Montferrand, la communauté, le consulat et l’arca communis (milieu xiiie-début xvie siècle)
Montferrand, the community, the consulate and the arca communis (mid xiith c. - early xvith c.)
p. 69-92
Résumés
Ville neuve fondée au début du xiie siècle par le comte d’Auvergne, Montferrand obtient la première charte de franchises de la région (c. 1196-1198). L’événement consacre l’autonomie juridique de la communitas et entérine la création de son instance exécutive, le consulat. Dès lors, les Montferrandais ne cessent de mettre en avant les signes qu’ils estiment les plus tangibles de leur existence et qui contribuent à signifier l’identité communale comme le sceau, la cloche et l’arche. L’arca communis paraît, peut-être plus que tout autre attribut, l’incarnation de leur indépendance et bénéficie d’une attention particulière. Dès le milieu du xiiie s. au plus tard, le gouvernement urbain soigne le coffre qui renferme les traces légitimant son existence et son administration, mais aussi les matrices sigillaires, le poinçon pour les métaux précieux ou encore les reliques. Fidèle du pouvoir, l’arche suit les pérégrinations d’un consulat qui, faute de maison commune, est contraint au nomadisme dans la ville. Toutefois, la croissance documentaire qui marque les derniers siècles du Moyen Âge oblige les consuls à modifier leurs pratiques de conservation. La multiplication des contenants impose une sédentarisation des arches communales. Le consulat opte d’abord pour l’aménagement d’une “armoire” au sein de la collégiale Notre-Dame (1409), puis décide de donner de la hauteur à ce qu’il qualifie désormais de “trésor de la ville”. Dès 1496, c’est la tour nord de l’église qui conserve, tels des reliquaires, les coffres de la commune. La pratique répond à un besoin de sécurisation, mais aussi de sanctuarisation de la mémoire collective. En effet, si l’arche est un attribut de gouvernement si important aux yeux de la commune de Montferrand, c’est qu’elle incarne et garantit son existence aux côtés de ses (trop) proches rivales : Clermont, ville épiscopale, et Riom, siège de l’administration capétienne.
Montferrand was a new town, founded at the beginning of the xiith century by the count of Auvergne and it was granted its first charter of preferential regional franchises (c. 1196-1198). This event marked the judicial autonomy of the communitas and confirmed the creation of the consulate, its executive body. From then on the Montferrandais never missed a chance to promote the insignia/signs which they felt were the most tangible proof of their existence and which helped to mark their communal identity just like the seal, the bell and the common chest. The arca communis seems perhaps more than any other attribute to be the incarnation of their independence and is worthy of particular attention. At the latest, from the middle of the xiiith c. onwards the urban government took good care of the chest which contained the signs that legitimized its existence and its administration as well as the seal matrices, the hallmark punches for the precious metals and even holy relics. Loyal to the governing power, the chest followed the wanderings of the consulate which, with no residence of its own, was obliged to move about the town. However, the increase in documentation which marks the last centuries of the Middle Ages obliged the consuls to change their conservation practices. The increase in the number of containers obliged the communal chests to settle. The consulate first opted for the installation of a “cupboard” inside the Notre Dame collegiate church (1409) and then decided to give what they now called “the town treasure” a higher profile. From 1496 onwards, like relics, the town’s coffers were kept in the north tower of the church. This practice developed from a need for security but was also in response for a need to sanctuarise collective memory. In fact, if the chest is an attribute of government that is so important in the eyes of the town of Montferrand it is because it embodies and guarantees its existence alongside its (close) rivals: Clermont, seat of the bishop and Riom, seat of the Capet administration.
Texte intégral
1En 1375, les consuls de Montferrand, en basse Auvergne, poursuivent en justice un bourgeois de la ville, récalcitrant à l’impôt, lors des grands jours du duc de Berry. Afin de défendre les intérêts de la res publica, les édiles montferrandais rédigent un mémoire judiciaire et l’adressent au duc. L’occasion leur est ainsi donnée de rappeler, devant les magistrats du prince apanagiste d’Auvergne, l’ancienneté de leur commune et les privilèges dont ils jouissent. Le troisième article du mémoire retient particulièrement l’attention. Dans celui‑ci, les consuls définissent ce qui – pour eux – est constitutif d’un gouvernement urbain et ce qui, par conséquent, fait la qualité du leur : “Item, dient lesdis consouls, que lidis consoulat de la dicte ville de Montferrant a toutes les noblesses, franchizes et libertés que nuls consoulat puet avoir quar il ont clouche, seel et uche fermant ; clouche au son de laquelle ilz se asemblent et font asembler leur commune, toutes les fois que bon leur semble, et seel dont ilz puevent seeller les lettres contratz qui sont en leur dit consoulat et ont uche fermant out il puevent tenir leurs papiers, lettres, privileges, registres et autres chouses neccesseres a leur dit consoulat”1. Pour les Montferrandais, la détention d’une cloche, d’un sceau et d’une arche est un signe probant de l’existence de leur communitas et, mieux, de la reconnaissance de la capacité juridique et administrative de celle-ci. La communauté, parce qu’elle détient ces signes manifestes de pouvoir, peut se revendiquer en tant qu’universitas, c’est-à-dire un corpus représenté par un organe gouvernemental doté d’un pouvoir décisionnaire : le consulat. En effet, c’est le “droit de se réunir, congregare, et de délibérer, consulere ou tenere consulatum”, qui assure une existence autonome à la communauté2. Les Montferrandais, qui défendent leur droit devant le duc en 1375, le savent bien. Ils rappellent, certes, les libertés obtenues de longue date, mais mettent surtout en avant les signes prouvant leur indépendance : une cloche, un sceau, une arche. Or, cette définition ne fait pas figure d’hapax dans la documentation. En 1308, les consuls se défendaient déjà du “prieur d’Auvergne que les troubloit” en affirmant avoir, dans cet ordre, “cloche, seel et arche”3.
2Les attributs promus par les consuls diffèrent cependant quelque peu de ceux qu’indiquent les coutumes. En effet, dans sa version de 12914, la charte de franchises précise que les habitants ont “corpus, communitatem, convocationem, congregationem sive assenblada, archas, domos et sigillum comunes et comune”5. D’après le seigneur, l’universitas doit jouir d’une arche, d’une maison et d’un sceau. La maison commune paraît, aux yeux du pouvoir seigneurial, un marqueur plus déterminant que la cloche dans l’acquisition de l’autonomie de la communitas. Cela souligne bien la discordance qui existe entre le discours formalisé et juridique du seigneur et la voix de la praxis, celle des consuls. Ceux-ci insistent sur les éléments qu’ils estiment les plus tangibles de leur existence, ceux qui – au quotidien – confèrent sa capacité au gouvernement urbain et qui, d’une manière générale, contribuent à signifier l’identité communale. Pour les Montferrandais, point n’est besoin de posséder un hôtel de ville pour exister ; une cloche, un sceau et une arche suffisent à garantir l’instance exécutive du consulat.
3Montferrand n’est pas un cas isolé et reflète bien le mouvement d’émancipation des communautés urbaines de la fin du Moyen Âge. Ville neuve fondée au début du xiie siècle dans les environs immédiats de la cité épiscopale par les comtes d’Auvergne pour faire pièce à l’évêque de Clermont6, Montferrand connaît un essor rapide et devient l’une des places commerciales les plus florissantes de la région. Ses foires et marchés ont, dès le milieu du xiie siècle, fait la richesse et la renommée de la ville et favorisé son expansion démographique. Quant à l’autonomie des habitants, c’est sans heurts et plutôt rapidement qu’elle est obtenue. En effet, vers 1196‑1198, le comte Guillaume et sa mère octroient une charte de coutumes aux Montferrandais. Celle‑ci, composée de 125 articles, est très libérale et paraît la plus ancienne de la région7. En 1226, alors que Montferrand rejoint la dot de Catherine, héritière du comte d’Auvergne, à l’occasion de son mariage avec Guichard de Beaujeu, les habitants s’entretiennent avec Louis VIII et obtiennent le titre de “bourgeois du roi”, ce qui les conforte dans leur recherche d’indépendance et les garde d’une éventuelle immixtion du nouveau seigneur dans leurs affaires8. Les Montferrandais jouissent d’un avantage considérable et veulent le faire savoir.
4Il convient alors de rendre tangible aux yeux de tous – seigneur, communautés voisines – cette indépendance. Quoi de plus normal que la mise en relief de cette autonomie par des signes manifestes ? Au mouvement communal correspond donc l’émergence de tout un “arsenal de biens et d’attributs [...] qui symbolisent l’autonomie urbaine”9 et fournissent les moyens d’expressions nécessaires à l’universitas. La cloche, les clefs, les bannières, les sceaux ou encore les livrées (appelées “gonelas” ou “raubas” en Auvergne) sont autant de signes perceptibles de l’indépendance urbaine. Première manifestation d’autonomie connue, un sigillum communitatis Montisferrandi apparaît dans la documentation dès 122610. Quid, alors, de l’arca communis ? Vanté comme l’un des principaux marqueurs de l’autonomie de Montferrand en 1308 et en 1375, le coffre demeure souvent “l’élément le plus insaisissable dans les textes”11. De fait, tout comme la matrice sigillaire, l’arche jouit d’un statut paradoxal. Précieux réceptacle des signes de pouvoir et de la mémoire collective, l’arca communis est jalousement gardée et tenue à l’abri des regards indiscrets. La vue et l’accès à l’arche sont réservés à de rares privilégiés, issus ou évoluant dans l’entourage du collège consulaire. Son utilité comme sa symbolique en font, pourtant, l’un des attributs majeurs du gouvernement urbain. En effet, “avec le xiie s., l’absolue nécessité de justifier, prouver et montrer, notamment en cas de protestation ou de procédure judiciaire, rejoint l’impérieux désir d’histoire et donne naissance à l’arca communis” car, “telle l’arche d’alliance de Moïse qui contenait les Tables de la Loi”, l’arche renferme comme un trésor les traces qui fondent l’identité et la mémoire collective de la communauté12.
