Réforme et légitimité de la création hymnologique
p. 105-131
Texte intégral
1Toute Réforme, religieuse ou autre, entraîne inévitablement des changements, des publications1 de pamphlets et traités pour préciser les nouvelles orientations et fixer une liturgie différente sans dérouter les fidèles habitués à la tradition et aux usages de l’Église ancienne. Le chant d’Église sera aussi impliqué et influencé par les Réformateurs tels que Martin Luther (1483-1546), Martin Bucer (1491-1551), Jean Calvin (1509-1564)..., soucieux de forger un répertoire en langue vernaculaire accessible à tous.
2Pour Martin Luther, la musique est la servante de la théologie (« ancilla theologiae ») et c’est en ce sens que des créations de textes et de mélodies appropriées au chant fonctionnel, simple, facile à retenir et à comprendre, se produiront. Les difficultés ne manquent certes pas : absence de poètes capables de réaliser immédiatement le nouveau genre de paraphrases strophiques et rimées ; réflexions sur la future esthétique de ce chant collectif. Lors de l’implantation de la Réforme en Allemagne, Alsace, France et Suisse, cette nécessité s’impose d’emblée, se justifie sur les plans poétique, hymnologique, mélodique et spirituel.
3Depuis 15392 à Strasbourg et 15623 à Genève, la pérennité du Psautier huguenot (cf. Appendice I) est incontestable et, à elle seule, justifierait les créations littéraires et mélodiques du XVIe siècle.
I. Situation de la musique cultuelle avant la Réforme
4Après la monodie multiséculaire du chant grégorien et des hymnes latines en plain-chant, puis, dès le IXe siècle, les débuts théoriques de l’écriture à plusieurs voix, les théoriciens ont eu l’idée de superposer deux mélodies4 d’abord en rapport d’octave ou de quinte. Pour les cérémonies officielles, l’Église ancienne bénéficie aussi d’un répertoire polyphonique. Les voix évoluent soit par mouvement parallèle, soit par mouvement contraire. Au XIIIe siècle, dans le cadre de l’Ars antiqua5, à la célèbre École Notre-Dame de Paris, Maître Albert réalise (pour la liturgie) des Organa doubles ; Léonin, des triples, et Pérotin le Grand (Perotinus Magnus), des quadruples. Les motets (ou motetus) polytextuels, parfois bilingues, avec ou sans parenté sémantique, côtoient les conduits, accompagnant le déplacement d’un grand personnage lors d’un office solennel. Au XIV siècle, à l’époque de l’Ars Nova, l’esthétique se complique avec de nombreuses spéculations d’ordre rythmique et symbolique ; à partir du XVe siècle, le mot « motet » désignera la forme religieuse, et « chanson », la forme profane.
5Le répertoire hymnologique latin de l’Église ancienne se maintient à travers les siècles et comprend un choix de Psaumes, antiennes6, hymnes et répons (du latin : responsorium ; de l’ancien français : responsoire), sur des textes bibliques ou patristiques, ou des questions de l’officiant impliquant de brèves réponses du peuple, selon le principe de l’alternance (Alternatimpraxis) reprise par les Luthériens (alternance entre le pasteur et l’assemblée, entre le soliste et le chœur, entre le chœur et les fidèles).
6Au Moyen Âge, et avant les bouleversements de la Réforme, la « Schola » – groupe de garçons recrutés pour la qualité de leurs voix, formés dans des écoles spécialisées, placés autour du lutrin7 et encadrés par des chantres adultes –, interprétait les genres liturgico-musicaux de la monodie ; l’assistance était passive8, les voix de femmes n’étaient pas tolérées.
7En 1525, Lefèvre d’Étaples et son disciple Gérard Roussel quittent Meaux. Dans une lettre que ce dernier adresse de Strasbourg à Nicolas Lesueur (de Meaux), il évoque le déroulement du culte allemand en cinq points essentiels :
Le ministre tourne le visage et non le dos au peuple [il regarde donc l’assistance],
Il lit quelques prières tirées des Écritures...
Ensuite, tout le monde chante un Psaume.
Après la prière, la lecture de l’Écriture, le sermon fini, tout le monde chante le Symbole (des Apôtres).
Pendant qu’a lieu la Communion et que chacun prend part à la Cène, tout le monde chante le Kyrie9.
8Dans une lettre à Guillaume Briçonnet, évêque de Meaux, Gérard Roussel signale que l’on prêche à Strasbourg, à 5 heures et à 7 heures du matin, devant une foule considérable, et que le chant des Psaumes hébraïques en langue vernaculaire constitue un grand événement. Il précise que : « Le chant des femmes se mêlant à celui des hommes produit un effet ravissant »10. Un réfugié anversois, dans une lettre, non signée par prudence, constate que : « Ici [à Strasbourg], tout le monde chante, tous ensemble chantent, tant homme que femme, et chacun a un livre en sa main ». La nouveauté dans la pratique du chant était telle qu’il juge utile de préciser : « hommes et femmes », et que tous suivent sur un recueil.
9Les Réformateurs bénéficieront de l’héritage hymnologique de l’Église ancienne et de la structure de la Messe romaine (Cf. Appendice II) qu’ils adapteront aux idées nouvelles relatives au chant : utilisation de la langue vernaculaire (pour une meilleure compréhension des textes) et participation des fidèles. Ces deux principes incontournables, légitimes et fonctionnels, seront les garants de la pérennité du Psautier (genevois) en français, encore au XXIe siècle, au point d’être depuis près de quatre siècles et demi le signe de ralliement et l’identité musicale des réformés dotés d’un solide pouvoir d’associations d’idées, comme, par exemple, le Psaume 68 (Que Dieu se montre seulement), selon la paraphrase de Théodore de Bèze (version officielle, Genève, 1562)11 :
modifications | |||
1 Que Dieu se monstre seulement | A | ||
2 Et on verra soudainement | B | « Et l’on verra... » | |
3 Abandonner la place. | C | ||
4 Le camp des ennemis espars | A’ | ||
5 Et ses haineux de toutes parts | B’ | « Épouvantés de toutes... | » |
6 Fuir devant sa face. | C’ | « Fuira devant... » |
7 Dieu les fera tous s’enfuir | D | « On verra tout ce camp... » |
8 Ainsi qu’on voit s’esvanouir | D | « Comme l’on voit... » |
9 Un amas de fumée | E | « Une épaisse fumée » |
10 Comme la cire auprès du feu | F | « Comme la cire fond au... » |
11 Ainsi des meschans devant Dieu | G | |
12 La force est consumée | H |
10Voici le texte et sa mélodie, en sa notation moderne, d’après la version de Conrart-La-Bastide (1677-1679) adaptée, en 1938, dans le recueil Louange et Prière (avec peu de modifications, outre l’actualisation de l’orthographe) :
Les musiciens et harmonisateurs de la Réforme sauront tirer parti de cet héritage hymnologique monodique et polyphonique.
