Introduction : Quand la vertu s’incarne
p. 7-18
Texte intégral
1L’ambition de cette réflexion collective doit être affichée d’emblée, même si elle peut apparaître excessive et déraisonnable, voire démesurée. Il s’agit de mieux comprendre l’exercice du pouvoir à Rome, son mode de fonctionnement ou encore ses spécificités pour une longue période qui prend en compte l’ensemble de la République et le début de l’époque impériale. Cette question n’est évidemment pas nouvelle, mais elle a été profondément renouvelée ces dernières décennies par une série d’études qui ont su définitivement s’affranchir du modèle interprétatif proposé par Theodor Mommsen (1817-1903) il y a un siècle et demi environ1. Nous sommes en effet désormais très loin du temps où l’on se contentait d’établir une simple équivalence entre pouvoir et institutions et de décrire la vie politique sous le seul angle du fonctionnement des principaux organes institutionnels (magistrats, Sénat, comices) et de leurs interactions. Si la question de l’imperium, de sa définition, de son champ d’application ou encore de son évolution n’épuise pas l’étude du pouvoir à Rome, d’autres pistes ont été explorées ces dernières décennies, qui ont proposé de nouveaux modèles théoriques.
2Les instruments de l’anthropologie politique ont été sollicités par les historiens du monde grec pour montrer à quel point la sphère du politique est indissociable des multiples interactions sociales qu’elle produit et nourrit. Un des principaux résultats de cette démarche a consisté à distinguer le politique de la politique : le politique doit être compris comme “un champ d’actions diffus et non institutionnalisé recouvrant l’ensemble des discours, des rituels et des pratiques collectives qui contribuent à forger, au sein de la communauté, un sentiment d’appartenance partagée – processions, sacrifices, fêtes, banquets, distributions, chœurs ou représentations théâtrales”2 ; quant à la politique, elle est “entendue non pas seulement comme l’accès réglé à différentes institutions, mais aussi comme auto-institution de la communauté par elle-même”3. Du côté des historiens de Rome – essentiellement de la Rome républicaine –, c’est la notion de “culture politique” qui a été mise en avant et privilégiée ces deux dernières décennies, et qui est du reste toujours en vogue : elle présente l’avantage d’élargir le champ de la politique en y intégrant les rituels, les images et l’ensemble des actes performatifs à travers lesquels des négociations étaient menées4. Le fonctionnement de la République romaine et du principat augustéen en est ressorti passablement éclairé. Les mécanismes de prise de décision dans les assemblées populaires et au Sénat, les comportements des magistrats et d’une façon générale des aristocrates qui gouvernaient la cité ont fait à ce titre l’objet d’études approfondies qui ne se limitent plus à une analyse des phénomènes proprement institutionnels5. La question des qualifications et des compétences nécessaires pour exercer le pouvoir a été largement posée et a abouti à des réflexions décisives. Elles portaient aussi bien sur les compétences savantes, le droit en particulier, que sur les compétences sociologiques, niveaux de fortune, réseaux clientélaires, prestige, mise en œuvre des codes de comportement politiques et sociaux, relations avec les dieux6. Il faut désormais aller plus loin dans l’étude de cette culture politique spécifique qui est celle de la Rome antique en s’intéressant à ce qui est au cœur du pouvoir parmi les innombrables manifestations de la vie politique.
Auctoritas et res publica
3La culture politique de la Rome républicaine et impériale est celle d’une structure globale à laquelle les Romains donnèrent un nom, celui de res publica, et dont la durée de vie fut millénaire parce qu’elle ne fut pas attachée à une forme particulière de régime plus qu’à une autre. Citant Cicéron, Quintilien fournit à ce sujet une précision capitale en dissociant les formae de la res publica de ses partes et en rappelant que si les premières sont au nombre de trois, le nombre des secondes est indéterminé : “On ne peut pas dire de combien de parties se compose une res publica, tandis que le nombre de formae est déterminé : combien par exemple il y a de sortes de res publicae, car on en connaît trois, selon que leur gouvernement est au pouvoir du peuple, d’un petit nombre ou d’un seul”7. Ce passage est fondamental, car il permet de dépasser le débat sur la nature même de la République romaine (aristocratie ou démocratie ?) ou du principat (monarchie ou république restaurée ?) pour se concentrer sur les notions qui constituent les partes de la res publica et qui sont suffisamment flexibles pour s’être adaptées aux différents régimes politiques qu’a connus la Rome antique. La notion même de pars rei publicae, si elle est difficile à définir tant elle est générique8, met en avant l’idée que le fonctionnement de la res publica est indissociable d’une série innombrable de notions latines dont l’articulation forme le pouvoir lui-même : en l’occurrence l’honos, la dignitas, la potestas, l’imperium, la libertas, la maiestas, le mos, le ius ou encore la lex. C’est dans ce cadre qu’entre une analyse de l’auctoritas, autre notion proprement romaine qui resta attachée à la res publica romaine aussi longtemps que celle-ci vécut et dont il faut reconnaître qu’elle a été jusqu’à présent très peu étudiée pour elle-même.
