Les inscriptions grecques peintes sur les vases attiques dans les nécropoles de Felsina
p. 161-179
Texte intégral
1Lors du colloque Mouvements et Trajectoires dans les nécropoles d’Italie d’époque pré-républicaine et républicaine, j’avais présenté le corpus des inscriptions dans les nécropoles de Bologne1. Il s’agissait de trois types d’inscriptions : les inscriptions grecques peintes sur les vases attiques, les graffites (onomastiques et commerciaux) sur les vases et les épitaphes sur les stèles. Mais l’étude de l’ensemble du matériel n’a pas permis d’apporter une réponse globale aux problèmes relatifs à l’organisation sociale et politique de Felsina à l’époque classique2. Chaque type de matériel étant conditionné par des problématiques propres, il a semblé plus judicieux de les étudier séparément et d’approfondir le rôle de chacun, dans les nécropoles de Felsina pour la phase Certosa3.
2Les inscriptions peintes sur les vases attiques, que je vais étudier essentiellement dans cet article, constituent le premier volet des trois types d’inscriptions funéraires de Bologne. Il s’agit d’un corpus de vingt-neuf inscriptions, toutes grecques4. Ces textes sont recensés à partir de la publication des vases attiques de E. Pellegrini5 et de la description qu’il en fait ; à ce corpus ont été ajoutées deux autres inscriptions lues par J. D. Beazley6. L’absence fréquente de ces textes dans les fascicules du Corpus Vasorum Antiquorum (C.V.A.)7 et dans les recueils de J. D. Beazley8 rappelle aussi qu’une partie de ces inscriptions n’est plus visible aujourd’hui. Cet effacement est certainement dû à leur fragilité9.
3Une étude sur les vases attiques appelle à une réflexion sur le milieu athénien qui les a fabriqués mais nous informe aussi sur le marché étrusque, puisque le client est le principal bénéficiaire du vase10. Afin de mieux cerner l’importance et la signification des inscriptions grecques peintes sur ces vases attiques pour la clientèle bolognaise qui les emploie en contexte funéraire, nous allons analyser ces inscriptions, la nature des vases, leur peintre et leur fonction.
4Cette communication se structure en quatre parties : une présentation rapide du corpus puis trois études sur les types de réception étrusque de la culture grecque, à savoir, le caractère ornemental de l’écriture et, au travers des acclamations de type kalos, deux sujets de prédilection (pratique du symposium et scènes de la vie quotidienne).
5Le corpus des vingt-neuf inscriptions grecques peintes sur vases attiques est marqué par la variété (fig. 2).
6La forme des vases que nous allons étudier est majoritairement liée au banquet : quatorze kylikes, cinq amphores, trois cratères à colonnettes, un cratère en calice, deux hydries, une œnochoé, un stamnos, un skyphos et un rhyton. Pour l’ensemble des représentations, sept vases traitent d’un sujet mythologique (scène du Minotaure et de Thésée, Héraclès et Busiris, Oreste et Pylades, Aphrodite et Phaon, Athéna et deux héros qui jouent aux dés, deux amazonomachies) ; trois vases sont illustrés par un thème dionysiaque (ménade, komos, silènes ivres) ; et les dix-neuf autres présentent des scènes de “vie quotidienne” (scènes de conversation amoureuse, scènes d’éphébie, scènes d’athlètes et thèmes féminins). Il n’est pas possible de mettre en rapport une iconographie avec un type particulier d’inscription.
7Les vingt-neuf inscriptions peintes se répartissent ainsi : une légende (Aphrodite et Phaon), deux amphores panathénaïques, quatre pseudo-inscriptions, un alphaoméga, vingt-et-un commentaires de type kalos (dont trois associés à un nom, Lysiklès, Philon, Epidromos). On notera une prédominance des acclamations de type kalos (les deux-tiers). Elles se rapportent tout autant à des scènes féminines, à des scènes dionysiaques, à des conversations amoureuses qu’à la représentation de l’amazone, de l’éphébie et à la scène du Minotaure et de Thésée.
8On constate l’absence de signature des peintres. Deux d’entre eux pourtant se détachent du corpus11. Il s’agit du Peintre d’Achille et du Peintre de Bologne 228. Les deux amphores panathénaïques seraient du premier et, dans le même style, serait peinte la kylix Pell. 173. Le second serait à l’origine des amphores Pell. 155 et Pell. 156. Il n’y a pas d’indices concluants qui permettent de savoir si la personnalité des peintres a une importance notable pour les acheteurs étrusques12.
9Quant à la localisation des inscriptions dans les nécropoles de Bologne, quatre vases attiques avec inscriptions proviennent de la nécropole Arnoaldi, seize de la Certosa, trois de De Luca, trois des Jardins Margherita, deux d’Aureli et un de Tamburini. On peut constater la rareté de ces inscriptions13 ainsi que la rareté des tombes concernées par leur présence. Sur un millier de tombes connues, dont “près de 60 % contenaient des récipients attiques”14, seules vingt-sept à la période classique possèdent un vase attique avec inscription (deux tombes en possèdent une paire15).
