L’univers mythologique de la saga à succès Harry Potter
p. 209-215
Texte intégral
1Magie, monstres, héros, les images de l’extraordinaire et les figures mythologiques antiques sont aujourd’hui omniprésentes sur la scène culturelle mondiale. Les mythes issus de l’Antiquité ont traversé les âges et il est frappant de constater qu’une très grande partie de la production culturelle qui attire les publics aujourd’hui touche à ces derniers. En s’interrogeant sur la pratique de la lecture, le philosophe et mythologue M. Eliade dévoile un fait significatif : le besoin qu’a de nos jours le public de lire ou de visionner des fictions qui se déroulent dans un modèle traditionnel, et, dans notre cas, remettant en scène des figures anciennes. Quelle que soit la gravité de la crise actuelle du roman, il perdure ce besoin de s’introduire dans des univers étrangers et passés. La “sortie du temps”1 opérée par la lecture de roman en particulier, est, selon l’auteur, ce qui rapproche le plus la fonction de la littérature de celle des mythologies. Le temps que l’on “vit” en lisant un roman permet de sortir du temps historique, pour se plonger dans un temps fabuleux. Il y a ici, dans la littérature, un désir d’accéder à d’autres rythmes temporels que celui dans lequel nous sommes obligés de vivre. Dans les genres fictionnels de l’imaginaire dont est issu le cycle à succès Harry Potter, se constitue une “hypermodernité culturelle”1 dans le sens où affluent divers procédés de recyclage des mythes, des plus anciens aux plus récents. En ce qui concerne l’emprunt direct aux mythes, l’œuvre Harry Potter est dotée de multiples références issues de la culture antique qu’il serait intéressant d’aborder : Centaures, Griffons, Sphinx, Basilic… L’auteure du cycle s’est réappropriée plusieurs mythes et personnages mythiques en les re-transposant dans l’œuvre, parfois de manière similaire et égale aux mythes de l’Antiquité, mais parfois aussi de manière revisitée. C’est à travers cette thématique et à l’aide des éléments étudiés durant notre thèse de doctorat (cette œuvre représente notre étude de cas principale sur laquelle se base une importante partie de notre recherche, un chapitre lui est entièrement consacrée) que nous proposons d’étudier l’univers mythologique de la saga à succès Harry Potter afin de comprendre pourquoi les mythes de l’Antiquité restent toujours autant appréciés par les publics.
Le secteur jeunesse, un tremplin pour la culture Antique
2Trois des plus grands précurseurs de la fantasy anglaise sont considérés comme écrivains pour la jeunesse. Nous retrouvons Lewis Carroll pour son Alice aux pays des merveilles, James Barrie avec Peter pan et Kenneth Grahame pour Le Vent dans les saules. La littérature pour la jeunesse anglo-saxonne est une tradition de fantasy. Beaucoup d’auteurs ont suivi le chemin de l’édition jeunesse comme J. R. R. Tolkien avec Bilbo le Hobbit ou C. S. Lewis et son univers de Narnia. À la fin des années 1990, ce sont deux cycles de fantasy qui vont bouleverser le milieu de l’imaginaire et son édition en France : À la croisée des mondes de Phillip Pullman (mélange de science-fiction et de fantasy) et le célèbre Harry Potter de J. K. Rowling. Le secteur de la jeunesse a subi plusieurs changements2, il se rapproche dans son fonctionnement du secteur adulte (en obéissant de plus en plus aux mêmes règles que la littérature générale). Son chiffre d’affaires a été multiplié par cinq en vingt-cinq ans. En 2001 il a atteint, d’après le Syndicat National de l’édition, plus de 211 millions d’euros. Les années précédant le deuxième millénaire, nous avons pu constater une stagnation de la part de l’édition jeunesse dans l’édition française jusqu’à l’arrivée de deux œuvres importante, Harry Potter et la bande dessinée Titeuf contribuant largement à la relance du secteur (+9.7 % entre 1999 et 2000). Comme le chiffre d’affaires, la production d’exemplaires est aussi en hausse, elle a augmenté de 55 % entre 1995 et 2001. Au total en 2001, 84,4 millions d’exemplaires ont été produits et 63,5 millions ont été vendus (répartis entre 44 millions de livres et 19,5 millions d’albums). Chaque années depuis les années 2000, le secteur jeunesse bat son plein et avec en tête l’imaginaire comme moteur du succès. Depuis une dizaine d’années, nous observons que la frontière entre catégorie jeune et catégorie adulte s’estompe peu à peu. Les éditeurs se sont renouvelés en proposant des nouvelles collections tant pour les young adult que pour les lecteurs de l’imaginaire, ces romans dits crossover ou cross-age sont des romans s’adressant en priorité aux jeunes, mais qui finalement sont lus par d’autres tranches d’âges. Le point commun de toutes ces œuvres lues par tous : la réinterprétation et remise en scène de diverses figures de l’Antiquité dans un univers toujours plus merveilleux.
