Chapitre IX. L’administration de Rome et de l’Italie
Années 42-40
p. 133-148
Texte intégral
1Parmi les décisions prises par les triumvirs, il était prévu qu’Antoine et Octavien aillent combattre Brutus et Cassius, tandis que Lépide resterait administrer Rome et l’Italie.
2Les sources littéraires sont peu éloquentes sur l’action du triumvir entre 42 et 40, elles donnent en revanche, beaucoup plus de détails sur la guerre menée contre les tyrannicides. Pourtant, l’action de Lépide ne doit pas être négligée. Il ne s’agissait pas, comme l’écrit R. Syme1, d’une mission théorique. La situation politique, à cause de la proscription, des mesures d’expropriation et de la mise en place de nouveaux impôts était tendue et pouvait à tout moment dégénérer. Lépide, avec trois légions sous ses ordres2, assura l’exécution des mesures avec ses collègues. Il continua des travaux urbains et comme Antoine et Octavien, émit des monnaies où il put développer ses propres thèmes de propagande.
1. Les mesures prises par les triumvirs en 42
3Les premiers mois de l’année 42 furent consacrés à la consolidation idéologique du régime et aux préparatifs de l’expédition contre Cassius et Brutus. Les triumvirs non seulement voulaient venger César mais aussi vénérer sa mémoire3. Le 1er janvier 42, les triumvirs, les magistrats et les sénateurs jurèrent de maintenir en vigueur les actes de César. Ils décidèrent d’élever sur le Forum un sanctuaire en son honneur, à l’endroit même où son corps avait été brûlé. Ils décidèrent que son portrait serait porté en procession avec l’image de Vénus, à l’occasion des jeux du cirque, que son nom serait associé à toutes les fêtes célébrées, et le jour de sa mort serait déclaré jour néfaste.
4Mais à côté de ces décisions qui faisaient de Lépide, d’Antoine et d’Octavien, les héritiers de César, d’autres mesures prises furent beaucoup plus impopulaires. En effet, Appien écrit que pour la fin de l’année 43, il manquait vingt millions de drachmes pour faire la guerre4. Les trois hommes mirent en place, probablement au début de l’année 42, de nouveaux impôts et emprunts qui touchaient les sénateurs, les chevaliers, les affranchis5, ainsi que les femmes fortunées6.
5Les triumvirs voulurent aussi satisfaire l’armée et en particulier les vétérans. Ils firent verser la solde et les gratifications déjà dues et ils promirent également aux vétérans la distribution de terres dans le cadre de colonies qui seraient créées sur le sol italien7.
2. L’administration de Lépide
6Les sources littéraires ne se sont pas étendues sur la manière dont Lépide a administré Rome et l’Italie. La seule chose dont nous soyons certains est que le Triumvirat était impopulaire8, bien qu’il y ait eu de la part des trois hommes, du moins à son début, la volonté de garder parallèlement à leur pouvoir constituant, le fonctionnement normal des institutions, la persistance d’une activité législative et l’exercice des magistratures traditionnelles9.
7Depuis le 1er janvier 42, Lépide se trouvait dans une situation particulière, puisqu’il cumulait des pouvoirs triumviraux et la charge du consulat. Il disposait donc d’un imperium militiae au double titre de triumvir et de consull10.
2.1. Les relations de Lépide avec le Sénat
8Il y a de fortes raisons de penser que Lépide chercha des mesures d’apaisement. Le premier indice qui va dans ce sens fut son discours prononcé devant le Sénat où il “tente d’excuser le passé et donne l’espoir qu’on serait clément à l’avenir parce qu’on avait suffisamment châtié”11. La date à laquelle Lépide le prononça est inconnue, Suétone précisant simplement : “après la clôture de la proscription”. Officiellement la proscription était achevée avec l’affichage des listes12. K. Scott13 a avancé qu’il avait été prononcé le 1er janvier 42, lors de la séance inaugurale du Sénat, ce qui est invérifiable. Il paraît plus probable qu’il ait été prononcé au cours de l’année 42 et qu’il avait pour but de ramener la paix au sein de la cité.
9Dion Cassius et Appien n’ont pas fait état de séances sénatoriales14 pour l’année 42. Pourtant, le Sénat s’était évidemment bien réuni comme le rappelle Suétone15 et il y a de fortes présomptions pour qu’il y ait eu une lectio. En effet, deux censeurs, C. Antonius, l’oncle d’Antoine et P. Sulpicius Rufus furent nommés par les triumvirs16. Ils ne procédèrent pas à un census, mais complétèrent l’album sénatorial, puisque la proscription avait touché environ cent cinquante sénateurs17. Dion Cassius écrivait au sujet de la lectio de 28 : “devenu censeur avec Agrippa, il (Auguste) procéda entre autres réformes, à l’épuration du Sénat. En effet, les guerres civiles y avaient fait entrer, sans qu’ils en fussent dignes, beaucoup de chevaliers, et même beaucoup de fantassins, en sorte que le nombre total des sénateurs avait atteint le chiffre de mille”18. Le Sénat de 42 était encore principalement composé de partisans d’Antoine et de Lépide19 et en conséquence ne constitua pas un contre-pouvoir.
2.2. La Lex Munatia et Aemilia
10En 42, Lépide et L. Munatius Plancus comme consuls furent à l’origine de la lex Munatia et Aemilia qui conférait la citoyenneté et l’exonération d’impôts envers un certain Seleucos et sa famille en reconnaissance de ses services. C’est ce qui ressort d’une inscription découverte à Rhosos, près d’Antioche en Syrie20. Cet acte se présentait comme une décision prise par Octavien, en vertu d’une loi qui porte les noms des consuls de 42, L. Munatius Plancus et M. Aemilius Lepidus. La teneur de la loi Munatia et Aemilia nous est inconnue, mais on peut supposer qu’entre autres clauses elle autorisait les triumvirs à octroyer le droit de cité romaine dans des cas déterminés et d’une manière plus précise sans doute, pour les services rendus au cours de la lutte contre les meurtriers de César et contre leurs complices. On voit que les formes légales étaient respectées. La lex Munatia et Aemilia peut être comparée à la lex Iulia en vertu de laquelle, Cn. Pompée Strabon conférait en 89 le droit de cité à des cavaliers espagnols, à la lex Geliia-Cornelia, loi consulaire de 72 qui donnait des pouvoirs analogues à Pompée le Grand et à la lex Calpurnia qui faisait du droit de cité une récompense dont pouvait disposer un imperator21. Il semble qu’en vertu de cette loi, Octavien ait pris une mesure spéciale qui ne s’appliquait qu au seul Seleucos, mesure gravée au Capitole sur une stèle et qui rappelait les stèles de proxénie où un personnage unique recevait une récompense due à ses mérites22. On peut donc tirer deux conclusions. La première concerne la procédure. Les consuls ont bien observé la procédure habituelle pour l’octroi de la citoyenneté romaine. La seconde conclusion touche à la possibilité qu’avait chaque triumvir d’intervenir dans le domaine de l’autre et qui était la conséquence du respect de la règle de la collégialité républicaine23. Octavien pouvait donc s’intéresser à des cités ou à des individus dans la partie de l’Empire qui était le domaine d’Antoine24.
