Chapitre VII. Vers la formation du second Triumvirat
Avril 43-novembre 43
p. 105-120
Texte intégral
1Après la victoire de Modène, le Sénat demanda à Lépide, à Munatius Plancus et à Asinius Pollimi de combattre Antoine1. Ce dernier rétablit rapidement sa situation grâce aux renforts conduits par Ventidius Bassus qui avait recruté trois légions dans les colonies militaires césariennes et dans sa région d’origine. Il avait rejoint Antoine le 3 mai à Vada Sabatia sur la cote ligure. Dès lors, le vaincu de Modène disposait de troupes supérieures à celles de Decimus Brutus qui le poursuivait. Antoine espérait donc passer en Transalpine rejoindre Lépide.
2La réunion des forces de Lépide et d’Antoine s’est accompagnée d’une succession de péripéties et de rebondissements qui nous sont connus grâce à la correspondance échangée entre les différents chefs d’armée pendant ces quelques semaines, et qui ont fait dire aux historiens que Lépide jouait un double jeu.
1. Le double jeu de lépide ou la “chronique d’une trahison annoncée”
3Le 18 mai 432, Lépide écrivait à Cicéron à la fin de sa lettre : “En ce qui concerne cette guerre, je ne ferai défaut ni au Sénat, ni à la République”. Onze jours plus tard, le 29 mai, les troupes d’Antoine faisaient leur jonction avec celles de Lépide, et le 30 mai 433 ce dernier adressait un courrier au Sénat pour expliquer les raisons de ce changement d’attitude. Pendant ces quelques jours une correspondance importante fut échangée entre Cicéron, Munatius Plancus, Asinius Pollion, Lépide et Decimus Brutus. C’est l’analyse de ces lettres qui a fait dire à bon nombre d’historiens que Lépide, L. Munatius Plancus, C. Asinius Pollion avaient pratiqué un double jeu, avaient trahi la République au profit d’Antoine4. La réalité est beaucoup plus complexe. La lecture première de ces missives laisse croire à la duplicité de Lépide. Ce “double jeu” s’explique plus par l’incertitude de la situation politique et militaire du moment que par son caractère indécis5, uentosissimus. Certes, Lépide comme gouverneur avait des comptes à rendre au Sénat, mais c’était un Césarien qui avait été partisan au lendemain des Ides de mars de venger sans attendre le meurtre du dictateur. Il avait choisi la cause d’Antoine, très tôt, pendant l’hiver 44-43. Il devait être prudent, c’est-à-dire se méfier non seulement du Sénat où s’était reconstitué un bastion pompéien6, mais également des autres gouverneurs des provinces occidentales. Officiellement Asinius Pollion et surtout Munatius Plancus soutenaient la cause sénatoriale et Decimus Brutus avait pour mission de poursuivre Antoine. Afficher trop rapidement ses opinions aurait été une erreur tactique, d’où la nécessité de se proclamer officiellement républicain et, officieusement, agir différemment.
4Il faut rappeler que Lépide était un homme bien renseigné. Par deux fois Asinius Pollion s’était plaint d’avoir eu ses courriers retenus par Lépide7 et Lépide écrivait lui-même qu’il avait des agents à Rome8 qui le tenaient au courant de la situation. Les autres gouverneurs agissaient d’ailleurs de la même manière. Nous savons par exemple que Decimus Brutus disait avoir entre les mains les papiers d’Antoine9. Lépide échangeait donc avec tous les protagonistes du moment une correspondance importante, ses courriers avec Antoine, Octave, Munatius Plancus, Decimus Brutus et Cicéron étant attestés par les sources10. Mais la lecture de toutes ces lettres doit être extrêmement critique parce que beaucoup de formules employées étaient destinées à maintenir l’équivoque et à dissimuler les tractations.
1.1. La correspondance entre Plancus et Cicéron
5Chronologiquement, il faut d’abord s’intéresser à la correspondance échangée entre Munatius Plancus et Cicéron11. Plancus avait reçu l’ordre de combattre Antoine. Pour ce faire, il devait descendre vers le Sud de la Gaule, c’est-à-dire traverser la province dirigée par Lépide. Il fallait d’abord qu’il entre en négociations avec ce dernier pour joindre leurs troupes et vaincre ensemble Antoine. En cette fin du mois d’avril, Munatius Plancus se disait toujours favorable à la cause républicaine. Ses lettres furent écrites à son avantage, il restait soucieux de sa carrière et de son avenir et n’était pas avare de compliments et de remerciements envers Cicéron. Dans une lettre datée de la fin avril 4312, il fit savoir à Cicéron qu’il avait franchi le Rhône et que de Vienne il avait envoyé mille cavaliers. Ce fut également à ce moment qu’il commença à négocier avec Lépide. Il semblait incertain des intentions de ce dernier dans la province duquel il venait de pénétrer13. Puis au début du mois de mai, Munatius Plancus écrivit à Cicéron pour lui annoncer qu’il était entré en négociations avec son collègue14. Auparavant il lui adressait ses remerciements habituels et affirmait son dévouement à la République. Il donnait des renseignements selon lesquels il avait fait passer le Rhône à ses troupes et avait envoyé son frère en avant avec trois mille cavaliers. Il se dirigeait lui-même sur Modène lorsqu’il apprit la victoire sur Antoine. Puis il en vint à Lépide. Tout en essayant de lui faire partager le parti de la Libertas, il restait très méfiant à son égard et à l’égard de son armée qui semblait prête à fraterniser avec celle d’Antoine15. Les négociations se lirent par l’intermédiaire de leurs lieutenants respectifs, Munatius Plancus était représenté par son frère C. Munatius et par Furnius, Lépide par M. Iuuentius Laterensis. L’envoi de ce personnage, républicain sincère16, répondait à un choix tactique. Il permettait encore à Lépide de laisser croire à Plancus et au Sénat, à la sincérité de ses sentiments républicains.
6Cicéron répondit à cette lettre le 5 mai 4317 en le remerçiant d’avoir envoyé des secours et “j’espère aussi que Lépide, réveillé enfin par nos malheurs, fera cause commune avec vous et avec la patrie. Tournez de ce côté-là tous vos soins, mon cher Plancus...”. Le 11 mai18, Plancus reprit contact avec Cicéron pour lui faire connaître le résultat de sa médiation avec Lépide. Si l’on croit le gouverneur de la Gallia Comata, ces négotiations furent positives puisque Lépide lui donna l’assurance qu’il résisterait à Antoine. Pour la seconde fois, Munatius Plancus fit allusion à Laterensis. Ce lieutenant de Lépide qui œuvrait pour la Libertas, joua un rôle de premier ordre dans toutes ces rencontres. Mais l’enthousiasme de Munatius Plancus retomba très rapidement, puisque deux jours plus tard, c’est-à-dire le 14 mail19, dans un nouveau courrier adressé à Cicéron, il n’était plus du tout sûr de Lépide. Alors qu’il avait établi son pont sur l’Isère et s’apprêtait à marcher vers le Sud, Lépide lui fit savoir de ne pas venir. Enfin, dans un long paragraphe Munatius Plancus avertit Cicéron des difficultés que connaissait Lépide au sein de son armée20.
