Chapitre VIII. La mise en place du second Triumvirat
Fin de l’année 43
p. 121-131
Texte intégral
1R. Syme écrivait au sujet du second Triumvirat que c’était “une période embrouillée, chaotique et affreuse”1. En effet, cette phase charnière de treize ans vit s’éteindre la fin d’un régime, celui de la Libertas républicaine, et naître le Principat, en fait la Monarchie.
2Sur le plan historiographique, depuis Th. Mommsen, les grandes collections historiques étrangères et françaises ont eu tendance à traiter très rapidement ces quelques années, soit comme un épilogue de la République, soit comme un prologue du règne d’Auguste.
3Bien que les sources donnent peu de renseignements sur l’institution et sur son fonctionnement, quelques chercheurs se sont consacrés dernièrement à l’étude du fonctionnement du Triumvirat et ont apporté des travaux de qualité2.
4Pour ce qui concerne Lépide, premier en dignitas au sein du Triumvirat, il reste le grand oublié de la période, l’historiographie s’attachant surtout à décrire la lutte intestine entre Antoine et Octavien. Les principaux historiens, Appien et Dion Cassius ont soit occulté, soit déformé son rôle et sa place3, d’où la nécessité de reprendre le dossier.
1. L’entrevue de Bologne
5Comme nous l’avons vu précédemment Lépide fut l’artisan principal de la réconciliation entre Antoine et Octavien. Il proposa certainement à ses deux futurs collègues le lieu de rencontre et il choisit en conséquence la Gaule Cisalpine, région qui était attachée aux Aemilii4. L’endroit exact du rendez-vous est toujours sujet à discussion. Appien5 situe la rencontre sur une petite île dans les environs de Modène. Dion Cassius6, Plutarque7 et Suétone8 la placent à Bologne. I1 semblerait comme l’a montré P. Grattarola9, que l’entrevue eut lieu début novembre sur une presqu’île au confluent de deux petites rivières le Renus et le Lavinius près de Bologne.
6Tous les témoignages sont concordants pour dire que les discussions entre les trois hommes furent longues et difficiles. Le récit d’Appien10 est riche en détails qui prouvent combien l’alliance était loin d’être acquise, et que la suspicion régnait entre Lépide, Antoine et Octavien. Il montre également le rôle déterminant de Lépide pour favoriser leur rapprochement : “Après les avoir fait camper les unes au regard des autres (les légions), ils s’avancèrent chacun de son côté avec trois cents hommes jusqu’aux deux ponts qu’on avait jetés sur le fleuve. Lépide entra le premier dans l’île pour s’assurer qu’il n’y avait rien à craindre, et en agitant son vêtement il lit signe à l’un ou à l’autre de s’avancer. Ils laissèrent chacun leurs trois cents hommes et tous leurs amis à la tête des ponts, et se placèrent à égale distance de ces deux ponts, dans un endroit pleinement découvert et tous trois prirent séance. Octave au milieu, par égard pour la dignité consulaire dont il était revêtu”.
7Mais le plus important restait le fond, et ici également les sources fournissent des renseignements de valeur inégale.
2. Les termes de l’accord
8Ce sont les témoignages d’Appien et de Dion Cassius qui donnent un certain nombre d’indications qui permettent d’avoir une idée précise sur la nature du second Triumvirat11, Appien écrit12 : “Qu’il serait nommé un nouveau Triumvirat entre Lépide, Antoine et Octavien, pour faire cesser tous les désordres et toutes les calamités de la guerre civile ; que l’autorité des triumvirs serait égale à l’autorité consulaire et qu’elle serait conférée pour cinq ans, tournure imaginée pour éviter de prendre le titre de dictateur par égard peut-être pour le sénatus-consulte qu’Antoine lui-même avait provoqué et qui prohibait la nomination d’un dictateur pour cause quelconque”. Dion Cassius13 ne donne pas de définition de leurs pouvoirs mais : “Les trois hommes seraient désignés, en commun, en quelque sorte responsables de la réorganisation et du rétablissement des affaires publiques ainsi que de leur amélioration et ce, apparemment non pas pour toujours, mais pour cinq ans”. Dion Cassius précise également qu’ils eurent les ἀρχαί et les τιµαί et qu’ils se divisèrent les provinces. Donc le Triumvirat était une magistrature collégiale, à durée limitée et en cela elle renouait avec la tradition républicaine, mais elle conférait à ses détenteurs un pouvoir équivalent à celui du dictateur. Appien14 et Dion Cassius15 précisent que les triumvirs nommèrent pour cinq ans à toutes les magistratures annuelles et se partagèrent le gouvernement des provinces. Lépide garda la Gaule Transalpine et reçut toute l’Espagne. Antoine gouverna la Gaule chevelue et la Cisalpine et Octavien l’Afrique, la Sicile et la Sardaigne.