II. Nécessité de forger une liturgie et une hymnologie nouvelles
11La nécessité de forger une liturgie et une hymnologie nouvelles s’est imposée d’emblée lors de l’implantation des Réformes luthérienne à Wittenberg ; bucérienne à Strasbourg (alors Ville libre du Saint Empire Romain Germanique), de langue allemande ; et calvinienne à Strasbourg – pour les réfugiés français qui ne comprenaient pas la langue locale – et à Genève.
12Martin Bucer et Jean Calvin, entre autres, préconisent – comme déjà signalé – la participation active de l’assemblée par le chant dans la langue du peuple, intelligible, comprise par tous et en accord avec les préoccupations « dans l’air »13. En 1524, dans son Traité Grund und Ursach der Neuerungen (Cause et raison des innovations), Martin Bucer se prononce ainsi en faveur de la langue allemande (en Alsace) :
Nous n’admettons aucune prière, ni aucun chant qui ne soit tiré des Écritures, et puisque prières et chants doivent contribuer à rendre les gens meilleurs, nous ne tolérons que la langue allemande pour que le laïque en toute connaissance de cause puisse dire « Amen »14.
13En 1536, dans son Institution de la Religion Chrétienne, à propos de la langue, Calvin abonde dans le même sens, en ces termes :
Dont il appert que les oraisons publiques ne se doyvent faire n’en langage grec entre les latins, ne en latin entre François et Anglois (comme la coustume a esté partout cy devant), mais en langage commun du pays qui se puisse entendre de toute l’assemblée...
14En 1542, dans La Forme des prières et chantz ecclesiastiques..., Epistre au lecteur, (Genève), à propos des Prières publiques, il explique qu’
il y a deux espèces [de prières], les unes se font par simple parolle, les autres avecque chant. Et n’est pas chose inventee depuis peu de temps. Car dès la première origine de l’Eglise, cela a esté, comme il appert par les histoires. Et mesmes sainct Paul ne parle pas seulement de prier de bouche, mais aussi de chanter.
15Par ailleurs, il critique les Papistes :
… qui... chantent et brayent de langue estranger [étrangère] et incognue [le latin] en laquelle le plus souvent ils n’entendent pas eux-mêmes une syllabe et ne veulent que les autres y entendent15.
16Il rappelle que :
Sainct PAUL nous montre que nous devons tenir un autre chemin : « Que feray-je donc, dit-il. Je prieray de voix, je prierai d’entendement. Je chanteray de voix, je chanteray d’intelligence ». Auquel passage il use de ce mot d’ESPRIT au lieu que nous [Calvin] avons mis Voix, signifiant le don des langues... »16
17Enfin, en 1543, dans son Epître A tous les Chrestiens et amateurs de la Parole de Dieu (Genève, 10 juin 1543)17, Calvin rappelle encore :
Que les chansons spirituelles ne se peuvent bien chanter que de cœur. Or le cœur requiert l’intelligence. Et en cela (dict sainct Augustin) gist la différence entre le chant des hommes, & celui des oiseaux. Car une linote, un rossignol, un papegay chanteront bien : mais ce sera sans entendre. Or le propre don de l’homme est de chanter en sachant ce qu’il dit.
18Pour la Prédication et le chant, dans l’ensemble, tous les Réformateurs se prononcent unanimement en faveur de la langue vernaculaire, accessible à tous. Cet objectif est réalisé d’emblée en Alsace, en Allemagne, en France et en Suisse. Les paraphraseurs et les mélodistes auront alors à faire face à quatre exigences, d’ordre littéraire, mélodique, esthétique et psychologique. Elles sont à l’origine d’un nouveau répertoire, dont les 150 Psaumes représentent l’essentiel, avec Les Dix Commandements (La Loy) (Strasbourg, depuis 1539)18, le Cantique de Siméon : O laisse Créateur, En paix ton serviteur (Strasbourg, depuis 1539), la Prière devant/avant le repas : O souverain Pasteur et maître (dans la paraphrase de Clément Marot, depuis 1549, Lyon, et 1561, Paris) ; la Prière après le repas : Action de grâces, Pere Eternel qui nous ordonnes N’avoir souci du lendemain (de Clément Marot) ; l’Oraison dominicale :
O notre pere estant la hault es cieux | (Marot, Strasbourg, 1542) |
Pere de nous, qui es là hault es cieulx | (Marot, Genève, 1542…), |
le Symbole des Apôtres, sur les paroles de Jean Calvin19 : Je croy en Dieu le pere tout puissant, créateur du ciel et de la terre… (Strasbourg, depuis 1539, puis de Clément Marot, depuis 1542, à Genève et aussi à Lyon, 1549 et Paris) ; la Salutation angélique (Resjouy toy, vierge Marie/Pleine de grâce abondamment..., de Cl. Marot, Lyon, 1549)20, entre autres...
19La première exigence, d’ordre littéraire, implique la création de paraphrases fonctionnelles (et non traductions) françaises et allemandes, strophiques et rimées, destinées au chant d’assemblée. Aux XVIe et XVIIe siècles, Jean Campensis considère ce nouveau genre comme une « claire et briève interprétation sur les Psaumes de David » et une « claire translation faicte jouxte la sentence non pas jouxte la lettre sur tous les psaumes selon la vérité hébraïque »21.
20En 1633, lors de la Contre-Réforme, Antoine Godeau, dans son Discours de la poësie chrestienne (en tête des Œuvres chrestiennes, p. 24), insiste aussi sur la difficulté du genre en ces termes :
Il faut demeurer d’accord que ce genre d’escrire [la paraphrase] est extrêmement difficile. Celuy qui s’en mesle doit en premier lieu estre tout à fait persuadé de la vérité des choses qu’il entreprend d’expliquer ; il est nécessaire qu’il ayt une exacte connoissance de la Théologie, afin de ne faire pas des hérésies, pensant faire des traductions et des paraphrases22.
21Clément Marot (1496-1544) a réalisé 49 paraphrases et, après sa mort, Théodore de Bèze (1519-1605)23, 101, auxquelles s’ajoutent celles des Dix Commandements, de quelques Prières et Cantiques (déjà mentionnés). Les paraphrases n’ont pas échappé à la polémique contemporaine, comme il ressort du texte intitulé : Sonnette [sic] d’un certain sot envieux, rédigé par Guillaume Guéroult24 :
Qui de Marot ou de Besze les vers
« Voudra choisir » pour les meilleurs eslire (escoutera)
Tout bien compris de long et de travers
Dire pourra en les escoutant lire,
Ceux de Marot « c’est » d’Amphion la lyre (sont)
Ou du Dieu Pan le flageol gracieux,
Mais ceux de Besze, un françois vicieux
Rude, fascheux et contrainct à merveilles.