4Il faut préciser d’emblée les finalités de l’enquête. Cette étude collective n’entend pas s’inscrire dans le prolongement et la continuité des travaux qui relèvent de la “Begriffsgeschichte” en ajoutant l’auctoritas à une liste déjà longue des travaux qui se sont intéressés à l’histoire de différentes notions et dont les meilleurs exemples sont les livres consacrés par Chaim Wirszubski, Jochen Bleicken et Valentina Arena à la libertas, les notices sur l’auctoritas rédigées par Richard Heinze et Otto Hiltbrunner ou encore la monographie de Joseph Hellegouarc’h sur le vocabulaire latin des relations politiques9. Elle part plus précisément du présupposé, qu’il faudra confirmer et si besoin affiner, que l’auctoritas, loin d’être une notion parmi d’autres, était précisément l’élément central de la culture politique romaine, celui qui était au cœur des interactions sociales essentielles à l’exercice du pouvoir et à sa représentation.
5Comme l’air que l’on respire, l’auctoritas était pour les Romains une réalité si évidente qu’ils ne se donnaient pas la peine de la définir. Or elle constitue indubitablement un point de référence pour une société à nulle autre pareille, au sein de laquelle les acteurs n’étaient pas des sujets sans épaisseur. Les Romains qui furent les acteurs de leur histoire n’étaient pas de grands héros civilisateurs, mais ils n’étaient pas non plus comparables à la figure du politicien d’aujourd’hui, inscrit dans un parti et faisant carrière d’abord pour lui-même. L’aristocrate romain, puisque c’est surtout de lui dont il s’agit dans cette réflexion collective, était à la tête de centaines d’individus, qui lui étaient liés d’une manière ou d’une autre, et devait faire montre d’une auctoritas relevant d’une sémantique des comportements dans un espace public qui allait jusqu’à inclure une partie de sa maison. C’était la condition du succès dans une société où la menace du déclassement social était permanente10. L’auctoritas était donc un horizon d’attente, mais aussi un code de pratiques particulières qui reposait sur la capacité personnelle à l’exercice du pouvoir, ainsi qu’à sa reproduction, et qui reconnaissait l’individu comme un des éléments fondamentaux du système. Ce que nous nous proposons de faire désormais est de tirer d’ores et déjà à propos de l’auctoritas les différents fils que la vingtaine d’articles rassemblés dans cet ouvrage fera apparaître plus nettement.
L’auctoritas comme valeur cardinale
6L’auctoritas s’apparentait à Rome à une qualité intrinsèque, collective et individuelle, affirmée et incarnée à des degrés divers par tous les acteurs de la société romaine exerçant une forme ou une autre de pouvoir : en l’occurrence le magistrat, le princeps, l’orateur, le juriste, le sénateur ou encore l’ensemble des sénateurs au sein du Sénat. Elle était également au cœur du fonctionnement de la religion romaine, qui ne cessa depuis les origines de Rome d’être l’un des fondements du pouvoir. Yann Berthelet étudie en particulier dans ce volume l’auctoritas des prêtres, qui présente la particularité d’avoir été viagère tout comme l’exercice des prêtrises et qu’il différencie ainsi de l’auctoritas des magistrats ; Françoise Van Haeperen traite quant à elle de l’auctoritas des auspices à travers la prise des auspices d’investiture par Octavien le 7 janvier et le 19 août 43 en montrant comment les signes demandés aux dieux, et plus spécifiquement à Jupiter, consolidaient les pouvoirs des (pro)magistrats. L’auctoritas apparaît aussi dans le cadre des relations familiales, comme le met en avant l’analyse par Julien Dubouloz des différents usages de ce terme dans un tel contexte. Elle s’attachait enfin à un énoncé et à un savoir lié à des individus, mais sous une forme “dérivée” ou “empruntée” qui conduit à distinguer l’auctor – celui qui inspire – de l’artifex – celui qui construit – en vertu d’une distinction élaborée par Hannah Arendt et reprise à nouveaux frais dans ce volume par Philippe Le Doze pour être appliquée par exemple au patronage littéraire. Bref, l’auctoritas était omniprésente dans la société romaine, toute la question étant désormais de la définir et de comprendre comment elle se manifestait et se transmettait.
L’auctoritas comme “surplus” ou “surcroît” et comme initiative : étymologie et terminologie
7Une analyse étymologique fournit à ce sujet des précisions intéressantes qui font ressortir l’idée capitale qu’à ce terme est intrinsèquement liée l’image d’un “surplus” ou d’un “surcroît”, attaché à l’individu ou au groupe détenteur d’une telle qualité11. Il faut tout d’abord rappeler toutes les implications découlant du fait que le mot auctoritas est formé à partir de la même racine qu’auctor, que l’on traduit en français par “auteur”, mais dont la signification dépasse de loin toutes les connotations attachées à ce terme français : l’auctor est celui qui détient par son action la capacité ou la possibilité de “mettre en marche”, de “faire bouger” et d’aboutir ainsi à un changement ou à une décision qui n’aurait pu, sans lui, se produire. L’auctoritas est donc cette influence et, partant, cet ascendant reconnu à celui, groupe ou individu, qui prend une initiative, quelle qu’elle soit, et qui attend que son initiative soit suivie d’une décision prise par un autre acteur12 ; dans les textes législatifs les plus anciens étudiés dans ce volume par Thibaud Lanfranchi, auctor et auctoritas prennent ainsi le sens de “garant” et de “garantie”. Il faut ensuite souligner que les substantifs auctor et auctoritas entretiennent un rapport de parenté avec le verbe augere, “augmenter”, qui est l’action et le résultat produits par l’auctor, détenteur de ce qui est au bout du compte un droit d’initiative qui lui a été reconnu par les autres. De ce point de vue, l’auctoritas est étroitement liée au qualificatif Augustus, donné comme surnom à Auguste et à tous les empereurs romains ultérieurs, à propos duquel Dion Cassius dit qu’il manifeste “l’éclat de leur autorité”13, c’est-à-dire celle des empereurs.
