Lieux de culte, réseaux divins, statues et reliefs “cultuels” : la cité de Vienne au Haut-Empire
p. 51-76
Texte intégral
1Si de nombreux travaux récents ont abordé les panthéons civiques des Trois Gaules et des Germanies1, les lieux de culte de la province de Gaule Narbonnaise n’ont pour l’heure pas fait l’objet de grandes synthèses : une exception notable est constituée par l’ouvrage de Raphaël Golosetti, qui a permis de mieux comprendre l’évolution des sanctuaires et le paysage religieux de la vallée du Rhône et des Alpes2. Les études de type monographique consacrées à des cités ou à des divinités singulières sont en revanche plus nombreuses, mais elles privilégient le plus souvent un type de sources (inscriptions, temples ou offrandes votives), sans offrir un tableau exhaustif des traces archéologiques des pratiques cultuelles. En particulier, les témoignages iconographiques et épigraphiques font encore trop souvent l’objet d’études séparées, ce qui entrave toute réflexion d’ensemble de manière particulièrement préjudiciable. Certes l’ampleur de la documentation – et de la tâche – pour la vingtaine de cités que comptait la Prouincia est un élément d’explication : il demeure que les cités de Narbonnaise offrent du point de vue de l’étude des cultes des ensembles documentaires encore en partie sous-exploités.
2Précocement et intensément romanisée, la cité des Allobroges et son chef-lieu, la colonia Iulia Augusta Viennensium, colonie de droit latin fondée par Octavien et promue au rang de colonie romaine honoraire sous Caligula, est l’une des plus opulentes et éminentes villes de la province, capable de rivaliser avec la capitale des Gaules toute proche. Elle est la ville de tous les superlatifs : ornatissima et ualentissima, comme la désigne Claude dans son discours de Lyon3, elle possède la plus grande enceinte de la Gaule4, le seul stade de la province5 et une panoplie monumentale exceptionnelle à tous égards. La colonie de Vienne représente de ce point de vue un cas d’étude emblématique, en raison de l’ancienneté de ses relations avec Rome, de l’étendue de son territoire – 14 000 km2, ce qui en fait l’une des plus grandes de la Gaule6 – de la richesse de la documentation7, de l’excellente conservation de sa parure monumentale, mais aussi en raison des nombreuses publications qui lui ont été consacrées à la suite de l’importante monographie d’A. Pelletier8. Or en dépit de ces conditions d’étude très favorables, le panthéon civique de la cité des Allobroges n’a jamais fait l’objet d’une réflexion globale approfondie et l’histoire religieuse de Vienne à l’époque impériale reste encore largement à écrire9.
3Le territoire de la cité de Vienne comportait un maillage important d’agglomérations urbaines dont certaines peuvent être identifiées comme des uici : parmi les principales figurent Genaua/Genève, Augustum/Aoste10, Boutae/Annecy, Cularo/Grenoble, Aquae/Aix-les-Bains ou encore Albinnum/Albens, ainsi qu’un pagus Dia[- - 11(fig. 1). La richesse documentaire pour le seul chef-lieu est aussi impressionnante que problématique : pour donner une idée de l’ampleur des difficultés méthodologiques, il suffit de rappeler que des dix-sept lieux de culte attestés à Vienne par des vestiges archéologiques12 (fig. 2), seul le temple d’Auguste et de Livie13 peut être identifié avec certitude ; pour un petit nombre d’entre eux, le titulaire divin peut être déduit de certaines dédicaces ou éléments de statuaire – par exemple un temple d’Apollon grâce à une série de chapiteaux ornés de serpents enroulés autour d’un trépied14 – tandis que la plupart demeurent totalement anonymes. Les inscriptions relatives aux prêtrises15 – en particulier aux flaminats, attestés en nombre relativement important – restent en réalité notre source la plus fiable pour connaître le panthéon officiel : elles révèlent que les grands cultes publics de la cité étaient ceux de Mars, de la Jeunesse et des membres de la famille impériale, qui étaient vénérés de leur vivant ou à titre posthume selon des modalités très variées. Sont également attestés Mercure, Apollon, Jupiter et Junon, les Dioscures, Mithra ou encore Hercule : or tous ces dieux n’ont peut-être pas bénéficié d’un temple monumental, et il n’est sans doute pas légitime de vouloir identifier le lieu de culte d’une divinité sur la seule base d’un témoignage figuré ou d’une dédicace. En première lecture, et comme il est normal pour une colonie, le panthéon viennois est dominé par ce que W. van Andringa désigne comme “les cultes représentatifs de l’État et du pouvoir romain établi sur le monde”16.
4Dans le cadre restreint de cette étude, une synthèse n’est évidemment pas envisageable ; néanmoins, puisque le présent volume se donne pour objectif “d’explorer les réseaux polythéistes, tels qu’ils sont attestés dans un contexte donné17”, il semble pertinent de réfléchir à l’articulation des textes épigraphiques, des monuments conservés et des documents iconographiques et à l’apport spécifique des documents figurés à la compréhension des identités divines et des réseaux divins. Quatre types de sources seront sollicités en priorité : les statues, en particulier les statues colossales de divinités attestées en nombre particulièrement élevé (il s’agit du lot le plus important de toute la Narbonnaise et peut-être des Gaules), les fragments d’autels monumentaux18, les bases inscrites de statues divines et enfin les inscriptions mentionnant la dédicace de statues19. En croisant les données issues de ces différents supports, il n’est pas seulement possible de mieux cerner les rites, les composantes architecturales des sanctuaires, leur richesse décorative ou leurs phases d’aménagement successives ; elles offrent surtout l’opportunité d’une réflexion méthodologique sur l’identification des statues cultuelles ou votives et sur la cohabitation d’une multiplicité d’images divines révélatrices de liens et de réseaux, sur la valeur des contextes archéologiques, sur le rôle que les images ont pu jouer dans l’expression visuelle et rituelle des associations divines.
5Le propos sera centré sur le Haut-Empire, pour lequel les sacerdoces et les lieux de culte sont mieux connus, et sur un petit nombre de dossiers où la statuaire a été placée au cœur du débat sur le lieu de culte auquel elle est censée se rattacher ou sur la nature de la potestas de la divinité représentée : le Capitole, les réseaux de dea Vienna, les caractéristiques du Mars viennois et l’intégration des empereurs divinisés dans le panthéon civique.
Architecture et statuaire : le dossier évanescent du Capitole
6Dans une colonie romaine, le culte de la triade capitoline est attendu et même requis, si on en croit les prescriptions des lois coloniales, en particulier la loi d’Vrso20. Or cela n’implique pas l’existence d’un Capitole monumental ; en outre ce culte capitolin est particulièrement évanescent à Vienne. Seules quatre inscriptions mentionnent en effet Iuppiter Optimus Maximus : deux ex-voto de nature inconnue, le socle d’une statuette également dédiée à Venus Augusta, enfin le couronnement d’un autel figuré découvert et conservé à Agnin, au sud de la capitale de cité21, qui réunit les bustes des “protecteurs sidéraux de la semaine” (Junon, Mars, Neptune, Diane, Mercure, Minerve) autour de celui de Septime Sévère.
7En 1975, des découvertes fortuites sur la colline Sainte-Blandine, à l’arrière de la colline de Pipet mais à l’intérieur de l’enceinte urbaine, conduisent au dégagement d’un monument luxueusement décoré, dont la construction a nécessité l’aménagement d’une terrasse, creusée dans le versant nord-occidental de la colline22. L’édifice prenait place au terme de la séquence monumentale et scénographique qui comportait en contrebas le théâtre, puis le grand sanctuaire impérial de la colline de Pipet et enfin un possible stade23, lui-même associé à un portique. La monumentalité des espaces a conduit à identifier un quartier à caractère public, comportant une succession de lieux de spectacle et de lieux de culte pour lesquels on peut légitimement supposer une forte interdépendance.
8L’édifice de Sainte-Blandine constituait plus précisément l’élément central d’une séquence de trois “salles d’apparat”, toutes dotées de pavements luxueux et disposées le long du vaste portique ; d’une largeur de 14,60 m pour une longueur conservée de 13 m (mais elle devait atteindre 30 m24), il possédait un sol en opus sectile composé de 209 dalles de Porta Santa et d’Africano, encadrées par une bordure en calcaire jaune25. Le mur de fond accueillait un imposant massif de maçonnerie (1,85 m x 3,65 m) qui a été interprété comme un socle de statue ou de groupe statuaire. A. Pelletier, qui a dirigé les investigations archéologiques, y a immédiatement reconnu un sanctuaire, notamment sur la foi des statues fragmentaires qui y ont été découvertes26. Cet ensemble représente un cas intéressant de lieu de culte dont le titulaire est inconnu faute de mentions épigraphiques, et où les fragments de statuaire se sont substitués à l’information écrite dans l’interprétation. Dans quelle mesure cette démarche est-elle légitime dans ce cas précis ?
