La province ecclésiastique de Tours
p. 149-176
Texte intégral
1Issue de la réforme administrative du ive siècle, la troisième Lyonnaise a encore plus que les autres un territoire étiré en longueur, qui renvoie le siège métropolitain à son extrémité orientale. Elle se divise nettement en deux parties : l’une plutôt continentale, essentiellement ligérienne, qui comprend les diocèses de Tours, Angers et le Mans ; l’autre, beaucoup plus péninsulaire : l’Armorique, à l’histoire bien spécifique.
Les conditions générales
2La Bretagne, région assez hétérogène, a été plus fortement romanisée qu’on ne l’a longtemps cru. Elle tire cependant son identité très particulière, et qui a contribué à l’apparition de nombreux mythes, des invasions des v et vie siècles, venues des îles Britanniques, et qui lui ont donné son nom. Dans ce contexte, où le monachisme irlandais joua un rôle essentiel, les neuf diocèses bretons se répartissent quant à leur origine en deux groupes : ceux issus d’une cité gallo-romaine – Nantes, Rennes et Vannes – et ceux qui furent fondés par les insulaires, aux limites parfois étranges et morcelées : Dol, Alet, Saint-Brieuc, Tréguier, Quimper et Léon. La situation paraît s’être stabilisée à l’époque de Nominoë, dans le troisième quart du ixe siècle. Celui-ci, après sa victoire sur Charles le Chauve, comprend que l’autonomie bretonne serait confortée par l’érection d’une métropole ecclésiastique, qui soustrairait les diocèses à la lointaine juridiction de Tours. Nous reviendrons sur la longue prétention métropolitaine de Dol. Au xiie siècle, la Bretagne appartient à l’empire Angevin, qui contribuera à y mettre en place une administration efficace (assises du comte Geoffroy de 1185), avant que la défaite des Plantagenêt ne la fasse entrer dans l’orbite capétienne en 1213. Il s’en suivra un siècle et demi de paix, propice à l’activité économique et aux chantiers d’envergure.
3Les origines du christianisme dans cette province sont comme ailleurs mêlées de légendes. Il faut à nouveau bien distinguer la partie continentale de la province, de la Haute Bretagne où l’origine des sièges épiscopaux est aussi gallo-romaine, et surtout de la Bretagne celtique où les choses apparaissent beaucoup plus complexes. À Tours, la tradition rapportée par saint Grégoire fait de Gatien le premier évêque de la cité. Elle le présente comme ayant été un des sept évêques envoyés par le pape Fabien au milieu du iiie siècle, sans toutefois en faire un martyr. Après un très long épiscopat, il aurait eu saint Lidoire comme successeur, avant le plus célèbre évêque de la cité : Martin – le “treizième apôtre” – dont l’éclat rayonnera bien au-delà de la Touraine (fig. 83). Légende mesurée des origines, pourrait-on dire, au regard de celle de saint Julien, apôtre du Maine, dont les actae font un des 72 disciples du Christ, ordonné et envoyé au Mans par le pape saint Clément en même temps de saint Denis de Paris. Au xie siècle, une vita reviendra à plus de vraisemblance en datant leur venue seulement du milieu du iiie siècle. Le cas de saint Maurille à Angers aurait pu être assez semblable. Sa vita, rédigée par saint Maimbœuf d’après des informations reçues du prêtre Justus, le fait venir de Milan, attiré par la renommée de saint Martin. Il s’établit alors à Chalonnes dans la solitude, où il fait de nombreux miracles, avant d’être appelé par le peuple d’Angers comme évêque en 423. Cette vita se trouva interpolée au xe siècle par l’archidiacre Anachaldus qui y ajoutera la légende de saint René, jeune ermite de Sorrente, près de Naples, décédé avant que Maurille ne lui ait administré les sacrements, ce qui causa le désarroi et la fuite de l’évêque que ses diocésains parvinrent à retrouver. René, ressuscité à l’âge qu’il aurait du alors avoir, sera éduqué par Maurille avant de devenir son successeur.
4La cité de Nantes voit en saint Clair son premier évêque, qui lui conférerait une origine quasi apostolique, puisqu’il passe pour avoir été envoyé par Lin, le premier successeur de Pierre, qui lui aurait alors confié un des clous ayant servi au crucifiement du Prince des apôtres. Une autre tradition le ramène au temps des “sept évêques”, soit vers 250. Le troisième évêque de la cité, Similien, mort en 310, est crédité par Grégoire le Grand de la conversion des jeunes martyrs Rogatien et Donatien, fils du gouverneur local. L’introduction du christianisme à Rennes serait dûe selon une tradition à Maximin d’Aix, dans lequel la légende voit aussi un des 72 disciples du Christ, débarqué en Provence avec saint Lazare et ses sœurs. Mais ce sont surtout saint Amand et saint Mélaine qui sont connus comme étant les protecteurs de la cité. L’existence du premier est douteuse, car il apparaît seulement dans la vie interpolée du second, et pourrait avoir été simplement confondu avec un évêque de Rodez du même nom. Saint Mélaine, évêque de Rennes vers 490, et conseiller du roi Clovis, mourut vers 530, après être retourné dans le silence de son monastère de Pratz.
5Le premier évêque de Vannes – Patern – serait aussi d’origine gallo-romaine, mais sa vita révèle une influence celtique beaucoup plus nette : moine en Grande-Bretagne dans le comté de Cardigan, il serait allé se faire sacrer à Jérusalem pour prendre la tête de son abbaye devenue évêché. Après la soumission de l’Armorique par le roi Caradoc, les Vannais le réclamèrent chez eux comme évêque.
6Restent six évêchés, situés in Armorico, auxquels Louis Duchesne avait attribué la fondation à des saints donnés par leurs vitae comme ayant vécu au vie siècle. Cependant, ces vitae laissent transparaître une réalité qui diffère du schéma classique rencontré dans la Gaule romaine et franque1. Dol tout d’abord, qui revendiquera d’être leur métropole, pose d’emblée le problème de la valeur de la vita de saint Samson, datable du début du viie siècle. Natif du Pays de Galles, Samson serait venu du monastère de Saint-Iltrud vivre comme un ermite au pied du Mont Dol, avant de devenir abbé, puis évêque du monastère qu’il y avait fondé (fig. 84). Son cousin Magloire lui aurait succédé dans cette charge avant de se retirer comme ermite à Jersey. Malo est aussi un gallois, que la légende crédite de maint exploit : il aurait célébré la messe sur le dos d’une baleine. Son biographe le plus polémique – le moine Bili – s’était donné pour but de montrer que le siège d’Alet n’avait jamais été suffragant de Dol. Aussi Malo, abbé de sa ville natale de Gwent au Pays de Galles, se fera-t-il sacré par l’archevêque de Tours quand les habitants d’Alet le choisiront pour leur évêque. Un épiscopat qui ne sera pas de tout repos pour celui qui était venu chercher la solitude sur le “rocher d’Aaron”, puisque marqué par des oppositions qui le feront s’exiler en Saintonge, où d’ailleurs il mourra au milieu du viie siècle.
