Cassius Dion et les historiens grecs. Contribution à l’histoire comparée des traditions textuelles
p. 21-32
Texte intégral
1La tradition du texte de l’Histoire romaine a été magistralement étudiée par U. P. Boissevain, au point que son editio maior, parue entre 1895 et 1901, demeure à plus d’un titre indépassable1. Cependant, si le savant batave a établi un stemma des sources manuscrites directes de l’Histoire romaine et évalué la fiabilité respective et relative des témoins indirects (Xiphilin et Zonaras notamment), il n’a pas cherché à reconstituer les étapes et les circuits de la transmission et de la réception de cette œuvre durant l’Antiquité et à Byzance : sa démarche était celle d’un philologue et d’un éditeur de textes, non d’un historien. Or, les avancées significatives qui ont été faites depuis le début du xxe s. dans le domaine de l’ecdotique des textes grecs en général, et des historiens grecs en particulier, permettent désormais d’enrichir le tableau quelque peu désincarné dressé par Boissevain, mais aussi de réexaminer à nouveaux frais certaines idées reçues. Il n’est pas question, dans les limites de cette contribution, de procéder à une actualisation complète des connaissances sur l’histoire du texte de Cassius Dion, mais seulement de revenir sur deux étapes majeures de la transmission directe des textes antiques : les éditions sur rouleaux de papyrus d’une part et les premières éditions byzantines – sur codex de parchemin et en écriture minuscule (ix‑xie s.) – d’autre part, qui, dans le cas des historiens grecs profanes, ont abouti à la création du corpus que nous connaissons aujourd’hui.
L’Histoire romaine sur rouleaux
2L’œuvre de Cassius Dion, avec ses quatre-vingts livres, semble se conformer à ce que J. Irigoin a appelé “la loi non-écrite des décades”, observée par la plupart des historiens grecs d’époque hellénistique et romaine2 : le nombre de livres que comptent leurs histoires est un multiple de dix, probablement parce qu’une dizaine de rouleaux permettait un empilage régulier sur des rayons de bibliothèque (4+3+2+1)3. Cette règle suppose qu’à chaque livre correspondait un rouleau, ce qui était effectivement la norme4, même s’il pouvait arriver qu’un livre fût divisé en deux rouleaux, comme cela est attesté pour Diodore de Sicile5. Mais elle n’implique pas pour autant que le rouleau de papyrus ait eu, à partir d’une certaine époque, des dimensions fixes, un format standard de librairie6 qui auraient prédéterminé la longueur dévolue à chaque livre : on observe au contraire d’importantes variations d’un livre à l’autre de l’Histoire romaine (de 27 à 66 chapitres)7, et c’est vrai également pour les Antiquités romaines de Denys d’Halicarnasse8 ou l’Histoire d’Hérodien9 par exemple, ce qui semble prouver que l’unité sémantique du livre a toujours prévalu sur l’unité matérielle, que le support a été adapté au contenu et non l’inverse. Cependant, ce n’est pas parce que la division en livres est le fait de l’auteur que cette division est nécessairement importante pour l’interprétation de l’œuvre ; ce n’est pas parce que Dion avait très probablement établi un plan précis et opéré un découpage de son Histoire en séquences – dont malheureusement il ne nous dit rien dans ce qui reste de son œuvre – que l’unité livre-rouleau était à ses yeux signifiante. Les éléments paratextuels (titres, sommaires préliminaires, souscriptions) qui, dans les manuscrits de l’Histoire romaine, soulignent le passage d’un livre à l’autre, orientent notre lecture en ce sens mais il s’agit très probablement d’une fausse piste, comme nous allons tenter de le montrer.
3Dans les deux plus anciens manuscrits byzantins de l’Histoire romaine, chaque livre commence, après le titre, par un sommaire dont les éléments – de courtes phrases introduites par περί ou par ὡς – sont numérotés10. Ces sommaires sont tous introduits par la formule Τάδε ἔνεστιν ἐν τῷ (numéro du livre en chiffres) τοῦ Δίωνος Ῥωµαϊκῶν11 ou τῶν Δίωνος Ῥωµαϊκῶν12, qui sert de titre initial au livre ; ils sont suivis de l’indication du nombre d’années couvertes par le livre, assortie des noms des consuls correspondants13. L’ancienneté de ces indices / indiculi rerum ou πίνακες ne fait aucun doute puisqu’on en trouve la trace dans le
Vaticanus gr. 1288, qui contient les vestiges d’un codex de l’Histoire romaine copié en onciale dans la seconde moitié du ve s.14. Tout porte à croire qu’ils remontent, comme les sommaires similaires attestés pour Diodore de Sicile ou Flavius Josèphe (Antiquités juives), aux premières éditions sur rouleaux15. Rien ne prouve en revanche qu’ils aient été rédigés par Dion lui-même, comme semblent le penser tous les éditeurs depuis Boissevain16, et la remarque vaut aussi pour Diodore et Josèphe. En réalité, cette certitude n’existe que pour un seul historien, Eusèbe de Césarée, dans son Histoire ecclésiastique – dont les sommaires se signalent par l’emploi d’une première personne incontestablement auctoriale17 –, mais elle a été étendue à d’autres cas, plus douteux, au point que l’idée semble aujourd’hui admise, sans avoir jamais été démontrée, que les historiens grecs d’époque hellénistique et romaine auraient eu pour habitude, en vertu d’une loi non-écrite du genre historiographique, d’élaborer des tables des matières placées à l’incipit des livres-rouleaux18. Un seul témoignage, celui de Polybe
(11 fr. 1a)19, semble attester l’existence, jusqu’à son époque en tout cas, d’un usage de ce genre, mais son interprétation reste très discutée. Dans ce passage, Polybe explique pourquoi il a choisi de rédiger, pour chaque livre de ses Histoires, des προεκθέσεις (introductions) plutôt que de simples προγραφαί (sommaires préliminaires?), comme le faisaient ses prédécesseurs. Si l’historien définit clairement les προεκθέσεις comme des introductions faisant partie intégrante de l’ouvrage, il est plus allusif s’agissant des προγραφαί, mais les indications qu’il donne sur leur aspect et leur fonction20 peuvent s’appliquer aux sommaires contenus dans les codices médiévaux, que ces derniers soient constitués de “têtes de chapitres” (κεφάλαια), comme chez Diodore, Flavius Josèphe, Dion ou Eusèbe, ou rédigés, comme celui qui figure en tête du livre 2 des Antiquités romaines de Denys d’Halicarnasse21. Polybe précise également qu’il n’a composé ses προεκθέσεις qu’à partir du septième livre de ses Histoires, ce type d’introduction n’étant pas adapté à la matière des livres précédents : pour les six premiers livres, il a rédigé des προγραφαί22. Malheureusement l’état actuel du texte des Histoires ne nous permet pas de vérifier cette différence et donc de clarifier le sens du mot προγραφή car seuls les cinq premiers livres nous sont parvenus dans la tradition directe et aucun d’eux ne contient de sommaire, ni quelque autre type d’avant-texte, en dehors du titre.