10Neuf vases du corpus sont d’ailleurs les seuls vases attiques de leurs sépultures16, lesquelles sont majoritairement individuelles à Bologne. Sur vingt-neuf inscriptions, il est possible de recomposer vingt-deux contextes17.
11Certaines tombes, indiquées par un signe extérieur, sont riches de leur monumentalité18 : la tombe 3 Certosa (Pell. 10, surmontée d’une structure en pierre), la tombe 41 Certosa (Pell. 174, le matériel comprend des fragments de stèle), la tombe 52 (Pell. 455, surmontée d’un cippe), la tombe 218 Certosa (Pell. 221, surmontée d’une stèle haute de deux mètres), la tombe 294 Certosa (Pell. 362, avec un fragment de stèle), la tombe 312 (Pell. 363 avec une stèle grossière), la tombe 231 Certosa (Pell. 155, avec une stèle), la tombe 110 Arnoaldi (dans un complexe funéraire signalé par trois stèles, Pell. 11 et 12) et la tombe 120 Arnoaldi (Pell. 156, signalée par un cippe). Quatre d’entre elles occupent une place bien en vue dans la nécropole de la Certosa19. La tombe 41 à l’extrême Ouest du groupe I, la tombe 3 au centre du même groupe, la tombe 218 du groupe II et la tombe 231 à l’extrême Ouest du groupe II se situent le long des voies de circulation ou sont visibles de la route.
12Les tombes à incinération sont aussi des marqueurs du statut social20 : la tombe 218 Certosa (Pell. 221), la tombe 231 Certosa (Pell. 155), la tombe 271 Certosa (Pell. 439), la tombe 294 Certosa (Pell. 362), la tombe 312 Certosa (Pell. 363), la tombe 6 Aureli (Pell. 396), la tombe 46 Arnoaldi (où le vase Pell. 261 est utilisé comme ossuaire) et la tombe du rhyton à tête de bélier (Pell. 567) dans la nécropole De Luca.
13Le choix de l’iconographie et de l’inscription est indépendant du type de tombe et du rite qui lui est associé. Les vases avec inscription participent avec les autres signes funéraires (stèle, riche matériel, incinération) au prestige du défunt.
14Parmi les inscriptions grecques peintes sur les vases attiques de ce corpus, quatre ne sont pas signifiantes : il s’agit de pseudo-inscriptions qui seront traitées dans cette partie en fonction de la répétition des lettres alphabétiques et de la disposition des mots dans l’espace iconographique. Si la mise en scène de l’écriture paraît plus importante que le sens, nous chercherons les possibilités d’une telle réception chez les Étrusques de Bologne.
15Dans la tombe 318 Certosa, se trouve une kélébé à figures noires (Pell. 48) (fig. 3). Entre les vides laissés par les chevaux et leur conducteur, deux pseudo-inscriptions21 sont verticales, et une horizontale. Cette disposition est répétée sur les deux côtés du vase, avec quelques variations dans les lettres. Les voyelles O et U sont les plus redondantes. Dans le contexte athénien, ces lettres alphabétiques constituent un effet ornemental très prononcé. La valeur commerciale de ce vase est confirmée par un graffite grec peint sous le pied22. Dans le contexte de Felsina, ce cratère à colonnettes fait partie d’un matériel riche en éléments de banquet : des vases attiques (deux kylikes, une kélébé, une œnochoé et une olpè), assortis d’un candélabre. La kélébé (Pell. 48) est datée des années 510-480, déposée plus récemment dans la tombe (datée du second quart du ve siècle a.C.23). Toutefois il ne s’agit pas de la seule inscription grecque de la tombe : sur une kylix à figures rouges (Pell. 433) représentant deux pancraces, on peut lire le verbe προσαγορύ qui se traduirait par saluer24. L’association d’une inscription signifiante et d’une autre non signifiante montrerait que les Étrusques, conscients du non-sens des pseudo-inscriptions25, en percevaient l’aspect décoratif. La pseudo-inscription participe de l’esthétique du vase et semble comprise dans le milieu étrusque comme telle26.
16Dans la tombe 3 Certosa, au caractère monumental, une des deux amphores (Pell. 10) contenues dans les biens du défunt comprend une pseudo-inscription. Les lettres U, O, S et T sont répétées entre la frise supérieure et les personnages (conducteurs de char et chevaux)27.
17Des jardins Margherita provient l’œnochoé à figures noires (Pell. 74). Il s’agit cette fois d’un type iconographique très connu en Étrurie28 : entre Athéna et les joueurs de tric-trac, on peut lire une répétition des lettres S et O. Le caractère lettré de la civilisation étrusque et la présence également dans l’art étrusque d’inscriptions à côté des figures peintes dans les tombes29 peut avoir facilité le passage d’une forme de décoration grecque à sa réception en Étrurie30. La lettre O, même si elle n’appartient pas à l’alphabet étrusque, est fondamentale sur le plan décoratif.