7Cette lettre mérite quelques observations. Sa datation a d’abord fait l’objet de controverses. L’historien allemand Groebe21 croyait qu’elle avait été écrite le 29 mai à cause de la référence faite à la mutinerie. Mais W. Sternkopf suivi sur ce point par H. Botermann ont bien montré qu’il fallait la dater du 13 ou du 14 mai en prenant en compte les renseignements fournis par Munatius Plancus. L’attitude de Lépide doit être aussi analysée. Il tenait à éloigner Plancus et à rencontrer Antoine seul. Or, Antoine avait fait sa jonction avec les trois légions de Bassus Ventidius le 3 mai à Vada Sabatia un peu à l’ouest de Savone. Cette jonction représentait pour le consul de 44 un grand succès tactique. Ainsi renforcée, l’armée pouvait gagner la Transalpine en suivant la côte. Appien22 écrit : “dans cet intervalle Antoine passe les Alpes après avoir mis dans ses intérêts Culleo à qui Lépide avait donné la garde de ses montagnes”. Or, ici encore, comme pour l’épisode de la cohorte de Iunius Silanus, il semblerait que. Lépide de nouveau, ait fait preuve de complicité passive, puisque Culleo23 laissa passer l’armée d’Antoine, bien que Lépide lui ait donné l’ordre de surveiller les Alpes. Le futur triumvir, naturellement au courant de la progression d’Antoine, voulait gagner du temps et revenait donc sur ses propos du 12 mai pour pouvoir négocier avec Antoine. Reste les relations de Lépide avec son armée24. Dans cette période troublée, l’armée et plus précisément les vétérans de César répugnaient à se battre entre eux. Ils constituèrent donc un trait d’union entre tous les chefs d’armée du moment. Si nous suivons Munatius Plancus, une partie de l’armée de Lépide était prête à se mutiner et surtout refusait de faire la guerre contre Antoine. Les deux principaux agitateurs, P. Canidius Crassus et Rufrenus, étaient deux anciens Césariens également partisans d’Antoine25. L’armée de Lépide était formée en grande partie de Césariens et présentait une grande homogénéité. Ces deux officiers ont dû sans grande difficulté alimenté la sympathie des soldats à l’égard d’Antoine. Enfin, il ne semble pas que Lépide ait pris des mesures coercitives contre ses légions ; au contraire il a dû subir jusqu’à la lin mai la pression de ces dernières.
8De nouveau un échange épistolaire s’établit entre Munatius Plancus et Cicéron entre le 18 mai et le 25 mai. Dans sa lettre26 datée du matin du 18 mai, Plancus décida de reprendre sa marche vers le Sud et quitta les bords de l’Isère. Lépide lui aurait demandé de le rejoindre. Cette lettre présente une difficulté. Pourquoi Lépide voulait-t-il faire venir son collègue alors que quelques jours plus tôt il essayait de l’éloigner ? Il semble que la seule réponse plausible soit que Lépide cherchait encore à sauver les apparences devant le Sénat en laissant penser qu’il restait fidèle à sa parole27. Enfin, entre le 18 et le 25 mai28 Plancus fournit les renseignements suivants : “Antoine est arrivé le 15 mai devant Fréjus, avec ses premières troupes. Ventidius est à deux jours de marche de lui. Lépide a son camp devant Forum Voconii, localité distante de Fréjus de 24 milles, et a décidé de m’attendre à cet endroit, comme il me l’a lui-même écrit. Si Lépide et la fortune me réservent une entière liberté de manœuvre, je vous promets de terminer l’affaire à souhait rapidement... 3 Cependant Lépide a fait ce que je désirais, en m’envoyant Apella29 comme garant de sa loyauté et de son alliance dans l’action politique”. On admet que cette lettre a été écrite pendant que Plancus descendait vers le sud de la Gaule. Donc, à en croire Plancus, les négociations commencées fin avril avec Lépide avaient abouti et vers le 25 mai Lépide rejoindrait le camp républicain.
1.2. La correspondance entre Lépide et Cicéron
9Pour la même période, Lépide écrivit deux fois à Cicéron, la première fois le 18 mai, la seconde fois le 22 mai. La première lettre semble être une réponse à une missive qui n’a pas été conservée30. Lépide donne à Cicéron des informations des opérations militaires en cours en fournissant des renseignements sur sa position géographique et sur celle d’Antoine. Il ne s’agit que de renseignements généraux, connus par ailleurs par Cicéron grâce à Plancus. Lépide rapporte que, apprenant l’arrivée d’Antoine dans sa province, il a quitté le camp qu’il occupait ab confluente Rhodani. Ce lieu de départ a été discuté. I1 y a toutefois de fortes présomptions pour qu’il s’agisse de la confluence du Rhône et de la Durance (Druentia) près d’Avignon (Avennio)31. Le lieu d’arrivée est également incertain. Lépide avait installé son camp dans un espace situé entre Aquae Sextiae (Aix) et Forum Iulii (Fréjus), près d’une rivière, l’Argens. Forum Vocontium est à mettre en relation avec Forum Voconii dont parle Plancus32 et correspondrait au lieu-dit les Biais.
10Après avoir donné quelques informations sur l’état de l’armée d’Antoine, il critiqua les actions de ses deux lieutenants Silanus et Culleo. Le premier était celui qui commandait la cohorte prétorienne à Modène et le second l’officier qui laissa entrer l’armée d’Antoine en Narbonnaise. Cette allusion avait pour but de rassurer Cicéron. En revanche. Lépide ne dit mot des troubles qui existaient au sein de son armée33. Bien au contraire, il insista sur le fait que c’étaient les soldats d’Antoine qui venaient chez lui. Lépide tenait à montrer au Sénat qu’il maîtrisait ses légions. Enfin, il termina sa lettre en rappelant d’une manière sobre et sans emphase son attachement au Sénat et à la République. Quatre jours plus tard il reprenait la plume34 pour réaffirmer ses sentiments républicains. Cette fois-ci, il désirait rassurer Cicéron sur les faux bruits qui couraient sur sa personne et sur ses intentions à l’égard d’Antoine. Le ton est conventionnel, il rappelait l’amitié qui le liait à Cicéron et les grands services qu’ils s’étaient rendus mutuellement. Pourtant, cette lettre montre l’inquiétude du futur triumvir. Bien renseigné à Rome par ses agents, il savait que des bruits couraient selon lesquels il était prêt à se rapprocher d’Antoine. Or, Lépide avait encore besoin de temps, d’où sa volonté de rassurer Cicéron. Ici encore les circonstances semblent dicter ses actes. Or, comme le laisse entendre Appien35, Lépide avait tout à fait raison de se méfier du Sénat puisque : “Il (Octave) s’exprima plus ouvertement dans sa correspondance avec Lépide et Asinius sur les outrages dont il était lui-même l’objet de la part du Sénat, et sur le rapide et subit accroissement de puissance des conjurés. Il s’efforça de lui faire craindre que, par une suite de la faveur que le Sénat accordait au parti de Pompée, chacun des amis de César ne fut particulièrement traité comme l’était Antoine... il leur donna comme conseil, d’avoir l’air de demeurer soumis aux ordres du Sénat ; mais de se concerter en même temps dans l’intérêt de leur sécurité réciproque pendant qu’ils en avaient le pouvoir”.
11Le conseil donné par Octave à Lépide était suivi par ce dernier depuis le mois d’avril. Habilement Lépide laissait croire à Plancus, à Cicéron, au Sénat, son attachement pour la cause sénatoriale. Mais parallèlement, il permettait à Silanus de rejoindre Antoine, à Culleo de laisser passer l’armée d’Antoine.
12A Rome, vers la fin du mois de mai, Cicéron ne savait que croire des intentions de Lépide. Le 29 mai36, il écrivait à Munatius Plancus : “Toutes les nouvelles provenant de ton secteur sont si incertaines, que je ne vois pas quoi t’écrire ; tantôt, en effet, on annonce ce que nous souhaitons concernant Lépide, tantôt le contraire”. Les inquiétudes de Cicéron étaient fondées puisque le même jour Lépide faisait sa jonction avec Antoine.
2. L’union de Lépide et d’Antoine
13L’alliance entre Lépide et Antoine s’est réalisée en deux temps. Dans un premier temps, les deux hommes ont négocié, puis dans un second, l’armée de Lépide est intervenue et a fait accélérer le cours des événements.