9C’est sur le sol dallé qu’ont été découverts de nombreux fragments de statues colossales, dont le plus remarquable est une tête féminine diadémée en marbre27 (figs. 3-4). Haute de 1,06 m de la base du cou au sommet du diadème, cette tête à bouchon d’encastrement oblige à restituer une statue d’une hauteur dépassant initialement cinq mètres28 si la déesse était représentée debout. Le format colossal, la présence du diadème et le caractère matronal de la représentation ont conduit A. Pelletier à reconnaître Junon.
10L’hypothèse d’un groupe statuaire placé sur la banquette maçonnée paraît confortée par le lieu de découverte des autres fragments, dispersés en avant de ce massif : un avant-bras droit29 (fig. 5), une jambe droite et un pied chaussé30 (fig. 6) ayant appartenu à une même statue masculine. Des fragments de draperie en calcaire31 viennent compléter l’ensemble, qu’A. Pelletier n’hésite pas à identifier comme un groupe cultuel capitolin – le pied chaussé étant attribué à Jupiter et Minerve n’étant “reconnaissable” qu’au travers des draperies.
11Si la situation privilégiée de ce bâtiment dominant le paysage urbain, le luxe de sa décoration et la colossalité de ce qui semble être un groupe cultuel constituent des arguments favorables, les implications d’une telle proposition ne sont pas minces. Depuis lors, l’identification de l’édifice a été accueillie avec un certain scepticisme par R. Robert32 puis par R. Golosetti, qui préfère parler avec prudence d’un “édifice de type basilical”33.
12Puisque la planimétrie ne fournit aucun indice, l’identification repose tout entière sur l’analyse de la statuaire : mais peut-on retenir les identifications proposées ? En premier lieu, l’hypothèse d’une triade capitoline semble mise à mal par le fait que, contrairement à ce qu’a proposé A. Pelletier, aucun des fragments ne peut être attribué avec certitude à une statue de Jupiter34 : en effet le pied chaussé d’une sandale a appartenu à une jambe dénudée jusqu’au niveau du genou ; le fragment n’est d’ailleurs pas cassé à cet endroit, la statue était simplement assemblée, en raison de ses dimensions, à partir de pièces sculptées séparément ; le recours à cette technique composite est confirmée par le plan de collage visible sur la partie antérieure du pied, qui était elle-même rapportée. Composites, les statues étaient peut-être aussi polylithes – associant plusieurs pierres, comme le suggèrent les fragments de draperie en calcaire découverts à proximité35 – voire acrolithes36. Comme la jambe est dénudée jusqu’au niveau du genou, il paraît exclu que la statue ait appartenu à une statue de Jupiter, qui était toujours représenté avec le bas du corps drapé et portait, comme Zeus, des sandales à la grecque37 ; la jambe conservée provient plus vraisemblablement d’une statue cuirassée colossale en pied. Parmi les dieux cuirassés, on pense en priorité au type de Mars Ultor largement diffusé à partir d’Auguste ; néanmoins celui-ci porte le plus souvent des cnémides et chausse des bottines de type mullei ou, de nouveau, des sandales de type grec38, ce qui n’est pas le cas ici. Une seconde hypothèse consiste à y voir la représentation d’un empereur, comme l’ont proposé à juste titre D. Terrer et R. Robert39.
13Les fragments de draperies en calcaire issus du même contexte n’autorisent aucune autre proposition40. Dans l’état actuel de la documentation, il faut donc s’en tenir à l’identification d’un groupe bipartite, associant une divinité féminine à un empereur cuirassé, dans une salle à probable destination cultuelle intégrée à un complexe plus vaste.
14Mais si on peut exclure l’hypothèse d’une triade capitoline, l’identification avec Junon demeure-t-elle valide ? Si J. J. Hermann et R. Newman envisagent Diane ou Vénus aussi bien que Junon41, la proposition d’A. Pelletier a été retenue par les auteurs du Nouvel Espérandieu sur la foi d’un rapprochement avec la Junon Ludovisi42. Les deux œuvres ont en effet en commun de figurer une divinité féminine diadémée selon un format colossal, mais la comparaison demeure générique et surtout, plusieurs détails iconographiques permettent de mieux situer la tête de l’Vrbs ; l’infula qui orne sa chevelure a conduit à y reconnaître une représentation idéalisée d’Antonia Minor, mère de Claude, identification qui fait pratiquement l’unanimité aujourd’hui. Les traits impersonnels de la tête viennoise ne permettent pas d’exclure totalement la représentation d’une impératrice divinisée ; dans ce cas, à côté d’Antonia, dont une effigie colossale est déjà attestée au théâtre de Vienne43, seule Livie serait réellement envisageable avec une telle coiffure. Loin d’être un ensemble “capitolin”, le groupe de Sainte-Blandine pourrait être, dans cette perspective, un cycle statuaire impérial.
15En réalité, certaines observations techniques permettent d’aller un peu plus loin. En premier lieu, le diadème se termine du côté gauche par une volute sculptée très inhabituelle pour ce genre de représentation (fig. 7a) ; en outre, on note la présence, à l’arrière du diadème, de cavités de fixation destinées à recevoir des éléments rapportés, probablement en métal car les mortaises sont de dimensions assez modestes (fig. 7b). Ces éléments garantissent la présence, à l’origine, de compléments susceptibles de préciser l’identification de la divinité figurée. Si la volute est le vestige d’un casque en partie rapporté, ce dernier devait être de faible volume, de type attique peut-être, et appelle une comparaison avec certaines représentations de Roma. Une contamination de l’iconographie de cette déesse par celle d’Héra/Junon est attestée dès les premiers moments du Principat dans la partie hellénophone de l’empire : dans le temple de Rome et d’Auguste de Caesarea Maritima, l’empereur était figuré comme le Zeus d’Olympie et Roma d’après l’Héra d’Argos44 ; une “confusion” avec une représentation de Junon est donc tout à fait compréhensible. Parmi les témoins archéologiques du culte de la déesse associé à celui des empereurs, la statue colossale du temple du forum de Leptis Magna compte parmi les plus impressionnants45 ; le visage et la coiffure sont proches de ceux de la tête viennoise ; néanmoins à Vienne, la forme incurvée du diadème à l’avant diffère nettement de celle que revêt la tête lepcitaine ; en outre, les longues mèches bouclées retombant de part et d’autre du cou semblent s’opposer à une telle hypothèse de restitution. En revanche on pourrait rapprocher la tête colossale de Vienne de celle d’une statuette en marbre découverte dans une domus de la ville46 : ce qui apparaît comme un diadème en vue frontale est en fait un casque doté d’un couvre-nuque et orné de deux volutes latérales (fig. 8).
16Néanmoins A. Pelletier avait lui-même envisagé une autre identification pour la tête féminine, avant de la rejeter au profit de Junon : ayant remarqué les cavités de fixation, il avait alors proposé de restituer une couronne tourelée, caractéristique des représentations de Tutela et des personnifications de cités, avant d’écarter cette possibilité en raison de la taille des mortaises, qui lui semblaient trop faibles pour accueillir un attribut très imposant. Il supposait que cet élément rapporté était particulièrement monumental sur la base d’une comparaison avec la célèbre statue dite “Tutela de Vienne”47 (fig. 9) : il estimait en effet à 0,50 m la hauteur du calathos à restituer48. Or le lien qu’il établit avec cette œuvre est sans doute trop contraignant : cette dernière provient en effet de l’Isère, près de la zone occupée par l’édifice thermal connu sous le nom de “Palais du Miroir”, qui réunissait des statues de formats, sujets et époques très divers, pour une partie en situation d’exposition secondaire ; si la statue figure indubitablement une Tychè, rien ne prouve qu’elle ait représenté la divinité tutélaire de Vienne en particulier. Il demeure que l’hypothèse d’un diadème tourelé pour rendre compte du dispositif visible sur la partie sommitale du crâne demeure intéressante ; si on se détache de l’image de la cosidetta “Tutela de Vienne”, il peut être pertinent d’envisager une attribution à la déesse Vienna, dont le culte est amplement attesté par ailleurs dans la capitale de cité.
De Junon à Vienna ?