7Connu par la Vita Briocmagli du xie siècle, due à un angevin resté anonyme, saint Brieux aurait lui aussi été originaire du Pays de Galles, tout en ayant été l’élève de saint Germain, dont on ne sait pas s’il s’agit de celui d’Auxerre ou de Paris. Venu évangéliser la Domnonée armoricaine, il y fonda un monastère. S’il mourut nonagénaire, on ne nous dit cependant pas qu’il en devint l’évêque. Tugdual, à l’origine de l’évêché de Tréguiers, possède une vita beaucoup plus rocambolesque. Originaire du Devonshire, il serait débarqué en Armorique avec 72 compagnons – allusion néotestamentaire évidente – où il fonda les monastères de Lan Pabu (Trebabu) et de Pago Trecher (Tréguiers). Durant la consécration épiscopale de cet abbé-évêque, un ange serait apparu pour effectuer la fraction du pain. Mais il y a mieux : conduit miraculeusement à Rome, Tugdual y aurait été choisi comme pape sous le nom de Léon le Breton, avant que le ciel ne lui enjoigne de retourner dans son évêché.
8L’origine des évêchés de Cornouaille et de Léon ressemble à celle des précédents, mais avec des nuances qu’il importe de souligner. Paul (ou Pol) Aurélien est lui aussi originaire de Grande-Bretagne. Ayant franchi la Manche, il demeura longtemps dans l’île de Batz avant d’être élevé à l’épiscopat à la demande des populations du Léon. C’est à la cour de Childebert qu’il aurait reçu la consécration épiscopale. Son successeur Goulven – connu par une Vita Golveni probablement du xiie siècle – accumule tous les poncifs propres au genre : retiré dans un ermitage, fait évêque contre son gré vers la fin de sa vie, il se démit rapidement de sa charge. Corentin enfin, dont la vita paraît récente – xiie siècle, elle aussi – est présenté non comme venant d’Angleterre, mais comme né dans la contrée. Choisi pour être évêque de Cornouaille, il serait allé recevoir sa consécration des mains de saint Martin de Tours, ce qui – comme dans le cas de saint Malo – peut être regardé comme une défiance à l’endroit du siège de Dol, dont Quimper n’aurait pas voulu se reconnaître suffragant.
9Les douze diocèses de la province de Tours étaient de dimensions très diverses. Le premier suffragant, qui était aussi le plus vaste, celui du Mans, comptait plus de 700 paroisses, alors que celui de Tours n’en regroupait que 280. Plusieurs diocèses bretons tournaient autour de la centaine de paroisses : Saint-Brieuc, Tréguier et Dol, grâce à ses nombreuses enclaves. Mais la richesse d’un diocèse ne dépend pas toujours de sa taille, et au xive siècle, les taxes prélevées par la Chancellerie apostolique révèlent dans le cas de Dol, un diocèse quatre fois plus riche que ceux de Rennes, Quimper ou Saint-Malo2.
10Si le chapitre métropolitain de Tours comptait une cinquantaine de prébendes, celui de Dol n’en avait guère que quinze, soit moins qu’Angers ou Nantes. Pour ce qui est des saints patrons des églises épiscopales, aucune dominante n’émerge, si ce n’est saint Maurice dans la partie ligérienne, puisqu’on se souviendra, qu’outre le patron de la cathédrale d’Angers, il fut le premier titulaire de la cathédrale tourangelle, antérieurement donc à saint Gatien. Dans la partie péninsulaire, après Pierre (Nantes, Rennes et Vannes), on rencontre la litanie des saints bretons : Samson, Tugdual, Corentin, Paul-Aurélien, en affirmation du particularisme local, sauf à Saint-Malo, où l’invocation du diacre de Saragosse – Vincent – peut être regardée comme un nouveau trait du caractère particulier de cet évêché.
La dominante du gothique angevin
11Qu’on l’appelle “gothique plantagenêt” ou “gothique angevin”, le style caractéristique de l’ouest de la France est beaucoup plus qu’une simple variante régionale du gothique. Par rapport au grand courant du gothique franco-picard, ou bien de ses versions champenoise, bourguignonne, lorraine ou même normande, il s’en écarte dans le principe même. Le mur reste ou redevient porteur, induisant ordinairement le vaisseau unique ou bien l’espace-hall, et excluant l’arc-boutant. Le fort bombement de la voûte, dite “cupoliforme” est peu compatible avec le sexpartisme de celle-ci. La démultiplication des nervures en des jeux au caractère de plus en plus illusionniste, crée des effets de ciborium sur les sanctuaires, qui se révèlent propres à l’accueil d’une thématique iconographique ailleurs souvent réservée aux portails. Le chevet plat, largement dominant, facilite la fragmentation en lunettes nervurées de ces voûtes lancées sur les sanctuaires. Les clochers, généralement de petit module, sont reportés aux extrémités de façades-écran tapissées d’arcatures. Aussi les grosses tours abritant les cloches sont-elles souvent renvoyées en un autre point de l’édifice.
12Les cathédrales de Tours, Angers et le Mans ont toutes les trois été profondément marquées dans un premier temps par ce style. Saint-Maurice d’Angers en est même souvent considérée comme l’acte de naissance, en même temps que comme l’exemple le plus accompli. Elle est d’ailleurs la seule cathédrale à avoir été intégralement construite conformément à cette esthétique, en l’espace d’un peu moins d’un siècle. On sait en effet maintenant que les verrières du chevet ont été mises en place entre 1230 et 1240, et que l’acte de donation d’un terrain en 1274, sur lequel nous reviendrons, ne saurait donc concerner le chevet dans son état actuel3.
13Au Mans, la cathédrale du xie siècle avait eu à subir deux incendies, en 1134 et 1137. L’évêque Guillaume de Passavant entreprit à compter de 1145 un profond remaniement du vaisseau principal, qui reçut cinq voûtes angevines fortement bombées. La cathédrale reconstruite fut dédicacée en 1158. Cependant, l’état des parties orientales nous est mal connu4.
14À Tours, notre ignorance est beaucoup plus grande encore. On ne connaît aucune mention de reconstruction au xie siècle. Pour le siècle suivant, quelques témoins archéologiques subsistent dans l’édifice actuel. Ils relèvent du style angevin. Une colonne, supportée par un cul-de-lampe, visible contre la pile sud-est de la croisée, donne probablement le niveau d’imposte et donc la hauteur approximative de la voûte du xiie siècle. Mais c’est surtout le massif occidental qui subsiste en grande partie sous le rhabillage flamboyant du xve siècle (fig. 85). Il interrompt en ce point le rempart gallo-romain. Dans chacune des deux tours, se superposent des salles : chambre de la calandre et chambre des métaux au nord, salle du guet au sud, qui appartiennent à des campagnes resserrées dans le temps autour de 1200, et de peu antérieures au début du chantier du chevet gothique5. Si le vocabulaire architectural est incontestablement angevin, la structure – du moins ce que nous en percevons – ne l’est guère : cette façade harmonique à deux grosses tours rejoint des exemples célèbres plus septentrionaux – Saint-Denis ou Chartres – ou locaux, comme Saint-Martin, sans annoncer particulièrement la disposition des façades angevines. Il faudrait en effet se demander si cette façade ne se positionnait pas surtout par rapport à la collégiale Saint-Martin, le sanctuaire le plus célèbre de la ville au Moyen Âge.