9Pour ce qui concerne la répartition des pouvoirs entre les trois hommes. Dion Cassius rappelle qu’ils étaient égaux en droit16. Dans l’ordre de préséance. Lépide le premier en dignitas, est cité en premier par Appien17 et dans les Fastes18. Cet ordre était déterminé par la date du consulat. Lépide avait été consul la première fois en 46, Antoine en 44 et Octavien en 43. Un deuxième point concerne la répartition des provinces. Le partage se révélait être surtout favorable à Lépide et à Antoine. Il l’était beaucoup moins pour Octavien. En effet, la Sicile et la Sardaigne étaient indisponibles parce qu’elles étaient tombées aux mains de Sextus Pompée, et l’Afrique, une riche province, était dirigée par T. Sextius, un gouverneur pro-antonien. Enfin, Antoine fit abandonner, pour la fin de l’année 43, le consulat à Octavien qui fut remplacé par Ventidius Bassus.
10Restait la question de la vengeance de la mort de César. Les triumvirs décidèrent qu’Antoine et Octavien conduiraient la guerre contre Brutus et Cassius, tandis que Lépide, nommé consul pour l’année 42, resterait à Rome pour administrer la ville et l’Italie19. Appien précise20 : “Il fut réglé en outre qu’Antoine et Octavien demeuraient chargés de la guerre contre Brutus et Cassius : que Lépide serait investi du consulat l’année suivante, qu’il resterait à Rome, parce que sa présence y serait nécessaire pour parer aux événements, et qu’il se ferait représenter en Ibérie par ses lieutenants. Que pour cet effet, il conserverait trois des légions de son armée, et qu’Antoine et Octavien se partageraient les sept autres, dont trois pour Octavien et quatre pour Antoine”. Ainsi, Antoine et Octavien, en prenant sept légions à Lépide, se constituaient une armée de vingt légions. C’était principalement Octavien qui désirait venger son père. Il apparaissait donc normal qu’il soit présent aux opérations militaires contre les tyrannicides, mais il avait besoin d’être accompagné par un stratège expérimenté. Antoine, grâce à son passé et à ses expériences militaires était cet homme. Lépide était surtout reconnu comme un bon médiateur et administrateur. Il n’avait pas eu souvent l’occasion de s’illustrer sur les champs de bataille. En revanche, il avait déjà administré Rome en 49 et en 46. La présence d’un triumvir était d’autant plus nécessaire dans l’Vrbs, qu’il fallait mettre en place la proscription21. Donc, au regard de l’expérience de chacun, il apparaissait logique que Lépide restât à Rome. Mais il risquait de ne plus être en parfaite égalité avec Antoine et Octavien à une époque où l’armée jouait un rôle essentiel dans les carrières politiques22.
11Donc, au moment de la rencontre de Bologne, Lépide avait au sein du Triumvirat une situation importante. Premier en dignitas, il cumulait pour 42, les pouvoirs triumviraux et le consulat et conservait les provinces occidentales. En ce mois de novembre 43, c’était Octavien qui semblait être le perdant de l’opération. Il avait dû laisser le consulat pour la fin de l’année et avait reçu des provinces qu’il ne pouvait réellement administrer.
12Après l’accord de Bologne, les triumvirs partirent vers Rome avec leurs armées. Ils firent leur entrée séparément, trois jours de suite. Octavien entra en premier en tant que consul en exercice suivi d’Antoine et de Lépide23. Chacun était accompagné de trois légions à l’intérieur de la ville qui se trouvait ainsi occupée militairement. Ils donnèrent une base légale au régime en faisant proposer par le tribun de la plèbe P. Titius un plébiscite qui mettait en place le Triumvirat24. Cette loi, la lex Titia fut votée le 27 novembre 43. Parallèlement à ces événements, Dion Cassius rapporte qu’un certain nombre de prodiges se produisirent25. En ce qui concerne Lépide, un serpent s’était enroulé autour de l’épée d’un centurion et un loup était entré dans sa tente pendant qu’il mangeait. Dion Cassius en a déduit que son pouvoir serait suivi de troubles26.
13Il fallait enfin régler la question des opposants qui pouvaient être tentés à Rome et en Orient de contester l’autorité des triumvirs. Les trois hommes choisirent de recourir à la proscription comme Sylla, quarante ans auparavant.