18Quant à l’hydrie de la tombe féminine 304 Certosa (Pell. 173), E. Pellegrini lit “HOEI∙”31 de haut en bas, sur la gauche du personnage. Cette suite de voyelles peintes pourrait s’interpréter comme une acclamation issue de la bouche de l’éphèbe, dont le visage est tourné vers l’inscription. Le vase provient d’une tombe à incinération.
19Ces vases font partie d’une sélection d’œuvres de culture grecque qui semble bien comprise en milieu étrusque et appréciée pour la savante association entre écriture et peinture. C’est pourquoi nous évoquons aussi la légende qui accompagne la représentation d’Aphrodite et de Phaon (Pell. 288 bis). Son peintre ferait partie du Groupe de Polygnote. Ce dernier signe lui-même ses œuvres et a coutume d’écrire des légendes pour les personnages mythologiques même les plus reconnaissables32. L’absence du contexte ne permet pas de mesurer l’ampleur du prestige que pouvait apporter ce vase. Toutefois les inscriptions accompagnant les personnages du mythe sont aussi un trait propre de la peinture monumentale grecque. Loin d’aider à l’identification des personnages, il s’agit d’une convention qui souligne l’importance de la représentation33.
20L’étude des acclamations de type kalos va nous amener à mieux approfondir un goût pour le style de vie à la grecque, à travers des thèmes mythologiques, dionysiaques et une certaine représentation des éléments qui rappellent la pratique du symposium.
21Ainsi l’iconographie du stamnos (Pell. 174) se réfère à l’histoire du héros Héraclès que Busiris aurait voulu sacrifier, selon un thème très populaire en Étrurie34 : sur l’autel, sont inscrites les lettres alpha et oméga35. La première et la dernière lettre de l’alphabet font penser à l’aspect civilisateur d’Héraclès : il combat en effet des Égyptiens s’apprêtant à commettre un acte barbare, puisque tuer un étranger contrevient aux principes de l’hospitalité grecque36. Ce vase fait partie du riche matériel de la tombe 41 Certosa, dont il est le seul vase attique. Il s’agit d’une sépulture féminine visible par une stèle. L’inscription, dans ce cas, pourrait être porteuse de valeurs grecques parce qu’elle est liée au rituel du sacrifice et aux lois de l’hospitalité.
22L’amphore à figures rouges (Pell. 156) représente d’un côté une conversation érotique entre un homme et un éphèbe, et de l’autre côté le combat de Thésée contre le Minotaure37 accompagné de l’inscription kalos. Il s’agit d’un contexte riche : la tombe 120 de la nécropole Arnoaldi, signalée par un cippe, contient une tête masculine en marbre, une série de vases attiques, une série d’instruments en bronze, des métaux précieux et des parures féminines38.
23Sur le cratère (Pell. 221) de la tombe 218 de la Certosa, kalos est inscrit au centre et à l’horizontale entre Apollon et Artémis, encadrés par Oreste et Pylade. Le choix de ce cratère est peut-être lié à une iconographie soutenue par une inscription qui met en valeur la beauté de la scène, la justesse de l’action ; il établit un rapport direct avec la culture hellénique. Ce vase s’inscrit dans un contexte somptuaire, comme dans le cas précédent : la tombe est indiquée par une stèle et le mobilier funéraire contient un service de banquet presque complet39.
24La pratique du symposium, ainsi suggérée par les dépôts dans la tombe, correspondrait à un marqueur social en Étrurie40. Les scènes dionysiaques renforcées par les acclamations de type kalos sont également en rapport avec les usages grecs du banquet. Sur l’hydrie à figures noires de la tombe 371 Certosa (Pell. 168), des inscriptions, lacunaires, reprennent l’expression ὁ παĩς καλός Le peintre, par ces inscriptions, donnerait “à lire pour mieux laisser voir”41, puisque l’écriture entoure les satyres. En occupant l’espace, l’inscription participe à l’ornementation42.
25Les acclamations de type kalos se retrouvent principalement sur des coupes : ces inscriptions jouent avec les convives dans le cadre du banquet athénien, sur les faces extérieures que tous peuvent admirer ou au centre du vase43. Il s’agit d’abord d’une kylix à figures rouges de la Certosa (Pell. 363)44. Quatre inscriptions de type kalos/kale sont réparties des deux côtés du vase représentant l’amazonomachie. Les mots accompagnent les gestes des guerriers, suivent les cavaliers ou ornent les boucliers. La redondance de l’inscription impliquerait une visibilité de la coupe45. Ce vase complète également les éléments de distinction sociale dont fait partie la stèle de cette tombe.
26Pour la kylix du Peintre du Mariage (Pell. 373), l’inscription ὁ παĩς καλός s’inscrit derrière un couple masculin constitué d’un homme barbu et d’un jeune homme en conversation érotique. L’absence de contexte ne nous aide pas à en comprendre la réceptivité chez les Étrusques mais le pied de la kylix a été restauré dans l’Antiquité. Elle a donc pu être utilisée du vivant du défunt et ajoutée au prestige social du buveur : l’inscription au centre de la coupe et non sur les côtés renvoie à un dialogue entre le peintre et le seul buveur46. Le sujet du kalos étant dépersonnalisé, il est plus facilement exportable47.