15Parmi les neuf cathédrales bretonnes dont on a encore souligné récemment le caractère normand6, cinq au moins présentent des traits angevins plus ou moins marqués. Sans doute celle de Saint-Malo doit-elle passer pour la plus représentative, puisqu’on n’a pas craint d’y voir une reproduction réduite de la nef angevine de Normand de Doué (fig. 86). Les travaux paraissent avoir été entrepris par l’évêque Jean de Châtillon (1144-1163). Celui-ci venait d’obtenir du pape Eugène III la confirmation du transfert du siège épiscopal d’Alet à l’île Aaron – autrement dit Saint-Malo – qui obligeait les moines de Marmoutier à abandonner à l’évêque l’église de ce lieu. On a beaucoup décrié cette copie de la cathédrale Saint-Maurice : “gauche imitation”, “bien loin du prestigieux modèle”7, elle n’en témoigne pas moins de l’influence des régions ligériennes en Haute Bretagne au xiie siècle.
16Saint-Pierre et Saint-Paul de Nantes est plus difficile à appréhender, toutes les parties orientales des xi-xiiie siècles ayant été détruites à partir de 1876 pour permettre la construction du grand chevet néo-flamboyant. L’édifice paraît avoir eu une histoire complexe. Un premier chevet à déambulatoire et trois chapelles rayonnantes surmontait la crypte qui fut redécouverte en 1885. Un projet plus grandiose semble avoir été entrepris, sans doute sous l’évêque Benoît de Cornouaille (1081-1114), qui prévoyait un transept à collatéraux. Ce projet ne fut jamais conduit à son terme. Les relevés très précis de Scheult, effectués dans les années 1830, en montrent des vestiges. Finalement, un sanctuaire moins profond fut élevé ; il fut encore modifié à la fin du xiie siècle ou au début du xiiie, sous l’évêque Maurice de Blason ou Geoffroy Plantin. Ce chevet est assez bien connu grâce aux relevés du xixe siècle. Une abside hémicirculaire, percée de hautes fenêtres en plein cintre à colonnettes, paraît avoir été couverte d’une voûte articulée à nervures (fig. 87). Une telle architecture permet d’évoquer des chevets angevins, comme ceux de Saint-Éloi, Saint-Martin ou la Trinité d’Angers, ou bien ceux de Gennes, Saint-Benoît de Fontevrault, ou encore Saint-Denis de Doué-la-Fontaine8.
17Les traces de l’influence angevine se font davantage percevoir en façade des cathédrales de Vannes et de Tréguier. Il est très possible que la cathédrale morbilhanaise ait jadis possédé une structure influencée par le gothique angevin. Son plan le suggèrerait. Mais l’édifice n’a pas eu de chance : nef et transept ont été rebâtis au xve siècle, et le chevet l’a été à la fin du xviiie. Heureusement, l’état ancien, visiblement du xiie siècle, est connu par les relevés de Kerleau. Quant à la façade, elle aussi connue dans son ancien aspect (fig. 88), elle a été pratiquement refaite dans le style néo-gothique à partir de 1863. C’est cette façade qui présentait des traits marqués de style angevin. La parenté avec celle de la cathédrale d’Angers a été souvent relevée. Mais la dissymétrie des tours et le fait qu’elles aient été de “vraies” tours, au volume intérieur évidé, et non de simples massifs d’angle, invitent à ne pas trop forcer le rapprochement. Les petits percements en trèfles, dont il subsiste latéralement des vestiges, sont aussi la marque d’une influence normande9. Yves Gallet avait cru pouvoir identifier une structure poitevine à l’angle sud-ouest de la façade amorcée de la cathédrale de Tréguier, projet qui ne fut pas poursuivi10. La tourelle renfermant un escalier dans l’angle sud-ouest de la nef en particulier, peut être rapprochée d’une pratique architecturale angevine, et même en l’occurrence poitevine (fig. 89). Une origine qui permet de remonter l’ouverture de ce chantier gothique breton peu après 1250. La cathédrale paraît d’ailleurs avoir présenté des traits ligériens et poitevins dès l’époque romane, comme en attestent la présence de la tour Hasting à l’extrémité du bras nord, et la ressemblance structurelle qu’elle offre avec la tour Charlemagne de Saint-Martin de Tours. Ce trait relie la petite cathédrale bretonne à une famille aquitaine et ligérienne, où l’on retrouve les cathédrales du Mans (cathédrale de l’évêque Hoël telle que la reconstitue Michel Bouttier), de Poitiers (clochers projetés mais sans doute jamais exécutés), Angoulême et Bordeaux (tour-porche du bras nord retrouvée en fouille).
18La dernière cathédrale bretonne à présenter quelque trait d’architecture angevine est celle de Dol, sur laquelle nous reviendrons plus loin. Cette cathédrale, réputée très normande autant que très anglaise, possède dans ses parties orientales, datées habituellement du dernier quart du xiiie siècle, des voûtes à nervures multiples11. En particulier derrière le chevet ainsi que dans l’angle nord du déambulatoire quadrangulaire, où une telle voûte couvre un large espace grâce aux lunettes d’angle dont la ligne de faîte se relève pour ceindre les extrados des baies, comme on le voit couramment en Anjou, sur les chevets droits dérivant de Saint-Serge d’Angers (fig. 90).
19Les cathédrales de Quimper et de Saint-Pol-de-Léon, toutes les deux marquées par de fortes influences anglaises et normandes, ne paraissent pas présenter de traits proprement angevins. Celle de Saint-Brieuc se présente comme une reconstruction tardive qui n’est pas antérieure à la seconde moitié du xive siècle. Quant à Rennes, disparue entièrement, elle est trop mal connue pour que nous puissions tenter des rapprochements stylistiques précis.
20On est cependant frappé, dans les cathédrales de cette province, par la prédominance de l’influence angevine qui marque non seulement le Maine et les régions ligériennes, mais aussi la Haute Bretagne. Seuls la Cornouaille et le Léon paraissent y avoir globalement échappé. Encore, la reconstruction relativement tardive de leurs deux cathédrales – sans parler de celle de Saint-Brieuc – pourrait-elle expliquer l’effacement de traits stylistiques antérieurs. Mais le gothique plantagenêt marque aussi de grands édifices plus méridionaux, tels que Poitiers et, dans une mesure plus énigmatique, Bordeaux, si bien qu’il serait là encore fort aventureux de conclure à l’existence d’une architecture de province.
L’engouement pour le gothique du nord
21À partir des années 1220, le style gothique du nord de la France est introduit sur les grands chantiers de la province de Tours, et la plupart des cathédrales sont profondément remaniées dans la seconde moitié du xiiie ou au xive siècle.
