Sénat et magistrats à la veille de la guerre civile entre Pompée et César
p. 609-624
Texte intégral
1Comme le savent bien les spécialistes du droit public romain, les livres républicains et impériaux de Cassius Dion sont une source d’information inestimable sur les institutions politiques de Rome. À côté des exposés spécifiques qui, dans les livres augustéens, ont pour objet même la transformation des institutions effectuée par le fondateur du régime impérial, on rencontre au fil du récit une foule d’indications qui touchent à leur fonctionnement. Tantôt ce sont des détails narratifs qui renseignent incidemment sur telle ou telle pratique, tantôt c’est l’énoncé d’une règle, parfois déjà connue, parfois ignorée par ailleurs – par exemple le droit pour les consuls désignés de prendre des édits au même titre que les consuls en exercice1 –, tantôt encore des commentaires politiques – par exemple l’effet du procès de Rabirius sur l’autorité du Sénat et sur l’équilibre des institutions2. Ce n’est pas seulement l’abondance des informations qui fait le prix de l’Histoire romaine à cet égard, mais aussi leur qualité, et ceci est particulièrement apparent pour les livres républicains, où elles sont très nombreuses. Comme on le constate quand on dispose d’autres textes qui permettent des recoupements, et c’est la situation la plus fréquente pour la fin de la République, rares sont les cas où une indication est erronée3. Inversement, lorsque Dion décrit une procédure, ses explications sont beaucoup plus claires, et en cela il se différencie des auteurs latins, surtout ceux qui écrivent à cette époque et pour un public qui naturellement n’ignore rien de ces questions. Il analyse ainsi de façon très précise, et unique dans nos sources, les règles de l’obnuntiatio, qui consistait pour un magistrat à annoncer qu’il observerait les signes célestes survenant spontanément lors des comices, et ses effets sur le déroulement des assemblées populaires (38.13.3-6). Aussi remarquables sont sa description du rite de l’augurium Salutis, une procédure divinatoire préalable à une prière publique appelant la protection des dieux sur la collectivité (37.24), et celle de la procédure d’intercalation, qui permettait d’insérer un mois supplémentaire dans le calendrier, en général à des fins politiques (40.62.1-2). Dans ces passages, il se présente explicitement comme un médiateur apportant au lecteur des clés pour la compréhension des événements qu’il rapporte : ainsi l’obnuntiatio est décrite à propos de l’une des lois du tribun Clodius, “sur laquelle, dit-il, il est nécessaire de s’étendre afin que ce soit plus clair pour le public”.
2Mais cette posture n’est pas la seule, et ce n’est pas non plus celle qu’il adopte le plus fréquemment : on remarque à la lecture de ces livres que les contextes et les modes d’énonciation de ces réalités institutionnelles sont assez divers. Voilà qui conduit à renverser la perspective, en cessant de considérer le texte de Dion seulement comme une carrière où puiser des matériaux propres à enrichir notre connaissance de ces réalités, pour s’intéresser plutôt aux intentions qui ont guidé son écriture. Il devient alors nécessaire de considérer attentivement les différentes façons dont il présente ces informations de type institutionnel, la manière dont elles s’articulent avec l’économie du récit, dont elles font sens dans le contexte de la narration, en un mot, dont elles s’intègrent dans le projet historiographique. Le cadre choisi sera celui des livres 36 à 40, qui couvrent les années 69 à 50 a.C., et montrent l’affirmation de la puissance politique de Pompée et les résistances qu’elle suscite dans une partie de l’oligarchie sénatoriale, puis la formation, en réponse à ces résistances, de l’alliance improprement appelée “premier triumvirat” entre Pompée, César et Crassus, enfin sa dissolution progressive et, après la mort de Crassus face aux Parthes, la montée du conflit entre Pompée et César, qui aboutit au déclenchement de la guerre civile décrit au livre 41. Ces livres se prêtent particulièrement à l’analyse proposée parce que ces deux décennies apparaissent chez Dion comme un moment où les institutions républicaines fonctionnent encore, mais sont perturbées par la puissance croissante des imperatores et l’irruption répétée de la violence dans la vie politique. À ce titre, elles sont à la fois le cadre et le sujet du récit dans toutes les parties consacrées aux affaires de Rome, et c’est là une originalité de l’œuvre de Dion. La façon dont il procède mérite donc une étude attentive. Celle-ci sera délibérément centrée sur deux institutions seulement, les magistratures et le Sénat, pour lesquels l’information est particulièrement riche, et qui par ailleurs occupent moins de place que d’autres dans les études modernes sur les institutions républicaines4.
Contextes et modes d’énonciation des règles institutionnelles
3Une première catégorie d’occurrences des informations concernant les institutions consiste dans les indications qui sont seulement des éléments du récit, et auxquels Dion n’accorde pas d’attention spécifique, même si pour les historiens modernes elles ont une valeur informative parce qu’elles illustrent telle ou telle règle. Par exemple les vœux de départ que prononce le consul Crassus au Capitole, avant de franchir le pomerium pour entreprendre la campagne contre les Parthes, information qui confirme l’existence de cette règle pour les titulaires d’un imperium quand ils quittent la ville de Rome, sont mentionnés comme l’occasion des violentes tentatives de certains tribuns de la plèbe pour faire obstacle à son départ, mais sans avoir d’autre valeur que contextuelle : “Au moment où il procédait sur le Capitole à la cérémonie habituelle des vœux en vue de sa campagne, etc.…”, écrit seulement Dion. Il précise ensuite que Crassus profita des affrontements entre les tribuns eux-mêmes, dont une partie le soutenaient, l’autre non, pour sortir du pomerium, qui, nous le savons par ailleurs, correspond à la limite géographique de l’autorité des tribuns, mais de cela il ne dit rien (39.39.5-7). Les occurrences de ce type seront donc laissées de côté, et ne seront retenus que les passages dans lesquels Dion mentionne une règle, une pratique, une procédure, dont il fait un élément de l’action de tel ou tel, et non pas une simple circonstance.