2.1. Les négociations
14La rencontre entre les deux hommes a été largement commentée par les sources. Le 6 juin, Plancus, de Cularo (Grenoble), prévint Cicéron que : “Lépide s’est joint à Marc-Antoine le 29 mai37”. La tradition a elle aussi largement commenté l’événement. On peut en reprenant les différentes sources attester les faits suivants38 : le 15 mai, Antoine était à Forum Iulii, le 29 mai, les deux armées firent leur jonction et le 30 mai Lépide écrivit au Sénat. Entre le 15 et le 29 mai, Antoine quitta Forum Iulii pour se rapprocher de Forum Voconii et Antoine et Lépide entamèrent des négociations. De quelles négociations s’agit-il ?
15Si Lépide accepta bien de recevoir Antoine, il n’avait nullement l’intention de se soumettre à ce dernier. Il avait envie de partager avec Antoine, selon l’expression heureuse de Cicéron39 les instrumenta regni. Antoine était en Transalpine en position de demandeur. Sa situation militaire n’était guère brillante. Aux batailles de Forum Gallorum et de Modène, il avait perdu la IIe et la XXXVe légions40, il ne possédait plus que la Ve légion intacte et de plus, un grand nombre d’hommes étaient désarmés. Toutefois, il faut ajouter les trois légions de Ventidius et une excellente cavalerie. Mais c’était une armée fatiguée et extrêmement affaiblie qui arriva dans le Sud de la Gaule. Sur la traversée des Alpes Plutarque écrit41 : “Dans sa fuite Antoine éprouva beaucoup de difficultés, dont la principale fut, la famine... On dévora même, dit-on, l’écorce des arbres, et l’on goûta à des animaux dont personne n’avait tâté auparavant”. En revanche, Lépide pouvait offrir à Antoine sept légions fraîches qui n’avaient pas encore combattu. Par ailleurs, Lépide était en relation avec Plancus avec lequel il pouvait peut-être négocier un retournement de situation. Enfin, il était en contact avec Octave. Antoine avait donc absolument besoin de Lépide et le langage qu’il lui tint n’était pas celui d’un homme arrogant. Appien42 insiste sur les liens anciens qui unissaient les deux hommes et sur les services qu’Antoine avait rendus à Lépide. L’amitié entre les deux hommes datait de l’époque césarienne, et aux Ides de mars Lépide avait mis sa légion au service d’Antoine tandis que ce dernier l’avait élire quelques jours plus tard Grand Pontife. Leur amitié s’était scellée par la future union de leurs enfants. Mais était-ce suffisant ? Certainement pas. Lépide connaissait bien Antoine ; après le 15 mars, Antoine, fort de l’armée de Lépide, avait renoncé à venger la mort de César, mesure qui certes avait évité la guerre civile mais qui, jusqu’au mois de juin lui avait pratiquement donné les pleins pouvoirs à Rome. A la demande probable d’Antoine, Lépide avait quitté Rome pour négocier avec Sextus Pompée. En l’envoyant en Espagne, Antoine se débarrassait d’un éventuel concurrent. De son côté Lépide n’était pas dans une situation aisée. Il savait par ses agents et par Octave que le parti pompéien et républicain avait redressé la tête au sein du Sénat, et en Orient, Brutus en Grèce et en Macédoine, Cassius en Syrie, reconstituaient une armée importante composée d’éléments pompéiens. Une alliance entre les deux hommes était la meilleure solution, mais pour Lépide elle n’était pas sans risques. Antoine était hostis publicus. Lépide risquait de le devenir à son tour. Et surtout, les deux hommes avaient besoin d’autres renforts, en particulier il leur fallait les légions de Munatius Plancus et d’Asinius Pollion. Enfin, il fallait aussi tenir compte d’Octave. Dion Cassius43 rapporte la chose suivante en parlant des négociations entre Lépide et Antoine : “Quand il (Lépide) apprit l’accord d’Antoine avec Octave, il se mit d’accord avec eux”. C’est la seule source qui fait état d’une première négociation entre Antoine et Octave. Il semble plutôt que les négociations entre les trois hommes commençèrent après le 29 mai comme le suggère Appien44. Il ne fait aucun doute qu’Octave fut au cœur de la discussion, d’autant plus qu’il était en relation avec Lépide et Asinius Pollion. Mais de son côté, à la fin du printemps. Octave, resté en Italie et fort de huit légions était surtout préoccupé par sa situation personnelle, il espérait briguer un des deux postes du consulat laissés vacants par la mort d’Hirtius et de Pansa45.
16Toutefois, ces négociations furent bientôt remises en question par les soldats de Lépide qui entrèrent en contact avec l’armée d’Antoine.
2.2. Le rôle de l’armée
17Appien, Plutarque et Velleius Paterculus ont rapporté de manière détaillée et avec des traditions différentes le rôle des soldats des deux armées qui poussa Lépide à s’unir à Antoine46. Déjà par deux fois, Munatius Plancus avait fait allusion à certains troubles au sein de l’armée de Lépide. Mais c’est surtout, l’intéressé lui-même. Lépide, qui y fait référence dans sa lettre du 30 mai47, adressée au Sénat où il justifia son action et demanda l’union à Rome. Cette lettre a été l’objet de nombreuses controverses48. Certains auteurs49 accordent foi à Lépide et admettent que ce dernier n’avait aucune chance de faire valoir ses droits face aux exigences de ses soldats. Il existait un sentiment d’unité au sein des armées de César et les légions de Lépide ne pouvaient pas se battre contre celles d’Antoine. Pour d’autres historiens50, les excuses de Lépide sont inacceptables, et sont considérées comme un acte lâche doublé d’une excuse fictive que personne ne crut.
18Que faut-il en penser ?
19La lettre 10.35 de Lépide est une lettre dans laquelle il demande l’union à Rome. Lépide appelle à témoin les hommes et les dieux en proclamant qu’il est resté fidèle au Sénat jusqu’au bout et qu’il a été complètement surpris par la mutinerie qui a eu lieu dans son camp. Son armée dont la vocation traditionnelle est de défendre la vie des citoyens romains l’aurait forcé à prendre en compte les intérêts des partisans d’Antoine. Il demande au Sénat de ne pas considérer comme un crime ce qui a été un acte de misericordia de sa part et de la part de son armée.
20Toutes les sources sont d’accord sur un point, l’armée de Lépide connaissait des troubles. Dans la lettre 10.34, Lépide ne fait pas allusion à ceux-ci, mais s’il a menti par omission, c’est pour faire croire à Cicéron et au Sénat, qu’il maîtrisait la situation. Il semble bien, comme l’écrivait Plancus que des agents d’Antoine, comme l’officier Canidius, aient travaillé au sein de l’armée de Lépide en faveur d’Antoine. Cette armée était composée principalement d’éléments césariens qui connaissaient Antoine et qui n’étaient pas prêts à se battre contre ce dernier. Le désir de paix manifesté par les soldats de Lépide était l’expression d’une morale particulière inculquée par César au moment de Pharsale51. César exprimait souvent son regret de voir se déclarer la guerre civile en affirmant qu’il n’était nullement responsable de la situation. La lettre de Lépide prouve qu’il partageait l’opinion de César puisqu’il affirme qu’il faut faire preuve de miséricorde à l’égard des citoyens romains. Toutefois cette notion de misericordia n’a pas le même sens chez Lépide que chez César. César se situait en quelque sorte au dessus des partis et il désirait préserver l’intérêt de tous les dues romani. Chez Lépide, le sens est plus restreint, la misericordia exercitus serait plutôt le sentiment d’unité, de solidarité qui existent chez tous les Césariens.