22Les trois cathédrales de Tours, le Mans et Angers ont fait l’objet d’études assez récentes qui ont permis d’en préciser la datation en même temps que la marche des travaux. Michel Bouttier et Claude Andrault sont parvenus à propos du Mans et de Tours à un début de chantier du chevet vers 1220, suivi de son achèvement vers 1255, faisant donc de ces deux édifices des contemporains. Le chantier de l’église métropolitaine, qui aurait apparemment connu trois phases distinctes – premier niveau, triforium, clair-étage – marquées par l’arrivée de nouveaux maîtres, aurait conservé globalement sa cohérence par rapport au projet de départ12. Par contre, selon Michel Bouttier, le projet initial de la première suffragante ne prévoyait qu’un vaisseau principal de même élévation que la nef du xiie siècle (soit 24 m), et dépourvu d’arcs-boutants. Ce n’est que plus tard, à compter de 1235, avec l’arrivée d’un nouvel évêque ambitieux, Geoffroy de Loudun, et la venue d’un nouveau maître originaire de Normandie, que le chantier prit une toute autre envergure. Les parties hautes ne pouvant plus s’envisager sans un contrebutement extérieur, on dut implanter des culées d’arc-boutant à la naissance des chapelles rayonnantes, entrainant l’obstruction partielle ou totale de certaines baies13. Si les arguments archéologiques apportés sont indéniables, on reste stupéfait de ce que la construction d’un immense soubassement rendu nécessaire par l’assiette du nouveau chevet dans les fossés des remparts, ainsi que le plan étonnamment développé des deux déambulatoires et des douze profondes chapelles qui se prolongent le long des bas-côtés du chœur, n’aient été destinés qu’à supporter un clair-étage aussi peu élevé (fig. 91). Pour tout dire, la silhouette restituée ici évoque irrésistiblement ces églises gothiques dont seuls les premiers niveaux purent être achevés, celui des fenêtres hautes ayant été réalisé à l’économie et à basse époque, comme à Lagny… On doit aussi relever les grandes parentés d’inspiration que révèle le niveau des chapelles rayonnantes à Tours et au Mans, ainsi que le montrent notamment les cintres des baies.
23La troisième cathédrale, celle d’Angers, a vu sa chronologie resserrée par l’abandon de la date de 1274, qui paraît ne plus pouvoir concerner l’édifice actuel14. S’appuyant notamment sur l’étude des vitraux par Karine Boulanger, Bénédicte Fillion propose de situer l’achèvement du chevet vers 1235, le bras sud étant déjà construit et son vis-à-vis nord devant l’être bientôt (1236-1239). Cette nouvelle chronologie n’annule pas la pertinente remarque de Jacques Mallet, pour qui “l’architecte révolutionnaire d’Angers n’est pas celui qui a construit la nef […], mais celui qui a eu l’audace de concevoir la continuité de largeur de ce grand vaisseau unique jusqu’à l’abside”15. Dès lors, le sens qu’il convient de donner au texte de 1274, par lequel Charles d’Anjou cédait aux chanoines un terrain situé entre le rempart et l’église Sainte-Croix, “pro ampliatione ipsius majoris ecclesie dignaremur” demande à être réinterprété16. On a évoqué le projet d’une chapelle absidiale dédiée à la Vierge. Mais les exemples allégués concernent tous des chapelles ouvrant sur un déambulatoire. Aucune des églises de l’Ouest possédant un chevet du type de celui de Saint-Maurice ne l’a prolongé par une chapelle absidiale.
24Il faut bien voir que la cathédrale d’Angers vers le milieu du xiiie siècle se trouve dans une situation paradoxale. Elle a achevé la reconstruction de son chevet depuis une quinzaine d’années ; le transfert des reliques de saint Maurille sur le grand autel a eu lieu en 1239, et celui des reliques de saint René sur l’autel matutinal suivra en 1255. Un grand cycle de peintures consacré à la légende de ces deux saints a été réalisé sur le pourtour de l’abside ; Marie-Pasquine Subes-Picot a montré comment ce cycle avait été composé pour accompagner dans leur procession les chanoines17. Malheureusement, le plan du chevet se révèle inadapté à deux fonctions majeures des églises à cette époque : l’ostension des reliques aux fidèles et la multiplication des messes privées. Les plans anciens qui nous sont parvenus, grâce au chanoine Lehoreau, montrent que le jubé médiéval se dressait au niveau de l’arc occidental de la croisée. En l’absence de déambulatoire, il n’était guère possible d’accéder aux reliques sans gêner l’office canonial. De plus, on ne pouvait dresser commodément des autels secondaires que dans les bras du transept. Tout cela, joint à l’engouement pour les immenses chevets gothiques du nord de la France, ne pouvait qu’inciter les chanoines d’Angers à vouloir imiter leurs confrères de Tours et du Mans, en entreprenant un nouveau chevet à déambulatoire et chapelles rayonnantes. On remarque d’ailleurs que c’est à cette époque – en 1273 – que les chanoines du Mans décident d’abandonner le logis qu’ils réservaient à leur architecte : celui-ci était-il en partance pour un autre chantier18 ?
25L’hypothèse d’un grand chevet gothique, envisagé mais jamais réalisé, ne devrait d’ailleurs pas étonner à cette époque. Plusieurs autres exemples assez similaires peuvent être invoqués : la réinterprétation en 1985 par J.-A. Puente Miguez d’une partie des soubassements d’un immense chevet à chapelles rayonnantes derrière le chœur de la cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle (fig. 60a) a permis de comprendre certains textes jusque là mal saisis ou négligés19. Les plans des chœurs de Notre-Dame de Paris et de Sainte-Croix d’Orléans, retrouvés sur un même parchemin à Strasbourg, dans le fonds de l’œuvre Notre-Dame, sont selon nous à interpréter dans le même sens, comme le pense d’ailleurs Yves Gallet20. Les petits chevets gothiques, amorcés mais jamais achevés, autour des absides des cathédrales méridionales d’Alet et d’Elne fournissent d’autres exemples de cet engouement pour ce type de construction, parfois entreprise sans que les moyens aient permis d’aller bien loin.
Dol : une métropole pour la Bretagne ?
26Dol tient une place toute particulière dans l’histoire religieuse de la Bretagne, qui permet de mieux comprendre son architecture. Samson, originaire de Dyved au Pays de Galles et moine d’Iltrud, vint en Armorique, au mont Dol, où il fonda une de ces abbayes-évêchés caractéristiques de la péninsule. Il sut se faire reconnaître auprès du roi mérovingien, et siégea au concile de Paris en 556. La Vita Samsonis prétend que le roi l’aurait fait Archepiscopatum totius Britanniae : les prétentions métropolitaines sur la Bretagne étaient nées. En 850, Nominoë se fait couronné roi par l’archevêque de Dol, et n’a de cesse de soustraire les évêchés bretons à la tutelle de Tours, soit ceux d’Alet, Saint-Brieuc, Tréguier, Léon, Quimper et Vannes ; cependant, il réclame encore en vain le pallium pour le prélat dolois. Celui-ci l’obtiendra de Grégoire VII dans le cadre de la réforme du xie siècle. Mais une série d’archevêques médiocres allait entrainer la débâcle des suffragants, bien que l’avènement des Plantagenêt ait renforcé l’aspiration à cette autonomie religieuse, vue comme un complément de l’indépendance politique. En 1199, Innocent III rendit une sentence très favorable à Tours, qui a été vue peut-être à tort comme le point final de la querelle. En effet, celle-ci perdurera encore longtemps, et les évêques continueront à se qualifier d’archiepiscopus Dolensis. Ils obtiendront même, en 1299, une bulle de Boniface VIII extrêmement favorable à leurs prétentions. Dans ce contexte, le souvenir de saint Samson est exalté, en tant qu’évangélisateur et “premier primat de Bretagne”, tandis que la cathédrale devient le lieu d’ostension de ses reliques. Le tort des historiens a peut-être été de considérer trop facilement les sentences pontificales comme des verdicts sans appel. Il est certain que, surtout à partir de Grégoire VII, les papes “affirment nettement leur prérogative, en tant que successeurs de Pierre, dans la création, la modification ou la suppression des diocèses et des provinces ecclésiastiques”21. Cependant, ces prérogatives mettront beaucoup de temps à être reçues sans discussion. Longtemps encore, les clercs érudits aimeront à batailler pour défendre les prétentions séculaires de leur Église, et cela d’autant plus que les sentences pontificales ne se priveront pas de se contredire avec le temps.