4L’évocation d’une règle dans un tel contexte est faite en général de manière rapide, et très souvent elle vise uniquement à l’intelligibilité des faits rapportés, sans qu’une attention particulière soit accordée à la règle en tant que telle. Un exemple parmi beaucoup d’autres : Bibulus, le collègue de César au consulat, en 59, multiplie les manœuvres pour empêcher le vote de la loi agraire proposée par César, et, après avoir fait intervenir en vain des tribuns de la plèbe, “il proclama pour tous les jours restants de l’année une période de fêtes qui, aux termes de la loi (ἐκ τῶν νόµων), interdisait même au peuple de se réunir en assemblée” (38.6.1). Par la suite, malgré son échec, Bibulus persévère dans son opposition, et Dion précise à nouveau, en reprenant la même expression : “Chaque fois que César proposait quelque mesure nouvelle, il faisait notifier par ses appariteurs que c’était une période de fêtes pendant laquelle on ne pouvait agir sans violer les lois” (38.6.5). La règle est mentionnée à titre de moyen d’obstruction, sans que Dion indique précisément comment elle fonctionne5, et non pour elle-même. Un cas un peu différent, parce que Dion est plus explicite, se rencontre dans le passage qui décrit la manœuvre de Clodius pour échapper au procès que Milon cherche à lui intenter, en 57 – se faire élire à l’édilité –, et dans lequel on apprend que les édiles entraient en charge avant les questeurs, qui devaient tirer au sort les juges : “Ce fut la principale raison de l’ajournement (du procès)” (39.7.4). Parfois au contraire la brièveté avec laquelle la règle est mentionnée rend l’interprétation incertaine pour nous. Toujours à propos de Clodius, qui peu après tente de nuire à Milon et à Pompée qui le soutenait en les faisant insulter dans les réunions populaires, et cherche à retarder l’ouverture du procès qui cette fois visait Milon, Dion indique que Clodius “empêcha que fût introduite la loi curiate, car tant qu’elle n’était pas votée on ne pouvait traiter aucune affaire sérieuse sur le plan politique ni intenter aucun procès” (39.19.3) : les spécialistes hésitent sur la (ou les) magistrature(s) concernée(s) par cette loi curiate6. Même incertitude pour une règle de la procédure sénatoriale invoquée à propos des sénateurs qui cessent de se rendre en séance à cause du comportement menaçant de Pompée, qui ambitionnait de se faire élire au consulat, en 56 : “Comme le quorum requis par les lois (ἐκ τῶν νοµίµων) pour émettre un vote concernant les élections n’était pas atteint, etc.…” (39.30.3). Les cas où un quorum était exigé étant assez rares et mal connus pour l’époque républicaine, l’interprétation du passage est délicate7. Il arrive même que Dion soit si allusif quant aux règles en jeu que sa narration en devient obscure. La description du comportement de César à son retour d’Espagne, où il avait fait campagne à l’issue de sa préture, et qui dut faire un choix entre demander le triomphe et effectuer sa déclaration de candidature pour le consulat, parce que les règles à respecter dans les deux cas étaient contradictoires, resterait incompréhensible pour nous si nous ne disposions pas des versions plus détaillées de Plutarque, Suétone et Appien. Dion se contente d’écrire : “Estimant qu’il avait jeté de bonnes bases pour accéder au consulat, il se hâta de partir pour les élections … et décida de briguer cette magistrature avant de mener son triomphe, puisque la fête ne pouvait être célébrée auparavant. Ne l’ayant pas obtenu en raison de l’opposition acharnée de Caton, il laissa tomber cette demande ; … il renonça volontairement au triomphe, et, entrant dans la Ville, il déclara sa candidature” (37.54.1-3). Les sous-entendus institutionnels – obligation pour le promagistrat en attente de triomphe de ne pas franchir le pomerium avant le jour de la cérémonie, obligation pour le candidat à une magistrature d’effectuer sa déclaration, la professio, en personne, devant le consul en exercice, ou d’obtenir du Sénat une dérogation à la loi – sont nombreux, et supposés connus du lecteur. Ce cas n’est pas unique, et l’attitude qu’il révèle chez Dion ne nous semble pas devoir être comprise comme de la négligence, et opposée à l’effort qu’il fait dans d’autres cas, que nous avons évoqués plus haut, pour détailler une règle. En réalité ces différences ont probablement leur origine dans le degré de familiarité de ses lecteurs avec les questions institutionnelles que présume Dion. Ce qui signifie, en supposant que sa présomption soit juste, soit que dans les livres antérieurs de son Histoire romaine il avait fourni les informations suffisantes, soit que ses lecteurs disposaient déjà d’une telle culture, parce que les élites du début du iiie s. conservaient un intérêt pour les institutions anciennes de Rome, dont certaines existaient toujours8.
5Une troisième catégorie de passages est à examiner, et ce sont de loin les plus nombreux : ceux dans lesquels Dion attire explicitement l’attention sur la violation de règles. L’indication est toujours brève, et le plus souvent tout à fait claire. Par exemple, la fuite du tribun Metellus Nepos, qui avait tenté vainement de faire voter le rappel de Pompée d’Orient pour achever de réprimer la conjuration de Catilina, est présentée ainsi : “Il se hâta de rejoindre Pompée, alors qu’il lui était interdit de quitter la cité pour une seule nuit” (37.43.4). La règle est énoncée pour mettre en évidence sa transgression délibérée par le tribun. L’indication est parfois plus insistante, comme à propos du procès de Rabirius. Les juges le condamnent selon l’antique procédure de la perduellio “alors qu’ils n’avaient pas été choisis par le peuple conformément à l’usage ancestral (κατὰ τὰ πάτρια), mais par le préteur lui-même, qui n’en avait pas le droit (οὐκ ἐξόν)” ; Dion mentionne à nouveau, juste après, le caractère illégal du procès (παρὰ τὰ νενοµισµένα) (37.27.2-3). Il ne dit rien de tel, en revanche, de l’initiative d’un préteur qui, pour interrompre le procès, fait descendre l’étendard du Janicule sans que les opérations de vote soient achevées, alors que l’explication qu’il donne de cet usage fait comprendre qu’elle était abusive (37.28). On voit par cet exemple que ses dénonciations des entorses aux règles sont délibérément ciblées. Les sénateurs ne sont pas exempts de ces stigmatisations : Pompée accepte le triomphe qu’ils lui ont décerné, “bien qu’il ne fût pas conforme à l’usage ancestral (ἐκ τῶν πάνυ πατρίων) de le célébrer en l’absence de ceux qui avaient participé à la victoire” (37.21.1), et C. Antonius, après avoir mis en déroute les Catiliniens à Pistoia, “reçut le titre d’imperator pour cette victoire bien que le nombre de morts fût inférieur à celui qui était requis par l’usage (παρὰ τὸ νενοµισµένον)” (37.40.2). Il arrive, mais c’est rare, que la dénonciation ne soit pas formulée, comme par exemple à propos de César quittant sa province d’Espagne pour candidater au consulat, comme on l’a vu plus haut : Dion écrit simplement qu’il “se hâta de partir pour les élections, avant même l’arrivée de son successeur”, sans préciser qu’il enfreignait ainsi une loi, la lex Cornelia de maiestate (37.54.1). De ces exemples, il ressort que Dion effectue des choix, met en valeur telle transgression plutôt que telle autre. Les raisons de ces choix ne se laissent pas toujours deviner, et sont parfois probablement en rapport avec ce qu’il estime connu de ses lecteurs en matière de règles. Mais la lecture suivie fait ressortir, au delà de l’éparpillement des mentions égrainées au fil du récit, des thèmes particuliers qui leur donnent une cohérence : elles forment les jalons d’une réflexion sous-jacente dont le sens général est le dysfonctionnement des institutions politiques traditionnelles9. C’est à l’analyse de ces thèmes qu’il faut maintenant procéder.