3. Le recours a la proscription
14La proscription avait été pour Sylla, une mesure politique qui consistait en l’élimination immédiate de ses adversaires politiques et de leurs complices dont on affichait les noms et dont on mettait les têtes à prix27. Une procédure précise était suivie. Un edictum exposait les motifs et les modalités de la proscription, des tabulae, planches de bois sur lesquelles étaient peints les noms des victimes, étaient dressées dans différents endroits de Rome. Une récompense en argent, payée sur fonds publics, était prévue pour toute personne qui assassinait un proscrit. La liste des proscrits était exposée au Forum, sur les Rostres. Le corps mutilé était privé de sépulture et la famille ne pouvait porter le deuil. Le proscrit connaissait une véritable damnatio memoriae et ses biens étaient confisqués.
3.1. Les raisons de la proscription de 43
15La question de la proscription du second Triumvirat a été largement débattue par les historiens et renouvelée par F. Hinard28.
16La situation politique de 43 était bien différente de celle de 82 parce que la guerre civile n’était pas commencée29. On peut donc se demander pour quelles raisons les triumvirs eurent recours à ce moyen ? Dion Cassius30, suivi par les historiens contemporains31 fait état du besoin de richesses de la part des triumvirs, en particulier pour Lépide et pour Antoine : “Ces deux-là toutefois sauvèrent aussi certains proscrits, ceux du moins dont ils reçurent plus d’argent qu’ils n’avaient pensé en recevoir de leur mort”. Florus32 : “Lépide était passé par le désir de richesses qu’il espérait acquérir à la suite du bouleversement de l’État”. Appien33 reprend l’argument de l’enrichissement mais en précisant que cet argent servirait à faire la guerre aux assassins de César : “3... ils avaient en effet besoin pour faire la guerre de beaucoup d’argent, car c’était à M. Brutus et à Cassius qu’étaient apportées toutes les contributions de l’Asie”.
17L’argument financier n’est pas à négliger totalement mais il ne peut seul expliquer la proscription. Et cela pour plusieurs raisons. En période de troubles, les revenus tirés de ventes de biens immobiliers sont toujours inférieurs à la valeur réelle des biens34. De même, on sait que les dirigeants politiques pouvaient s’enrichir en confisquant des biens sans recourir à la proscription. Appien nous apprend que les biens de tous ceux, qui non proscrits, avaient quitté Rome, furent confisqués. Mais il nous dit également35 qu’il manquait aux triumvirs vingt millions de drachmes attiques après avoir vendu le bien des proscrits. F. Hinard36 a calculé que cette somme correspondait exactement à huit cents fois le praemium offert à un assassin ou à un indicateur et qu’il y avait environ trois cents proscrits. Donc, l’idée d’une proscription pour s’enrichir personnellement ou pour se procurer de l’argent en vue de faire la guerre ne peut être retenue.
18Le second argument est d’ordre idéologique et politique. Les triumvirs qui se présentaient comme les tenants de la légitimité césarienne, voulaient venger la mort de César. Cette volonté se retrouve chez les trois hommes. Lépide, après les Ides de mars, voulait venger César, et Antoine l’en avait dissuadé. Ce dernier était d’un avis partagé. Si dans la XIIIe Philippique, il se déclarait satisfait de la mort de Trébonius, qu’il considérait comme un parricide37, lors des négociations avec Octavien, il lui avait dit clairement que "c’était plutôt à César à venger son père qu’à lui-même à venger son ami”38. Enfin, le jeune César avait fait de la vengeance de la mort de son père son cheval de bataille. Il a bien été montré39 qu’après avoir fait ratilier son adoption à Rome, Octavien s’était donné pour seul but avoué de venger César. Les sources sont unanimes sur ce point40 et c’est la première raison évoquée dans l’edictum rapporté par Appien41. Donc, la proscription allait d’abord toucher les assassins et leurs complices. Mais pas uniquement. Par trois fois l’edictum fait allusion au fait que Lépide et Antoine aient été déclarés hostes publici42. Ce rappel prouve combien les deux hommes avaient été marqués par cette procédure. L’étude prosopographique menée par Fr. Hinard43 démontre que les coupables et les complices de l’assassinat de César furent touchés par la procédure, mais également ceux qui se trouvaient dans la "mouvance cicéronienne” et qui constituaient le parti sénatorial.
19Il y avait donc une co-responsabilité des trois triumvirs dans la rédaction de l’edictum, bien que la propagande augustéenne ait voulu atténuer le rôle d’Octavien44.
20Les triumvirs auraient pu se contenter, pour éliminer leurs adversaires, de les déclarer hostes publici. Mais, utiliser cette procédure, revenait à reconnaître l’existence d’une rivalité de partis et de clans45. Les triumvirs qui exerçaient un pouvoir comparable à celui du dictateur et qui entendaient reconstituer l’unité du peuple romain telle qu’elle avait été réalisée par César, voulaient mettre en place une procédure extraordinaire pour éliminer leurs adversaires politiques. La procédure employée ressemblait à celle de Sylla. Elle fut mise en place juste après la ratification de la lex Titia de Triumuiris rei publicae constituendae46. Toutefois, les exécutions avaient commencé avant l’entrée des triumvirs à Rome, puisque selon Appien47, ils avaient décidé de faire exécuter douze ou dix-sept de leurs adversaires parmi lesquels se trouvait Cicéron. La proscription proprement dite commença la nuit qui suivit le vote de la lex Titia et les tabulae furent installées dans différents quartiers de la ville48.
