Jupiter chez les Convènes (Pyrénées centrales) dieu romain ou dieu aquitain ?
p. 95-132
Texte intégral
1Entre 1987 et 1990 fut découvert aux limites occidentales de la cité des Convènes, dans les Pyrénées centrales1 (fig. 1), un vaste établissement antique dont une petite partie seulement fit l’objet de fouilles. Les ruines ainsi dégagées furent attribuées à une ample uilla qui aurait été édifiée au milieu du IIe siècle sur des vestiges plus anciens et occupée, avec ce que cela suppose de transformations et de modifications, jusqu’au IVe siècle au moins. Les fouilleurs portèrent l’essentiel de leur attention sur un petit ensemble thermal, qui fut donné comme le balnéaire de cette uilla. Et c’est dans l’espace de service de ces thermes, dans un secteur qui subit en son temps de profonds remaniements, que fut mis au jour ce qu’ils appelèrent un « petit oratoire ». Y furent retrouvés dans un contexte fort perturbé, entre autres objets, trois autels votifs dont l’un était gravé d’une dédicace Fulguri deo. Si vingt années plus tard l’ensemble de la fouille n’a toujours pas été publié, en 2006 paraissaient, dans le même temps et sans que leurs auteurs ne se fussent concertés, deux interprétations différentes de la nature de ce dieu foudre.
2La première de ces propositions fut le fruit d’une analyse strictement épigraphique, publiée au sein d’une suite d’études consacrées aux vestiges architecturaux, numismatiques, fauniques et à la céramique de cette « chapelle antique »2. Mises bout à bout, de manière cloisonnée, ces études ne suscitèrent aucune tentative de synthèse ; et à défaut de vision d’ensemble, l’étude épigraphique prit naturellement le pas sur les autres contributions3. Ces vestiges furent ainsi considérés comme les ruines d’un lieu de culte privé, consacré à un Jupiter local, régulateur des événements météorologiques, honoré dans un contexte agro-pastoral, ou du moins rural. Et la dénomination particulière du dieu, où l’épithète devenait théonyme (alors que les dédicaces à Jupiter fulgur ou fulmen mentionnent de façon systématique le nom de Jupiter) permit en outre d’avancer l’hypothèse selon laquelle se jouait avec deus Fulgur une étape intermédiaire dans un processus d’interpretatio entre un dieu pyrénéen et le Jupiter romain4.
3La seconde interprétation fut proposée dans un article qui tentait, dans le cadre d’une réflexion plus générale, d’associer plus étroitement études épigraphiques et analyses archéologiques afin de définir, ou d’essayer de définir, la structure théologique de la cité. Cet article présentait, en conclusion et à titre d’exemple, une interprétation de ce lieu de culte bigourdan fondée sur la prise en compte de l’ensemble des vestiges et de leur caractère d’exception, tel que celui-ci apparaissait à la lecture des rapports de fouilles5. Il suggérait de reconnaître dans cet « oratoire » un puteal, cet endroit où la foudre était symboliquement enterrée selon un rite romain, et d’identifier dans ce deus Fulgur, bien que la formule consacrée f(ulgur) c(onditum est) n’eût pas été formellement exprimée (ou conservée), l’expression (locale mais romaine) d’un tel acte d’enfouissement.
4Mon propos n’est pas, dans le cadre du sujet qui nous occupe ici, de savoir qui a tort et qui a raison ; le dossier mériterait, avant toute conclusion définitive, une minutieuse relecture. Il est de revenir sur les interprétations épigraphiques du Jupiter convène, qui tentent, comme pour le supposé « Jupiter de Pouzac », de faire de manière systématique du Père des dieux une divinité que les multiples fonctions, dont on la charge, auraient conduite à s’associer, à côtoyer puis à remplacer tout dieu indigène ; et de débattre de la validité de telles entreprises.
I. Remarques préliminaires
5Mais deux remarques préalables sont ici nécessaires. Et, comme nous l’avons déjà souligné ailleurs avec les mêmes mots, elles sont destinées « aussi bien à montrer les limites de la démonstration qu’à prévenir des critiques que justifierait l’absence de ces précautions »6.
6La première d’entre elles concerne l’unicité des sources qui nous sont accessibles. Exceptées quelques inscriptions publiques du début du IIe siècle, trouvées au chef-lieu de cité, qui apportent quelques informations laconiques ne concernant, d’ailleurs, que le domaine particulier des hommages à l’empereur et à Rome7, le texte votif gravé sur des autels est le seul recours pour celui qui s’intéresse à l’histoire des religions antiques convènes. Il peut paraître alors paradoxal de tenter une approche de la structure des cultes d’une ciuitas en ne se fondant que sur des textes religieux qui relevaient des cultes privés, dont la pratique ne répondait pas aux règles qui régissaient les cultes communs de la cité. La dépose d’un tel objet dans un sanctuaire et les rites qui devaient accompagner cet acte étaient en effet des gestes religieux d’ordre privé, exempts de contrainte officielle.