4Le passage de Polybe fournit toutefois sur ces προγραφαί un indice précieux qui trouve un écho dans la documentation papyrologique. D’après lui, les προγραφαί présentent un inconvénient majeur, dû à la place (χώρα) qu’elles occupent : leur propension à disparaître, soit parce qu’on n’y prête pas attention, soit parce qu’elles sont abîmées23. Ces indications ne peuvent se comprendre que si les προγραφαί figuraient non pas sur la face interne du rouleau mais sur sa face externe – exposée et vulnérable –, comme cela est attesté pour les titres initiaux ou finaux24. Or le papyrus Ryland I 19 (iie s. p.C.)25, qui contient le début du livre 47 des Philippiques de Théopompe, présente justement, au dos, le sommaire de ce livre : [τάδε ἔνεστι]ν ἐν τῆι ἑβδόµ[ηι καὶ τεσσαρακο]στῆι τῶν Θεοπόµ[που Φιλιπ]πικῶν· [τοῦ πρὸς Φίλι]ππον πολέµου [Ἀθηναίοι]ς ἀρχή· καὶ Περίν[θου καὶ Βυζα]ν̣τ̣ί̣ο̣[υ πολιο]ρ[κία26. Peut-être tenons-nous avec ce document la preuve que les προγραφαί étaient bien des sommaires (faisant également office de titres initiaux) et que ces sommaires étaient écrits non pas en tête du texte, mais au dos des rouleaux, ce qui expliquerait qu’ils n’aient pas été systématiquerment reportés dans les manuscrits lors du passage du uolumen au codex : c’est probablement la raison pour laquelle ils sont absents des manuscrits des cinq premiers livres de Polybe, et de ceux des Antiquités romaines, à l’exception notable du livre 227.
5Quoi qu’il en soit, si l’on admet que le mot προγραφαί désigne bel et bien des sommaires ou des résumés préliminaires, il ressort de ce texte que les προεκθέσεις étaient pour Polybe une alternative avantageuse à l’emploi, plus ancien ou plus répandu, des προγραφαί. Or ce second procédé, que Polybe n’a pas inventé28, se retrouve aussi chez Diodore de Sicile : l’incipit de chacun des livres de sa Bibliothèque historique est constitué d’une introduction partielle, doublée, qui plus est, d’une conclusion récapitulative placée en toute fin de livre29. Ce système de balises, qui guide efficacement le lecteur à la fois dans l’œuvre (succession des livres, économie de la matière) et dans le temps (succession chronologique des faits), se suffit si bien à lui-même qu’il amène à douter de l’authenticité des sommaires préliminaires transmis par les manuscrits médiévaux, d’autant plus que ces derniers ne reflètent pas les articulations et la structuration du récit diodoréen. Tout porte donc à croire qu’il s’agit plutôt de paratextes allogènes, ajoutés par des librarii, sans doute à date haute, dès les premières éditions sur rouleaux : inscrits au verso des uolumina, ils étaient destinés à faciliter la consultation ponctuelle de cette œuvre monumentale plutôt que la lecture continue et extensive à laquelle son auteur, qui l’avait conçue comme une synthèse, la destinait30.
6Dans le cas de Dion, les sommaires (qui n’existent que pour les livres 37 à 57, 59 et 80) se signalent par leur lexique dionien : tous les termes employés dans le πίναξ d’un livre sont tirés du texte même du livre, comme nous avons pu le vérifier, ce qui pourrait constituer un argument fort en faveur de leur authenticité. Cependant les points de focalisation sont à chaque fois les mêmes (guerres civiles, guerres étrangères, conquêtes et soumission de peuples, victoires, défaites, élections, procès, exils, décès, consécration de monuments) et le prisme s’avère souvent déformant en raison d’omissions surprenantes, qui frappent surtout les parties rhétoriques31. Pour ne citer qu’un exemple, le sommaire du livre 52 omet purement et simplement le fameux débat entre les deux conseillers d’Auguste, Agrippa et Mécène, auquel sont consacrés les deux tiers du livre32. Il est donc impossible que Dion ait rédigé ces πίνακες et très douteux qu’il ait pu en cautionner la publication. Il s’agit probablement d’un travail de librairie effectué par un copiste à partir d’une lecture superficielle du texte, attentive uniquement à l’événementiel et centrée sur quelques figures majeures de la fin de la République et des débuts de l’empire.