11Parallèlement à ses activités politiques et administratives. Lépide continua l’œuvre édilitaire commencée sous César.
2.3. L’activité édilitaire de Lépide
12Fr. Hinard a montré récemment que le bilan des opérations urbaines entreprises par les triumvirs, entre la mort de César et l’établissement du Principat était apparemment assez mince dans la mesure où on n’y trouvait pas de cohérence25. De même F. Coarelli a remarqué qu’après sa victoire sur l’Égypte, en 30 a.C., Octavien avait voulu effacer systématiquement le souvenir des interventions précédentes, aussi bien celles d’Antoine que de lui-même26. Néanmoins, pour ce qui concerne Lépide, quelques indices laissent penser qu’il a participé et a continué l’œuvre du dictateur.
13Le triomphe de 43 fut certainement l’occasion pour Lépide de faire quelques travaux d’urbanisme. Il aurait pu continuer la réfection de la Basilica Aemilia qui était “une entreprise en déshérence” puisque son frère Paullus et son neveu étaient proscrits et avaient dû quitter Rome fin 43. Il ne l’a pas fait, parce que de tels travaux ne pouvaient être entrepris que par Paullus et sa famille27. Lépide ne pouvait s’attribuer les mérites d’une tâche dont s’était chargé son frère aîné. Comme nous l’avons déjà mentionné, il y avait une nécessaire continuité familiale dans les opérations édilitaires de cet ordre.
14De même, il est fort improbable comme le pensait E. Pais28, que Lépide à l’occasion de son triomphe, ait dédicacé le temple de la Felicitas. C’est en contradiction avec un passage de Dion Cassius29 qui rappelle que ce temple fut achevé lorsqu’il était maître de la cavalerie de César.
15En revanche, il a certainement poursuivi et terminé la construction des Saepta et peut-être commencé la construction du temple d’Isis et de Sérapis (fig. 1).
16La construction des Saepta commencée par Lépide sous la dictature césarienne n’était pas achevée aux Ides de mars30. Comme l’explique justement F. W. Shipley31, il paraît tout à lait logique que Lépide ait voulu continuer ces travaux débutés quelques années plus tôt.
17Une chose est certaine. Dion Cassius32 affirme clairement que les Saepta étaient déjà terminés par Lépide, puisque Agrippa se contenta de la décoration avec des œuvres d’art, en lui donnant le nom de Saepta Iulia. L’ouvrage probablement ralenti ou interrompu par la guerre civile, devait être achevé en 36 a.C., date de la destitution du triumvir33. Lépide tenait à achever ce projet césarien et ainsi réaffirmer son lien avec le dictateur.
18En ce qui concerne le temple d’Isis et de Sérapis, Dion Cassius34 écrit que ce furent les triumvirs qui décrétèrent la construction d’un temple à Isis et à Sérapis. Le culte égyptien était ancien à Rome et progressait plus ou moins souterrainement dans les milieux populaires. Les dieux égyptiens furent mêlés aux troubles de la République agonisante. En 58 a.C., des statues et des autels avaient été érigés clandestinement sur le Capitole et le Sénat les fit détruire. Les fidèles d’Isis, faute d’avoir des autorisations officielles, érigèrent des chapelles privées en 53 a.C.35 Le Sénat de nouveau intervint et les fit détruire. Rome était alors le théâtre des désordres organisés par Clodius. Ce dernier recrutait ses bandes dans les milieux populaires qui étaient aussi attachés à Isis. Les agitateurs isiaques semblaient vouloir contrecarrer le parti de la Grande Mère qu’incarnait le Sénat resté dans sa majorité traditionnaliste. Il remirent en place leurs lieux de culte et vers novembre-décembre de 1 année 4836, pendant les fêtes isiaques, le Sénat décida une nouvelle fois, à la suite d’un oracle, de détruire l’ensemble des sanctuaires d’Isis et de Sérapis.
19Dion Cassius est muet sur les motifs qui ont conduit à cette construction. Il nous semble, comme 1 a bien montré M. Le Glay37 que cette mesure est à mettre en rapport avec la politique égyptienne de César, et que la construction du temple était la réalisation d’un projet césarien. Le temple a pu être identifié à l’Iseum campense, déjà mentionné par Juvénal38. F. Coarelli39 a montré qu’il existait un nymphée dans les horti Caesaris du Quirinal, relié par un ruisseau, l’aqua Sallustiana, à une citerne, reproduisant le delta du Nil, près de l’Iseum in campo. Il y a de fortes présomptions pour que Lépide ait commencé les travaux dans un lieu qui se situait à l’ouest des Saepta40. La signification de cet acte est politique. II récupérait certes, une partie de l’héritage césarien, mais en même temps il rappelait les liens de sa gens avec l’Égypte.
2.4. Lépide et la propagande monétaire
20A l’occasion de la formation du Triumvirat, les quatre monétaires de 42 frappèrent une série de monnaies qui commémorèrent l’événement. En suivant le précédent de César41, le portrait de chaque triumvir était représenté, accompagné de son nom et de son titre : III. VIR. R.P.C. (Triumuir Rei Publicae Constituendae)42.
21Nous avions vu que les monnaies frappées par Lépide et Antoine lors de la fusion de leurs troupes en mai 43 avaient pour but de faire ressortir l’unité qui existait entre les Césariens. Il semble que la situation soit différente après la formation du second Triumvirat43. Les monnaies frappées par chacun des triumvirs firent davantage ressortir la concurrence qui existait entre eux que leur unité de vue. Comme le remarque R Wallmann44, la propagande monétaire était primordiale pour les triumvirs, et l’émission de monnaies semble avoir été pour eux un excutoire leur permettant d’exprimer leur rancœur et leur volonté d’occuper une place de premier plan.