3.2. La proscription de Paullus, le frère de Lépide
21C’est sur la première liste que fut inscrit le nom de L. Paullus, le frère plus âgé de Lépide. Les Romains, pour qui la famille était le fondement de l’État, considéraient que les conflits qui existaient entre membres d’une même famille étaient les plus atroces qui soient. Parmi ces conflits, les discordes entre frères étaient considérées comme un des crimes les plus odieux49 et les sources anciennes ont insisté sur le caractère particulièrement monstrueux de la proscription qui permettait la vengeance fratricide et qui rappelait le meurtre de Rémus par Romulus. Ainsi, Florus50 : “Qui pouvait assez se lamenter sur le caractère indigne d’une situation en vertu de laquelle Antoine avait proscrit son oncle Lucius César, Lépide son frère Lucius Paullus”. Appien51 a donné les motifs de la proscription de L. Paullus : “Lépide était le premier dans la nomenclature des triumvirs, et son frère Paullus Lepidus était le premier dans la liste des proscrits... leur crime (celui de Paullus et de Lucius César) était d’avoir été les premiers à déclarer l’un son frère, l’autre son neveu, ennemis de la patrie”. Donc, pour Appien, il s’agissait bien d’une vengeance de Lépide à l’égard de L. Paullus. Toutefois deux autres traditions ont rapporté des faits différents. Pour Plutarque52 : “On permit à Lépide de faire proscrire son frère Paullus, mais certains auteurs disent que Lépide concéda Paullus aux autres qui demandaient sa mort”. Antoine pouvait aussi avoir des griefs contre Paullus. En 44, il avait accepté du Sénat une mission en compagnie de Q. Minucius Thermus et de C. Fannius auprès de Sextus Pompée pour lui demander son aide contre Antoine53. Suétone54, enfin, laisse à penser que le proscripteur fut Octavien. Ce dernier aurait échappé à un attentat fomenté par un esclave de Paullus, le fils : “qui lui gardait rancune d’avoir proscrit Paullus, le père de son maître, et qui jugeait que l’heure de sa vengeance était venue”. Ceci étant, on ne voit pas quels pouvaient être les motifs de rancune du jeune Octavien. En revanche, il semble bien que Lépide ait eu de sérieuses raisons d’en vouloir à Paullus55. Leurs chemins politiques étaient divergents depuis les années 50-40. Tandis que Lépide avait choisi le camp de César qu’il lit nommer dictateur lorsqu’il était préteur, Paullus avait hésité sans aller pour autant dans le camp de Pompée56. Il avait reçu de César les moyens financicrs pour réparer la Basilica Aemilia et avait refusé de se rapprocher de Pompée qui avait combattu son père et fait exécuter son frère aîné. Au moment de la guerre de Modène, Paullus choisit le parti sénatorial et en avril 43. il affirmait en parlant de Lépide : “Qu’il exerçait sa haine contre ses plus proches parents”57. Enfin il avait voté au Sénat la déclaration d’hostis publicus contre Lépide58. Toutefois, grâce à la complicité de centurions59, Paullus put quitter Rome et rejoindre M. Brutus. Après la mort de Brutus, il resta à Milet bien qu’il eût été invité à rentrer à Rome après les accord de Misène60.
3.3. La proscription de Lépide
22L’étude prosopographique menée par Fr. Hinard montre combien il est difficile de savoir de façon précise qui a été proscrit par Lépide. Toutefois deux cas méritent attention. Le premier concerne Q. Lucretius Vespillo61, le “mari” de Turia, le second L. Saenius Balbinus62.
3.3.1. Lépide et la Laudatio Turiae
23La proscription dura jusqu’à la paix de Misène en 39. Entre 43 et 39 les triumvirs avaient le pouvoir de rajouter des noms comme celui d’en radier63. Les radiations ont surtout été individuelles et ont pu poser en pratique des difficultés. C’est le cas bien connu de la laudatio funebris dite de Turia. Il s’agit d’un edictum de restitutio qui avait été pris par Octavien pendant son absence de Rome dont Lépide aurait refusé de reconnaître la validité.