7Outre les sommaires préliminaires, les manuscrits byzantins de Dion contiennent des titres finaux – placés à l’explicit de chaque livre – qui sont eux aussi des vestiges des éditions sur uolumina : ces titres ou souscriptions étaient originellement écrits soit à la suite du texte, sur la même face du papyrus, comme c’est l’usage dominant dans les papyri d’Herculanum, soit au verso du rouleau33. Pourtant, bien que le texte de chaque livre soit ainsi parfaitement borné dans les manuscrits – en amont par un sommaire, en aval par un titre final –, les éditeurs de Dion, à partir de Bekker34, et notamment Boissevain, rompant avec la vulgate, ont remis en cause ces limites35 et, en quatre endroits, modifié la frontière entre deux livres (36-37, 42-43, 55-56 et 56-57). En effet, à chaque fois, l’explicit du livre, dans les manuscrits, est constitué par le premier membre d’une parataxe (en µέν) dont le second membre (en δέ) sert d’incipit au livre suivant36 : gênés par ces µέν “solitaires” isolés en fin de livre, les éditeurs les ont déplacés au début du livre suivant, au motif qu’il ne s’agirait pas de clausules voulues par l’auteur mais d’éléments paratextuels connus sous le nom de “réclames” (catch-words ou reclamantes en anglais). Ce procédé, utilisé par les copistes pour préserver l’ordo librorum, consistait à mettre à la fin d’un livre-rouleau les premiers mots ou la première phrase du livre-rouleau suivant. Au moment du passage du uolumen au codex, les réclames ont perdu leur raison d’être, les livres étant désormais solidarisés en pentades ou en décades, et elles ont été supprimées. Certains manuscrits en conservent néanmoins la trace, comme le Chisianus R VIII 60 qui contient les dix premiers livres des Antiquités romaines de Denys d’Halicarnasse37 : par exemple la phrase qui, dans ce manuscrit, ouvre le livre 4 (βασιλεὺς µὲν δὴ Ταρκύνιος οὐ µικρῶν οὐδὲ ὀλίγων Ῥωµαίοις ἀγαθῶν αἴτιος γενόµενος, ὀκτὼ καὶ τριάκοντα ἔτη τὴν ἀρχὴν κατασχὼν οὕτω τελευτᾷ) figure aussi à la fin du livre 338, et c’est précisément cette répétition qui permet d’affirmer que nous avons affaire à une réclame. En revanche, dans les passages de Dion corrigés par Bekker et Boissevain, il n’y a pas de répétition (le membre de phrase en µέν n’est pas repris au début du livre suivant), ce qui ne peut s’expliquer que si un copiste (à un moment ou un autre de la transmission sur codex), confondant le début et la fin, a fait l’erreur surprenante de conserver la réclame à sa place et d’effacer le début du livre suivant ! Un autre élément codicologique fragilise encore davantage l’hypothèse de Bekker et Boissevain : la présence systématique, dans les manuscrits de Dion, de titres finaux. En effet, la documentation papyrologique montre que, dans l’histoire de la transmission sur rouleaux, les réclames ont été progressivement remplacées et rendues obsolètes par les titres finaux39, ce qui exclut a priori qu’elles aient été utilisées concomitamment pour une même œuvre. L’exemple du Chisianus R VIII 60 semble d’ailleurs le confirmer : les réclames conservées dans ce codex ne sont pas suivies d’un titre final mais du titre initial du livre suivant40. Cependant, c’est surtout le parallèle avec d’autres historiens qui autorise le maintien de ces µέν isolés en fin de livre chez Dion car des explicit identiques se trouvent chez Denys d’Halicarnasse, à la fin du livre 241, du livre 542, du livre 643, du livre 744, et déjà chez Thucydide45, au point qu’on peut se demander si leur présence chez Dion (et chez Denys ?) ne relève pas de l’imitatio Thucydidis46.
8Il n’en demeure pas moins vrai que le passage d’un livre à l’autre de l’Histoire romaine n’est jamais marqué dans le texte par une coupure nette : c’est au contraire la technique de l’enchaînement qui prévaut et l’on trouve des formules conclusives ou récapitulatives du type µὲν δὴ οὖν, οὕτω µὲν δή, µὲν δή, aussi bien à la fin qu’au début d’un livre47. Ces liaisons ne sont évidemment pas utilisées uniquement à ces places charnières mais servent aussi, à l’intérieur des livres, à articuler les unités narratives les unes aux autres. Or, cet effacement de la césure entre les livres contraste avec l’attention presque maniaque portée par Polybe et Diodore à la numérotation et à la succession des livres, et rappelle à l’inverse la scriptio continua de Tite-Live. Bien que l’état actuel du texte (perte de décades entières, disparition de la préface générale) nous prive probablement d’informations précieuses sur la manière dont Dion concevait l’organisation d’ensemble de son œuvre, l’absence d’introductions et de conclusions dignes de ce nom à l’incipit et à l’explicit des livres conservés, la prégnance du modèle annalistique48, la rareté des renvois internes et des commentaires d’auteur sont néanmoins symptomatiques d’un choix narratif et esthétique qui relève davantage de la tradition romaine que de la tradition grecque. Ce constat doit par conséquent nous inciter à lire l’Histoire romaine autrement, en tentant de faire abstraction de l’appareil paratextuel qui, dans les manuscrits médiévaux et les éditions modernes, s’interpose entre le texte et nous.
Le choix byzantin (ixe-xe s.)
9Les livres grecs, papyrus et manuscrits, sont les représentants directs du texte qu’ils portent puisqu’ils remontent, par voie de copies successives, sinon à “l’original d’auteur”, au moins aux premières éditions antiques. La tradition indirecte, quant à elle, regroupe toutes les formes de la transmission partielle et secondaire d’un texte : citations faites par les auteurs postérieurs, florilèges, abrégés, commentaires mais aussi traductions dans d’autres langues49. À cet égard, Cassius Dion fait figure d’exception, avec une tradition indirecte riche et diverse et, dans les cas des Extraits constantiniens et de Xiphilin, remarquablement fidèle au texte-source. En effet, pour tous les autres historiens grecs profanes (ve a.C. - iiie p.C.) conservés sous une forme complète (Hérodote, Thucydide, Flavius Josèphe) ou semi-fragmentaire (Polybe, Diodore de Sicile, Denys d’Halicarnasse, Appien), les Excerpta constituent le principal, voire l’unique témoin indirect (si l’on excepte la Souda, qui procède elle-même, pour les notices et citations historiques, de ce florilège) : sans eux nous ne saurions rien ou presque des livres 6 à 40 de Polybe ni des livres 12 à 20 des Antiquités romaines de Denys d’Halicarnasse, tous disparus dans la tradition directe. Or, cette situation de quasi monopole a conduit les savants modernes, nous semble-t-il, à surestimer la place de l’entreprise constantinienne dans la première renaissance byzantine, au détriment d’autres manifestations, moins étudiées, de ce regain d’intérêt pour l’historiographie grecque, au point de lui imputer la responsabilité de la disparition d’une partie des auteurs-sources, au motif qu’elle aurait rendu “inutile aux yeux des contemporains la copie des ouvrages ainsi dépouillés”50. Il nous semble cependant possible d’apporter quelques nuances à ce tableau négatif.