Donne à Marot le laurier glorieux :
A Besze quoi ? de Midas les aureilles.
Voici la Response de Theodore de Besze à l’asne envieux :
Un certain esprit de travers
Trouve mes vers rudes et verds
Fascheux, et contraints à merveilles,
Donnant le laurier precieux
A Marot doux et gracieux.
A moy de Midas les aureilles.
Asne envieux, j’ay bien appris
De donner à Marot le prix :
Mais quant est des aureilles miennes
Pour les changer qu’est-il besoin
De Cercher un Midas si loin
Ne sais-tu où sont les tiennes ?
22La seconde exigence, d’ordre mélodique, consiste à trouver des adaptateurs et créateurs de mélodies capables de véhiculer les 150 paraphrases, ce qui, dans certains cas, engendrera des problèmes et maladresses entre la prosodie verbale et la prosodie musicale (pour les timbres empruntés). Après le travail des paraphraseurs, ce sera donc au tour des musiciens « mélodistes » de forger des mélodies faciles à chanter et à retenir de préférence par cœur, traitées syllabiquement à raison d’une note par syllabe, ou en cas d’adaptations ultérieures à plusieurs voix, un accord par syllabe, tout en respectant les exigences prosodiques, avec une mélodie (non ornée) et sur des rythmes simples convenant au chant d’assemblée (Cf. IIIe partie).
23La troisième exigence, d’ordre esthétique, implique la recherche d’un style adapté aux vœux des Réformateurs et aux nécessités du chant collectif. Si Martin Luther, dans une pseudo-boutade, avance que « Le diable ne doit pas garder les belles mélodies pour lui », en 1534, Catherine Zell25 affirme que :
Tous ont besoin de chanter pour louer Dieu : l’apprenti à son travail, la servante en lavant la vaisselle, le paysan aux champs, le vigneron à sa vigne, la mère près du berceau de son enfant.
Et, en 1543, dans son Adresse aux Dames de France, Clément Marot abonde dans le même sens26 :
O bienheureux qui voir pourra
Fleurir le temps que l’on ouira
Le laboureur à sa charrue
Le charetier parmi la me
Et l’artisan en sa boutique
Avec un PSEAUME ou un CANTIQUE
De son labeur se soulager
... et la bergère aux bois estans
Faire que rochers et étangs
Après eux chantent la hauteur
Du Saint Nom de leur Créateur.
24De son côté, en 1542, Calvin, dans son Epistre au lecteur27, tout en reconnaissant que :
... le chant a grand force & vigueur d’esmouvoir & enflamber le cœur des hommes, pour invoquer & louer Dieu d’un zèle plus vehement & ardent,
met en garde sur le fait que :
Il y a toujours à regarder, que le chant ne soit pas legier & volage : mais ait pois & maiesté, comme dit sainct Augustin, & ainsi qu’il y ait grande différence entre la musicque qu’on faict pour resiouyr les hommes à table & en leur maison : & entre les psalmes, qui se chantent en l’Eglise, en la presence de Dieu & de ses anges,
et souhaite28 :
... que les aureilles ne soyent plus attentives à l’harmonie du chant, que les esprits au sens spirituel des paroles.
Le mot « harmonie » n’est pas à prendre au sens actuel d’harmonisation (pour les compositeurs), mais au sens du XVIe siècle : beau chant, chant harmonieux29.
25Pour le chant ès-maisons, afin de contrebalancer le succès des chansons diaboliques (teufftiche Bullelieder), selon Martin Bucer30, le répertoire huguenot a été enrichi de versions à plusieurs voix réalisées par les « harmonistes » (auteurs de l’harmonisation)31 : soit en contrepoint simple, note contre note (nota contra notam), favorisant l’intelligibilité des paroles perçues verticalement ; soit en contrepoint fleuri, avec des entrées successives, des imitations, des effets symboliques provenant de la traduction musicale figuraliste des images et idées du texte (Wortausdeutung, exégèse ; ou Word painting, peinture des mots), les paroles étant alors perçues horizontalement, procédé musicalement et artistiquement plus intéressant ; ou encore, en style de motet, à deux chœurs, pouvant employer jusqu’à huit voix.
26La quatrième exigence, d’ordre psychologique, concerne les fidèles qui ne doivent pas être dépaysés par rapport au répertoire liturgique et hymnologique antérieur à la Réforme. Hommes et femmes doivent à présent chanter des textes en langue vernaculaire. Selon des témoignages de réfugiés (lettres déjà citées), ce changement se passe bien à Strasbourg dans l’entourage des Réformateurs : Martin Bucer, Matthias Zell (1477-1548), curé de la Chapelle Saint-Laurent, Wolfgang Capiton (1478-1541), disciple d’Érasme et de Luther, chanoine à St-Thomas et Caspar Hedion (1491-1552), prédicateur à la Cathédrale et de quelques Humanistes. Dès 1524, Thiebaut Schwarz32 célèbre en allemand le culte avec chants à la Cathédrale (provisoirement à l’usage des Protestants).
27Jean Calvin, réfugié à Strasbourg en 1538, s’inspire des usages locaux et publie, l’année suivante, le recueil expérimental : Aulcuns pseaulmes et cantiques mys en chant33 (illustration I) constituant néanmoins, malgré certaines paraphrases maladroites ou peu chantables, l’amorce du Psautier (en français), futur recueil officiel doté des 150 paraphrases et 125 mélodies : Les Psaumes mis en rimes françoises par Clement Marot & Theodore de Beze, Genève, 156234 (voir Appendice I, illustration II). Les mélodies se maintiendront, les paraphrases subiront quelques remaniements orthographiques et sémantiques, depuis Conrart-La Bastide35, Bénédict Pictet36, jusqu’à nos jours. Ce processus d’actualisation est lié à la mise en conformité de l’hymnologie avec les idées nouvelles issues de la Réforme, sans perdre complètement de vue la tradition du chant de l’Église ancienne.
III. Textes, mélodies, esthétique
1) Aménagement des textes :
28Lors de la Réforme, la génération nouvelle de poètes, de mélodistes et d’harmonistes doit d’abord s’affirmer et réfléchir aux recommandations des Réformateurs. Ils seront alors des adaptateurs de textes et de mélodies existantes, empruntés à l’héritage de l’Église ancienne, tout en tenant compte des nouveaux objectifs, avant de devenir des auteurs de paraphrases, puis des créateurs de mélodies.