La question de l’accès aux charges publiques
6Concernant les magistratures, pour lesquelles Dion manifeste un intérêt particulier, sa réflexion embrasse plusieurs aspects. Elle porte à la fois sur certaines d’entre elles, notamment la censure et le tribunat de la plèbe, et sur leur ensemble, et elles sont alors envisagées globalement sous l’angle de leur rôle dans le fonctionnement du système politique. Cette perspective est apparente dès le début du livre 36, au moment où est débattue la lex Gabinia qui confère à Pompée un commandement extraordinaire contre les pirates. Le sénateur Catulus, qui tente, dans un discours que Dion développe longuement, de dissuader ses concitoyens de voter la loi, affirme qu’un tel commandement est contraire aux principes du régime républicain : “Si cette mission représente un honneur pour ceux qui en sont jugés dignes, tous ceux qui sont dans ce cas doivent en bénéficier, c’est cela la démocratie (δηµοκρατία) ; si elle implique des efforts, chacun doit aussi en assumer sa part, c’est cela l’égalité (ἰσοµοιρία)” (36.32.1). En d’autres termes, la loi remet en cause l’égal accès aux charges publiques et l’obligation de les assumer. Cette affirmation répondait à un argument avancé par Gabinius, le tribun qui proposait la loi : “Vous devez choisir ce qui est utile à la cité (τὸ τῇ πόλει συµφέρον). Car il convient de confier les affaires non pas à ceux qui l’ambitionnent (τοὺς σπουδαρχοῦντας), mais à ceux qui en sont capables” (36.27.3).
7Or l’évocation de la compétition acharnée pour les charges publiques, l’ambitus, revient régulièrement dans les livres républicains, et se retrouve plus loin, notamment dans l’éloge funèbre d’Auguste, où Tibère lui rend hommage pour avoir “veillé à la dignité des élections (τὸ ἀξίωµα τῶν ἀρχαιρεσιῶν)”, et “remplacé dans l’esprit des citoyens l’ambition
(τὸ πλεονεκτικόν) par le souci de la renommée (τὸ εὔδοξον)” (56.40.4)10. C’est donc un thème de réflexion privilégié, et Dion le présente à certains moments de son récit comme une question digne d’un développement particulier. Ainsi, il décrit en détail les péripéties du vote de la lex Calpurnia de ambitu, en 67, qu’il présente comme une réponse voulue par les sénateurs aux ravages de la corruption électorale, insiste sur la difficulté à élaborer une loi efficace (36.38-39), puis s’attarde en considérations moralisantes sur d’autres formes de corruption (36.40.3). Reprenant la narration, il pose ensuite quelques jalons, désignant le même fléau comme la cause du complot connu sous le nom de “première conjuration de Catilina” (36.44.3), et plus tard de la conjuration de Catilina elle-même, que celui-ci aurait fomentée en réaction à la loi de ambitu que venait de faire voter Cicéron, “estimant que la décision avait été prise à cause de lui” (37.29.2). Il met à nouveau la question au premier plan dans le récit des années 53-52, qui débute par la mention des nombreux troubles occasionnés par les élections (40.45.1), évoquant à plusieurs reprises la brigue frénétique et l’absence de magistrats – l’anarchie au sens propre – à cause de l’impossibilité de procéder à leur élection (40.46.3 ; 40.48.1 ; 40.50.3), et insérant le meurtre de Clodius dans ce contexte (40.48.2 ; 40.49.5). Il insiste aussi sur la perturbation générale qui en résulte : les efforts désordonnés des tribuns et des sénateurs pour résoudre ce problème, leur recours à Pompée, leurs hésitations à lui conférer la dictature, et finalement la décision de le nommer consul sans collègue, “une étrange décision qui n’avait été prise en aucune circonstance” (40.50.5). La perturbation des élections par le comportement des candidats, emportés dans une compétition récurrente, et ses effets sur le fonctionnement régulier des institutions, sont donc pour Dion un élément essentiel du tableau politique de ces années-là11.
8Mais il fait aussi, dans le récit de la période qui suit la formation, fin 60, de l’alliance entre Pompée, César et Crassus, une large place à une autre cause de perturbation, la mainmise des triumvirs sur les élections. La logique à l’œuvre ici est différente, et Dion y rend son lecteur attentif par la manière dont il présente les faits, les inscrivant d’emblée dans le contexte de la rivalité qui oppose Pompée à César, thème qui constitue le fil conducteur de son récit des années qui précèdent la guerre civile. Le premier est présenté dans deux longs chapitres comme jaloux de la popularité que ses succès en Gaule valent au second (39.25-26), tandis que les accords de Lucques sont passés sous silence12, ce qui permet de faire apparaître l’élection au consulat de Pompée et Crassus, et leur mainmise sur les autres magistratures, comme une stratégie de compensation qui leur serait propre (“s’armer contre César” : 39.26.3) et non comme le résultat d’un pacte. Par ce procédé, le dysfonctionnement des magistratures prend un relief supplémentaire. Le récit de la manière dont Pompée et Crassus parviennent au consulat multiplie les détails qui mettent en évidence les irrégularités : professio en dehors du délai légal, recours à un interroi et retard des élections, manœuvres d’intimidation pour décourager les autres candidats, présence, enfin, de soldats à Rome (39.27.3 ; 39.30.4 ; 39.31). S’ensuit la description des procédés par lesquels, une fois élus, ils placent dans tous les collèges de magistrats, préteurs, édiles, tribuns, “les gens qui leur convenaient” (39.32), et se font ainsi aisément octroyer, pour renforcer leur position face à César, des commandements provinciaux qui dérogeaient à l’usage. Leur caractère irrégulier n’est pas commenté par Dion, sans doute parce qu’il présume que le lecteur conserve présent à l’esprit le long discours de Catulus évoqué plus haut, qui montrait comment un commandement de cette nature portait atteinte aux règles traditionnelles d’attribution de l’imperium aux magistrats supérieurs, consuls et préteurs13. L’asservissement des magistratures à l’ambition de ces grands personnages est donc un autre aspect de leur dysfonctionnement que Dion juge digne d’être analysé dans le détail.
Le dévoiement du consulat
9Le souci de la précision, qu’on a particulièrement remarqué dans le passage relatif au consulat conjoint de Pompée et Crassus, se retrouve à propos des magistratures prises individuellement. L’intérêt que Dion leur porte est variable, et le consulat, justement, n’est pas aussi présent qu’on pourrait l’attendre. Cependant, l’image que dessinent les quelques passages où apparaissent des consuls en action est assez univoque : c’est celle d’une magistrature pervertie par ceux qui la revêtent.