10La tradition directe des historiens grecs profanes possède une caractéristique remarquable, mais souvent méconnue : les plus anciens témoins conservés ont tous51 la même origine, Constantinople et la première renaissance byzantine, et sont issus des premières translittérations de l’onciale en minuscule52. Il s’agit cependant d’une tradition lacunaire puisqu’aucune œuvre historique (à l’exception notable de celles d’Hérodote, de Thucydide et de Xénophon53) ne nous a été transmise dans sa totalité par le canal de ces codices ueteriores : ces derniers contiennent seulement des groupes de livres (pentades ou décades) et sont en fait les vestiges d’éditions complètes, en plusieurs volumes, constituées entre le ixe et le xie s., puis démembrées pendant les siècles suivants, notamment lors du sac de Constantinople par les Croisés en 1204. Ces exemplaires, transférés en Occident pendant le dernier siècle de l’empire de Byzance, ont alimenté principalement le fonds italien de manuscrits grecs, si bien que la quasi totalité des codices recentiores d’historiens grecs aujourd’hui conservés dans les bibliothèques européennes dérive – directement ou indirectement – de ces témoins constantinopolitains, dont les plus fameux sont le Vaticanus gr. 124 de Polybe (livres 1-5), le Neapolitanus suppl. gr. 454 de Diodore de Sicile (livres 1-5), le Chisianus R VIII 60 de Denys d’Halicarnasse (livres 1-10) et, pour Dion, le Marcianus gr. 395 et le Laurentianus 70.8.
11Or, plusieurs manuscrits de ces historiens datés des ixe-xie s. partagent avec les manuscrits originaux des Excerpta parvenus jusqu’à nous55 une caractéristique codicologique commune56 : ils comportent 32 lignes à la page. Pour autant, ces éléments codicologiques ne prouvent pas que toute la tradition des historiens grecs des ixe-xie s. remonte au seul scriptorium impérial. L’atelier d’un certain moine Ephrem57 a aussi produit des manuscrits d’historiens, de luxe ou usuels, dont la mise en page n’est pas à 32 lignes, mais qui se reconnaissent à leurs réglures et à leur écriture : c’est le cas du Vaticanus gr. 124 de Polybe, mais aussi du Monacensis gr. 430 et du Vaticanus gr. 126 de Thucydide, du Vaticanus gr. 141 d’Appien (Ἰβηρική, Ἀννιβιακή et Λιβυκή) et de cinq manuscrits de Flavius Josèphe datés du xie s.58. Quant aux deux vetustiores de Dion59, s’ils ne relèvent ni du type à 32 lignes ni du type Ephrem, A. Diller a rapproché l’écriture du Marcianus gr. 395 de celle de l’Urbinas 35 (Organon d’Aristote), un manuscrit copié à Constantinople pour Aréthas de Césarée vers 895 et a reconnu dans le Laurentianus 70.8 la main du scribe et le format du Parisinus gr. 1397 de Strabon, copié lui aussi pour Aréthas à la fin du xe s.60. À ces arguments codicologiques on peut en ajouter un autre, à la fois paléographique et philologique, qui concerne le changement d’écriture opéré au ixe s. En effet, tous ces manuscrits d’historiens copiés entre le ixe et le xe s. à Byzance sont issus des premières translittérations de l’onciale en minuscule61 et comportent des fautes caractéristiques, qui ne s’expliquent justement que par ce passage d’une écriture à l’autre : ces fautes dites d’onciale permettent de distinguer entre des translittérations différentes d’un même texte et donc de repérer des filiations, des parentés entre plusieurs exemplaires manuscrits. Or on dénombre presque toujours pour une même œuvre historique au moins deux translittérations, les manuscrits des Extraits constantiniens relevant quasi systématiquement d’une translittération différente de celle(s) des manuscrits de la tradition directe, ce qui veut dire que les témoins directs parvenus jusqu’à nous ne sont pas ceux qui ont servi de sources aux rédacteurs des Excerpta62. Cette information est plus importante qu’elle n’en a l’air car elle prouve que la tradition des historiens à Constantinople, loin de passer par un centre unique, a diffusé à travers plusieurs canaux, bénéficiant d’initiatives officielles et privées63 et que le passage de l’onciale à la minuscule n’a pas été le goulet d’étranglement que l’on prétend parfois.
12Mais surtout, comme le montre le tableau donné en annexe, les auteurs excerptés sont ceux qui ont le mieux survécu, que ce soit sous une forme complète ou semi-fragmentaire64 ; de tous les autres, que Photius lisait dans leur intégralité au siècle précédent, il ne subsiste aujourd’hui que des fragments65. Il semble donc que l’entreprise de Constantin, loin de faire disparaître les œuvres originales et complètes, a au contraire assuré leur pérennité66, que ce soit de manière consciente et délibérée, ou au contraire par une sorte d’effet collatéral et paradoxal, le succès des Extraits incitant les lettrés constantinopolitains à faire copier les textes-sources. Il n’est pas possible de trancher entre ces deux hypothèses – qui d’ailleurs ne sont pas exclusives l’une de l’autre –, mais elles vont l’une et l’autre à l’encontre de l’idée reçue selon laquelle l’anthologie historique de Constantin, fondée sur les œuvres complètes, mais vouée à les remplacer, aurait rendu inutiles leur conservation et leur diffusion.
13Il n’en demeure pas moins vrai – et c’est le dernier point sur lequel nous voudrions insister – que cette survie est la conséquence d’un choix, opéré par les excerpteurs de Constantin, sinon par l’empereur lui-même. En effet, alors que Photius, cinquante ans plus tôt, connaissait environ vingt-cinq historiens grecs profanes67 (voir tableau en annexe), seule une douzaine d’entre eux ont été retenus par les excerpteurs68 : Hérodote, Thucydide, Xénophon, Polybe, Denys d’Halicarnasse, Flavius Josèphe, Nicolas de Damas, Appien, Dion, Dexippe. Pourquoi ? La réponse se trouve peut-être dans les sommaires des sections thématiques conservées, en particulier De virtutibus et vitiis et De insidiis, où l’ordre d’apparition des auteurs collationnés (sacrés et profanes) semble répondre à une même logique sous-jacente, à une idée ordonnée de l’historiographie antique, que T. Büttner-Wobst a le premier mise en évidence69 :
historiens traitant des origines, païennes ou judéo-chrétiennes (Flavius Josèphe, Georges le Moine, Jean Malalas, Jean d’Antioche, Diodore de Sicile, Nicolas de Damas)
historiens traitant de l’histoire grecque (Hérodote, Thucydide, Xénophon, Arrien)
historiens traitant de l’histoire romaine (Denys d’Halicarnasse, Polybe, Appien, Dion)
<historiens traitant de l’histoire byzantine>
14Ce classement montre que les excerpteurs avaient présentes à l’esprit des catégories d’après lesquelles ils classaient les ouvrages des historiens. Or il est frappant de constater que ces catégories, fondées sur ce qu’on appelle aujourd’hui des “aires chrono-culturelles”, restent plus que jamais opérantes (à l’exception peut-être de la première), dans les manuels d’histoire et de littérature antique, alors même qu’elles n’ont aucun rapport avec les subdivisions du genre historique (récits de fondation, histoire des origines, histoire universelle, histoire pragmatique, biographie…) par rapport auxquelles les historiens grecs se sont pendant des siècles déterminés. Aussi sommes-nous, souvent sans le savoir, pleinement les héritiers des Byzantins, tant pour le corpus de textes qu’ils nous ont légué que pour la conception de l’historiographie dont il témoigne.