8L’omniprésence et l’ubiquité de l’auctoritas au sein de la société romaine expliquent pourquoi elle est à ce point réfractaire à une définition trop simple et semble résister à toute analyse. C’est au contraire la polyvalence et la polysémie qui prédominent quand il est question chez les anciens de cette notion. C’est ce que montre en particulier dans ce volume Francisco Pina Polo à partir d’une analyse qui prend en compte l’emploi d’auctoritas chez Tite-Live et qui met en avant les différentes significations de ce terme : “influence”, “crédibilité”, “prestige”, “autorisation”, “approbation”… Il y a donc une difficulté réelle, immanquablement perçue dès l’Antiquité tout d’abord par ceux dont la langue maternelle n’était pas le latin, en particulier par les nombreux historiens de Rome écrivant en grec ou par tous ceux qui eurent à traduire en grec des réalités romaines (on songe aux membres de la chancellerie de l’administration romaine).
9On a souvent eu tendance à penser que les “Grecs” eurent du mal non seulement à conceptualiser cette notion si spécifiquement romaine, mais aussi tout simplement à la traduire. Une telle conclusion s’est longtemps appuyée sur un passage de Dion Cassius, capital pour notre propos, qui souligne que l’auctoritas – ici simplement retranscrite sous la forme αὐκτώριτας, ce qui apparaît comme un hapax – est un terme qu’“il est impossible de rendre en grec une fois pour toutes”14. L’article d’Étienne Famerie revient sur ce passage et réagit à l’égard de l’interprétation commune qui en est présentée en montrant à quel point la réalité est beaucoup plus complexe. Il rappelle tout d’abord que ce texte de Dion Cassius n’envisage à propos de l’auctoritas romaine qu’un aspect particulier qui fait référence à une résolution du Sénat invalidée par un vice de procédure ou un veto tribunicien, procédure spécifique à propos de laquelle l’historien grec veut souligner qu’elle était totalement inconnue des institutions des cités grecques15 ; il souligne ensuite à quel point le terme même de “Grecs” est trompeur, car il n’est rien d’autre qu’une “étiquette” appliquée à des auteurs si différents et ayant vécu jusqu’à sept siècles d’intervalle – de Polybe à Jean le Lydien ; il passe enfin en revue les différents moyens utilisés par les auteurs grecs pour rendre dans leur langue la notion romaine d’auctoritas : αὐθεντ(ε)ία, γνώµη, δόγµα (συγκλήτου), βούληµα et ἀξίωµα. Outre ces précisions techniques, les réflexions de Famerie sur les traductions et visions grecques de l’auctoritas sont capitales d’un point de vue plus général, d’une part parce qu’il est impensable d’écrire l’histoire de Rome sans le recours aux sources grecques, d’autre part parce qu’une analyse du regard porté par les “Grecs” est un moyen de décentrer le regard de manière à souligner les spécificités romaines de cette notion. Le fait qu’aucun mot de la langue grecque ne rende le terme latin auctoritas de manière univoque montre en tout cas à quel point les Grecs eurent du mal à saisir toutes les nuances attachées à cette notion. Cela ne veut pas dire que les Grecs étaient incapables de se représenter une forme ou une autre d’autorité16. Il faut plutôt inverser la perspective, comme le fait Dario Mantovani quand il rappelle, de manière salutaire, que les Romains empruntèrent une telle notion à la tradition rhétorique d’origine gréco-hellénistique en l’adaptant à leurs propres réalités et en l’intégrant à leur propre système de pensée. Cette mise au point doit nous inciter à davantage de prudence quant à la signification d’une notion qui nous donne le sentiment d’une fausse familiarité en raison de la facilité à la traduire dans la plupart des principales langues contemporaines (“autorité”, “authority”, “autorità”, “autoridad”…). Il faut au contraire saisir le point de vue des anciens sans plaquer sur celui-ci une des nombreuses visions modernes de l’autorité.