7La seconde concerne les dédicaces elles-mêmes. Malgré leur grand nombre dans les Pyrénées centrales, elles ne suppléent ni la pauvreté des renseignements d’ordre archéologique, ni les lacunes des informations de caractère historique que l’on pourrait attendre d’elles. Et si l’épigraphie s’efforce, en vain, de proposer des critères de datation pour des textes que caractérise une formulation trop concise associant un théonyme, le nom du dédicant et une formule de consécration, très répétitive et fortement stéréotypée, l’archéologie peine toujours à placer, pour deux raisons majeures, ces autels dans le temps. L’une tient au processus de récupération et de réutilisation des marbres antiques qui a, de l’Antiquité au Moyen Âge, de l’époque moderne à l’époque contemporaine, pour des raisons propres à chacune de ces périodes, provoqué le déplacement d’un bon nombre de ces autels et brouillé la piste de leur origine. Cette dispersion des autels convènes, dont l’origine est souvent limitée au nom de la commune sur le territoire de laquelle ils ont été retrouvés, obscurcit notre perception du paysage cultuel institutionnel antique et contribue beaucoup à l’impression de parcellisation des cultes antiques. L’autre résulte d’une recherche archéologique désordonnée que des échanges, des achats, des vols ou simplement l’inattention ont parfois transformée en désastre et cela jusqu’à une date récente. Enfin si, aujourd’hui, quelques fouilles ont permis la découverte d’autels votifs, ces derniers ont toujours été mis au jour dans des contextes très perturbés à l’image des sept autels dédiés à Jupiter, trouvés à Saint-Bertrand-de-Comminges, qui sont issus de couches de destructions tardives et de zones de récupération de matériaux8.
II. Jupiter chez les convènes
8Parmi la soixantaine de divinités, romaines et indigènes, que l’on connaît dans la ciuitas Conuenarum, Jupiter est assurément le dieu qui fut le plus à l’honneur. Cinquante-trois dédicaces lui sont consacrées9 (annexe 1) ; il précède ainsi largement un autre dieu romain, Mars, mis à contribution trente-quatre fois, et quelques dieux indigènes, comme Leherennus en Ariège, Erge à Montsérié ou Erriappe à Saint Béat, que des découvertes souvent exceptionnelles ont placés (par le nombre) aux meilleures places de ce panthéon foisonnant. En 1931, lors d’un premier recensement réellement exhaustif du panthéon « gréco-romain » convène10, Jupiter apparaissait déjà, en tête de liste, comme le dieu le plus représenté dans cette cité des Pyrénées centrales. Les découvertes faites depuis lors n’ont guère modifié les rapports de cette suprématie : un autel votif inscrit sur sept est consacré à Jupiter.
9À cette indéniable prééminence, s’ajoute une seconde caractéristique qui accentue la supériorité du Père des dieux par rapport à toutes les autres divinités : il domine, bien entendu, le panthéon urbain avec treize inscriptions, mais il occupe aussi, en un maillage serré, l’ensemble du territoire, que ce soit dans les plaines et les collines du nord de la cité ou dans le piémont et les vallées de la montagne, au sud (fig. 2). Hors la ville, son nom est ainsi recensé dans une trentaine de sites ; et il devance largement Mars et un dieu aquitain ou gaulois, Abellio, que les dédicaces dispersées, pour chacun d’entre eux, dans huit lieux de la cité semblent toutefois devoir placer parmi les divinités d’influence11.
10À l’exception d’un autel où l’effacement des lettres n’autorise pas de leçon assurée (annexe 1, 54), cinquante-trois autels permettent une lecture incontestable du théonyme (fig. 3). Parmi ceux-ci, une très écrasante majorité – 92 % d’entre eux – invoque Jupiter sous son appellation romaine abrégée, I(upiter) O(ptimus) M(aximus).
11Deux de ces dédicaces se distinguent du lot commun par l’ajout d’une épithète ou d’une épiclèse : on recense ainsi un autel consacré I(oui) O(ptimo) M(aximo) Beisirisse, qui aurait été trouvé à Cadéac en vallée d’Aure et qui est aujourd’hui perdu, et un autre dédié I(oui) O(ptimo) M(aximo) auctori bonarum tempestatium, découvert à Lescure en Ariège. Par deux fois aussi Jupiter très bon et très grand est associé à d’autres divinités : Junon et Mercure au chef-lieu de cité, Lugdunum, d’une part, à des dii ceteri à Siradan, dans la haute vallée de la Garonne, d’autre part.
12Enfin, on remarquera que Jupiter n’est invoqué que trois fois sous son théonyme complet, Iupiter. Dans ce cas de figure, il porte une fois l’épithète salutaris et est par deux fois pourvu de l’épithète deus, lorsqu’il est honoré seul sur un autel dépourvu d’origine certaine, et lorsqu’il est associé avec Minerve sur un autel issu de Marignac (bassin de Saint-Béat).
13On notera encore que le chef-lieu a livré un autel gravé d’une formule abrégée DOIM pour D(eus) O(ptimus) I(upiter) M(aximus), où manifestement le lapicide ou le commanditaire s’embrouillèrent dans l’ordre des initiales.
III. Interpretation du Jupiter convène
14Pour fastidieuse que puisse paraître cette tenue des comptes, elle semble toutefois montrer, dès l’abord, que si la manière de « nommer le dieu » a un sens12, la présence presque « universelle » de Jupiter très bon et très grand sur le territoire convène devrait être comprise comme la mainmise d’un dieu romain sur le Comminges pyrénéen.