27La kylix du Peintre d’Ambrosios (Pell. 434) rappelle ce lien direct entre le buveur et le peintre : au centre du vase, l’inscription (ὁ παĩς καλός) se lit juste derrière le jeune homme qui porte une kylix. Il s’agit du seul vase attique de la tombe 17 de la nécropole Aureli48. Cette singularité du vase attique et l’interférence entre l’objet et l’écriture lui confèrent une place de choix.
28Le rapport entre la vaisselle du banquet et l’inscription ὁ παĩς se lit aussi sur la kylix de la tombe 83 Certosa, vase de référence qui a donné son nom au peintre (Peintre de Bologne 440). L’inscription est au centre du vase devant un éphèbe enroulé dans un himation et tenant un bâton. Il ne s’agit pas du seul vase attique de la tombe : il y a aussi une kélébé et un cratère49. Ce dernier, marqué d’un signe commercial sous le pied, représente des éphèbes qui mélangent le vin.
29Enfin, la kylix (Pell. 455) de la tombe 52 Certosa présente, au centre du vase, une scène dionysiaque. L’inscription au féminin, parallèle au bâton de la ménade, renforce la verticalité de la scène50.
30Même si certaines interprétations de l’acclamation de type kalos renvoient à une réalité exclusivement athénienne51, il n’est pas impossible d’y lire un indice d’adhésion à des pratiques définissant un mode de vie et des comportements à la “grecque” pour les Étrusques de Bologne52.
31Les scènes féminines, les scènes d’éphèbes et les scènes d’athlétisme de ce corpus des vases attiques avec inscriptions grecques témoignent enfin d’autres thématiques liées à l’acclamation de type kalos.
32Trois vases avec une iconographie féminine portent l’inscription kalos. Sur une kylix lacunaire de la nécropole De Luca (Pell. 442), une nymphe et une jeune fille assise sont ainsi séparées par l’inscription au masculin. Le cratère (Pell. 261) utilisé certainement comme ossuaire53, présente une iconographie de la femme au bain très connue54. Le matériel de cette tombe ne contenait pas d’autre objet. L’inscription décore horizontalement la vasque de la jeune femme. Le col et l’anse du vase ont été restaurés dans l’Antiquité ce qui confirme encore son importance sociale et funéraire. Pour la kylix à figures rouges de la tombe 355 de la nécropole Certosa (Pell. 365), E. Pellegrini restitue le mot kalé au féminin en rapport avec l’iconographie d’une femme au bain. Seule la lettre K était pourtant visible. Le thème correspond au reste du matériel de la tombe : boucles d’oreilles, alabastre, anneaux, parures. À partir de la moitié du ve siècle en Grèce, les représentations féminines se multiplient et les acclamations acquièrent un sens voisin des scènes d’éphèbes ou d’athlètes, liées au traitement du corps55. Dans les nécropoles de Bologne, on ne peut pas conclure à un lien entre les inscriptions, le sexe du défunt et la représentation iconographique.
33Les scènes d’éphébie avec des acclamations de type kalos sont nombreuses et participent parfois aux thématiques du banquet ou du sport. Dans deux tombes de la nécropole Certosa, signalées par des stèles, dont le matériel est riche en céramiques attiques, deux vases proposent des scènes d’éphébie : c’est le cas d’un guerrier quittant la maison sur l’amphore à figures rouges (Pell. 155) du Peintre de Bologne 228 de la tombe 231 Certosa (kalos est restitué) ; et d’un homme au gymnase sur la kylix à figures rouges du Peintre de Colmar de la tombe 294 Certosa (Pell. 362)56. En corrélation avec une ciste cette fois, deux vases correspondent au seul matériel attique des tombes dans lesquelles ils ont été déposés. Il s’agit de la kylix à figures rouges de la tombe 271 Certosa (Pell. 439)57 représentant un guerrier qui court et du rhyton (Pell. 567) d’une tombe féminine de la nécropole De Luca58. Sur ce rhyton, des éphèbes sont séparés par une inscription que E. Pellegrini restitue comme kalé. Dans une autre tombe féminine59, un skyphos (Pell. 523) possède une acclamation au masculin qui sépare un jeune homme d’un homme plus âgé (inscription répétée peut-être sur l’autre face, d’après la restitution de E. Pellegrini)60. À l’intérieur de la kylix de la nécropole De Luca (Pell. 361), un éphèbe nu tenant une peau de lièvre et une lyre est représenté en mouvement avec une acclamation, tandis qu’à l’extérieur, sur le pourtour du vase, se trouvent des scènes mythologiques61. On peut remarquer qu’il s’agit d’une coupe du peintre Oltos, qui ajoute fréquemment des inscriptions de type kalos au centre des kylix62. Oltos bénéficiait d’une grande notoriété en Étrurie où il exportait largement63. Le choix de ces vases participe d’un attachement à la culture grecque, à travers le thème de la formation de l’éphèbe, et leurs inscriptions confirment le goût pour un code iconographique athénien très répandu.