Auctoritas et hiérarchie
10La place centrale occupée par l’auctoritas dans la culture politique de la Rome antique découle avant tout de la structure fortement hiérarchisée de la société romaine et du besoin permanent qu’avaient ses membres de respecter et de faire respecter les hiérarchies en vigueur, quelle que soit du reste l’époque considérée. On précisera à cet effet que l’une des principales caractéristiques de la société romaine, sinon la principale, n’est pas tant l’existence d’une hiérarchie, qui est après tout une réalité inévitable dans toute société humaine, que le principe qui consiste à faire de la hiérarchie le premier critère de l’organisation sociale. Ce lien intrinsèque entre l’autorité sous quelque forme que ce soit et la hiérarchie a déjà été établi de manière théorique par Hannah Arendt, qui a proposé la figure de la pyramide comme “image du gouvernement autoritaire”17 et défini l’ordre autoritaire comme étant “toujours hiérarchique”18, ajoutant que “la forme autoritaire du gouvernement avec sa structure hiérarchisée … érige l’inégalité et la différence en principes omniprésents”19. À Rome, l’auctoritas était la qualité qui structurait si profondément les comportements civiques précisément parce qu’elle conférait une forme de supériorité à l’individu ou au groupe qui en était détenteur, voire à l’énoncé qui était produit. C’est ce qui explique par exemple pourquoi Auguste crut bon de faire savoir dans ses Res gestae qu’aussitôt après sa prise du pouvoir, l’auctoritas était devenue le fondement de sa primauté20. S’y ajoute qu’elle était parfaitement adaptée à une société aussi fortement hiérarchisée que la société romaine parce qu’elle était modulable à l’envi, “skalierbar” comme le souligne Martin Jehne ainsi que Karl-Joachim Hölkeskamp, l’auctoritas propre à un individu ou à un groupe n’étant pas exactement identique à celle d’un autre individu ou d’un autre groupe. À Rome, ce principe de graduation, voire de gradation fut appliqué à un si haut point et avec un si grand degré de précision qu’il permettait d’affiner les hiérarchies internes en créant autant de strates – individuelles et sociales – qu’il était nécessaire et en mettant ainsi en place ce qu’on peut appeler des “disparités hiérarchiques”21. Il était en ce sens indispensable au fonctionnement d’une société pyramidale dans laquelle l’influence de l’auctoritas, maximale au sommet de la pyramide, décroissait au fur et à mesure que l’on descendait vers sa base.
11L’auctoritas était d’une telle force au sein de la société romaine qu’elle était d’ordinaire reconnue et acceptée par les acteurs de la société auxquels elle s’adressait, et donc suivie d’effet : elle était cette puissance qui permettait de l’emporter dans la prise de décision, que le contexte soit aristocratique ou monarchique. Il faut y voir là sans doute une grande différence, sinon la plus grande, avec cette autre notion-clé de la res publica qu’était la dignitas, qui présuppose un statut – à acquérir, puis à défendre – plus qu’une initiative et action visant à un surcroît de pouvoir ; c’est ce que souligne Élizabeth Deniaux à partir d’une étude des lettres de recommandation de Cicéron qui montre à quel point l’auctoritas de Cicéron fut sollicitée pour défendre la dignitas de ses amis éloignés de Rome et dans quelle mesure elle inspira les décisions du Sénat. L’auctoritas était en effet supposée susciter de l’obéissance de la part de ceux vers lesquels elle était dirigée. C’est ainsi que l’on explique par exemple pourquoi et comment le peuple obéissait à l’aristocratie à l’époque républicaine et au prince à l’époque impériale22, même si le degré de soumission du peuple varia selon les périodes et était plus faible au moment de la crise de la République, ce qui a fait dire à juste titre à Giuseppe Zecchini et à Mario Pani qu’à cette époque le peuple n’obéissait pas nécessairement – ou n’obéissait plus23.
12Le plus important dans cette affaire est que l’auctoritas s’imposait d’elle-même sans recours à la contrainte par la force ou à la violence. Cette réalité a déjà été soulignée dans les travaux théoriques consacrés à la notion d’autorité d’abord par Alexandre Kojève24, puis par Hannah Arendt, qui précise notamment que la relation autoritaire entre celui qui commande et celui qui obéit repose sur l’acceptation d’une hiérarchie dont chacun reconnaît la justesse et la légitimité25. Cette observation est capitale : à Rome, l’efficacité de l’auctoritas était fondée sur la reconnaissance de la supériorité de l’individu ou du groupe détenteur de cette qualité par les autres acteurs de la société, ainsi que sur la confiance que ces derniers accordaient à leurs dirigeants. Il faut à ce stade de l’enquête à nouveau introduire une autre notion indissociable de la res publica romaine, celle de la libertas, qui est loin d’être incompatible avec l’expression de l’auctoritas : ces deux notions étaient au contraire indissociables et s’articulaient, comme le montre le fait que le thème de la libertas était présent aussi bien sous la République qu’à l’époque impériale26. Comme le souligne Hannah Arendt, “un gouvernement autoritaire voué à restreindre la liberté reste lié à la liberté (italique de Arendt) qu’il limite dans la mesure où il perdrait sa substance même s’il l’abolissait complètement, c’est-à-dire se transformerait en tyrannie”27. Prolongeant les remarques de Peter A. Brunt28, Robinson Baudry applique une telle analyse à l’Antiquité romaine en montrant dans son article que “l’auctoritas, pour s’exercer, suppose en effet la libertas”.