15De fait, Raymond Lizop, dès 1931, ne s’y était pas trompé lorsqu’il proposa de voir en Jupiter un dieu romain chargé par « l’autorité romaine » de faire « le lien moral et religieux »13 entre Rome et des populations pyrénéennes que la bigarrure de leur panthéon semblait entacher d’un fort particularisme. Cette interprétation s’appuyait sur l’examen attentif des noms des dédicants et la reconnaissance de leur qualité d’indigènes ; et allait à l’encontre des idées de Jules Toutain pour qui, à en croire R. Lizop, ces dévotions à Jupiter étaient l’expression d’un culte pratiqué par des fonctionnaires, des commerçants, citoyens et affranchis, étrangers au pays14. Toutefois R. Lizop, encore fortement imprégné des thèses de ces illustres prédécesseurs dont Camille Jullian15, n’en concluait pas moins que la préséance de Jupiter en territoire convène ne pouvait trouver sa véritable raison que dans l’engouement des populations locales pour un « culte des vents et des phénomènes atmosphériques » qu’il prétendait faire « figurer au nombre des principaux cultes indigènes »16 ; il admettait de la sorte, de façon contradictoire avec son idée première – celle d’un Jupiter officiel –, qu’un processus rudimentaire d’interpretatio était la raison essentielle de la notoriété de Jupiter en pays convène.
16Une trentaine d’années plus tard, l’idée que le Jupiter commingeois cachait une double personnalité semblait devoir être acquise, solidement fondée, crut-on, sur des découvertes archéologiques. Au début des années 1960, en effet, fut mis au jour, à 1541 m d’altitude, au pic Tourroc, point culminant du massif du Sacon17, un beau lot d’autels votifs trouvés hors de tout contexte précis18. Parmi ces autels, un seul, aniconique, portait une inscription fragmentaire, les autres, anépigraphes, étaient ornés de bustes et de motifs végétaux (arbres ou feuilles).
17Bien que le texte fût très effacé, les inventeurs de ce beau site, Georges Fouet et André Soutou, crurent pouvoir lire une dédicace faite I(oui) O(ptimo) M(aximo). Et forts de cette lecture, ils estimèrent être en mesure de discerner dans les traits fortement érodés des bustes anonymes un Jupiter jeune, imberbe et énergique, qui, non conforme aux images du Jupiter classique, généralement mature et barbu, fut tout naturellement donné comme un Jupiter local. Pour faire bonne mesure, les motifs végétaux furent identifiés comme étant à la fois des représentations d’arbres sacrés, qui portaient le souvenir d’un culte de la végétation antérieur à la romanisation, et l’image de uerbenae romaines, ces rameaux portés en couronne par les prêtres, tandis que les svastikas, rouelles et autres fleurons qui décoraient bases et couronnements de ces mêmes autels furent, en un vaste amalgame, reconnus comme des motifs solaires.
18Ainsi la personne du « Jupiter du Sacon » devint le prototype d’un Jupiter pyrénéen doué d’une double nature : celle d’une divinité importée, le Jupiter romain de l’Esquilin, et celle d’un Jupiter local, de tradition aquitaine préromaine. Sur de tels fondements se développèrent deux interprétations du culte au Père des dieux, qui, bien qu’elles s’accordassent sur le rôle fédérateur de la divinité, divergèrent sur les raisons de son succès.
19Pour l’une19, le « Jupiter aquitain » était bien cette divinité double, à la fois indigène, protectrice de la végétation, garante d’abondance, et romaine, maîtresse du ciel et des éléments, dispensatrice des bienfaits de la nature. Cette personnalité binaire justifiait alors pleinement la présence du dieu au point le plus élevé du mont Sacon, là où quelques bergers auraient d’eux-mêmes aménagé un sanctuaire et entretenu un culte. Selon cette opinion, la grande ferveur que les Convènes manifestèrent envers Jupiter ne pouvait se concevoir qu’au travers de la dévotion envers des divinités locales, dont l’assimilation aurait été favorisée par le rôle protecteur primordial accordé au Père des dieux ; un tel élan prouvant, de manière plus générale, que sous des cultes romains se profilait la permanence de cultes indigènes.
20Selon l’autre20, Jupiter était à la cime d’une montagne convène l’exact équivalent du summus excellentissimus et du deorum princeps romain. Vu sous cet angle, le culte au Jupiter du mont Sacon ne devait plus être considéré comme une dévotion d’ordre privé, laissée à la bonne volonté de quelques montagnards, mais comme un culte public, pratiqué dans un sanctuaire inscrit dans la liste des publica sacra. Les raisons majeures des modifications de la vie religieuse seraient donc à chercher dans les changements politiques et institutionnels dictés par la romanisation. Et si l’obligation d’un devoir religieux envers l’empereur et les dieux officiels de l’Empire avait donné naissance dans certaines régions au culte impérial, dans d’autres, comme les Pyrénées centrales, c’est une dévotion nouvelle envers Jupiter compris comme pouvant être le garant de la cohésion de la cité, qui se serait plus volontiers développée.