10La conjuration de Catilina en offre une illustration frappante. On y voit intervenir d’un côté Cicéron, dont Dion reconnaît, quasiment à contrecœur, et uniquement pour la dernière phase de la conjuration, quand Catilina entre en guerre à la tête des troupes qu’il a rassemblées en Étrurie, que “ce fut vraiment une chance pour les Romains qu’il soit resté (à Rome)” (37.34.1) ; auparavant son rôle est minimisé, voire occulté14. Son collègue C. Antonius au contraire est présenté, avec une évidente dramatisation, comme un anti-consul, qui, au lieu d’être au service de la cité, participe à son ébranlement : Dion insiste à plusieurs reprises, y compris au moment où va se livrer le combat décisif à Pistoia, sur sa complicité avec les Catiliniens, un point de vue qu’on ne trouve nulle part de façon aussi nette dans la tradition. Quant à Catilina, Dion indique d’emblée que ce sont ses échecs répétés au consulat qui l’ont poussé à l’action, et il précise que lorsqu’il quitta Rome pour l’Étrurie et “entra ouvertement en guerre, il prit le titre et la tenue des consuls” (37.33.2). Le consulat est donc représenté dans cet épisode par deux figures négatives, le traître et l’usurpateur, tandis que le seul titulaire légitime est un acteur effacé. Plus loin, il apparaît comme un jouet aux mains de Pompée, qui, revenant d’Orient, “fit élire consuls Lucius Afranius et Metellus Celer, espérant en vain qu’il pourrait grâce à eux mener à bien tous ses projets” (37.49.1), car ils avaient été ses légats. Cette instrumentalisation du consulat échoue, Afranius étant caricaturé comme plus doué pour la danse que pour les affaires, et inefficace, tandis que Metellus, qui se brouille immédiatement avec Pompée, est montré comme acharné à entraver ses projets, mais plus par tempérament que par vertu politique (37.50.1-4). L’année qui suit voit s’affronter César, qui cherche à faire voter à toute force, et contre l’avis de la majorité des sénateurs, sa loi agraire, y compris par la violence, et son collègue Bibulus, qui multiplie les manœuvres d’obstruction. Dion détaille celles-ci avec une grande précision, mettant en évidence ce dysfonctionnement de la collégialité, qui aboutit à ce que Bibulus “se retire de la vie politique (τῶν πολιτικῶν ἐξέστη)” (38.6.6), et que César “assume personnellement la responsabilité de l’ensemble des propositions, des avis et des édits, tout comme s’il était seul magistrat de la cité (ὡς καὶ µόνος αὐτῆς ἄρχων)” (38.8.2). Enfin, un passage de la fin du livre 40 montre les effets, dans les derniers jours de l’année 50, d’une situation identique à celle de 59, en ce sens que toute action commune des consuls est empêchée par leurs attachements partisans opposés. L’un, Marcellus, violemment hostile à César, que soutenait une majorité de sénateurs, en arrive à prendre de lui-même une initiative illégale, comme Dion le précise : “Il bondit hors du Sénat, se rendit auprès de Pompée qui se trouvait dans les faubourgs, et lui confia, de sa propre autorité et sans décret, la protection de la Ville et deux légions urbaines” (40.64.4). Et il rappelle plus loin que les mesures concernant ces légions cesseraient d’être valides à la fin de l’année, c’est-à-dire quand le consul sortirait de charge, “parce qu’elles n’avaient été décidées ni par le Sénat ni par le peuple” (40.66.2). Cette insistance est d’autant plus remarquable que Dion, à contre-courant du reste de la tradition, ne dit pas un mot de la séance du Sénat que Marcellus quitte brutalement, et que ni César (Hirtius), ni Plutarque, ni Appien, qui rapportent cet épisode avec plus ou moins de détails, ne donnent ces précisions-là sur les actes du consul.
11Rappelons aussi la façon dont Pompée et Crassus ont usé du consulat en 55, et le consulat sans collègue de Pompée en 52, pour compléter ce tableau en pointillé du consulat, éclaté en facettes diverses apparaissant au fil du récit, mais cohérent. Il présente un aperçu des différentes formes d’affaiblissement et de dévoiement que le consulat subit, du point de vue de Dion, et témoigne de la précision de ses analyses.
Le naufrage de la censure
12Contrairement au consulat, la censure est une magistrature sur laquelle Dion attire explicitement l’attention de ses lecteurs, sous la forme de commentaires personnels, un procédé qu’il emploie rarement dans les livres républicains. Ainsi, à propos de l’abrogation, en 52, de la loi de Clodius qui empêchait un censeur de sanctionner et rayer des listes quiconque sans l’accord de son collègue, il écrit : “Quand ils eurent retrouvé leur pouvoir d’antan … ils n’osèrent pas heurter de front le grand nombre, mais ils ne voulaient pas non plus encourir le reproche de ne pas radier les personnes indignes, et c’est pourquoi aucune personne sensée n’eut désormais l’ambition d’exercer cette charge” (40.57.3). Il veut indiquer que la suppression des restrictions que la loi de Clodius avait imposées n’a pas permis de restaurer l’autorité de la censure, et de cette manière il fait de cet événement un tournant dans une histoire qu’il livre par ailleurs, comme à son habitude, sous la forme de brèves indications sur telle ou telle censure données au fil du récit. Bien qu’elles paraissent neutres, leur signification implicite est claire : inefficacité et décisions néfastes dessinent un tableau très critique.
13Ainsi, il signale que ni les censeurs de 65, à cause de leur désaccord, ni ceux de 64, en butte à l’opposition des tribuns, ne parvinrent à remplir leurs fonctions (37.9.3-4), et il est remarquable qu’il ne donne pas leur nom, alors que l’un d’eux, Crassus, était un personnage éminent : c’est la magistrature qui l’intéresse, non son titulaire. Parmi les fonctions propres aux censeurs, l’une fait régulièrement l’objet de ces mentions, la révision de la liste des sénateurs (lectio senatus). Dès le livre 36 il impute à celle de 70, au cours de laquelle le nombre exceptionnel de 64 sénateurs avaient été radiés, l’aggravation de la corruption électorale dont, on l’a vu plus haut, il fait un de ses thèmes privilégiés : “Parce que beaucoup de ceux dont les noms avaient été rayés par les censeurs s’efforçaient de recouvrer d’une manière ou d’une autre leur rang de sénateur, pour l’ensemble des magistratures se multipliaient coalitions et intrigues” (36.38.2) – en effet l’un des moyens, pour un sénateur radié, de pouvoir siéger à nouveau, et au rang qu’il occupait précédemment, était de se faire élire à la magistrature correspondante. Plus loin, il livre une indication dont nous ne pouvons pas saisir toute la portée, faute d’informations complémentaires, notamment sur l’effectif habituel du Sénat15, mais qui devait être évocatrice pour ses lecteurs : “Cette année-là, les censeurs inscrivirent dans l’album sénatorial tous ceux qui avaient été magistrats, au-delà même du nombre” (37.46.4). C’est l’anomalie du nouvel effectif qui est implicitement critiquée.
14La loi que fit voter Clodius, dont on a vu qu’elle rendait plus difficiles les sanctions et les radiations, et concernait donc aussi la lectio, est présentée comme une pure manœuvre destinée à se concilier les sénateurs et les chevaliers et à couper Cicéron de ses soutiens avant de l’abattre (38.13.1-2). Cela suffirait à la disqualifier, s’il ne s’y ajoutait le commentaire de Dion sur son abrogation, évoqué ci-dessus : la loi avait privé les censeurs de “leur pouvoir d’antan (τὴν ἀρχαίαν ἰσχύν)”. Pourtant, son abrogation à l’initiative de Scipion, collègue de Pompée en 52, n’est pas présentée sous un jour positif, comme l’annonce le commentaire préalable : “Apparemment, il le faisait en leur faveur, puisqu’il leur rendit le pouvoir qui était le leur auparavant, mais les choses tournèrent à l’inverse” (40.57.1). Suit l’explication citée plus haut, qui dénonce la crainte qu’auraient les titulaires de la magistrature d’assumer les risques politiques des choix qu’ils ont à nouveau liberté de faire, et se conclut ainsi : “Aucune personne sensée n’eut désormais l’ambition d’exercer cette charge” (40.57.3). La description donnée plus loin de la censure d’Appius Claudius et L. Calpurnius Pison, en 50, illustre ce naufrage, en montrant comment aucun des deux n’était “sensé”. Les conséquences politiques de la sévérité de l’un et de l’indulgence de l’autre sont présentées comme pareillement inattendues et catastrophiques, en contribuant à précipiter le déclenchement de la guerre civile (40.63-64). Ce que Dion veut sans doute exprimer dans ces deux passages qui se répondent, c’est que la censure telle qu’elle avait fonctionné dans le passé n’était plus viable dans le contexte de polarisation partisane qu’avait imposée la puissance de Pompée et de César.
