La communauté réformée parisienne au XVIIe siècle et ses écrivains
p. 77-96
Texte intégral
1Il est tentant de constituer en groupe les hommes de lettres protestants parisiens du XVIIe siècle, et d’interpréter le phénomène même que représente un tel groupe. Pour constater qu’il est peu nombreux, et s’interroger alors sur le faible rayonnant culturel des réformés français. Ou pour insister sur son amenuisement du fait de nombreuses conversions – celles de Boisrobert et Saint-Amant tôt dans leurs carrières, celles plus tardives, eu égard à leurs trajectoires, de Théophile de Viau, Montausier, Pellisson. Ou au contraire pour faire de ces hommes de lettres un élément du dynamisme de la communauté réformée au temps de l’Édit de Nantes, en soulignant alors la valeur du poète Jean-Ogier de Gombault ou du traducteur Perrot d’Ablancourt, le rayonnement de Valentin Conrart, premier secrétaire de l’Académie française, ou les qualités d’écrivain de pasteurs tels Jean Daillé, Jean Claude, Laurent Drelincourt. Pour autant, sans même parler de ceux qui sont devenus catholiques, cette liste cache bien des différences dans la manière dont chacun de ces individus a lié dans son parcours son identité confessionnelle et son identité d’hommes de lettres.
2Certains d’entre eux n’ont guère revendiqué leur protestantisme dans leurs écrits, ou n’ont pas construit leur réputation autour de leur qualité de protestant. Dans le petit milieu des hommes de lettres parisiens, on savait bien sûr que, par exemple, Perrot d’Ablancourt était protestant, mais il n’a jamais mis en avant cette identité dans ses écrits1. Pour d’autres, l’identité protestante apparaît fluctuante au long d’une carrière. Ainsi Jean-Ogier de Gombauld, dans les années 1620, choisit-il d’apparaître avant tout comme un protégé d’Anne d’Autriche2, puis, dans les années 1630, comme un fidèle de Richelieu3, et tout au long de sa carrière il fait figure de poète courtisan ; il insiste, dans l’image qu’il donne de lui-même dans ses ouvrages, sur sa noblesse et sur la faveur dont il jouit auprès des puissants4, mais pas sur sa confession. Après sa mort, en revanche, paraissent, par les soins de Valentin Conrart, les Traités et lettres de feu M. de Gombauld touchant la religion5, qui ramènent sa figure d’auteur vers l’Église réformée.
3Il sera question dans cet article des écrivains qui ont mis en jeu leur identité protestante. Les pasteurs, pour leur part, ne pouvaient pas ne pas le faire : ils étaient d’abord définis par leur fonction pastorale. Mais il faut alors se demander pourquoi certains d’entre eux – et parmi eux beaucoup de pasteurs parisiens – ont choisi d’apparaître comme des écrivains ou de développer des pratiques d’écriture qui les apparentaient aux écrivains. Pour les hommes de lettres protestants qui n’écrivent pas dans un tel cadre ecclésial, et qui néanmoins se présentent comme protestants, on se demandera ce qu’ils ont fait, en tant qu’hommes de lettres, avec leur identité réformée. On ne cherchera donc pas à mesurer ici l’inscription protestante de leur production en rapportant le contenu de leurs écrits ou leurs choix en matière de pratiques d’écriture à la doctrine protestante ou à un mode d’être protestant qui serait universel. Au reste, on serait bien en peine de le faire du fait que les hommes de lettres qui nous intéressent manifestent la plus grande volonté de conformité avec les écrivains catholiques, tant sur le plan de l’art d’écrire que sur celui des pratiques d’ écriture6. On vise plutôt à cerner des manières d’être écrivains et protestants qui renvoient à la dynamique socio-politique de la communauté réformée parisienne du XVIIe siècle aussi bien qu’à ce que signifiait socialement être écrivain à cette époque.
4Trois cas seront évoqués, qui dessinent ensemble le territoire des rapports qu’entretenaient l’activité et l’identité d’écrivain avec l’activité et l’identité protestante dans le Paris de l’Édit de Nantes : celui de Samuel Chappuzeau, auteur de théâtre, professeur dans une école tenue par un pasteur, et dont la plume est mobilisée dans le cadre d’une querelle interne à Charenton en 1661 ; celui de Jean Daillé, pasteur renommé, que l’on vantait en disant qu’il aurait pu être de l’Académie française ; celui de Valentin Conrart, lui-même académicien, dont la carrière est très liée à des réseaux mondains catholiques, mais qui a déployé tout un volet de son action d’homme de lettres en direction de la communauté protestante parisienne.
Samuel Chappuzeau : enseignement et service de plume autour du consistoire
5Samuel Chappuzeau est resté dans l’histoire littéraire comme auteur dramatique et comme le rédacteur de la première histoire du théâtre français7. Il est né en 1625 à Paris dans une famille protestante d’origine poitevine. Spolié de son héritage par ses beaux-frères selon ses dires, il tente de vivre de son savoir et sa plume, d’abord en Hollande, puis à Lyon à partir de 1651, où il s’établit comme correcteur d’imprimerie et où il publie ses premiers livres. Lyon dans son lustre, éloge des institutions de la ville et de ses magistrats, paraît en 1656, la même que Le Cercle des femmes, sa première production dramatique. Il écrit ou publie encore deux pièces dans ces années-là, avant de retourner en Hollande, où il réussit à devenir précepteur du prince d’Orange en 1659. Il se fait cependant évincer et revient en France, à Paris, en 1661.
6C’est alors qu’il intervient dans l’affaire du pasteur Alexandre Morus, qui a largement mobilisé la communauté réformée parisienne et même française entre 1656, lorsqu’il est pour la première fois question de le recruter comme pasteur à Charenton, et 1664, où le synode de Berry lui octroie une « sainte amnistie » et le réintègre définitivement au sein du consistoire8. Pour le dire vite, Morus est un personnage controversé qui suscite des adhésions passionnées mais aussi des oppositions farouches : on lui reproche à la fois des mœurs libertines et des opinions hétérodoxes sur des matières qui divisent les protestants. La longueur du conflit le concernant tient certainement pour partie à Morus lui-même, pasteur flamboyant, adulé des foules pour ses prêches brillants, mais dont la personnalité à la fois hautaine, mélancolique et instable, se plie mal aux règles du jeu social. H ne devait certes pas être le seul pasteur aux mœurs répréhensibles selon les normes du temps : sa particularité semble être d’avoir eu du mal à se conformer aux règles de la bienséance. Mais parce que les comportements de Morus ont constamment déjoué les tentatives de médiation et d’étouffement de ses scandales, cette affaire a durablement divisé la communauté protestante parisienne et pris une ampleur inédite. Au dilemme initial – valait-il mieux recruter un pasteur brillant, susceptible de raffermir la communauté dans ses convictions et de porter bien haut la parole des réformés en face du monde catholique, ou un pasteur plus terne, mais aux mœurs irréprochables ? – se sont surimprimés d’autres d’enjeux : tandis que se durcissaient les positions, l’affaire est devenue un moyen pour un certain nombre de protestants d’affirmer leur pouvoir au sein de l’Église réformée9.