29La paraphrase, genre très en vogue, est, selon Jean Campensis, la « claire translation faicte jouxte la sentence non pas jouxte la lettre sur tous les psaumes selon la vérité hébraïque » (1542)37. Elle représente un exercice redoutable pour des poètes rompus aux techniques de l’Humanisme et à la recherche de leurs moyens d’expression pour les Psaumes genevois. En aucune manière, il ne peut s’agir de « traduction »38 ; de plus, le texte doit être condensé, strophique et rimé, aussi proche que possible de la version biblique. Les premières tentatives, souvent maladroites, ne tiennent pas toujours compte des possibilités vocales, de la « chantabilité » et du caractère communautaire. C’est le cas de la première paraphrase du Psaume 36, En moy le secret pensement / Dixit injustus ut delinquat (Strasbourg, 1539) :
Voici le destin littéraire de ce Psaume 36 avec ses versions successives :
301. Jean Calvin : En moy le secret pensement (Strasbourg, 1539, 1542, 1545, 1548, 1553)
1 | En moy le secret pensement | A39 | |
2 | Du maling parle clairement | B | |
3 | C’est qu’à Dieu il ne pense | C | |
4 | Car il se complaist en ces faictz | A’ | |
5 | Tant que haine sur ces meffaictz | B’ | |
6 | Et jugement ne pense | C’ | Finales en 1539 : |
7 | Son parler tend a decepvoir | D | (cadence ouverte) |
8 | Il ne cherch’ entendre et scavoir | D’ | (cadence conclusive) |
9 | N’aussi ung seul bien faire | E | |
10 | Il pense mal estant couché | F | |
11 | Du droict chemin est debauché | G | |
12 | Sans au mal se desplaire | H |
31Cette paraphrase du Psaume 36, avec ses mots et ses rimes (et assonances), est difficile à prononcer et peu chantable ; elle ne se maintiendra pas à l’usage et sera remplacée par la version de Clément Marot, plus élégante et plus facile à chanter.
322. Clément Marot : « Du maling les faictz vicieux » (Strasbourg ; Genève, 154240), devenue : « Du maling le meschant vouloir » dans le recueil officiel de Genève, 1562 :
1 | Du maling le meschant vouloir | A | |
2 | Parle en mon cœur et me fait voir | B | |
3 | Qu’il n’a de Dieu la crainte | C | |
4 | Car tant se plaist en son erreur | A’ | |
5 | Que l’avoir en haine et horreur | B’ | |
6 | C’est bien force et contrainte | C’ | |
Finales en 1542 | |||
7 | Son parler est nuisant et fin | D | (finale alignée) |
8 | Doctrine va fuyant afin | D’=D | (finale alignée) |
9 | De jamais bien ne faire | E |
10 | Songe en son lict meschanceté | F |
11 | Au chemin tors est arresté | G |
12 | A nul mal n’est contraire | H |
33Parfois, les modifications sont minimes et finissent par revenir à la tournure d’origine, comme, par exemple, pour le Psaume 33 : Exultate justi in Domino / Resveillez vous chascun fidèle. Voici la version d’origine, par Clément Marot qui, dès 1545 (1548, 1553), propose :
1 | Resveillez vous chascun fidèle |
2 | Menez en Dieu joye or en droit |
3 | Louange est très séante et belle |
4 | En la bouche de l’homme droit |
5 | Sur la douce harpe |
6 | Pendue en écharpe (effet d’écho dans la phrase mélodique) |
7 | Le Seigneur louez |
8 | De lutz, d’espinettes |
9 | Saintes chansonnettes |
10 | A son nom jouez |
34Au cours des siècles, quelques petits changements porteront sur l’incipit qui passera de la première personne du pluriel à celle du singulier : Réveille-toi ; chascun sera remplacé par peuple (fidèle), avec le même nombre de syllabes. En 1995, dans le Psautier français41, Roger Chapal prendra certaines libertés. Par exemple, pour le Psaume 33 :
1 | Réjouis-toi, peuple fidèle42 | |
2 | Acclame Dieu à pleine voix ! | |
3 | Sa louange est séante et belle | |
4 | Dans la bouche des hommes droits | Au lieu de : |
5 | Sur un air de fête | Sur la douce harpe |
6 | Sonnent les trompettes | Pendue en écharpe |
7 | Pour un chant nouveau ; | Le Seigneur louez |
8 | Les cors, les cithares | De lutz, d’espinettes |
9 | Les voix les plus rares, | Saintes chansonnettes |
10 | Les sons les plus beaux | A son nom jouez. |
35Cette paraphrase fantaisiste ne tient pas compte de l’effet d’écho (vers 5 et 6 du modèle). Les mots tels que harpe, flûte, épinette sont pourtant compréhensibles au XXe siècle.
2) Les sources de mélodies
36Les paraphrases littéraires des Psaumes, du Cantique de Siméon, des Dix Commandements, Articles de foi, Cantiques et prières… étant réalisées par J. Calvin, Cl. Marot et Th. De Bèze, la génération naissante de musiciens de la Réforme devra les doter de mélodies appropriées. Les premiers mélodistes (auteurs de mélodies) seront d’abord des « adaptateurs » avant de devenir des « créateurs ». Dans un premier temps, selon un principe courant au Moyen Âge, ils empruntent au fonds religieux et profane existant. Ce procédé, tout à fait légitime, a le mérite de ne pas dépayser les fidèles.
1- Première source : emprunt au répertoire de l’Église ancienne
37La mélodie de la séquence attribuée à Wipo (v. 995- v. 1050), chapelain de l’Empereur Conrad II : Victimae paschali laudes43 véhiculera le texte de Théodore de Bèze pour le Psaume 80 : O Pasteur d’Israel escoute / Qui regis Israël, sur la mélodie arrangée par Pierre Davantes (XVIe siècle). Il n’y a aucune parenté sémantique entre le modèle latin et le psaume français. L’ajout du monosyllabe « O », facilitant l’attaque du premier vers, a nécessité le dédoublement de la première note :
2- Deuxième source : emprunt au répertoire profane existant, familier au peuple
38Le Psaume 138 se chante sur la mélodie d’une chanson d’amour de Clément Marot (Attaingnant, 1529/30)44 : Quand vous voudrez faire une amye..., après suppression des mélismes (ornements) pour obtenir un traitement syllabique et fonctionnel sans difficulté d’intonation. La recette pour se « faire une petite amie »45 devient un chant religieux de louange : Il faut que de tous mes espritz / Ton los est pris / j’exalte et prise, dans la paraphrase de Clément Marot et, en 1938, dans le Recueil Louange et prière : Il faut, grand Dieu, que de mon cœur / La sainte ardeur te glorifie...