Annexe
15Le rôle des Extraits constantiniens dans la survie des historiens grecs profanes (ve a.C - iiie p.C.)
historiens grecs profanes (ve a.C-iiie p.C.) | connus de Photios | excerptés dans les Extraits constantiniens | conservés dans la tradition directe (complets) | conservés dans la tradition directe (semi-fragmentaires) | fragmentaires | |
Agatharchide de Cnide | X | X | ||||
Amyntianos | X | X | ||||
Appien | X | X | X | |||
Arrien | Bithyniaka | X | X | |||
Anabase | X | X | X | |||
τὰ µετὰ Ἀλέξ. | X | X | ||||
Parthika | X | X | ||||
Cassius Dion | X | X | X | |||
Céphalion | X | X | ||||
Ctésias | X | X | ||||
Denys d’Halicarnasse | X | X | X | |||
Dexippe | X | X | X | |||
Diodore de Sicile | X | X | X | |||
Douris de Samos | X | X | ||||
Ephore | X | X | ||||
Flavius Josèphe | X | X | X | |||
Hérodien | X | X | ||||
Hérodote | X | X | X | |||
Julius Africanus | X | X | ||||
Juste de Tibériade | X | X | ||||
Memnon | X | X | ||||
Nicolas de Damas | X | X | ||||
Phlegon de Tralles | X | X | ||||
Plutarque (Vies) | X | X | ||||
Polybe | ? | X | X | |||
Théopompe | X | X | ||||
Thucydide | X | X | X | |||
Xénophon | Hell. | ? | X | |||
Cyropédie | ? | X | X | |||
Anabase | ? | X | X |
16Tous les historiens compilés par les Extraits Constantiniens ont été conservés dans la tradition directe, soit à l’état complet (Hérodote, Thucydide, Xénophon, Cyropédie et Anabase, Arrien, Anabase, Flavius Josèphe), soit sous forme semi-fragmentaire (Polybe, Diodore de Sicile, Denys d’Halicarnasse, Appien, Cassius Dion), à deux exceptions près (Dexippe, Nicolas de Damas), qui n’ont survécu qu’à l’état de fragments.
Notes de bas de page
1 * Nous tenons à remercier deux collègues papyrologues, Marie-Pierre Chaufray (CNRS, Institut Ausonius, Bordeaux) et Nathan Carlig (Université de Liège), pour leur aide précieuse et diligente.
Boissevain 1895-1901. L’histoire du texte se répartit entre la Praefatio du volume I (la tradition directe ; Zonaras et les diverses collections d’excerpta) et celle du volume II (Xiphilin).
2 Irigoin 1997a, 129.
3 Cependant Appien, avec vingt-quatre livres, et Hérodien, avec huit livres, semblent avoir préféré les octades.
4 Isid., Etym., 6.13.1 : codex multorum librorum est, liber unius uoluminis ; Canfora 1974, 9.
5 Le livre 1 de sa Bibliothèque historique était divisé, à cause de sa longueur, en deux parties (chap. 1-41 et chap. 42-98) correspondant chacune à un uolumen : “Le premier livre de Diodore ayant été divisé en deux volumes à cause de son étendue, le premier comprend l’introduction générale de l’ouvrage, ainsi que les traditions reçues sur les premiers Égyptiens … Dans le présent volume (ἐν ταύτῃ τῇ βίβλῳ) nous développerons les sujets qui font suite à nos propos précédents…” (1.42.1-2). Il en va de même pour le livre 17 (voir Bertrac, in : Chamoux et al. 1993, c, n. 63 [introduction générale à l’édition de Diodore dans la Collection des Universités de France]).
6 Irigoin 1997a, 128 parle de vingt feuilles de papyrus collées bout à bout.
7 La moyenne tourne autour de cinquante chapitres par livre dans l’édition Boissevain, mais il y a des exceptions notables : 27 chapitres pour le livre 51 et 35 pour le livre 50 ; 65 pour le livre 39 et 66 pour le livre 40.
8 Chaque livre comporte entre 61 chapitres (livre 10) et 96 chapitres (livre 6) dans l’édition Teubner (Jacoby 1885-1905).
9 Chaque livre comporte entre 8 chapitres (livre 8) et 17 chapitres (livre 1) dans l’édition Teubner (Stavenhagen 1922).
10 Ces numéros n’ont cependant pas de correspondants dans le texte lui-même.
11 Dans le Marcianus gr. 395 (M).
12 Dans le Laurentianus 70.8 (L).
13 Voir par exemple (livre 41): τάδε ἔνεστιν ἐν τῷ τετταρακοστῷ πρώτῳ τῶν Δίωνος Ῥωµαϊκῶν
α. Ὡς Καῖσαρ ἐς τὴν Ἰταλίαν ἦλθε καὶ Ποµπήιος ἐκλιπὼν αὐτὴν ἐς Μακεδονίαν διέπλευσεν.
β. Ὡς Καῖσαρ Ἰβηρίαν παρεστήσατο.
γ. Ὡς Καῖσαρ ἐς Μακεδονίαν ἐπὶ Ποµπήιον διέπλευσεν.
δ. Ὡς Καῖσαρ καὶ Ποµπήιος περὶ Δυρράχιον ἐπολέµησεν.
ε. Ὡς Καῖσαρ Ποµπήιον περὶ Φάρσαλον ἐνίκησεν.
Χρόνου πλῆθος ἔτη δύο, ἐν οἷς ἄρχοντες οἱ ἀριθµούµενοι οἵδε ἐγένοντο
Λ. Κορνήλιος Π. υἱ. Λεντοῦλος
Γ. Κλαύδιος Μ. υἱ. Μάρκελλος ὕπ.