5Si le coffre est assez important aux yeux des consuls pour qu’ils le mentionnent comme un des trois signes de l’indépendance municipale, à quelle activité gouvernementale répond-il exactement ? Et quels documents recèle-t-il qui le rendent à ce point symbolique de l’existence juridique de l’universitas ? Répondre à ces questions, c’est étudier la constitution progressive des archives municipales et apprécier la valeur qu’on leur accorde.
Pratiques scripturaires et souci de conservation
6L’Auvergne commence sa “révolution urbaine” à la fin du xiie s. bien après les grands mouvements du Nord ou du Midi du royaume de France13. Toutefois, comme dans ces grands ensembles, l’émancipation communale auvergnate s’inscrit dans la “grande révolution de l’écrit”14 et impose aux communautés la nécessité de dire, montrer et prouver leur fondement en droit, ce qui conduit à une accumulation de preuves. Les universitates sont attachées à l’écrit et font de la pratique scripturaire une caution de leur existence, un gage de leur identité.
7Montferrand ne déroge pas à la règle. Ses habitants paraissent, d’ailleurs, soucieux de défendre les droits de la communauté depuis longtemps. En effet, la charte de coutumes obtenue à la fin du xiie s. précise que “totas las chauzas que hom <no> trobaria escriutas en la chartra o el lhibre dels uzatjes de Monferrant devont esser acordadas, aordenadas o jutjadas pel senhor e pels cosols”15. Un livre des usages a donc préexisté à la reconnaissance juridique de la communauté montferrandaise. Le livre en question, malheureusement disparu, démontre combien l’activité scripturaire est ancienne à Montferrand et intrinsèque à la communauté.
8La production manuscrite, en plein essor au xiiie siècle – conséquence directe du besoin croissant de preuves dont fait montre la société médiévale –, rend nécessaire l’usage d’un moyen de conservation spécifique comme l’arche. Voyons, alors, ce que renferme le dit coffre.
Au commencement étaient les privilèges…
9L’arche est l’un des attributs typiquement associés à l’exercice du gouvernement urbain16. Toutefois, il n’est pas facile de la repérer dans la documentation. Dans son étude sur le consulat de Millau, Florent Garnier s’intéresse aux manifestations de l’autonomie urbaine comme “le sceau, la bannière, la maison commune ou bien encore l’arca communis”, mais conclut qu’il “n’est aucunement fait mention” de celle-ci17. En Auvergne, Josiane Teyssot arrive à un constat similaire pour la bonne ville de Riom et ne relève que de rares “allusions aux papiers du consulat”18. Si l’arche demeure, dans de multiples villes, la grande inconnue de la batterie des signes extérieurs d’autonomie du pouvoir municipal, tel n’est pas le cas à Montferrand. Le coffre figure fréquemment dans les écrits consulaires, ce qui permet de suivre sa destinée et de comprendre sa fonction.
10C’est au milieu du xiiie siècle qu’est mentionné pour la première fois le coffre commun. En 1264, les consuls versent 7 sous et 6 deniers pour l’“archa de portar (…) e per I mesagé”19. Cette attestation, bien que peu prolixe, sort l’arche de l’ombre et prouve son utilité ; elle doit être déplacée et se trouve associée à un messager. Il s’agit, vraisemblablement, du coffre au sein duquel sont conservées les chartes de la commune. En 1266, il est fait mention d’une dépense pour réparer “las sarralhas de l’archa dels cairels”20. Il n’est plus question d’un coffre pour les archives, mais d’une boîte où l’on conserve les carreaux d’arbalètes pour les sentinelles qui montent la garde (gaytas) : autre élément de l’autonomie urbaine. Dès la seconde moitié du xiiie s. au plus tard, il existe deux sortes d’arches à Montferrand, l’une vouée à la conservation des traces de l’administration, l’autre dévolue aux armes. C’est, cependant, le premier type qui nous intéresse et qu’il convient de pister.
11Parmi les nombreuses mentions de coffre rencontrées dans les sources manuscrites, certaines, plus que d’autres, permettent de comprendre l’utilisation qu’en font les gens de l’époque médiévale. On trouve, d’abord, dans l’arca communis “tout un ensemble documentaire facilitant la gestion de la ville”21. Certains documents, minutieusement conservés au fil des générations, remontent à la fondation de la commune. C’est le cas des coutumes, mais aussi d’autres chartes tout aussi précieuses. En 1379, les consuls dressent l’“inventaris (...) de las letras et enchartrament dal fait de consolat” et inscrivent : “lo priviletge seelat de III seaux dal senhor de Beljeoc et non y a, a present, que ung seel. Item lo priviletge dal rey saint Loys. Item ung autre priviletge dal rey Phelipe, successor dal rey saint Loys. Item ung autre priviletge dal rey Phelipe de Fransa et de Navarra. Item una confirmation dos priviletges dal rey Charle (...)”. Les consuls répètent l’opération en 1380, 1383 et 1387, et consignent les chartes dans le même ordre22. Ils se contentent d’ajouter, à la fin de la liste, les pièces nouvellement entrées dans l’arche. En 1421, il est encore enregistré : “premierement les priviletges. Item une lettre de confirmacion de certain priviletges (...)”23. Les inventaires, dressés régulièrement par les édiles gouvernementaux, prouvent combien les franchises sont au cœur de la pensée municipale depuis la fin du xiie s. Elles sont scrupuleusement conservées, copiées, vidimées, confirmées et inventoriées, ce qui montre l’émergence d’un besoin nouveau. Désormais “le document s’inscrit dans un continuum juridique, il s’installe dans le temps […] L’objectif n’est plus seulement de se souvenir de l’action juridique ou économique passée, c’est aussi et avant tout de prévenir tout conflit, de prévoir de futures potentielles contestations”24. Tel est le cas des coutumes et de leurs confirmations. Véritables actes de naissance de la commune, consacrant l’autonomie juridique de la communauté, ces chartes doivent être conservées avec précaution, sinon dévotion, ce qui rend nécessaire l’arca communis, assimilée symboliquement à l’arche mosaïque.
12Outre les privilèges, c’est l’ensemble des écrits de l’administration municipale qui est entreposé dans le coffre. Citons, par exemple, des pièces de procédure, mais aussi des chartes obtenues du roi, du bailli, du gouverneur, du duc, du sénéchal et, d’une manière générale, tous les justificatifs de l’action gouvernementale (comptes, délibérations). En 1383, à l’occasion du changement de consuls, les édiles sortants dressent l’inventaire de ce qu’ils laissent dans l’arche à leurs successeurs et enregistrent : “premeyrament aquest papeyr”25. Est ainsi consigné, en tête de liste, l’inventaire en cours de rédaction ! Toutes les pièces produites ou reçues par le consulat sont entreposées dans le coffre afin de prouver et défendre, si besoin est, les droits de la commune. L’arche se présente comme un écrin voué à la réception et à la construction du corpus réglementaire et normatif urbain ; elle incarne le droit, sinon la Loi, de la ville, mais détient d’autres fonctions.
Le bazar de la commune
13Outre les prérogatives de la commune, les coffres de Montferrand recueillent d’autres éléments, d’aucuns plus attendus que d’autres. L’arche sert de caisse de dépôt des deniers de la ville. Cette fonction, répandue ailleurs26, est attestée à plusieurs reprises dès le xiiie s. Vers 1284, le consulat fait réparer “las saralhas” du coffre où sont placés les deniers de l’impôt communal (“cumi”)27. En 1365, les consuls déposent dans l’arche l’argent commun28. Familière, l’opération est répétée en 1377, en 138329… ce qui semble aller à l’encontre des conclusions d’Albert Rigaudière pour Saint‑Flour. Le spécialiste du monde urbain affirme, en effet, que “pour ce qui est de l’arche commune, son existence probable ne doit pas faire illusion […] Il s’agit d’un coffre, davantage destiné à conserver les archives que les fonds”30. Montferrand tend à démontrer la persistance de cette double fonction de l’arche : tenir les archives comme les deniers communs.
14Le coffre de Montferrand renferme de surcroît les matrices des sceaux de la ville. Sont ainsi mentionnés, en tête des inventaires, “lo seel et contraseel de consoulat [et] lo seel d’Erbers”31. On retrouve dans l’arca communis les matrices du sceau et du contre‑sceau du consulat, mais aussi celle de la juridiction royale de la Purge, tribunal spécialisé dans la mise à l’écart des lépreux32. À ces premières matrices sigillaires, connues et identifiées, s’ajoutent “autres III seaux”, sans plus de précision33. Il s’agit, peut‑être, de matrices qui ne sont plus en usage34. Outre les matrices sigillaires, c’est “le poinçon avec lequel les orfèvres apposaient une marque sur les ouvrages d’or pour certifier le titre du métal”35 que l’on trouve dans l’arche dès 137936. Quant à l’apparition de cet objet dans le coffre commun, c’est à Jean de Berry que les Montferrandais la doivent depuis l’octroi d’un privilège en 136737.