3Harry Potter est une suite romanesque de fantasy divisée en sept tomes. La langue d’origine est l’anglais, les tomes sont traduits en français par Jean-François Ménard aux éditions Gallimard, l’éditeur original est Bloomsburry Publishing (Royaume-Uni). Le premier tome de la saga est paru en Angleterre le 30 juin 1997 et en France le 16 novembre 1998. Les sept tomes ont très vite été adaptés au cinéma en huit films. Cette saga narre les aventures d’Harry Potter, un jeune sorcier, et de ses amis Ron Weasley et Hermione Granger dans leur combat contre les forces du mal. Vendu à des millions de livres dans le monde, Harry Potter est aujourd’hui considéré comme un ouvrage de référence en littérature fantasy, cette œuvre est à la base du nouvel engouement pour les genres de l’imaginaire. Les sept premiers tomes de la saga se sont écoulés à plus de 450 millions d’exemplaires à travers le monde, ce qui fait d’Harry Potter la saga la plus vendue de l’histoire. Ce cycle littéraire est fait d’aventures, de mythes et de légendes, il fait ressurgir des histoires vieilles comme le monde, des exploits divins… Peuplé de références aux personnages et créatures mythologiques, le cycle Harry Potter propose de parler, tout comme les mythes, de questions universelles que tout un chacun se pose. La vie, la mort, l’amitié, la famille, autant de thèmes qui perdurent à travers les âges et qui, à l’aide de certains mythes, seront repris de manière plus “souple” dans les fictions. En ce qui concerne Harry Potter et ses emprunts aux mythes, il est tout d’abord intéressant d’évoquer la nature même du personnage principal : le sorcier.
4Aucun personnage n’a été aussi craint dans la mythologie ou les légendes que les sorciers et les sorcières. Être accusé de sorcellerie était considéré comme l’une des pires choses qu’il puisse arriver. Pourtant, à ses débuts, la magicienne était bien considérée, parfois même rapprochée au rang de déesses. Dans les peuples du Moyen-Orient qui vénèrent les déesses, les femmes pratiquaient divers rituels religieux, ces prêtresses étaient certainement les plus anciennes aïeules de la sorcière. De leurs rituels sacrés sont nés les cérémonies regroupées plus tard sous le nom de sorcellerie. D’anciens écrits turcs racontent que ces femmes s’asseyaient à l’intérieur d’un cercle sacré tracé avec du sel pour réciter leurs incantations3. Elles étaient vues comme dotées d’un extraordinaire pouvoir de guérison et protection, les magiciennes étaient ainsi considérées comme des figures positives. Avant de devenir cette créature maléfique bien connue, telles des déesses, elles permettaient aux rois de régner, aux soldats de gagner les guerres, aux femmes d’enfanter. Une des figures de la mythologie grecque les plus connue reste Circé, fille d’Hélios, une magicienne et enchanteresse très puissante. Pour comprendre comment le statut de la sorcière a autant évolué, plusieurs chercheurs pensent qu’il faut se référer au début de l’Antiquité, trois millénaires avant J.-C. Plusieurs tribus nomades indo-européennes qui vénéraient des dieux féroces et masculins ont quitté l’Orient pour l’Occident. Ce culte des dieux a peu à peu évincé celui des déesses. Le peuple hébreu a progressivement intégré ce culte masculin et, obéissant aux préceptes de la bible, va condamner la sorcellerie qu’il considère comme pratique païenne. “Qu’on ne trouve chez toi personne qui exerce le métier de devin, d’astrologue ou d’enchanteurs. Personne qui interroge les morts” (Dt., 18.10).