1) Quand vous voudrez faire une amye…
2) Une pastourelle gentille...
3) Il faut que de tous mes esprits...46
4) Il faut, grand Dieu, que de mon cœur...
3- Troisième source : créations de mélodies
39Les mélodistes – ayant, au cours des années, trouvé une esthétique fonctionnelle – sont capables de créer des mélodies nouvelles. L’exemple suivant a le mérite d’illustrer une filiation inattendue et d’associer à la fois le répertoire strasbourgeois en allemand et ses incidences sur le psaume français le plus connu et symbolique : le Psaume 68, après un détour par le Psaume 36.
40En 1525, le Psaume 119 : Beati immaculati devient, avec la paraphrase et la mélodie de Matthias Greiter : Es sind doch seligalle die/Im rechten glauben wandeln hie... (Teutsch Kirchenampt, Ordonnance du culte en allemand, Strasbourg, 1525). En 1539, Jean Calvin emprunte cette mélodie (allemande) pour son Psaume 36 : En moy le secret pansement47 figurant dans son recueil strasbourgeois : Aulcuns Pseaulmes et cantiques mys en chant. Enfin, dans le Psautier officiel, cette mélodie véhiculera le Psaume 68 : Que Dieu se monstre seulement, de caractère combatif, énergique et bien enlevé. En fait, cette mélodie originale du Psaume 119 sera, dans l’hymnologie allemande, reprise dans un tempo lent et méditatif, entre autres, pour le choral O Mensch bewein dein ’Sünde gross48 que Jean-Sébastien Bach utilisera, comme cantus firmus harmonisé exposé en valeurs longues (chœur d’enfants), dans sa Passion selon St Matthieu (fin de la Première partie)49.
41Deux traditions sont en présence. Le modèle allemand contient deux finales différenciées : l’une, suspensive, « à l’ouvert » ; l’autre, conclusive, « au clos ». En 1539, Calvin a effectué une copie conforme, mais en 1542, par suite d’une erreur de copiste ou d’un processus de simplification, les deux finales ont été alignées (modèle français).
42Cette erreur de 1542 a donné naissance à la tradition française, musicalement moins intéressante ; rappelons que ce psaume nécessite un mouvement plus rapide et plus énergique, pour rendre compte de son caractère martial. En revanche, le modèle de 1525 est repris dans la tradition allemande dans plusieurs chorals, comme, par exemple : O Mensch bewein dein ’ Sünde gross, à prendre dans un mouvement plus lent pour respecter le caractère méditatif de Sebald Heyden.
3) Les problèmes esthétiques
43Le corpus hymnologique étant constitué, les mélodistes ont cherché un style accessible en accord avec la prosodie musicale, la prosodie verbale et les exigences de l’intelligibilité des paroles : traitement syllabique et homorythmique (une syllabe / une note), rythme simple et mélodies faciles à retenir, correspondant au chant fonctionnel des fidèles au culte à une voix.
44Les « harmonistes » (harmonisateurs) ont utilisé plusieurs techniques :
451. harmonisation à quatre voix, note contre note, ou, selon l’expression de Goudimel : « harmonie consonante au verbe ». La mélodie est d’abord confiée au ténor et/ou au soprano, à raison d’un accord par syllabe (accord parfait, renversement, quinte à vide).
462. harmonisation en contrepoint fleuri, plus libre, moins stéréotypée, moins fonctionnelle. Goudimel s’excuse en ces termes : « L’harmonisation du Psautier a été le plus fidèle témoignage, de tous mes labeurs le plus beau » et poursuit [par précaution] : « Nous avons ajouté au chant des Psaumes trois parties, non pour induire à les chanter à l’Église, mais pour s’esjouyr [se réjouir] en Dieu ès maisons... ». Dans ce cas, le Psaume est découpé en sections et exploité comme cantus firmus (mélodie imposée) placé au ténor et au soprano. Les parties d’accompagnement sont plus ornées et utilisent les procédés d’imitation et des entrées successives50.
473. harmonisation en style de motet. Claude Goudimel, Claude Le Jeune, Paschal de L’Estocart, Philibert Jambe de Fer, entre autres, ont réalisés des versions de concert, selon le principe que la mélodie peut être exposée textuellement à l’une ou l’autre des parties, ou se mêler au tissu polyphonique. Cette esthétique aboutit à des œuvres très élaborées.
48Le problème de la place du cantus firrnus – énoncé au Ténor selon la tradition du XVe siècle – s’est posé depuis les premières harmonisations. Il passera progressivement de cette partie au soprano. À partir de 1585, ce processus est appliqué dans les Psaumes en latin classico-humaniste (selon les genres métriques d’Horace) de l’Écossais George Buchanan (1506-1582) et du musicien Statius Olthof qui place systématiquement la mélodie à la partie supérieure (soprano). En 1586, le principe se généralise dans les Chorals allemands de Lukas Osiander dans son Recueil 50 Geistliche Lieder also gesetzt dass eine ganze christliche Gemein durchaus mitsingen kann (mis en musique de telle manière que toute une assemblée chrétienne puisse absolument participer au chant (mot à mot : « chanter avec »). La mélodie du cantus firmus planant à la partie supérieure facilite considérablement la perception des paroles.
Conclusion
49La légitimité de la création hymnologique lors de la Réforme se justifie pour diverses raisons :
501. le succès immédiat du Psautier genevois, vendu à plus de 30 000 exemplaires pendant la seule année 1562, ayant connu de nombreuses rééditions et adaptations jusqu’à nos jours.
512. l’exploitation depuis 1562 (déjà 1539) jusqu’en ce début du XXIe siècle : les mélodies, toujours chantées, restent intactes ; seuls, les textes (parfois désuets) ont été remaniés51 et actualisés.
523. les nombreuses traductions en italien52, romanche (dans les Grisons), allemand53, néerlandais54, hongrois..., même en dialecte béarnais55. Quelle que soit la langue étrangère de la paraphrase, dans presque tous les cas, la mélodie d’origine est utilisée, parfois avec quelques minimes variantes (adjonction, dédoublement, suppression d’une note) occasionnées par l’adaptation en langue étrangère du texte original à la mélodie traditionnelle. Pour accompagner sa traduction allemande, Ambrosius Lobwasser n’a pas hésité à emprunter l’harmonisation fonctionnelle de Claude Goudimel.