17Le dossier documentaire relatif à la divinité est assez fourni, quoique très hétéroclite. Le témoignage iconographique le plus explicite de la fonction et de l’importance de la déesse Vienna, la cité divinisée, est un vase à médaillon d’applique retrouvé à Lyon dans le sanctuaire du Verbe Incarné, dédié au culte impérial49 (fig. 10b) : on y voit Vienna lourdement drapée, la tête ceinte d’une couronne tourelée, tenant sceptre et patère ; à l’arrière, une Victoire la couronne. Elle conduit un char tiré par un bige qu’elle s’apprête à faire entrer triomphalement dans la ville, dont les remparts (eux-mêmes tourelés) sont visibles à l’arrière-plan. Mercure, vêtu d’une chlamyde, identifiable quoiqu’acéphale, car caractérisé par ses sandales ailées, tient la bride des chevaux. Une inscription placée dans l’ouverture de la porte vient expliciter la scène (Vien(na) / Flor(entia) / Felix), tandis que la partie inférieure du médaillon accueille une inscription couramment développée ainsi : F[elix Vi]enna Potens Flore(ntia) / [Suo?] Principe Saluo. Une nouvelle lecture, fondée sur la confrontation de plusieurs médaillons fragmentaires, fait de la formule un souhait (Vienna flor(escas) Felix), ce qui ne change pas fondamentalement l’interprétation : la puissance, la prospérité et le “bonheur” de Vienne sont strictement liés à la santé de l’empereur tandis que Mercure, l’un des grands dieux de la cité, apparaît comme un protecteur et un guide. L’association de ces deux divinités est parfaitement attendue. Ce lien étroit entre cité et empereur est confirmé par l’inscription CIL, XII, 182750 pour le salut des empereurs et de la cité de Vienne.
18Quoique la fonction religieuse des vases à médaillon d’applique ne puisse être démontrée, l’image a l’avantage de préciser l’iconographie de la déesse Vienna, qui s’écarte de celle de la Tutela précédemment évoquée : alors que cette dernière tient un gouvernail et une corne d’abondance51, l’image du médaillon se caractérise par une couronne crénelée dépourvue de calathos mais associée à un diadème – qui en l’occurrence rappellerait en filigrane le don de la muraille par Auguste – mais aussi par une pose solennelle et des attributs insistant sur la pietas et la souveraineté, la première apparaissant comme la garantie de la seconde. Malgré le caractère fortement symbolique du médaillon, il semble livrer une iconographie “officielle” de la déesse, puisqu’elle apparaît à l’identique sur un autre médaillon proposant le face-à-face des divinités tutélaires de Vienne et de Lyon : le Genius de la capitale des Gaules à droite, et à gauche Vienna, identifiée par une didascalie, qui tient de nouveau sceptre et patère (fig. 11). Ces images aident donc peut-être à restituer l’aspect de l’image cultuelle, mais surtout à mieux cerner la “personnalité” de la déesse, sa puissance divine ou Numen, qui est d’ailleurs célébré en tant que tel dans une inscription de Rome, où M. Nigidius Paternus lui a élevé un autel en marbre52 : Numini deae / Viennae / ex d(ecreto) d(ecurionum) / M(arcus) Nigidius Paternus / IIuiral(is) pon(endum) cur(auit). On ignore les circonstances de dédicace du monument, mais il permettait assurément de garantir la présence de la divinité poliade dans l’espace de l’Vrbs.
19Un autre texte doit être versé au dossier de ce culte : il était dupliqué sur deux bases de statues en calcaire53 offertes à la fin du ier ou au début du iie s. p.C. par un affranchi aux frères Coelii (Sextus Coelius Canus et Sextus Coelius Niger) qui avaient exercé la charge de questeurs à Vienne et qui, en remerciement de leur accession au décurionat (à l’âge de 77 ans !) avaient offert une statue en argent de la déesse Vienna (simulacrum Viennae argenteum). Le texte est célèbre en raison de la somme exorbitante consacrée à ce don : 200 000 sesterces, ce qui correspond à la somme la plus importante consacrée à une seule statue pour l’ensemble du monde romain54. Le caractère exceptionnel du geste invite à s’interroger à la fois sur l’aspect, la fonction et la destination de l’œuvre : en général, au-delà de 100 000 sesterces, il s’agit de dons collectifs ou hors norme : faut-il penser à une statue en argent massif ou en bronze recouvert d’argent ? Ce n’est pas impossible, mais peut-être la somme reflète-t-elle (aussi) l’excellence du travail de l’artiste. Si on devait proposer une restitution de l’œuvre disparue, il faudrait sans doute la présenter comme une déesse drapée et tourelée, tenant sceptre et patère. En outre, il s’agit de la seule attestation du terme simulacrum non seulement dans la cité de Vienne, mais aussi dans l’ensemble de la Narbonnaise ; à Vienne, les statues divines sont qualifiées de signa, éventuellement de statuae55. Les études lexicographiques récentes concluent à une multiplicité des termes désignant les statues de culte ; néanmoins, comme l’a rappelé S. Estienne, les termes de simulacrum et de signum “sont réservés à des représentations de dieux ou d’empereurs divinisés, tandis que statua et imago désignent généralement des statues en pied, le plus souvent honorifiques et des portraits d’hommes vivants ou morts”56. Il serait donc imprudent d’affirmer que les frères Coelii ont financé une nouvelle statue de culte pour le temple de Vienna ; en revanche, ils ont manifestement tenu à ce que leur offrande soit insigne, remarquable entre toutes.
20Il paraît significatif que le dédicant – qui pourrait d’ailleurs être un affranchi de l’un des frères – présente leur don comme un témoignage de leurs qualités morales, la pietas et la concordia, deux des vertus cardinales sur lesquelles reposent l’harmonie et la stabilité de l’ordre civique57. Sans descendance directe, les frères Coelii ont affecté une somme très importante à la célébration de la déesse qui incarnait cet ordre civique : en remerciement des charges exercées et du privilège de siéger parmi les décurions (qui n’était pas automatique pour les anciens magistrats, comme l’a souligné J. Gascou), c’est à Vienna, personnification divinisée de leur cité, et vraisemblablement au sein même de son sanctuaire, qu’ils ont fait preuve de leur piété insigne : un tel emplacement aurait garanti à ce simulacrum exceptionnel la plus grande visibilité. Notons enfin que l’affranchi, en tant que sévir, participait à titre personnel à la gestion du culte des empereurs, qui étaient régulièrement associés à Vienna dans les hommages comme dans les images.
21Ces divers témoignages indirects, qu’ils soient iconographiques ou épigraphiques, permettent d’établir l’existence d’un culte de Vienna dans le chef-lieu de cité ; la richesse des dons de statues attestés dans la ville témoigne à la fois de l’importance du sanctuaire pour les élites viennoises mais aussi de son rôle comme vitrine et lieu d’expression de la concordia, du consensus et de la pietas existant entre les hommes et les dieux, entre les membres de la communauté, mais aussi entre la cité et l’empereur. Tous ces témoignages expriment leur confiance dans le cadre institutionnel offert par la cité pour la perpétuation et le salut de tous.
22Revenons à l’édifice “basilical” de Sainte Blandine. L’hypothèse d’une triade capitoline peut être écartée, mais celle d’un lieu de culte accueillant les statues monumentales de deux divinités reste plausible. La statue masculine a toutes les chances d’avoir figuré un empereur cuirassé ; si on ne peut exclure la représentation à ses côtés d’une impératrice ou princesse divinisée aux traits idéalisés, la présence et la nature de compléments en métal aujourd’hui disparus invitent à envisager la restitution d’un casque (il pourrait alors s’agir de Roma) ou d’une couronne tourelée, caractéristique des personnifications de cités ; l’hypothèse d’une représentation de dea Vienna avec de tels attributs serait concordante avec l’image que livrent les médaillons d’applique.
23La réunion des attestations révèle les contours d’une divinité dont l’image fut implantée jusqu’au cœur de l’Vrbs, et s’inscrivant au sein d’un réseau divin comprenant d’une part son correspondant lyonnais, prenant la forme d’un Genius, d’autre part les princes divinisés, qui représentaient l’échelon central du pouvoir, mais aussi Mercure, qui est le dieu le plus fréquemment présent dans l’épigraphie religieuse de la cité.
Quelles images et quelles divinités autour du Mars viennois ?
24Mars est l’un des cultes civiques les mieux connus grâce à un corpus épigraphique conséquent et à l’étude exhaustive de F. Bertrandy, qui a dressé un inventaire des dédicaces et inscriptions relatives à ce dieu pour l’ensemble du territoire des Allobroges58. Au total, ce ne sont pas moins de 26 inscriptions qui le mentionnent, dont 19 sont des dédicaces au dieu et 10 mentionnent l’un de ses prêtres. Si le chef-lieu apparaît bien comme le centre principal de sa vénération, les dédicaces du territoire se concentrent dans sa moitié orientale (Grenoble, lac du Bourget, Annecy et Genève ou encore Passy59).