5De femmes descendantes des déesses à monstruosités associées au diable, les sorciers et sorcières de l’œuvre Harry Potter sont différents. Ils représentent des hommes et des femmes à l’apparence totalement humaine, issues de classes sociales différentes et vivant dans une communauté magique où, tout comme la nôtre, chacun à une place et un rôle. Les sorciers ont leur propre monnaie, leurs banques, moyens de transport et de communication, codes vestimentaires (robes de sorciers à la mode ou vieillotte), des distinctions sociales (par exemple l’Ordre de Merlin). Trois grands thèmes sont fortement présents dans la saga : la mort, la tolérance et l’amour. La mort, le livre débute par celle-ci (la mort des parents d’Harry), il s’ensuivra une quête incessante de l’immortalité par le puissant mage noir Lord Voldemort, mêlée à son désir de voir mourir celui qu’il n’a pas réussi à tuer. La tolérance est également dans toute l’œuvre avec notamment le fait que certains sorciers soient issus de familles sans pouvoirs, d’autres de familles pauvres. L’amour reste un thème extrêmement fort ; tout au long de l’histoire Harry est entouré de cet amour : pour ses parents, pour son parrain, pour ses amis.
Les mythes et légendes animales évoquées dans Harry Potter
6Dans cette sous-partie, nous évoquerons les plus importants mythes et légendes animales repris dans la saga Harry Potter. En effet, l’auteure a su créer un monde entier et unique, avec sa faune et sa flore et dont, bien souvent, les idées furent reprises des mythes de l’Antiquité.
71° Le phénix tout d’abord, oiseau rattaché au culte du soleil dans l’Égypte et l’Antiquité classique, est présent dans le cycle. Le phénix est un oiseau légendaire doté de pouvoirs. Il est présent dans le cycle Harry Potter, sous la forme de l’oiseau nommé Fumseck du directeur de l’école de sorcellerie Poudlard. Tout comme le phénix des mythes et légendes, à la fin de sa vie et ne pouvant se reproduire, il s’enflamme, se consume et renaît de ses cendres. Par contre, contrairement à Fumseck, le phénix de la mythologie ne possède pas de larmes anti-venin et ne porte pas de charges lourdes, ce qui est le cas de ce dernier. Cet animal devient un allié du héros de la saga.
82° Dans la mythologie grecque, les centaures, qui sont des créatures mi-homme, mi-cheval, sont des êtres à la fois sauvages et sereins, épris de musique et de prophéties. Ils étaient favoris des dieux qui leur envoyaient des héros mortels afin que ces derniers acquièrent des connaissances supérieures. Nous retrouvons les centaures dans le cycle Harry Potter. Harry, le héros, se liera avec certains centaures notamment l’un d’entre eux, prénommé Firenze, qui le guidera, tout comme la mythologie l’indique, à travers de multiples quêtes.
93° Dans le cycle Harry Potter, le garde-chasse de l’école, Hagrid, possède un chien à trois têtes nommé Touffu. Tiré de Cerbère, le fameux imposant chien à trois têtes des mythologies grecques et romaines, il est, tout comme dans les mythes, un gardien. Cerbère était le gardien des Enfers, empêchant l’entrée des morts dans le monde des vivants. Touffu garde lui aussi la vie, la fameuse pierre philosophale présente dans le premier tome de l’histoire. Cette pierre, issue des mythes alchimiques, serait capable de transformer les métaux en or et d’allonger considérablement l’espérance de vie. L’auteure s’est inspirée d’Orphée, fils du roi de Thrace Oeagre et de la Muse Calliope, qui, désireux de faire sortir sa femme des Enfers, réussit à passer devant Cerbère en lui jouant de la lyre ; elle a toutefois remplacé cet instrument par une harpe qui a endormi le chien permettant l’accès au trésor.
10Le garde-chasse Hagrid possède également un dragon. Dans les mythes, les dragons descendent des serpents géants. Leur caractère ne fut pas présenté de la même manière selon les endroits du globe. Dans les mythes orientaux les dragons sont bienveillants et doux, au contraire des mythes occidentaux où ils n’apprécient pas les humains et en deviennent des monstres sanguinaires. Dans Harry Potter, nous faisons face à des dragons issus de la culture occidentale, leur élevage est interdit. Norbert, le dragon recueilli par Hagrid se révèle indomptable et le garde-chasse consent à s’en séparer.
114° Populaire en Grèce comme en Égypte, le Sphinx est une créature composée d’un buste de femme et d’un corps de lion. Son aspect change selon les lieux et les époques et des détails peuvent lui être ajoutés comme des ailes d’aigles par exemple. Chez les Grecs, le Sphinx est une créature exclusivement féminine alors que, chez les Égyptiens, elle peut aussi être masculine. Dans la mythologie grecque, la Sphinge fut envoyée par les dieux pour punir Thèbes. Elle posait aux voyageurs une énigme et laissait la vie sauve à qui donnait la bonne réponse. La Sphinge fut vaincue par Œdipe qui résolut son énigme (“Quel est l’animal qui s’avance sur quatre pattes le matin, sur deux pattes le midi et sur trois pattes le soir ?”) ; dévastée par cet échec se jeta du haut de son rocher et se donna la mort.