7Jusqu’en 1660, la controverse portait sur les agissements du pasteur dans sa charge précédente, en Hollande ; Morus est finalement absous de ses fautes au synode national de Loudun, qui se termine en janvier 1660. Mais les attaques contre lui sont relancées en 1661 : cette fois Morus est mis en cause pour ses agissements à Paris même. Le consistoire le suspend alors, et l’envoie en Angleterre dans l’hiver 1661-1662, en espérant qu’il ne reviendra pas en France. Il rentre pourtant à Paris en juin 1662 : il est alors mis en accusation devant le consistoire, et plusieurs dépositions par écrit de Chappuzeau constituent les pièces maîtresses de ce dossier. Si l’on en croit ses dépositions, Chappuzeau aurait rencontré Morus en Hollande, et l’aurait retrouvé à Paris. Il raconte ses pérégrinations parisiennes en compagnie du pasteur, et expose dans le détail les frasques de ce dernier, qui devient sous sa plume un impénitent coureur de jupons :
Ces promenades, sans rire (car il y a plutost un sujet de larmes) se faisoyent comme une espèce de chasse après quantité de femmes pudiques ou impudiques en faisant la pirouette alentour, en les poussant du coude, en les galopant jusqu’au lieu où leurs affaires les menoyent. en s’arrestant lors qu’elles venoient à s’arrester ; & quelque fois quand elles alloyent trop loin, on les quittoit pour en suivre d’autres, dont le visage plaisoit davantage ; & sur tout on s’attaquoit aux cappes, dont on recevoit souvent des injures, qui obligeoient à fuir10.
8Les amis de Morus contre-attaquent en accusant Chappuzeau d’avoir été payé pour l’espionner et médire de lui. De fait, Chappuzeau raconte lui-même qu’après avoir suivi – sous la contrainte, explique-t-il longuement – Morus dans d’innombrables expéditions licencieuses, il s’est ouvert de l’affaire à un Ancien de Charenton, qui après avoir sermonné sans succès le pasteur, a tout raconté à un autre ministre parisien, Jean Daillé. Sommé par ce dernier de s’expliquer, Morus continue à nier les faits qui lui sont reprochés, si bien que Daillé charge trois membres du consistoire d’espionner Morus11. Finalement, Chappuzeau prévient un beau jour les Anciens que Morus a le projet d’aller « avec des femmes » dans un cabaret du faubourg Saint-Martin, et leur permet ainsi d’établir un rapport sur la conduite scandaleuse du pasteur, rapport sur la base duquel il est suspendu par le consistoire12.
9Chappuzeau s’explique très longuement sur cette affaire : il a déposé une première fois devant le consistoire le 15 juillet 1662, puis une deuxième, cette fois devant le colloque réuni en août à Charenton13. Censuré par ce dernier, il a rédigé une ultime lettre de protestation, qui date de septembre 166214. À travers ces récits, même s’ils ne sont pas entièrement crédibles, et ne dévoilent pas tous les dessous de l’affaire, on saisit cependant les principaux ressorts de l’intervention de Chappuzeau dans cette polémique, ressorts qui sont étroitement liés à sa condition d’homme de lettres aux abois.
10Morus semble avoir soufflé à Chappuzeau, lorsque ce dernier s’est retrouvé à Paris sans ressources, l’idée d’ouvrir un pensionnat pour jeunes gens, le pasteur se faisant fort, grâce à ses relations au sein des élites protestantes parisiennes, de lui amener des clients. Chappuzeau loue alors une grande maison et entreprend, avec l’aide d’un pédagogue, d’instruire effectivement plusieurs fils de bonne famille, parmi lesquels le fils de Ruvigny, délégué général des protestants de France, et le fils Galland, probablement issu de la grande famille de financiers protestants15. En outre, Morus offre de s’entremettre auprès de de Lorme, autre notable de la communauté réformée, pour qu’il accepte que Chappuzeau lui dédie la version des colloques d’Érasme qu’il vient de mettre sous la presse16. Chappuzeau est ainsi devenu l’obligé et même le client d’Alexandre Morus, grâce à l’entregent dont jouissait ce dernier. Cependant la pension ne semble pas avoir très bien marché – elle reçoit du reste un coup fatal lors de la révélation de l’affaire : tous les enfants lui sont retirés en un jour – et il est vraisemblable que Chappuzeau ait accepté de trahir Morus, qui logeait alors chez lui. soit contre de l’argent, soit contre la promesse d’une situation.
11La communauté protestante a constitué un véritable cadre d’accueil pour cet homme de lettres à la recherche d’une situation à Paris. Cette affaire montre l’un des leviers par où s’activent les solidarités protestantes : le pasteur joue ici un précieux rôle d’intermédiaire. Elle révèle aussi les débouchés qu’offrait à un écrivain l’insertion dans le milieu des notables réformés de la capitale. Débouchés dans l’enseignement d’abord : il est probable que l’offre éducative parisienne n’était pas à la hauteur des demandes des familles protestantes. Certes, les protestants parisiens avaient obtenu en 1616 le droit d’ouvrir des petites écoles à Charenton17. Certes, un collège protestant avait été fondé en 1609 à Clermont-en-Beauvaisis, où l’on enseignait « la langue latine, grecque, l’escriture, l’arithmétique, la musique, la rhétorique, la dialectique et la logique »18. Or, éloigner les enfants de la demeure familiale pendant les études était considéré comme bénéfique au XVIIe siècle, et c’était l’un des avantages que l’on voyait à l’institution collégiale19. Il n’en reste pas moins qu’il n’existait pas à Paris d’académie pour les protestants, et s’il y avait des cas de jeunes huguenots envoyés dans les collèges catholiques20, le prestige de l’institution et de l’éducation reçue primant alors sur la différence religieuse, bien d’autres familles protestantes devaient refuser cette solution. D’où la pension imaginée par Morus, dont le fonctionnement reposait apparemment largement sur les épaules de Chappuzeau.
12Celui-ci est donc devenu régent, sans abandonner son activité d’auteur puisqu’il cherche à faire patronner par un notable protestant sa dernière production. En ces temps d’actif mécénat royal, on voit par cette affaire combien continuaient à compter, au moins pour toute une frange de seconds couteaux du monde des auteurs parisiens – et sans qu’il y ait une coupure absolue entre eux et les écrivains plus en vue et mieux pensionnés – les réseaux de patronage constitués au sein des élites urbaines. Chappuzeau tente de les mobiliser à son service, en usant au mieux des particularités locales : à Lyon, il avait fait vibrer la corde de la fierté municipale en s’adressant avant tout, dans Lyon dans son lustre, aux échevins (catholiques) tandis qu’à Paris sa tentative de percée s’appuie sur des réseaux confessionnels.
13Lorsqu’il vient déposer devant le consistoire de Charenton, Chappuzeau est toujours dans la même logique : il entreprend de réfuter les accusations lancées contre lui par Morus et ses amis et défend ainsi sa réputation, afin de conserver un crédit au sein de la communauté protestante qui est vital pour lui. Ses récits, dans lesquels il se met abondamment en scène, révèlent que l’enquête sur Morus a offert une tribune au pauvre homme de lettres pour s’expliquer sur ses agissements, mais aussi pour lancer un appel au secours adressé aux protestants de Paris. Chappuzeau, dans ses dépositions, raconte en effet par le menu sa carrière, insiste sur l’honorabilité de sa famille, sur sa propre moralité irréprochable, sur les spoliations dont il a été victime, sur ses difficiles responsabilités de chef de famille, et sur ses hautes compétences. Morus lui reproche notamment d’être un homme de lettres sans dignité : « que je fais des comédies & des farces et notamment le collimaillard & que mon nom est affiché au coin des rues »21. Face à cette accusation, il se défend ainsi :
Il pourroit aussi bien vous [Morus] dire Messieurs que j’ay mis au jour des ouvrages bien plus considérables que cela, & des ouvrages de piété & d’instruction qui ont esté générallement bien receuz, & où j ’ay incéré pour lui un éloge avantageux, qui me fit alors des ennemis, que j’ay traduit les entretiens familiers d’Erasme avec un peu de succez & enfin sans parler de mes autres productions, que tandis qu’il a servi le public de sa langue, je l’ay servi de ma plume, que par une fausse modestie, je ne puis nommer tout à fait mauvaise puisqu’elle me fournit en partie de quoy subsister. Si mon nom est affiché aux carrefours, le nom de quelques autres autheurs reputez tres-gens de bien & d’honneur y paroit aussi, quoy que je leur cede à tous la gloire de mieux écrire. Je ne fais pas seulement des pièces comiques, qui sont les plus difficiles ; je travaille aussi au grand & au sérieux, & mes poèmes sont trouvez assez bons pour estre recitez devant le roi. Je vous avoue pourtant Messieurs que la seulle nécessité, & la crainte que j’ay de tomber sur les bras de mes amis m’a fait entreprendre des ouvrages de théâtre, où je trouve quelques emolumens ; mais pour les quels j’ay une aversion naturelle, & a quoy je ne penserois jamais si j’avois lieu d’occuper ma plume a escrire quelque belle histoire ou a coucher des lettres ou a quelque autre chose de cette nature, d’où je pusse tirer quelque utilité22.