22En 42, Lépide frappa le même nombre de monnaies que ses collègues, puis leur nombre diminua pour 41 et 40. Les monnaies de Lépide sont divisées en deux séries : celles sur lesquelles Lépide apparaît avec ses collègues, sans le nom d’un magistrat monétaire et celles sur lesquelles le nom de Lépide est accompagné du nom de l’un des magistrats monétaires.
2.4.1. Les monnaies de Lépide avec ses collègues
231. Aureus45 (fig. 2)
Avers :
M ANTONIVS III VIR R PC
M. Antonius Triumuir Rei Publicae Constituendae.
Tête nue d’Antoine à droite. Derrière le lituus.
Revers :
M LEPIDVS III VIR R P C
M. Lepidus Triumuir Rei Publicae Constituendae.
Tête nue de Lépide à droite. Derrière le simpulum et l’aspersoir.
242. Aureus46.
Avers :
LEPIDVS PONT MAX III VIR R P C
Lepidus Pontifex Maximus Triumuir Rei Publicae Constituendae Tête nue de Lépide à droite.
Revers :
CAESAR IMP III VIR R P C
Caesar Imperator Triumuir Rei Publicae Constituendae.
Tête nue d’Octavien à droite.
25La première monnaie a été frappée après la formation du second Triumvirat. Cette monnaie tend à développer l’idée qu’il existait bien une unité et une collaboration entre les deux hommes. Ils ont utilisé le même titre et choisi des symboles religieux, le simpulum (récipient cultuel) et l’aspergillum (l’aspersoir) pour Lépide qui était Grand Pontife, le lituus (le bâton de l’augure) pour Antoine qui était augure. Enfin, la mention du Grand Pontificat était une manière pour Lépide de se placer dans la continuité de César.
26La seconde monnaie pose plus de difficultés, parce que les numismates ne sont pas d’accord sur la date et sur le lieu de sa frappe47. Il semble toutefois qu’elle ait été émise en 42, mais à la différence d’E. Badian48 qui voit à travers cette monnaie une communauté d’idées entre Lépide et Octavien, nous pensons plutôt qu’elle révèle la rivalité latente qui existait déjà entre les deux hommes. En effet, Lépide désigne Octavien sous son nom d’imperator et ne revendique pas ce titre pour lui-même bien qu’il en ait le droit mais en même temps il met en avant son titre de Grand Pontife sans faire mention des fonctions sacerdotales d’Octavien49.
2.4.2. Les monnaies de Lépide avec les magistrats monétaires
271. Aureus50 (fig. 3)
Avers :
M LEPIDVS III VIR R P C
Marcus Lepidus Triumuir Rei Publicae Constituendae.
Tête nue de Lépide à gauche.
Revers :
L REGVLVS IIII VIRA P F
Lucius Regulus Quattoruir Auro Publico Feriundo. Avec au milieu la vestale Aemilia qui tient un sceptre et un simpulum.
282. Aureus51.
Avers :
M LEPIDVS III VIR R P C
Marcus Lepidus Triumuir Rei Publicae Constituendae.
Tête de Lépide nue à gauche.
Revers :
L MVSSIDIVS T F LONGVS IIII Corne d’abondance.
293. Aureus52.
Avers :
M LEPIDVS III VIR R P C
Marcus Lepidus Triumuir Rei Publicae Constituendae.
Tête nue de Lépide à gauche.
Revers :
L MVSSIDIVS T F LONGVS III VIR A P F
Lucius Mussidius Titi Filius Longus Quattuoruir Auro Publico Feriundo. Mars nu, debout, portant un casque corinthien, le pied sur un bouclier, tenant de la main droite une lance, et de la gauche une épée.
304. Aureus53.
Avers :
M LEPIDVS III VIR R P C
Marcus Lepidus Triumuir Rei Publicae Constituendae.
Tête nue de Lépide.
Revers :
C VEIBIUS VAARVS. Deux mains jointes.
315. Aureus54.
Avers :
M LEPIDVS III VIR R P C
Marcus Lepidus Triumuir Rei Publicae Constituandae.
Tête nue de Lépide à gauche.
Revers :
P CLODIVS M F III VIR A P F
Publius Clodius Marci Filius. Quattuoruir Auro Publico Feriundo. Représentation d’une femme qui tient dans sa main droite un sceptre et dans la gauche une corne d’abondance.
32Lépide a repris une représentation déjà utilisée lorsqu’il était lui-même monétaire, celle de la vestale Aemilia. Plutarque écrit que cette vestale était fille d’Énée et mère de Romulus par Mars55. Lépide tenait à rappeler l’origine prestigieuse de sa famille, fondatrice de Rome, comme son collègue Antoine qui faisait référence à Hercule56 et Octavien à Enée portant Anchise sur ses épaules57. Mais Lépide faisait également allusion à la période césarienne. La monnaie qui représente une femme tenant dans sa main droite un sceptre et dans la gauche une corne d’abondance a été identifiée par H. A. Grueber58 comme la Concordia. M. Crawford y voit plutôt une représentation de la déesse Fortuna59 et T. V. Buttrey la déesse Felicitas en souvenir des travaux de construction de son temple menés par Lépide60.
33Les derniers symboles, avec la figuration du dieu Mars et des deux mains jointes ont été utilisés par les deux autres triumvirs61. Ce type de Mars fait certainement réference aux forces militaires dont disposaient les triumvirs et les mains jointes sont le symbole de la Concordia entre les triumvirs62.
34Lépide développa donc sur ses monnaies quelques thèmes communs avec ses collègues (le dieu Mars et les mains jointes, symbole de l’unité entre les triumvirs), mais surtout il a tenu à mettre en valeur ses propres thèmes de propagande. Il a rappelé l’origine mythique de sa famille par le biais de la vestale Aemilia, et son parcours politique comme fidèle césarien avec Felicitas. Enfin il lit ressortir sa charge de Grand Pontife pour concurrencer son collègue Oetavien et rappeler le souvenir de César.