25Comme l’a souligné M. Christol, Vienne est l’une des rares cités de Gaule qui ait inscrit le culte de Mars dans ses cadres institutionnels, ce que révèle le flaminat du dieu60. Or le nom de Mars n’est accompagné, à Vienne même et dans la plupart des cas, d’aucune épiclèse qui vienne préciser le périmètre de son pouvoir61 ; mais sur le territoire, à six reprises, c’est un Mars Augustus qui est honoré62. L’interprétation qu’il convient de donner aux divinités augustes est, on le sait, encore très débattue. Si certains spécialistes (dont F. Bertrandy et B. Rémy) défendent l’idée d’un lien direct entre cette dénomination et l’hommage, voire le culte rendu à l’empereur – et y voient l’expression d’un loyalisme de type politique envers le prince –, d’autres interprétations sont aujourd’hui retenues : elle désignerait plutôt les grands dieux communautaires – lecture qui paraît particulièrement pertinente dans le cas de Vienne. Le caractère officiel du culte est amplement confirmé par le rang des dédicants connus, parmi lesquels figurent trois personnages de rang équestre et cinq magistrats municipaux ; deux dédicaces à Mars sont le fait de flamines du dieu.
26La richesse du dossier épigraphique est en contraste flagrant avec l’absence quasi-totale de témoignages iconographiques et plus largement archéologiques : en effet on ne recense que quelques statuettes de bronze difficiles à interpréter (ex-voto, éléments de “laraires” domestiques ?) et on ne connaît ni l’emplacement ni l’aspect de ce qui devait être l’un des lieux de culte les plus imposants de la ville63. On est donc en présence d’un dieu à la fois omniprésent et insaisissable : dieu sans épithète, Mars était-il aussi un dieu isolé, “sans réseau” et comment l’interpréter ?
27Un relief en marbre pourrait apporter des indices intéressants à propos de la personnalité du Mars viennois : aux abords du “jardin de Cybèle” a été exhumé un relief monumental64 très lacunaire proposant une scène mythologique complexe (fig. 12) : seule est conservée la partie supérieure droite de la composition, qui était encadrée par un décor de rais-de-cœur. On y voit deux figures féminines allongées : l’une, dans la partie supérieure, drapée dans un vêtement fin, est sous un figuier ; l’autre, en-dessous, est sur une kliné ; elle a le buste dénudé. A. Hermary propose de reconnaître Vénus en bas65 et Rhéa Silvia en haut, car elles sont représentées ainsi sur des sarcophages de la collection Mattei qui figurent certainement ces personnages ; la partie manquante de la composition comprendrait entre autres une représentation de Mars “visitant” la vestale, selon une iconographie rare en Gaule mais attestée sur un médaillon d’applique de Vienne66 (fig. 13).
28Les dimensions très importantes du panneau sculpté (2,30 m de haut pour la seule partie conservée) imposent de l’attribuer à un grand monument, somptueusement décoré ; si l’hypothèse d’un temple dédié à la naissance de Rome a été avancée, il convient de rester prudent sur l’interprétation, comme l’a rappelé A. Dardenay67. Le relief ne provient probablement pas du temple de Mars : on suppose que ce dernier était situé sous Saint-André le Haut, où a été retrouvé un autel au dieu. À quel monument pourrait-on le rattacher ? Aucune structure en place ne peut lui être attribuée, mais d’autres fragments présentant la même moulure d’encadrement figurent un quadrige et un buste de Sol-Apollo68. La présence d’autres épisodes mythologiques et d’autres divinités semble en première lecture affaiblir le sens de la composition : nous ne sommes ni en présence d’un cycle spécifiquement consacré aux primordia Vrbis ni d’un ensemble centré sur Mars. Comme l’a noté R. Robert, deux inscriptions découvertes dans le même secteur pourraient contribuer à éclairer sa destination : la base d’une statue de Germanicus et un vœu pour la sauvegarde des empereurs et de la cité. Ce contexte iconographique et épigraphique suggère un lien entre l’image des origines de Rome et la célébration impériale, sans qu’il soit possible d’aller plus loin dans l’interprétation.
29Néanmoins la présence probable de l’épisode de Mars et Rhéa Silvia, qui rappelle le statut d’un Mars pater, père du fondateur de Rome, tisse un lien, ténu mais significatif, avec le grand dieu officiel du panthéon viennois et confirmerait indirectement le caractère éminemment romain du culte. Si tel était le cas, Vienne s’affirmerait à travers son panthéon comme un véritable miroir de la capitale de l’empire, où Mars comptait aussi parmi les plus grands dieux. Or il n’est peut-être pas indifférent que le territoire de la cité accueille le seul lieu de culte dédié à Quirinus69 – d’ailleurs honoré lui aussi comme Augustus – de l’ensemble des Gaules et peut-être des provinces occidentales70 ; on ne peut s’empêcher de penser à la première triade romaine formée avec Jupiter et Mars et d’établir un lien avec l’institution du flaminat de ce dernier.
30Quoique rares, les combinaisons divines révélées par quelques dédicaces multiples vont dans le même sens : à Douvaine, Mars est associé à Jupiter dans un ex-voto71, de même qu’à Genève72, où il apparaît à la tête d’une “triade” que vient compléter Mercure, l’autre grande divinité des Allobroges, qui apparaît dans 43 inscriptions sur le territoire de la cité et occupe ainsi “la première place dans le panthéon épigraphique de la cité de Vienne”73. Il semblerait que cette dernière dédicace convoque les trois principales divinités du panthéon local, garantes de la souveraineté, de la protection et de la prospérité de la cité.
31Les prescriptions testamentaires d’un membre de l’ordre équestre, Decimus Decmanius Caper, révèlent une autre combinaison : une inscription de Vienne74 fait état de la donation de 50 000 sesterces que ce sous-préfet des cavaliers de l’aile Agrippiana a laissée pour l’érection de statues divines75 ; or les bases en calcaire de deux d’entre elles, d’une facture et d’une gravure très soignées, ont été découvertes à Grenoble : la première est dédiée à Mars76, la seconde à Saturne77. Curieusement, alors que le nom d’aucune des deux divinités n’est complété par une épithète, B. Rémy suppose que le Saturne correspond au dieu romain, tandis que Mars serait “le dieu gallo-romain et non le dieu guerrier du panthéon romain”, ce qui paraît quelque peu contradictoire. Un rapprochement avec l’autel d’Agnin précédemment évoqué permet d’envisager une signification astrale pour ce cycle de dédicaces, qui est probablement incomplet.
32Enfin, un autre témoignage archéologique pourrait être versé au dossier : la puissante tête barbue appelée “la Bobe”78 (fig. 14). Remployée comme clé de voûte dans une porte médiévale, elle est aujourd’hui exposée au Musée lapidaire ; elle se caractérise par ses dimensions colossales79, sa frontalité et son traitement sans effet. Elle a dernièrement été identifiée comme un portrait de Septime Sévère, mais la ressemblance paraît purement générique et surtout, la partie supérieure du crâne manque, ce qui interdit d’étudier la coiffure et de rattacher l’agencement capillaire à l’un des types officiels de l’empereur. Le format et la frontalité indiquent une probable effigie divine ; or on remarque qu’elle n’est pas cassée dans sa partie sommitale, mais aménagée : un plan horizontal a été préparé pour recevoir un complément aujourd’hui disparu. La barbe volumineuse, le cou puissant et la moue sévère qui a donné son surnom populaire à la statue – “la Bobe” – peuvent donner des indices : une représentation de Jupiter étant exclue en raison de la chevelure qui est trop courte, il pourrait s’agir de Mars, dont le casque rapporté a disparu. Si tel était le cas, nous aurions une indication précieuse non seulement sur l’aspect, mais aussi sur le rôle du dieu : s’il était casqué, il était aussi probablement cuirassé et le type statuaire s’inspirait du Mars Ultor romain. L’œuvre est trop fragmentaire pour permettre une étude plus approfondie, et les sources épigraphiques n’autorisent en aucun cas à faire du Mars viennois un Mars Vengeur, décalque du Mars romain, car le type a pu être utilisé pour représenter des Mars “interprétés” ; néanmoins les choix iconographiques confirment la prégnance du modèle romain et impérial, construisant une image à la mesure de la puissante protection qu’il exerçait sur le territoire des Allobroges.
33Il ressort de ce tableau très lacunaire le caractère à la fois dominant et multiple du Mars viennois ; le texte des inscriptions est en tant que tel peu explicite, mais les associations révélées par certaines dédicaces multiples, reliefs ou statues contribuent à préciser les fonctions autant que les hiérarchies : Mars n’est associé qu’aux plus grands dieux, et malgré l’absence d’épithète, on ne saurait nier son caractère éminemment romain ni déceler la moindre réminiscence d’un dieu indigène antérieur à la création de la cité.