15Éléments sans doute moins courant – dans la documentation écrite du moins – les reliques, elles aussi, rejoignent à Montferrand l’arche commune. En 1367, les consuls placent dans leur coffre les reliques de la léproserie d’Issoire dont ils possèdent le droit de collation38. Le gouvernement municipal a, semble-t-il, pris en main la gestion des reliques et contrôle leur ostentation durant les processions. En 1375, les consuls affirment ainsi “que les bailes de la confrairie dudit Sainct Esperit sont tenuz leur rendre compte annuellement des reliques”39. L’inventaire de l’arca communis, dressé en 1379, le confirme en consignant, sans plus de détail, la présence de “certana quantitat de reliquias”. L’année suivante, le scribe a pris soin de préciser : “certana quantitat de reliquias envolpadas de sandat rey”, c’est-à-dire enveloppées de soie rouge40. On ignore, cependant, la nature et la provenance de ces précieux objets. Il pourrait s’agir des reliques de saint Lazare et de sainte Marie‑Madeleine que les consuls “prêtent” à la léproserie d’Herbet en 137341. En 1381, la documentation révèle que les “reliquias dal Sain Pa de la Sena” (“le pain de la Cène”) se trouvent aussi dans le coffre communal42. En 1488, on précise, enfin, que les vêtements de la messe sont également conservés dans un coffre portant les armes de la ville43. L’arche devient le reliquaire de ce que d’aucuns ont qualifié de “religion civique”44.
16Tous les éléments utiles à l’exercice du gouvernement sont déposés dans “la cayssa de consolat”. La conservation de ceux-ci pose alors une question pragmatique, celle de l’organisation de l’arche.
Élaboration d’une archivistique médiévale
17Afin de gérer au mieux les intérêts de la chose publique, le consulat doit tenir l’arche en lieu sûr, mais surtout son contenu. Plusieurs dispositifs de gestion voient alors le jour. Plus que la conservation des documents, c’est l’accès à l’archive qui pose question. Quoi qu’il y paraisse et bien qu’il faille considérer l’existence d’une certaine “sédimentation documentaire”45, rien ne sommeille vraiment au fond des arches. Les documents qui y sont entreposés ne sont pas figés dans le temps ; leur utilité dépasse leur date de rédaction. Ainsi, telle ou telle pièce de procédure peut faire jurisprudence lors d’un futur contentieux et mérite d’être conservée. Les papiers placés dans l’arche sont autant de preuves potentiellement utiles à la défense des droits urbains. Garants du passé et de la mémoire collective, les documents archivés sont des assurances pour le futur. Aussi, doivent-ils pouvoir être localisés et sortis rapidement de leur écrin. Pour répondre à pareil besoin, le consulat a pris l’habitude, on l’a vu, de dresser l’inventaire de l’arca communis. La pratique, sans doute ancienne46, est connue dès le xive s. (fig. 1). L’opération est visiblement coutumière, sinon obligatoire à chaque changement de collège consulaire, puisqu’elle est attestée en 1379, 1380, 1383, 138747…
18Pour faciliter l’accès au fonds, les scribes municipaux adoptent d’autres dispositifs révélant l’élaboration d’une pensée archivistique. Dès le xve s. au plus tard, on classe, cote et annote (analyses dorsales) les documents avant de les inventorier et de les ranger dans le coffre de la commune et, ce, selon une logique bien précise. Les papiers sont réunis par thème dans des sacs ou des caisses (sur lesquels on inscrit l’objet48), puis sont cotés avec l’Ave Maria ou le Salve Regina (conséquence du culte marial local)49 et, dans une moindre mesure, au moyen d’autres références liturgiques (Pater Noster…)50. Enfin, pour gagner plus de temps, les scribes ont pris l’habitude, dès le xiiie s., de confectionner des onglets afin de matérialiser le découpage interne de leurs registres et de repérer le plus rapidement possible les passages utiles à la gestion communale (fig. 2-3).
19Si l’inventaire permet de connaître les documents conservés dans l’arche, il n’est pas suffisant. L’explosion scripturaire de la fin du Moyen Âge impose un effort d’organisation et conduit à la rationalisation du coffre municipal. Dès la seconde moitié du xive s., les écrits sont plus précis et font la part belle à un vocabulaire nouveau et varié. À partir de 1371, les Montferrandais délaissent le terme (trop) générique d’“arche” et citent, désormais, les “usches”, “l’estuyt”, la “caisse”, le “cofre” ou encore les “boustie” ou “bostia” de la ville. Parfois, le scribe fait preuve d’une plus grande précision, citant tantôt “ung estuyt de boys couvert de cuyr rouge fermant a clef”, tantôt une “cayssa longa de Monpeyleyr” ou une “cayssa de Monpeyleyr cayrada”51. Cet effort de dénomination des contenants (forme, origine, couleur) n’est pas un effet discursif, il répond à une réalité – la multiplication des boîtes – et à un besoin. La différenciation des coffres facilite l’accès aux documents. Or, la diversité des contenants ne doit pas occulter le fait que les différentes boîtes se trouvent, toutes, au sein d’une seule et même “arche”52. Faut-il imaginer, alors, que les divers coffres s’emboîtent, telles des poupées gigognes, dans une arche unique de très grande dimension ? Il est difficile de trancher, mais la documentation le suggère fortement, au moins jusqu’au début du xve s.
20Une “archivistique médiévale” se met en place progressivement à Montferrand et connaît diverses étapes qu’il convient de retracer.
Construction d’un “bâtiment d’archives”
21Ces très nombreux et très divers objets conservés dans le coffre communal n’ont une utilité que s’ils sont identifiés, classés, préservés. La question du nombre, de la forme et de la taille des contenants se pose et tout autant celle du lieu choisi pour les entreposer. Ces questions, nombreuses, sont d’importance ; elles permettent d’interroger les usages qui entourent la détention et l’accès au droit urbain et à la mémoire collective sis dans l’arca communis.
22La documentation manuscrite, abondante, permet de dresser fidèlement l’évolution des pratiques et des lieux de conservation de l’arche commune et de suivre le parcours de ce qui, à l’origine, ne fut sans doute qu’un simple et unique coffre53.
“Une arche pour les gouverner tous”
23Il est à supposer que les consuls ne disposent, à l’origine, que d’une seule arche pour conserver “les grands symboles de l’autonomie communale”54. Or, il demeure difficile de l’affirmer. Le plus ancien registre de comptes conservé mentionne, en 1264, une seule “archa”55. Toutefois, vers 1283‑1284, les consuls évoquent “las archas de la vila”. En 1285, ils rétribuent un individu pour “l’archa portar”56. Il est question d’une simple “archa dal cosolat” en 1307, puis de “las archas de cossolat” en 1317 et, à nouveau, d’une unique “archa” en 134657. La facilité avec laquelle les scribes passent du singulier au pluriel pour désigner le coffre communal ne permet pas de déterminer précisément la date à laquelle s’est imposé le besoin de détenir plusieurs boîtes.
24Un élément plaide, pourtant, en faveur d’un coffre unique voué, à l’origine, à la seule conservation des privilèges de la ville. Lorsqu’ils rédigent le nouvel inventaire de leurs archives, au début du xvie s., les consuls consignent en premier lieu “ung estuys long couvert de cuyr fermant a une corroye de cuyr intitullé : ‘Le grand vidimus des previlleges’” où repose “la confirmation des previleges donnez et concedez es bourgeoys, manans et habitans de la ville de Montferrand par Loy de Beaujeu”. Il s’agit du vidimus, réalisé en 1273, de la première charte de franchises58. Plus tard, ils mentionnent encore “les anciens privileges [qui sont] dans ung estuyt de boys faict en façon d’une caisse longue” ou le “petit coffre de boys ou sont les privileges de la ville estant dans le coffre fermant a quatre serures et quatre clefz”59. Une boîte destinée spécifiquement aux coutumes a dû exister très tôt. Toutefois, dès la seconde moitié du xiiie s. au plus tard, l’arche s’est démultipliée. L’explication se trouve dans la nécessité de faire face à la croissance documentaire relative à l’impérieux besoin de conserver la mémoire commune. Montferrand, comme les autres villes du royaume de France, connaît une période marquée par “un véritable engouement pour [les] registres, une sorte de folie de l’écriture administrative”60.
25L’arche originelle, vouée à la conservation des privilèges, ne peut suffire face à l’institutionnalisation du gouvernement urbain et à la production scripturaire croissante qui l’accompagne. Pour gérer cette inflation documentaire, les édiles de Montferrand sont contraints de multiplier les contenants, ce qui soulève la question de leur conservation.
Des arches itinérantes
26La multiplication des “boîtes” ou des “coffres”, attestée dans divers documents, et la croissante ampleur des archives à conserver rendent complexe l’utilisation des arches. On sait que les consuls rémunèrent des hommes forts pour les déplacer. La fréquence de ces pérégrinations apparaît dans la comptabilité. Un premier déplacement est attesté en 1264, puis un autre vers 1284. En 1285, il est question de l’“archa portar a l’ubrador”61. En 1317, les comptes révèlent que la ville a demandé à “Me S. de Cheberot […] de gardar las archas de cossolat”, ce qu’il fit, à plusieurs reprises, en mettant l’hôtel de la Chancellerie à la disposition des consuls62. En 1371, il faut “bouter hors lez usches de consoulat” de la maison où elles se trouvent et, encore, les déplacer63. Dix ans plus tard, les consuls évoquent l’“archa de conssollat a Saint Esprit”, c’est-à-dire dans la maison de la confrérie éponyme64. Entre temps, c’est à Riom que l’on retrouve la trace de l’une des arches. En effet, en 1374, les consuls – engageant un procès devant le bailli ducal – laissent en garde à un Riomois “la dicta caissa seelada de nostres seals […] per paour dos chamis”, c’est-à-dire par peur des routiers environnants, conséquence directe de la guerre de Cent ans65. Aux xiiie et xive s., les autorités municipales de Montferrand ne cessent de promener leurs arches et ce, malgré les risques ambiants. Le fait surprend quand on connaît la détermination qu’emploient les consuls à la conservation des traces de leur administration et de la mémoire collective.