2.5. Les portraits de Lépide et la propagande politique
35G. Grimm, dans une étude consacrée aux portraits des trois triumvirs63, a développé l’idée selon laquelle la disposition des cheveux sur le front des statues était une des caractéristiques communes aux trois hommes. Il en a conclu que c’était le signe d’une communauté de vue sur le plan politique64. Il semblerait que la conception des portraits se soit faite en 43 sous l’influence d’Octavien et qu’après la reconduction du Triumvirat à Tarente en 37, Antoine ait modifié ses portraits65. En ce qui concerne Lépide, à partir de 36 il n’y a plus de statue qui le représente. Force est de reconnaître que nous avons peu de portraits du triumvir. A l’époque de César, F. Coarelli a identifié en Lépide, la statue masculine découverte à Alba Fucens66. Pour la période triumvirale, les statues de Lépide sont rares et souvent controversées67. C. Curtius68 considérait que le portrait de bronze du musée national de Naples et la tête de la Glypothèque de Copenhague représentaient Lépide. Il avait reconnu le triumvir en comparant ccs statues avec les monnaies frappées par Lépide, en particulier avec celles des monétaires C. Veibus Vaarus et L. Mussidius Longus et avait retrouvé une ressemblance qui l’avait amené à cette conclusion. Ces portraits dataient du début du Triumvirat, de 43 ou de 42. G. Grimm a justement repris l’étude de la statue de Copenhague pour étayer sa thèse. Toutefois il faut, à notre avis, être très prudent, d’une part parce que nous ne sommes pas certains d’être en présence de statues de Lépide, et d’autre part, l’analyse d’autres sources iconographiques, comme les monnaies, font plutôt ressortir la concurrence qui existait entre les trois hommes que leur unité sur le plan politique.
3. La victoire de Philippes et ses conséquences
36Début avril, Antoine et Octavien quittèrent Rome. Ils marchèrent vers le Sud de l’Italie et Octavien se détourna de sa route pour essayer de battre Sextus Pompée qui s’était emparé de toute la Sicile69. Le manque de bateaux empêcha son armée d’envahir l’île et il remit à plus tard son attaque. Il rejoignit Antoine, et leurs forces (dix-neuf légions plus des auxiliaires) embarquèrent à Brindisi vers la Macédoine. Arrivée sur place, l’armée triumvirale quitta la côte et marcha vers l’intérieur pour se retrouver en face de celle de Brutus et de Cassius qui avaient établi leur camp à l’ouest de la ville de Philippes. Une première bataille eut lieu début octobre qui n’emporta pas de victoire décisive70. Cassius croyant la cause républicaine perdue, se suicida71. La seconde bataille se déroula trois semaines plus tard, le 23 octobre72. L’armée triumvirale l’emporta et Brutus, à son tour se donna la mort73. Le véritable vainqueur de Philippes fut Antoine, Octavien ayant été malade, donc indisponible pendant toute la campagne. La cause républicaine était momentanément anéantie. Quelques nobles irréductibles choisirent de rejoindre Sextus Pompée74. Un certain nombre de ces hommes furent mis à mort par les triumvirs75. D’autres enfin, après avoir négocié, firent une reddition honorable à Antoine et se mirent à son service76.
37Au lendemain de leur victoire. Antoine et Octavien, dans le cadre d’un accord privé, sans consulter Lépide, surent immédiatement tirer les conséquences de cette victoire. Dion Cassius77 : “Ils avaient pour le moment la supériorité sur Lépide, celui-ci n’ayant pas participé à la victoire”. Ils réorganisèrent l’armée en reprenant les légions aux vaincus. Ils se partagèrent les tâches au sein de l’empire. Antoine partait réorganiser la partie orientale du monde romain qui avait été gérée par Brutus et Cassius et il devait rapporter de l’argent pour l’armée. Octavien revenait à Rome et en Italie pour distribuer les terres assignées et organiser les colonies. Enfin, ils firent un nouveau partage des provinces. Dion Cassius78 : “Ils se partagèrent le pouvoir ; César obtint l’Espagne et la Numidie et Antoine eut la Gaule et l’Afrique”. Appien79 : “Ils renouvelèrent entre eux le partage des provinces qu’ils avaient déjà fait et y comprirent celles qui avaient composé le lot de Lépide”. Donc, Lépide perdait l’Espagne et la Gaule Transalpine. En compensation. Dion Cassius80 : “Ils convinrent d’accorder l’Afrique à Lépide au cas où ce dernier s’indignerait quelque peu de ce partage”. Appien81 présente une tradition différente : “Lépide avait été accusé de trahir les intérêts du Triumvirat au profit de Sextus Pompée et il fut décidé que si Octave prouvait qu’il s’agissait d’une calomnie, Lépide recevrait d’autres provinces”. Puis au début de l’année 4182 : “Les renseignements qui furent pris sur la conduite de Lépide n’ayant fourni rien de grave à sa charge, Octave lui donna l’Afrique en compensation de son lot antérieur”.
38La lecture d’Appien et de Dion Cassius laisse penser que la victoire de Philippes marqua la lin du pouvoir effectif de Lépide au sein du Triumvirat. Son absence à la campagne militaire servit de prétexte à Antoine et à Octavien pour le dépouiller de ses deux provinces occidentales. Il fut considéré par ses deux collègues comme le collega minor du Triumvirat83, qui toutefois, n’osèrent pas l’éliminer totalement en 42 parce qu’il avait encore des appuis politiques à Rome, en particulier dans les milieux sénatoriaux84. Si l’on croit Appien, Lépide serait rentré en contact avec Sextus Pompée et aurait trahi Antoine et Octavien lorsqu’ils combattaient Cassius et Brutus. Il nous semble que cette “trahison" soit une invention pour justifier la nouvelle répartition des provinces. Il paraît difficile de croire que Lépide ait trahi ses collègues au profit du fils du Grand Pompée qui avait été responsable de la défaite de son père et de la mort de son frère aîné. En revanche, il se peut très bien que Lépide soit rentré en contact avec Sextus Pompée en 42 pour éviter les effets désastreux d’un blocus qui empêchait l’arrivée de blé vers l’Italie85. Leurs négociations échouèrent comme le prouve la suite des événements. En conséquence, Antoine et Octavien lui octroyèrent l’Afrique. Mais dans un premier temps86, Octavien avait conservé l’Africa Noua, c’est-à-dire la partie orientale de l’ancien royaume de Juba que César avait réduite en province et avait donné l’Africa Vetus à Antoine. Ce ne fut que plus tard que Lépide put récupérer les deux provinces87. L’Afrique était riche économiquement, mais elle connaissait des troubles politiques, les deux gouverneurs T. Sextius et Q. Cornificius reproduisant en Africa l’affrontement que se livraient les triumvirs88.