Le culte impérial dans les réseaux divins de la cité de Vienne
34On a déjà relevé à propos de Vienna ou de Mars l’association étroite de la célébration ou de la vénération impériale aux cultes civiques ; elle est si régulière dans les dédicaces religieuses en Gaule qu’il est difficile d’en tirer des conclusions précises. Or à Vienne, si l’on suit les identifications proposées pour les différents lieux de culte archéologiquement ou épigraphiquement avérés, le “culte impérial” aurait proprement annexé l’ensemble de l’espace urbain dès les débuts du Principat : outre le temple d’Auguste et de Livie seraient attestés un Augusteum80, le temple sur podium de la rue Victor Hugo81 et le grand sanctuaire de Pipet. Dans l’étude qu’il a consacrée au culte impérial viennois82, B. Rémy a recensé pas moins de 87 inscriptions et parmi les sacerdoces municipaux (flaminats), la gamme des modalités de culte des empereurs vivants ou divinisés et à celui de divers membres de la famille impériale est particulièrement étendue : sont en effet attestés les cultes de Rome et Auguste, d’Auguste puis du diuus Augustus et enfin de Germanicus César83, une spécificité locale d’un grand intérêt, qui pourrait s’expliquer par la proximité des élites municipales avec certains membres de la famille de Caligula. Le culte des princesses divinisées était pris en charge par des flaminiques, attestées en nombre important à Vienne : on ne connaît pas moins de huit prêtresses municipales84. Les statues impériales présentes en grand nombre à Vienne même sont un autre signe de l’intensité de la célébration impériale, mais doivent être considérées comme des statues honorifiques sortant au moins partiellement de la sphère du culte impérial, d’autant plus qu’elles sont pour la plupart attestées par des bases inscrites qui ont fait l’objet de remplois85 : la présence de deux bases de statues de Germanicus confirme néanmoins l’importance du prince, révélée par l’existence d’un sacerdoce spécifique. Si l’omniprésence statuaire des membres de la domus impériale semble acquise, il est plus difficile de cerner les modalités et les espaces précis de leur vénération. En effet malgré l’abondance des témoignages, leur découverte en dehors de tout contexte archéologique interdit le plus souvent de connaître les sanctuaires à proprement parler et de reconstituer la topographie du culte impérial viennois. Elle permet en revanche de comprendre les logiques d’associations des divinités impériales avec d’autres divinités civiques et de mieux saisir une forme de “maillage” du territoire de la cité.
Un temple et plusieurs autels
35Le temple du forum compte parmi les édifices religieux les mieux conservés non seulement de Gaule romaine, mais aussi de l’empire. Le monument, de style corinthien, dominait initialement la place du Forum ; moins célèbre que la Maison Carrée, il présente pourtant un cas assez similaire, les titulaires divins étant connus dans les deux cas grâce aux cavités de fixation laissées par les lettres en bronze de l’inscription dédicatoire aujourd’hui disparue. Celle-ci était apposée sur l’architrave et la frise du temple, pour lequel les spécialistes d’architecture s’accordent à reconnaître deux phases successives. Les deux états de l’inscription confirment donc les deux vies du monument : initialement dédié à Rome et Auguste, selon une formule largement et précocement diffusée dans l’Occident romain, il fut transformé par l’adjonction de Livie divinisée, Diua Augusta, après sa consecratio intervenue en 41 p.C., associée désormais au diuus Augustus. Selon B. Helly, c’est un séisme intervenu sous Caligula qui aurait partiellement détruit l’édifice et favorisé sa transformation86.
36Pour reprendre une expression de P. Gros, le temple n’est pas seulement “l’axe générateur” de la place publique87, mais devient celui de la spectaculaire séquence monumentale se développant sur plusieurs niveaux qui a déjà été évoquée à propos de l’édifice de Sainte-Blandine. Le théâtre, adossé à la colline de Pipet, en est le premier élément ; il est le seul des théâtres gallo-romains à accueillir dans sa partie sommitale un dispositif doté d’une cella barlongue et d’un pronaos88, véritable sacellum in summa cauea. La présence impériale est assurée dans l’édifice théâtral par l’effigie diadémée très fragmentaire d’Antonia Minor qui y a été découverte89. L’infula qui orne sa chevelure la désigne comme prêtresse du divin Auguste, dont le culte est parfaitement attesté à Vienne – tout comme celui de Livie, qui avait précédé Antonia dans l’exercice de ce sacerdoce à Rome. Ces caractéristiques tout comme son format colossal lui confèrent une tonalité particulière qui semble excéder la simple dimension honorifique. Si on accepte que le sanctuaire de Pipet ait été dédié au culte impérial, qui était peut-être également présent dans l’édifice de Sainte Blandine, on remarque que de la place du forum au sommet de la colline, c’est l’ensemble de la série monumentale qui se trouvait marquée par cette présence cultuelle, avec une intensité particulière entre Tibère et Claude, avec de possibles échos thématiques entre différents édifices publics et/ou cultuels du centre monumental.
37Les reliefs confirment l’importance de cette phase et témoignent de l’existence d’au moins deux autels monumentaux directement liés à la célébration des empereurs. Le premier accueillait le seul véritable “relief historique” conservé pour l’ensemble des provinces gauloises. Il s’agit d’une composition à tonalité dynastique dont sont conservés les portraits d’Auguste et de Tibère, représenté avant son avènement90, ce qui permet de situer sa dédicace dans la décennie 4-14 p.C. Les couronnes précisent le message global : alors qu’Auguste est couronné de chêne, insigne qui lui avait été octroyé pour avoir mis un terme à la guerre civile et qui représente donc l’empereur pacifer, Tibère est couronné de laurier, en souvenir de ses campagnes militaires victorieuses. Leur face-à-face exprimait donc visuellement l’idée même de co-régence91. Une tête féminine a probablement appartenu au même relief : elle présente un visage juvénile et porte une coiffure classicisante. Sa tête est ceinte d’un bandeau. On y a parfois vu une représentation de Vénus, ce qui constituerait peut-être dans ce contexte une allusion à l’adoption de Tibère dans la Gens Iulia, mais on ne peut exclure qu’il s’agisse d’une effigie impériale fortement idéalisée : il pourrait dès lors s’agir de Livie. Si ces considérations sont exactes, et malgré les lacunes, il est probable que le relief ait appartenu à un autel destiné au culte dynastique. La rareté du motif en dehors de Rome suffirait presque à l’assurer ; malheureusement, comme souvent à Vienne, l’emplacement précis n’est pas identifiable, puisque la tête d’Auguste était en remploi sur les pentes nord de la colline de Pipet, mais indique une proximité avec les lieux de culte précédemment mentionnés.
38Le second autel, identifié et publié par R. Robert92, est composé de plusieurs fragments de plaques de revêtement en marbre blanc, d’inégales dimensions ; elles étaient ornées de cygnes tenant dans leur bec des guirlandes composées de végétaux et de fruits. Ce motif de prédilection de l’art officiel augustéen renvoie sans ambiguïté à l’abondante série des “autels d’Auguste”, issus de l’Vrbs et des cités du monde romain, qui mettaient en exergue la prospérité et la piété retrouvées grâce à l’action conjointe du Princeps et d’Apollon. Il est attesté notamment sur l’un des autels retrouvés in situ dans l’orchestra du théâtre d’Arles, autre colonie de Narbonnaise particulièrement favorisée par la famille impériale ; les autres autels de ce cycle bien connu, tous anépigraphes, ce qui nous interdit de connaître leur(s) destinataire(s), associent de manière systématique symboles augustéens et emblèmes apolliniens, en une ambiguïté voire une confusion savamment entretenue93. Du fait de ses dimensions plus imposantes, l’autel de Vienne prend des allures d’Ara Pacis gauloise94 qu’il est vraisemblable de rattacher à l’une des modalités du culte impérial viennois, même si la possibilité d’un lien avec Apollon ne saurait être exclue.
39Il n’est évidemment pas nécessaire de postuler l’existence d’un monument cultuel spécifique pour chacun de ces destinataires impériaux : un autel placé devant une statue pouvait suffire et l’aire du temple d’Auguste et de Livie (ou du sanctuaire de Pipet) a pu accueillir les rites consacrés à l’ensemble des princes julio-claudiens divinisés95. On aimerait bien sûr en savoir plus sur le réseau viennois, apparemment d’une grande densité, des diui, diuae et des princes ou princesses de la famille impériale dont témoignent d’une manière elliptique les titulatures sacerdotales : le titre de “prêtre d’Auguste” pouvait renvoyer à des pratiques et des destinataires variés (culte du Genius, du Numen…).