15Mais sa réflexion sur la censure dépasse le cadre de ces livres : il donne dans les suivants, à propos de César d’abord, puis d’Auguste, des précisions qui ne figurent pas ailleurs sur la manière dont les anciennes fonctions des censeurs ont continué d’être assumées. Et l’une de ces indications souligne l’idée de la décadence irrémédiable de la censure. Mentionnant le décret du Sénat qui accordait à César la charge de préfet des mœurs, après la victoire de Thapsus, il écrit : “Ils le désignèrent pour trois ans comme préposé aux mœurs de chacun (τῶν τε τρόπων τῶν ἑκάστου ἐπιστάτην) : c’est ainsi qu’il fut appelé, comme si le nom de censeur n’était pas digne de lui” (43.14.4).
Le rôle néfaste du tribunat de la plèbe
16On sait que Dion décrit cette magistrature sous un jour très négatif dans ses premiers livres, au moment où elle apparaît, et dénonce ensuite régulièrement les méfaits des tribuns à différentes étapes de l’histoire de Rome16. Les livres 36 à 40 comportent de nombreux passages qui illustrent cette constante de la pensée politique de Dion, mais un seul, placé en préface du développement consacré à la lutte contre la corruption, présente un énoncé général, en évoquant la restauration par les consuls de 70 des pouvoirs et prérogatives des tribuns que Sylla avait amoindris : “Le pouvoir des tribuns (ἥ τε τῶν δηµάρχων δυναστεία) était redevenu ce qu’il était anciennement” (36.38.2)17. Il est remarquable qu’il prenne la forme d’un constat d’ordre institutionnel, apparemment neutre.
17Les autres passages montrent les tribuns en action, mais, à la différence de ce qu’on a observé à propos des autres magistratures, ce n’est pas seulement le contexte qui suggère le jugement de Dion : il arrive que tel ou tel tribun soit explicitement caractérisé de façon négative. Ainsi, Gabinius est présenté, avant même que soit décrite sa proposition de loi, comme inféodé à Pompée et étranger au souci du bien public, “car c’était le pire des hommes” (36.23.4). Et même quand Dion se contente de décrire leurs initiatives, il tourne souvent le récit de façon à les discréditer : Manilius, au moment où il propose que soit confiée à Pompée la guerre contre Mithridate, a une conduite incohérente (36.42.2-4), Metellus Nepos se comporte comme un agitateur (37.43.1), Clodius multiplie les actions qui ne sont que des manœuvres indirectes pour atteindre l’objectif pour lequel César l’utilise, faire condamner Cicéron (38.12-17), Curion dissimule son ralliement à César et prend des initiatives trompeuses (40.61-62). Autre caractérisation fréquente du comportement des tribuns : ils apparaissent comme les marionnettes des puissants. Gabinius et Manilius sont des hommes de paille de Pompée, comme Metellus Nepos ; Clodius et Curion agissent pour le compte de César. Seule l’action du tribun réformateur de 67, C. Cornelius, est présentée sous un jour favorable (36.38.4-40.2).
18Derrière ces représentations, une idée récurrente, qui ressort fréquemment de la description de leurs initiatives : le danger de déstabilisation qu’ils représentent. Lorsque le Sénat prend des mesures pour juguler l’agitation provoquée par le complot des consuls désignés pour 65, la soi-disant “première conjuration de Catilina”, un tribun non nommé y fait obstacle par son intercession – un détail inconnu par ailleurs (36.44.5). Au début de l’année 63, pour laquelle sont évoqués des présages défavorables, Cicéron, écrit Dion, fait échouer une série de projets proposés par différents tribuns, significativement non nommés, là non plus, mais caractérisés comme subversifs dès le début du passage : “Les tribuns obtinrent le soutien du consul Antonius qui leur ressemblait en tous points” (37.25.3). Peu après, survient le procès de Rabirius, attribué à l’initiative exclusive du tribun Labienus, dont les liens avec César ne sont pas évoqués, contrairement à ce qu’indique le reste de la tradition, et présenté par Dion comme une mise en cause de l’autorité des sénatus-consultes, et “un bouleversement absolu du régime politique (πᾶς ὁ κόσµος τῆς πολιτείας ἐταράττετο)” (37.26.2). Et les attaques de Metellus Nepos contre Cicéron après l’exécution des conjurés arrêtés, “en réalité dirigées contre le Sénat” (37.42.2), sont présentées comme une forme de déstabilisation. En 52, ce sont des tribuns qui paralysent les élections, contribuant à laisser la cité sans magistrats, puis provoquant des débats sans issue par leur suggestion de désigner Pompée comme dictateur (40.45.3 ; 40.45.5), et qui, en attisant la colère populaire soulevée par l’assassinat de Clodius, suscitent les violences qui rendent nécessaire le vote du senatus consultum ultimum (40.49.1-3).
19L’ensemble de ces indications dessine un tableau cohérent et quasiment univoque des dangers que les tribuns de la plèbe de la fin de la République font courir à la stabilité du régime, qu’ils agissent de leur propre initiative ou pour le compte des triumvirs. Mais ces livres contiennent aussi des informations originales sur un certain nombre d’initiatives tribuniciennes qui touchent aux institutions elles-mêmes. C’est dans le contexte de l’anarchie des années 53-52 qu’elles sont mentionnées (40.45.3-4). L’une consiste à “organiser les jeux à la place des préteurs” qu’on n’a pu élire, c’est-à-dire à assurer la continuité d’une des formes les plus importantes des cultes publics. Dion mentionne un fait analogue en 49, au moment où les armées de Pompée et de César s’affrontent et où bon nombre de magistrats sont absents de Rome : “Comme il n’y avait plus aucun édile sur place, les tribuns accomplissaient toutes les tâches incombant aux édiles” (41.36.3). Sans doute suggère-t-il que l’accomplissement par des magistrats de la plèbe de fonctions relevant de magistrats du peuple romain était une anomalie18. L’autre initiative que prennent les tribuns est révélatrice d’une volonté de réforme institutionnelle dont on ne connaît pas d’autre exemple. Ils proposaient, écrit Dion, “d’installer à la place des consuls des tribuns consulaires afin qu’il y eût davantage de magistrats désignés comme autrefois” : nous ignorerions, sans ce texte, cette tentative pour faire revivre une magistrature qui avait été liée au conflit patricio-plébéien des premiers siècles de la République, car elle avait été créée pour offrir aux plébéiens, à défaut du consulat lui-même, un accès au pouvoir consulaire, avant que les leges Liciniae Sextiae leur ouvrent le consulat. La pertinence de la proposition – le petit nombre des postes de consul contribuait certainement à l’emballement de la brigue – n’est pas soulignée, et peut-être Dion cherche-t-il seulement à suggérer à son lecteur qu’une telle initiative est révélatrice du sentiment d’impuissance que provoquait la paralysie des élections.