34Enfin trois kalos-names apparaissent dans la série des inscriptions grecques de Bologne. Il s’agit de Lysiclès (Pell. 435), de Philon (Pell. 396), kalos sous-entendu, et d’Epidromos (Pell. 436). Philon était un athlète athénien de la fin du vie siècle a.C. Il est connu par une douzaine d’autres inscriptions64. La production d’une série d’inscriptions postérieures à son décès s’explique par l’existence de plusieurs personnages65 portant le même nom, ou bien par une renommée telle qu’il est encore appelé sur les vases comme référence, selon le principe de la “culture of fame”66. Ce vase s’inscrit dans une série de céramiques attiques : un cratère à colonnettes, un skyphos et trois kylikes (en plus d’une amphore de production locale). La kylix de la Certosa (Pell. 436) porte la mention Epidromos kalos. J. D. Beazley l’attribue au Peintre d’Epidromos67 : sur dix-neuf vases connus de ce peintre, quatorze portent cette inscription éponyme68. En dehors de ce peintre, trois autres kylix et une série de fragments non attribués portent cette inscription69. Cette référence peut correspondre au nom du peintre lui-même ou bien rappeler la beauté des athlètes. En effet, le mot Epidromos signifie “celui qui court”. Sa mise en parallèle avec Leagros, sur d’autres vases, rappelle la beauté physique des jeunes hommes, mais aussi la renommée de certains hommes libres athéniens de cette époque.
35Ces références à l’athlétisme connaissent une large diffusion en Étrurie et reflètent la réception dans le contexte étrusque des coutumes grecques70, comme le confirment les deux amphores panathénaïques de Bologne (Pell. 11 et 12), trouvées dans la nécropole Arnoaldi, tombe 110. L’espace même de la sépulture, en connexion avec plusieurs autres tombes et comprenant trois stèles, fait penser à une mise en scène et à une valorisation du pouvoir de ce défunt ou de sa famille71. Les amphores portent la mention du peuple des Athéniens et leur dépôt en paire dans la tombe fait partie de cette volonté de prestige. Ces amphores sont un prix autant pour le gagnant du concours des Panathénées que pour celui qui les possède72. Elles sont un signe important de distinction73.
36En conclusion, rappelons que ces signes de comportement ne sont pas limités à Bologne, ni même à l’Étrurie, et se retrouvent sur l’ensemble de la péninsule italienne en Campanie comme en Grande Grèce. La fabrication de ces vases s’échelonne sur un siècle, de 525 à 425 a.C.74 À Felsina, dans la nécropole de la Certosa, l’adhésion à certains traits du modèle athénien s’intensifie vers les années 480/470 a.C. et vers le second quart du ve siècle pour les autres nécropoles de la cité (fig. 2)75.
37L’idée que les inscriptions de type kalos auraient un lien avec la démocratie a été suggérée76 : la renommée des personnages et les acclamations font référence en effet à une vie publique de type athénien. La documentation de Bologne ne confirme pas une telle interprétation du sens de kalos en contexte étrusque et peu d’éléments nous permettent encore d’expliquer et de confirmer pour chaque cas le caractère précieux du vase.
38Les céramiques attiques sont pourtant des marqueurs de distinction sociale dans les nécropoles felsiniennes et les inscriptions peintes sur ces vases confirment les influences culturelles athéniennes. À Felsina, le choix d’un vase à inscription n’est certainement pas dû au hasard : quand on regarde l’ensemble de la tombe et sa position dans l’espace funéraire, on constate que ce vase fait partie d’un ensemble monumental, ou donne une valeur supplémentaire au matériel de cette tombe. Ainsi les inscriptions grecques peintes sur les vases attiques des nécropoles de Felsina, associées aux images lisibles du symposium, de la formation de l’éphèbe ou de la pratique athlétique, contribuent à donner une idée de la culture et du statut social du défunt.
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Notes de bas de page
1 Les nécropoles se développent en périphérie de la ville (fig. 1). À la période villanovienne, elles se situent à l’est, à l’ouest et au nord de la cité. À la période orientalisante, elles se structurent selon l’axe est/ouest. Leur monumentalisation se généralise à partir de la fin du vie siècle, début de l’apogée felsinienne. À la fin du ve siècle, la sortie de la ville à l’ouest se double d’une route plus au sud, bordée par la nécropole de Polisportivo. Les plus anciennes nécropoles sont les plus proches de la cité, indiquant ainsi une structuration urbaine antérieure à la monumentalisation des ensembles funéraires (Sassatelli 1988).
2 Les relectures et les conseils des Professeurs Agnès Rouveret et Giuseppe Sassatelli m’ont été profitables. Je les remercie vivement.
3 La phase Certosa est comprise entre la seconde moitié du vie siècle et le ive siècle a.C.
4 Fabretti 1867 identifie deux inscriptions comme celtes (CII1, 102 pour Pell. 48 et CII1, 103 pour Pell. 10) alors qu’il s’agit de pseudo-inscriptions grecques.