“Cependant j’avouerai que je t’ai dû la plus douloureuse amertume de ma vie. Quand cessant d’être un citoyen inutile, je me suis rendu a la patrie par la bienfaisante intervention de César Auguste alors absent de Rome, tu t’adressas à son collègue Marcus Lepidus qui y était présent pour lui parler de mon rétablissement ; tu te jetas à terre à ses pieds ; non seulement tu ne fus pas relevée, mais tu fus traînée et enlevée comme une esclave, le corps plein de contusions, avec la dernière énergie tu informas Lépide de l’édit de César en le suppliant d’assurer mon rétablissement ; tu entendis même des mots d’insulte ; tu reçus de cruelles blessures et tu les fis voir pour que l’on connût le responsable de mes malheurs. Son attitude ne tarda pas a lui nuire”64.
24L’épithaphe a été rédigée sous le règne d’Auguste entre 8 et 2 a.C.65. A. M. Gowing a bien montré que les laudationes étaient souvent mensongères et que le laudateur amplifiait les qualités de la personne louée66. Dans cette laudatio, les arrières-pensées politiques sont continuellement présentes, parce que le laudateur était redevable envers Auguste, et il utilisa la laudatio pour le lui faire savoir67. I1 a rappelé la période de ht proscription pour faire ressortir la clementia d’Octavien qu’il oppose à la crudelitas de Lépide. I1 insiste longuement sur la manière brutale dont Lépide s’est comporté envers Turia (onze lignes sur cent quatre-vingts). Or, il est impensable que Lépide lui-même, ait traîné, blessé et injurié une matrone comme Turia. Un passage d’Appien peut être mis en parallèle avec l’éloge funèbre. Les triumvirs ayant besoin d’argent pour conduire la guerre contre Cassius et Brutus prirent un décret qui obligeait les femmes les plus riches à faire connaître leur fortune et à participer à l’effort de guerre. Mécontentes de la situation, les matrones romaines choisirent Hortensia, la fille du célèbre orateur, comme leur porte-parole68. Elle vint trouver les nouveaux maîtres de Rome et leur tint un discours virulent dans lequel elle dénonçait les mesures de l’edictum. Appien a rapporté la suite des événements69 : "A ce discours d’Hortensia, les triumvirs frémirent d’indignation par les conséquences que pouvait avoir l’exemple donné par les femmes. Ils donnèrent donc ordre à leurs licteurs d’éloigner ces femmes de la tribune et de les chasser. Mais une grande rumeur s’étant élevée de tous côtés de l’assemblée, les licteurs n’exécutèrent point l’ordre des triumvirs, qui se levèrent ajournant le peuple au lendemain". Donc le passage de la laudatio est certainement mensonger. Au pire ce furent les licteurs de Lépide qui blessèrent Turia et non le triumvir lui-même70. Il faut aussi nuancer la crudelitas de Lépide, crudelitas exploitée par la propagande augustéenne. Or, voici ce que rapporte Suétone71 pour ce qui concerne la conception que se faisait Octavien de la proscription : “Iulius Saturninus rapporte en outre qu’après la clôture des proscriptions, M. Lépide ayant au Sénat tâché d’excuser le passé et donné l’espoir qu’on serait clément à 1 avenir parce qu’on avait suffisamment châtié, Auguste déclara au contraire qu’il avait mis un terme à la proscription mais en gardant toute liberté”. Comme le remarque Fr. Hinard72, Lépide n’avait pas vu tout le parti qu’il y avait à tirer de l’état de terreur ainsi créé, tandis qu’Octavien souhaitait conserver ce moyen qui annihilait ses adversaires politiques.
25Reste le problème juridique qui concerne la compétence des triumvirs. Il s’agit d’une radiation obtenue d’Octavien qui avait rédigé un édit (edictum Caesaris). Cet edictum avait été pris lorsqu’il était absent de Rome. Or, Lépide ne veut pas en reconnaître la validité. Peut-être comme le suggère F. Hinard73, parce qu’il était à l’origine de la proscription, ce que laisse entendre le texte, ou bien parce que les adjudicataires des biens avaient fait pression sur lui pour maintenir la proscription. Toutefois nous ne savons pas de quelle façon fut résolu ce conflit de compétences.
3.3.2. La proscription de L. Saenius Balbinus
26La proscription de ce personnage, consul suffect pour les deux derniers mois de 30, est attestée par Appien74. Le fils de Lépide, Marcus, avait fomenté un complot contre Octavien en 30. Iunia, sa mère, accusée de complicité dans cette conjuration, devait apporter sa caution. “Personne ne s’offrant pour ce cautionnement. Lépide assiégea plusieurs fois, mais sans succès, la porte du consul Balbinus... les accusateurs de mon épouse et de mon fi1s rendent un hommage éclatant à mon innocence, puisqu’ils ne m’accusent pas moi-même comme leur complice. Ce n’était pas moi, non plus, qui avais fait inscrire votre nom sur les tables de proscription, moi qui dans ce moment suis au dessous de ceux qui furent proscrits”. E. Wistrand75 a montré les liens qui existaient entre L. Saenius Balbinus et les Aemilii auxquels il devait vraisemblablement sa carrière. C’est certainement pour cette raison que Lépide lui a rappelé le fait qu’il n’était pas à l’origine de sa proscription. Il se peut que Saenius ait été porté sur les listes par Antoine sans qu’on puisse déterminer quelle raison l’avait déterminé à le faire76.