L’impuissance du Sénat
20Comme on l’a vu à l’instant, le procès de Rabirius est présenté par Dion comme une mise en cause de l’autorité des sénatus-consultes, et “un bouleversement absolu du régime politique (πᾶς ὁ κόσµος τῆς πολιτείας ἐταράττετο)” (37.26.2). On s’attendrait donc, pour ce qui concerne le rôle du Sénat dans cette période où le fil conducteur du récit de Dion est le dysfonctionnement croissant des institutions traditionnelles, à ce que les épisodes marquants soient décrits comme autant de signes de son affaiblissement. Pourtant, le tableau qui est esquissé par touches successives n’est pas aussi univoque, et révèle une réflexion nuancée.
21Le premier de ces épisodes, le combat politique occasionné par le vote de la lex Gabinia, auquel Dion accorde un développement exceptionnellement long, offre certes une vision tranchée. Il montre d’abord avec insistance les sénateurs démunis et paralysés face à la gravité d’une piraterie maritime devenue omniprésente et menaçant Rome elle-même, payant le prix de leur incapacité passée à apprécier le danger et de leurs décisions inefficaces et inadaptées (36.23.2-3), puis s’opposant énergiquement à la proposition du tribun Gabinius : “La proposition reçut un accueil favorable, et tous d’emblée penchèrent en faveur de Pompée, excepté le Sénat ; il préférait en effet tout subir de la part des pirates plutôt que de remettre à Pompée un commandement aussi étendu” (36.24.1). Cette présentation délibérément schématique, et que nous savons inexacte, suivie de la description des affrontements physiques à la curie, puis des vaines manœuvres pour entraver le vote de l’assemblée, est un moyen de suggérer au lecteur que le Sénat n’est plus en mesure de gérer l’empire territorial de Rome, une idée que Dion exprime ultérieurement en son nom propre, quand, commentant le meurtre de César au début du livre 44, il rejette le régime républicain comme inadapté à ce qu’est devenue la cité à cette époque (44.2.4). En décrivant avec précision cet épisode, il prépare le lecteur à cette analyse générale des mérites comparés de la monarchie et de la démocratie, et en même temps il place au premier plan le personnage de Pompée, prototype des imperatores dont la puissance, acquise par les succès militaires à l’extérieur, échappe au contrôle du Sénat. De la sorte, il ne lui sera plus nécessaire d’insister sur cet aspect de l’histoire des dernières décennies de la République. Les commandements extraordinaires que reçoivent Pompée et Crassus en 55, par un plébiscite, sont indiqués sans aucun commentaire autre que les oppositions partisanes qu’ils provoquent, comme si le Sénat était hors jeu (39.33.2). Et l’enthousiasme que suscite l’expédition de César en Bretagne donne lieu à des commentaires ironiques de Dion sur la vanité de cet exploit et la naïveté des sénateurs éblouis, qui votent des honneurs démesurés (39.53).
22Autant l’image d’un Sénat incapable de répondre aux défis extérieurs et dépossédé de tout pouvoir de décision en ce domaine est nette et dépourvue d’ambiguïté, autant face aux problèmes intérieurs il est présenté au contraire, du moins avant la formation en 60 du “premier triumvirat”, comme capable d’initiatives opportunes et de décisions énergiques. L’année même du vote de la lex Gabinia, les sénateurs sont explicitement crédités d’une ferme détermination à juguler la brigue par une loi. Les consuls chargés de la faire voter, écrit Dion, en précisant malicieusement qu’eux-mêmes, y ayant eu recours, “n’agissaient pas ainsi parce qu’ils abhorraient ces pratiques …, ils subissaient en réalité la pression du Sénat” (36.38.3). Il indique ensuite que les sénateurs, soucieux de l’efficacité d’une telle loi, s’efforcèrent de faire écarter une proposition tribunicienne trop radicale qui aurait découragé les accusateurs. Une appréciation si clairement positive doit être rapprochée de l’entrée en matière de la conjuration de Catilina : “Le Sénat décida, sur les instances de Cicéron au premier chef, quand (Catilina) brigua une nouvelle fois le consulat et employa tous les moyens possibles pour être élu, d’ajouter par une loi un exil de dix ans aux peines prévues en cas de corruption” (37.29.1). L’initiative de cette nouvelle lex de ambitu apparaît là aussi comme une réponse adaptée au contexte, même si, comme l’indique Dion juste après, elle décida Catilina à agir.
23À plusieurs reprises, pour ces années, Dion met en évidence, en donnant des précisions que les autres auteurs négligent, la capacité des sénateurs à prendre des mesures énergiques à l’égard de ceux qui menacent la paix civile. Dans l’affaire du complot des consuls désignés Cornelius Sylla et Autronius Paetus, en 66, ils accordent d’abord une garde armée aux consuls en exercice, avant que la véritable riposte soit paralysée par l’intercession d’un tribun, comme on l’a vu plus haut (36.44.4-5) – affirmation invérifiable, car la tradition sur cette affaire est très embrouillée et suspecte, mais révélatrice de l’interprétation de Dion19. Et à propos de la conjuration de Catilina il décrit une série de mesures, prises dès sa révélation par les fameuses lettres remises à Crassus, que nous ne connaissons pas autrement, ou très allusivement : tumultus, garnisons postées dans la ville, enquête pour démasquer les coupables, en plus du senatus consultum ultimum, dont il s’applique à traduire la formule avec exactitude (37.31). Plus remarquable encore, il crédite faussement le Sénat de l’injonction faite à Catilina de quitter la Ville, alors qu’on sait que ce fut l’effet du seul discours de Cicéron, la Première Catilinaire, qui ne fut suivi d’aucun décret (37.33.1). Pareillement, après avoir donné les grandes lignes du débat sur le sort des conjurés emprisonnés, il évoque les poursuites décidées à l’encontre des complices présumés (37.36.3).
24En réalité cette image d’un Sénat assumant efficacement sa vocation de protection de la cité est partielle, et dans deux autres développements, l’un qui précède cet épisode, l’autre qui le suit, Dion attire l’attention au contraire sur la fragilité de son autorité. Le premier est la présentation du procès de Rabirius (37.26) : Dion attribue aux sénateurs des réactions indignées, motivées surtout, dit-il, par le sentiment que l’autorité du Sénat était radicalement remise en cause, et il ajoute sa propre analyse, évoquant sans le nommer le senatus consultum ultimum, et prophétisant la conjuration de Catilina : les décisions du Sénat perdraient à l’avenir leur légitimité si un citoyen qui les avait appliquées – Rabirius – encourait une condamnation, et les séditieux auraient un sentiment d’impunité. C’est à ce propos qu’il parle de “bouleversement absolu du régime politique” (37.26.2). Le second passage est le bilan de la conjuration de Catilina (37.42), centré sur les attaques politiques et la menace de procès dont Cicéron fut la cible à cause de l’exécution des Catiliniens : “Si l’accusation le visait personnellement en apparence, c’était en réalité une manœuvre dirigée contre le Sénat”. Et Dion mentionne le vote d’un sénatus-consulte, inconnu par ailleurs, qui accordait à Cicéron une immunité. Plus loin, la loi de Clodius visant à pousser Cicéron à s’exiler, en 58, est décrite de façon analogue : “Elle mettait en cause l’ensemble du Sénat parce qu’il avait confié aux consuls la protection de l’État, ce qui les autorisait à agir de la sorte, avant de condamner Lentulus et les autres qui furent alors exécutés” (38.14.5). Ces trois passages mis en perspective illustrent bien les nuances de l’analyse que fait Dion de la place du Sénat dans le système politique à cette période, pour ce qui concerne les affaires de la Ville : centrale, mais contestée et menacée.