IV. Essai sur la personnalité du Jupiter convène
21Pour notre part, la lecture de cette unique dédicace étant trop incertaine, l’implantation au mont Sacon d’un Jupiter, et plus encore d’un Jupiter isolé, ne nous paraît de loin pas assurée21. Les fondements des deux démonstrations sont bien trop fragiles pour permettre d’asseoir avec autant d’assurance deux propositions aussi contradictoires, données, chacune, comme le paradigme de la dévotion envers Jupiter en territoire convène. N’y aurait-il pas d’autres explications, ou compléments d’explications, à la notoriété exceptionnelle du Père des dieux dans la ciuitas Conuenarum ? Tentons d’y voir plus clair.
IV. 1. Ce que suggère la localisation des autels
22R. Lizop, qui en 1931 recensait vingt-neuf inscriptions convènes consacrées à Jupiter, observait qu’une majorité d’entre elles étaient issues de la vallée pyrénéenne de la Garonne, entre Saint-Béat et Saint-Bertrand-de-Comminges, et de la vallée de la Barousse, les autres étant dispersées (sans ordre apparent sous-entendait-il) dans le reste du territoire22. La répartition des vingt-quatre autels complémentaires aujourd’hui répertoriés en territoire convène donne un peu plus de poids au chef-lieu de la ciuitas, au bassin de Saint-Béat et à quelques autres sites comme Valentine et Saint-Plancard, mais elle ne modifie pas fondamentalement celle relevée par R. Lizop.
23Si ce dernier estimait que la prépondérance des autels à Jupiter dans les deux vallées de la Garonne et de la Barousse était la conséquence d’une forte influence du chef-lieu très romanisé sur son territoire proche, en 1997, en un mouvement inverse, Christian Rico faisait des carrières de Saint-Béat un puissant centre de romanisation et des marmorarii et autres lapidarii les promoteurs du culte à Jupiter, dont la diffusion aurait profité de celle du marbre23. Certes la répartition des autels Ioui dans la ciuitas Conuenarum répond à celle de l’ensemble des autels convènes sur le territoire. Mais il n’y a rien en cela de particulier – et cette observation est presque une lapalissade. Que les autels, comme d’ailleurs d’autres marbres, affichent une forte présence dans la partie de la haute vallée de la Garonne, qui mène le fleuve du bassin de Saint-Béat (où se situent un carrefour de voies et les carrières de marbre) au chef-lieu de la cité n’a rien de rédhibitoire. Qu’ils se fassent plus rares – ou plus petits – à mesure que l’on s’éloigne à la fois des carrières et de la voie fluviale qui en permet un transport facile, n’a rien d’étonnant24. La diffusion des marbres est tributaire de la proximité des zones d’approvisionnement et cela vaut donc pour les autels votifs en général et pour ceux consacrés à Jupiter en particulier.
24En revanche, on notera comme un fait marquant la présence presque exclusive des autels consacrés à Jupiter dans la vallée de la Barousse, que d’aucuns attribuèrent là encore à l’influence qu’aurait exercée le chef-lieu de cité sur son proche arrière-pays25. Mais il s’agit là d’une explication par défaut, dans la mesure où les autels ne peuvent être rapportés à leur véritable contexte. Et se contenter de dire que Jupiter fut présent « jusque dans les vallées les plus reculées »26 n’est pas une observation juste, moins encore une réponse, car cela procède d’une vision subjective du paysage moderne, qui ne tient pas compte des caractéristiques de l’occupation antique du territoire.
25Et là est bien le nœud du problème. Les autels à Jupiter sont, qu’ils aient été trouvés en remploi comme la très grande majorité des autels convènes ou qu’ils aient été trouvés au cours de fouilles – ainsi ceux des uillae de Valentine et de Montmaurin, ceux de Saint-Jean des Vignes à Saint-Plancard et même ceux de Saint-Bertrand-de-Comminges –, des pierres errantes dont la dispersion ne connaît guère de règles perceptibles et assurées. Si c’est avouer que nous ne connaissons rien des sanctuaires qui abritèrent un culte à Jupiter, on peut toutefois noter que le culte jovien se concentrait en des lieux fortement romanisés : le chef-lieu de cité, les autres agglomérations comme sans doute celle(s) du bassin de Saint-Béat, Saint-Pé d’Ardet en bordure de la vallée de la Garonne ou encore Saint-Plancard dans les collines du nord de la cité, les uillae (Montmaurin, Valentine), le secteur inexploré de Siradan et de Bagiry au contact de la Barousse et de la Garonne dans le piémont. Et l’on peut alors supposer, dans l’attente de confirmations archéologiques, que la dispersion des autels baroussais pourrait être le reflet d’une structure d’exploitation plus fragmentée qu’ailleurs pour des raisons topographiques, mais non moins romaine, ou romanisée, que celle des grandes propriétés foncières que l’on prête au Nébouzan27. Toujours est-il qu’il ne faut pas croire que ces autels étaient disséminés sur un territoire indigène, sauvage et reculé, qu’il aurait fallu mener à la romanisation.
IV. 2. Ce que nous apprennent les noms des dévots de Jupiter
26Parmi les cinquante-trois autels votifs à Jupiter, onze ne fournissent pas d’indication au sujet des dévots, dans la mesure où les cassures du marbre ont fait disparaître les noms ou rendu illisibles les quelques fragments de lettres qui nous en sont parvenus.