21Pour ce qui concerne la soumission de Lépide, les récits d’Appien, de Plutarque et de Velleius Paterculus sont unanimes pour dire que Lépide a cédé à la volonté de ses soldats et qu’il n’a rien fait pour réprimer cette rébellion. R. Syrne rapporte qu’un tel événement était déjà intervenu à Rome52. Pendant la guerre civile qui opposa Pompée et César, il y eut en Albanie sur les rives de 1’Apsus une tentative de fraternisation entre les deux armées. Le général césarien Vatinius essaya son éloquence sur les soldats de Pompée, mais en vain, parce que le pompéien Labienus intervint et fit cesser tout trouble. Apparemment rien de tel en ce qui concerne Lépide. Toutefois, H. Bengtson53 a montré que Lépide se trouvait dans une impasse. S’il ne cédait pas à ses soldats, il avait de fortes chances d’être tué. Il pouvait aussi choisir comme Laterensis, le fidèle républicain, le suicide. Mais Lépide préféra céder d’autant plus qu’il avait intérêt à se rapprocher d’Antoine. Néanmoins cette affaire pouvait se révéler fâcheuse et risquait à l’avenir de l’affaiblir vis-à-vis d’Antoine54.
22L’alliance entre les deux hommes a été commémorée par une série de monnaies qui peuvent être datées entre juin 43 et le début de l’année 4255 (fig. I). Le choix des symboles retenus fait ressortir la stricte égalité qui semble exister entre eux. Ils sont tous les deux co(n)s(ul) et imp(erator) et ils rappellent sur le plan religieux uniquement les attributs sacerdotaux de leur charge sans la nommer : le lituus pour Antoine et le simpulum et l’aspergillum pour Lépide.
23Puis, il fallait assumer les conséquences de cette alliance, à savoir la déclaration d’hostis publicus sénatoriale.
2.3. Lépide hostis publicus
24La nouvelle de la défection de Lépide fut connue à Rome au plus tôt le 7 juin. La veille. Cicéron écrivait encore à D. Brutus56 : “Lépide est dans des dispositions favorables”. La réaction du Sénat fut unanime ; il fut comme Antoine déclaré hostis publicus57. Voici ce que le vieux consulaire écrivait à Cassius58 : “Lépide ton propre parent (tuus affinis). Lépide mon ami intime, (meus familiaris), a été déclaré ennemi public (hostis) par le Sénat, à l’unanimité, le 30 juin, ainsi que tous ceux qui ont trahi la République en même temps que lui ; on leur a cependant donné la possibilité de revenir à la raison avant le 1er septembre pour rentrer dans le devoir”. Le fait est aussi rappelé par Dion Cassius, Appien et Velleius Paterculus. Dion Cassius59, de manière succincte, sans donner de date, fait savoir que le Sénat “fit ôter sa statue érigée sur les Rostres et le déclara ennemi. Il fixa également un délai à ses compagnons d’armes, les menaçant d’une guerre s’ils ne l’abandonnaient pas avant”. Appien60 ne rapporte pas l’événement, mais, en revanche, fait état du sénatus-consulte qui révoquait les mesures prises contre Lépide et Antoine : “Il (le Sénat) céda à l’empire de la nécessité ; il révoqua les sénatus-consulte qui déclaraient Antoine, Lépide et l’armée qui était sous leurs ordres, ennemis de la patrie”. Quant à Velleius Paterculus61 : “Lépide fut ensuite déclaré ennemi public par le Sénat, comme auparavant l’avait été Antoine”.
25Les conséquences d’une telle décision étaient graves pour l’intéressé. En effet, les Romains distinguaient la guerre extérieure (bellum externum) de la guerre civile (bellum ciuile). La notion d’hostis, ennemi public s’appliquait uniquement en cas de guerre civile au chef du parti adverse, à ses partisans, à ses soldats. César et son armée furent l’objet d’une telle mesure62, comme Antoine après Modène63. L’insistance avec laquelle fin 43, les triumvirs rappelèrent à trois reprises, dans leur décret sur la proscription, le fait que leurs adversaires les avaient déclarés hostis publicus64 montre la gravité exceptionnelle de cette mesure aux yeux des Romains. F. Jal dans son étude consacrée à cette notion, a bien montré que Cicéron voulait exclure l’ennemi de la communauté romaine. Il employa de manière ambiguë le terme hostis en l’assimilant souvent à un vrai ennemi étranger.
26La famille de l’hostis était aussi concernée par la mesure, puisque les biens de l’intéressé étaient confisqués. Elle connaissait, sur le plan moral, le déshonneur. C’est pour cette raison que Seruilia, la belle-mère de Lépide et Iunia son épouse intervinrent auprès de Cicéron pour que soient épargnés les enfants de Lépide. Cicéron dans une lettre adressée à Brutus65, lui apprend que la guerre civile recommence à cause de la “trahison et de la démence” de Lépide, et à la fin en vient à ses enfants : “Ainsi, quand on nous demande d’accorder à ses enfants le bénéfice de la pitié, on ne nous fournit aucun moyen d’éviter les pires supplices, au cas où leur père viendrait à l’emporter puisse Jupiter écarter ce présage. 2. Certes il ne m’échappe pas combien il est douloureux que les crimes des parents soient payés par la punition des enfants ; mais les lois ont admirablement voulu que l’amour des enfants accrût l’attachement des parents à la République. Aussi est-ce Lépide qui se montre cruel pour ses enfants et non pas celui qui déclare Lépide ennemi public”.
27Une amitié politique et philosophique existait entre Cicéron et Brutus. Leurs liens s’étaient resserrés après les Ides de mars et depuis le mois d’avril 43, ils s’adressaient des courriers réguliers. A son tour Brutus écrivit à Cicéron le Ier juillet66. Dans cette lettre, il ne semblait pas être au courant du ralliement de Lépide et ne croyait pas à cette alliance. Puis, il en vint aux enfants de Lépide et demanda qu’ils soient épargnés67. Il y avait chez Brutus assurément des accents de sincérité. Mais sa conduite, à l’égard des enfants de sa sœur était certainement dictée par Seruilia avec laquelle il correspondait. Cette femme avait encore beaucoup d’influence sur son fils, surtout en matière politique68. Elle a dû intervenir auprès de son fils pour que celui-ci à son tour agisse auprès de Cicéron. On peut y voir également des raisons philosophiques : M. Brutus, disciple de l’Académie restait un fervent défenseur de la clementia, ce que Cicéron lui reprochera d’ailleurs. Sur ce sujet, dans un premier temps Cicéron, à la mi-juillet lui répondit de la manière suivante69 : “(Après avoir rappelé à Brutus sa clémence naturelle à traiter les vaincus) Ce qu’il semble avoir de cruel, c’est que le châtiment s’étende aux enfants, qui ne l’ont nullement mérité ; mais cette pratique est ancienne et commune à toutes les cités, puisque les enfants de Thémistocle ont été dans le besoin”. Mais, finalement le 27 juillet70 ; “Pour les enfants de ta sœur, Brutus, je n’ai pas attendu que tu m’écrives ;...j’ai plaidé la cause des enfants au Sénat, dans les termes dont tu as pu être informé, je pense, par les lettres de ta mère”.
28Les courriers échangés entre Brutus et Cicéron pose la délicate question de la condition des enfants de condamnés pour raisons politiques, proscrits71 et hostes publici. Ces liberi étaient associés au sort de leurs parents, et il semble qu’ici Cicéron se fasse l’écho d’une tradition qui accepte que les enfants soient aussi responsables des actes de leurs parents dans le cadre de la solidarité familiale. Cependant E. Gabba72 a affirmé que la condition de ces enfants était contraire aux normes de fonctionnement de la société du ier siècle a.C. Il appuyait sa réflexion sur un passage de Denys d’Halicarnasse73 qui raconte le procès de Sp. Cassius en 485 et qui évoque la décision du Sénat d’épargner ses enfants.