27Pour la mise en place de la proscription, il existait bien une co-responsabilité des trois triumvirs. Lépide, ayant été déclaré hostis publicus par le parti sénatorial, était au même titre que ses deux collègues, responsable de la proscription. En revanche, il est extrêment difficile de connaître ses victimes. Les sources anciennes ont longuement insisté sur sa crudelitas parce qu’il avait proscrit son frère Paullus. Mais nous ne connaissons pas. à deux exceptions étudiées, les personnes qu’il avait fait porter sur les listes.
3.4. Le second triomphe de Lépide
28Au cours du mois de décembre 43, on célébra deux triomphes, celui de Lépide et de L. Munatius Plancus. Le souvenir en a été conservé par les Fasti Triumphali Barberiniani77 :
M. Aemilius Lepidus iterum ex Hispania
prid. K. lan.[tr]iumphavit, palmam de[dit]
29Appien78 rapporte : “Au milieu de ces événements (les proscriptions). Lépide reçut les honneurs du triomphe au sujet de ses succès en Ibérie. La proclamation qui lut publiée à cette occasion était ainsi conçue : ‘sous le bon plaisir des dieux, on fait savoir a tout le monde, hommes et femmes, de célébrer la présente journée par des sacrifices et par des festins. Quiconque sera convaincu de désobéissance sera inscrit sur les tables de proscription’. Lépide parcourut ainsi les temples en triomphe, accompagné de tous les citoyens qui le suivaient avec une gravité extérieure mais avec l’indignation dans l’âme”. Velleius Paterculus présente une tradition différente79 : “Aussi, parmi les brocards des soldats qui avaient suivi le char triomphal de Lépide et de Plancus au milieu des malédictions des citoyens on entendit citer ces vers : ‘c’est de Germains, non de Gaulois que triomphent les deux consuls’”.
30Il était habituel, dans le triomphe romain, que les soldats qui accompagnaient leur général, fassent des plaisanteries douteuses. Le triomphe de César était, à ce propos, resté célèbre80. Velleius Paterculus, en parlant de “Germains” fait évidemmment allusion à la proscription de Paullus81. Peut-être faut-il y voir une marque de la propagande augustéenne. Il est évident qu’en cette fin de l’année 43, les Romains étaient sous le coup et le choc de la proscription et que les fêtes liées aux deux triomphes n’étaient qu’une maigre compensation. Enfin, on peut s’interroger sur la nature de ces “succès en Ibérie”. La plupart des historiens admettent que Lépide célébra un triomphe pour avoir conclu la paix avec Sextus Pompée au cours de l’été 44, ce qui lui avait déjà valu le vote d’une supplicatio de la part du Sénat. Mais, comme le remarque J.-M. Roddaz82, cela paraît bien étrange à la fin de 43, en période de proscription et de rupture avec le Sénal, au moment où Sextus Pompée est proscrit et est l’un des principaux ennemis des triumvirs. Comme pour l’année 47, ne pourrait-on pas plutôt supposer que Lépide ait accompli quelque mission de pacification au cours du printemps et de l’été 44 ?
Notes de bas de page
1 Syme 1967, 503, n. 3.
2 Bringmann 1988, 22-38 ; Wallmann 1989 ; Bleicken 1990 ; les contributions de Laffi 37-65, de Martino 67-83 et Gabba 127-134 dans Scritti in onore di Levi 1993.
3 Pour les oublis ; peu de choses ont été écrites sur le consulat de Lépide en 42, sur son rôle pendant la guerre de Pérouse ou sur son gouvernement d’Afrique qui a quand même duré quatre ans, de 40 à 36 a.C. Pour les déformations : la plupart des historiens font porter la responsabilité de la proscription de 43 sur Antoine et Lépide et atténuent celle d’Octavien. Il en est de même chez les historiens contemporains qui occultent bien souvent Lépide. A titre d’exemple voir Bleicken 1990, 12 et 15-16, n. 32.
4 I1 ne faut pas oublier non plus que Bologne était dans la clientèle des Antonii. Ce fut la seule ville qu’Octavien dispensa de prêter le serment de fidélité en son nom en 32, parce qu’elle “était dans la clientèle des Antonii depuis fort longtemps”. Voir Suet., Aug.. 17.3.