27Sept ou huit autels sont porteurs du seul théonyme et pourraient avoir été offerts publice, par la cité ou toute communauté « citoyenne », selon une hypothèse séduisante mais invérifiable, que l’on doit à William van Andringa28. Un autel seulement a été dédié au Père des dieux par l’ensemble des membres d’une communauté, les pagani Collaies (annexe 1, 47 ; fig. 4), sans que l’on puisse en déduire pour autant, son formulaire étant aussi laconique que celui des dédicaces privées, à quel titre et dans quel contexte, privé ou officiel, il fut dédié.
28Trente-trois autels nous permettent de faire la connaissance de trente-cinq ou trente-six dédicants29 (annexe 2). Treize individus (ou quinze) portent les tria ou duo nomina et peuvent être considérés, à juste titre dans un milieu essentiellement composé de pérégrins libres30, comme ayant appartenu à la communauté des citoyens. Si les citoyens font ici presque jeu égal avec les pérégrins dont le nom est assurément suivi de la mention de la filiation, le nombre de ces derniers pourrait bien s’accroître si la part d’incertitude qui concerne au moins cinq des sept incerti recensés pouvait être levée. Trois dédicaces enfin sont le fait d’esclaves dont l’un, le régisseur Sabinianus, a pu agir au nom de son maître (annexe 2, 38) alors que les deux autres formulèrent des vœux pour le salut de leur(s) maître(s)31.
29Au regard des dédicaces faites aux autres dieux, à Mars par exemple32, les citoyens prennent une large part dans les dévotions à Jupiter. Les noms sont très romains et peu d’entre eux affichent une origine indigène, tels Sénius Conditus, fils de Cingus, dont le gentilice et le surnom ainsi que le nom du père sont résolument aquitains, ou encore Titus Minicius Harbelex qui porte un cognomen d’origine indigène. Les pérégrins, quant à eux, ont conservé un intérêt égal pour les noms d’origines locale et romaine, qu’ils aient offert leur autel en ville comme Silex, fils de [...] et Placida, fille de Consuétus, ou ailleurs comme Annosus, fils de Pompéianus.
30On en conclura donc, sans étonnement, que, dans le groupe des individus qui dans la ciuitas Conuenarum affichèrent leur attachement envers Jupiter, on compte des dévots qui sont parmi les plus fortement imprégnés de romanisation, au rang desquels on rencontre une étrangère, la trévire Clamosa33.
31Une divinité qui dans sa très grande majorité est honorée sous la dénomination la plus romaine qui soit, Iupiter Optimus Maximus, un environnement sans doute éminemment romanisé, des dédicants fortement imprégnés de romanité, l’affaire pouvait sembler entendue. On se demandera alors quelles furent les raisons qui poussèrent certains chercheurs à développer et à défendre une construction intellectuelle dans laquelle les dévotions envers Jupiter furent systématiquement données comme la traduction de cultes à des divinités préromaines.
IV. 3. Ce que laissent entendre les épithètes, épiclèses et les associations
32Qu’un dieu romain pourvu de l’épithète deus cachât une divinité de couleur locale est un argument encore fréquemment employé par ceux qui défendent l’idée d’une « résistance » des cultes indigènes convènes à la pénétration romaine34. Mais cette hypothèse est fortement, et à juste titre, remise en cause et si la présence de cette épithète est le marqueur d’un panthéon provincial, on sait maintenant qu’elle ne désigne pas de manière systématique un contexte local35. L’usage de l’épithète deus n’affecte pas la qualité propre des divinités qui en sont dotées : il est un moyen pour la population indigène de s’intégrer par l’emploi du langage cultuel romain dans le système des représentations de la romanité. L’abréviation DOIM gravée sur un autel trouvé au chef-lieu de cité en est une bonne illustration (annexe 1, 15 ; fig. 5). Offert par une pérégrine dont le nom romain est assez répandu dans les provinces de l’Empire et dont le père porte un nom aquitain, cet objet porte un théonyme qui, tout en situant le dieu dans un contexte romain, témoigne par les erreurs de transcriptions d’un inconfort, plein de bonne volonté, face aux us religieux de la romanité.
33Par ailleurs l’emploi de l’épithète deus est très peu fréquent en pays convène lorsqu’il s’agit de Jupiter36. Par deux fois seulement celui-ci porte cette épithète : sur un autel consacré par une dévote d’origine trévire, Clamosa37 (annexe 1, 1) dont le statut d’étrangère infirme l’interprétation « aquitanisante » de l’usage de l’adjectif deus ; et en association avec Minerve sur un autel offert par un incertus (annexe 1, 45). Que ce dernier se soit adressé, sans préciser les raisons de son choix, à deux des divinités de la triade capitoline, l’une pourvue d’une épithète, l’autre non, contredit à notre sens l’idée que l’épithète qualifiant Jupiter puisse témoigner d’une culture latine imparfaitement assimilée ; l’adjectif paraît ici plus vraisemblablement avoir été utilisé pour accentuer la prééminence du Père des Dieux.