27Une explication réside dans la réalité matérielle du consulat. Contrairement à ce que laissent entendre les coutumes seigneuriales, le consulat ne possède pas d’immeuble(s) et ne semble pas désireux d’acquérir de quoi “faire maison commune”66. Le gouvernement préfère louer les hôtels de quelques grands bourgeois ou s’établir au sein d’édifices publics notoires67. La possession immobilière n’est pas une priorité du consulat de Montferrand. Et, d’une manière générale, “dans les villes de l’espace francophone les bâtiments de représentation qui manifestent l’existence d’un pouvoir citadin sont un phénomène secondaire”68. Le sujet n’est, d’ailleurs, visiblement pas un gage d’autonomie aux yeux des édiles de Montferrand qui préfèrent citer leurs “cloche, seel et arche”. À défaut de posséder sa propre domus communis, la municipalité loge là où bon lui semble, c’est-à-dire aux quatre coins de la ville. À la fin du xve s., les réunions se tiennent d’ailleurs “infra domum communem dicte ville Montisferrandi appellatam vulgariter ‘de la Chancellerie’”69, c’est-à-dire le siège de la chancellerie royale établie, par Philippe le Bel, au début du xive s.
28Loin d’être un défaut, la pratique offre un double avantage au pouvoir communal. Les édiles peuvent, d’abord, marquer leur présence sur l’ensemble du territorium communitatis et représenter chaque quartier de la ville (Vacherie, Saunerie, Molles et Moulins). En outre, l’oligarchie dirigeante a trouvé le moyen de s’attacher le soutien des grandes familles. En effet, c’est aux notables et, souvent, aux consuls sortis de charge que sont loués les hôtels destinés à l’instance exécutive. Le gouvernement offre ainsi à ses anciens dirigeants une rentrée d’argent non négligeable70, mais surtout un signe de distinction, une belle fin de carrière, pour ne pas dire une “retraite chapeau”. C’est un privilège rare d’héberger chez soi et le consulat et les arches communes. Le destin de celles-ci est donc le fruit des locations du moment. Aux xiiie et xive s., point de régularité ni d’entrepôt spécifique pour les archives montferrandaises, les coffres suivent les pérégrinations du pouvoir, ils cheminent et font des haltes ponctuelles dans telle ou telle partie de la ville. Cette “époque bénie, où tous les papiers d’un pouvoir se déplacent avec lui”71, n’est pas sans rappeler les pratiques des souverains capétiens jusqu’au changement instauré sous le règne de Philippe Auguste ; si l’on souscrit, bien sûr, à la tradition historiographique72.
29Or, ce qui semble être une pratique ancienne à Montferrand, finit par devenir un problème. L’accumulation documentaire, la multiplication des coffres, comme l’insécurité qui règne à la fin du Moyen Âge remettent en cause les usages locaux et poussent les édiles municipaux à questionner leurs pratiques archivistiques et à aménager un local particulier.
Ad Sanctum sanctorum : l’armoire du consulat
30À l’aube du xve s., l’arche de Montferrand connaît une double évolution ; sa dénomination et sa forme changent. Désormais, il n’est plus question des “arches”, “coffres” ou “uches” du consulat, mais d’une “armoire” que les consuls établissent au sein de la collégiale Notre‑Dame ; une sédentarisation et une sanctuarisation des archives s’opèrent73.
31Les comptes conservent la mémoire de ce tournant majeur de l’histoire des archives et révèlent, qu’en 1409, les consuls rétribuent 60 sous à “Stevenot le masson pour fere l’armaire de l’iglise pour tenir les priviletges, sedules et autres chouses touchant le fait de la ville”. À cette somme, s’ajoutent 33 sous et 12 deniers pour “une post [= planche] de l’entre deux dudit armaire” et “pour la closure dudit armaire, tant pour poust, ferrehure, sarralhes et clez et autres chouses neccessairez”. Le chantier, confié à un maçon et non à un charpentier, laisse supposer la construction ou l’aménagement d’un “bâtiment” (une salle du coffre ou un placard maçonné dans l’épaisseur d’un mur) plutôt qu’un simple meuble en bois. Ce qui demeure certain, c’est que dès 1409, les archives ne sortent plus de l’église. Ainsi, en 1421, les consuls nouvellement élus dressent l’inventaire des documents laissés “en l’armoyre a l’iglize” par leurs prédécesseurs. Dès lors, les consuls font montre d’une vigilance constante pour la mise en sécurité de leur armoire. En 1452, la ville paie 6 sous pour “deux sarures que ont esté mises en ung coffre neuf de la glise”, puis demande à “ung enfant” de surveiller la nouvelle arche communale pendant les travaux de réparation de l’église. Les consuls craignent, sans doute, qu’une main malhonnête profite de va‑et‑vient trop nombreux dans l’édifice pour s’approcher dudit écrin. En 1462, Michel Escalier, serrurier, donne quittance aux consuls de 21 deniers “pour la vente d’une saraille et clef mises a l’armaire de l’esglise Notre Dame de Montferrand prés l’aultier saint Pierre, auquel armaire sont plusieurs lettres de la dite ville et consulat”. Quelques semaines plus tard, le pouvoir exécutif refait l’inventaire des archives municipales et décide d’acheter des sacs “pour mectre les titrez de ladite ville”74, dont certains sont parvenus jusqu’à nous (fig. 4).
32Ainsi, à partir de 1409, les Montferrandais délaissent les arches mobiles et optent pour une “armoire”, installée près de l’autel Saint‑Pierre. Cela assure une sédentarisation des archives et une sécurisation de celles-ci. Il faut sans doute voir dans ce changement la conséquence des événements récents qui ont bouleversé l’équilibre et la sécurité de la communitas Montisferrandi. En effet, la basse Auvergne connaît, dans la seconde moitié du xive siècle, les effets de la guerre de Cent ans. Passages de routiers, chevauchées du duc de Lancastre, sièges et prises de villes sont autant d’éléments qui scandent le quotidien et frappent l’imaginaire des médiévaux75. Les Montferrandais, quant à eux, ne sont pas épargnés par les troubles de la guerre ; ils en connaissent les vicissitudes et en font les frais. La commune est ainsi confrontée, en février 1388, au pire épisode de son histoire : la prise et le sac de la ville par Perrot le Béarnais. L’épisode, largement décrit par Froissart, est relaté par le duc de Berry qui rapporte comment “Perrot le Biernois et autres Anglois et ennemis du royaume de France eussent prise notre ville de Montferrant” et souligne “les grans pertes et dommages que lesdit habitans ont euz et soustenus pour raison et a cause de la dicte prinse”76. Ces documents livrent le traumatisme subi par les Montferrandais et expliquent, certainement, le sursaut sécuritaire du gouvernement à l’égard des archives77.
33Cependant, comment ne pas constater, aussi, que l’agencement adopté par Montferrand au début du xve s. est une transposition du modèle royal, celui de la sanctuarisation du Trésor des chartes selon “le dispositif symbolique de la Sainte Chapelle, imaginé par Louis IX et longtemps entretenu par ses successeurs”78. D’ailleurs, nombreuses sont les universitates à avoir opté pour ce système. Ainsi, le consulat de Cournon, qui comme celui de Montferrand ne possédait pas de maison commune, a décidé de mettre ses archives au cœur de la collégiale, dans un coffre (ou armoire) placé sous la protection de saint Martin. Le saint fut, toutefois, d’un vain secours puisque, peu après 1400, un incendie se déclara dans l’église et consuma les archives de la commune, franchises comprises79 ! Quant aux élus de Clermont, c’est sur ordre du duc de Berry, en 1402, qu’ils font faire “une huche fermant à trois clefs” qu’ils placent, pour plus de sécurité, dans l’église cathédrale80. Le début du xve s. semble marquer un tournant dans les pratiques archivistiques des communautés urbaines. “La conservation des archives civiles dans les établissements religieux [peut surprendre], mais il faut se souvenir du droit d’asile dont bénéficient les édifices religieux”81. Néanmoins, plus qu’un effort de sécurisation de l’arca communis, c’est une sanctuarisation de son contenu – les droits et la mémoire de la commune – qui s’opère à Montferrand et qui exprime parfaitement le goût et le besoin si particuliers que nourrit cette communitas pour le concept de “religion civique”. C’est d’ailleurs au cœur de la collégiale séculière, administrée par les consuls et sise intra-muros, et non du prieuré casadéen (régulier), sis en dehors de l’enceinte, que sont déposées les archives.
34La sanctuarisation opérée au début du xve s. conduit à une dernière évolution. Dès 1496, les Montferrandais délaissent définitivement les termes d’arche ou d’armoire et optent pour le terme symbolique de “trésor”.
Le “trésor de la ville”
351496 est une année charnière pour la communauté montferrandaise. En cette fin du xve s., le consulat procède à des changements lourds de signification. La commune paraît en pleine introspection et montre un intérêt particulier pour son histoire et son identité. En effet, les consuls (re)découvrent les fondements de leur commune, la charte de coutumes, et affirment “que lesdits privilieges qui sont beaulx et auctentiques ont esté trouvés (…) escriptz en latin fort eleganment et que, par ce moyen, ilz sont et ont esté par cy devant incogneuz a la pluspart desdictz habitans, a cause de quoy n’ont esté gardés ne entretenus conme il appartient, a leur grant interestz et donmaige et plus seroient s’ilz n’estoient autrement publiés ne magnifestés ou entenduz” ; portrait peu flatteur que voilà ! Pour y remédier, le consulat décide de “radig[er] lesdits privilieges de latin en françoys, en prenant la substance du latin selon l’intencion des octroyans et le comun usaige de parler au plus prés (…) saulve toute bonne correction et l’interpretacion juridique des paroles ambiguez et inusiteez”82. La traduction de la charte en français doit permettre à tout un chacun d’en prendre connaissance. Le consulat fait de cet événement “un geste refondateur de sa puissance et d’une identité urbaine sur un principe d’utilitas publica”83. Toutefois, sous couvert de rendre ses lettres de noblesses aux vieilles franchises, le pouvoir municipal ajoute une trentaine d’articles supplémentaires, entérinant ainsi les droits qu’a su s’arroger l’universitas depuis sa fondation.