29La correspondance de Cicéron au cours des mois de juin et de juillet 43 faisait régulièrement allusion à Lépide. Il le tenait responsable de la nouvelle situation politique et de l’imminence de la guerre civile. Il savait que Lépide et Antoine reconstituaient leurs forces et cherchaient de nouveaux alliés. Conscient de la gravité de la situation pour le parti sénatorial, il fait appel dès juin aux forces de Decimus Brutus et de Munatius Plancus pour l’Occident et à celles de Brutus et de Cassius pour l’Orient. Dans les différents courriers adressés à Cassius74 et à Brutus75 entre juin et juillet 43, Cicéron emploie toujours les mêmes termes à l’égard de Lépide : légèreté, inconstance, trahison et crime.
30Un tel acharnement de Cicéron envers Lépide peut s’expliquer de deux façons. Pour des raisons politiques, d’abord. Cicéron avait bien compris que Lépide et Antoine allaient essayer de constituer un “camp occidental” et que la cause républicaine et sénatoriale était compromise. Bien qu’ayant été toujours plus ou moins sceptique sur le compte de Lépide. Cicéron s’était finalement trompé sur la situation et les équilibres politiques. En juillet, il écrivait à M. Brutus76 : “Mais, dans le cas de Lépide, on nous critique, car. après lui avoir décerné une statue aux Rostres, nous l’avons ensuite abattue ; c’est que nous nous sommes efforcés de le détourner de son égarement en l’honorant : la folie de cet homme, léger entre tous, a eu raison de notre sagesse”. La seconde raison est d’ordre philosophique. La philosophie a joué un rôle essentiel dans les engagements politiques de la fin de la carrière de Cicéron77. Au mois d’octobre 44, il rédigea le De Officiis où il défendit une conception stoïcienne des devoirs de l’homme envers lui-même et l’État. Après avoir défini les principes de la morale individuelle, Cicéron classa les hommes en boni et en improbi. Son jugement sur Antoine et Lépide se fit en relation de ces principes. Les boni, parmi lesquels M. Brutus, ont le courage sur le plan moral qui leur permet de rechercher le chemin de l’honneur, de la moralité, de la justice aussi bien dans la famille que dans l’État78. Les improbi, en revanche, sont opportunistes, recherchent les avantages et la gloire personnels au détriment des intérêts de l’État79. Ils ont détruit la République et commis le parricidium patriae80. Dans l’esprit de Cicéron, Lépide répond à la définition de l’improbus. Enfin, et c’est un point important qui eut des conséquences sur la carrière de Cicéron, il refusa la clementia. La clémence et la douceur sont louables, mais pour la chose publique on doit avoir recours à la sévérité sans laquelle on ne peut administrer un État81.
3. Vers la formation du second triumvirat
31A la fin du printemps 43, en Occident, Lépide et Antoine devaient reconstituer leurs forces. Fin mai 43 Lépide commandait sept légions, Antoine quatre. Il fallait qu’ils réussissent à convaincre les deux autres gouverneurs de l’Occident, Munatius Plancus et Asinius Pollion.
32Si l’on croit Plancus, dès le 29 Mai82, jour de la jonction des forces de Lépide avec celles d’Antoine, “ils levèrent le camp le même jour pour s’approcher de moi ; l’information me parvint quand ils étaient à 20 000 pas”. Plancus eut le temps de se replier et de remonter à Cularo (Grenoble). Son but était de faire jonction avec Decimus Brutus. Celle-ci eut lieu à Cularo le 10 juin et les deux proconsuls envoyèrent au Sénat un communiqué relativement optimiste sur leurs chances de battre les armées d’Antoine et de Lépide83. Mais la dernière lettre de Munatius Plancus adressée à Cicéron, datée du 28 juillet84 s’avérait inquiétante pour le camp républicain, parce que si les forces armées des deux gouverneurs étaient nombreuses, cette armée était en fait peu solide ; Plancus se plaignait aussi de ne pas recevoir de secours d’Octave.
33Durant cette même période, les négociations reprirent avec Asinius Pollion. Ce dernier avait adressé le 8 juin une lettre à Cicéron85. Il expliquait qu’il avait trois légions fidèles, mais l’une, la XXVIIIe avait été sollicitée par les promesses d’Antoine qui offrait à chaque soldat cinq cents deniers et “Lépide, de son côté, ne m’a pas moins pressé, par des messages de lui et d’Antoine, de lui envoyer la XXe légion”. Il fallut attendre finalement le mois d’août pour qu’Asinius Pollion choisisse le camp de Lépide et d’Antoine86 et vienne les rejoindre sans doute par la uia Domitia et la nia Aurelia. Il amenait avec lui trois légions.
34Après avoir beaucoup hésité, Munatius Plancus abandonna à son tour Decimus Brutus et rejoignit au mois d’août Antoine et Lépide87. Il arrivait avec cinq légions, de la cavalerie et des auxiliaires. Ces deux retournements en faveur d’Antoine et de Lépide s’expliquent par des changements de la conjoncture politique. Munatius Plancus et Asinius Pollion étaient certainement au courant des négociations et des tractations qui existaient depuis le printemps et l’été entre Lépide, Antoine et Octave. Il comprirent, lorsqu’Octave accéda au consulat que leur intérêt était de soutenir Lépide et Antoine.
35Abandonné, Decimus Brutus espérait gagner l’Illyrie puis rejoindre M. Brutus en Macédoine. Il ne pouvait seul risquer une bataille contre Lépide et Antoine. Mais il fut poursuivi par ces derniers et ses soldats l’abandonnèrent. Il fut capturé par une tribu gauloise et exécuté sur les ordres d’Antoine au mois de septembre 4388.
36Parallèlement à ces événements. Octave au début de l’été brigua le consulat89. Or, le Sénat à l’annonce de l’union de Lépide et de d’Antoine, craignit qu’Octave ne se rapproche de ces derniers90. Il lui donna le commandement de la guerre contre Antoine et Lépide qu’il l’accepta91. Mais le Sénat lui refusa le consulat en prétextant qu’il n’avait pas l’âge requis. Il lui consentit seulement les ornements du consulat et le droit de discuter avec les consulaires92. C’était bien insuffisant pour ce jeune homme ambitieux qui, comme Sylla, décida de marcher sur Rome avec huit légions. Son entreprise réussit et le 19 août, il fut élu consul par les Comices avec Q. Pedius comme collègue. Il prit immédiatement deux mesures : la première concernait les tyrannicides. Un tribunal extraordinaire était créé dans le but de juger les meurtriers de César. Tous ceux, qui de près ou de loin, avaient participé à l’assassinat devaient être punis par l’exil et dépouillés de leurs biens. Il fit également ratifier son adoption par les Comices curiates93. Dominant ainsi la situation à Rome, il pouvait marcher contre Lépide et Antoine. C’était du moins ce qu’il laissa croire au Sénat.
37Au début de l’automne 43, la situation au plan militaire se résumait ainsi : en Occident Antoine et Lépide disposaient de vingt légions plus trois en réserve qui se décomposaient de la façon suivante : Antoine commandait huit légions, Lépide sept, Plancus trois (plus une en réserve), Pollion deux (plus une en réserve)94. Il fallait aussi tenir compte des troupes auxiliaires et des forces de cavalerie. Lorsque Lépide et Antoine pénétrèrent en Italie du Nord, ils avaient sous leurs ordres dix-sept légions95. Les troupes les plus inexpérimentées étaient restées en Gaule et en Espagne96. A Rome, Octavien avait à sa disposition onze légions97. Pour l’Orient, M. Brutus et Cassius pouvaient compter sur vingt légions98. Il ne fallait pas oublier les forces navales de Sextus Pompée stationnées en Sicile99.