14Chappuzeau, passé dans l’histoire littéraire comme le premier historien du théâtre, ne défend guère ici un art auquel il déclare ne s’adonner que pour faire bouillir la marmite, et faute de charge plus honorable. Il vante certes ses productions, mais dans le but de trouver un emploi auprès d’un haut personnage, pour lequel il se plairait à « coucher des lettres ». Sa déposition elle-même peut être comprise comme un service de plume rendu aux adversaires de Morus, et rétribué comme tel. Chappuzeau, bien entendu, se défend d’être un traître, mais s’il a bien été récompensé pour sa dénonciation des actes du pasteur, ce travail entre dans le cadre des multiples tentatives de ce « Rousseau du ruisseau » avant la lettre pour vivre de sa plume et tenter de s’insérer dans la société parisienne, via la communauté protestante23. Toutefois l’affaire Morus semble avoir porté un coup de grâce à ses projets d’installation durable dans la capitale : il ne tarde pas à quitter la ville, et poursuit une carrière errante entre Genève, Lyon, Munich, Turin et Paris.
Jean Daillé : un pasteur écrivain
15L’un des protagonistes essentiels de l’affaire Morus est Jean Daillé, le plus ancien et le plus connu des pasteurs de Charenton, qui a d’abord été un fervent partisan du ministre controversé, et le principal artisan de sa venue à Paris, avant de se retourner contre lui et de mettre tout son poids dans la balance pour le faire condamner. Cette influence et cette renommée, on les mesure d’ordinaire au moyen des éloges qui lui sont décernés en dehors même de la communauté protestante, par des écrivains catholiques. Mais ce sont plutôt les éloges d’écrivains, publiés dans des ouvrages du temps, qui ont été un facteur essentiel de promotion de la figure de Jean Daillé. y compris parmi les protestants. Il faut dire qu’il n’a cessé de manifester sa proximité aux écrivains mondains de son temps, et c’est cet effort de conformité qui a été payé par des éloges, notamment par ceux de l’épistolier Jean-Louis Guez de Balzac, écrivain qui jouissait d’une très grande renommée. Les deux hommes sont entrés en contact par l’intermédiaire de Valentin Conrart, et depuis les années 1630, ils ne cessent de s’échanger leurs productions, or les recueils de sermons de Daillé, par exemple, sont toujours accueillis très favorablement par l’épistolier. Les lettres de Guez de Balzac adressées à Daillé ou parlant de lui circulent largement, sous forme manuscrite d’abord dans les milieux lettrés parisiens, avant que leur rassemblement en recueils imprimés ne contribue à diffuser plus largement encore la figure du pasteur, à l’exemple de cet extrait d’une lettre à Conrart du 13 juillet 1653, dans laquelle il évoque une visite de Daillé :
Véritablement, ce furent de ces heures dont tous les moments sont precieux, & que j’estime plus, sans comparaison, que des années entières [...] Il me rendit tant de tesmoignages d’amitié ; il me parla tant de vous ; il me dit de si bonnes choses, & me les dit si bien, que je vous advouë. que jamais conversation ne me satisfit plus que celle-là, ni ne laissa dans mon esprit de plus belles, ni de plus agréables images24.
16Balzac vante ici la conversation du pasteur exactement dans les mêmes termes que celle d’hommes de lettres « ordinaires », catholiques ou protestants. Il tire ainsi la figure de Daillé vers celle d’un écrivain mondain. Du reste, les quelques lettres qui nous restent de Jean Daillé ne démentent guère cette image. Voici par exemple ce qu’il écrit à un pasteur de La Rochelle, Taudebarratz, à propos d’un ami commun avec lequel Daillé échange des livres :
Faites luy cependant mille baisemains treshumbles de ma part & vous informez si luy ou Coulomnier ou quelque autre de vos gens qui se meslent de livres ne pourroient point m’accomoder d’un 7 & 8 tomes de S. Jerosme d’impression de Basle 1565 ou d’un 4e de Paris en 1533 comme aussy du I & 3. tome du Platon Grec Latin de Serranus fol°. Mais c’est trop vous parler de ces objets de ma passion & il est raisonnable que je vous parle de la vostre dont l’entretien vous sera infiniment plus agréable. Les vers qu’elle vous a inspirés sont dignes de vous et d’elle ; il n’y a que l’occasion & le sujet qui m’en deplaist. Car sera-t-il toujours dit que vous aurez à vous plaindre de l’éloignement de ces beaux yeux ? La Lyonne sera-t-elle toujours lyotme le temps et la patience qui viennent à bout de toutes choses ne l’apprivoiseront-ils pas ? [...] Si j’avois une aussi heureuse veine que vous je ferais icy bien des vers a sa louange25…
17Daillé se révèle ici un bibliophile doublé d’un écrivain galant, d’un pasteur qui ne rechignerait pas à écrire des vers à la louange d’une dame. Cette mise en scène de lui-même comme écrivain féru de bonnes lettres – ce qui est attendu d’un pasteur – mais aussi de belles-lettres – ce qui l’est moins – est enfin confirmé par la Vie de Jean Daillé publiée par son fils Adrien. Très proche de son père qui l’avait fait nommer comme ministre à Charenton au début des armées 1660, il promeut vraisemblablement dans ce récit une représentation de la carrière de Jean Daillé conforme à ses vœux. Or, s’il s’étend longuement sur sa piété et l’application envers son ministère, le portrait qu’il trace de lui ressemble à s’y méprendre à celui d’un professionnel des lettres. Lorsqu’il raconte l’enfance de son père par exemple, Daillé fils insiste non sur sa vocation religieuse, mais sur sa vocation lettrée :
Il ne commença que tard à étudier le Latin, parce que son Pere le destinoit aux affaires, dans la pensée de luy laisser sa Charge. Mais il falut ceder à l’inclination que la Nature luy avoit donnée pour les Lettres, & qui dés qu’il seût un peu lire, luy faisoit devorer avec une avidité incroyable, tout ce qui luy pouvoit tomber entre les mains, de livres françois26.