36L’arche commune va connaître une importance renouvelée quand le gouvernement montferrandais s’engage dans ce qui sera un tournant majeur de son histoire : la traduction des coutumes. La ville ne se contente pas, à cette occasion, d’une refonte de son auctoritas, elle entreprend de construire, grâce aux archives, une mémoire et une identité urbaines. En 1496, apparaît pour la première fois dans la documentation la référence au “trezor de la ville”, dans la nouvelle mouture des franchises (25 août), puis dans les actes de la vie courante. Le 24 décembre, les consuls payent ainsi “deux clefz qui ont estées mises a la porte du tresor et a l’arche dudit tresor”84. Désormais c’est au trésor que fait référence le gouvernement lorsqu’il évoque ce qui, à l’origine, n’était qu’une simple archa85. L’armoire, édifiée en 1409, laisse place à un “bâtiment d’archives” : la chambre du trésor. Dès 1496, on assiste à un réaménagement complet de ce lieu : pose de serrures et de clefs, confection de nouveaux coffres en “noyer aux armes de ladite ville”86, réalisation d’un nouvel inventaire87. Celui-ci, conservé, cite “le grand coffre, a la main senestre en entrant dans ladite chambre, fermant a quatre clefs et quatre serrures”, “le coffre a quatre serures a main destre prés la porte”, “ung petit coffre fermant a quatre clefz, ou sont les armes de la ville”, “le coffre qui est a coté la fenestre a main droite”, “le coffre qui ferme a quatre clefz et deux serrures estant a la main dextre en entrant dans la dicte chambre”88 et d’autres descriptions prolixes permettant une reconstitution fidèle de l’agencement interne du “trésor de la ville”.
37Où se situe le nouveau dépôt municipal ? La réponse se trouve dans l’inventaire des “tiltres estans en la chambre de la ville de Montferrand située au-dessus la chappelle de Estevenot”89. L’indication fournie, loin d’être lacunaire, permet de localiser ce que les consuls nomment désormais la “chambre” ou “trésor” de la ville. En effet, c’est à la chapelle Sainte-Catherine, édifiée en 1457 au pied de la tour nord de l’église Notre‑Dame par le bailli royal Estevenot de Thalauresse90, que font allusion les consuls. La localisation des archives ne fait plus aucun doute ; c’est à l’étage de la tour nord de la collégiale qu’est le trésor de la ville. De fait, il existe deux pièces aménagées dans cette tour, l’une au-dessus de l’autre (au‑dessus de la chapelle Sainte‑Catherine), qui ont pour particularité de porter la marque du pouvoir municipal. En effet, le blason de la ville (lion rampant) – figuré sur le sceau et le contre-sceau de la ville dès 1226 ou dessiné sur la couverture d’un registre de comptes du xive s. (fig. 5‑6) – est représenté sur la clef de voûte de la chambre basse comme de la chambre haute (fig. 7-8).
38Le dispositif est très répandu dans l’Occident médiéval91. Pour Yann Potin, le terme de “trésor” doit être analysé d’après la situation du dépôt d’archives qui est, souvent, au contact rapproché des trésors conservés dans l’église. La proximité, métaphorique ou concrète, de l’arche avec un trésor sacré tendrait à lui conférer pareille qualité92. Tel est sans doute le cas à Montferrand où l’emploi du terme “trésor” ne paraît pas relever de la métonymie, mais d’une volonté de sanctifier les arches et, de facto, leur contenu. La disposition du trésor, plus encore que sa localisation, conforte cette interprétation. L’aménagement de deux pièces (haute et basse), au sein de l’église, vouées à la réception des archives de la ville paraît, une fois de plus, une réplique du trésor de la Sainte Chapelle de Louis IX qui connaît, dès 1318, l’installation du Trésor des chartes au‑dessus des sacristies hautes et basses93. Voilà de quoi conférer au dépôt montferrandais sa qualité de “trésor documentaire”.
39Or, le “trésor” de Montferrand, si bien gardé, finit par tomber dans l’oubli. Le choix de Clermont comme capitale de l’Auvergne par Catherine de Médicis en 1557, le rattachement de Montferrand à Clermont entre 1630 et 1731, la Révolution, sans doute aussi, scellent pour un temps le sort du trésor de la ville94. En effet, il faut attendre le milieu du xixe s. pour que l’on redécouvre les archives de la commune. En 1842, Étienne‑Hormisdas Thévenot, correspondant des Monuments historiques pour le Puy‑de‑Dôme, rédige un rapport sur l’église Notre‑Dame de Montferrand et note :
“Le deuxième étage de la tour sert aux archives de la ville de Montferrand, qui y sont entassées pêle‑mêle dans des bahuts aux armes de France. On remarque dans cette salle […] des registres de comptes de la ville très intéressants, plusieurs chartes, du papier fort ancien et très curieux par sa fabrication. L’insouciance la plus blâmable laisse ces titres intéressants en butte aux intempéries des saisons, dans un local ouvert à tous les vents et mal défendu par un grillage de fer […]. Cela est déplorable, mais ce qui l’est bien davantage, c’est que beaucoup de titres ont disparu. Le classement et le dépouillement de ces archives, qui appartiennent à une ville dont le rôle a été assez actif dans le Moyen Âge, offriraient des renseignements curieux”95.
40Le fonds, transporté à l’hôtel de ville de Clermont, puis aux Archives municipales, a, depuis, été trié, classé et inventorié par Emmanuel Teilhard de Chardin. Celui-ci a consacré la majeure partie de sa carrière à la rédaction de l’inventaire du fonds ancien de Montferrand et offert au public l’une de ces Sommes dont furent si friands les gens du Moyen Âge (1200 pages)96. Le souci de conservation et la minutie déployés, très tôt, par le consulat de Montferrand permettent à l’historien d’aujourd’hui de consulter l’un des plus beaux fonds d’histoire municipale de France avec, notamment, une série quasi-continue de registres de comptes rédigés en ancien occitan (1259‑1388)97 ; juste retour des choses au vu des années consacrées à la constitution de ce “trésor documentaire”.
L’arca communis : une incarnation de la communitas ?
41Après avoir montré l’origine de l’arche de Montferrand, sa fonction, son évolution et comment on aboutit à la construction d’un bâtiment d’archives avec mise en place de pratiques archivistiques, il convient de s’arrêter sur la valeur symbolique de cet attribut particulier dont use le gouvernement urbain. Cette insistance sur le symbole doit être avancée avec prudence dans la mesure où, à Montferrand comme ailleurs, l’arca communis n’est pas un attribut isolé, mais s’insère dans la longue liste des objets utiles au pouvoir municipal.
Garantir l’universitas
42L’arche commune est l’une des marques tangibles de la reconnaissance de la capacité juridique de la communauté urbaine. Si l’arche paraît, à Montferrand, plus que d’autres symboles (clefs, bannières, maison commune), un garant de l’identité et de la puissance du consulat, c’est qu’elle conserve en son sein l’acte de naissance de la commune – les franchises – mais aussi les titres justificatifs de l’ensemble des prérogatives de la ville. On trouve donc dans le coffre, sans surprise, la charte fondatrice (avec ses confirmations) et les privilèges accordés par les seigneurs locaux et les grands du royaume (princes et souverains). À ces documents s’ajoutent les actes législatifs et normatifs de la ville (documents réglementaires) et les actes de l’administration urbaine (comptabilité, délibérations, actes de règlements judiciaires), lesquels font jurisprudence. Citons, par exemple, cet étonnant accord conclu – en novembre 1232 et pour une période de cinq ans – entre les “comunitas urbis Claromontensis et comunitas ville Montisferrandi” au sujet du sort à réserver aux incendiaires et homicides98. Les habitants s’emparent de pouvoirs judiciaires relevant de leurs seigneurs (évêque de Clermont et sire de Beaujeu) dont l’identité est sciemment passée sous silence… Il serait possible de multiplier, à l’infini ou presque, les exemples montrant l’intérêt que porte la communauté pour tout ce qui, dans l’arche, prouve sa capacité juridique.
43L’importance consacrée à l’arche paraît, à Montferrand, plus forte que dans n’importe quelle ville de basse Auvergne. Preuve en est la fréquence de mentions de l’arca dans la documentation. Si l’on s’en tient aux deux autres volets composant le “triptyque urbain des capitales de basse Auvergne”99, seul Montferrand sort son épingle du jeu. Les allusions au coffre de Riom ou de Clermont sont épisodiques (deux ou trois attestations seulement) tandis que celles de Montferrand jaillissent de toutes parts (une cinquantaine avant 1500), ce qui est loin d’être anodin. En effet, la récurrence avec laquelle revient l’arche dans la documentation (et principalement dans les écrits du consulat) prouve combien son existence est précieuse aux yeux de la communitas. L’arche conserve bien sûr la mémoire de la ville, mais garantit surtout son identité et sa capacité juridique. Sans arche, point d’archives ; sans archives, point de preuves et sans preuves, point d’universitas… Or, la commune de Montferrand ne peut en faire l’économie. Ville neuve fondée par le comte au début du xiie s. dans l’orbite de Clermont, ville épiscopale à 2 km, et de Riom, siège de l’administration capétienne à 12 km, Montferrand tire sa force de sa commune qui est la plus ancienne de basse Auvergne. Cette autonomie précoce permet à la ville de s’imposer sur la scène politique locale et d’intégrer le réseau urbain des “bonnes villes”, dont la ville (toujours citée dans le trio de tête) puise autorité, respect et reconnaissance.
44On comprend mieux, dès lors, la part que prend l’arca communis dans l’affirmation du pouvoir municipal. Le coffre commun rappelle, à Montferrand, peut‑être plus que tout autre attribut, l’autonomie des habitants, leur puissance gouvernementale mais aussi la mémoire urbaine.