38Au début du mois d’octobre Lépide et Antoine pénétrèrent en Italie, prêts à négocier avec Octavien. Cette rencontre était préparée depuis le printemps. Les sources sont unanimes : Lépide joua un rôle de premier plan, en servant d’intermédiaire entre Antoine et Octavien, ce qui permit la réconciliation entre les deux hommes100. Celle-ci se lit secrètement au cours de l’été, probablement en juillet, avant qu’Octavien ne marche sur Rome. On peut s’interroger sur les raisons d’un tel retournement de situation. Octavien voulait à tout prix venger la mort de César, mais ses forces étaient insuffisantes pour vaincre Brutus et Cassius. De plus, le Sénat lui était foncièrement hostile. C’est donc naturellement vers les fidèles Césariens qu’il se tourna. Lépide, après les Ides de mars, s’était présenté comme le vengeur de César, ce qui ne pouvait que plaire à l’héritier de César. Pour preuve de sa bonne volonté, après son départ de Rome, il avait fait révoquer par Q. Pedius, les sénatus-consultes qui faisaient d’Antoine et de Lépide des hostes publici101. De leur côté, Lépide et Antoine ne pouvaient rester indéfiniment en Transalpine ou en Italie du Nord. Il leur fallait donc agir. Dans tous les cas de figure la guerre civile était inévitable et la meilleure solution restait un rapprochement avec Octavien. Des négociations, des tractations elles-mêmes peu de choses nous sont parvenues mais on peut imaginer qu’elles ont dû être difficiles. C’est ce que laisse penser un passage de Velleius Paterculus102. Si l’on croit cet auteur, Antoine était toujours réticent pour venger César. Or, Octavien était intransigeant sur cette question. On peut supposer que Lépide, qui avait été favorable à la vengance de César essaya de faire infléchir Antoine sur ce point.
39Donc, les trois hommes, avec Lépide comme intermédiaire, devaient se rencontrer pour traiter de deux points essentiels, venger César, c’est-à-dire faire la guerre aux tyrannicides, et trouver sur le plan constitutionnel la meilleure façon de gouverner Rome et d’y garantir la paix.
Notes de bas de page
1 App., BC., 3.74 : “On écrivit aussi à Lépide, Plancus et à Asinius Pollion de faire la guerre quand ils seraient à proximité d’Antoine”.
2 Cic., Fam., 10.34. Camp de Pont d’Argens.
3 Cic., Fam., 10.35. Camp de Pont d’Argens.
4 Carcopino, 1947, II. p. 376 : “L’hypocrisie subtile ou brutale de ces traîtres de comédie”, ou p. 394 : “Lépide, Pollion et Plancus se comportent comme des larrons en foire, ils étalent leurs boniments et affichent leur fausseté”.
5 Cic., Fam., 11.9.1. Camp de Reggio, 29 avril 43.
6 App., BC., 3.81.
7 Cic., Fam., 10.31.1. Cordone, le 16 mars 43 : C. Asinius Pollion salue Cicéron : “... Il ne cause pas autant de retard que les guetteurs postés en tous lieux par les deux partis et qui recherchent et retiennent les courriers”. Fini., 10.33.1 écrite de l’Espagne Citérieure en juin 43 à Cicéron : “Lépide a retardé à dessein le moment où je serai informé des combats livrés près de Modèlle, en retenant pendant neuf jours mes courriers”.
8 Cic., Fam., 10.34a. I. Camp de Pont d’Argens, 22 mai 43 à Cicéron. Au sujet des fausses rumeurs qui courent à Rome : "Je sais par mes représentants que tu les as accueillies avec précaution”.
9 Cic., Fam., 11.1, le 6 mai 43 : D. Brutus, Imp. Consul désigné, à Cicéron. Sur la frontière des Statiellenses : “Même du côté de Plancus, il n’a pas encore perdu espoir, comme je l’ai constaté par les papiers qui me sont tombés entre les mains, dans lesquels il indique les noms des émissaires qu’il envoie à Asinius, a Lépide, a Plancus”.
10 Avec Antoine : Cic., Fam., 11.11, le 6 mai 43 ; avec Octave : App., BC., 3.81 : avec D. Brutus : Cic., Fam., 11.23.1, le 25 mai 43.
11 Bardt 1909. 574-593 ; Sternkopf 1910, 250-300 ; Perrochat 1957, 172-183 ; Walser 1957, 25-31 : Bengtson 1974,479-531. Nous nous référons également aux commentaires de Shackleton Bailey 1977.
12 Cic.. Fam., 10.9 : en Transalpine, 26 avril 43 ou peu après. Sur cette lettre : Sternkopf 1910. 252-253 ; Perrochat 1957, 178-179 et Shackleton Bailey 1977, 522-523.
13 Cic., Fam., 10.9 : “Pour ma part, si je ne suis pas gêné par Lépide, je ferai preuve de la rapidité voulue ; si en revanche, il s’oppose à ma progression, j’aviserai suivant les circonstances”.
14 Cic.. Fam. 10.11. Territoire des Allobroges, vers le 1er mai : cf. Sternkopf 1910, 253-255 ; Perrochat 1957, 179 ; Shackleton Bailey 1977, 524-525.
15 Cic., Fam. 10.1 1.2 : “Si Antoine s’aventure ici sans soutien, je pense pouvoir résister facilement, à moi seul, et assurer la défense de la République à votre idée, quand bien même il serait accueilli par l’armée de Lépide. Supposons, en revanche qu’il amène avec lui des forces appréciables, supposons que la Xe légion de vétérans que j’ai réussi à remettre dans le droit chemin avec les autres retourne à sa rage antérieure...”.
16 Münzer 1919 : RE. X,. s.v. lu vendus, col. 1365-1367. Il fut questeur en 62, et préteur en 51 ; MRR. II, p. 353 et p. 175 ; cf. Sternkopf 1910.
17 Cic.. Fam., 10.14. Rome, le 5 mai 43.
18 Cic., Fam., 10.15, en Gaule Transalpine, au sud de l’Isère, le 11 ou (12 mai ?). Cf. Sternkopf 1910, 255-258 ; Perrochat 1957. 179-181.
19 Cic., Fam., 10.21. Camp au bord de l’Isère, vers le 13 mai 43. Cf. Sternkopf 1910, 269-270 ; Perrochat 1957,181.
20 Cic., Fam., 10.21.4 : “Il s’est ajouté un autre fait : un jour où Lépide haranguait ses soldats, ceux-ci déloyaux par eux-mêmes et corrompus de surcroit par leurs chefs, les Canidius, les Rufrenus et tous ceux que vous connaîtrez le moment venu, s’écrièrent en hommes de bien qu’ils voulaient la paix et qu’ils ne se battraient contre aucun parti, après que deux consuls exceptionnels avaient été tués, tant de citoyens perdus au nom de la patrie, tous ces gens déclarés ennemis publics, enfin, et leurs biens confisqués ; et Lépide n’avait ni châtié ni jugulé cette manifestation”.
21 Cité par Botermann 1968, 128.
22 App., BC., 3.83.
23 Peut-être s’agissait-il de Q. Terentius Culleo, tribun de la plèbe en 58 a.C.
24 Mundubeltz 2000a, 362.
25 P. Canidius Crassus devint consul suffect en 40, il était bien connu comme partisan d’Antoine. Voir Botermann 1968, 120. n. 3. Rufrenus. tribun de la plèbe en 42, fut l’auteur d’une loi, la lex Rufrena qui institua des honneurs divins à César. Sur P. Cassidius Crassus, Ferriès 2000,413-430.