18Non seulement Jean Daillé est attiré par les lettres, mais il « dévore » des livres en français, ce qui indique une attirance forte pour les belles-lettres. C’est donc par les ouvrages profanes qu’il en vient à l’étude, d’abord dans un collège de Saint-Maixent en Poitou, puis à Saumur. Dans la suite de son récit, Adrien Daillé accorde une très large place à la fonction de secrétaire remplie par son père auprès de Philippe Duplessis-Mornay, et notamment à son rôle de publicateur de ses mémoires27. Par ailleurs Adrien Daillé évoque longuement les publications de son père et indique que, parmi les manuscrits qu’il laisse, figure « un petit écrit sur l’instruction d’un enfant qu’on veut nourrir dans les belles lettres »28. Dans le dernier ouvrage de la Vie, qui est intitulé « Qualités personnelles de M. Daillé. Conclusion de l’Ouvrage », Adrien Daillé brosse le portrait d’un honnête homme aux antipodes du savant enfermé dans son cabinet comme du théologien austère, et le rend conforme à tous les topoi positifs de l’homme de lettres :
Son entretien étoit doux et facile ; car il s’accomodoit à la portée de tout le Monde, & les personnes du commun trouvoyent leur conte avec luy, de mesme que les plus relevez et les plus doctes. Comme il avoit une lecture fort vaste & fort melée, il fournissoit amplement à toutes sortes de conversations, & sur quelque sujet qu’on le mist, il trouvoit toujours de quoy satisfaire la compagnie [...]. Et il ne paroissoit pas moins dans une partie de promenade ou de divertissement honneste, que dans une Conference de gens de Lettres, ou dans une Assemblée de Ministres et d’Anciens. Sa piété n’estoit ni severe ni sauvage, & il ne croyoit pas qu’il fust defendu de rire. Il n’estoit pas ennemy de la douce raillerie ; &. ceux qui s’y entendent, disent qu’il y reüssissoit quelquefois de bonne grâce. Il n’estoit pas comme beaucoup de savans, qui lorsqu’ils sortent de dessus leurs livres, ont accoustumé d’estre tout mornes & tout chagrins ; mais pour luy au contraire, quand il avoit esté attaché le plus fortement à la méditation, il n’y paroissoist plus dés qu’il avoit passé la porte de son cabinet [...]. C’estoit pourtant ses livres & ses estudes qui faisoyent sa principale récréation, & ses plus grandes délices. C’estoit là qu’il se delassoit de son travail avec plaisir, & avec proffit tout ensemble29.
19Habile en la conversation, goûtant le « divertissement honneste » et les assemblées d’hommes de lettres, Daillé père est ici vanté avant tout pour l’alliance de son savoir avec ses qualités mondaines. Son fils peut alors logiquement conclure son portrait en lui décernant la qualité d’écrivain :
C’est ainsy que cet Ecrivain bien instruit dans la Science du Royaume des Cieux savoit mettre en œuvre les choses nouvelles & les anciennes dont il faisoit amas de tous costez ; & il seroit à souhaiter qu’il fust demeuré plus long tems au Monde ; afin de pouvoir produire dans la lumière publique, celles qui sont encore cachées dans son cabinet, qui est le trésor où il les accumuloit30.
20Adrien Daillé entérine la promotion du terme d’« écrivain », qui désigne désormais au XVIIe siècle un auteur dans le sens le plus laudatif du terme, et l’applique significativement à son père, préparant peut-être ainsi la publication imprimée des opuscules restés inédits de celui-ci31.
21Jean Daillé a donc construit et fait construire une image de lui-même qui correspondait à celle des écrivains parisiens qu’il fréquentait. Ce phénomène renvoie à la puissance du mouvement d’affirmation des belles-lettres dans ces mêmes années tel qu’il a été décrit par Christian Jouhaud et Alain Viala, un mouvement qui tend à imposer non seulement de nouvelles normes formelles et linguistiques, mais aussi de nouvelles images de ce que doit être un homme de lettres32. La production protestante n’est pas restée à l’écart de ce mouvement, en premier lieu parce que les élites de Charenton lisaient aussi des ouvrages de belles-lettres, ensuite parce que les producteurs d’ouvrages de piété ou de controverse protestants subissaient eux-mêmes l’attraction des belles-lettres, d’autant qu’ils écrivaient dans un contexte de concurrence avec des auteurs catholiques eux-mêmes profondément marqués par les belles-lettres. Pour autant, une telle description tend à présenter comme inévitable l’attirance pour le modèle de l’écrivain, et à faire de pasteurs tels que Jean Daillé des récepteurs passifs de ces nouvelles normes. Or il faut bien plutôt considérer qu’un Jean Daillé s’est fait écrivain dans la même période qu’un Guez de Balzac, par exemple, avec plus ou moins les mêmes armes que lui, et une réflexion identique à propos de la logique d’un tel choix. Les compliments de Balzac à Daillé, s’ils se présentent comme des cadeaux octroyés par un puissant auteur à un pasteur reconnaissant, mettent Balzac enjeu dans l’une des fonctions essentielles de l’écrivain de ce temps, celui de fabricateur de réputations, et Daillé use bien de lui comme tel, et en connaissance de cause. Le pasteur contribue du reste lui-même en retour à la construction de la réputation de Balzac, au moyen de ses propres pratiques d’écrivain.
22La construction d’une telle réputation est probablement tournée avant tout vers le monde protestant lui-même. Les pasteurs étaient, dans une certaine mesure, en concurrence les uns avec les autres, et de fréquentes controverses partageaient en outre le monde des ministres. Dans ces polémiques sur des questions théologiques ou morales, les réputations des protagonistes étaient mises en jeu, si bien que les écrits de controverse étaient aussi des vecteurs de la construction de représentations affrontées du bon pasteur, notamment à travers la définition de rapports différents à l’écriture et aux belles-lettres. En 1645, André Rivet, théologien français installé en Hollande où il jouit d’une position d’autorité par sa proximité au prince d’Orange, reçoit une lettre de l’un de ses parents parisiens, qui formule le jugement suivant à propos de Daillé :
Il est tenu pour le plus élégant prédicateur qui soit aujourd’ huy en France. J’ay ouï parler de son stile à quelques-uns de Mrs de l’Académie, qui l’estiment parfait et voudraient bien que sa Profession ne l’empeschat point d’estre de leur Compagnie33.
23À l’époque, Daillé et Rivet sont engagés, au sein de camps opposés, dans la controverse sur la grâce universelle qui partage les protestants de tous les pays d’Europe34, si bien qu’une telle louange, qui agrège définitivement Daillé au monde des belles-lettres symbolisé par l’Académie française, prend sens dans un contexte polémique où l’on se renseigne sur la réputation – et les soutiens – de l’adversaire.
24Les pasteurs de Charenton – Laurent Drelincourt, Jean Claude, Michel Le Faucheur, écrivains à l’instar de Daillé – sont donc partie prenante d’un mouvement qui définit de nouveaux rapports entre intellectuels et élites (protestantes comme catholiques) rassemblées dans l’orbite de la cour : ces intellectuels ne peuvent plus se contenter de voir leur identité définie par les corps auxquels beaucoup d’entre eux continuent à appartenir – le corps des pasteurs en l’occurrence. Pour réussir pleinement leur carrière, les ministres se font écrivains, c’est-à-dire adoptent les nouvelles normes de l’éloquence – et de fait l’éloquence de la chaire est chez les protestants pensée de plus en plus souvent selon les canons des belles-lettres –, les nouvelles normes de publication de leurs travaux, et enfin une identité de pasteurs hommes de lettres, ce qui suppose de leur part une mise en valeur de leurs qualités mondaines35.
