447. Parapetti 1987, date plus volontiers la construction du bouleutèrion de la fin du premier siècle.
169 Balty 1991, 447-453. Intervention au bouleutèrion : voir en dernier lieu Kalinowski & Taeuber 2001, 355-356.
170 Balty 1991, 468-470.
171 Balty 1991, 470-473.
172 Mert 1999, 252-256.
173 Balty 1991, 531-532.
174 Sperti 2000.
175 Balty 1991, 515-519. On présume habituellement que ces deux personnages ont été des bienfaiteurs de la boulè et qu’ils auraient notamment financé une restauration du bâtiment où le Conseil se réunit (sans que l’inscription honorifique en l’honneur de ces personnages le suggère de quelque manière, IAph2007 2.17 et 2.13).
176 Balty 1991, 519-523.
177 Balty 1991, 453-458.
178 Magie 1950, 639.
179 Balty 1991, 518-519.
180 Balty 1991, 473-476.
181 Balty 1991, 524-526.
182 Balty 1991, 527.
183 Balty 1991, 447 n. 99. Voir l’inscription IK, 28.2-Iasos, 253 : dédicace à Homonoia et au peuple, entre 195 et 190, par “les épimélètes chargés du bouleutèrion et de l’archéion (…) et l’architecte Anaxagoras fils d’Apellikôn”.
184 Balty 1991, 558.
185 Rumscheid 1998, 51-59.
186 Rumscheid 1998, 56.
187 Balty 1991, 531.
188 Balty 1991, 589 (qui cite P. Verzone d’après lequel ce bâtiment serait d’époque impériale) et plan de la cité dans De Bernardi Ferrero (éd.) 2002 : au no 31, à l’est de l’axe nord-sud de la cité, au sud du Plutonion, est indiqué un bouleutèrion avec un point d’interrogation. Si l’on reprend les suggestions de J.-Ch. Balty concernant l’emplacement des bouleutèria, on constate que ce monument n’a pas la position normale d’un bouleutèrion dans une cité. La grande agora de l’époque antonine n’en a pas encore révélé sur son pourtour ; je n’ai trouvé aucune indication bibliographique sur l’éventuelle relation avec une agora antérieure, avant le tremblement de terre de 60.
189 Balty 1991, 551-553. IK, 24.1-Smyrna, 697, l. 12.
190 Balty 1991, 519 n. 450.
191 Hamon 2005, 318 n. 7 sur la précision du vocabulaire épigraphique, qui en employant ce terme désigne bien le lieu et non l’institution.
192 Bier 1999 et Kokkinia 2003, 205 et n. 43.
193 Knibbe & Büyükkolanci 1989, 43-45.
194 Balty 1991, 514 n. 426.
195 IK, 13-Ephesos, 740b.
196 Quelques commentaires dans Eichler 1962, 41.
197 Alzinger 1974, 51-55 et Spanu 1988, 44-45.
198 Alzinger 1988 pense qu’il s’agit d’une reconstruction vers 50 a.C. d’un édifice datant du iiie s. a.C.
199 Reynolds 1996, 121-126.
200 À Magnésie du Méandre des inscriptions mentionnent l’existence d’un bouleutèrion à l’époque hellénistique, même si le bâtiment actuel est d’époque romaine (IMagnesia 100 et IMagnesia 46, avec une clause ordonnant la gravure du décret dans le bouleutèrion : [ἀ] ναγράψαι δὲ καὶ τὸ ψάφισμα ἐμ βουλευτηρίωι, de la fin du iiie ou début du iie s. a.C.) ; à Téos le bouleutèrion est également cité régulièrement dans les inscriptions (par exemple, dans la fondation sur l’éducation des enfants prévoyant que les examens de grammaire et de musique s’y déroulent, Syll.3 578). Enfin à Pergame, une inscription du ier ou du iie siècle mentionne un bouleutèrion, dont l’emplacement n’est pas identifié dans le tissu urbain (IPergamon, 278).
201 Aristid., Or., 18.5. Voir également les discours 17 et 19-21.
202 Aristid., Or., 26.97.
203 Balty 1991, 569-570.
204 Au neutre dans LSJ s.v. οἰκοβασιλικόν, tandis que L. Robert, Bull. 1973, 475 suggère que ce mot est masculin d’après l’inscription d’Aphrodisias.
205 Bull. 1973, 475. On connaît un quatrième exemple en Asie mineure : L. Robert dès 1973 signale l’utilisation de ce terme en latin dans une inscription de la colonie romaine de Cremna de Pisidie, où une épouse de consulaire a légué 12 000 deniers pour la construction de ce bâtiment (ICremna, 45). À ce jour, ce sont les seules attestations conservées. D’après St. Mitchell, l’oecobasilicum de Cremna, qu’il rapproche de ceux de Thyatire et de Sardes – mais non, comme nous, du cas hypothétique d’Aphrodisias – consiste dans “a large basilical hall used as a meeting place” (Mitchell 1995, 67 et 157 pour la citation). Il nous semble que les inscriptions de Thyatire et de Sardes renvoient plutôt à une salle, du fait de sa décoration coûteuse et de son usage pour les réunions de la gérousie, qui serait d’une taille inférieure à celle d’une basilique. C’est pourquoi nous associons son étude à celle des autres salles de réunions de collèges de magistrats ou d’organes institutionnels de la cité.