25Tout change, en revanche, avec la formation du “premier triumvirat”. Dès l’année 59, César, heurté par l’opposition intransigeante des sénateurs à son projet de loi agraire, “ne communiqua plus rien au Sénat et prit l’habitude de soumettre directement au peuple toutes les mesures qu’il désirait”, indique Dion, soulignant cette rupture avec l’usage institutionnel (38.4.1). Quand Pompée et Crassus décident de revêtir le consulat, les sénateurs mènent contre eux et contre les tribuns à leur solde un combat acharné mais vain, dont Dion relate en détail les péripéties : prise des vêtements de deuil, refus d’assister aux jeux publics, affrontements physiques (39.28-29). Le bilan est clair : “Ils étaient réduits à l’impuissance comme des esclaves”. En 52, ils semblent recouvrer un certain pouvoir de décision : lorsque les désordres provoqués par le meurtre de Clodius sur la voie Appienne sont à leur comble, ils votent le senatus consultum ultimum. Mais ils se divisent, les uns se tournant vers Pompée, les autres vers César, et si Dion souligne que la décision qu’ils prennent, de nommer Pompée consul sans collègue “parut bonne”, car dès lors Pompée, flatté, “prit soin d’agir constamment en faveur du Sénat” (40.50.5), la suite du récit fait comprendre qu’il s’agit d’une illusion. Car à partir de là commence la narration des préliminaires de la guerre civile, et, de façon frappante, qui contraste avec les autres auteurs, Dion n’y fait plus aucune place au Sénat, en particulier il omet de rapporter la séance mouvementée de décembre 50 au cours desquelles Curion multiplie les manœuvres pour éviter des votes qui pénalisent César – ce choix narratif est révélateur.
En manière de conclusion
26Pour conclure, et pour illustrer la cohérence des analyses institutionnelles de Dion, il vaut la peine d’examiner rapidement trois passages qui montrent ce que deviennent les séances du Sénat et le système des magistratures dès que commence la guerre civile, en 49. Autant Dion a ignoré les dernières séances de l’année 50, autant il retrace longuement celle de janvier 49, capitale à ses yeux parce qu’elle provoque la rupture décisive avec César, en donnant une foule de détails de procédure qui sont d’ordinaire absents du récit (41.1‑3). On voit ainsi les deux tribuns césariens obliger les consuls à donner lecture du message adressé par César au Sénat, selon une règle inconnue par ailleurs20 ; les consuls faire voter per discessionem, une procédure très rare, les tribuns n’étant pas tenus d’exprimer leur avis, indique Dion21 ; les sénateurs passer par-dessus l’intercession des tribuns césariens, en faisant rédiger la décision qu’ils avaient prise sous la forme d’une auctoritas senatus, une procédure rare également et que Dion ne nomme pas ici, mais qu’il explique dans le long passage où il décrit la réforme augustéenne de la procédure des séances (55.3.4-5) ; enfin le vote du senatus consultum ultimum et du tumultus, et la menace de déclarer César hostis publicus. Cette abondance de détails signifie manifestement qu’il ne s’agit pas seulement pour lui d’informer le lecteur avec exactitude sur un événement décisif, mais de montrer que les institutions elles-mêmes sont à ce moment-là un élément de la lutte pour le pouvoir : les consuls et les sénateurs d’un côté, les deux tribuns césariens de l’autre mobilisent tous les dispositifs institutionnels possibles pour l’emporter.
27La même démarche se retrouve à propos des magistratures. Dion présente, en deux passages qui se correspondent, ce qu’il en advient une fois la guerre civile engagée. Du côté césarien, il décrit longuement l’organisation des pouvoirs à Rome quand César y pénètre et revêt la dictature (41.36), et en dénonce avec constance les faux-semblants. César est nommé dictateur par Lépide, préteur – les consuls ont quitté Rome pour suivre Pompée –, “contrairement à l’usage (παρὰ τὰ πάτρια)”, César pourvoit aux magistratures et aux sacerdoces, “mais sans respecter scrupuleusement les règles traditionnelles (τὰ νενοµισµένα)”, puis “il résigne la charge de dictateur (τὸ ὄνοµα τῆς δικτατορίας) mais conserve la puissance qu’elle comportait (τὴν δὲ δύναµιν τό τε ἔργον αὐτῆς)”. En effet, résume Dion, “il utilisait la force des armes, et reçut une légitimation (ἐξουσίαν ἔννοµον) de ce qui restait des sénateurs, mais il faisait tout ce qu’il voulait impunément”. Les institutions traditionnelles apparaissent non plus seulement comme un élément de la conquête du pouvoir, mais comme son enjeu22. Du côté des Pompéiens repliés à Thessalonique, qui s’efforcent “de donner le sentiment que c’était le peuple et la Ville entière qui se trouvaient là” en y consacrant un espace auspicial – une information qui ne se trouve que chez Dion –, et qui “étaient très attachés aux usages ancestraux (τῶν πατρίων)”, rien, en réalité, n’est conforme aux règles. Car à force de légalisme les Pompéiens se sont enfermés dans une impasse institutionnelle dont ils ne peuvent sortir qu’en prorogeant les magistrats de l’année précédente, faute de loi curiate (41.43)23. La conclusion de Dion est nette : “Ces hommes exerçaient nominalement leur magistrature dans leurs camps respectifs, mais dans les faits Pompée et César, qui, pour la propagande, détenaient un titre légal, l’un de consul, l’autre de proconsul, faisaient entièrement non pas ce que leur imposait leur charge, mais ce qu’ils voulaient” (41.43.5). Il a pris la peine de décrire la situation des magistratures traditionnelles dans les deux camps pour amener brutalement le lecteur à constater leur caractère illusoire : sur ce plan, la République a déjà pris fin. La perversion totale du système des magistratures que la lex Titia rendra possible, et que Dion décrit à plusieurs reprises dans son récit du triumvirat24, est en germe dans ces anomalies du début de la guerre civile de 49.
28Les deux composantes essentielles des institutions républicaines dont on vient de suivre l’analyse dans les livres 36 à 40, les magistratures et le Sénat, font l’objet d’un traitement analogue : richesse des informations, précision des détails, dévoilement minutieux des dysfonctionnements. C’est que, du point de vue de Dion, les procédures institutionnelles ne sont pas seulement le cadre dans lequel se déroulent les conflits politiques, mais, surtout quand commencent à s’opposer, en un combat inégal, les sénateurs attachés à la République et les imperatores, leur enjeu. Elles forment, de ce fait, la matière du récit, et donnent à l’Histoire romaine de Dion cette coloration si particulière : c’est une histoire de la République comme régime politique25. C’est pourquoi il a fait une place à des informations qui paraissent a priori anecdotiques, comme les changements de vêtements répétés des sénateurs, ou leur refus de participer aux cérémonies sacrées, en les mettant sur le même plan que le vote du senatus consultum ultimum ou la déclaration d’hostis publicus26 : ce sont des modes d’action révélateurs de la contradiction entre les positions institutionnelles et les réalités de pouvoir, et c’est pour cette raison que Dion continue de leur faire une place dans le récit des guerres civiles puis de la fondation du Principat.