Valentin Conrart, auteur protestant
25Valentin Conrart (1603-1675) avait noué dès les années 1630 une étroite alliance avec Jean Daillé, puis avec son fils, qu’il confirme solennellement dans son testament de 1666 :
J’ai toujours eû une estime, & une tendresse très-particulières, pour M. Daillé le fils, mesme dès son enfance ; & je reconnois aussi, qu’il m’a toûjours beaucoup aymé, aussi-bien que M. son Père, pour qui j ’ay toujours toute la vénération qui est deûe à un mérite aussi rare, & aussi extraordinaire que le sien. Je les supplie tous deux de me continuer leur amitié jusqu’à ma fin, & d’aggréer, pour témoignage de la mienne, que ce que j ’ay des œuvres de Savonarole en divers volumes italiens (qui est presque tout ce qu’il a fait en cette langue-là), passe de mon cabinet, dans leur Bibliothèque, pour leur y estre un souvenir de moy36.
26Le legs des œuvres de Savonarole en italien place résolument cette amitié sous le signe de la complicité de lettrés, et cette complicité s’est manifestée à plusieurs reprises publiquement : elle y prend alors forme d’un échange de légitimité. En témoigne la Vie de Jean Daillé par son fils où Conrart occupe une place de choix, comme le montre ce récit relatif aux derniers moments du pasteur de Charenton :
Le Vendredy soir qui suivit cette derniere Action, il ne sortit du logis que pour aller dans le voisinage chez l’illustre Monsieur Conrart son intime amy & l’homme véritablement selon son cœur, dont la charmante conversation faisoit l’une des principales douceurs de sa vie, & de l’affection duquel il se glorifioit à juste titre, n’y ayant jamais eu de liaison plus estroite ni plus indissoluble, que celle qui a toujours esté entr’eux depuis leur première connoissance. Il sembloit qu’il vouloit prendre congé de ce cher Ami, & comme s’il eust eu quelque pressentiment que ce devoit estre leur dernier Adieu, sa visite fut plus longue que de coûtume, & il ne se retira qu’après un entretien de deux heures, le plus agréable du monde37.
27Leur dernier échange est significativement dépeint comme un « entretien » « agréable » entre amis, loin de l’entretien érudit comme de la relation de pasteur à fidèle : on retrouve là la manière dont Balzac vantait le pasteur. Conrart est donc lui aussi appelé à témoigner de ce que Jean Daillé était un homme de lettres capable de s’adresser à un public varié, aux antipodes de l’image de sévérité savante accolée aux ministres.
28Quinze ans plus tôt, Jean Daillé avait dédié un recueil de sermons imprimés à Conrart, et il s’agissait pour lui de se placer ainsi sous la protection d’un représentant éminent des belles-lettres :
Il est bien vrai, Monsieur, qu’en vous les dediant je leur procure un passeport fort advantageux, les faisant courir sous la faveur de vôtre nom, qui est celebre dans le monde des belles lettres, & reconnu & chéri par les plus polis & les plus estimés esprits de ce siècle, & qui se voit mesme gravé avecque l’honneur, qu’il merité, en divers endroits de leur plus nobles ouvrages38.
29Dans la suite de l’épître, Daillé développe le thème de l’amitié étroite qui le lie à Conrart, cette amitié avec un homme de lettre reconnu apparaissant comme légitimante en soi. En retour, il utilise sa propre autorité de pasteur pour décerner un brevet de piété à l’académicien, et l’ériger en notable de la communauté réformée :
Pour moi. Monsieur, ce qui m’en touche & qui m’en ravit le plus, c’est que le fonds, qui soûtient toutes ces belles qualités, est une piété solide ; qui se justifie clairement par la fermeté de sa constance au milieu des tentations, & des scandales du monde, & par l’admirable douceur de sa patience dans les maladies, que la providence vous a assignées pour l’exercice ordinaire de vôtre vertu. le louë nostre Seigneur de ce qu’estant tel vous estes des nôtres ; & je regarde les graces, qu’il vous a données, comme des joyaux, dont il a voulu orner nostre eglise39.
30La relation entretenue avec Daillé est tout à fait emblématique du rôle que s’est donné Conrart à l’articulation du monde des auteurs et de la communauté protestante parisienne. Il a en effet fondé sa position sociale sur une activité d’intermédiaire de publication40. Il est devenu un homme de lettres reconnu non pas grâce à sa production – il a peu écrit et très peu publié – mais en rendant des services à des libraires et surtout à des écrivains41. Il revoit les manuscrits de ses amis, suit pour eux le processus d’impression de leurs ouvrages, et après leur parution, s’attache à les promouvoir auprès de son vaste réseau dans la république des lettres et dans les milieux mondains parisiens. Cette activité est soutenue par des positions institutionnelles : celle de secrétaire de l’Académie française à partir de 1635, encore qu’il s’agisse d’une institution peu active et mal établie au début de son existence ; celle d’officier du roi surtout. Conrart est en effet secrétaire du roi depuis 1624, et il s’est spécialisé, à la grande Chancellerie de France où ces officiers mettent au propre les actes royaux, dans la délivrance des privilèges d’impression qui sont obligatoires pour qu’un ouvrage imprimé puisse voir le jour. S’il rend là encore service à ses amis écrivains, Conrart se trouve en même temps, par cette activité, partie prenante du dispositif de contrôle du monde des lettres mis en place par Richelieu et le chancelier Séguier à partir des années 1630, et il y a là un élément capital dans l’autorité d’homme de lettres qu’il s’est acquise.
31Conrart a mis son activité de publicateur au service de la communauté protestante. Il conseille les pasteurs de Charenton lorsque ceux-ci envisagent de faire imprimer leurs écrits et, comme on l’a vu, travaille à leur réputation, soit directement dans ses propres lettres, soit en se faisant leur intermédiaire auprès d’écrivains réputés tels que Guez de Balzac. Il fait publier des pamphlets anti-jésuites, ou bien les mémoires de Duplessis-Mornay en Hollande, grâce à son réseau parmi les libraires et les théologiens protestants installés aux Provinces-Unies. Et dans les années 1660 et 1670, il aide à faire connaître les doléances qui montent de la province contre la politique anti-protestante de Louis XIV : dans ses papiers se trouvent des plaintes manuscrites émanant par exemple des protestants du Poitou, et qui sont corrigés de sa main. Enfin il a pris une part active à l’effort de modernisation des textes sacrés protestants.
32La volonté de moderniser la Bible ainsi que le psautier huguenot s’inscrit dans la lignée de l’exégèse saumuroise, conduite par un souci de clarté et par la volonté de s’écarter d’une traduction vieillie pour se rapprocher du texte biblique originel. Elle correspond aussi à l’attraction exercée par le champ littéraire sur le monde des pasteurs parisiens, ainsi que leurs alliés saumurois, dans un contexte de vive concurrence avec les catholiques. Conrart est ici parfaitement à son affaire, en tant que spécialiste du beau langage, mais aussi en raison de ses nombreuses relations parmi les auteurs catholiques – tels que son cousin Antoine Godeau, évêque de Vence, ou les jansénistes – qui se livrent en même temps au même travail. Depuis le milieu du siècle, les pasteurs parisiens multiplient les critiques contre la Bible de Genève, qui est en usage en France, en se plaignant notamment de ce qu’elle n’est jamais remise à jour, et que les éditions en sont fautives. Cette volonté de révision se heurte aux réticences des protestants du Midi et de l’Ouest, mais aussi d’une partie des réformés d’Ile-de-France, attachés à la spécificité des traductions protestantes, et qui se méfient des nouveautés venues de Charenton42. La question de la langue est devenue un enjeu de légitimité pour les pasteurs parisiens, forts de leur supériorité dans ce domaine, et qui en jouent auprès des provinciaux. Au synode de Loudun de 1659, il est décidé de confier la surveillance de toutes les entreprises de révision au consistoire de Charenton, relayé par le synode d’Île-de-France. C’est là une reconnaissance du rôle moteur des Parisiens dans ce domaine mais, pour lui faire contrepoids, est créé un comité national chargé de veiller aux travaux du consistoire. Les membres en sont recrutés sur tout le territoire des églises réformées de France43.