5 Pellegrini 1912 (abrégé sous la forme Pell. suivie du numéro du vase). La majeure partie de ces inscriptions n’est pas signalée dans les rapports de fouilles (Zannoni 1876 et Gozzadini 1884).
6 Pell. 435 et Pell. 436.
7 Laurinsich 1929 et 1931, Laurenzi 1936 et Bermond Montanari 1957 et 1960.
8 Beazley 1963, 1978 et Carpenter et al. 1989.
9 Cette fragilité serait due aux difficultés de conservation, aux restaurations successives et à la technique utilisée. Ainsi Pellegrini 1912 indique précisément que les inscriptions sont surpeintes pour les vases 442 et 567. Les inscriptions sont couleur violette (“paonazzo”) pour les no 361, 373, 396, 434, 440, et 523 ; et en lettres noires pour les vases no 261, 363 et 365. Sur la technique des inscriptions : cf. Boardman 1974, 213.
10 La Genière 2004.
11 Cinq vases avec inscriptions ne sont pas répertoriés chez Beazley (Pell. 10, 48, 168, 439, 523).
12 Reusser 2003. Leur distribution en plaine padane est aussi liée au système des échanges. Sassatelli 1990.
13 Le corpus de Pellegrini 1912 comprend en effet huit cent quatre-vingt-six vases. L’auteur a lu vingt-sept inscriptions peintes (3 %).
14 À la question si “la possession de la céramique attique a pu être réservée à des couches sociales déterminées et limitées dans les villes ou les campagnes – par exemple les représentants des classes dirigeantes ou de l’aristocratie – comme on a toujours supposé” (p. 169), Reusser 2003 répond par un exemple de la nécropole Certosa de Bologne avec un extrait de plan, partie 1 et 2 de la Certosa. Il conclut à une utilisation des vases attiques par des couches de population plus larges à Bologne. “En vérifiant un plus grand nombre de contextes, il devient manifeste qu’ils n’étaient pas mis ensemble par hasard. Au contraire se dessine un choix intentionnel de formes de vases et également de sujets iconographiques” (Reusser 2003, 170).
15 Il s’agit de la tombe des amphores panathénaïques dans la nécropole Arnoaldi et de la tombe 318 dans la nécropole Certosa (Pell. 48 et 433).
16 Il faudrait cependant connaître la proportion des vases attiques non inscrits qui seraient les seuls vases d’importation dans les tombes pour conclure sur ces évaluations chiffrées.
17 Six vases (Pell. 74, 288 bis, 361, 373, 435, 442) ne sont pas replacés dans leur contexte précis. En effet, le matériel des nécropoles des jardins Margherita et De Luca n’a pas été encore publié dans son intégralité. De plus, il a été impossible de retrouver le contexte archéologique de la référence Pell. 436 dans l’ouvrage de Zannoni 1876.
18 Cet argument peut être renforcé par l’idée que le pourcentage des tombes signalées extérieurement est plus élevé dans le corpus des tombes avec des vases grecs inscrits que sur l’ensemble des autres tombes. Dans la nécropole de la Certosa par exemple, 10 % des tombes sont signalées par des cippes ou des stèles (Govi 1999) contre 38 % dans la liste dressée ici.
19 Sassatelli 1988.
20 L’incinération est peut-être un rite de prestige à cause de son coût et de son ancienneté (Govi 2005, 274).
21 Trois lectures différentes ont été faites de cette inscription (Fabretti 1867, Brizio 1872, no 18 et Pellegrini 1912). Toutes soulèvent l’aspect répétitif des lettres utilisées par le peintre : le O, le U, le T et le signe +.
22 Seul Fabretti 1867 fait mention de KOD, inscription peinte sous le pied du vase. Ce sigle ferait référence à un circuit commercial particulier même s’il n’est pas possible de démontrer la présence de commandes pour les nécropoles de Bologne. La cité, située au cœur des échanges entre l’Adriatique et l’Étrurie centrale, permettait certainement de bénéficier d’un vaste choix de céramiques.
23 Govi 1999, 114-115.
24 L’inscription a été signalée par Zannoni 1876, Brizio 1872, Fabretti 1867 (4, note 1) et Klein 1898 (9). Aucun des quatre auteurs ne propose la même transcription. Brückner a recensé jusqu’à quatorze occurrences de ce verbe, utilisé d’après lui comme un terme technique du rituel des noces (cité par Ferri 1938). Pour Steiner 2007, elle correspondrait plutôt à une formule de don. Le fascicule du C.V.A. cite quinze autres kylikes de l’atelier de Paidikos portant cette inscription.
25 Baurain-Rebillard 1998 écrit : “Le caractère non signifiant d’une inscription est indépendant du niveau d’alphabétisation de l’émetteur, la même constatation s’impose du côté du récepteur” (p. 76). L’auteur montre en effet que des peintres peuvent être à l’origine autant de pseudo-inscriptions que d’inscriptions signifiantes.
26 Contrairement à Frel 1997 : “les acquéreurs des vases attiques ne comprenaient rien à ces inscriptions et ne s’y intéressaient guère” (p. 19).