39Octavien rentra en Italie à la fin de l’année, mais il dut d’abord s’arrêter à Brindes parce qu’il était malade89. Lors de son arrivée à Rome au milieu de l’année 41 les premiers mouvements antitriumviraux apparurent90.
4. Lépide et la guerre de Pérouse
40La situation politique, économique et sociale était particulièrement tendue au cours de l’année 41. Une partie du Sénat et les proscrits étaient hostiles à Octavien et la ville commençait à connaître des famines à cause du blocus de Sextus Pompée. Octavien arriva à Rome au mois de juillet et dut rencontrer très rapidement Lépide. Les sources ne fournissent aucune information à ce sujet. Il se peut très bien que Lépide ait protesté auprès d’Octavien du sort qui lui avait été réservé, comme il le fera en 36. Octavien savait que Lépide avait toujours sous son commandement trois légions et des appuis au Sénat. Il canalisait sur lui beaucoup trop d’oppositions pour se permettre d’avoir en plus celle de son collègue, d’où la remise de la province d’Afrique, même si cette province était toujours en proie à des troubles internes.
41La situation sociale se dégrada rapidement. Les vétérans exigeaient la réalisation immédiate des promesses qui leur avaient été faites91. Octavien commença au mois de juillet la distribution des terres pour ses soldats92 et les propriétaires de dix-huit villes italiennes furent dépossédés par la force. Ils protestèrent et beaucoup d’entre eux vinrent à Rome pour présenter leurs doléances93. Octavien ne pouvait les dédommager, faute d’argent94 et la confusion régnait à Rome et dans toute l’Italie95. L’un des deux consuls de 41, Lucius Antonius96 et Fulvie, l’épouse d’Antoine97 intervinrent. Ils prirent fait et cause pour les propriétaires spoliés, tout en ne négligeant pas de profiter du renom d’Antoine pour se concilier les faveurs de ses anciens soldats98. Et parallèlement à ses premières revendications, ils s’opposèrent au pouvoir triumviral, et remirent en question la dictature exercée par les triumvirs99. Après l’échec de plusieurs tentatives de réconciliation et de négociation100, Octavien et L. Antonius eurent recours aux armes et la guerre dite de Pérouse commença101.
42Nous sommes très mal renseignés sur le rôle et la place joués par Lépide dans ce conflit. Il avait trois légions et cette force n’était pas à négliger, dans le conflit qui s’annonçait. Il n’a jamais cherché à s’allier avec L. Antonius et à s’attirer la sympathie de la classe moyenne italienne expropriée, du Sénat et de la plèbe. Lépide soutint Octavien102. Et ce pour deux raisons. La première concernait les relations avec Fulvie qui étaient mauvaises. Dion Cassius103 lui fait dire qu’elle “n’avait pas de respect pour Lépide parce qu’il était sans caractère” et Appien au début du conflit104 : “Fulvie vint rejoindre Lucius en alléguant que de son côté, elle redoutait pour ses enfants les manœuvres de Lépide”. De quelles manœuvres s’agit-il ? Nous ne le savons pas, et la crainte pour ses enfants est surprenante. En effet, il paraît difficile de croire que Lépide ait voulu être malveillant à l’égard des enfants d’Antoine, d’autant plus que son fils était fiancé avec la fille d’Antoine. La seconde considération concerne le pouvoir triumviral auquel Lépide semblait être très attaché. En effet, rien dans les sources ne laisse penser que Lépide ait négocié avec L. Antonius et qu’il ait eu quelques sympathies pour les dépossédés. Il a certainement considéré que son intérêt était d’aider Octavien et ainsi conserver son pouvoir. Il est tout-à-fait inexact d’écrire comme le fait R. Syme105 que Lépide ne lui fut d’aucune aide. Il lui a permis, en lui apportant ses légions, de se constituer une armée de douze légions dont les forces étaient à peu près égales à celles de L. Antonius106.
43Les opérations militaires se présentèrent au début du conflit comme une série de manœuvres et de contre-manœuvres dont l’objectif était pour chaque belligérant de réunir ses forces pour affronter l’adversaire107. Après quelques escarmouches, la guerre véritable commença108. Octavien laissa Rome à Lépide avec deux légions109. Il partit à Alba Fucens pour essayer de récupérer les deux légions de L. Antonius qui s’étaient mutinées110. Profitant de l’absence d’Octavien, L. Antonius quitta son quartier général de Préneste et s’empara de Rome. Appien111 : “sur ces entrefaites, Lucius marcha vers Rome en diligence. Il se fit précéder par trois cohortes, qui furent clandestinement introduites dans la ville. Il arriva lui-même à la suite de ses cohortes avec beaucoup de troupes, avec de la cavalerie et des gladiateurs. Nonius qui était chargé de garder les portes les lui ouvrit. Il lui remit en même temps les soldats dont il avait le commandement. Lépide se sauva de Rome, et alla rejoindre Octavien. Lucius convoqua le peuple et lui dit : “Qu’Octave et Lépide ne tarderaient pas de recevoir le châtiment de leurs actes de violence et d’atrocité...”. Dion Cassius présente une version quelque peu différente où il n’est pas question de la fuite de Lépide112 : “... En effet, ni Lépide, qui avait en charge la garde de la ville, par sa nonchalance naturelle, ni le consul Seruilius, qui était encore moins actif, n’opposèrent de résistance”. Dion Cassius ne précise pas ce que fit ensuite Lépide. Sa fuite peut s’expliquer par plusieurs raisons113. D’une part, ses forces militaires, deux légions, étaient inférieures à celles de L. Antonius et d’autre part une partie de son armée lui était hostile, puisque l’un de ses officiers, Nonius114, l’avait trahi en ouvrant les portes de Rome. Ensuite, la population romaine était dans sa grande majorité favorable au consul. Appien n’ajoute-t-il pas à la fin du discours de L. Antonius : “ce discours fut accueilli avec des applaudissements universels. Tout le monde crut que ç’en était déjà fait du Triumvirat”.