Exercice, acquisition et transmission de l’auctoritas
13L’auctoritas apparaît donc comme l’une des marques capitales de la forte structuration hiérarchique de la société romaine, l’un des instruments de la domination et l’un des critères de la différenciation sociale. Il reste à étudier non seulement comment elle était mise en pratique, mais aussi comment elle se transmettait, la question de l’acquisition et de la transmission étant une donnée fondamentale dans toute étude des formes du pouvoir. Le fait est qu’il n’y avait pas à ce sujet d’automaticité. À Rome, l’auctoritas était principalement liée aux membres masculins des familles de l’aristocratie et au principal organe institutionnel qui les réunissait, le Sénat, mais elle n’était pas donnée une fois pour toutes : elle était au contraire conférée selon des modalités déterminées et devait être constamment activée sous peine d’être dans un premier temps affaiblie, puis de disparaître purement et simplement. Robinson Baudry démonte dans cette perspective les mécanismes de fonctionnement de l’auctoritas au sein du Sénat pendant les trois dernières décennies de la République en montrant à quel point les ressorts de celle-ci étaient complexes : loin d’être mécaniquement déterminés par des données objectives telles que le rang du sénateur ou l’ordre d’interrogation, ils devaient également prendre en compte les dynamiques procédurales et les événements, ainsi que le contenu et la forme de la sententia ; bref ils consistaient en un dosage qui articulait statut, contexte et performance et qui n’était à ce titre pas reproductible. Le succès d’une sententia n’était donc jamais garanti et, inversement, un échec n’était pas nécessairement synonyme de déshonneur.
14Le processus d’acquisition de cette qualité ne se limitait pas du reste au cercle étroit de ceux qui en étaient les détenteurs. C’était au contraire le peuple romain dans sa forme institutionnelle, le populus Romanus, qui était directement sollicité à travers la prérogative qui consistait à choisir les magistrats dans le cadre des élections comitiales et qui contribuait ainsi à conférer une part plus ou moins grande d’auctoritas aux magistrats élus, en plus de la potestas ou de l’imperium que l’élection leur attribuait ipso facto ; s’y ajoute que c’étaient ainsi les citoyens romains présents aux élections qui permettaient au bout du compte à partir de Sylla aux questeurs élus d’entrer au Sénat et de faire ainsi partie d’une assemblée bien connue pour être détentrice d’une telle qualité. Au-delà de la question de l’acquisition, le peuple romain se voyait également attribuer la fonction de juger si le comportement de tel individu ou de tel groupe détenteur de l’auctoritas était dans tel contexte conforme au modèle d’exemplarité dont la meilleure description se trouve dans les laudationes funebres des membres de l’aristocratie et qui valorise des vertus telles que la grauitas, la uirtus, la fides, la familia, les opes, les qualités oratoires… C’était la condition essentielle pour que l’auctoritas de ceux qui étaient reconnus pour être les dirigeants fût acceptée par ceux qui étaient commandés. Si l’on utilise une métaphore empruntée aux Anciens et chère à ceux-ci, la vie publique était comparable à une scène sur laquelle des acteurs titulaires de l’auctoritas et en position hiérarchiquement supérieure faisaient étalage de cette vertu en face d’un public, le peuple romain, amené à juger de la qualité d’un tel spectacle.
15L’analyse qui vient d’être menée montre à quel point l’auctoritas n’était efficace qu’à la condition expresse d’être visible et performative. Elle s’exprimait en outre dans l’interaction, que cette dernière soit confinée dans les cercles étroits de l’aristocratie – par exemple dans les relations entre sénateurs – ou qu’elle se manifeste dans un cadre plus large qui mettait en contact les aristocrates avec l’ensemble des citoyens – par exemple à l’occasion d’un discours prononcé par un magistrat lors d’une contio ou des comices. Dans le Dictionnaire critique de la sociologie, Raymond Boudon et François Bourricaud rappellent à juste titre en ce sens que “l’autorité est une relation” et que “la relation d’autorité est instable”29, autant de points fondamentaux que développe Jean-Michel David à partir du témoignage de Cicéron. La voie choisie pour stabiliser autant que possible une relation par essence instable fut d’ériger des modèles de comportement fondés sur des exempla qui étaient la source même de l’auctoritas et qui s’appuyaient sur un passé idéalisé érigé au rang de tradition et, à ce titre, sans cesse reconfiguré au gré des circonstances. Ce qu’on appelle le mos maiorum, “la coutume des ancêtres”, occupe donc pour notre objet d’étude une place centrale, étudiée par Clément Bur, qui se justifie par les liens étroits existant entre auctoritas et passé et qui reposait sur le phénomène de l’imitation des anciens et des ancêtres. C’était en effet le poids de la tradition à Rome qui nous donne le sentiment que l’habitus des Romains était marqué par le conformisme et que les Romains étaient eux-mêmes conformistes30, habitués qu’ils étaient à se conformer aux effets de l’auctoritas une fois qu’ils en avaient reconnu le bien-fondé – et à cette seule condition.