33En 1664, Laurent Drelincourt, autre pasteur de Charenton, envoie un long mémoire à Esaïe Colladon, premier syndic de la République de Genève, dans lequel il se plaint des nombreuses fautes que comportent les éditions de la Bible genevoise, et mentionne des essais de correction en cours à Paris44. Cette première action, restée semble-t-il sans réponse, est relayée à partir de 1667 par Valentin Conrart, dans une série de lettres adressées à Turrettini, autre théologien érudit de Genève : il y incite les autorités genevoises à réagir à l’offensive janséniste dans le domaine de la traduction des textes sacrés par une révision de la Bible genevoise. Il propose que Paris participe à une telle entreprise45. En réalité, au moment où a lieu cet échange épistolaire, Conrart a déjà pris en main une édition révisée du Nouveau Testament, qui paraît en 1669 chez Antoine Cellier. L’avertissement, dû à Conrart et Adrien Daillé, explique les buts de l’entreprise :
En effet, ceux qui ont mis la main à cette édition n’ont point eu d’autre but, lorsqu’ils y ont travaillé, que celui que le savant et célèbre Robert Estienne exprime dans la préface de sa Bible françoise de 1559. C’est que les changements qu’il avait entrepris de faire dans la traduction ordinaire, n’étaient qu’en attendant que dieu, par sa bonté, y pourvût, et qu’il donnât le moyen à d’autres à qui il avait fait plus de graces, de mettre la main à un tel œuvre, et de s’y employer totalement. Mon travail, ajoute-t-il, pourra servir à ébaucher l’ouvrage, en attendant que Dieu le fasse entreprendre par tels ouvriers qui le puissent amener à perfection. Ce n’est donc pas qu’ils aient prétendu, par leurs soins, de donner des lois à personne, ni de fixer notre version à leurs paroles. Ils ont seulement espéré que leurs avances, aussi bien que celles que l’on avait faites avant eux, seraient des acheminements à ce qui reste à faire ; et ce qu’ils ont tenté, des essais qui exciteront les personnes capables de cet important travail, à contribuer quelque chose à l’exécution des ordres du dernier synode national de Loudun, pour voir bientôt une parfaite édition de notre Bible française46.
34On remarque la prudence des correcteurs, qui inscrivent leur travail dans la lignée du synode de Loudun et présentent leur travail comme un « essai », prélude à une « parfaite édition de notre Bible française ». Malgré toutes ces précautions, l’édition de Daillé et Conrart fut censurée au synode provincial d’Île-de-France tenu à Charenton en 1671, au motif que cette entreprise n’avait pas été commandée par le synode précédent47. Selon Orentin Douen, le véritable motif de la censure tient à cette tension entre les pasteurs d’Île-de-France et leurs collègues de Charenton, jugés trop indépendants à l’égard de la hiérarchie réformée48. De fait, Conrart a assis son influence sur l’Église réformée de France grâce à une étroite alliance avec les pasteurs parisiens, mais celle-ci semble s’être retournée contre lui dans cette affaire : il a été finalement renvoyé à son statut de particulier.
35Aussi va-t-il adopter une autre méthode pour faire publier le psautier huguenot révisé par ses soins, qui constitue le grand œuvre des dernières années de sa vie. Selon une anecdote fameuse rapportée par son premier biographe, Ancillon, l’idée de ce travail lui serait venue alors que, chantant les psaumes dans sa maison, il aurait été raillé à propos de l’archaïsme de leur langue par un académicien passant sous ses fenêtres49. Vraie ou fausse, l’anecdote est révélatrice du type de légitimité reconnue à Conrart pour mener à bien cette entreprise : c’est bien en académicien, spécialiste du beau langage, qu’il s’attache à ce travail. On sait qu’il n’eut pas le temps de le mener à bien, et que c’est seulement après sa mort, en 1677, que paraissent les cinquante premiers psaumes qu’il a retouchés50. Dans l’« Avertissement », le publicateur des psaumes, La Bastide, collaborateur de Conrart à la fin de sa vie, met en valeur la double légitimité sur laquelle est assis le travail de son ami. Il rappelle d’abord que celui-ci a été incité à mener à bien cette tâche par les autorités synodales :
Il y a déjà quelques années que feu Monsieur Conrart se proposa de retoucher la versification Françoise de nos Psaumes, pour tâcher de l’accomoder aux changemens que le tems & l’usage ont apportez à nôtre langue. Il y fut d’abord excité par des personnes de merité, dont il consideroit les avis ; et, dans la suite, la pluspart de nos Synodes [la liste de ceux-ci figure en marge], ayans eu connoissance de son dessein, ils l’en loüerent par leurs Lettres & par les actes de leurs Assemblées, & l’exhorterent en même tems à l’executer le plutôt qu’il pourroit, comme une chose qu’ils jugeoient très souhaitable pour la pieté, très utile & tres necessaire pour l’édification de ceux de nôtre communion51.
36Mais La Bastide rappelle aussi l’amitié de Conrart avec Jean Chapelain, célèbre critique et homme puissant dans le monde des auteurs de son temps et avec Antoine Godeau, lui-même auteur célèbre de paraphrases de psaumes :
C’est icy un ouvrage de pieté, où l’on ne doit chercher que la gloire de Dieu & la consollation de la conscience : mais on doit par tout ce témoignage à la mémoire d’une personne aussi illustre que luy, & particulièrement sur le sujet dont il s’agit maintenant, qu’avec de grandes lumières d’esprit, & de jugement, & une probité & une honéteté tres-exacte, il avoit une longue habitude pour les choses de la pieté, des liaisons fort étroites & un commerce continuel avec un très-grand nombre de personnes d’esprit & de merité, & enfin une connoissance tres-particuliere de la pureté & de la politesse de nôtre langue. C’est de luy & de feu Monsieur Chapelain que [en marge : dans la préface de sa paraphrase sur les Psaumes] Monsieur Godeau entend parler, sous le nom de deux de ses excellens amis, qui luy avoient si fort aidé à corriger sa paraphrase sur les mêmes Psaumes52.
37On voit ici comment la réputation de Conrart comme correcteur des ouvrages de ses amis écrivains est réinvestie pour légitimer son travail de révision du psautier huguenot. Toutefois, Conrart avait probablement, dans ce cas, bien davantage ménagé, par rapport à la publication du Nouveau Testament, la communauté réformée. Une série de brouillons de lettres de 1675 adressées à différents synodes provinciaux ayant eu lieu cette année-là montre qu’il a orchestré une véritable campagne de publicité pour obtenir l’approbation des synodes53. Au synode de Vitry d’avril 1675, il envoie un cahier de son travail, afin qu’il soit examiné par les députés :
Vous y verrez, messieurs, un essay des changemens que j’ay taché de faire aux vers des Pseaumes qui se chantent dans nos Eglises, & vous jugerez si j’ay eû le bon-heur de répondre en quelque sorte, aux espérances que vous avez conceuës, qu’ils pourroient ne leur estre pas inutiles. Pour moy, Messieurs, je ne vous dissimule point, que c’est avec quelque honte, que j’expose à des yeux aussi clair-voyans que les vostres, un ouvrage où ma foiblesse m’a fait laisser tant de defauts, quoy que j’aye employé beaucoup d’années, & toute l’application dont je suis capable, à les diminuer ; mais je vous croy trop équitables, pour me les attribuer tous, & pour ne considérer pas les bornes étroites où j’ay esté contraint de me renfermer pour garder le sens de l’original ; la mesure & le genre des vers, à cause du chant, & autant qu’il a esté possible, les rymes, & le stile mesme de nostre vieille version, de peur de scandaliser certaines personnes scrupuleuses, qui se font si j’ose dire une idole de l’Antiquité, puisqu’elle leur est vénérable, jusques dans les choses ridicules. Je souhoiterois. Messieurs, que les importantes occupations ausquelles vous serez obliges d’employer le peu de temps que vostre Assemblée durera, vous pussent permettre de corriger mes corrections54...