27La cathédrale de Dol a fait l’objet d’une étude approfondie de la part d’Anne-Claude Le Boulc’h, qui en a décortiqué avec bonheur l’histoire monumentale22. La nef a donc été conçue en deux temps : le premier niveau, à partir de 124523, étant dû à un architecte normand, avant qu’un maître d’œuvre anglais n’élève les étages supérieurs suivant un parti très différent qui nécessita une modification des piles. Les modèles allégués sont ici Chichester, Salisbury, le chœur de Saint-Hugh à Lincoln… Mais en réalité, c’est le chœur de Guillaume de Sens, qu’il convient d’invoquer dans la mesure où il fournit une architecture métropolitaine, voire primatiale. Car les “anglicismes” qui s’y rencontrent ne sont pas gratuits ! Le rapprochement des deux élévations (fig. 92a et b), distantes pourtant de près de quatre-vingt ans, est significatif. Le chœur de la cathédrale anglaise repose sur une grande variété de piles (cylindriques, jumelles accostées de deux fûts en délit en marbre de Purbek, ou bien accostées de quatre fûts). C’est ce dernier type – le plus spectaculaire – que retient le maître d’œuvre dolois. Au second niveau, il reproduit le triforium-passage au rythme de deux arcades par travée, elles-mêmes recoupées en deux, sans percement de l’écoinçon. Ce rythme sera à Dol seulement “esquissé” sur le mur du fond. Au niveau des fenêtres hautes, il revient à la structure du mur dédoublé, avec trois amples arcades hiérarchisées vers la nef, auxquelles ne correspond cependant qu’une seule fenêtre dans le mur du fond. Ce dernier détail, devenu rare à l’époque du decorated, avait caractérisé au contraire les nefs anglo-normandes (Ely, Norwich, Chichester, etc.). Le percement de trois fenêtres en regard des trois arcades internes se répand ensuite : nef et chœur de Saint-Hugh à Lincoln, chœurs d’Ely, Worcester, Salisbury, etc. Si une unique fenêtre est maintenue à Dol à une date aussi tardive que 1260, c’est bien en référence à Cantorbéry. Ce choix “primatial” pourrait-on dire s’inscrit plus largement sur fond de rappel appuyé de l’architecture anglaise, à commencer par le plan, dont l’extrême étirement en longueur n’a chez nous aucun correspondant parmi les cathédrales gothiques. On évoquera aussi l’inclinaison très prononcée des arcs-boutants de la nef, qui renvoie à Salisbury ou à Wells.
28L’aspect de la façade de la cathédrale doloise a suscité beaucoup de commentaires : “modeste et peu élégante”, “n’offrant aucun attrait”, “sans caractère”… Cette apparence décevante a généralement été mise au compte de son emplacement, trop près du rempart, qui l’empêchait d’être le front par lequel on abordait ordinairement l’édifice. Mais n’est-il pas naïf de penser que des commanditaires qui arboraient de telles prétentions et qui, au niveau de la nef, prenaient pour modèle la primatiale de toute l’Angleterre, aient en même temps cherché à faire quelque économie en élevant une façade indigente ? Car l’aspect frustre, archaïque dirions-nous, du frontispice de Dol ne tient pas non plus à la transformation de sa baie centrale à basse époque, ni à la suppression d’un porche dont on ne sait rien de concret et qui a pu être assez tardif. La référence paraît être en effet tourangelle, non point sans doute par rapport à la cathédrale rivale dont la façade du xiie siècle nous est mal connue, mais bien par rapport à la collégiale Saint-Martin, en tant que celle-ci est le reliquaire de l’apôtre de la Gaule, comme l’église de Dol l’est de saint Samson, l’apôtre de la Bretagne. La confrontation des deux frontispices est parlante (fig. 93a et b). Le regroupement des trois portes extrêmement dépouillées d’aspect dans la seule travée centrale, l’existence d’une unique baie au-dessus, et surtout, la structure de la tour sud avec son contrefort médian et ses deux hautes arcades en plein cintre à colonnettes, dans la partie inférieure desquelles ne s’ouvrent que deux petites baies. On doit enfin noter que l’amorce d’une arcature a été repérée contre le contrefort nord-ouest de la tour sud24. Anne-Claire Le Boulc’h souligne que “les niveaux intérieurs de la tour ne correspondent pas avec ceux déterminés par le décor de ses faces externes”25. Autrement dit, l’habillage décoratif de ces faces, conçu suivant un style volontairement archaïque pour une création du xiiie siècle, se réfère en fait à la collégiale Saint-Martin. Même si des ressemblances peuvent être signalées avec d’autres clochers du xiie siècle, en particulier Chartres et Vendôme, les similitudes les plus évidentes le sont avec le sanctuaire tourangeau26. Les niveaux trois et quatre de la tour, reconstruits aux xive et xve siècles, paraissent abandonner les références à la tour du Trésor de la collégiale, pour s’inspirer maintenant de la structure de sa tour Charlemagne (fig. 94a et b).