26 Cic., Fam., 10.18. Camp au bord de l’Isère.
27 Botermann 1968. 128-129.
28 Cic., Fam., 10.17 ; Plancus à Cicéron, route vers Forum Voconii. Cf. Sternkopf 1910. 264.
29 Ce personnage inconnu par ailleurs devait être un affranchi grec.
30 Cic., Fam., 10.34. Camp de Pont d’Argens, 18 mai 43.
31 Jullian 1920.49, n. I ; Shackleton Bailey 1977, 537.
32 Cic., Fam., 10.17.
33 Botermann 1968, 128, y voit une description mensongère de la situation.
34 Cic., Fam., 10.34a. 1-2. Camp de Pont d’Argens, 22 mai 43 : “... Cependant, j’ai la certitude que, dans cet immense bouleversement si soudain de la République, des rumeurs erronées, propagées par mes détracteurs, t’ont transmis à mon sujet des informations indignes de moi, bien faites pour t’émouvoir au plus haut point, étant donné ton amour pour la République. Je sais par mes représentants que tu les as accueillies avec précaution et que tu n’as pas jugé leur devoir une confiance aveugle ; je t’en suis reconnaissant, comme il se doit... 2... Si tu as bien présentes à l’esprit ma vie, ma vigilance, ma loyauté dans mon activité politique passée, qui sont dignes de Lépide, attends-toi, dans l’avenir, à des actes de valeur égale ou d’autant plus grande et fais-toi d’autant plus un devoir de me soutenir de ton autorité que je suis davantage redevable pour les services que je te rends. Bonne santé”.
35 App., BC., 3.81.
36 Cic., Fam., 10.20.
37 Cic., Fam., 10.23. Cularo, 6 juin 43.
38 Eutrope. 7.1 : “Antoine en fuite, privé de son armée, se réfugie auprès de Lépide, qui avait été le maître de la cavalerie de César et qui avait alors des troupes considérables. Il fut recueilli par celui-ci”. Vell. 2.63 : “Pendant ce temps, Antoine ayant dans sa fuite traversé les Alpes, échoua d’abord dans une négociation avec Lépide”. Plut., Ant., 18.2 : “Il (Antoine) alla donc camper auprès de lui. et voyant qu’on ne lui faisait aucune avance amicale, il résolut de tout risquer”. Le récit d’Appien est le plus détaillé : “Il (Antoine) se rendit près du fleuve où Lépide était campé. Il ne s’entoura ni de circonvallations, ni de retranchements, il se regarda comme campé auprès d’un ami. Ils s’envoyèrent de fréquents messages l’un à l’autre. Antoine rappelait à Lépide l’ancienne amitié qui les unissait, et les divers services qu’il s’était fait un plaisir de lui rendre”.
39 Cic., Brut., 1.15.4.
40 Brunt 1971.481-482.
41 Plut., Ant., 17.3 ; 17.6.
42 App., BC., 3.83.
43 D.C. 46.51.2.
44 App., BC., 3.86.
45 Syme 1967, 177-178.
46 App., BC., 3.83 : “... Mais les soldats de Lépide, impressionnés par le prestige d’Antoine et voyant bien les échanges en cours, sensibles aussi à la simplicité de son campement, commençèrent à entrer avec ceux d’Antoine en secret, puis ouvertement, puisqu’il s’agissait de concitoyens et de compagnons d’armes ; ils passèrent outre aux interdictions de leurs officiers, et, pour faciliter le contact, établirent un pont de bateaux sur la rivière. Et la légion désignée comme la dixième, qui avait naguère été conduite par Antoine, prépara pour celui-ci une place à l’intérieur”. Plut., Ant., 18.3-6 présente une version différente : “(voyant que Lépide ne lui faisait aucune avance, Antoine décida d’aller à sa rencontre). Il avait la chevelure négligée et une barbe épaisse, qu’il avait laissé pousser aussitôt après sa défaite ; prenant un vêtement sombre, il s’approcha du retranchement de Lépide et se mit à parler. Comme beaucoup de soldats étaient apitoyés par son aspect et gagnés par ses discours, Lépide, pris de peur, fit sonner toutes les trompettes ensemble pour empêcher Antoine d’être entendu. Cela ne fit qu’accroître la pitié des soldats, qui conférèrent secrètement avec lui, en lui envoyant Laelius et Clodius déguisés en courtisanes, pour l’engager à attaquer hardiment le retranchement, car beaucoup étaient prêts à le recevoir et même, s’il le voulait, à tuer Lépide. Antoine ne permit pas de toucher à Lépide, mais il tenta le lendemain de passer le fleuve avec son armée. Il entra le premier dans l’eau et s’avança vers la rive opposée, où il voyait de nombreux soldats de Lépide lui tendre les mains et arracher les palissades. Il pénétra dans le camp, et tout passa sous ses ordres. Il traita Lépide avec beaucoup de douceur : en le saluant, il lui donna le nom de père, et, tout en gardant de fait, l’autorité entière, il lui laissa le titre et les honneurs de commandant en chef’. Vell. 2.63 présente une version plus sobre : “Mais bientôt, il (Antoine) se montra fréquemment à tous les soldats et comme tous les généraux étaient supérieurs à Lépide et Antoine à beaucoup d’entre eux : les soldats abattirent le uallum dans la partie arrière pour le recevoir. Il céda le titre de général à Lépide mais il eut en main tous les pouvoirs”.
47 Cic., Fam., 10.35.1-2. Camp de Pont d’Argens, après avoir rappelé ses sentiments républicains : “1. … Si la Fortune ne m’avait ôté de force mon pouvoir de décision personnel ; de fait, l’armée en totalité, attachée à sa tradition de sauvegarder la vie des citoyens et la paix générale, s’est soulevée et m’a contraint, à dire vrai, à prendre en charge le salut et le maintien dans leurs droits de toute cette foule de citoyens romains. 2. Dans une telle situation, Pères conscrits, je vous supplie instamment de laisser de côté les offenses privées, de n’avoir égard qu’à l’intérêt suprême de l’Etat et de ne pas faire un crime du mouvement de pitié qui nous a animés, moi et mon armée, dans ce conflit entre citoyens. Si vous tenez compte du salut et de la dignité de tous, vous servirez mieux votre propre cause et celle de la République”.
48 Voir surtout : Botermann 1968, 127-129 ; Bengtson 1974, 527-530.
49 Botermann 1968, 127, n. 3. Sur les mutineries en général : Mundubeltz 2000a, 358-365.
50 Botermann 1968, 127, n. 4.
51 Botermann 1968, 129, n. 3.
52 Caes., Chi., 3.19.
53 Bengtson 1974, 527-528.
54 C’est ce que conclut App.. B., 3.84 : “De la sorte, Antoine remonté au faîte de sa puissance, constituait une menace terrible pour ses adversaires : il disposait en effet d’une armée, celle qu’il avait retirée de Modène, assortie d’une superbe cavalerie, trois légions l’avaient rejoint en route (celles de Ventidius), et Lépide devenait son allié avec ses sept légions d’infanterie lourde, une foule d’auxiliaires et un matériel considérable. Et si Lépide était encore nominalement à leur tête, c’est Antoine qui dirigeait absolument tout”.
55 RRC, 498-499, no 489 ; Sear 1998, 81, no 119.
56 Cic., Fam., 1 1.24.
57 Voir Jal 1963a, 53 ; Baumann 1973, 132-139.
58 Cic., Fam., 12.10.1.
59 D.C. 46.51.4. Ce fait est aussi confirmé par Cicéron (Brut., 1.15.9) à la mi-juillet, lorsqu’il écrit à Brutus : “Je suis blâmé au sujet de Lépide, à qui j’ai fait élever près de la tribune une statue que j’ai fait ensuite renverser”.