27 Zannoni 1876, 53, Fabretti 1867, CII1, 103 et Pellegrini 1912, 10 proposent trois transcriptions différentes de l’inscription.
28 Sur ce même thème, on peut citer entre autres le vase d’Exékias provenant de Vulci (Villard, in Charbonneux et al. 1968, 100) et le vase inscrit du Peintre de Chiusi trouvé à Orvieto (Martinelli & Paolucci 2006, 90). Plus récemment (au début du ve siècle), une scène de jeu du même type peinte dans une tombe de Capoue opposait deux nobles étrusques (Cerchiai 1995).
29 On note également, dans l’art étrusque, la présence d’inscriptions à côté de figures peintes (comme sur la peinture monumentale de la Tombe des Augures de Tarquinia). Cf. la communication de C. Cousin.
30 Rebillard 1998. L’auteur voit un rapprochement graphique entre les pseudo-inscriptions et les exercices de syllabisation étrusque. Certains vases étrusques comportent en effet des listes alphabétiques et des répétitions de lettres.
31 Govi 1999 transcrit hoe (p. 99).
32 Beazley 1963 mentionne cent trente-deux références du peintre de Polygnote (dont trois références du groupe de Polygnote). Le peintre aurait signé six vases et mentionné le nom des personnages sur plus d’une trentaine de vases. L’écriture chez ce peintre n’est pas un fait majoritaire mais fréquent. Il est toutefois intéressant de noter qu’un seul autre vase connu pour le moment et représentant les amours d’Aphrodite et de Phaon aurait été peint par Meidias trouvé à Populonia et datant du ve siècle. Ce dernier est un peintre qui utilise les inscriptions sur un mode ludique. Une étude de Coüelle 1998, sur Meidias, pose la difficile question de la part d’inventivité des peintres et de celle des Étrusques dans ces choix. L’article se conclut sur une grande liberté de créativité attribuée à ces peintres de vases mais ne peut se prononcer sur la réceptivité de ces différents jeux d’interprétations induits par la nomination des personnages.
33 Phaon, vieux marin, aurait recueilli Aphrodite sur son bateau et l’aurait conduite en Asie Mineure. Pour le remercier, elle lui aurait permis de redevenir jeune et d’une beauté captivante.
34 Il s’agit notamment d’un thème de prédilection des hydries de Caerè.
35 Il serait peut-être possible de reconstituer le mot kalos avec un oméga : la présence d’un omicron ou d’un oméga ne semble pas changer le sens du mot. Ed. Pottier conclut que kalos au nominatif et au génitif peut avoir la même signification (cité par Ferri 1938).
36 Pour en savoir plus sur les enjeux et l’iconographie du mythe d’Héraclès et de Busiris, cf. Durand & Lissarrague 1993, 160.
37 Cette iconographie de Thésée et le Minotaure associée au kalos est déjà présente sur de nombreux autres vases d’après Steiner 2007. Sur les trente et un vases attribués au peintre de Bologne 228 d’après Beazley 1963, il n’est fait mention d’aucune inscription.
38 Macellari 2002, 270.
39 Govi 1999, no 103.
40 Il existe une longue bibliographie sur l’étude de la réception du rituel du banquet chez les Etrusques (Torelli 1997 et D’Agostino & Cerchiai 1999). Dans le premier quart du ve siècle, principale période où la pratique du symposium s’exprime dans les inscriptions grecques peintes de Bologne, on trouve d’autres témoignages de la réception des pratiques symposiaques ailleurs qu’en milieu étrusque ; en Grande Grèce, la Tombe du Plongeur de Poseidonia présente en effet une représentation de banquet en milieu funéraire (Rouveret 1988) ; à Fratte, une petite olpè avec inscription, trouvée en milieu non grec, montre aussi l’importance et la diffusion de ces pratiques (Pontrandolfo 1987).
41 C’est la conclusion de Jubier 1998, dans son travail sur le peintre de Sappho.
42 L’hydrie est associée à une amphore et à une kylix attique dans son contexte funéraire.
43 Lissarrague 1987, 36 sq. et 121.
44 Pell. 363 est le seul vase du corpus attribué au Peintre de la centauromachie de Bonn. Beazley, en effet, attribue Pell. 362 au Peintre de Colmar et non pas au Peintre de la centauromachie de Bonn comme l’indique le fascicule du C. V. A.
45 Steiner 2007. L’auteur voit une connexion entre les deux faces du vase qui se répondent. Ces inscriptions auraient une signification visuelle et seraient métadiscursives. L’auteur prend ses exemples chez Exéchias et Oltos.
46 Ces inscriptions “invite the viewer to take both sides of the vessels into consideration and they create more levels of meaning when taken together than when taken singly” (Steiner 2007, 92). Regarder les deux faces du vase serait crucial pour en comprendre l’ensemble.
47 Pour Slater (1999, note 42), l’inscription kalos toute seule laisse un vide pour écrire le nom de l’être aimé. Rebillard 1994 propose que cette formule, démotivée, serve à la fois de décoration mais aussi d’expression : “l’essentiel, tout au moins, était de glorifier, d’acclamer, même si l’énoncé n’avait pas d’objet” (p. 281).