53Selon Wilhelm Tappert56 :
Les mélodies voyagent, elles sont les touristes les plus infatigables de la terre, elles traversent les fleuves, les Alpes, les océans, et jouent aux nomades dans les déserts ; partout, elles rencontrent d’autres mélodies qui font le même chemin ou en sens inverse.
54Il en est de même du Psautier huguenot, qui a fourni la preuve de son utilité. La création littéraire et hymnologique de la Réforme est justifiée par sa qualité poétique, artistique et fonctionnelle et sa pérennité du XVIe au XXIe siècles57.
55Le 10 juin 1543, dans sa Préface A TOUS LES CHRETIENS ET AMATEURS DE LA PAROLE DE DIEU, Jean Calvin n’a-t-il pas légitimé d’avance le destin hymnologique du Psautier huguenot, en affirmant, de manière quasi-prophétique :
« C’est pourquoi, quand nous aurons bien cherché ca et là,
nous ne trouverons meilleures chansons,
ni plus propres pour ce faire que les Psaumes de David ».
Appendice I chronologie des principaux recueils de 1539 à 1562
Appendice II : ordonnance de la messe catholique romaine
Texte officiel et traduction française58
Appendice III : ordonnance de la messe Allemande (Deutsche Messe) selon Martin Luther (1526)
I Introït59 : Choral ou psaume allemand en 1er ton.
II Kyrie eleison : triple invocation (Kyrie / Christie / Kyrie)
(Le Gloria in excelsis qui, vraisemblablement, en fait partie, n’est pas mentionné).
III Prière (Kollektengebet).
IV Épitre : lecture chantée en 8e ton.
V Graduel : sous la forme d’un choral allemand.
VI Évangile : lecture chantée en 5e ton.
VII Confession de Foi, sous la forme du choral luthérien :
Wir glauben all an einen Gott60.
VIII Prédication :
IX Paraphrase du Notre Père et exhortation à ceux qui veulent participer à la Sainte Cène.
X Paroles d’institution de la Sainte Cène d’après la Première Épitre aux Corinthiens, ch. 11, v. 23 sq, complétée par la lecture des textes de l’évangile, pendant laquelle a lieu la Consécration (c’est à dire la préparation à un usage particulièrement saint) des éléments. La mélodie des paroles s’appuie sur le ton de la Passion ; elles doivent ainsi être mises en valeur et audibles.
XI Élévation des espèces de la Cène.
XII Distribution de la Cène sous les deux espèces.
XIII En outre, on doit chanter, soit le Sanctus sous la forme du choral : Jesaja dem Propheten das geschah61 ou Jesus Christus unser Heiland62, ou encore, l’Agnus Dei allemand63.
XIV Prières d’action de grâces.
XV Bénédiction.
Appendice IV : Ordonnance du culte lors de la réforme à Strasbourg
À Strasbourg, pour le service religieux, Jean Calvin préconnise la structure suivante :
Invocation
Confession des péchés
Décalogue (4 premiers préceptes chantés par l’assemblée) *
Prière demandant la force d’observer la loi (décalogue)
Décalogue (6 derniers commandements chantés par les fidèles) *
Prière d’illumination de l’Esprit
Lecture de la bible
Prédication
Prière d’action de grâces et d’intercession (pour les autorités, princes, magistrats)
Psaume chanté
Credo chanté
Bénédiction
Éléments bibliographiques
Gérold (Théodore), Les Plus Anciennes Mélodies de l’Église protestante de Strasbourg et leurs auteurs, Paris, Alcan, 1928, 81 p.
Pidoux (Pierre), Franc-Bourgeois-Davantès. Leur contribution à la création des mélodies du Psautier huguenot. Genève, 1993. Exemplaire dactylographié (à la BPF, non commercialisé).
Pidoux (Pierre), Le Psautier huguenot du XVIe siècle, I, Les Mélodies, Bâle, Baerenreiter, 1962, 203 p.
Pidoux (Pierre), Le Psautier huguenot du XVIe siècle, II, Documents et bibliographie, Bâle, Baerenreiter, 1962, 203 p.
Weber (Édith), Le Concile de Trente et la musique : de la Réforme à la Contre-Réforme, Paris, Honoré Champion, coll. Musique Musicologie 12, 1982, 301 p. (réédition courant 2008).
Weber (Édith), La Musique protestante de langue française, Paris, Champion, 1979, 199 p.
Weber (Édith), La Musique protestante de langue allemande, Paris, Champion, 1980, 262 p.
Weber (Édith), La Recherche hymnologique, Paris, Beauchesne, 2001, vi + 232 p.
Weber (Édith), « La Réforme », Précis de Musicologie (J. Chailley et collaborateurs), Paris, P.U.F., 1984, p. 185-193.
Weber (Édith), « La Réforme/La musique protestante à la recherche de son esthétique », Histoire de la musique, La musique occidentale du Moyen Âge à nos jours (dir. : Marie-Claire Beltrando-Patier) Paris, Bordas, 1982, p. 181-196.
Weber (Édith), Histoire de la musique française de 1500 à 1650 (Programme de l’Agrégation d’histoire), Paris, SEDES, coll. Regards sur l’histoire (99), 1996, 244 p. (Chapitre IV : « La Réforme », Chapitre V : « La Contre-Réforme »).
Weeda (Robert), Le Psautier de Calvin, Turnhout, Brepols, 2002, 229 p.