16Si l’acquisition de l’auctoritas n’était pas automatique, son maintien et, surtout, sa transmission ne l’étaient pas non plus. Être membre de l’aristocratie ne suffisait pas : encore fallait-il reproduire sa vie durant aussi bien que possible le modèle de supériorité canonique ; il fallait également que les générations suivantes en soient elles aussi capables, défi permanent qui requérait des qualités spécifiques n’étant pas à la portée de tous et nécessitant une formation exigeante. Le système romain n’était en outre pas fermé aux évolutions et il pouvait y avoir en fonction du contexte de nouveaux acteurs auxquels l’auctoritas était accordée. C’est ce que l’on constate à la fin de la République, quand le peuple se vit reconnaître une auctoritas – mais uniquement collective, comme le souligne Martin Jehne. C’est ce qui se produisit également à partir des années 20 a.C., quand Auguste surimposa son auctoritas à celle du Sénat à la suite de sa victoire sur Marc Antoine, processus qui est également étudié en détail par Frédéric Hurlet à partir d’un réexamen des sources épigraphiques. L’interposition du prince dans les institutions traditionnelles se concrétisa également dans le domaine du droit quand l’auctoritas d’Auguste devint le fondement à partir duquel les juristes furent autorisés à émettre leurs avis (responsa)31. Une telle intervention impériale eut une portée considérable qui a été pendant longtemps négligée par l’historiographie contemporaine, à tort. Elle a en effet contribué à faire du prince “un juriste parmi les juristes, et même le premier des juristes” : c’est ce que rappelle Aldo Schiavone, qui rapproche cette mesure du passage des Res gestae soulignant la prééminence de l’auctoritas d’Auguste (34.3) et retrace la longue histoire de l’auctoritas des juristes en lien avec l’évolution complexe des modalités du ius respondendi depuis l’époque républicaine jusqu’au iiie siècle p.C.
La res publica romaine comme régime d’autorité
17Il ressort des propos qui précèdent que l’auctoritas se rencontrait dans tous les segments de la société romaine – religion, droit, magistratures, Sénat – et au cœur de toutes les formes de pouvoir à Rome. Elle est donc sans conteste une valeur partagée par les citoyens romains, à un point tel qu’on peut aller jusqu’à dire que les Romains vivaient sous un régime d’autorité. C’est l’idée théorique qu’exprime Thomas Hobbes quand il forgea le principe suivant : auctoritas non ueritas facit legem. Connu pour être la maxime de l’absolutisme, cet adage fait ressortir le fait qu’il exista ce que l’on peut appeler deux régimes de pouvoir selon que la notion centrale dans l’exercice du pouvoir et les discours qui en émanent est la ueritas ou l’auctoritas. Le philosophe allemand Jürgen Habermas a prolongé cette analyse en l’historicisant en partie quand il a introduit la “raison” dans l’étude des rapports de pouvoir et situé au xviiie siècle – celui des Lumières – une rupture marquée par la formation d’une sphère publique, l’“Öffentlichkeit”, structurée précisément par la raison32. Pour l’Antiquisant, la partie la plus intéressante de cette réflexion théorique est celle qui traite de la “préhistoire” de la notion d’Öffentlichkeit et qui comporte d’heureuses intuitions ainsi que de fortes potentialités, même si cette question a été “survolée à grands traits” de l’aveu même de son auteur33. Habermas y défend l’idée que la sphère publique reposant sur la raison succéda à un autre type de sphère publique, structurée quant à elle par la “représentation” et fondée sur le statut de l’individu, les insignes de son rang, une allure déterminée, ainsi que sur un code de comportement visant à l’excellence. Nous pouvons à notre tour prolonger l’analyse de Habermas et l’appliquer au thème de notre réflexion collective en faisant de l’auctoritas l’une des vertus cardinales du système axiologique de la Rome antique, au même titre que la “majesté”, la “dignité”, l’“honneur”, la “gloire”, la “réputation”, la “renommée”, sinon la vertu cardinale, celle qui définit l’ensemble du système en dernier ressort. L’auctoritas d’un individu ou d’un groupe est en particulier à la fois ce qui justifie la représentation de celui-ci et ce qui en découle : comme l’écrit Habermas, “l’homme noble est l’autorité dans la mesure où il la représente”34.