Γ. Ἰούλιος Γ. υἱ. Καῖσαρ τὸ β’
Π. Σερουίλιος Π. υἱ. Ἰσαυρικός ὕπ.
14 Les treize folios conservés couvrent environ les trois derniers quarts du livre 79 et le début du livre 80, précédé de son sommaire. Tous les éditeurs, jusqu’à Boissevain compris, ont cru qu’il s’agissait des livres 78-79 à cause d’une erreur de F. Orsini, qui a pris la souscription du livre 79 (ΔΙωΝΟC. ΡωMAΙKHC - ΙCTOPIAC -- / ΟΘ- ) pour le titre initial du livre suivant, méprise due probablement à l’absence, en tête du sommaire du livre 80, de la formule ΤΑΔΕ ENECTIN… contenant le numéro du livre. Sur ce codex exceptionnel, on se reportera à l’étude magistrale de Mazzucchi 1979 ; voir aussi Franchi de Cavalieri 1908, 7 ; Nolhac 1887, 189 ; Irigoin 1969, 44-45 (= Irigoin 2003, 447).
15 Dans les manuscrits les plus anciens de Diodore, le livre 17 porte le titre : τῶν Διοδώρου βύβλων τῆς ἑπτακαιδεκάτης εἰς δύο διῃρηµένης (“livre 17 de Diodore divisé en deux tomes”), suivi du sommaire de chaque tome (ἡ πρώτη περιέχει τάδε / ἡ δευτέρα περιέχει τάδε). C’est la preuve que ce livre occupait originellement deux uolumina dont chacun avait son propre sommaire (voir Bertrac, in : Chamoux et al. 1993, c, n. 63).
16 Ils les reproduisent au début de chaque livre de l’Histoire romaine, en les “complétant” avec les numéros des chapitres correspondants des éditions modernes.
17 Certains κεφάλαια sont autoréférentiels : “Au sujet des hommes d’église qui se sont distingués de notre temps, et lesquels d’entre eux se sont maintenus jusqu’au siège des églises” (HE, livre 7, sommaire, κεφάλαιον Λ (30)). Les sommaires se terminent par une courte notice, de l’auteur, sur les sources qu’il a utilisées : “Nous avons rédigé ce livre d’après Clément, Tertullien, Josèphe, Philon” (sommaire du livre 2) ; “Pour le septième livre de l’Histoire ecclésiastique, Denys le grand évêque d’Alexandrie sera encore notre collaborateur par ses propres paroles : chacune des choses qui ont été accomplies de son temps a été en effet racontée, au fur et à mesure qu’elle se produisait, dans les lettres qu’il a laissées. Aussi bien mon récit commencera à partir de là” (sommaire du livre 7).
18 Irigoin 1997a, 130-132.
19 Ἴσως δέ τινες ἐπιζητοῦσι πῶς ἡµεῖς οὐ προγραφὰς ἐν ταύτῃ τῇ βίβλῳ, καθάπερ οἱ πρὸ ἡµῶν, ἀλλὰ καὶ προεκθέσεις καθ’ ἑκάστην ὀλυµπιάδα πεποιήκαµεν τῶν πράξεων. Ἔγὼ δὲ κρίνω χρήσιµον µὲν εἶναι καὶ τὸ τῶν προγραφῶν γένος· καὶ γὰρ εἰς ἐπίστασιν ἄγει τοὺς ἀναγινώσκειν θέλοντας καὶ συνεκκαλεῖται καὶ παρορµᾷ πρὸς τὴν ἀνάγνωσιν τοὺς ἐντυγχάνοντας, πρὸς δὲ τούτοις πᾶν τὸ ζητούµενον ἑτοίµως ἔνεστιν εὑρεῖν διὰ τούτου· θεωρῶν δὲ διὰ πολλὰς αἰτίας καὶ τὰς τυχούσας ὀλιγωρούµενον καὶ φθειρόµενον τὸ τῶν προγραφῶν γένος, οὕτως καὶ διὰ ταῦτα πρὸς τοῦτο τὸ µέρος κατηνέχθην· τῆς γὰρ προεκθέσεως οὐ µόνον ἰσοδυναµούσης <πρὸς> τὴν προγραφήν, ἀλλὰ καὶ πλεῖόν τι δυναµένης, ἅµα δὲ καὶ χώραν ἐχούσης ἀσφαλεστέραν διὰ τὸ συµπεπλέχθαι τῇ πραγµατείᾳ, τούτῳ µᾶλλον ἐδοκιµάσαµεν χρῆσθαι τῷ µέρει παρ’ ὅλην τὴν σύνταξιν πλὴν ἓξ τῶν πρώτων βυβλίων· ἐν ἐκείνοις <δὲ> προγραφὰς ἐποιησάµεθα διὰ τὸ µὴ λίαν ἐναρµόζειν ἐν αὐτοῖς τὸ τῶν προεκθέσεων γένος. Nous suivons ici l’interprétation de Roussel 1970, 666, 1341. Pour une interprétation différente de ce passage, voir Pédech 1964, 509-510 ; Irigoin 1993, 56 (= Irigoin 2003, 149).
20 La προγραφή attire l’attention des lecteurs, stimule leur intérêt et leur permet de se repérer facilement dans le texte (καὶ γὰρ εἰς ἐπίστασιν ἄγει τοὺς ἀναγινώσκειν θέλοντας καὶ συνεκκαλεῖται καὶ παρορµᾷ πρὸς τὴν ἀνάγνωσιν τοὺς ἐντυγχάνοντας, πρὸς δὲ τούτοις πᾶν τὸ ζητούµενον ἑτοίµως ἔνεστιν εὑρεῖν διὰ τούτου).
21 C’est le seul conservé pour les onze livres des Antiquités romaines transmis par la tradition directe ; il ressemble davantage à un résumé qu’à une table des matières : ἡ δευτέρα βίβλος τῆς ῥωµαικῆς ἀρχαιολογίας ἣν συνέγραψε Διονύσιος Ἀλεξάνδρου Ἁλικαρνασεύς· περιείληφε τὰ πραχθέντα ὑπὸ Ρωµύλου τοῦ κτίσαντος ῾Ρώµην· καὶ ὑπὸ Νοῦµα Ποµπιλίου· τοῦ µετ’ ἐκεῖνον ἄρξαντος τῆς πόλεως. Χρόνος τῶν πραχθέντων ἀµφοτέροις· τοῖς βασιλεῦσιν ἀπὸ τῆς ἑβδόµης ὀλυµπιάδος· ἣν ἐνίκα δάντις µεσσήνιος ἄρχοντος ἀθήνησιν.