Mémoire et identité urbaines
45L’institution communale de Montferrand a fait de l’arche (armoire puis trésor) le témoin de la mémoire collective et de l’identité urbaine. Les consuls font montre, par exemple, d’un souci mémoriel certain lorsqu’ils couchent sur le papier les preuves de leur administration comptable et fiscale et lorsqu’ils mettent en place des dispositifs particuliers pour conserver et consulter ces registres. L’intérêt pour “la préservation d’une mémoire institutionnelle, administrative et comptable” est plus que notoire à Montferrand où les écritures comptables sont conservées, en série, depuis le milieu du xiiie s. Or, il existe des liens étroits entre écriture comptable et conservation d’une mémoire100. Les agents municipaux montferrandais qui tiennent et rédigent les comptes de la ville le savent bien qui consignent, régulièrement, des “memorias” à la fin de chaque exercice consulaire.
46Dès le milieu du xive s. au plus tard, les consuls prennent soin de relater les événements majeurs qui ont scandé l’année écoulée. À titre d’exemple, le consulat rédige, en 1372, un chapitre intitulé : “Memorias de toutes les chouses que sont avenues en nostre temps desquelles nous devons fere memories”. L’année suivante, le collège consulaire tient une même rubrique nommée : “S’ensievent les memoires desquelles est neccessités a fere mention per le temps a venir”101. Sous le nom générique de “memorias”, les consuls enregistrent des informations diverses qui, souvent, n’ont pas trait à la fiscalité, mais à l’histoire urbaine. On trouve ainsi le récit de négociations avec le duc (1365), la circulation de livres juridiques (1367), la révocation du sacristain de la collégiale et la nomination des bailes de la charité (1368), la résolution de problèmes sociaux (1372) ou encore le mariage d’une riche bourgeoise avec Pierre de Giat, chancelier du duc de Berry (1373)102. Présentées sous la forme d’alinéas, “las memorias” de Montferrand sont autant de petits chapitres voués à la composition d’une chronique urbaine plutôt que de simples recommandations destinées aux futurs dirigeants de la commune comme le pratiquent, par exemple, les consuls d’Agen avec leurs memoranda103. Avec les “memorias”, c’est une (re)composition de l’histoire et de la mémoire collective qui a lieu à Montferrand et, ce, d’autant plus que la ville ne paraît jamais avoir envisagé la rédaction de cartulaires municipaux.
47Agissant au nom d’une soi‑disant “nécessité”, les consuls montrent combien ils ont conscience de s’inscrire dans le temps et prouvent qu’ils entendent participer à l’élaboration d’une mémoire et d’une identité collectives. La rédaction des registres, la tenue de “memorias”, la conservation des écritures municipales sont autant de preuves soulignant le besoin grandissant de la commune pour l’affirmation d’une identité propre. Les pratiques scripturaires et de conservation de la mémoire font alors écho à des manifestations fédératrices bien connues des villes de la fin du Moyen Âge, comme la communalisation de saints patrons ou encore l’organisation de fêtes et de processions104. Montferrand ne déroge pas à la règle, organisant chaque année la commémoration de sa figure tutélaire : la comtesse “Brayère”, celle qui est à l’origine des coutumes de la fin du xiie siècle105. Une identité urbaine existe à Montferrand et se nourrit de la memoria collective, elle‑même surgissant d’un corpus d’écritures multiples, pareil à une “torah” montferrandaise conservée dans le coffre commun.
Le pouvoir de l’invisible
48Si la matérialité de l’arche ne fait aucun doute – elle a été présentée sous ses diverses formes – demeure la question de sa visibilité. Bien que l’arca soit un attribut majeur du gouvernement urbain, elle n’est réservée qu’à une élite réduite. Son secret et son inaccessibilité sont préservés par un jeu complexe de serrures et de clefs qui apparaissent dans la documentation dès le xiiie s.106. En 1307, les consuls font réparer la serrure et faire “una clau neva a l’archa dal cosolat”. En 1346, il est question d’ajouter “III saralhas en las claus” à l’arche, ce qui porte le nombre total de serrures et de clefs à quatre. La multiplication des contenants sis dans l’arche principale conduit, dans la seconde moitié du xive siècle, à l’apparition d’une fermeture propre à chaque boîte : “le clief de la dicte uche” (1376), “ung petit cofre ferrat sarrant en clauf et en sarralha” (1380). L’apparition de l’armoire consulaire, au début du xve s., ne modifie pas la donne puisque l’on cite encore les “sarralhes et clez” permettant d’y accéder (1409), les “deux sarures que ont esté mises” (1452) ou encore la “saraille et clef mises a l’armaire” (1462). Quant à la salle du “trésor”, il est bien question d’y poser “deux clefz” dès 1496 ; clefs qu’il faut refaire en 1511 car “les autres estoient perdues”107. Il est intéressant de noter que le nombre de clefs permettant d’ouvrir l’arche varie de une à quatre alors que le collège consulaire se compose de huit personnes jusqu’à la fin du xive s. (date à laquelle il est réduit à quatre). Il doit donc exister une distinction hiérarchique entre ceux qui détiennent la clef du coffre et ceux qui ne l’ont pas ! Il faut d’ailleurs attendre 1500 pour que le nombre de clefs soit en adéquation avec le nombre de consuls108. La clef de l’arche est, sûrement, un signe de différenciation sociale puisqu’elle permet d’accéder au sanctuaire mémoriel de la commune, ce qui est un privilège inaccessible au “commun”109.
49Le statut de l’arche commune paraît alors ambivalent ; c’est un attribut qui oscille entre le visible et l’invisible, tantôt mis en évidence, tantôt confidentiel. L’autonomie de la communauté repose, en grande partie, sur des pièces conservées dans un coffre invisible du plus grand nombre. Pourtant, “l’essentiel des chartes (…) prévoit dans leurs protocoles que les documents soient ‘lus, vus et entendus’”. Loin d’être une énumération formelle, la formule souligne l’importance de ces sens au Moyen Âge. La vision est une forme d’appréhension du texte aussi importante que la lecture (réservée à de rares élus)110. Lire à voix haute ou montrer le document, c’est permettre à tous de prendre connaissance des droits urbains. Or, les papiers de la ville ne sortent pas de leur cachette. Ils demeurent, sous clef, à l’ombre de l’arche, ce qui pose la question de la matérialité et de la visibilité des productions scripturaires urbaines. Mais, comme écrivait Montaigne, “il y a certaines choses que l’on ne cache que pour mieux les montrer” (Les Essais – Livre III). À Montferrand, comme sans doute ailleurs, il faut croire avant de voir. Point n’est besoin d’exposer aux yeux de tous l’arche commune pour connaître son existence et accepter sa valeur juridique et symbolique. Voilà qui confère une puissance particulière à l’arca communis et consacre l’existence d’une forme de sacralité laïque au sein de la commune. D’ailleurs, comment ne pas remarquer les rites qui entourent l’accès ou la détention du coffre commun ? Ils sont reçus comme autant de marques de l’honorabilité et du privilège d’édilité de ceux qui peuvent voir et toucher l’arche commune.
50À Montferrand, l’arche communale revêt diverses fonctions et héberge objets et documents en tout genre. Argent, poinçons, reliques et sceaux se joignent aux archives pour former un “tout” que les consuls nomment, à l’orée du xvie s., le “trésor de la ville” ce qui n’a rien d’hasardeux. “L’association entre l’écrit, la relique sacrée et la pierre précieuse au sein du trésor ne procède […] pas d’une simple logique utilitariste de sécurité mais accomplit plutôt la transcription liturgique du modèle du trésor du temple de Jérusalem : la filiation étymologique entre l’archive et l’arche d’alliance […] se mue en assimilation réelle”111. Les Montferrandais, qui en ont bien conscience, font de l’arca communis un des attributs majeurs de leur gouvernement. Et pour cause, l’arche est le garant de la Loi urbaine et renferme l’identité et la mémoire collective de la ville.
51Berceau de la commune et reliquaire de sa mémoire, l’arche n’est pas un tombeau scellé. Ses portes s’ouvrent et se referment fréquemment afin d’assurer la circulation des documents entre élus. Une fois triées, classées et inventoriées, les pièces rangées dans le coffre commun sont autant de preuves de “l’antiquité” du consulat et, partant, de la reconnaissance de l’autonomie de l’universitas. Aussi, pour servir un procès, le scribe n’hésite pas à piocher dans le dépôt communal les preuves utiles à la res publica ; il choisit, alors, telle pièce ou telle autre afin de défendre les prérogatives de la ville et, ce faisant, il rappelle, qualifie et définit la notion d’identité collective.
52L’on comprend, alors, les enjeux que représentent et l’accès à l’arche (apanage de rares privilégiés) et la conservation de son contenu. Preuve en est cette phrase des consuls : “pieces concernans les affaires de la charité et seroit besoing que (…) fussent au tresor de la ville car sont dangereuses de perdre”112. Cette préoccupation de la conservation traduit la nécessité de prouver, mais aussi la capacité du gouvernement urbain à anticiper et à se projeter dans d’éventuels conflits. L’arche n’est pas qu’un réceptacle du passé, c’est un pari sur l’avenir, une assurance sur le futur. Le coffre commun renferme les fondements de la commune autonome, mais aussi les piliers de son avenir. En tant que garante de l’identité et de la mémoire collectives, l’arca communis paraît l’alpha et l’omega de la communauté montferrandaise. “Archa” devenue armoire, armoire devenue trésor, les consuls de Montferrand font de l’un de leurs attributs de gouvernement un bâtiment d’archives, renfermant un “monument d’histoire” : leur histoire.
Bibliographie
Sources éditées
Lodge, R. A., éd. (1985) : Le plus ancien registre de comptes des consuls de Montferrand en provençal auvergnat, 1259-1272, Clermont-Ferrand.