Éléments discographiques
30 cm | Chantres et musiciens de la Réforme | |
Collaboration de la Maîtrise (quelques Psaumes) | ||
Direction : Horace Hornung | ||
STUDIO SM. SM 33. 64 ; 33. 65 (2 disques) | ||
30 cm | Psaumes polyphoniques de Claude Goudimel à nos jours | |
Maîtrise de l’oratoir du Louvre | 1972 | |
Ensemble de Cuivres | ||
Pierre Gabard, trompette solo | ||
Marie-Louise Girod, orgue | ||
Direction : Horace Hornung | ||
Vogue CV 25001 | ||
(Collaboration scientifique et texte : Édith Weber) | ||
CD | Psaumes du XVIe siècle | |
Le Psautier de Genève mis en musique | ||
Centre de musique ancienne – Genève | ||
Ensemble « Clément Janequin » | ||
Ensemble « Les Élements » | ||
CASCAVELLE VEL 1001 | 1995 | |
CD | Claude Goudimel, Psaumes au temps de la Réforme | |
Chœur, solistes, et Ensemble instrumental de l’Oratoire du Louvre | ||
Direction : Florian Hollard | ||
Classics 3D 80 16 | 1996 | |
CD | Le Psautier français | |
Ensemble Claude Goudimel | ||
Chorale Per Cantum et Chorale Oratorio | ||
Direction : Christine Morel | ||
Champeaux CSM 0010 | 1997 | |
CD | Psaumes français à l’époque de l’édit de Nantes | |
Ensemble vocal Sagittarius | ||
Direction : Michel Laplénie | ||
Lira d’Arco LA 0018 (distribution MUSICIDISC) | 1999 | |
CD | Psaumes et chansons de la réforme | |
Ensemble Clément Janequin | ||
Direction : Dominique Visse | ||
Harmonia Mundi HMC 90 16 72 | 2000 | |
CD | Le Psautier français** | |
Psaumes de la réforme notre temps | ||
Paroles de Roger Chapal | ||
Chœur Continuum, Chœur d’enfants Nadia Boulanger, | ||
Orgue : Y. Liorzou | inité, | |
Ensemble Clément Marot, Chorale Laudate Dominum de Fontainebleau | , | |
Champeaux CSM 0019 | 2001 |
CD | Louange et Prière [Un recueil huguenot] | |
Psaumes et cantiques | ||
Chorale Guy de Brès | ||
Sous la direction de Robert Weeda | ||
Organiste : Roselyne Wieger-Kœniger | ||
CGB 2002/01-02 (2 CD) c/o Église Protestante de Bruxelles/Chapelle Royale. | 2002 | |
CD | Concert chez Philippe de Marnix | |
Marie de Roy (soprano) | ||
Fabrice Holvoet (luth) | ||
Allen James (orgue) | ||
Contredisse CEX 3000 CD | ||
Société Royale de l’Histoire du Protestantisme Belge, | ||
Av. Adolphe Lacomblé 21, 60/12 | ||
B 1030 BRUXELLES | 2004 |
Notes de bas de page
1 Favorisées au XVIe siècle par l’essor de l’imprimerie et de l’imprimerie musicale (Strasbourg, Genève, Lyon).
2 Date du recueil expérimental strasbourgeois : Aulcuns Pseaulmes et cantiques mys en chant, à l’initiative de Calvin (voir Appendice I. illustration I).
3 Date de publication du recueil officiel (et complet) des 150 Psaumes (illustration II) reposant sur 125 mélodies – quelques mélodies sont donc communes à plusieurs textes (ex. Ps. 36 et Ps. 68) – encore chantées de nos jours (et dont certaines ont même été empruntées à l’usage des Catholiques après le Concile de Vatican II (1962-1965) prônant le chant en langue vernaculaire : voir Appendice II).
4 Le principe – consistant à présenter au grave une teneur en valeurs longues et, à l’aigu, une partie ornementale – étant trouvé, il peut être élargi en superposant une troisième partie (triplum) ou une quatrième (quadrupluni), appliqué aux organa (singulier : organum) au XIIIe siècle.
5 L’expression « antiqua » n’est pas médiévale, elle a été forgée par des musicologues par opposition à l’« Ars Nova » (titre du Traité de Philippe de Vitry, XIVe siècle).
6 Antienne (du grec latinisé : antiphona, signifiant voix en réponse), chant destiné à encadrer la psalmodie ou récitation modulée des Psaumes.
7 À cause de leur grand format, les enfants lisent les manuscrits au lutrin, alors que les chanoines et les religieux du Chœur connaissent de nombreuses pièces par cœur.
8 Dans certains cas, le peuple pouvait répondre par un refrain simple.
9 Émile DOUMERGUE, Essai sur l’histoire du culte réformé, Paris, Fischbacher, 1890, p. 88 sq.
10 HERMINJARD, Correspondances des Réformateurs, I, Genève, 1866-1897, p. 404 sq.
11 Cité par Pierre PIDOUX, Le Psautier huguenot du XVIe siècle, I. Les mélodies, Bâle, Bärenreiter, 1962, Ps. 68, p 74.
12 Extrait du CD : Claude GOUDIMEL, Psaumes au temps de la Réforme sur des poèmes de Clément MAROT et Théodore de BÈZE, Chœur, solistes et ensemble instrumental de l’Oratoire du Louvre. Direction : Florian HOLLARD. 3 D Classics CD 80 16 (1996).
13 Par exemple, en Allemagne, la mélodie ancienne : Dich fraw vom Himmel ruf ich an a été reprise, mais l’allusion à Marie [Toi femme, du ciel, je t’invoque...] véhicule un texte modifié, tout en maintenant deux syllabes : Christum, vom Himmel ruf ich an (Christum = accusatif de Christus). C’est ainsi qu’une invocation à la Vierge devient une invocation au Christ.
14 Cité d’après Théodore GÉROLD, « Les plus anciennes mélodies de l’Église protestante de Strasbourg et leurs auteurs », Cahiers d’histoire et de philosophie religieuse, 18, Paris, Alcan, 1928, p. 39.
15 Cf. : Protestantisme et musique (ouvrage collectif), Paris, Éd. Je Sers, 1950, p. 63-64.
16 IRC, Livre III, (trad. Fr. 1541-1560) dans Opéra Calvini (publ. par J.-D. BENOIT, éd. Critique, Paris, 1960, cité par P. PIDOUX, L. C.), T. IV, p. 240.
17 Le texte le plus développé de cette Épître est identique à celui de l’Epître au Lecteur de Genève, 1542 (à part quelques différences orthographiques).
18 1542, 1543, 1545, 1548, 1553 ; Paris, 1551.
19 Strasbourg (1539, 1542), qui, à partir du recueil de Loys BOURGEOIS (1547), sera supplantée par la paraphrase de Clément MAROT (Genève, 1542) : Je croy en Dieu le Père tout puissant qui crea terre et ciel resplendissant...
20 Pierre PIDOUX, Le Psautier huguenot..., op. cit., p. 133 sq. (Annexes aux Psautiers).
21 Ouvrage de Jean CAMPENSIS publié à Lyon, en 1542, et conservé à la B.N. 61 41 Rés. Cité d’après Édith WEBER, La Musique mesurée à l’Antique en Allemagne, Paris, Klincksieck, 1974, tome 1er, 1re partie, p. 378 sq.
22 Ce qui ne sera pas toujours le cas des « paraphrases » de Psaumes actualisées dans des recueils récents, fin XXe siècle.
23 Il fera l’objet d’une commémoration en 2005, dans le cadre des « Célébrations nationales » (Archives Nationales), en liaison avec Théodore de Bèze.
24 Mort à Lyon, v. 1565, poète, versificateur, imprimeur et éditeur, auteur de paraphrases. Cf. Édith WEBER, La Musique protestante de langue française, Paris, Champion, 1979, p. 143-144. Cf. Pierre PIDOUX, Le Psautier huguenot, II. Documents, Bâle, Bärenreiter, 1962, p. 68-69. Ces deux pièces ont été imprimées, la première par G. du BOSC, la seconde par Conrad BADIUS, ainsi qu’il ressort des délibérations du Conseil. Aucun exemplaire de ces impressions ne paraît avoir été conservé.