60 App., BC., 3.96.
61 Vell. 2.64.4.
62 App., BC., 2.33.
63 D.C. 46.39.3.
64 App., BC., 4.8.2 ; 4.9.8 ; 4.10.4.
65 Cic., Brut., 1.12. Rome début de juillet 43.
66 Cic., Brut., 1.13.1-2. Camp en Macédoine, 1er juillet 43.
67 Cic., Brut., 1.13 : “Je te prie instamment, Cicéron, au nom des liens qui nous unissent et de ta bienveillance à mon égard, d’oublier que les enfants de ma sœur sont les fils de Lépide et de considérer que j’ai pris auprès d’eux la place de leur père ; ... quelle aide suis-je en mesure d’apporter à ma mère, à ma sœur et à ces enfants, si leur oncle Brutus n’a eu aucune influence auprès de toi et du reste du Sénat, en face de leur père Lépide ?”
68 Boes 1990,236.
69 Cic., Brut., 1.15.11. Rome, peu après le 15 juillet 43.
70 Cic., Brut., 1.18.6. Rome 27 juillet 43.
71 Hinard 1984, 1889-1907.
72 Gabba 1966, 149-152.
73 Dion. H. 8.80 : “Certains tentèrent de faire exécuter aussi les fils de Cassius, mais le Sénat considéra que c’était là une coutume cruelle et nuisible : s’étant réuni, il décida par senatus-consulte que les enfants seraient exempts de la peine, qu’ils pourraient continuer à vivre en toute quiétude, sans avoir à encourir exil, infamie, ni quelque déchéance que ce soit. Et depuis cette époque, la coutume s’est établie à Rome – et a été observée jusqu’à nos jours – d’exempter les enfants de toutes les peines encourues par leur père pour un crime, qu’ils fussent les fils d’un tyran, d’un parricide ou d’un traître”. Toutefois, ce texte est polémique et était dirigé contre les dirigeants syllaniens. Voir Hinard 1985a, 177-186.
74 Cic., Fam.. 12.8.1. Rome, peu après le 9 juin 43 : “Les ‘actes’, dont je sais avec certitude qu’ils te sont envoyés, t’ont fait connaître, je pense, le crime de ton parent Lépide, sa légèreté et sa versatilité extrêmes”. Fam., 12.9.2, Rome, milieu ou lin de juin 43 : “De notre côté, alors que nous pensions la guerre terminée, soudain ton cher Lépide nous a plongés dans la plus profonde inquiétude”. Fam., 12.10.1. Rome vers le 1er juillet 43 : “... Au moment où j’écris ces lignes, la guerre a pris réellement une grande ampleur, à cause de la légèreté criminelle de Lépide”.
75 Cic., Brut., 1.10.2. Rome, mi-juin 43. Après avoir rappelé la situation politique et militaire après Modèlle : “... Et on a donné à Lépide le temps voulu pour nous faire éprouver dans les périls plus graves son inconstance plus d’une fois constatée”. Brut., 1.12.1. Rome au début du mois de juillet : “... Malgré notre victoire, nous sommes contraints de nous battre de nouveau ; c’est la conséquence de la folie criminelle de Lépide”. Brut., 1.14.2. Rome, 14 juillet 43 : “... Car la guerre est rallumée, et une guerre de grande ampleur par la scélératesse de Lépide”. Brut., 1.15.4. Rome, peu après le 15 juillet 43. En parlant de la situation politique après les Ides de mars : “... Mais l’organe de la royauté a été transmis à Lépide et à Antoine, l’un plus inconstant, l’autre plus corrompu, l’un et l’autre craignant la paix, ennemis de la tranquilité”.
76 Cic., Brut., 1.15.9. Rome, peu après le 15 juillet.
77 Boes 1990, 229.
78 Cic., Off., 1.55.
79 Cic., Off., 1.57.
80 Cic., Off., 3.83.
81 Voir Grimal 1986, 418-420.
82 Cic., Fam., 10.23.2. Cularo, 6 juin 43.
83 Cic., Fam., 1 1.13a. Cularo, vers le 10 juin 43.
84 Cic., Fam., 10.24. Camp de Cularo.
85 Cic., Fam., 10.32. Cordoue le 8 juin.
86 Vell. 2.63 : “Quant à Asinius Pollion. ferme dans ses intentions, il resta fidèle au parti de César et adversaire des Pompéiens : tous les deux (Munatius Plancus et Asinius Pollion) livrèrent leurs armées à Antoine”. Liv. Per. 120 : “Comme, en outre Asinius Pollion et Munatius Plancus avaient en se joignant à lui avec leurs armées, augmenté les forces de Marc-Antoine App., BC.. 3.97 : “... Tandis qu’ils échangeaient tous ces messages, Antoine, qui poursuivait Decimus, reçut le ralliement d’Asinius Pollion à la tête de deux légions. Et Asinius négocia une réconciliation avec Plancus qui, avec trois légions passa du côté d’Antoine, de sorte que désormais Antoine commandait une armée tout à fait considérable”.
87 D.C. 46.53.2 ; App.. B.C, 3.97 ; Vell. 2.63 ; Liv. Per. 120.
88 App., BC., 3.97-98 ; D.C. 46.53-54 ; Vell. 2.64.
89 App., BC., 3.88.
90 App., BC., 3.88.
91 D.C. 46.42.1-2.
92 Cic., Farti., 11.20.1.
93 App., BC., 3.94. Il devenait C. Iulius Caesar Octauianus. Comme le remarque Hinard 2003, 331, le personnage se faisait appeler César et les sources anciennes reprennent cette dénomination. C’était pour ce jeune homme de dix-neuf ans le seul point de légitimité sur lequel il pouvait s’appuyer. C’est uniquement par commodité et pour éviter toute confusion, que nous l’appellerons Octavien.
94 App., BC., 3.97.
95 Plut., Ant., 18.2.
96 Soit six légions. Voir Brunt 1971, 484.
97 Brunt 1971, 484.
98 App., BC., 3.96.
99 Sextus Pompée se trouvait à nouveau dans une situation de rebelle depuis qu’il avait été mis, sans preuves réelles, dans le camp des tyrannicides.
100 Liv. Per. 119 : “C’est pourquoi C. César, s’étant, par l’intermédiaire de M. Lépide, réconcilié avec Antoine, vint à Rome avec son armée et, après avoir contraint à rester chez eux, en raison de l’arrivée de cette armée, ceux qui étaient hostiles, lut élu consul alors qu’il avait 19 ans”. Orose 6.18.8 : “Grâce aux bons offices de Lépide, César se réconcilia avec Antoine”. Eutrope 7.1 : “Bientôt par l’entremise de Lépide, César fit la paix avec Antoine”.
101 App., BC., 3.96 : “Tout cela fait. César, qui envisageait de se raccommoder avec Antoine (il savait que désormais vingt légions avaient été rassemblées par Brutus et ses amis, et il avait, pour leur faire face, besoin d’Antoine)... Car Pedius, après le départ de César, s’attachait à convaincre les sénateurs de ne pas envenimer incurablement leurs relations avec Antoine et Lépide et de se réconcilier avec eux... les décrets du Sénat déclarant ennemis Antoine et Lépide, et les troupes sous leurs ordres, furent abrogés, et de nouveaux, qui proposaient la paix furent envoyés”.
102 Vell. 2.65 : “Alors, il y eut entre lui. César et Antoine, un échange de lettres et on commença à parler d’accomodement. Antoine ne cessait de rappeler à César combien le parti pompéien lui était hostile, à quelle puissance il s’était déjà élevé et avec quelle ardeur Cicéron exaltait Brutus et Cassius et il lui déclarait fermement qu’il joindrait ses forces à celles de Brutus et de Cassius qui étaient déjà puissants de dix-sept légions, si César rejetait l’accord qu’il proposait ; il ajoutait que c’était plutôt à César à venger son père qu’à lui-même à venger son ami”. Il faut toutefois être prudent pour ce qui concerne l’objectivité de Velleius Paterculus. Dans ce passage, il semble difficile de croire qu’Antoine puisse composer avec Brutus et Cassius.
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