Lodge, R. A. (2006) : Les comptes des consuls de Montferrand (1273-1319), Paris.
Lodge, R. A. (2010) : Les comptes des consuls de Montferrand (1346-1373), Paris.
Lodge, R. A. (à paraître) : Les comptes des consuls de Montferrand (1378-1385), Paris.
Bibliographie
Bedos, B.-M., éd. (1980) : Les sceaux des Villes, in : Corpus des sceaux français du Moyen Âge, t. 1, Archives nationales, Paris.
Bertrand, P. (2009) : “À propos de la révolution de l’écrit (xe-xiiie siècle). Considérations inactuelles”, Médiévales, 56, 75-92.
Bertrand, P. (2015) : Les écritures ordinaires. Sociologie d’un temps de révolution documentaire (1250‑1350), Paris.
Billoré, M. et J. Picot, dir. (2014) : Dans le secret des archives. Justice, ville et culture au Moyen Âge : sources et commentaires, Rennes.
Boucheron, P. et J.‑P. Genet, dir. (2013) : Marquer la ville. Signes, traces, empreintes du pouvoir (xiiie‑xvie siècle), Actes de la conférence organisée à Rome (2009), Paris - Rome.
Boudet, M. (1908) : “Note sur le commencement de l’invasion anglaise en Auvergne pendant la guerre de Cent ans”, Bulletin Historique et Scientifique de l’Auvergne, 28, 21-48.
Boudet, M. (1909) : Cournon, ses franchises et ses chartes (avant 1244 et mai 1244), Paris.
Carraz, D., dir. (2014) : Les établissements hospitaliers dans le Massif Central et ses périphéries au Moyen Âge : territoires et réseaux, Clermont-Ferrand.
Charbonnier, P. (1996) : “La charte de Montferrand (traduction et explication)”, in : Teyssot, dir. 1996, 5-23.
Chiffoleau, J., C. Gauvard et A. Zorzi, dir. (2007) : Pratiques sociales et politiques judiciaires dans les villes de l’Occident à la fin du Moyen Âge, Rome.
Delaborde, H.-F. (1902) : “Les bâtiments successivement occupés par le Trésor des chartes”, Mémoires de la Société de l’Histoire de Paris et de l’Île-de-France, 29, 159-172.
Delsalle, P. (1998) : Une histoire de l’archivistique, Québec.
Duby, G., dir. (1980-1985) : Histoire de la France urbaine, Paris.
Dutour, T. (2014) : “Les génies invisibles de la cité. Recherche sur les espaces et les mots de la participation à la vie publique dans quelques villes de l’espace francophone de langue d’oïl à la fin du Moyen Âge (xiiie‑xve siècle)”, in : Boucheron & Genet, dir. 2013, 463-481.
Fournier, G. (1973) : Châteaux, villages et villes d’Auvergne au xve siècle, d’après l’armorial de Guillaume Revel, Genève.
Galland, B., J. Briand, L. Dauphant, A. Gallo et D. Lannaud (2009) : “Constitutions d’archives”, in : SHMESP 2009, 317‑340.
Garnier, F. (2006) : Un consulat et ses finances. Millau (1187‑1461), Paris.
Garnier, F. (2014) : “Livres de comptes, mémoire et identité urbaines dans le Midi de la France au Moyen Âge”, in : Gilli & Salvatori, dir. 2014, 21-39.
Gauvard, C. (2007) : “Droit et pratiques judiciaires dans les villes du nord du royaume de France à la fin du Moyen Âge : l’enseignements des sources”, in : Chiffoleau et al., dir. 2007, 33-79.
Gilli, P. et E. Salvatori, dir. (2014) : Les identités urbaines au Moyen Âge. Regards sur les villes du Midi français, Actes du colloque de Montpellier (8-9 décembre 2011), Turnhout.
Guyotjeannin, O. et Y. Potin (2004) : “La fabrique de la perpétuité. Le trésor des chartes et les archives du royaume (xiiie-xixe siècle)”, Revue de Synthèse, 125, 5e série, 15-44.
Richard, O., dir (2010) : Religion civique xve-xvie siècle, Histoire urbaine, 27.
Lavaud, S. (à paraître) : “Entre normes et pratiques ; les memoranda d’Agen, passeurs de mémoire”, in : Statuts, écritures et pratiques sociales dans les sociétés de la Méditerranée occidentale à la fin du Moyen Âge (xiie‑xve siècle), 3e rencontre de l’ÉFR (25-26 juin 2015) : “Statuts et paysage documentaire”.
Lodge, R. A. (2011) : “La maison du consulat à Montferrand et la maison du Saint-Esprit”, Bulletin Historique et Scientifique de l’Auvergne, 112/1, no 788‑789, 105-118.
Marichal, P. (1932) : “Nécrologie. Emmanuel Teilhard de Chardin”, Bibliothèque de l’École des chartes, 93, 416-417.
Morsel, J. (2000) : “Ce qu’écrire veut dire au Moyen Âge… Observations préliminaires à une étude de la scripturalité médiévale”, Memini. Travaux et documents de la Société des études médiévales du Québec, 4, 3-43.
Pépin, G., F. Lainé et F. Boutoulle, dir. (2016) : Routiers et mercenaires pendant la guerre de Cent ans. Hommage à Jonathan Sumption, Ausonius Scripta Mediævalia 28, Bordeaux.
Picot, J. (2012) : “La Purge : une expertise juridico-médicale de la lèpre en Auvergne au Moyen Âge”, Revue historique, 314/2, no 662, p. 291-321.
Picot, J. (2014) : “Les léproseries d’Auvergne au Moyen Âge : politique d’assistance et structuration du territoire”, in : Carraz, dir. 2014, 83‑94.
Picot, J. et J. Teyssot (2014) : “Les villes d’Auvergne et le roi : Montferrand au xiiie siècle”, in : Billoré & Picot, dir. 2014, 221-250.
Potin, Y. (2005) : “Archives en sacristie. Le trésor est-il un bâtiment d’archives ? Le cas du ‘trésor des chartes’ des rois de France (xiiie-xixe siècle)”, Livraisons d’histoire de l’architecture, 10, 65-85.
Prétou, P. (2016) : “Les voisins contre la route : réactions et imprécations communautaires en Gascogne face aux bandes armées pendant la guerre de Cent ans”, in : Pépin et al. 2016, 133‑146.
Ranquet, H. et E. du (1969) : Montferrand, ses vieilles pierres. Château, remparts, église, logis, Clermont-Ferrand.
Richard, O. (2009) : Mémoires bourgeoises. Memoria et identité urbaine à Ratisbonne à la fin du Moyen Âge, Rennes.
Rigaudière, A. (1982) : Saint-Flour ville d’Auvergne au bas Moyen Âge : étude d’histoire administrative et financière, Paris.
Rigaudière, A. (1993a) : “Universitas, corpus, communitas et consulatus dans les chartes des villes et bourgs d’Auvergne du xiie au xve siècle”, in : Rigaudière, dir. 1993b, 21-51.
Rigaudière, A., dir. (1993b) : Gouverner la ville au Moyen Âge, Paris.
SHMESP (2009) : L’autorité de l’écrit au Moyen Âge (Orient-Occident), Actes du xxxixe Congrès de la SHMESP (Le Caire, 2008), Paris.
Tardieu, A. (1870-1871) : Histoire de la ville de Clermont-Ferrand, Moulins.
Teilhard de Chardin, E. (1902-1922) : Inventaire sommaire des archives communales antérieures à 1790 : ville de Clermont-Ferrand : fonds de Montferrand, Clermont-Ferrand, 2 vol.
Teyssot, J. (1993) : “Les relations seigneurs-villes : le cas des trois “capitales” de basse Auvergne, Clermont, Riom et Montferrand du xiie au xve siècle”, in : Seigneurs et seigneuries au Moyen Âge, 117e Congrès National des Sociétés Savantes (Clermont-Ferrand 1992), Paris, 319-329.
Teyssot, J. (1997) : “Le mouvement communal en Auvergne, xiie-xve siècle”, Annales du Midi, CCXVIII, Toulouse, 201-210.
Teyssot, J. (1999) : Riom 1212-1557. Capitale et Bonne Ville d’Auvergne, Nonette.
Teyssot, J., dir. (1996) : Montferrand 1196-1996. Conférences données pour le viiie centenaire de la charte de franchises, Clermont-Ferrand.
Teyssot, J. et T. Wanegffelen (2001) : Histoire de l’Auvergne, Rennes.
Thévenot, É.-H. (1842) : “Rapport spécial, sur l’église de Montferrand, à M. le Ministre de l’Intérieur”, Annales scientifiques, littéraires et industrielles d’Auvergne, 15, 415‑436.
Thiolier, C. (1995) : Montferrand. Institutions consulaires, vie quotidienne (xve, xvie, xviie siècles), Paris.
Vauchez, A., dir. (1995) : La religion civique à l’époque médiévale et moderne (chrétienté et islam), Rome.
Notes de bas de page
1 AD Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép. fonds 2, FF 10, cote 4 (“aux sceaux”). Sauf mention contraire, toutes les cotes citées ensuite sont issues du fonds de Montferrand (“3 E 113 dép. fonds 2”) conservé aux Archives départementales du Puy-de-Dôme.
2 Rigaudière 1993a, 31.
3 II 1, pièce 2, fol. 11.
4 Les Montferrandais obtiennent une charte de coutumes vers 1196-1198 (confirmée en 1249, vidimée en 1273). En 1291, le seigneur octroie une nouvelle charte contenant une vingtaine d’articles supplémentaires. AA 1 (1273) et AA 3 (1291).