22 11 fr. 1a.5 : ἐν ἐκείνοις <δὲ> προγραφὰς ἐποιησάµεθα διὰ τὸ µὴ λίαν ἐναρµόζειν ἐν αὐτοῖς τὸ τῶν προεκθέσεων γένος.
23 11 fr. 1a.3 : θεωρῶν δὲ διὰ πολλὰς αἰτίας καὶ τὰς τυχούσας ὀλιγωρούµενον καὶ φθειρόµενον τὸ τῶν προγραφῶν γένος.
24 Guichard Romero 2005, 191-192. On peut également supposer que ces προγραφαί étaient écrites sur les σίλλυβοι, ces étiquettes de papyrus ou de parchemin attachées ou collées aux uolumina qui portaient le titre du rouleau et son numéro d’ordre mais aucune des rares étiquettes conservées n’atteste d’une telle pratique (Dorandi 1984).
25 Luppe 1977.
26 Theopomp., FGrHist 115, 217.
27 Voir supra n. 21.
28 Il semble qu’on le doive à Ephore (selon D.S. 16.76.5 : χρόνον δὲ περιέλαβε ἐτῶν σχεδὸν ἑπτακοσίων καὶ πεντήκοντα καὶ βύβλους γέγραφε τριάκοντα, προοίµιον ἑκάστῃ προθείς).
29 Par exemple : D.S. 12.2.2-3 et 12.84.4 ; 14.2.4 et 14.117.9 ; 15.1.6 et 15.95.4 ; 18.1.5-6 et 18.75.3.
30 D.S. 1.3.6-8.
31 Au livre 38, le discours de César à ses officiers avant l’offensive contre Arioviste (38.36-46) n’est pas mentionné malgré sa longueur et l’importance de son contenu, qui excède largement le contexte de cette bataille, puisque César retrace l’histoire de la conquête romaine et annonce la pacification du monde. Au livre 39 les menées de Clodius pendant son édilité (contre Milon, contre Cicéron, contre Caton) sont passées sous silence, alors qu’elles occupent sept chapitres (39.17-23) : le πίναξ met curieusement en exergue la mission de Caton à Chypre (δ. Ὡς Κάτων τὰ ἐν Κύπρῳ κατεστήσατο) qui n’est qu’un élément marginal du récit consacré à Milon.
32 α. Ὡς Καῖσαρ ἐβουλεύσατο τὴν µοναρχίαν ἀφεῖναι.
β. Ὡς αὐτοκράτωρ καλεῖσθαι ἤρξατο.
33 Guichard Romero 2005, 192 n. 10.
34 Bekker 1849.
35 Corcella 2013, 60.
36 C.D. 36.54.5 (τότε µὲν δὴ ταῦτ’ ἔπραξε) / 37.1.1 (τῷ δ’ ἐπιγιγνοµένῳ ἔτει) ; 42.58.4 (τότε µὲν ταῦτ’ ἔπραξε) / 43.1.1 (τῷ δὲ ἐχοµένῳ ἔτει) ; 55.34.7 (καὶ ταῦτα µὲν ἄλλοι καθῄρουν) / 56.1.1 (ὁ δὲ δὴ Τιβέριος) ; 56.47.2 (ταῦτα µὲν κατὰ Αὔγουστον ἐγένετο) / 57.1.1 (Τιβέριος δὲ εὐπατρίδης µὲν ἦν καὶ ἐπεπαίδευτο).
37 À la fin des livres 1, 3, 4, 5 se trouve à chaque fois le début du livre suivant.
38 D.H. 3.73.4 ; voir aussi les dernières lignes du livre 5 (5.77.6) : ἀλλ’ ὑπὲρ µὲν τούτων ἕτερος ἂν εἴη τοῖς λόγοις καιρὸς ἐπιτηδειότερος. οἱ δ’ ἐν τῷ κατόπιν ἐνιαυτῷ τὴν ὕπατον ἀρχὴν παραλαβόντες Αὖλος Σεµπρώνιος Ἀτρατῖνος καὶ Μάρκος Μηνύκιος, ἐπὶ τῆς ἑβδοµηκοστῆς καὶ πρώτης ὀλυµπιάδος, ἣν ἐνίκα στάδιον Τισικράτης Κροτωνιάτης, ἄρχοντος Ἀθήνησιν Ἱππάρχου. La partie en gras a été supprimée à juste titre par les éditeurs depuis A. Kiessling.
39 West 1963.
40 Par exemple, à la fin du livre 1 Denys annonce dans une formule conclusive le contenu du livre suivant (1.90.2 : νυνὶ δὲ ἐπὶ τὴν ἑξῆς διήγησιν τρέψοµαι τὴν ἀνακεφαλαίωσιν τῶν ἐν ταύτῃ δεδηλωµένων τῇ βίβλῳ τῆς ἐχοµένης γραφῆς ποιησάµενος ἀρχήν). Vient immédiatement après le début du livre 2 (2.1.1 : ἡ Ῥωµαίων πόλις ἵδρυται µὲν ἐν τοῖς ἑσπερίοις µέρεσι τῆς Ἰταλίας περὶ ποταµὸν Τέβεριν, ὃς κατὰ µέσην µάλιστα τὴν ἀκτὴν ἐκδίδωσιν, ἀπέχουσα τῆς Τυρρηνικῆς θαλάττης ἑκατὸν εἴκοσι σταδίους), puis le titre initial du livre 2 (ΔΙΟΝΥΣΙΟΥ ΑΛΙΚΑΡΝΑΣΕΩΣ ΡΩΜΑΙΚΗΣ ΑΡΧΑΙΟΛΟΓΙΑΣ ΛΟΓΟΣ β).
41 D.H. 2.76.6 (καὶ τὰ µὲν περὶ Ποµπιλίου Νόµα τοσαῦτα παρελάβοµεν) et 3.1.1 (τελευτήσαντος δὲ Ποµπιλίου γενοµένη πάλιν ἡ βουλὴ τῶν κοινῶν κυρία µένειν ἔγνω ἐπὶ τῆς αὐτῆς πολιτείας).