40À défaut de saisir avec précision ces modalités cultuelles, nous pouvons connaître grâce à une inscription monumentale gravée sur une table de calcaire un aménagement cultuel et statuaire exceptionnel96 offert par une flaminique (flaminica Viennae) : tegulas aeneas auratas / cum carpusculis et / uestituris basium et signa Castoris et Pollucis cum equis et signa Herculis et Mercuri.
41Le bloc semble complet, mais comme le nom de la flaminique manque, il faut peut-être supposer la présence d’un second bloc aujourd’hui perdu. N. Chorier en faisait la dédicace d’un temple97, ce qui semble improbable étant donné la taille et la mise en page du texte ; en revanche elle témoigne indéniablement d’un acte d’évergétisme de grande ampleur. B. Rémy pense que la mention D(ecreto) D(ecurionum) renvoie au mode de désignation de la prêtresse98 ; en réalité, on pourrait tout aussi bien supposer qu’elle révèle le caractère officiel de l’octroi de l’emplacement du monument auquel l’inscription appartenait. En outre huit flaminiques sont attestées dans la cité de Vienne99 et les inscriptions ne précisent que rarement l’identité des divinités “prises en charge” par ce sacerdoce ; seules deux épitaphes de Grenoble donnent un titre complet mais ambigu, celui de flaminica Aug(ustae)100. Il est fort vraisemblable que l’inscription fasse état des ornements architecturaux et statuaires apportés à un sanctuaire, éventuellement dans le cadre d’un évergésie ob honorem, ainsi que le suggère B. Rémy101. En effet, ces aménagements sont à la fois considérables et luxueux : tuiles et antéfixes (carpuscula) en bronze doré pour le toit, socles ornés et quatre statues divines qu’on peut difficilement considérer comme purement “décoratives” : celles des Dioscures (avec leurs chevaux), de Mercure et d’Hercule. Cette association de divinités masculines pourrait révéler les dévotions propres à la dédicante, ou encore renvoyer à des divinités du panthéon civique. La présence de Mercure ne surprendrait guère : il est le dieu le plus fréquemment présent dans l’épigraphie religieuse de Vienne et il apparaît comme “guide” du char triomphal de Vienna sur le médaillon d’applique lyonnais. En outre l’une des compétences des Dioscures est de veiller sur le transport maritime : ils sont donc parfaitement attendus aux côtés de la divinité tutélaire d’un important port fluvial. Le rôle d’Hercule dans cette combinaison est plus délicat à cerner, dans la mesure où le culte du dieu n’est pas attesté par ailleurs à Vienne : lié à l’élevage, il est également attaché “au retour victorieux après les exploits accomplis au loin”102 et c’est peut-être au titre de sa fonction “civilisatrice” qu’il était présent dans cet ensemble. L’inscription de la flaminique anonyme qui a offert ces signa ne révèle pas seulement l’existence d’un culte et d’un sanctuaire public, elle offre aussi de précieux renseignements, de nouveau, sur les domaines d’action attachés à la déesse et la nature de divinités “invitées” dans son sanctuaire – à tout le moins sous la forme de leurs images.
42On a coutume d’opposer les cultes populaires qui relèveraient de la romanisation de cultes indigènes, et les cultes officiels des centres urbains, dont le culte impérial serait le parangon. Or le sanctuaire de Châteauneuf, situé dans la Combe de Savoie, près du confluent de l’Arc et de l’Isère, sur sa rive droite, réduit considérablement – voire abolit totalement – cette césure et révèle un très intéressant réseau divin.
Limetus, l’empereur et les autres : le sanctuaire de Châteauneuf
43Découvert en 1977, le site de Châteauneuf-les-Boissons a été partiellement fouillé jusqu’en 1986. Ont été mis au jour un établissement thermal, un théâtre et, en contrebas de ce dernier, un sanctuaire composé d’un temple à deux cellae entouré d’un péribole, qui a seul fait l’objet d’investigations complètes103. Le sanctuaire, construit à la fin du règne d’Auguste, a connu une intense phase de fréquentation jusqu’à l’époque flavienne qui vit sa destruction, peut-être due à une inondation. Son titulaire principal est connu grâce à l’inscription dédicatoire demeurée en place, gravée sur une plaque de schiste et insérée dans le sol de béton au centre géométrique du péribole104 : il s’agit de Limetus, par ailleurs inconnu, que l’on a voulu expliquer comme une divinité des confins sur la foi d’une “ressemblance entre Limetus et limitis” ; dans ce cas, il faudrait supposer une naturalisation d’un dieu indigène dont le nom romain tendrait à traduire le domaine d’action, celui de protecteur de la frontière. Le temple a été dédié à la suite d’un vœu par deux dédicants pérégrins, dont Quartio fils d’Atepo. Or ce qui a toutes les apparences d’un petit sanctuaire de campagne se révèle d’une extraordinaire richesse cultuelle ; il “accueille” en effet plusieurs autres divinités sous la forme d’ex-voto et d’offrandes dont témoigne une série de graffiti gravés sur les enduits peints des murs extérieurs de la cella (au nombre de 59) ou sur des tuiles déposées en bordure sud du péribole, peut-être auprès d’une statue ou d’un autel secondaire105 (18 au total). Tous font état d’offrandes en nature ou, plus fréquemment encore, en espèces et révèlent tout un réseau divin autour de Limetus, puisque plusieurs autres divinités apparaissent comme destinataires des ex-voto : Mercure et Maia, les “dieux et déesses” (di, diae), Rome et l’empereur régnant, qui reçoit plusieurs dénominations (Caesar, Imperator, Augustus).
44Cette configuration divine particulière a suscité plusieurs commentaires : en premier lieu, la présence de l’empereur a été justifiée par l’éloignement du sanctuaire civique106 qui se trouvait à Vienne. En outre, B. Rémy propose que le dieu local Limetus ait été “assimilé” à Mercure, notamment parce que ce dernier est beaucoup plus fréquemment attesté dans les ex-voto107 et surtout parce qu’il est le grand dieu des Allobroges ; l’hypothèse se retrouve chez C. Mermet, qui établit un lien entre le domaine d’action d’un Mercure “gardien des frontières” et l’étymologie supposée du nom divin108 ; elle est en effet suggestive, puisque Châteauneuf est proche de la limite de la cité, de la frontière entre Gaule Narbonnaise et Alpes Cottiennes, et de surcroît proche du confluent entre l’Arc et l’Isère.
45En revanche rien ne prouve que Mercure ait succédé ou se soit substitué à Limetus dans une phase plus avancée du culte. Très intéressantes sont les associations divines attestées par les ex-voto, honorées par couples ou plus exactement par paires : un Nero et Limetus109, Mercure et Maia110, Rome et Auguste et de manière plus hypothétique, Mercure et Rome111. B. Rémy justifie ces associations comme des “répétitions d’intensité”, destinées pour le dévot à “mettre toutes les chances de son côté”112. En réalité elles sont probablement moins redondantes qu’il n’y paraît, dans la mesure où elles font émerger une nébuleuse parfaitement cohérente qui lie étroitement, dans le quotidien des habitants de l’agglomération ou des visiteurs de passage, la prospérité du commerce (et plus largement de tout type d’échange) et au pouvoir de Rome “incarnée” par l’action du prince, le tout fortement ancré dans le territoire d’une cité qui devait une partie de son opulence à sa situation privilégiée de carrefour routier et fluvial ; de même à Lyon, un affranchi, M. Herennius, a dédié, dans un temple construit à ses frais mais sur sol public, les statues (cultuelles ?) de Mercure et Maia (signa duo) ainsi qu’une imago (un portrait, peut-être sous forme de buste) de l’empereur Tibère113, probablement présent en tant que divinité “invitée”, dont l’action était absorbée en quelque sorte dans la sphère de compétence des divinités titulaires – prospérité de la terre et des échanges. Par ces combinaisons, c’est l’identité du lieu de culte et de la communauté qui le fréquente qui se construit et les “puissances divines” qui le composent se complètent mutuellement.
46Ainsi à Châteauneuf, de façon significative, deux tuiles portent l’abréviation C.I.V. (pour Colonia Iulia Vienna114) qui montre que la cité est un protagoniste à part entière de la “transaction” divine, ou plus exactement que les visiteurs n’expriment pas seulement leur attachement au prince, mais au système de la cité en tant que tel, considéré comme un jalon intermédiaire essentiel.