5 AA 2, pièces 1-3 (1291).
6 Fournier 1973, 79.
7 Charbonnier 1996, 5-23.
8 Picot & Teyssot 2014, 221-250.
9 Rigaudière 1993a, 36.
10 AN, J 421, no 1 (février 1226 n. st.).
11 Teyssot 1999, 114.
12 Delsalle 1998, 102 ; Billoré & Picot 2014, 16 et 4e de couverture ; Galland et al. 2009, 317‑340.
13 Teyssot 1997, 201-210.
14 Bertrand 2009, 75 et Bertrand 2015.
15 Charbonnier 1996, 9.
16 Duby 1980, t. 2, 267.
17 Garnier 2006, 158-160.
18 Teyssot 1999, 114.
19 Lodge, éd. 1985, 92.
20 Id., 103.
21 Galland et al. 2009, 324.
22 CC 170, fol. 33, 45 et 117.
23 FF 11, pièce 11.
24 Bertrand 2009.
25 CC 170, fol. 117.
26 Garnier 2006, 347.
27 Lodge, éd. 2006, 8 et 130.
28 Lodge, éd. 2010, 380.
29 CC 165, fol. 131 (1377) et CC 170, fol. 146 (1383).
30 Rigaudière 1982, t. I, 121.
31 CC 170, fol. 33 et 117 (1379, 1383).
32 Picot 2012, 291-321.
33 CC 170, fol. 33, 45 et 117 (1379-1383).
34 Sur la thésaurisation des matrices sigillaires “réformées”, voir l’article de L. Macé et celui de L. Germain et J. Petrowiste, dans ce volume.
35 Lodge, éd. 2016 (à paraître).
36 CC 170, fol. 33, 45 et 117 (1379-1383).
37 II 1, pièce 2, fol. 9.
38 CC 165, fol. 53v : “en l’archa de cosolat son las relequias de la chapela de S. Gorge prés d’Ysoyere”. Picot 2014, 86.
39 II 1, pièce 2, fol. 9v.
40 CC 170, fol. 33 et 45 ; Lodge, éd. à paraître.
41 CC 165, fol. 109v : “avons baillé a messire Rotbert Fornet, vicaire d’Erbers, (…) les reliques que s’ensievent (…) un chapse de corne en laquelle avoit certaine quantité de ousses de sant Lazer envoulpés de sante. Item unes autres reliques de la Marie Magdalene envoulpeez de sante ; lesquellez il a promis bien et dehuement garder et icelles rendre et delivrer aus consouls quant par leur en sera requis”.
42 CC 165, fol. 76.
43 Thiolier 1995, 157.
44 Vauchez 1995 ; Richard, dir. 2010.
45 Garnier 2014, 25.
46 Les consuls de Najac dressent des inventaires dès 1260. Voir l’article de L. Germain et J. Petrowiste, dans ce volume, p. 137.
47 CC 170, fol. 33, 45 et 117.
48 II 1, pièce 2, fol. 10v : “Dans ung sac intitulé : ‘Sac des vidimus’ a esté mis ce que s’ensuyt” et fol. 15 : “Plus a esté mis dans ledit coffre ung autre sac intitulé : ‘Pieces de l’antiquité du seel royal estably a Montferrand’” ; II 1, liasse 3, pièce 2, fol. 2v : “Dans un sac long ou est escript sur la toele : ‘De la Purge’”, et fol. 3 : “Dans ung autre sac intitulé par ces motz : ‘Le sac ou sont letres, tiltres et enseignements touchant le fait de la charité’”.
49 CC 214, fol. 5 : “Plus les certifficacions et quictances marqués en teste par : Ave, Maria, gracia, plena, dominus, tecum, benedicta, tu …” (1497).
50 CC 226, registre 2, fol. 6-7 (“couctée par ‘noster’”, “couctées par ‘qui’”, “couctées par ‘celys’”) ; CC 372, pièce 18 (Pater) ; GG 36, registre 1, fol. 5 (noster, cui, es, in celis).
51 CC 170, fol. 151v et 166 (1384-1385) ; II 1, pièce 2, fol. 6 (début xvie s.).
52 CC 170, fol. 151v : “en l’archa de cossolat dins una cayssa longa de Monpeleyr”, fol. 156 : “la qual caysa es dins l’archa de cossolat”, “dins la dicta cayssa en l’archa de consolat” et fol. 156v : “dins la cayssa de cossolat li quals es dins l’archa” (1383-1384).
53 Sur l’évolution des pratiques et lieux de conservation des archives voir Delaborde 1902, 159-172.
54 Lodge, éd. 2006, IV.
55 Lodge, éd. 1985, 92.
56 Lodge, éd. 2006, 8 et 25.
57 Id., 51 et 94 ; Lodge, éd. 2010, 5.
58 AA 1 et II 1, pièce 2, fol. 23.
59 II 1, pièce 2, fol. 4v et 12.
60 Gauvard 2007, 77.
61 Lodge, éd. 1985, 92 ; Lodge, éd. 2006, 8 et 25.
62 Lodge, éd. 2006, 94.
63 CC 165, fol. 98.
64 CC 170, fol. 76 (1381).
65 CC 165, fol. 114v.
66 L’expression fait écho au titre de l’article d’É. Jean-Courret, dans ce volume.
67 Lodge, éd. 2011, 108-111.
68 Dutour 2014, 479.
69 GG 38, dossier “St-Robert”, pièce sans sous cote, fol. 2v (10 juillet 1496).
70 Lodge, éd. 1985, 38-39 ; Lodge, éd. 2011, 108.
71 Potin 2005, 65.
72 Guyotjeannin & Potin 2004, 22.
73 Sur le remplacement du coffre par l’armoire, voir Delsalle 1998, 103-105.
74 CC 175, fol. 19v (19 novembre 1409) ; CC 185, fol. 93-94 (25 mars et 28 avril 1452) ; CC 187, fol. 3 et 6v (20 janvier et 5 avril 1462) et FF 11, pièce 11 (5 août 1421).
75 Boudet 1908, 21-48 ; Teyssot 1999, 156-157.
76 Dans une autre lettre, datée du 9 mars 1388 (n. st.), le duc de Berry rapporte : “les consulz, manans et habitans de notre ville de Montferrant, en notre pays d’Auvergne, nous ont fait exposer que comme samedi VIIIe jour de fevrier darrnier passé, deux heures avant jour, notre dicte ville de Montferrant ait esté, par les Anglois et ennemis de mondit seigneur et de nous, prise et occuppée, pillée, desrobée et irreparablement domagié et, en oultre, plusieurs gens, tant effans mineurs d’aage comme autres de ladicte ville, aient par les diz ennemis esté emprisonnés et les aucuns mors et les autres bleciez et maltraictiez”. AA 13, pièces 3 et 5 (1389, 1390) ; CC 4, pièce 6 (1388).
77 Sur le rapport entre les communautés et les gens de guerre, voir Prétou 2016, 133-146.
78 Potin 2005, 69.
79 Boudet 1909, 105 et 119-120.
80 Tardieu 1870-1871, t. I, 478.
81 Delsalle 1998, 97.
82 AA 5, fol. 1.
83 Voir le texte de V. Challet, dans ce volume, p. 185.
84 CC 371, pièce 27, fol. 1.
85 CC 187, fol. 31 : “charcher les tiltres de la ville (...) a la chambre du tressor” (1528) ; FF 70, pièce 11 : “les pieces neccessaires furent trouvées (…) en la chambre du trezor” (1540) ; CC 257, registre 1, fol. 31-32 : “avoir mys au trezor de la ville les tiltres” (1544).
86 CC 375, pièce 39, fol. 1v (30 janvier 1500 n. st.).
87 Thiolier 1995, 161-162.
88 II 1, pièce 2, fol. 4v, 13, 22v, 28v et 81v.
89 II 1, liasse 3, pièce 2, fol. 1.
90 Ranquet 1969, 110.
91 Delsalle 1998, 99.
92 Potin 2005, 68.
93 Potin 2005, 72-73 et 76.
94 Teyssot & Wanegffelen 2001, 35-41.
95 Thévenot 1842, 424-425.
96 Teilhard de Chardin 1902-1922 ; Marichal 1932.
97 Lodge, éd. 2006, III-VIII.
98 AA 10, pièce 1. Sur ce document voir l’analyse d’E. Grélois, dans ce volume.
99 Teyssot 1993 ; Teyssot 1999, 388 et 4e de couverture.
100 Garnier 2014, 24-25.
101 CC 165, fol. 100v et 109.
102 CC 165, fol. 49, 54, 63, 102v et 109.
103 Lavaud à paraître.
104 Richard 2009, 267-283.
105 CC 169, fol. 19 (1373), CC 179, fol. 40 (1438) ou CC 371, pièce 1, fol. 5v (1496).
106 Lodge, éd. 1985, 103 ; Lodge, éd. 2006, 130.
107 Lodge, éd. 2006, 51 ; CC 162, fol. 6v ; CC 165, fol. 124v ; CC 170, fol. 64 ; CC 175, fol. 19v ; CC 185, fol. 93 ; CC 187, fol. 3 ; CC 371, pièce 27, fol. 1. ; CC 387, pièce 1, fol. 5v.
108 CC 375, pièce 39.
109 Sur les clefs, voir le texte de S. Lavaud, dans ce volume.
110 Morsel 2000, 19.
111 Guyotjeannin & Potin 2004, 24.
112 II 1, pièce 2, fol. 84v.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Le bazar de l’hôtel de ville
Ce livre est diffusé en accès ouvert freemium. L’accès à la lecture en ligne est disponible. L’accès aux versions PDF et ePub est réservé aux bibliothèques l’ayant acquis. Vous pouvez vous connecter à votre bibliothèque à l’adresse suivante : https://0-freemium-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/oebooks
Si vous avez des questions, vous pouvez nous écrire à access[at]openedition.org
Référence numérique du chapitre
Format
Référence numérique du livre
Format
1 / 3