206 Voir Pont 2007c.
207 Voir également la nouvelle édition dont ce texte a fait l’objet : IAph2007, 12.1111.
208 TAM V, 2, 982.
209 TAM V, 2, 991.
210 Sardis, 63.
211 Bruneau 1988, 37 nuance les conclusions de L. Robert sur ce mot (Robert 1957, 362 n. 1). Voir aussi Ginouvès & Martin 1985, qui mettent en question l’idée de revêtements polychromes : la σκούτλωσις désigne avant tout une technique de placage sur une paroi, avec du marbre, pour la décorer.
212 Reynolds 1991, 19 et 26 no 1 (SEG 41, 910).
213 Sur ces bâtiments, voir Lévy 1901, 350-351.
214 D.Chr., 7.39.5.
215 MAMA VIII, 498 ; voir également Robert 1966b, 393 pour la réunion de deux fragments mentionnant la construction du portique sud du grammatophylakion.
216 Reynolds 1996.
217 Robert 1966b, 393.
218 Bull. 1961, 783.
219 Sur le sens de “porte monumentale à avant-corps”, voir Hellmann 1992, 352. M.-Chr. Hellmann traduit le singulier τὸν πρὸ τοῦ πρυτανείου πυλῶν[α] par “les propylées du Prytanée”.
220 IK, 12-Ephesos, 437.
221 LSJ s.v. σωλάριον et OLD, s.v. solarium. Il peut s’agir aussi en latin d’une clepsydre ou d’un endroit exposé au soleil.
222 IK, 12-Ephesos, 462 et Add. p. 12-13.
223 IK, 12-Ephesos, 528.
224 IK, 17.1-Ephesos, 3071.
225 Sève 1979, en particulier 347 pour le commentaire de ce passage : ἀνατεθῆναι αὐτῆς ἄγαλμα ἐν ἐνὶ τῶν οἰκημάτων τῆς τετραγώνου ἀγορᾶς ἐν τῇ στοᾷ τῇ ἀπὸ τῆς ἀνατολῆς, τῷ ὄντι μεταξὺ τοῦ τε τῶν τειμητῶν ἀρχήου καὶ τοῦ ἀγορανομίου, κοσμηθέντι δὲ αὐτῷ χρῆσθαι εἰς τὸν ἀεὶ χρόνον ἀρχήῳ τόν τε κοσμοφύλακα καὶ τοὺς ἀεὶ κοσμοφυλακήσοντας (l. 64-68).
226 Sève 1979, 348.
227 Sève 1979, 347 n. 104.
228 Hellmann 1992, 29.
229 IPergamon, 237.
230 Pour παραστάς, voir Hellmann 1992, 322-324.
231 On trouve également la bibliothèque construite par Flauia Mélitinè à Pergame, dans l’Asklépiéion.
232 Voir les conclusions de cette partie et II.2.
233 Bohn 1889, 43 fig. 52 ; Robert 1937, 74-89.
234 Gros 1996b, 373.
235 IK, 17.1-Ephesos, 3009, découverte devant la porte de Mazaios et Mithridatès.
236 Ginouvès & Martin 1998, 127 et n. 73.
237 Keil 1943.
238 Aristid., Or., 1.354.
239 Gros 1996b, 368.
240 Respectivement IK, 17.2-Ephesos, 3009 et 5113.
241 IK, 17.2-Ephesos, 5101.
242 IK, 17.2-Ephesos, 5102 (en grec) et 5103 (en latin).
243 IK, 17.2-Ephesos, 5104 et 5105 par la fille de Celsus ; IK, 17.2-Ephesos, 5106 par le petit-fils de Celsus ; IK, 17.2-Ephesos, 5107 par son neveu.
244 IK, 17.2-Ephesos, 5108, 5109, 5111.
245 IK, 17.2-Ephesos, 5113.
246 IK, 13-Ephesos, 690. Les informations manquent pour localiser ce Mouséion dans le tissu urbain éphésien.
247 Robert 1937, 146.
248 Puech 2002, 84 et n. 3.
249 MAMA VI, 98, pl. 19 ; Robert L. & J. 1954, 166 n. 46 admettent la restitution du mot “bibliothèque” : [-τὴν βυβλιοθή]κην ἐκ θεμέλίων κατ[α]σκευάσαντες καὶ τὸν περὶ αὐ[τὴν-].
250 Barresi 2003, 428-430.
251 Clerc 1885.
252 Demangel & Laumonier 1922, 327 no 6.
253 Str. 14.1.37.
254 Le gymnase de Chios porte le surnom “homérique” : Kaibel 1878, 860 ; Peek 1976 date l’épigramme indiquant cette dénomination du ier s. a.C. au plus tard.
255 Philostr., VS, 2.27 [619].
256 IGR IV, 618. Voir Robert 1937, 147 et l’inscription IK, 23.1-Smyrna, 191.
257 Robert 1937, 148.
258 Martyrium Pionii (éd. Robert 1994), 17.1.
259 Trad. de Naumann 1950, 74.
260 IK, 34-Mylasa, 508.
261 Hellmann 1992, 284. La définition est élaborée à partir du cas du gymnase de Delphes, dont la paradromis sert encore à l’époque impériale.
262 Io. Mal. 10.235-236.
263 Martyrium Pionii, 4 et 12.14.
264 Sève 1979.
265 Sève 1979, 348-349.
266 Picard 1951. Les autres mentions concernent la Grèce continentale et les Îles.
267 Picard 1951, 135.
268 D’après nos relevés, même la Bithynie voisine ne permet pas de prendre connaissance d’une telle diversité de lieux de réunion pour les instances de la cité ou pour le public éduqué.
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