42 D.H. 5.77.6 (ἀλλ’ ὑπὲρ µὲν τούτων ἕτερος ἂν εἴη τοῖς λόγοις καιρὸς ἐπιτηδειότερος) et 6.1.1 (οἱ δ’ ἐν τῷ κατόπιν ἐνιαυτῷ τὴν ὕπατον ἀρχὴν παραλαβόντες – voir supra n. 38).
43 D.H. 6.96.4 (καὶ τὰ µὲν ἐπὶ τῆς τούτων ὑπατείας πραχθέντα Ῥωµαίοις ταῦτ’ ἦν) et 7.1.1 (Τίτου δὲ Γεγανίου Μακερίνου καὶ Ποπλίου Μηνυκίου τὴν ὕπατον ἐξουσίαν παραλαβόντων).
44 D.H. 7.73.5 (καὶ τὰ µὲν ἐπὶ τούτων συντελεσθέντα τῶν ὑπάτων τοιάδε ἦν) et 8.1.1 (οἱ δὲ µετὰ τούτους ἀποδειχθέντες ὕπατοι κατὰ τὴν ἑβδοµηκοστὴν καὶ τρίτην ὀλυµπιάδα).
45 Th. 3.116.3 (ταῦτα µὲν κατὰ τὸν χειµῶνα τοῦτον ἐγένετο, καὶ ἕκτον ἔτος τῷ πολέµῳ ἐτελεύτα τῷδε ὃν Θουκυδίδης ξυνέγραψεν) et 4.1.1 (τοῦ δ’ ἐπιγιγνοµένου θέρους) ; 7.87.6 (ταῦτα µὲν τὰ περὶ Σικελίαν γενόµενα) et 8.1.1 (ἐς δὲ τὰς Ἀθήνας ἐπειδὴ ἠγγέλθη).
46 Corcella 2013, 61.
47 C.D. 37.58.4 : ἐκεῖνα µὲν δὴ οὖν καθάπερ εἰκὼν τῶν µελλόντων σφίσι καὶ ἐν τῇ γῇ καὶ ἐν τῷ ὕδατι συµβήσεσθαι προεδείχθη ; 38.1.1 : τῷ δὲ ἑξῆς ἔτει ὁ Καῖσαρ; 39.1.1 : οὕτω µὲν δὴ καὶ ἐκεῖνα διεπολεµήθη· µετὰ δὲ ταῦτα ; 41.1.1 : τότε µὲν δὴ ταῦτ’ ἔπραξε, µετὰ δὲ τοῦτο ; 42.1.1-2 : ἡ µὲν οὖν µάχη τοιαύτη δή τις ἐγένετο, … αἴτιον δὲ ὅτι ; 48.1.1-2 : ὁ µὲν οὖν Βροῦτος ὅ τε Κάσσιος οὕτως ἀπώλοντο … ὁ δὲ δὴ Καῖσαρ καὶ ὁ Ἀντώνιος.
48 La structuration du récit par année consulaire est un principe d’organisation très présent dans toutes les parties de l’Histoire romaine et les coupures entre les livres correspondent souvent à un changement d’année. Cependant la durée couverte par un livre est très variable : par exemple, le livre 47 correspond à une seule année (novembre 43 - octobre 42) alors que les livres 36 et 37 comprennent respectivement trois et cinq années.
49 Définitions librement empruntées à Irigoin 1997b (1986), 22.
50 Irigoin 1962, 298 (= Irigoin 2003, 214) ; voir également Irigoin 1997b (1967-1968), 49 : “Le cas de Polybe, avec sa tradition directe linéaire et fort lacuneuse, atteste l’influence néfaste que les extraits d’historiens ont exercée sur la transmission des œuvres complètes”.
51 À une exception près : le Vaticanus gr. 1288 de Dion, dont il a déjà été question plus haut.
52 Irigoin 1962 (= Irigoin 2003, 197-232).
53 Cette différence s’explique sans doute par l’amplitude relativement modeste de leurs œuvres, qui tiennent dans un seul volume (Laurentianus 70.3 d’Hérodote, Palat. Heidelb. gr. 252 et Monac. gr. 430 de Thucydide, Scorialensis T-III-14 des Xénophon (Helléniques)) mais aussi par la fortune “rhétorique” qu’ont connue ces trois historiens classiques (Nicolai 1992 ; Fromentin 2016a).
54 Olim Vindobonensis suppl. gr. 74.
55 Turonensis 980 (De uirtutibus et uitiis) et Vaticanus gr. 73 (De sententiis).
56 Sur cette question des manuscrits à 32 lignes on se reportera à Irigoin 1959 ; Irigoin 1997b (1967-1968), 45-50 ; Irigoin 1977 (= Irigoin 2003, 295-309).
57 Diller 1947 ; Irigoin 1959, 181 sq.
58 Vat. gr. 148, Ambr. D 50 sup, Vindob. hist. gr. 20, Parisinus gr. 1419, Parisinus gr. 1429.
59 Respectivement 34 lignes à la page pour le Marcianus et 36 pour le Laurentianus.
60 Diller 1947, 184-185.
61 Ce sont soit des exemplaires dits de translittération soit, le plus souvent, des copies réalisées à partir d’un exemplaire déjà translittéré.
62 Voir par exemple : pour Dion, Fromentin, in : Fromentin & Bertrand 2008, lxxx-lxxxi ; ead., in : Fromentin & Bertrand 2014, lxxxviii ; pour Diodore, Bertrac, in : Chamoux et al. 1993, cxx-cxxi (avec quatre translittérations différentes pour les livres 11 à 20).
63 Comme l’écrivait déjà Lemerle 1971, 120 n. 40 : “Il faut donc admettre la multiplicité des centres et des ‘ateliers’ de translittération, et non un centre unique”.
64 À l’exception de Nicolas de Damas et de Dexippe.
65 À trois exceptions près : Plutarque, Hérodien, Xénophon (pour les Helléniques).
66 Fromentin 2016a.
67 Ibid.
68 En effet, bien que nous n’ayons conservé que quatre sections thématiques sur les cinquante-trois que comportait originellement la collection historique de Constantin, “pour les auteurs profanes de toutes les époques …, il est probable que la liste que nous pouvons dresser aujourd’hui représente l’essentiel de ce que les excerpteurs avaient en main” (Flusin 2002, 540).
69 Büttner-Wobst 1906, 362-369 ; Roos 1910, 408-416 ; voir aussi Flusin 2002, 546 sq.
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