18Les considérations théoriques qui précèdent conduisent à aborder un problème central, celui de l’argument d’autorité, qui revient à évaluer le poids de la raison et de la rationalité dans la société romaine. Dans notre société contemporaine, la notion même d’argument d’autorité a mauvaise presse, car elle revient à dévaloriser la part de rationalité de l’argument pour se focaliser sur le statut de l’individu qui le délivre et, du point de vue contemporain, faire ainsi violence à ceux auxquels s’adresse l’argument. Faut-il penser que l’inverse était vrai à Rome et que, dans ces conditions, la raison n’avait aucune place dans le discours politique dans le sens où l’auctoritas a pu passer pour être incompatible avec la persuasion35 ? Charles Guérin montre à ce sujet à travers une étude d’un discours de Cicéron, le Pro Sulla, qu’il faut étudier cette question avec le sens de la nuance en invitant à toujours prendre en compte le contexte d’énonciation, un discours prononcé devant le peuple n’utilisant pas le même type d’arguments qu’une plaidoirie délivrée devant un tribunal. Rassemblant les passages – au nombre d’une trentaine – dans lesquels l’auctoritas est attribuée aux juristes, Dario Mantovani étudie les multiples facettes de l’argument ex auctoritate dans le droit en prenant soin de distinguer ce qu’il appelle le versant “extra-systémique” (l’emprise persuasive que les juristes ont ou n’ont pas sur les destinataires de leurs opinions) du versant “intra-systémique” (l’auctoritas dans le rapport entre juristes). Il apparaît au bout du compte que l’argument d’autorité, loin d’être à Rome un simple oxymore, doit être combiné et articulé avec d’autres argumentaires pour être pleinement efficace. Yann Berthelet a raison de faire remarquer à partir d’une analyse d’un passage du Brutus de Cicéron qu’auctoritas et discours (oratio), loin de s’opposer, se complètent : l’argumentation oratoire développée par un consul ou quelque sénateur que ce soit peut en ce sens être “un utile complément à son auctoritas”. En d’autres termes, nous sommes dans un système complexe et hybride dans lequel l’auctoritas dite éthique, fondée sur l’auctoritas de celui qui défend tel argument, peut le cas échéant – et doit en fonction du contexte – être renforcée par un raisonnement de type rationnel. Mais si la raison n’était pas absente du discours politique à Rome, il ne fait aucun doute que le régime de rationalité des Romains était de toute façon très différent du nôtre.
19L’auctoritas romaine a elle aussi une histoire, qui mérite d’être prise en compte autant que la libertas ou l’honos – désormais mieux connus grâce à de nombreux travaux plus ou moins récents36 – et que nous allons étudier de façon collective dans la longue durée. Si la dimension historiographique de ce sujet vient d’être esquissée dans cette introduction, sa dimension proprement historique sera au centre de toute notre démarche. Nous remonterons autant que possible dans le temps, au ve siècle en l’occurrence avec l’étude du témoignage des XII Tables. Il sera ensuite question avec l’article de Karl-Joachim Hölkeskamp de la période médio-républicaine, au cours de laquelle se mirent progressivement en place aussi bien la République romaine que l’auctoritas et les exempla sur lesquels l’auctoritas se fonda. La crise de la République romaine fut marquée par des bouleversements dont nous soulignerons quelques-unes des caractéristiques et qui se traduisirent en particulier par le phénomène de concurrence entre auctoritates, traditionnelles et nouvelles : le peuple se vit reconnaître à son tour une auctoritas à côté de celle du Sénat ; on vit apparaître sous la plume de César la formule auctoritas Italiae, étudiée par Giuseppe Zecchini. La fin de la crise aboutit à un processus qui consista en un transfert de l’auctoritas du Sénat vers l’auctoritas du prince et qui dura plusieurs décennies.
20Nous tenons ici à remercier les différentes institutions qui ont contribué à l’organisation du colloque et à la publication de l’ouvrage collectif issu de cette rencontre scientifique : tout d’abord l’Institut Universitaire de France ; ensuite la Maison Archéologie & Ethnologie, l’une des 23 Maisons des Sciences de l’Homme en France ; enfin le laboratoire ArScAn (UMR 7041), et la directrice de l’une de ses équipes, Christel Müller, qui a fourni une aide logistique ; au sein de cette équipe, nous remercions tout particulièrement Robinson Baudry, qui nous a assistés pour l’organisation du colloque et la publication des actes, ainsi que deux doctorants, Clément Bady et Mathias Nicolleau.
Notes de bas de page
1 La postérité de Mommsen a fait l’objet ces dernières années de plusieurs mises au point, notamment à l’occasion de la célébration du centenaire de sa disparition. Cf. notamment Nippel et Seidensticker ed. 2005 ; cf. aussi Fargnoli et Rebenich ed. 2013 ; sur les réactions au Droit public romain de Mommsen, cf. pour un bilan France et Hurlet 2019, 16-22.
2 Cf. pour cette définition Azoulay 2014a, 619.
3 Cf. pour cette définition Azoulay 2014b (citation tirée du résumé) ; cf. aussi dans ce sens pour l’histoire romaine Hurlet et Montlahuc 2018, 491. Définition sensiblement différente chez Moatti 2011, 107-108 : “il faudrait bien sûr d’abord se demander si l’enquête porte sur la politique ou le politique, c’est-à-dire si l’on s’interroge sur le champ du débat ou sur l’organisation du pouvoir dans la cité”.
4 Sur l’application de la notion de “culture politique” à l’histoire romaine, cf. la monographie fondamentale Hölkeskamp [2004] 2008, dont le sous-titre est révélateur : “Die politische Kultur des antiken Rom” ; cf. aussi Hölkeskamp 2019.
5 Cf., exempli gratia, Bonnefond-Coudry 1989 et 1995 ; Coudry 2018 et à paraître ; Jehne 2009b ; David 1992 et 2007 ; Flaig 2003 ; Sumi 2005 ; Hölkeskamp 2004 et 2017.
6 Sur le droit, cf. Schiavone [2005] 2008. Sur les liens entre pouvoir et argent, cf. Beck, Jehne et Serrati ed. 2016. Sur les liens de clientèle, cf. Eilers 2002 ; David 2009 ; Pina Polo et Jehne ed. 2015 ; Ganter 2015. Sur la notion de prestige et son application à la culture politique de la Rome antique, cf. Hurlet et al. éd. 2014 ; Baudry et Hurlet éd. 2016. Sur les relations avec les dieux, cf. Berthelet 2015.