25 Édith WEBER, La Musique protestante en langue allemande, Paris, Champion, 1980, p. 92.
26 Edith WEBER, « Une réaction contre le succès du Psautier de la Réforme : les Psaumes de la Contre-Réforme », Foi & Vie, CIII, Février 2004, n° 1, p. 9-24.
27 Genève, La forme des prières et chantz ecclesiastiques..., Epistre au lecteur, 1542.
28 IRC, 1541-1560.
29 Le contresens dans l’acception du mot a fait prétendre que Calvin serait allergique à la musique polyphonique.
30 Dans sa préface au Gesangbuch, Strasbourg, 1541.
31 Par exemple : Claude Goudimel (v. 1514-1572), Claude Le Jeune (1530-1600), Paschal de L’Estocart (1539-apr. 1584), Pierre Certon (mort en 1572). Philibert Jambe De Fer (v. 1520-1566 ?)...
32 Le 15 février 1524.
33 Réédition facsimilé (textes et mélodies), avec dernier état de la question, par Gert Jan BUITINK, Introduction par Jan R. LUTH (traduction française : Édith WEBER, p. 65- 94), 94p. Brasschaat, Boekmakerij Gert-Jan BUITINK, fin 2003, 63p.
34 Reprint : Clément MAROT et Théodore de BÈZE : LES PSAUMES EN VERS FRANÇAIS avec leurs mélodies, fac-similé de l’édition genevoise de Michel BLANCHEER, 1562, publié avec une introduction de Pierre PIDOUX, Genève, Droz, (Coll. « Textes littéraires français »), 1986.
35 Valentin Conrart (1603-1675, Paris), poète, écrivain, fondateur et Premier Secrétaire Perpétuel de l’Académie française, « Ancien de l’Église Réformée ». Rappelons que ses révisions seront publiées par Marc-Antoine Crozat, sieur de La Bastide après sa mort, en 1677 et 1679. Les mélodies se maintiennent.
36 Bénédict Pictet (1655-1724), auteur protestant, Pasteur (1680), Professeur de Théologie (1686), chargé par l’Église de Genève de présider la Commission pour la révision du Psautier terminée en 1693, publiée en 1694.
37 Cf. Note 21.
38 Bien que cette expression soit utilisée au XVIe siècle.
39 Ces lettres renvoient à la structure mélodique répétitive A B A/A’B’ C’. À chaque nouvelle lettre correspond une nouvelle mélodie.
40 Et aussi : Bourgeois, 1547 ; Lyon, 1548, 1549 ; Genève, depuis 1551.
41 Le Psautier français. Les 150 Psaumes versifiés en français contemporain. Mélodies originales du XVIe siècle harmonisées à quatre voix, Lyon, Réveil Publications, 1995, p. 92-93.
42 La version allemande : Wohl auf, Ihr Heiligen und Frommen reprend le même symbolisme de quinte montante, pour illustrer le mouvement ascendant.
43 Maintenue par les Pères du Concile de Trente.
44 Il faut évidemment que la chanson soit antérieure au psaume. Il est encore chanté actuellement.
45 Cité d’après Jean ROLLIN, Les Chansons de Clément Marot, Étude historique et bibliographique, Paris, Librairie Fischbacher, 1951, p. 377 :
Quand vous voudrez faire une amye
Prenez la de belle grandeur
Quand vous voudrez faire une amye (reprise)
Prenez la de belle grandeur
Doulceur en cueur
Langaige bien saige
Dansant chantant par bons accords
Et ferme de cueur et de corps.
(Clément Marot).
46
Cette mélodie (Il faut que de tous mes esprits) est aussi utilisée pour un chant de Noël : Une pastourelle gentille.
47 Rappelons que cette paraphrase de Calvin, maladroite et difficile à chanter, sera supplantée par celle de Clément Marot : Du maling, le meschant vouloir (Genève, 1562).
48 « O homme, pleure tes lourds péchés ».
49 Également comme Prélude de choral pour orgue (Orgelbüchlein, N° 24, BWV 622).
50 C’est le cas des éditions de 1568 (et 1580, édition posthume) des Psaumes de Claude Goudimel.
51 Avec plus ou moins de fidélité par rapport aux prototypes de Clément Marot et Théodore de Bèze.
52 Cf. I Salmi della Riforma a cura di Emanuele FIUME et Daniele Cristiano IAFRATE, Presentazione di Paolo RICCA, Introduzione di Edith WEBER, Torino, Claudiana editrice, 1999, 275 p. (Psautier officiel italien).
53 Der Psalter... in deutsche reyme verstendiglich und deutlich gebracht... und hierüber... vier Stinimen (il s’agit de l’harmonisation de Claude Goudimel).
54 Het Boeck der PSALMEN Davids / Mit de hebreische Spraecke in Nederduptschen dichte op de ghewoonlische franzoische wyse overghesett door Philips van Mamix, Anvers, 1580. Fac-similé, Gert Jan Buitink, Anvers, 1985.
55 Los Psalmes de David metuts en rima bernesa per Arnaud de Salette, nouvelle édition préparée par Robert Darrigrand, Introduction historique : Benedit Cursente, Ortez, Per Noste, 1983, 289 p.
56 Auteur de Wandernde Melodien.
57 À titre d’exemple, lors de récentes réunions internationales de descendants de Huguenots, chacun chante la paraphrase en sa langue maternelle sur la même mélodie traditionnelle (Genève, 1562).
58 Cité d’après Édith Weber, Le Concile de Trente et la Musique, op. cit., p. 231.
59 Introduction.
60 Nous croyons tous en un seul Dieu.
61 Voici ce qui est arrivé au prophète Ésaie.
62 [... der von uns den Gotteszorn wand J : Jésus-Christ, notre Sauveur qui a détourné de nous la colère divine.
63 Christe, du Lamm Gottes, der du trägst die Sünd der Welt, erbarm dich unser... (chanté trois fois). Amen (Christ, agneau de Dieu, qui ôte les péchés du monde, oh ! prends pitié de nous... Amen)
Auteur
Université de Paris IV-Sorbonne
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Sarah Voinier et Guillaume Winter (dir.)
2011
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(Des Réformateurs aux Romantiques)
Alain Joblin et Jacques Sys (dir.)
2008
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1996
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Poésie allemande de la modernité
Jean-Marie Valentin et Frédérique Colombat
2017