44Lépide alla rejoindre Octavien. Ce dernier laissa le siège de Sentinum et se dirigea vers Rome par la uia Flaminia. Le jeune César occupa la ville sans difficulté puisque Lucius l’avait déjà évacuée115. Puis il se dirigea vers le Nord pour rejoindre les généraux antoniens. Dans ce récit des événements, rien n’a été dit sur Lépide mais il y a de bonnes raisons de penser qu’il soit de nouveau resté à Rome pour administrer la ville jusqu’à la fin du conflit116 qui dura jusqu’en février 40, date de la fin du siège de Pérouse. Cette guerre se termina par la victoire d’Octavien. Lucius et son armée furent graciés, mais la ville de Pérouse fut brûlée et grand nombre de notables furent exécutés117. Toutefois la situation des triumvirs restait périlleuse. Le Sénat, les classes moyennes romano-italiques leur étaient encore hostiles et en Sicile, Sextus Pompée constituait toujours une menace118.
45Lépide resta à Rome jusqu’à la moitié de l’année 40. Les relations entre les deux hommes devaient être tendues puisque selon Appien, Octavien se méfiait de Lépide. En effet, après la victoire de Pérouse, Antoine s’était embarqué au mois de mars 40 à Alexandrie avec une flotte importante. Il débarqua en août 40 à Brindes, puis il assiégea la cité tenue par les troupes d’Octavien après avoir négocié avec Sextus Pompée et gagné le concours de Domitius Ahenobarbus119. Antoine s’était donc rapproché du camp républicain et pompéien. Appien explique que les forces d’Octavien, soit quarante légions, étaient supérieures à celles d’Antoine, de Sextus Pompée et d’Ahenobarbus réunies120. Il craignit, à la fin du printemps, que Lépide se rapproche des trois hommes, d’où sa décision de l’envoyer vers l’Afrique. Appien121 : “Octave éloigna en même temps, sous divers prétextes, ceux des amis d’Antoine dont il n’était pas sûr, en les envoyant les uns d’un côté, les autres d’un autre. II fit partir Lépide pour la Libye qui lui avait été assignée et lui fit emmener six des légions d’Antoine sur lesquelles il pensait ne devoir pas trop compter”. Si le récit d’Appien est exact, ce fut de la part d’Octavien une décision judicieuse puisqu’il se débarrassait à la fois d’un collègue génant et d’une partie de l’armée d’Antoine. Mais rien ne laisse penser que Lépide se soit rapproché d’Antoine et de Sextus Pompée. Quant aux légions, il y a de fortes chances qu’il s’agisse d’une restitution de la part d’Octavien et Antoine, puisque ces derniers avaient pris à Lépide sept légions pour combattre les libérateurs122. Dion Cassius123 fait un récit différent mais tout aussi discutable : “A ce moment, quand il vit que Lépide s’irritait d’être privé de la province qui lui revenait, il l’envoya en Afrique, afin qu’il ait l’impression de recevoir cette province de lui seul et non aussi d’Antoine, et qu’il ait pour lui des dispositions plus bienveillantes". Cet argument est tout à fait contestable, puisque après la bataille de Philippes, Antoine et Octavien se partagèrent tous les deux les provinces et donnèrent d’un commun accord l’Afrique à Lépide124. Il semble difficile d’admettre qu’Octavien ait obligé Lépide à partir vers l’Afrique. On peut en revanche supposer que les deux hommes aient pris ensemble cette décision à cause de la menace que constituait Sextus Pompée pour Rome. Ce dernier se trouverait ainsi dans une situation inconfortable, puisque les îles qu’il dominait se localisaient entre Rome et l’Afrique. Par ailleurs, depuis la guerre de Pérouse, les classes moyennes italiennes étaient hostiles aux triumvirs, et on peut comprendre que momentanément Lépide ait voulu quitter l’Vrbs pour une province plus accueillante. En gagnant l’Afrique, il savait qu’il pouvait certainement refaire ses forces, se constituer une clientèle et retrouver un nouveau souffle au sein du Triumvirat.
Notes de bas de page
1 Syme 1967, 195.
2 Au moment de la formation du Triumvirat, Lépide avait sous ses ordres dix légions. Selon App., BC., 4.3, Antoine et Octavien lui en prirent sept pour aller combattre Brutus et Cassius et lui en laissèrent trois pour gouverner Rome et l’Italie.
3 D.C. 47.18.
4 App., BC., 4.31.
5 D.C. 47.16 ; App., BC., 4.34.
6 App., BC., 4.32-33 ; Nicolet 1976, 243 dresse la liste des impôts. Il y eut : le tributum rétabli de 43 ; un impôt sur les immeubles, (D.C. 47.14.2) ; un impôt sur les propriétés rurales (D.C. 47.14.2) : un impôt sur les ventes et les locations” (App., BC., 4.5), il s’agissait d’un telos, c’est-à-dire d’une taxe indirecte ; des liturgies spéciales furent imposées aux sénateurs qui durent fournir des marins pour la flotte, (des esclaves et leur solde comme en 214 a.C.) et réparer à leurs frais les routes ; enfin, un impôt sur les esclaves, levé la première fois en 43 (D.C. 47.16.3) et renouvelé en 40.
7 D.C. 47.14.3. Voir notamment Keppie 1983.
8 Plut., Ant., 21.1 : “Le Triumvirat paraissait dans l’ensemble insupportable aux Romains, mais l’on en voulait surtout à Antoine, plus vieux que César (Octavien), plus puissant que Lépide, et qui s’était replongé dans sa vie de plaisir et de débauches”.
9 Millar 1973,53 ; Laffi 1993,50.
10 Roddaz 1992, 192. n. 35 ; Roddaz 1996b, 80-81.
11 Suet., Aug., 27.3.
12 Hinard 1985a, 246.
13 Scott 1933,20, n. 1.
14 Bonnefond-Coudry 1989. Voir le calendrier des séances, p. 218 et la liste des séances commentées, p 809.
15 Suet., Aug., 27.3.
16 MRR, II, 358-359 ; Suolatili 1963, 490-494 ; Chastagnol 1992b, 20 ; Fasti Colotiani, CIL, T 2, p. 64 : /C.A/ntonius, P. Sulpicius cen(sores) lustr(um) n(on) fiecerunt).
17 Hinard 1985a, 268.
18 II y eut un nouveau recrutement en 39 puisque D.C. 48.34.4. écrit : “(ils) firent entrer au Sénat un nombre fort important de gens non seulement parmi les alliés, des soldats ou des fils d’affranchis mais même des esclaves”. Voir sur ce sujet, Poma 1987. 149-174.