7 Quint. 5.10.63 : partis incertas esse, ut quibus constet res publica, formas certas esse, ut quot sint species rerum publicarum quas tris accepimus : quae populi, quae paucorum, quae unius potestate regerentur. Sur ce passage, cf. Moatti 2018, 53-60.
8 Elle englobe par exemple la prouincia, définie par Cicéron comme une pars rei publicae (Q. fr., 1, 1, 4).
9 Wirszubski 1950 ; Bleicken 1972 ; Arena 2012 ; Heinze 1925 ; Hiltbrunner 1988 ; Hellegouarc’h [1963] 1972.
10 Sur la crainte du déclassement social et les modalités de ce phénomène social, cf. Klingenberg 2011.
11 Sur l’étymologie de l’auctoritas, cf. Casinos Mora 2000, 123-124 ; Bettini 2005, 237-258 ; Bettini 2015, 99-117 ; Nippel 2007, 15.
12 Cf. dans ce sens Bettini 2005, 245 qui souligne que l’auctor est celui qui exerce une influence sur une décision qu’un autre individu ou groupe d’individus doit prendre.
13 D.C. 53.18.2 qui utilise le terme ἀξίωµα pour rendre la notion latine d’auctoritas (cf. infra, 31-32 au sujet de cette traduction).
14 D.C. 55.3.4-5 : αὐκτώριτας ἐγίγνετο, ὅπως φανερὸν τὸ βούληµα αὐτῶν ᾖ. Τοιοῦτον γάρ τι ἡ δύναµις τοῦ ὀνόµατος τούτου δηλοῖ· ἑλληνίσαι γὰρ αὐτὸ καθάπαξ ἀδύνατόν ἐστι.
15 Ce point a été déjà mis en évidence par Agamben 2003, 127 qui précise à juste titre que ce passage de Dion Cassius “implique donc qu’il doit être rendu en grec, chaque fois par des termes différents selon le contexte” et qui ajoute que “Dion n’a donc pas à l’esprit quelque chose comme une spécificité romaine du terme, mais éprouve seulement de la difficulté à le ramener à une signification unique”.
16 Pour une analyse stimulante de nature comparatiste qui cherche à définir ce que l’autorité dans le monde grec sans projeter sur celui-ci la notion romaine d’auctoritas, cf. Pisano 2019.
17 Arendt [1954] 1972, 130.
18 Arendt [1954] 1972, 123.
19 Arendt [1954] 1972, 131.
20 RGDA 34.3.
21 Sur la notion de “hierarchische Gefälle”, cf. Hölkeskamp, [2004] 2008, 34-36.
22 Sur “l’obéissance” (“Gehorsamstiefe”) du peuple, cf. notamment les travaux de Karl-Joachim Hölkeskamp (par exemple Hölkeskamp, [2004] 2008, 37 et 88-93), qui prolongent les réflexions de Christian Meier.
23 Zecchini 2006, 398-399 et Pani 2010, 75-76.
24 Kojève [1942] 2004, 57 (“le “support” réel de toute autorité est nécessairement un agent … censé être libre et conscient”) et 60-61 (“en principe, l’autorité exclut la force … Non seulement exercer une autorité n’est pas la même chose qu’user de la force (de violence), mais les deux phénomènes s’excluent mutuellement”).
25 Arendt [1954] 1972, 123.
26 Hurlet à paraître.
27 Arendt [1954] 1972, 128 ; cf. aussi Arendt [1954] 1972, 140 : “L’autorité implique une obéissance dans laquelle les hommes gardent leur liberté”.
28 Brunt 1988, 322-330.
29 Boudon et Bourricaud 1982, 32 ; cf. déjà dans ce sens Kojève [1942] 2004, 58.
30 Sur le conformisme des Romains, cf. David 2007, 226 qui rappelle qu’à Rome, “c’était dans le conformisme qu’il fallait exceller” ; cf. en dernier lieu Mouritsen 2017, 67.
31 Pomponius, Ench., D. 1.2.2.48-49.
32 Habermas [1962] 1978.
33 Sur les potentialités de l’ouvrage de Habermas pour l’histoire romaine, cf. Hurlet 2019.
34 Habermas [1962] 1978, 24.
35 Comme le rappelle Arendt [1954] 1972, 123 : “L’autorité, d’autre part, est incompatible avec la persuasion qui présuppose l’égalité et opère par un processus d’argumentation. Là où on a recours à des arguments, l’autorité est laissée de côté. Face à l’ordre égalitaire de la persuasion, se tient l’ordre autoritaire, qui est toujours hiérarchique. S’il faut vraiment définir l’autorité, alors ce doit être en l’opposant à la fois à la contrainte par force et à la persuasion par arguments” ; cf. déjà dans un sens proche Kojève [1942] 2004, 59.
36 Sur la libertas, cf. les références qui se trouvent supra à la n. 9, ainsi que Balmaceda ed. à paraître ; sur l’honos, cf. Jacotot 2013.
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