Notes de bas de page
1 40.66.3 ; 55.6.5. La valeur documentaire de l’Histoire romaine à cet égard est soulignée dans Pina Polo 2013, 428-430.
2 En 63 a.C., le vieux sénateur Rabirius fut accusé du meurtre du tribun Saturninus survenu près de quarante ans plus tôt alors que le Sénat avait voté le fameux senatus consultum ultimum. Aux yeux de Dion, “ce procès avait pour effet de priver ses décrets de toute validité”, et il ajoute aussitôt : “c’était donc un bouleversement absolu du régime politique” (37.26.1-2).
3 Un exemple : la procédure, appelée la transitio ad plebem, à laquelle Clodius, qui appartenait à une famille patricienne, eut recours pour pouvoir briguer le tribunat de la plèbe, accessible seulement aux plébéiens, est décrite de manière incorrecte, avec une confusion entre adoption et adrogatio (37.51.1-2). Cf. Lachenaud & Coudry 2014, 184 n. 342.
4 Les assemblées populaires notamment, et en particulier les contiones, auxquelles l’historiographie récente fait une large place. Sur le Sénat, voir Kuhn-Chen 2002, 230-236.
5 On sait par ailleurs que les consuls peuvent décréter de leur propre chef des jours de fête (des feriae), ce qui modifie le caractère des jours dans le calendrier, notamment les jours dits comitiaux seuls propres à la tenue des assemblées du peuple (cf. Lachenaud & Coudry 2011, 53 n. 21).
6 Cf. Van Haeperen 2012, 100-103.
7 Le contexte étant celui de la vigoureuse opposition du consul Marcellinus et d’une partie des sénateurs à la candidature de Pompée et Crassus au consulat, déclarée en dehors du temps légal, ce qui rendait nécessaire une dispense des lois, on peut penser que le quorum dont parle Dion était celui en vigueur depuis un plébiscite de 67 concernant la procédure en cas de dispense des lois. Cf. Bonnefond-Coudry 1989, 403-406.
8 Deux constatations permettent d’étayer cette hypothèse. L’une est inspirée d’un passage dans lequel Dion, à propos du procès de Rabirius, décrit une pratique comitiale mise à profit par l’un des protagonistes, mais qui, par comparaison avec les règles en jeu dans le choix de César que l’on vient de voir, est de l’ordre du détail infime : il s’agit de l’étendard levé ou abaissé sur le Janicule au moment du vote des comices centuriates (37.28). Or Dion termine par ces mots : “Aujourd’hui encore, on agit ainsi pour respecter l’usage”. Il suppose donc que ce détail a été remarqué par ses contemporains, mais qu’ils en ignorent la raison et sont curieux de la connaître. L’autre constatation, qui va dans le même sens, est le nombre élevé des traités de droit public spécialisés qui fleurissent à son époque, sous la plume notamment de grands juristes qui participent à la haute administration de l’Empire, comme Ulpien et Paul, et qui portent sur les charges publiques, consulat, proconsulat, questure, etc.… (cf. Urso 2005, 175-180).
9 Les assemblées populaires, que nous laissons volontairement de côté, occupent une place importante dans cette réflexion, comme en atteste le récit détaillé de trois épisodes riches en illégalités et en violences, le vote de la lex Gabinia en 67, celui de la rogatio Flauia en 60, celui de la loi agraire de César en 59.
10 À noter également un passage du discours de Mécène, où le choix de ses conseillers par le monarque selon le mérite est présenté comme bien préférable à la désignation par le sort ou la brigue (52.15.3). À plusieurs reprises, dans les livres augustéens, Dion montre Auguste préoccupé par des perturbations lors les élections au consulat : en 22 (54.6.2-4), en 19 (54.10.1-2), en 8 (55.5.3), et il évoque le vote, en 18, de la lex Iulia de ambitu (54.16.1).
11 Velleius (2.47.3), et surtout Appien (BC, 2.19.69-71 ; 2.23.87-88) font aussi une place au phénomène de l’ambitus, mais seulement pour expliquer la désignation de Pompée comme consul unique, et dans une perspective différente, qui consiste à valoriser l’action réformatrice de Pompée, qui prétendait, écrit Appien, remettre d’aplomb le régime (διόρθωσις) avec sa loi de ambitu. Dion, lui, en fait un thème de réflexion qui court sur toute la période couverte par ses livres 36 à 40. À noter que le lien entre ambitus et affaiblissement du régime républicain figure dans les lettres de Cicéron de l’été et l’automne 54 (par ex. Q Fr., 2.14.4 ; 3.2.2-3).
12 Cette omission, qu’on a parfois considérée comme un oubli, et un signe de la médiocre qualité historique du récit de Dion, doit plutôt s’interpréter comme l’effet d’un choix délibéré, répondant à des considérations littéraires, tant il est improbable que Dion ait ignoré un événement évoqué par Plutarque, Suétone et Appien. Cf. Lachenaud & Coudry 2011, xxix-xxx.
13 Cf. dans ce volume la contribution d’E. Bertrand et M. Coudry.
14 Cf. Lachenaud & Coudry 2014, lxvi-lxvii.
15 Le chiffre de 600 que les études modernes retiennent habituellement repose sur le regroupement de sources diverses et peu explicites.
16 Cf. Fechner 1986, 206-210 ; Urso 2005, 53-77.
17 L’emploi du mot δυναστεία pour désigner le pouvoir des tribuns est habituel chez Dion. On le trouve dans le résumé qu’a donné Zonaras (7.15.10) à propos de la création du tribunat, et dans le passage de l’Histoire romaine où il est question du projet d’Octavien de devenir tribun pour tirer parti du pouvoir que comporte le tribunat, dès qu’il parvient à Rome après la mort de César (45.6.2). La puissance tribunicienne des empereurs est désignée en revanche par le mot ἐξουσία.
18 Cf. la note de Hinard, in : Freyburger-Galland et al. 2002, 64 n. 4.
19 Cf. Seager 1964, sur la “fabrication” de la “première conjuration de Catilina” ; Marshall 1977, sur le passage de Dion.
20 Cf. Barrandon 2010, 83, 87.
21 Cf. Bonnefond-Coudry 1989, 485-486 et les remarques de Hinard, in : Freyburger-Galland et al. 2002, lix-lx.
22 Cf. Hinard, ibid., lxiii.
23 Cf. Hinard, ibid., l-li.
24 Pour les années 40 (48.32.1 ; 48.32.3-4), 39 (48.34.5 ; 48.35.1-2), 37 (48.53.1-4), 36 (49.16).
25 Comme l’a vu Fechner 1986, 154, en montrant que Dion a une vision de la décadence de la République qui fait une place importante au dysfonctionnement des institutions politiques, et pas seulement aux rivalités de personnes et à la corruption des mœurs comme les autres auteurs.
26 C’est grâce à son œuvre que l’on connaît une grande partie de ces décrets : cf. les tableaux dans Allély 2012, 150-151.
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