38Conrart, tout en adoptant fermement une position « moderne » et en fustigeant ceux qui « se font [...] une idole de l’Antiquité », n’en marque pas moins beaucoup de déférence à l’égard du synode, ainsi que la volonté de suivre point par point la procédure d’approbation des ouvrages en vigueur au sein des églises réformées de France.
39Publier les psaumes – et tenter de publier le Nouveau Testament – a certes obligé Conrart à se plier aux exigences des autorités protestantes. Cependant, le cadre protestant est aussi celui qui lui a donné la possibilité de se rapprocher le plus de la ligure d’un auteur. En ce sens, son identité protestante est ce qui a permis à Conrart de devenir un homme de lettres accompli, qui aurait pu voir son nom imprimé sur la page de titre d’un livre s’il n’était mort avant d’avoir achevé son travail. Certes, il ne s’agissait que d’une entreprise de révision et de modernisation d’un texte dont il n’était pas l’auteur, mais cette tâche n’était pas si différente de celle des traducteurs dont il avait soutenu les entreprises des années 1630 aux années 1650. Deux raisons principales expliquent que Conrart ait pu devenir une figure d’auteur dans le cadre protestant. En premier fieu, en tant qu’homme de lettres, il jouissait probablement d’une légitimité supérieure auprès des protestants qu’auprès des catholiques, du simple fait que sur le terrain protestant il disposait de moins de concurrents : le secrétaire de l’Académie française est devenu pour les réformés le symbole de l’homme de lettres. En second lieu, apparaître comme un auteur en publiant une version modernisée des textes sacrés réformés, en raison de la visée pieuse de l’entreprise, et de son encadrement par les institutions protestantes, garantissait Conrart contre les dangers que lui faisait encourir l’adoption d’une position d’auteur, celle de paraître chercher à se fabriquer un vain nom par sa plume, voire à vivre de celle-ci, alors même que Conrart se voulait un bon bourgeois parisien introduit dans les milieux aristocratiques : si ces activités nous permettent de le qualifier de professionnel des lettres, s’il s’est présenté lui-même comme un homme de lettres, il entendait par là une identité aux antipodes de celles d’un auteur contraint de vivre de sa plume.
40À la mort de Valentin Conrart, en 1675, ses héritiers ont fait imprimer des vers à sa louange : leur auteur, qui n’avait donc pas perdu tout contact avec la société protestante parisienne, n’est autre que Samuel Chappuzeau. qui a été rétribué 33 livres tournois pour ce travail55. Du poète à gage au service des élites protestantes parisiennes à un membre de ces élites qui, grâce aux belles-lettres, fréquente les plus grands noms de l’aristocratie réformée de la capitale, en passant par un pasteur qui, pour sa renommée de pasteur, s’est fait homme de lettres : s’il s’est agi dans cet article de montrer la prégnance des belles-lettres dans le monde protestant parisien, les trois cas présentés révèlent comment ce que signifie être écrivain et ce que signifient les belles-lettres est travaillé par chaque littérateur en fonction de sa situation sociale. Mais dans tous les cas, l’écriture apparaît comme un instrument précieux pour modeler une identité réformée qui apparaît elle-même comme plurielle, et comme continûment construite par les acteurs sociaux selon des logiques qui sont loin d’être uniquement religieuses.
Notes de bas de page
1 Roger ZUBER, Les « Belles Infidèles » et la formation du goût classique, réed. Paris, Albin Michel, 1995, p. 255-265.
2 Voir le privilège de librairie pour L’Endimion de Gombauld (Paris, Nicolas Buon, 1624) : « Nostre bien aymé Nicolas Buon. Marchand Libraire en nostre Ville de Paris ; nous a fait remontrer qu’il a recouvert un livre intitulé l’Endymion, composé par le sieur de Gombauld, pour l’embellissement duquel, & pour satisfaire au désir de la Reyne, nostre tres-honorée Compagne & Espouse : il a fait tailler plusieurs belles figures en taille douce, pour lesquelles il luy a convenu faire de grandes despences... ».
3 Panégyrique à Mgr le cardinal duc de Richelieu, Paris, A. Courbé, 1633.
4 Lettres de Gombauld, Paris, Augustin Courbé, 1647 ; Les Épigrammes de Gombauld divisées en trois livres, Paris, A. Courbé, 1657.
5 Amsterdam, P. Lanclume, 1669. L’« Avertissement » (n.p.), dû à Conrart, explique benoîtement ce changement : « Ceux qui ont connu feu Mr de Gombauld, savent que ses discours de Religion étoyent de tous ses Ouvrages ceux quil estimoit le plus. Il les avoit composez par un pur motif de charité, dans le dessein de faire connoître la vérité à ceux qui étoyent dans l’erreur, & d’affermir dans la bonne créance ceux qui y étoyent nez, ou qui l’avoyent embrassée [suit la liste de ses ouvrages de religion avec leurs dates de composition]. Je ne diray rien du sujet qui l’a obligé à garder ces exellents Écrits dans son Cabinet. Sa plus grande passion étoit de les rendre publics, parce qu’il étoit persuadé qu’ils seroyent utiles [...]. Mais quand on aura remarqué dans ces Ouvrages, la ferveur de ce zèle, & quand on saura d’ailleurs, que sa subsistance dépendoit presque indispensablement de la Cour, on ne trouvera plus étrange qu’il ne les ayt pas fait paroistre durant sa vie ».
6 Roger ZUBER, « Calvinisme et classicisme. L’activité littéraire des réformés au XVIIe siècle », XVIIe siècle, n° 76-77, 1967, p. 5-22 ; du même, « L’Art épistolaire et les protestants », (de Henri IV à Pierre Bayle), La Pensée religieuse dans la littérature et la civilisation du XVIIe siècle en France [Colloque de Bamberg, 1983], Paris-Sealtle-Tubingen. P.F.S.C.L., Biblio 17, n° 13, 1984, p. 226-251.
7 Le Theatre français divisé en trois Livres, où il est traité I. De L’Usage de la Comédie. II Des Auteurs qui soutiennent le Theatre. III. De la Conduite des Comédiens, Lyon, Michel Mayer et Paris, René Guignard, 1674. Sur la carrière d’auteur de Chappuzeau, voir l’article de Déborah BLOCKER, « Publier la gloire du théâtre françois », dans G.R.I.H.L., De la Publication. Entre Renaissance et Lumières, Paris, Fayard. 2002, p. 193-210.
8 Procès-verbal du synode de Berry du premier juillet 1664, Bibliothèque de l’Arsenal (désormais Ars.), Recueil Conrart (désonnais RC) 4121, p. 1287.