19 Les partisans d’Antoine sont bien connus. Voir notamment la thèse de Ferries 1997. Il est beaucoup plus difficile de retrouver ceux de Lépide qui pourtant existaient, comme le laisse penser ce court passage de D.C. 48.3.6, en 41 : “C’est pourquoi justement César, craignant une révolte de leur part surtout parce que Lépide était là, écrivit une lettre au Sénat”. Voir également Grattatola 1990.
20 Roussel 1934, 34-35 ; Sherk 1969, no 58 ; Millar 1973, 55. Voici la traduction de P. Roussel pour la partie qui nous intéresse : – I – Année.... le... du mois d’Appoleios. Imperator César, fils du divin Iulius, imperator pour la quatrième fois, consul désigné pour la (deuxième) et la troisième fois, aux magistrats, au Conseil et à l’Assemblée de Rhosos, ville sacrée, inviolable et(autonome), salut. Moi et mon armée, nous sommes en excellente santé. Ci-joint un extrait transcrit d’une stèle qui se trouve au Capitole de Rome : vous devez l’enregistrer dans vos archives publiques. Envoyez-en aussi une copie au Conseil et à l’Assemblée de Tarse, au Conseil et à l’assemblée d’Antioche, au Conseil et à l’assemblée de..., pour qu’ils l’enregistrent. Adieu. – II – (César) imperator, triumvir préposé au rétablissement de la République, conformément à la loi Munatia et Aemilia, (a) donné le droit de cité et l’immunité totale en ces termes. Attendu que Séleukos, fils de Théodotos de Rhosos a tait campagne avec nous dans la (guerre en...), sous notre commandement souverain, qu’il a souvent et grandement pâti et risqué pour nous, ne reculant devant rien lorsqu’il s’agissait d’endurer des maux, qu’il a manifesté son attachement et sa loyauté à la République, qu’il a associé (sa fortune) à notre conservation, qu’il a consenti à tous les sacrifices pour la République romaine, qu’en notre présence comme en notre absence, il nous a rendu service.
21 Roussel 1934, 46.
22 Roussel 1934, 46.
23 Roddaz 1996b, 91.
24 Voir Millar 1973, 50-67 qui s’est intéressé à cette problématique à la suite des découvertes d’Aphrodisias. Sur Aphrodisias, Reynold 1982.
25 Hinard 2003, 348.
26 Coarelli 1985, 258.
27 Hinard 1992, 70-71 ; Hinard 2003, 346-347.
28 Pais 1920, 289.
29 D.C. 44.5.2.
30 Cic., Art.. 4.16.4 ; D.C. 43.23.2. Sur les Saepta Iulia : Gatti, s.v. Saepta lidia. LTUR. 4. 1999, 228-219 : Palmer 1983, 343-361 ; Shipley 1932,9-60.
31 Shipley 1932,18.
32 D.C. 53.23.2.
33 Rotldaz 1984.256-257 ; Coarelli 2001,42.
34 D.C. 47.15.4 : “... et ils firent aussi voter un temple à Isis et à Sérapis”. Sur le culte d’Isis : Malaise 1972 ; Dunand 2000. Sur l’Iseum Campense, la bibliographie est abondante : Gatti 1943-1944, 117-163 ; Coarelli 1977, 807-846 ; Coarelli 1984. 461-475 ; Le Glay 1985a, 545-562, notamment p. 549 ; Coarelli. s.v. Iseum et Serapeum in Campo Martio : Isis Campensis. LTUR. 3, 1996, 107-109.
35 D.C. 40.47.
36 D.C. 42.26.2.
37 Le Glay 1985a, 549-550, suggérait également que cette construction pouvait être mise en relation avec les préoccupations économiques des triumvirs. Il s’appuyait sur le fait que sur les revers des monnaies des triumvirs omises en 43-42 a.C., étaient représentés soit des cornucopiae, soit Pax et le caducée, soit encore Cérès ou un modius avec trois épis de blé. Il nous semble difficile de mettre en relation la construction d’un temple d’Isis avec la question de l’approvisionnement en blé. Voir Allély 2000b, 41-42.
38 Juv. 6. 528-529.
39 Coarelli, s.v. Iseum et Serapeum in Campo Martio ; Isis Campensis. LTUR. 3. 1996, 107-109.
40 Gatti 1934, 123-149. Le temple détruit par Tibère serait alors celui-là. Voir Bustany & Géroudet 2001 153-154.
41 De Martino 1993, 77-78.
42 RRC ; G rucher 1911, 109-152 ; Buttrey 1956, 8-10 ; Wallmann 1977 ; Sear 1998
43 Wallmann 1977, 37-38.
44 Wallmann 1977, 37. Sur Octavien et Antoine : Zanker 1988,44-65.
45 RRC, p. 501, no 492.
46 RRC, p. 511, no 495.
47 Babelon 1885, I, p. 132 considère qu’elle a été frappée à l’occasion du second Triumvirat. Grueber 1910,1, p. 579 pense que cette frappe a eu lieu entre 40 et 36 en Afrique, lorsque Lépide y était gouverneur.
48 Badian 1992, 12.
49 Wallmann 1977, 36 considère qu’après la victoire de Philippes, Lépide étant en position d’infériorité chercha à compenser son manque de pouvoir réel par le rappel de ses fonctions religieuses.
50 RRC. p. 502, no 494/1.
51 RRC. p. 504, no 494/13.
52 RRC. p. 503, no 494/7a.
53 RRC. p. 504, no 494/10.
54 RRC, p. 503, no 494/4b.
55 Plut., Rum., 2.3.
56 RRC. p. 502, no 494/2a.
57 RRC. p. 502, no 494/3a.
58 Grueber 1911,1. p. 584, no 4277.
59 RRC, p. 503 et p. 510. no 494/4b.
60 Buttrey 1956, 8-10, n. 41.
61 Représentation de Mars : Octavien, RRC. p. 505, no 494/16 ; 494/18. Antoine, p. 505, no 494/17. Représentation des mains jointes : Octavien : RRC. p. 504, no 494/12. Antoine, p. 504, no 494/1.