12Présent pendant le Tournoi des Trois Sorciers du quatrième tome Harry Potter et la Coupe de Feu, Harry fait face à un Sphinx dans un labyrinthe qui lui pose, tout comme dans les mythes une énigme, mais cette fois-ci l’auteure la transforma en une charade :
“D’abord, pense au premier de ce qu’il faut apprendre.
Lorsque l’on ne sait rien à l’âge le plus tendre.
Ensuite, dis-moi donc ce que fait par naissance.
Celui qui, au palais, à élu résidence.
Enfin, pour découvrir la dernière donnée.
Il suffit de la prendre à la fin de l’année.
Tu connaîtras ainsi la créature immonde.
Que tu n’embrasserais pour rien au monde”.
135° Le basilic est également une créature présente dans Harry Potter, mais de manière assez différente. En effet, connu comme un reptile de petite taille dans l’Antiquité greco-romaine, il est, dans le cycle, un serpent de très grande taille. De plus, dans le cycle, cette créature est mélangée à une autre : Méduse (Méduse était une belle jeune fille avant d’être transformée en Gorgone par la déesse Athéna, ses cheveux furent changés en serpents et son regard modifié). En effet, le basilic a le pouvoir de pétrifier d’un simple regard, tout comme Méduse, et dans le cycle il sort d’une tête géante ornée de serpents à la place des cheveux…
146° Le Griffon a d’abord été imaginé par les peuples d’Asie centrale avant de s’intégrer dans le bestiaire antique méditerranéen. C’est une créature mi-aigle, mi-lion. Dans Harry Potter, le Griffon est le symbole de la maison de l’école de sorcellerie Griffondor. L’auteure s’est également réappropriée cette créature sous la forme d’un hippogriffe, mi-aigle, mi-cheval, prénommé Buck.
157° Les sirènes apparaissent dans la mythologie grecque comme une créature hybride mi-femme, mi-oiseau. L’influence de la mythologie nordique la transformera en être mi-femme, mi-poisson. Les légendes des sirènes ont accompagné de nombreux marins dont Ulysse lors de son Odyssée. Séduisant les marins avec leurs musiques et leurs chants elles les entraînaient à leur perte volontaire. Ulysse, mis en garde, ordonna à ses marins de se boucher les oreilles pour ne pas succomber ; lui, curieux, se fit attacher au mât de son navire, les oreilles libres. Il commença à entendre des voix lui promettant de lui révéler toutes les vérités qu’il souhaitait. Rendu fou il supplia son équipage de le libérer pour rejoindre les sirènes, mais celui-ci n’en fit rien. Plus tard, lorsque le danger fut passé, ils se débouchèrent les oreilles et les sirènes folles de rage se jetèrent dans la mer où elles disparurent à jamais.
168° Le Labyrinthe est également un clin d’œil mythologique. L’architecte Dédale aurait construit un labyrinthe pour enfermer le Minotaure. Dans le quatrième tome de la saga, Harry ainsi que les autres participants du Tournoi des Trois Sorciers doivent se sortir d’un labyrinthe.
17Par ailleurs, en dehors des mythes et légendes animales évoquées dans l’œuvre, nous retrouvons certaines références mythologiques chez plusieurs personnages. Le Professeur de Défense contre les forces du mal de l’école de sorcellerie Poudlard, le Professeur Remus Lupin (surnommé par ses proches Lunard), est un loup-garou. Il tire son existence de la mythologie romaine avec les deux frères jumeaux Rémus et Romulus qui furent élevés par des loups. Minerva McGonagall, professeur de métamorphose et directrice de la maison de Gryffondor dans laquelle se trouve le héros de l’histoire, a été nommée ainsi en l’honneur de la déesse Minerve, courageuse, forte et intelligente tout comme cette dernière. Argus Rusard, le concierge de l’école se réfère à Argos le gardien/berger qui possédait une centaine d’yeux pour tout voir.