9 Ce récit d’après Eugène et Émile HAAG, La France protestante..., [1846-1855], Genève, Slatkine reprints, 1966, tome 7, p. 543-548 ; et les documents des recueils de Conrart. Pour un exposé plus complet de l’affaire Morus, voir Nicolas SCHAPIRA, Un Professionnel des lettres au XVIIe siècle. Valentin Conrart une histoire sociale, Seyssel, Champ Vallon, 2003, p. 319-337.
10 Pour Messieurs du consistoire de l’église réformée de Paris À Paris le 15 juillet 1662, Ars, RC 4121, p. 1140.
11 Pour Messieurs..., Ars, RC 4121, p. 1144-1149.
12 Pour Messieurs..., Ars, RC 4121, p. 1160.
13 A Messieurs Messieurs les Pasteurs & Anciens du Colloque assemblé à Charenton, Ars, RC 4121, p. 1277-1284.
14 Lettre sans titre de Chappuzeau du 3 septembre 1667, Ars., RC 4121, p. 1277-1284.
15 Pour Messieurs..., Ars., RC 4121.
16 « Quinze jours apres ou environ, comme j’ay tiré de ma plume une bonne partie de ma subsistance, je mis sous la presse la version des colloques d’Erasme ; & led sieur dans la rencontre me proposa de les dedier à Mr de Lorme, qu’il vouloit me servir auprès de luy & m’y procurer de l’advantage », Pour Messieurs..., Ars. RC 4121, p. 1133.
17 Jacques PANNIER, L’Église réformée de Paris sous Louis XIII (1610-1621), Paris, Champion, 1922. p. 228.
18 Jacques PANNIER, L’Église réformée de Paris sous Henri IV, Paris, Champion, 1911. p. 528.
19 Marie-Madeleine COMPÈRE, Du collège au lycée (1580-1850), Paris, Gallimard-Julliard, coll. « Archives », 1985, p. 104-105.
20 Jacques PANNIER, L’Église réformée sous Louis XIII, op. cit., p. 229.
21 A Messieurs Messieurs les Pasteurs..., Ars. RC 4121, p. 1230.
22 A Messieurs Messieurs les Pasteurs..., Ars., RC 4121, p. 1230-1231.
23 Robert DARNTON, Gens de lettres, gens du livre, Paris, Odile Jacob, 1992.
24 Lettre XVI du livre XXVI, Les Œuvres de Monsieur de Balzac, divisées en deux tomes, publiées par Valentin Conrart, Paris, L. Billaine. 1665, tome 2, p. 978.
25 Lettre de Jean Daillé à M. Taudebarratz, ministre à La Rochelle, du 2 mars 1661, Bibl. S.H.P.F., Ms. 759 (II), Collection d’autographes.
26 « Vie de Jean Daillé », in Les deux derniers sermons de Mr Daillé, prononcez à Charenton, le jour de Pasques, 6 avril 1670, et le jeudy suivant. Avec un abrégé de sa vie, & le catalogue de ses œuvres, Genève, Jean Ant & Samuel De Tournes, 1671, p. 4.
27 « Vie de Jean Daillé », in Les deux derniers sermons..., op. cit., p. 13-14.
28 « Vie de Jean Daillé », in Les deux derniers sermons..., op. cit., p. 49.
29 « Vie de Jean Daillé », in Les deux derniers sermons..., op.cit., p. 78-80.
30 « Vie de Jean Daillé », in Les deux derniers sermons..., op.cit., p. 83. C’est Adrien Daillé qui souligne.
31 Alain VIALA, Naissance de l’écrivain. Sociologie de la littérature à l’âge classique, Paris, Minuit, 1985, p. 277.
32 Christian JOUHAUD, Les Pouvoirs de la littérature, Paris, Gallimard, 2000 ; Alain VIALA, Naissance de l’écrivain, op. cit.
33 Lettre de Pineau à André Rivet du 20 mai 1645, cité par François LAPLANCHE, L’Écriture, le sacré et l’histoire. Érudits et politiques protestants devant la Bible en France au XVIIe siècle, Amsterdam et Maarssen, Holland University Press, 1986, p. 562.
34 François LAPLANCHE, Orthodoxie et prédication. L’œuvre d’Amyraut et la querelle de la Grâce universelle, Paris, PUF, 1965.
35 Nicolas SCHAPIRA, « Carrières de pasteur, carrières d’écrivain au XVIIe siècle : le cas de Jacques Couët-du-Vivier », Bulletin de la Société de l’Histoire du Protestantisme Français, tome 150, avril-juin 2004, p. 257-281.
36 Testament olographe de Valentin Conrart, 1666, Archives Nationales, Réserve du minutier central.
37 « Vie de Jean Daillé », in Les deux derniers sermons..., op. cit., p. 57.
38 Vingt Sermons de Jean Daillé sur divers textes de l’Écriture..., Geneve, P. Chouët, 1653, épître dédicatoire « À Monsieur Conrart... », n.p.
39 Ibid.
40 Sur cette notion, voir G.R.I.H.L., De la Publication. Entre Renaissance et Lumières, études réunies par Christian JOUHAUD et Alain VIALA, Paris, Fayard, 2002.
41 Les éléments sur Conrart viennent de Nicolas SCHAPIRA, Un Professionnel des lettres, op. cit.
42 Tout ce développement d’après François LAPLANCHE, L’Écriture, le sacré et l’histoire, op. cit., p. 552-553 et p. 561-563.
43 Françoise CHEVALIER, « Le synode national de Loudun (décembre 1659-janvier 1660) d’après les témoignages du commissaire du Roi Jacques Collas de la Madelène et du pasteur Jacques Couet du Viviers », B.S.H.P.F., 1996, p. 237-238. Sur la censure protestante, cf. Jean FLOURET, « L’édition de livres protestants à La Rochelle », Revue française d’histoire du livre, 1997, N° 96-97, p. 309-314.
44 François LAPLANCHE, L’Écriture, le sacré et l’histoire..., op. cit., p. 563.
45 Lettre à Turrettini du 30 décembre 1677, in Claire-Éliane ENGEL, « Valentin Conrart et Port-Royal », B.S.H.P. E, tome LXXXVI, 1936, p. 30-34.
46 Avertissement cité in Orentin DOUEN, La Révocation de l’Édit de Nantes..., op. cit., tome 1, P 298.
47 Procès-verbal du synode provincial d’Île-de-France réuni à Charenton, cité par Orentin DOUEN, La Révocation de l’Édit de Nantes..., op. cit., tome 1, p. 299.
48 Orentin DOUEN, op. cit., tome 1, p. 300.
49 Charles ANCILLON, Mémoires concernant les vies et les ouvrages de plusieurs modernes célèbres dans la République des Lettres par M. Ancillon, Amsterdam, chez les Wetsteins, 1709, p. 101-102.
50 Le Livre des Psaumes en vers français, par Cl. Marot et Th. De Bèze, retouchés par feu M. Conrart, ... (et A. de La Bastide), Première partie, Charenton, A. Cellier, 1677.
51 Le Livre des Psaumes..., op. cit., « Avertissement », n.p.
52 Ibid.
53 Lettres de Conrart au synode de Vitry du 26 avril 1675, au synode de Saintonge, d’Aunis & d’Angoumois de mai 1675, et au colloque des Églises de la souveraineté de Sedan, Raucourt & c. du 22 may 1675, Ars. RC 7463, f° 1-2.
54 Lettre de Conrart au synode de Vitry du 26 avril 1675, Ars., RC 7463, f° 1.
55 Archives Nationales, Minutier central, ét. XXXIX, 137, 16 août 1677 : compte d’exécution testamentaire. Jacques Muisson et Jacques Conrart.
Auteur
Université de Paris-Est
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