34Honorée avec Jupiter à Marignac, Minerve est curieusement absente de la triade gravée au plat non pas d’un autel mais d’une mensa trouvée en un contexte très imprécis dans le secteur du temple au chef-lieu de cité (annexe 1, 17 ; fig. 6). Elle est en effet ici remplacée par Mercure qui forme avec Jupiter et Junon une triade inhabituelle mais qui est connue en Germanie supérieure38. Et Mercure côtoie Jupiter ailleurs39. Bien que leur association ne soit pas fréquente, on ne peut tirer argument de la rareté et du caractère, disons, « romainement peu réglementaire » de ces rencontres pour déceler dans de telles dédicaces les vestiges sous-jacents de cultes indigènes.
35De facture tout aussi romaine est la dédicace qu’un marbrier, Quintus Védius Silvanus, fit graver à la face principale d’un autel offert I(oui) O(ptimo) M(aximo) et ceteris (annexe 1, 36) ; pour laconique, et peut-être cavalière, que soit cette formule, elle n’en est pas moins parfaitement romaine, et doit être lue comme un raccourci de celle bien connue et référencée ailleurs dans l’ensemble de l’empire, et ceteris diis où il faut entendre sans doute diis deabusque omnibus40. Il apparaît ici clairement que le Jupiter romain est le bénéficiaire premier de cet acte de dévotion et qu’en honorant les dii ceteri le dédicant a sans doute jugé commode et prudent – et aussi plus économique – d’associer au Père des dieux l’ensemble des divinités, sans distinction de rang, régionale ou topique, ni d’appartenance, romaine ou indigène.
36Finalement que le nom de Jupiter puisse être la désignation latinisée d’une divinité indigène repose essentiellement sur deux textes. L’un concerne un Jupiter pourvu, selon l’opinion commune, d’une épiclèse locale, l’autre mentionne un Père des dieux doté d’une épithète peu commune.
37Le premier d’entre eux est une inscription retrouvée en remploi dans l’église de Cadéac en vallée d’Aure (annexe 1, 49 ; fig. 7). Aujourd’hui disparue, elle mentionnait, selon la leçon la plus couramment retenue, un « Jupiter Beisirisse » remercié par un certain Marcus Valerius Potens, membre d’une grande famille de possessores bien implantés en Aquitaine méridionale41, qui aurait ainsi complété le théonyme romain par une épiclèse dont l’origine est indiscutablement aquitaine. Toutefois il faut bien admettre que l’on ignore la signification de cette épiclèse. Faut-il réellement y voir le nom d’une divinité topique – dont aucune occurrence n’est connue ailleurs – assimilée selon un processus que l’on ne connaît en pays convène que pour un seul dieu romain, Mars42 ? Ne pourrait-il s’agir d’un qualificatif formé sur un toponyme, à la manière d’un Jupiter Poeninus ? Ne faudrait-il pas plus simplement encore restituer la lecture I(oui) O(ptimo) M(aximo) (et) Besiriss(a)e et considérer Beisirissa comme le nom d’une divinité féminine associée à Jupiter ?
38Malgré ces incertitudes43, « Jupiter Beisirisse » fut dans un second temps associé à un dieu indigène, Ilun, au prétexte qu’une dédicace à lui offerte aurait été trouvée au même endroit et dans les mêmes conditions. Ainsi une vieille opinion, mal assurée, fortement combattue, mais encore resurgissante44, associait Jupiter et Ilun en un même culte des eaux pour conclure à l’existence à Cadéac d’un lieu de cure antique, dont aucune trace n’a pour l’instant été trouvée mais dont la station thermale moderne, aujourd’hui abandonnée, était, en un raisonnement circulaire, le garant d’une continuité des usages.
39Absolument rien ne permet d’affirmer que ce supposé « Jupiter Beisirisse » et Ilun aient eu un quelconque rapport avec des eaux, ni qu’ils aient été associés en une même structure théologique, ni même qu’ils aient eu une résidence permanente à Cadéac. Le dieu aquitain Ilun semble avant tout avoir été une divinité tutélaire « micro-régionale » d’une vallée voisine, celle de la Layrisse qui, ouvrant sur la confluence de la Garonne et de la Pique, permet l’accès à l’ensemble du Luchonnais où cette divinité est bien attestée et où Jupiter se fait d’ailleurs plus discret45. Qu’une dédicace dédiée à Ilun puisse avoir été trouvée à Cadéac n’a cependant rien qui puisse surprendre : nous le savons, nous sommes confrontés à des dédicaces qui procédaient de la sphère privée, qui ne suivaient donc pas expressément les règles de la religion officielle et qui pouvaient traduire une piété personnelle dont les motifs, trop peu souvent exprimés, purent susciter des rencontres fortuites entre dieux.