48 Riccioni 1952-1953, 259.
49 Bermond Montanari 1960 donne comme référence bibliographique Zannoni 1876, 169. Or, à cette page, la tombe de la nécropole Certosa qui correspond au vase ne devrait pas être la tombe 159 mais la tombe 83.
50 Un vase du Fogg Art Museum porte aussi un kalos-name au masculin sur le ruban que tient une ménade (Dow 1930).
51 Ces acclamations s’appliqueraient exclusivement aux Athéniens d’après Kilmer 1993. Connor 1987 voit dans ces inscriptions un rappel des acclamations publiques.
52 Pour la thématique de la “grécité”, cf. la communication de M. L. Haack.
53 Macellari 2002, 101.
54 “Le bassin, centrant l’image, porte l’adjectif kalé : ses belles lettres décorent l’objet, tout en soulignant sa fonction : contribuer à la toilette des femmes, au même titre que le miroir (sur la coupe de Douris, l’inscription à hauteur du visage répond symétriquement au miroir), l’alabastre et les bottines, contrepoint des scènes qui rassemblent les jeunes athlètes autour du même louterion” (Frontisi-Ducroux 1998, 176).
55 L’emploi est le même au masculin et au féminin pour les acclamations esthético-érotiques puisque l’esthétique du corps grec est avant tout masculine (Frontisi-Ducoux 1998 et Niddam-Hosoi 2007).
56 Il s’agit du seul vase attique de la tombe. L’esthétique de l’inscription suit la courbe du dos de l’éphèbe, au centre de la kylix, dans une scène de bain au gymnase. On ne peut pas dire si le rite funéraire était celui de l’incinération à cause de la faiblesse du matériel et des conditions de découverte. Le prestige de l’inscription est lié ici à l’unicum de la scène et à l’individualité du regard porté au centre de la kylix.
57 Ce vase n’est pas répertorié par Beazley 1963, ni Carpenter et al. 1989. L’inscription suit la courbe du bouclier.
58 La tombe comprend des boucles d’oreilles, un vase pour onguent, un peigne et un miroir.
59 Govi 1999, 49-50 : il s’agit de la tombe 86 Certosa.
60 Il participe à une mise en scène funéraire avec un cratère attique à figures rouges et des plats en céramique locale dont un possède un graffite.
61 D’un côté, est représenté Héraclès et le lion ; de l’autre, la lutte de Pelée et d’Atalante.
62 Dans The Beazley Archive, on compte deux cent vingt-six vases attribués au peintre Oltos dont cent cinquante-huit comportent une inscription, soit près de 70 %.
63 Quatre-vingt-dix vases peints par Oltos ont une provenance connue d’après The Beazley Archive et soixante-trois proviennent d’Étrurie (soit près de 70 %).
64 L’inscription de Bologne ne figure pas dans la liste de Klein 1898 ni dans celle de Beazley.
65 Beazley 1963 : les coupes à figures rouges postérieures à 490 a.C. concerneraient peut-être un autre personnage même si l’iconographie reste celle du gymnase.
66 Slater 1999.
67 Laurinsich 1929 refuse de voir l’inscription contrairement à Beazley 1929.
68 Sur les cinq vases qui n’ont pas d’inscription, trois sont trop lacunaires pour en posséder la trace.
69 On compte chez Beazley vingt occurrences d’Epidromos. Trois d’entre elles ne correspondent pas au Peintre d’Epidromos. Il s’agit d’une kylix de Chiusi du Peintre Kiss où Epidromos côtoie Leagros sur une inscription, d’une kylix du Peintre Salting et d’une kylix trouvée à Orvieto du Proto-Panaetian Group.
70 L’iconographie des pratiques athlétiques se retrouve aussi sur les peintures funéraires de Tarquinia ou sur les reliefs de Chiusi au ve siècle (Thuillier 1985 et 1993).
71 Macellari 2002.
72 Celui qui possède ces amphores n’est pas forcément le gagnant des Panathénées. 90 % des amphores dont le contexte est connu (16 % de l’ensemble de ces amphores) proviennent d’un contexte funéraire. Bentz 2003 estime que les amphores panathénaïques sont des offrandes et des biens de commerce. Pour un résumé des polémiques sur la participation aux concours des possesseurs de ces vases : Macellari 2002, 226-233.
73 À la même période, les amphores panathénaïques et les pratiques de l’athlétisme sont présentes dans toute l’Italie. Les tombes de Tarente dont celle du sarcophage dite de “l’athlète” rappellent au début du ve siècle cette large diffusion (Lippolis 1994).
74 Les quatre pseudo-inscriptions concernent des céramiques à figures noires, antérieures aux autres productions, et ne sont pas répertoriées chez Beazley.
75 Cet horizon chronologique correspond à une évolution générale en Italie (Rouveret 1999 et 2002, 345-348).
76 Slater 1999 et Bazant 1987.
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