5 App., BC., 4.2 : “Octave et Antoine, cessant d’être ennemis, se rendirent pour traiter ensemble dans une île petite et unie au milieu du fleuve Lavinius dans les environs de Modène”.
6 D.C. 46.55.1 : “Et ils s’entretinrent, non pas seuls, mais avec un nombre identique de soldats, sur un îlot du fleuve qui coule devant Bologne, de façon que personne d’autre ne vînt prêter renfort à aucun d’eux”.
7 Plut., Cic., 46.2.4 : “Pendant trois jours, ils restèrent réunis secrètement entre eux seuls près de la ville de Bononia. Les entrevues avaient lieu en avant des camps dans un endroit entouré d’une rivière”.
8 Suet. Aug., 96.1 : “Lorsque les troupes des triumvirs étaient rassemblées à Bologne”.
9 Grattarola 1990,205, n. 290.
10 App., BC., 4.2.
11 En effet, nous n’avons par ailleurs aucun renseignement de la part de l’abréviateur de Tite-Live, de Velleius Paterculus, d’Auguste dans les Res Gestae. Si Suétone, Plutarque et Florus font allusion au second Triumvirat, ils n’en précisent pas la nature juridique.
12 App., BC., 4.2.
13 D.C. 46.55.3.
14 App., BC., 4.2.
15 D.C. 46.55.3-5.
16 D.C. 47.1.1 : “Ayant donc conclu et prêté serment, ils firent route vers Rome, avec l’apparence de devoir gouverner tous à égalité...”.
17 App., BC., 4.2 : “Qu’il serait nommé un nouveau Triumvirat entre Lépide, Antoine et Octavien”.
18 Degrassi 1947, 273-274 : (M. A)EMILIUS, M. ANTONIUS (erased), lmp CAESAR III r(ei) p(ublicae) c(onstituendae) ex a(nte) d(iem) VK. dec. ad. pr(idie) K. lan, sex(tas).
19 D.C. 46.56.1 : “Ils convinrent en outre d’exécuter leurs ennemis, de donner à Lépide, désigné consul à la place de Decimus, la garde de Rome et de l’Italie, et de faire eux-mêmes campagne contre Brutus et Cassius”.
20 App., BC., 4. 2-3.
21 Roddaz 2003, 189, n. 9.
22 Weigel 1992, 70-71.
23 App., BC., 4.7.
24 Fasti Colotiani, CIL, I2. p. 64. Ce plébiscite fut voté immédiatement après la rogatio, sans que soit observé le trinundinum d’usage. Voir de Martino 1993, 69.
25 D.C. 47.1.
26 D.C. 47.1. Toujours selon Dion Cassius, le prodige au symbole le plus significatif concernait Octavien. Juste après l’accord de Bologne, un aigle vola au dessus de sa tête et tua deux corbeaux qui s’étaient abattus sur lui.
27 Nous reprenons les conclusions de Hinard 1985a, 17-66.
28 Hinard 1985a ; voir également Syme 1967, 182-194 ; Bengston 1972, 3-38 ; Canfora 1980,425-437.
29 Hinard 1985a, 260 : “Lépide, Antoine et Octave n’étaient pas des vainqueurs de guerre tenant la totalité de l’empire entre leurs mains et leurs adversaires n’étaient pas des survivants de combats acharnés, déterminés à poursuivre une lutte sans merci”.
30 D.C. 47.8.5.
31 Syme 1967, 189 ; Bengston 1972, 13 ; Canfora 1980,426-430.
32 Flor., 2.16.
33 App„ BC., 4.5 et 4.31.
34 Hinard 1985a, 313-315.
35 App., BC., 4.31 : “Il en résulta que les triumvirs, qui avaient espéré que le produit de ces ventes suffirait pour les besoins de la guerre, qu’il leur manquait vingt millions de drachmes attiques”.
36 Hinard 1985a, 313.
37 Cic. Phil., 13.22.8 : “Que le châtiment d’un scélérat ait vengé la cendre et les restes d’un homme illustre et que la volonté des dieux se soit manifestée avant le déroulement complet d’une année, soit en affligeant déjà soit en brandissant un supplice pour le parricide”.
38 Vell. 2.65.
39 Martin 1992, 396, n. 10.
40 Flor., 2.16 : “César... par le fait que son père n’était pas vengé et les menées de Cassius et de Brutus étaient une insulte pour ses mânes”.