40Le second texte concerne un certain Valérius Iustus qui, à Lescure à l’extrémité orientale de la cité, désigna Jupiter très bon et très grand d’une belle et exceptionnelle épithète : auctor bonarum tempestatium (annexe 1, 18 ; fig. 8), dans laquelle on a voulu retrouver l’expression d’une dimension locale du Père des dieux, identique à celle que l’on fit ensuite porter à l’hypothétique Jupiter du mont Sacon46. À l’encontre d’une telle interprétation, on fera deux remarques. La première est que cette épithète, pour exceptionnelle qu’elle soit en pays convène, n’est pas inconnue ailleurs. On peut en effet lire deux épiclèses équivalentes, gravées sur deux autels identiques offerts par un certain Quintus Fabius Catullinus, trouvés à Lambèse en Numidie. L’une des dédicaces fut faite I(oui) O(ptimo) M(aximo) tempestatium diuinarum potenti, l’autre fut dédiée Ventis bonarum tempestatium potentibus47. Si Valérius Iustus a usé plus volontiers du mot auctor plutôt que du qualificatif potens, celui-ci, à l’image du commanditaire des deux dédicaces algériennes, a voulu exprimer son lien avec une divinité souveraine sous l’enveloppe de laquelle ne transparaît aucune divinité locale et signaler une piété envers une divinité céleste dont le « rôle atmosphérique » n’est ni la traduction d’une mentalité « gallo-romaine »48 ni celle d’un caractère aquitain propre. La seconde remarque concerne le dédicant lui-même : il est fort probable que le Valérius Iustus qui exprima sa ferveur en Jupiter par la dépose d’autel dont la superbe est peu courante n’est autre que le Marcus Valérius Iustus qui offrit un autel Fortunae Augustae et dont l’épitaphe aujourd’hui malheureusement perdue nous apprenait qu’il fut l’époux d’une Iulia Paulina, fille de Sergius49. Si Valérius Iustus et Marcus Valérius Iustus désignent bien le même homme, nous pénétrons ici le monde de l’élite convène50, un monde fortement romanisé qui ne manifesta ni attachement particulier ni volonté d’un retour aux traditions anciennes. Au contraire, nous croirions volontiers qu’en faisant usage d’une expression, certes, inhabituelle, Marcus Valérius Iustus voulut marquer son goût pour la romanité et faire montre à la fois de son intégration religieuse et de sa culture littéraire, peut-être puisée aux meilleures sources, celles des bonae tempestates ou de l’egregia tempestas de Cicéron ou encore de l’auctor frugum tempestatumque potens de Virgile51.
IV. 4. Les dédicaces pro salute et Jupiter salutaris
41Dans les années 1930 fut trouvé à Saint-Bertrand-de-Comminges un autel fragmentaire, qui nous apprend qu’Ulpianus s’acquitta de son vœu envers un Jupiter salutaris (annexe 1, 16 ; fig. 9). S’il convient de s’interroger sur la nature du dieu, on ne peut retenir l’hypothèse selon laquelle Jupiter était ici un dieu guérisseur, honoré dans des thermes qui auraient eu une vocation thérapeutique52. Notre autel fut trouvé en remploi dans les murs d’une ferme installée sur les thermes du forum de Lugdunum : sa provenance exacte ne nous est pas connue et rien ne permet d’associer ce fragment à des thermes publics ; c’est ce que nous confirme d’ailleurs la découverte d’autres fragments inscrits de nature variée (dont un morceau d’inscription funéraire) au même endroit et dans les mêmes conditions. Si rien ne vient donc confirmer l’hypothèse d’un Jupiter médecin, celle-ci a toutefois permis à d’audacieux épigraphistes de restituer la suite de la dédicace commingeoise selon quelques lignes empruntées à une inscription d’Aquincum, gravi infirmitate liberatus53, et dans le même mouvement, de donner des idées à un faussaire local qui confectionna une autre dédicace de cet acabit54.
42La notion de salus ne renvoie pas forcément, et seulement, à la santé physique d’un individu, mais aussi à sa sauvegarde et à sa conservation55. On rapprochera donc volontiers ce uotum à notre Jupiter salutaris urbain de deux dédicaces à Jupiter faites pro salute par deux esclaves, l’une provenant de Bagiry, l’autre de Marignac, où Félicissimus d’une part et le régisseur Fortunatus d’autre part agirent respectivement pro salute et pro salute et reditu (annexe 1, 35 [fig. 10] et 41). Rien dans ces dédicaces ne permet d’affirmer que Jupiter salutaris ou remercié pro salute n’était pas honoré dans son acception romaine56.
IV. 5. Le « voisinage » des dieux, une réalité inconfortable
43« Voisinage » est un terme que nous utilisons volontiers pour traduire une réalité assez vague que d’aucuns interprètent comme des « cohabitations » ou des « associations », parfois rassemblées sous le mot d’« assimilation » lorsqu’il s’agit à la fois de dieux romains et indigènes57. Ce « voisinage » concerne des dieux dont les noms ne sont pas associés sur une même dédicace, lorsque les autels sont trouvés hors de tout contexte ou dans des contextes ambigus et dont le seul lien est leur rencontre sur un même territoire communal (annexe 1). Dans de tels cas, nous ne savons pas si ces dieux « voisins » étaient honorés dans un même sanctuaire et nous ignorons – quand bien même admettrait-on qu’ils soient issus des mêmes lieux de culte – la nature des relations qu’ils pouvaient entretenir entre eux : égalitaires ou hiérarchiques, permanentes, transitoires ou éphémères, fortuites peut-être. Que pouvons-nous savoir en effet de la coexistence entre Jupiter et les autres dieux, tous romains à l’exception d’un Ilumber aquitain, qui étaient à l’honneur dans le chef-lieu de la cité ? Quel ordre ramener dans la pléiade de divinités qui gravitaient dans le bassin de Saint-Béat, dieux topiques (Erriappe, Astoilunus), dieux indigènes à l’audience plus large (Abellio, Ilun), dieux romains (Silvain, Fagus, Minerve et Jupiter) ? Quels rapports existaient entre Jupiter, Mars et Sutugius à Saint-Plancard, entre Jupiter, Artahe, Idiatte et les dii Montes à Saint-Pé d’Ardet ? Ces questions restent sans réponses et, au bout du compte, il faut le reconnaître, nous sommes dans l’ignorance totale de ce qu’était la structure religieuse de la cité des Convènes58.