29La mise en chantier du chœur de la cathédrale, sans doute peu avant 1280, correspond certainement à l’arrivée d’un nouveau maître. Si la hauteur du vaisseau est identique et la structure comparable, il est évident que l’esthétique change profondément par rapport à la nef. Quelles peuvent donc être les sources de cette nouvelle architecture ? Ce nouveau maître d’œuvre conserve la structure du mur épais dédoublé, avec un second passage au-dessus du triforium, mais sans tendre à présent un réseau libre à l’aplomb de l’arcature de ce triforium. Dans le détail, ses références paraissent franciliennes et proviennent de la vallée de l’Oise. Les piles, dont les multiples fûts sont réunis par des contre-courbes, sont couronnées de chapiteaux aux tailloirs ondoyants au-dessus de la colonnette tournée vers le grand vaisseau, et pointus sur les fûts d’angle. Ils rappellent ceux des grandes arcades du chœur de la cathédrale de Beauvais (1225-1245). Le triforium, très haut, allie des formes polylobées non inscrites à une modénature dépouillée ainsi qu’à l’absence de bases et de chapiteaux. Certes, un tel tracé se rencontre déjà au chevet de Saint-Père de Chartres, ou à Cambronne-les-Clermont et à Cormeille-en-Vexin, mais il faut attendre Champagne-sur-Oise pour retrouver le même dessin mou ainsi que l’absence de chapiteaux. Les fenêtres hautes quant à elles présentent les mêmes caractéristiques de tracé et de modénature. On serait tenté de les rapprocher de celles du chevet carré de Nogent-sur-Oise, ou bien encore de l’étonnante réalisation que constitue l’abbatiale de Saint-Martin-aux-Bois, dont les fenêtres du chevet annoncent le grand trèfle de l’angle sud-est du déambulatoire de Dol, et où des tailloirs à bec surmontent tous les chapiteaux. On a remarqué que la présence de formes polylobées non inscrites, conjuguées avec une modénature très simple ainsi qu’avec la disparition des chapiteaux, caractérise un art rayonnant tardif du dernier tiers du xiiie siècle et du début du suivant27. Malgré l’irruption de ce style “francilien tardif”, la construction du chœur de la cathédrale de Dol a poursuivi la réalisation du grand programme très anglais initié au départ. On peut simplement se demander si les chapelles construites le long des bas-côtés du chœur étaient bien prévues dans le plan à l’origine, ou bien si ce n’est pas pour répondre à des besoins liturgiques croissants – multiplication des messes privées – qu’elles furent ajoutées. Les parties orientales sont organisées autour d’un sanctuaire carré, où le reliquaire de saint Samson se dressait derrière l’autel majeur comme en certaines cathédrales anglaises. La chapelle axiale, ajoutée probablement au début du xive siècle et dédiée elle aussi au saint local, n’a pas modifié fondamentalement ce programme, même si elle a accentué la ressemblance avec d’autres cathédrales d’outre-manche (Wells, Lichfield) (fig. 95).
30L’ornementation au service des grandes causes politico-religieuses, que furent le culte de saint Samson et la revendication de la métropole, s’exprime de façon particulièrement spectaculaire à Dol dans la maîtresse-vitre : la grande verrière du chevet. Ce vitrail date de la fin du xiiie siècle28. Les polylobes du tympan sont consacrés au Jugement dernier, et quatre des huit lancettes à des récits bibliques. Deux autres lancettes sont dévolues à l’histoire de sainte Marguerite d’Antioche et de sainte Catherine, dont la cathédrale détenait des reliques. Les deux dernières le sont à saint Samson et aux saints archevêques de Dol. La sixième lancette développe la vie du saint fondateur sur six polylobes, mais c’est surtout la septième qui mérite de retenir notre attention. Chacun de ses huit médaillons montre un archevêque entouré de six évêques (fig. 96) ; le prélat figuré au centre porte le pallium et tient la croix archiépiscopale, de plus il est nimbé. On doit donc y reconnaître les six premiers évêques canonisés de la métropole doloise : Samson, Magloire et Budoc (ces deux derniers connus par la Vita Maglorii du xe siècle), Leucher (mentionné par la Vita Samsonis), Thuriau et Géneré. Les suffragants sont ici les évêques de Quimper, Léon, Alet (Saint-Malo), Tréguier, Saint-Brieuc et Vannes. Nous avons donc affaire à une représentation historicisante de la primauté de Dol, exécutée à l’heure où le conflit avec l’archevêque de Tours reprenait un ton virulent, car la verrière est vraisemblablement antérieure à la sentence de Boniface VIII de 1299.
31La métropole de Dol est-elle parvenue à imprimer sa marque sur ses suffragantes prétendues, ou du moins sur certaines d’entre elles ? C’est ce qu’il nous faut examiner maintenant.
Le “gothique” des suffragantes de Dol
32Alors que les grandes églises romanes à déambulatoire – paroissiales ou monastiques – s’égrènent le long de la côte sud de la Bretagne : Loctudy, Saint-Gildas-de-Rhuys, Fouesnant, Landévenec, mais aussi Brélévenez sur la côte nord, ce type de plan va pratiquement se trouver réservé aux cathédrales à l’époque gothique. Une seule exception : l’abbatiale de Redon, avant les exemples très tardifs du gothique flamboyant que seront les églises de Dinan. Parmi les six suffragants que Dol revendique, un seul, Vannes, conservera jusqu’au xviiie siècle un chevet roman. Les cinq autres cathédrales connaitront toute une reconstruction plus ou moins complète, qui en tout cas concernera toujours les parties orientales. La relation à la métropole prétendue de Dol tendrait au premier abord à isoler le chevet plat malouin comme particulièrement proche architecturalement. Ce serait là encore une de ces illusions qu’un regard plus attentif dissipe rapidement. Même s’il est très imprécisément daté29, le chevet de Saint-Vincent, par ses liens continentaux, affiche fortement sa différence avec les “petits” chevets polygonaux des quatre autres suffragantes. Son architecture ligérienne emprunte l’essentiel de sa structure à sa “vraie” métropole : celle de Tours, et à cela, l’adoption du chevet plat – d’ailleurs implanté de biais – ne change rien. L’exigüité de l’espace disponible dans l’étroite péninsule qu’est l’île d’Aaron en est très vraisemblablement la raison. L’élévation intérieure des dernières travées nord affiche sa similitude avec la structure des travées du chœur de la cathédrale tourangelle (fig. 97a et b). Le dessin du triforium est le même : deux lancettes trilobées supportant un quadrilobe libre. Au-dessus, le grand développement des fenêtres hautes, qui égalent en élévation le niveau des grandes arcades, adopte aussi le même tracé, à ceci près que les trois roses des tympans malouins sont égales, s’éloignant par là de la hiérarchie existante à Tours. Le chevet de Saint-Malo se présente comme une réduction de celui de sa métropole : 20,75 m de hauteur sous voûtes, contre 27,20 m, soit quasiment les trois quarts. Bien sûr, des différences méritent d’être relevées : la plus remarquable est sans doute le triforium aveugle de la cathédrale bretonne. Hormis cela, on relèvera surtout des détails stylistiques : quelques traits normands, telles que les roses de feuillage aux écoinçons du triforium, les colonnettes baguées, ainsi que les deux frises de perforations – quadrilobées et trilobées – au-dessus et au-dessous de ce même triforium. Les maîtres d’œuvre malouins adoptent dans tout le chevet une modénature très ronde, pour les tailloirs en particulier, qui les rapproche là encore des créations normandes et anglaises du xiiie siècle. Pourtant certains détails viennent affirmer fortement la communauté d’inspiration avec Tours : absence de coursière au pied des fenêtres hautes, à la différence de toutes les autres cathédrales gothiques bretonnes30, et construction d’un réseau libre dans le tympan du triforium qui ne se soude à l’arc d’encadrement qu’en trois points : deux à la base et un au sommet, à l’imitation du triforium des travées du rond-point de Tours. De telles ressemblances, certainement recherchées à dessein, doivent entrer en ligne de compte dans la datation du chevet de Saint-Malo.