47Ces modes d’association prouvent, s’il en était encore besoin, l’absence de solution de continuité entre le “culte impérial”, les grands dieux romains et les divinités locales ; contrairement à ce qui a longtemps été affirmé, l’empereur, tout comme la déesse Rome, font l’objet de vœux. L’idée d’une césure entre les cultes officiels du chef-lieu et les cultes locaux du territoire doit donc être rejetée.
Conclusion
48Les ensembles documentaires relatifs au prétendu Capitole et aux cultes de dea Vienna, de Mars ou des diui, étude de cas d’un grand intérêt méthodologique dans le cas de la cité de Vienne, permettent de mesurer la contribution spécifique des images et de leurs supports monumentaux à notre connaissance du “paysage religieux” d’une colonie latine puis romaine au Haut-Empire et plus spécifiquement, de cultes importants mais relativement peu attestés dans les supports traditionnels de l’expression religieuse. Ces dossiers illustrent un large éventail de situations à partir d’états documentaires inégaux : alors que le Mars viennois est un grand dieu civique largement attesté dans l’épigraphie mais difficile à saisir dans ses valences spécifiques en raison de l’absence d’épiclèses, dea Vienna est au contraire peu présente dans les dédicaces mais régulièrement représentée dans les sources iconographiques les plus variées. Dans les deux cas, la prise en compte simultanée des textes épigraphiques et des images divines autorise quelques relectures ou propositions : dans le cas de Mars, le réseau iconographique perceptible autour de la divinité pointe vers une “personnalité” étroitement liée au Mars augustéen, à Rome et à ses origines, puisqu’il apparaît à plusieurs reprises associé à Rhéa Silvia et/ou à Vénus. La présence sur le territoire d’un culte à Quirinus, d’une extrême rareté en contexte provincial, pourrait confirmer indirectement cette facette du culte ; à Rome, le fronton du temple de Mars Ultor associait notamment ces trois divinités à la figure du prince.
49L’importance de dea Vienna dans le panthéon civique se déduit moins de l’abondance des dédicaces conservées que des usages qui ont pu être faits de son image : les circonstances de dédicace de l’exceptionnel simulacrum offert par les jumeaux Coelii révèlent que la divinité, “émanation de l’existence municipale”115 et équivalent des Génies de colonie d’autres cités, était convoquée comme un médiateur divin de premier plan dans la célébration de la concorde au sein des instances civiques.
50De manière assez paradoxale, on remarque dans la plupart des études une tendance à laisser de côté les documents figurés quand l’information épigraphique et archéologique est de bonne qualité, et au contraire à les surinvestir (quitte à les surinterpréter) quand elle fait défaut. Dans la reconstitution de ces réseaux divins, l’iconographie et la statuaire méritent de constituer autre chose qu’un palliatif auquel on recourt “faute de mieux” car elles apportent davantage qu’une illustration ou un complément d’information. Il ne s’agit en aucune manière de renverser la perspective pour placer la documentation statuaire au centre de la réflexion sur le quotidien religieux des cités, mais de lui redonner la place qui lui revient au sein de raisonnements souvent complexes : l’identification des divinités par le biais des attributs ou des modèles artistiques, la présence de parèdres, la hiérarchisation à l’œuvre dans les images, la nature des statues offertes et le type d’espaces ou d’emplacements qu’on leur octroyait sont autant d’éléments essentiels à sa compréhension. Ces associations sont parfois le fruit des initiatives des dédicants singuliers, et renseignent alors sur la personnalité et les intentions des cultores ; mais elles peuvent aussi être révélatrices de tendances plus structurantes, de nature à éclairer l’identité religieuse ou les différentes potestates (modes d’action) des divinités mises en présence.
Notes de bas de page
1 Raepsaet-Charlier 1993 ; Van Andringa 2002 ; De Cazanove & Meniel, dir. 2012.
2 Golosetti 2016.
3 CIL, XIII, 1668 ; D. 212.
4 Golvin 2010, 36.
5 Selon l’hypothèse formulée par B. Helly : Helly 1994 ; CAG 38/3, 378-379, fig. 356.
6 Rémy 1970 ; Rémy 1992, 201.
7 Environ 900 inscriptions et 500 fragments de sculptures sur pierre.
8 Pelletier 1982. Outre le volume de la Carte Archéologique de la Gaule (CAG 38/3), celui du Nouvel Espérandieu (NEsp I) consacré aux sculptures sur pierre a réuni plus de 500 notices, tandis que la collection épigraphique a fait l’objet de trois volumes des Inscriptions Latines de Narbonnaise (ILN, V, 1 à 3) complétés par les Inscriptions Latines de Haute Savoie (ILHS) et celles de Genève (Maier 1983) ; il faut ajouter à ces ouvrages de référence de nombreux articles de synthèse sur l’urbanisme de la colonie.
9 La thèse d’A. Vigier (Vigier 2011) traite plus largement des élites allobroges. Quelques études abordent une divinité particulière : Mars (Bertrandy 2000), Mercure (Rémy 1994) ou encore Vintius (Vigier 2009).
10 Rémy & Jospin 1998.
11 Pagus Dianensis ou Dianius.
12 Ils sont recensés commodément dans la CAG 38/3, 129-131.
13 CAG 38/3, [065], 265-270.
14 NEsp I, 144-149, n° 331 à 338, pl. 215-218 (avec bibliographie antérieure). Certains ont été découverts en remploi à Notre-Dame d’Outre-Gère : CAG 38/3, 418 4*, fig. 407.
15 Gascou 1997, 92-101.
16 Van Andringa 2009b.
17 Voir supra, l’introduction par Y. Berthelet et F. Van Haeperen.
18 Vienne a livré des fragments de reliefs dits “historiques”, genre pratiquement inexistant en dehors de la capitale de l’Empire : Rosso 2004 et 2011.
19 Sur ces dernières et pour l’ensemble de la Gaule Narbonnaise, voir Boularot 2015.
20 CIL, II, 594, titres LXX et LXXI. Sur les temples capitolins, voir Barton 1982.
21 Autel octogonal en marbre blanc dédié vers 198 p.C. pour le salut de Septime Sévère et Caracalla ; CIL, XII, 2183 ; Espérandieu 1907, 281-282, n° 412 ; CAG 38/1, 111-112, fig. 72 p. 112 ; CAG 38/4, 84-85, fig. 18-19 ; ILN, V-2, 320 p. 29. Cet autel est également dédié “aux autres dieux immortels” pour le salut des membres de la dynastie sévérienne.
22 Pelletier 1976, 61-62 ; 1988, 38.
23 Récemment identifié au niveau du cimetière Pipet (Helly 2004, 100) ; sur l’identification de ces structures, voir la discussion dans la CAG 38/3, 378-379.
24 Toute la partie antérieure a disparu. Golosetti 2016, 307, fig. 107.
25 CAG 38/3, 379 ; fig. 356 p. 378 (salle Zc).
26 Pelletier 1976, 58-63.
27 NEsp I, 24-25, n° 53, pl. 52-53 ; CAG 38/3, 380, n° 2, fig. 359.
28 Pelletier 1976, 62.
29 R. Robert, D. Terrer, in : NEsp, I, 95, n° 211, pl. 172 ; CAG 38/3, 380 n° 3.
30 NEsp, I, 91, n° 196, pl. 168 ; CAG 38/3, 379 fig. 358.
31 NEsp, I, 101, n° 237, pl. 178 ; CAG 38/3, 380.
32 R. Robert, in : NEsp, I, p. XLVII.
33 Golosetti 2016, 307-308, 346.
34 Pelletier 1976, 62.
35 NEsp, I, 101 ; mais ces fragments pourraient tout aussi bien avoir appartenu à d’autres statues, entièrement en calcaire.
36 Selon Hermann & Newman 2000, 298.
37 Balty 2007, 60.
38 Biard & Rosso 2017.
39 R. Robert, D. Terrer, in : NEsp, I, 91 et 95.
40 CAG 38/3, 380 : “les attributions respectives à Jupiter et Minerve proposées par A. Pelletier (2001) ne reposent sur aucun fondement”.
41 Herman & Newman 2000, 298-300, fig. 17 p. 299 (dernier quart du ier s. p.C.).
42 D. Terrer, R. Lauxerois, in : NEsp, I, 24-25, n° 53, pl. 52-53.
43 Rosso 2000.
44 Josèphe, BJ, 1. 21. 7.
45 Aurigemma 1940, 44-45, fig. 25 ; Boschung 2002, p. 8 n° 1.2, pl. 2,2. 4.
46 Lauxerois et al., 1982, 403-405, fig. 12 (il s’agirait selon eux de Minerve) ; A. Hermary, in : NEsp, I, 25-26, n° 54, pl. 54-57 (Roma ou Minerve, iie s. ap. p.C.) ; CAG 38/3, 451 n° 2, fig. 451, où la légende du cliché indique une représentation de Roma, alors que le texte attribue la statuette à Minerve.