41 App., BC., 4.8 : “Marcus Lepidus, Marcus Antonius, Octauius César... proclament ce qui suit : Si les méchants, par une suite de la déloyauté qui leur est naturelle, ne s’efforçaient point d’exciter la commisération en leur faveur, lorsqu’ils en ont besoin, et si, devenant d’abord les ennemis de leurs bienfaiteurs, ils ne finissaient point, lorsqu’ils ont été sauvés par eux, par conspirer contre leur personne, Caius César n’aurait point été assassiné par ceux auxquels il eut la générosité de conserver la vie. après les avoir faits prisonniers de guerre, et par ceux qu’il combla de dignités, d’honneurs et de largesses, après les avoir mis au rang de ses amis les plus distingués ; et nous-mêmes, nous ne serions point forcés de sévir ainsi avec tant de vigueur contre la multitude de ceux, qui, non contents de nous abreuver d’outrages, nous ont encore déclarés ennemis de la patrie”.
42 App., BC., 4.8, déjà cité. App., BC., 4.9 : “Il fallait se hâter d’exterminer ceux qui ont été les premiers à nous déclarer la guerre, lorsqu’ils ont déclaré dans leurs décrets que nous étions, nous et les armées qui servaient sous nos ordres, ennemis de la patrie”. App., BC., 4.10 : “Il est également nécessaire de donner quelque satisfaction à l’armée, qui a été offensée, exaspérée par tous les genres d’outrages et qui a été proclamée ennemie de la patrie par ceux-là mêmes qui étaient les vrais ennemis de la République”.
43 Hinard 1985a. Se référer au catalogue des proscrits de 43,415 à 552.
44 Flor., 2.16 : “La mort y était affreuse, horrible, pitoyable pour ceux qui fuyaient partout l’univers... Ces crimes étaient inscrits sur les tablettes d’Antoine et de Lépide. César se contenta d’y mettre les noms des assassins de son père”. Vell. 2.66 : “Malgré l’opposition de César qui fut vaine, car il était seul contre deux, recommença le mal dont Sylla avait donné l’exemple, la proscription”. Canfora 1980, 432-433 avance que l’édit est plutôt l’œuvre d’Antoine, ce qui est très discutable et surtout invérifiable.
45 Hinard 1985a, 318.
46 App., BC., 4.7.
47 App., BC., 4.7.
48 App., BC., 4.7.
49 Voir Jal 1962b, 393-417. L’auteur insiste longuement sur le fait que la guerre civile a brise l’union et l’affection normales qui existaient entre parents.
50 Flor., 2.16. Mais aussi Vell. 2.67.3 : ne quid ulli sanctum relinquerentur, uelunt in dotem inuitamentumque sceleris Antonius L. Caesarem auunculum, Lepidus, Paulum fratem proscripserant. Ou encore Orose. 5.18.11 : “Là, Antoine avait fait inscrire son ennemi Tullius Cicéron, là son oncle maternel. L. César et cela du vivant de sa mère, ce qui aggrave encore le crime ; là Lépide avait jeté dans le troupeau des proscrits son propre frère L. Paullus”. D.C. 47.6.3 : “Et de fait, Antoine avait été combattu par son oncle Lucius César, et Lépide par son frère, Lucius Paullus”.
51 App., BC., 4.9.
52 Plut., Ant., 19.3.
53 Cic., Phil., 13.13.
54 Suet., Aug., 16.8.
55 Voir Shackleton Bailey 1960, 260 ; Bruhns 1978,40-41 ; Weigel 1979b, 637-646.
56 Suet., Caes., 29.2 : Plut., Pomp., 58.1.2 : Plut., Caes., 29.3 : App., BC., 4.26. Voir Hayne 1972b 148-155.
57 Cic.. Brut., 2.2.
58 App., BC., 4.7.
59 App., BC., 4.37 ; D.C. 47.6.3.
60 App., BC., 4.37.
61 Hinard 1983a, 491-492.
62 Hinard 1985a, 513-514.
63 Hinard 1985a, 247.
64 Éloge funèbre d’une matrone romaine, 2.11-18. Traduction M. Durry.
65 Sur la Laudatio Turiae une abondante bibliographie a été donnée par Gowing 1992b, 284, n. 3.
66 Gowing 1992b, 293.
67 Id., ibid., 296.
68 Granados de Arena 1986, 93-107.
69 App., BC., 4.34.
70 Il faut toutefois rappeler que recourir aux licteurs pour blesser corporellement quelqu’un répugnait aux Romains. De plus, un certain nombre d’interdictions concernait ces derniers qui ne pouvaient toucher les mains des vestales et des matronae. Voir Marshall 1984. 120-141.
71 Suet., Aug., 27.3.
72 Hinard 1985a, 310.
73 Hinard 1985a, 249.
74 App., BC., 4.50.
75 Wistrand 1958, 43-45.
76 Hinard 1985a, 513 ; Glauning 1936, 14.
77 Degrassi 1947, 343.
78 App., BC., 4.31.
79 Veli. 2.67.3-4.
80 Suet., Caes., 49.4-5.
81 Warren 1970,49-66, en particulier p. 65 note 100.
82 Roddaz 1988a, 329, n. 85.
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