62 RRC, p. 510.
63 Grimm 1989, 347-364.
64 Grimm 1989, 349.
65 Grimm 1989, 352.
66 Coarelli 1998.
67 Voir Hinks 1935,88-95 ; Walter 1938, 161 ; Poulsen 1962, 6-17.
68 Curtius 1932, 202-268, plus précisément p. 265.
69 App., BC., 4.85 : D.C. 48.18.1.
70 D.C. 47.43-46.
71 D.C. 47.46.5.
72 D.C. 47.47-49.
73 D.C. 47.49.
74 App., B.C., 5.2-4
75 Suet., Aug., 13.2.
76 Plut., Brut., 50. Ce fut le cas d’un ami de Brutus. Lucilius qui resta au service d’Antoine.
77 D.C. 48.1.2.
78 D.C. 48.1.3.
79 App., BC., 5.3.
80 D.C. 48.1.3.
81 App., BC., 5.1-3.
82 App., BC., 5.2.2.
83 Sur le plan institutionnel la situation de Lépide était tout à fait particulière. Depuis 43, il disposait d’un imperium sur la province ibérique parce que c’était la prouincia qui lui était revenue après l’exercice de la charge de maître de la cavalerie en 44. Cet imperium militiae courut jusqu’au 31 décembre 43 au moment où il célébra son triomphe, mais depuis le 23 novembre il disposait aussi de l’imperium triumviral et à partir de 42, il revêtit le consulat. En 41, il était toujours à Rome où il lit sans doute usage de son imperium domi triumviral pour faire obstacle à Lucius Antonius.
84 Gabba 1971,140.
85 A la fin de l’année 44, Sextus Pompée conformément aux accords conclus avec Lépide avait quitté l’Espagne et s’était arrêté quelque temps à Marseille au début de 43 et fut nommé praefectus classis et orae maritimae. Il fut proscrit au titre de la lex Pedia en novembre 43. Voir Hinard 1985a, 505-506, no 105. Il se prépara dorénavant à la guerre et accueillit de nombreux proscrits. Il lit la conquête de la Sicile à la lin de l’année 43 et au cours de l’année 42 et s’empara de la quasi-totalité des vaisseaux qui appartenaient aux triumvirs, ce qui explique la faiblesse de la flotte triumvirale à Philippes. Sa flotte dominant désormais cette partie du bassin occidental de la Méditerranée, géna l’approvisionnement en blé de l’Vrbs.
86 D.C. 48.1.3 et 48.22.2.
87 D.C. 48.2.4 et 48.23.5.
88 La guerre civile entre César et Pompée eut des répercussions importantes sur l’organisation du territoire africain. La défaite des Pompéiens à Thapsus (6 avril 46) fut aussi celle de leur allié, le roi Juba de Numidie. Son royaume devint l’Africa Noua, et la fossa regia marquait à l’est la frontière avec l’Africa Vetus. César confisqua également le territoire de Massinissa et le partagea avec ses alliés. Tandis que le fils de Massinissa, Arabion partait vers l’Espagne, César octroya à P. Sittius la partie orientale du royaume où ce dernier installa ses soldats, les Sittiani. Au lendemain de la mort de César, cette répartition territoriale fut modifiée par le retour d’Arabion et par la mort de P. Sittius. Cirta devint colonie romaine et Arabion récupéra une partie du royaume de son père, tandis que les deux provinces l’Africa Noua et l’Africa Vetus devinrent l’objet de conflits entre Césariens et Républicains. Q. Cornificius, un ami de Cicéron, reçut du Sénat le 20 mars 44, le gouvernement de l’Africa Vetus. Ce gouvernement fut prorogé en mars 43. Antoine et les Césariens comptèrent sur le gouverneur de l’Africa Noua, T. Sextius nommé probablement en 44. Avant la guerre de Modène, le Sénat demanda à T. Sextius de remettre une légion à Q. Cornificius et d’en envoyer deux autres en Italie. Ces dernières furent récupérées par Octavien après la victoire de Modène. Après la formation du second Triumvirat, le conflit entre les gouverneurs éclata ouvertement.
89 App., BC., 5.12.
90 D.C. 48.3 ; App., BC., 4.104 ; Gabba 1970a, p. LXVI.
91 App., BC., 5.12. Il avait été prévu à Bologne que les vétérans recevraient des récompenses en terres et cela fut confirmé par la lex Tilia. Voir Keppie 1983,53 ; Freyburger & Roddaz 1994, p. XL.
92 D.C. 48.6. Leur nombre n’a pas dépassé 50 000. Keppie 1983, 60 ; Freyburger & Roddaz 1994, p. XLIII.
93 Gabba 1970a, LIX-LXVIII ; Volponi 1975, 85-87 ; Schneiner 1977, 222-225 ; Keppie 1983, 3.
94 App., BC., 5.15.
95 D.C. 48.9.4.
96 Roddaz 1988a, 317-346.
97 Babcock 1935. 1-32. La propagande augustéenne a déformé le rôle de Fulvie. Elle est toujours présentée sous un jour odieux et ses actes sont déformés.
98 Gabba 1970a, p. XXIII.
99 App., BC., 5.19 ; Gabba 1971, 139 ; Roddaz 1988a, 339-340.
100 Conférence de Teanum : App., BC., 5.20.79 ; D.C. 48.10.2. Conférence de Gabies : App., BC., 5.23.90 ; D.C.48.12.1.
101 Sur la guerre de Pérouse : outre les titres déjà cites, on peut lire Roddaz 858-864, dans Hinard 2000.
102 D.C. 48.13.4 ; App., BC., 5.12 ; 5.29.
103 D.C. 48.4.1.
104 App., BC., 5.21.
105 Syme 1967, 200.
106 Voir Hahn 1960, 211-215 ; Brunt 1971, 493-496 ; Wallmann 1975, 71-78.
107 Sur les opérations militaires de la guerre de Pérouse voir : Reinhold 1933, 180-183 ; Gabba 1970c 215-223 ; Gabba 1971 ; Wallmann 1975.
108 App.. BC., 5.27.
109 App., BC., 5.29.
110 App., BC., 5.30.
111 App., BC., 5.30.
112 D.C. 48.13.4.
113 Gabba 1970a, p. XLVII.
114 Ce personnage, inconnu par ailleurs, était soit centurion, soir tribun militaire. Voir Freyburger & Roddaz 1994, 67, n. 91.
115 App., BC., 5.31.
116 Weigel 1992, 81.
117 App., BC., 5.44.
118 Gabba 1971, 155.
119 D.C. 48.27.5 ; App., BC., 5.56 ; Gabba 1970a, LV-LIX.
120 App., BC., 5.53. Hadas 1930, 86-87.
121 App., BC., 5.53.
122 Gabba 1970a, 91.
123 D.C. 48.20.4.
124 D.C. 48.1.3.
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