47 Picard 1964 ; A. Hermary, in : NEsp I, 36-37, n° 72, pl. 84-85.
48 Pelletier 1976, 62-63.
49 Desbat et al., 1983, 395-399, fig. 1-5 ; le diamètre du médaillon est de 15,5 cm. On en connaît un autre exemplaire à Cologne : Bolaños Herrera 2016.
50 CIL, XII, 1827 = ILN, V-1, 44 : Pro salute Augustorum et u[ictoria] / et reditu et statu ciuitatis Vi[ennensium.
51 Picard 1964, 101-123, part. p.102-104.
52 CIL, VI, 36835 = AE 1900, 5. Elle est exposée sur le Forum Romain, à proximité de la Basilica Aemilia.
53 CIL, XII, 5864 a-b = ILS 6999 et 6999a ; De Kisch 1979, 262, n° 20-21p. 277. Rémy 1992, 210, 217-218 n° 15-16, fig. 1 et 2 ; ILN, V-1, 72 ; CAG 38/3, 396 n° 1, fig. 379 a-b. Dimensions : 104 cm x 68 cm. Elles ont été retaillées et leur couronnement abattu, de sorte que les éventuelles traces de fixation des statues originelles ont disparu.
54 De Kisch 1979, 262 : “Il s’agit, pour une statue unique et pour un versement non effectué en métal précieux, de la somme la plus importante que nous connaissions”. Elle est dépassée par quelques autres donations, mais pour plusieurs statues.
55 Rémy & Géroudet 2015, 56.
56 Estienne 1997, 83.
57 Lamoine 2009, 201 sqq,
58 Bertrandy 2000.
59 ILN, V-2, 547, 548 et 549.
60 Sur le flaminat de Mars, voir ILN, V-1, p. 48-49 ; Christol 2010, 364. Dans les Trois Gaules, Mars Mullo a un flamine chez les Riedones (Bérard 2006, 26).
61 Christol 2010, 365 ; B. Helly, in : CAG 38/3, 128.
62 Notamment à deux reprises à Passy : ILN, V-2, 548 et 549 = ILHS, 80 et 81 = Bertrandy 2000, 239 n° 14 et 16. Voir également CIL, XII, 2219 = Bertrandy 2000, 238 n° 5 (Grenoble).
63 En toute logique, il devait se trouver à l’extérieur de l’enceinte urbaine mais à proximité immédiate de la ville.
64 Vienne, Musée archéologique Saint-Pierre, inv. R 2001-5-123. GAG 38/3, 128, 305 fig. 259 ; A. Hermary, in : NEsp I, 59-61, n° 123, pl. 124-125 (avec bibliographie complète) ; voir aussi R. Robert, in : NEsp I, p. XLIX. Dimensions : H. : 230 cm ; L. : 137,5 cm (début du iie siècle p.C.)
65 La présence d’une figure d’Eros parmi les fragments non jointifs du relief confirme l’identification de Vénus (D. Terrer, in : NEsp, I, 61, n° 124, pl. 126).
66 Mars et Ilia : Bertrandy 2000, 243 type D, 244 fig. 9 ; B. Helly, in : CAG 38/3, 128.
67 Dardenay 2012, 146-147. Je la remercie de m’avoir indiqué cette étude.
68 NEsp I, 63-64, n° 129, pl. 128-129.
69 CIL, XII, 2201 et 2002 ; ILN, V-2, 347 et 348 (Saint-Laurent-du-Pont, entre Vienne et Grenoble) ; CAG 38/4, 80-81, 307 fig. 283 et 284 (époque julio-claudienne).
70 Rémy in : ILN V-2, 52.
71 CIL, XII, 2580 = ILN V-3, 809 = ILHS, 57. Bertrandy 2000, 21 p. 239.
72 CIL, XII, 2589 = ILN, V-3, 823 ; Maier 1983, 97 n° 74 ; Bertrandy 2000, 239 n° 22. L’inscription est aujourd’hui perdue.
73 Rémy 1994, 180.
74 ILN V-1, 370.
75 Boularot 2015, 47.
76 CIL, XII, 2218 = ILN, V-2, 357 ; Rémy 1992, 218 n° 19 ; Bertrandy 2000, 238 n° 4 ; CAG 38/4, 189 n° 6, fig. 144.
77 CIL, XII, 2225 = ILN, V-2, 363 ; Rémy 1992, 218 n° 20 ; CAG 38/4, 189, 190 fig. 145.
78 CAG 38/3, 229, fig. 157 ; D. Terrer, in : NEsp I, 77-79, n° 149, pl. 150.
79 La hauteur conservée est de 80 cm.
80 Il s’agirait du sanctuaire situé sous l’immeuble Le Ponsard : Helly 2014, 129, n° 4.
81 Helly 2014, 130, n° 8.
82 Rémy 2003b.
83 CIL, XII, 1872 = ILN, V-1, 66.
84 Rémy 2003b, 372 n° 8.
85 Pour le seul chef-lieu de cité : Rosso 2006, 293, n° 81 (Germanicus, 14-19 p.C., perdue), 293, n° 82 (Drusus Minor, vers 23 p.C, perdue), 294, n° 83 (Tibère, 14-37 p.C.), 297-299, n° 86 et 87, fig 67 (Caligula à deux reprises), 299, n° 88 (Caligula, 34-37 p.C.), 304, n° 92, fig. 71 (Constantin 1er, 302-324 p.C.), 305, n° 93 et 94 (empereurs indéterminés).
86 Helly 2014, 119-120.
87 Gros 2008, 70.
88 Le Bot-Helly & Helly 2002, 124-126 ; Tardy 2009, 176-177, fig. 1.
89 Rosso 2001 ; A. Hermary, in : NEsp I, 75, n° 146, pl. 148 ; Rosso 2006, 299-301, n° 89, fig. 68.
90 Les premiers à avoir rapproché les deux effigies, conservées l’une à Vienne et l’autre à Lyon, sont F. Salviat et D. Terrer : Salviat & Terrer 1983. Ils appartenaient à un même relief. Cf. D. Terrer, in : NEsp I, 71-74, n° 142-143, pl. 138-145 ; Rosso 2006, 134-135, n° 84-85 et p. 294-297.
91 Rosso 2004, 166, fig. 2 a-b.
92 NEsp, I, 154-158, n° 347-358, pl. 223-226 ; Robert 2005.
93 Sauron 1991 ; Carrier 2005-2006.
94 Gros 2008, 70.
95 Sur la place et le rôle des autels impériaux dans la ville, voir Mauger 2016.
96 L’inscription proviendrait de Pipet. CIL, XII, 1904 ; ILS 3400 ; Rémy 1992, 211, 217 n° 14 ; ILN, V-1, 88 ; CAG 38/3, 347 fig. 308 ; Boularot 2015, n° 9 p. 44.
97 Chorier, 1659, 173.
98 Rémy 2003b, 372.
99 On se reportera au tableau commode fourni par Rémy 2003b, 372 n° 8.
100 CIL, XII, 2317 = ILN, V-2 458 et peut-être ILN, V-3, 858.
101 Rémy-Geroudet 2015, 63.
102 L’expression est de J. Scheid.
103 Mermet 1993 ; Rémy 1999, part. p. 31-32 pour le site et son occupation ; voir aussi Golosetti 2016, 323-327.
104 ILN, V-2, 462 p. 155-156 (avec bibl. antérieure) ; AE, 1993, 1111 ; Golosetti 2016, fig. 117.
105 Mermet 1993, 127.
106 Rémy 1999, 35.
107 Rémy 1999, 33 (7 graffites au total).
108 Mermet 1993, 112 n. 41.
109 Mermet 1993, n° 39 p. 130 ; AE, 1993, 1152 ; ILN, V-2, 463.
110 Mermet 1993, n° 1A ; AE, 1993, 1112b ; ILN, V2, 471 et Mermet 1993, n° 14 p. 114 ; AE, 1993, 1122 ; ILN, V-2, 472. Je remercie F. Van Haeperen qui m’a communiqué une étude encore inédite sur la déesse Maia.
111 Mermet 1993, 107-108 n° 2. En revanche, on ne trouve jamais Limetus associé à Mercure, ce qui tendrait à renforcer l’hypothèse de B. Rémy.
112 Rémy 1999, 34.
113 CIL, XIII, 1769.
114 Il s’agirait donc d’une abréviation de Colonia Iulia Augusta Vienna (J. Gascou, in : AE 1993, 1148 et 1155).
115 Van Andringa 2011, 219.
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