Une pérennité des mythes
18Du grec mythos, le mythe désigne un récit traditionnel qui relate les exploits d’un héros ou d’une divinité et qui permet d’expliquer certains phénomènes. Il fournit des éléments sur le fonctionnement de la société. C’est un récit pouvant contenir une morale implicite. Le terme logos forme la seconde partie du mot mythologie, il renvoie au concept philosophique d’une “rationalité gouvernant le monde”. Selon le philosophe et mythologue M. Eliade, “le mythe raconte une histoire sacrée ; il relate un événement qui a eu lieu dans le temps primordial, le temps fabuleux des ‘commencements’”4. Le mythe relate comment, grâce aux exploits d’êtres surnaturels, une réalité est venue à exister. C’est ainsi, toujours, le récit d’une création ; y sont décrits les diverses apparitions du sacré ou du surnaturel dans le monde. La fonction maîtresse du mythe est de révéler les modèles de tous les rites et activités humaines significatives. Aujourd’hui, nous constatons l’importance que revêtent les mythes dans la culture littéraire. Les personnages mythiques et leurs destins continuent de fasciner les publics. Les mythes vont traduire les préoccupations intemporelles les plus importantes, c’est pourquoi ils perdurent à travers le temps. Le mythe rend compte de ce qui est inexplicable et donne une certaine logique. Dans Mythologies5, Roland Barthes montre que les mythes permettent aux sociétés d’expliquer l’inexplicable, de donner du sens. Les mythes sont le produit de l’imagination humaine, ils habitent nos rêves, notre inconscient. Ils traversent les siècles et se renouvellent en fonction “d’où” ils sont. Pour Joseph Campbell, les images mythologiques vont plus loin que la manifestation de l’inconscient, elles sont aussi une volonté de réaffirmation de certains principes spirituels, elles sont soumises aux besoins et obsessions de l’homme et de la société. Chaque société crée de nouveaux mythes et bien souvent réactualise certains récits traditionnels. “Les mythes ont été inventés par les cultures afin de donner un sens à leur place dans l’univers”6.
19Ces mythes et figures mythiques utilisés dans les multiples œuvres fictionnelles de l’imaginaire ont fait peau neuve et ont ainsi intéressé de plus en plus de public. Le symbolisme de ces mythes possède une signification au niveau psychologique, plusieurs auteurs tels Sigmund Freud (1856-1939) et Carl G. Jung (1875-1961) ont développé une nouvelle science, celle de l’interprétation des rêves et des mythes :
“Cette science nouvelle fait apparaître qu’à travers les contes merveilleux qui se proposent de raconter la vie des héros légendaires et qui mettent en scène les divinités de la nature, les esprits des morts et les ancêtres totémiques du groupe – une expression symbolique a été donnée aux peurs, tensions et désirs inconscients qui sont à la base des différents types de comportements humains conscients”7.
20Pour Bronislaw Malinowski, le mythe fait revivre une réalité originelle qui répond à un profond besoin religieux, il est un élément essentiel de la civilisation humaine, il est une réalité vivante à laquelle on ne cesse de recourir. Pour Joseph Campbell, les images mythologiques vont plus loin que la manifestation de l’inconscient, elles sont aussi une volonté de réaffirmation de certains principes spirituels, elles sont soumises aux besoins et obsessions de l’homme et de la société. Chaque société crée de nouveaux mythes et bien souvent réactualise certains récits traditionnels. Les mythes revisités, réécrits produisent sur les publics un effet similaire aux mythes de bases, mais ils vont également donner un plus, procurer plus de plaisirs, de sensations et d’émotions. Le retour des mythes antiques constitue l’un des faits majeurs de l’histoire de la fiction littéraire et cinématographique au xxie siècle.
Bibliographie
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Barthes, R. (1957) : Mythologies, Paris.
Besson, A. (2015) : “Le nouveau pays des merveilles”, Strenæ [En ligne], mis en ligne le 01 mars 2015, http://strenae.revues.org/1410.
10.4000/strenae.1410 :Brunel, P., éd. (2003) : Dictionnaire des mythes du fantastique, Limoges.
Campbell, J. (2010) : Le Héros aux mille et un visages, trad. par H. Crès, Paris.
Eliade, M. (1963) : Aspects du mythe, Paris.
Notes de bas de page
1 Besson 2015.
2 Source : Les moins de 15 ans et le marché des loisirs culturels, Premiers éléments documentaires, DEPES, DT n° 1269, mai 2004, http://www2.culture.gouv.fr/deps/fr/sommaire/somm_15ans_dep.htm, p. 66-69.
3 Documentaire Les sorcières, de l’Antiquité à nos jours, Introcrate Archives Videos, URL : https://documystere.com/histoires-legendes/la-legende-des-sorcieres/.
4 Eliade 1963, 16.
5 Barthes 1957.
6 Brunel 2003.
7 Campbell 2010, 223.
Auteur
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