33L’extérieur de ce chevet adopte une esthétique sensiblement plus sobre qu’à Tours, et qui offre plusieurs points de contact avec le chevet de l’abbatiale de Redon, sans toutefois adopter pleinement son austérité architecturale. Les réseaux des grandes fenêtres sont privés de chapiteaux, et les arcs-boutants adoptent une structure très proche de ceux de Redon, et qui dérive de Soissons, avec un double couronnement en bâtière en décrochement l’un sur l’autre. La tourelle d’escalier méridionale, qui à Redon flanque la première travée du chœur, se retrouve presque identique aux angles du chevet de la cathédrale malouine.
34Les quatre autres cathédrales bretonnes – Quimper, Tréguier, Saint-Pol-de-Léon et Saint-Brieuc (fig. 98, 99, 100, 101) – malgré un écart chronologique considérable entre elles, présentent des similitudes, notamment au niveau du chevet, qui en même temps les éloignent de la cathédrale de Saint-Malo. Il s’agit en outre d’édifices relativement modestes, la hauteur sous voûte n’atteignant 20 m qu’à Quimper. Ailleurs, elle avoisine plutôt les 18 m, et même seulement 16, 50 m à Saint-Pol-de-Léon. En plan, ces chevets apparaissent profondément différents les uns des autres. Quimper semble avoir emprunté à Soissons les voûtes de son déambulatoire qui incluent la chapelle rayonnante correspondante. La datation jadis proposée par R.-F. Le Men – chantier ouvert dans les années 1240 – avait déjà été mise en doute par André Mussat31, qui lui préférait une date plus basse. Yves Gallet a depuis montré que le chantier n’avait guère pu s’ouvrir avant le dernier tiers du xiiie siècle. Seule Tréguier est assez classique. La cathédrale du Léon conjugue dans un chevet très tardif – après 1420 – l’abside en hémicycle avec un déambulatoire carré à ressauts, dont le modèle pourrait bien être à chercher à Dol. Les voûtes des deux chapelles d’angle qui flanquent la chapelle axiale sont ainsi à rapprocher des travées extrêmes du déambulatoire carré dolois. Quant à Saint-Brieuc, le parti adopté paraît plus maladroit que curieux, avec l’introduction de deux travées triangulaires à la naissance de la partie tournante, rendues nécessaires par un étrange rond-point du type 3/6, dont il est vrai que trois des piles ont été reconstruites dans les années 1400. C’est la terminaison orientale de leur grand vaisseau qui fournit cependant cet “air de famille” qui marque tellement ces “petites” cathédrales bretonnes. Les dimensions modestes ont incité à ne pas multiplier les piles dans la partie tournante, et donc à adopter un rond-point du type 5/8, qui n’offre à l’œil que trois pans coupés. D’autre part, le canon anthropomorphique joue ici à plein pour contrarier la miniaturisation de l’architecture : le triforium, la coursière supérieure et les garde-corps n’ont pu être réduits au delà de ce qu’exigent les nécessités d’accès. Ils apparaissent de ce fait globalement surdimensionnés par rapport aux grandes arcades et au clair-étage. Le phénomène est surtout sensible à Saint-Brieuc et à Saint-Pol-de-Léon (fig. 100 et 101), où le chevet très tardif paraît encore fortement influencé par celui de Quimper. L’évolution chronologique joue dans le sens d’une réduction en largeur des fenêtres hautes qui engendre des espaces muraux de part et d’autre. Ils sont si larges dans les cathédrales du Léon et du Trégor (fig. 99 et 100), que des lucarnes moulurées ont été percées aux côtés des piles engagées, pour éclairer le couloir situé à l’arrière. Ces piles qui, de Quimper et Saint-Brieuc d’une part, à Saint-Pol et Tréguier d’autre part, en passant d’une forte colonnette à un faisceau de trois, adoptent une section de plus en plus filiforme.
35Extérieurement, ces chevets manifestent peut-être moins de caractères communs. On est cependant frappé de ce que celui de Tréguier reproduise autant de caractères quimpérois à un demi siècle d’écart (fig. 102 et 103), si on retient les datations proposées par Yves Gallet (premier tiers du xive siècle pour les parties hautes, et mise en place du couvrement vers 1330 pour Quimper ; gros œuvre entrepris vers 1360, et voûtes posées de 1385 à 1402 pour Tréguier). On retrouve un même parti pour les chapelles rayonnantes, ainsi qu’un long mur lisse pour fermer celles de la partie droite, peut-être inspiré de Dol, et enfin les tourelles d’escaliers à la naissance de l’abside. Les arcs-boutants affichent leur ressemblance par le grand écart entre les volées extérieures courtes et les volées intérieures longues, un même type de couronnement pour les culées, et le percement en quadrilobe de la tête de la volée. On relèvera enfin un subtil effet de décaissement des pans du clair-étage par un jeu de fines moulures. On ne retrouve rien de tout cela dans les autres cathédrales, si ce n’est que celle du Léon reprend, en plein xve siècle, des culées très “soissonnaises”, semblables à celles que nous avons déjà rencontrées à Redon et à Saint-Malo. Mais l’influences anglaise se fait sentir dans les parties orientales de cette petite cathédrale, avec des fenêtres hautes et bases à arcs segmentés qui évoquent celles de Hereford, Norwich ou Worcester.
36Il faudrait enfin prendre en compte le cas de Saint-Pierre de Rennes, entièrement disparue à la seule réserve du massif occidental à deux tours qui avait été entrepris en 1541, pour être achevé plus d’un siècle plus tard, en 1668. L’ancienne cathédrale, commencée en 1182 par l’évêque Philippe, bénéficia au xive siècle des largesses de Charles de Blois, avant d’être consacrée en 1359. Les témoignages anciens nous apprennent assez peu de choses : les arcs-boutants auraient été ajoutés au fur et à mesure des besoins ; le transept n’aurait pas été voûté et le clocher se serait dressé sur le flanc nord. Aucune vue utilisable de l’église ne nous est parvenue. On dispose par contre d’un plan daté de 1755 et qui paraît assez fiable. D’après l’échelle – donnée en toises – la cathédrale aurait eu une longueur d’un peu plus de 97 m. On est donc loin des 144 m parfois allégués. Le plan est atypique pour la Bretagne, mais pourrait avoir influencé celui de la petite cathédrale de Saint-Brieuc, qui dans ce cas en aurait donné une version réduite de près d’un quart (fig. 104a et b). On retrouve en effet des proportions assez voisines ainsi qu’un transept très débordant ouvrant sur des absidioles quadrangulaires. Le chevet, du type 7/12, pose une énigme avec sa deuxième série de grosses piles rondes. Délimitait-elle un second déambulatoire ? Mais celui-ci aurait été apparemment bien étroit ; ou bien s’agissait-il de passages transversaux permettant de faire communiquer entre elles les chapelles rayonnantes, comme il en existe à Toulouse ? Mais alors, les chapelles du rond-point de Rennes, apparemment très profondes, se seraient bien mal adaptées à un tel dispositif.
Les chantiers de la fin du Moyen Âge
37En Bretagne, une nouvelle entreprise architecturale d’envergure mérite sans doute encore d’être lue dans son rapport avec le chantier de la métropole tourangelle : la reconstruction de la cathédrale Saint-Pierre et Saint-Paul de Nantes, commencée par l’ouest, à l’heure où la cathédrale de Tours avait entrepris un rhabillage complet de son vieux massif occidental des xii et xiiie siècles. Les deux églises bénéficient à présent d’études récentes ayant permis de réévaluer leur datation32. Si on adopte leurs conclusions, ces œuvres ne se seraient pas succédées mais plutôt interpénétrées chronologiquement. Même en admettant le vieillissement du chantier breton que propose Jean-Marie Guillouët33, le portail central tourangeau conserve son antériorité34. Mais les portails latéraux de l’église métropolitaine n’auraient sans doute été transformés que plus tard, pendant le dernier tiers du siècle, soit après la réalisation de ceux de Nantes. Il est particulièrement intéressant de comparer ces deux monuments à la scène de la construction du Temple de Jérusalem due à Jean Fouquet (fig. 105 et 106a et b). Il apparaît tout à fait probable que le miniaturiste – ou du moins les modèles qu’il a utilisés – aient eu une connaissance directe des deux cathédrales concernées. La structure de la travée, ici reproduite à l’identique quatre fois, dont une en retour d’angle vers la droite, est de toute évidence d’inspiration tourangelle : elle recopie d’assez près la travée du portail central de la métropole. On retrouve le gable aigu à gros crochets brochant sur une arcature aveugle surmontée d’une coursière au garde-corps à jour. Au-dessus des deux vantaux, la superposition de deux linteaux en anse de panier délimite deux premiers tympans ajourés que vient séparer le pinacle du dais du trumeau. Le tympan supérieur inclut une rose qui dans la réalité orne le gable. Son dessin à huit pétales trilobés est tout à fait identique, à ceci près qu’un pétale a été figuré dans l’axe, et non un meneau comme dans la réalité. La cathédrale bretonne paraît avoir à son tour inspiré la miniature par l’ampleur de ses portails, qui tous sont à trumeau, et surtout par l’existence de portails en retour d’angle sur les faces latérales des tours : disposition architecturale “trop exceptionnelle (sinon unique)”35, selon Jean-Marie Guillouët, pour que l’on puisse croire à une simple coïncidence36. Dès lors, un scénario simple semble se dessiner : l’initiative des transformations revient sans nul doute à Tours, dont le somptueux portail central est achevé au milieu du siècle. Puis à Nantes, sur le grand chantier de rénovation de la cathédrale “ducale”, on cherche encore à renchérir sur une métropole dont on n’a jamais vraiment cessé de tenter de s’affranchir. La “suffragante” sera ici plus complète, plus somptueuse, grâce à la mise en œuvre d’un programme à cinq portes sans doute encore jamais vu. La miniature de Fouquet, probablement réalisée alors que le programme nantais était en voie d’achèvement, reflète la structure du portail central tourangeau qu’elle démultiplie à loisir à l’image des portails nantais.
38Pour autant, l’engouement pour les grands chantiers gothiques ne cesse pas avec l’apparition de la Renaissance. Un siècle après l’ouverture du chantier nantais, en 1536, l’archidiacre Jean Danièlo posait la première pierre du nouveau chevet de la cathédrale de Vannes : un déambulatoire devait ouvrir sur neuf chapelles rayonnantes. Hélas, le beau projet tourna cours, et seule la chapelle axiale vit le jour (fig. 107) ; avec sa structure médiévale mêlée à un décor antiquisant, accostée des amorces des chapelles limitrophes à jamais inachevées, elle témoigne de l’extraordinaire longévité du rêve gothique.
Notes de bas de page
1 Pietri 1987, 17.
2 Bonnet & Rioult 2010, 93, n. 16.
3 Fillion-Braguet 2014, 115.
4 Bouttier 2000, 28-33.
5 Salet 1949, 31-35 ; et Andrault-Schmitt 2010, 109-117.
6 Bonnet 2017, 23.
7 Sur la cathédrale de Saint-Malo : Cornon 1950 ; Mussat 1963, 284-287 ; Petout 1992, 16-19 et 64-71 ; Bonnet-Rioult 2010, 31-34 ; Chouinard 2017.
8 Cailleteau 1991 ; Éraud 2001. Sur Doué-la-Fontaine : Fillion-Braguet 2018.
9 Sur cette cathédrale : Mussat 1963, 288-289 ; Mussat 1986 ; Bonnet & Rioult 2010, 466-476.
10 Gallet 2004 ; Gallet 2017a.
11 Le Boulc’h 1999, 159.
12 Andrault-Schmitt 2010.
13 Bouttier 2000, 56-61 ; et Bouttier 2003. La translation des reliques de saint Julien dans le nouveau chevet eut lieu le 27 avril 1254. Mortet & Deschamps 1995, 893-894.
14 Fillion-Braguet 2014.
15 Mallet 1984, 265-266.
16 Boüard 1926, 203.
17 Subes-Picot 1998, et Subes 2003.
18 Salet 1961, 48.
19 Puente-Miguez 1985.
20 Gallet 2010b ; voir le compte-rendu de P. Kurmann dans Bulletin monumental 2011, 160. Yves Gallet est revenu récemment plus longuement sur ce document : Gallet 2017d, 294-301. Celui-ci avait jadis été déjà remarqué par Pierre du Colombier. Du Colombier 1973, 84.
21 Lauwers & Ripart 2007, 143.
22 Le Boulc’h 1999. Voir depuis : Bonnet & Rioult 2010, 138-149 ; et Bonnet 2017, 26.
23 André Mussat avait opté pour une datation nettement plus haute : soit un chantier bien avancé en 1223. Mussat 1979, 55-56.
24 Couffon 1968, 48-50.
25 Le Boulc’h 1999, 69.
26 Vergnolle 1994, 320-322.
27 Gallet 2006, 151.
28 Une petite divergence existe entre M.-P. Lillich, qui date le vitrail des années 1265-1275, et A.-C. Le Boulc’h qui propose 1285/90-1300. Lillich 1994 et Le Boulc’h 1999, 207-208.
29 Cornon 1950, 296 (dernier quart du xiiie siècle) ; Petout 1992, 20-21 (1240-1260) ; Bonnet & Rioult 2010 (2ème moitié xiiie siècle). Tout récemment, Hervé Chouinard remarque que la présence d’une couronne d’épines dans le triforium pourrait être un “utile marqueur”, mais préfère attribuer le chevet à Henri III d’Angleterre, un “roi bâtisseur”, en mettant en avant les ressemblances (toutes relatives selon nous) avec la cathédrale de Salisbury. Cf. Chouinard 2017.
30 Nous mettons toujours à part le cas de Nantes, reconstruction tardive dans le style flamboyant.
31 Mussat 1979, 59.
32 Rapin 2003 et Guillouët 2003, ainsi qu’Andrault-Schmitt 2010.
33 Guillouët 2003 : années 1445-1455 pour la réalisation du cycle bas, et 1455-1465 pour les voussures.
34 Rapin 2003, 306 : vers 1423-1450.
35 On rencontre cependant de tels portails à Coutances.
36 Guillouët 2003, 239.
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