44Quelle valeur, alors, peut-on accorder à la tentative de rapprochement qui fut faite entre Jupiter très Bon et très Grand et le dieu Bouccus, trouvés tous deux hors contexte aux environs de la uilla de Valentine59 ? Elle ne repose que sur un postulat totalement invérifiable : une identité de fonctions des dieux, tous deux étant supposés avoir été les garants de fécondité et d’abondance et être doués de capacités d’adaptation. Ce postulat a ensuite été élargi à une troisième divinité indigène Baicorix ou Buaicorix, dont le nom figurait sur un autel qui fut trouvé sur la commune de Labarthe-de-Rivière, non loin de la même uilla, et qui fut rattaché à cette dernière60. Cette association hasardeuse de Buaicorix, divinité qui aurait eu « toutes les chances d’avoir été un dieu lié à une rivière ou en tout cas aux eaux »61, avec Bouccus et Jupiter permet en fin de démonstration d’offrir le portrait d’un Jupiter au champ d’action illimité, maître des saisons, des biens terrestres, maître du ciel, dieu secourable et protecteur, dieu des sommets et des eaux, et d’en faire un dieu aisément substituable à n’importe quelle divinité indigène de tradition préromaine.
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Jupiter des Convènes, un dieu constitutionnel ?
45Les représentations de Jupiter ne sont pas nombreuses dans les Pyrénées centrales. Quatre autels seulement donnent à voir le Père des Dieux, figé en une représentation strictement faciale. Si, pour trois de ces bustes joviens, les traits, perdus dans la cassure du marbre, ne sont plus discernables, un seul laisse encore entrevoir le visage érodé d’un homme plutôt jeune et imberbe (fig. 11, Hèches). Comme de bien entendu, ces caractéristiques qui ne sont pas celles du Jupiter traditionnel, mature et barbu, furent données comme typiques d’un Jupiter indigène62. Mais c’est oublier un peu vite le caractère très répétitif qu’affichent les rares images divines convènes ; et lorsque celles-ci ne sont pas expressément légendées, il n’est guère possible d’attribuer à ces dieux aux visages indifférenciés une quelconque identité.
46Chez les Convènes, tout porte à croire que le culte à Jupiter s’adressait au dieu capitolin63 : aucun indice ne laisse véritablement entendre que sous un habit romain aurait vécu, ou survécu, un dieu indigène. Le grand nombre d’autels qui sont consacrés au Père des Dieux64 et, plus encore, le nombre élevé de monuments où son nom seul est invoqué, peut-être consacrés publice, semblent devoir indiquer que le culte rendu à Jupiter en pays convène fut un culte fédérateur qu’il faut sans doute compter parmi les cultes officiels de la cité.
47Quand et comment cette piété envers un Jupiter constitutionnel65 se serait-elle diffusée ? C’est là une question à laquelle il est difficile de répondre. Mais, si rien ne permet, comme en Galice, de reconnaître dans la grande notoriété de Jupiter une influence flavienne, « pourvoyeuse de promotion »66, rien n’interdit de penser qu’un processus identique pût avoir été à l’œuvre dans la cité des Convènes, dont le statut juridique reste encore sujet à discussion67.
48Une base (très incomplète) élevée à Trajan, en 100, par un commanditaire inconnu, un piédestal dressé avant 102 en l’honneur de Plotine par un notable local, Caius Iulius Sérénus, qui accéda à l’ordre équestre par la volonté de l’empereur68 et quelques autres morceaux à la « graphie trajanienne », qui mentionneraient une colonia Conuenarum, furent donnés comme les preuves que la cité des Convènes accéda au titre de colonie romaine (honoraire) sous le règne de Trajan. Considérés comme des indices fiables dans un premier temps, remis ensuite en question, ces textes ne sont en eux-mêmes certes pas irréfutables69 ; mais si on leur associe les autels convènes dédiés en nombre à un Jupiter romain, la documentation dans son ensemble pourrait témoigner de la reconnaissance de l’élite locale et peut-être de la ciuitas tout entière envers un empereur généreux – à titre individuel et collectif – envers l’Optimus Princeps, l’élu du Iupiter Optimus Maximus70, dont elles auraient épousé l’idéologie. Que les émissions monétaires trajaniennes au type de Jupiter, témoins du « virement théocratique de l’empereur », ne soient apparues qu’en 11271, une dizaine d’années donc après l’érection, au chef-lieu de cité dans le portique du temple, des hommages convènes, n’aurait rien de rédhibitoire : les premières années du règne portaient déjà les germes de la rencontre entre Trajan et Jupiter.
49La question d’une éventuelle influence trajanienne sur le développement du culte de Jupiter dans la ciuitas Conuenarum reste posée. Toutefois, quand bien même il est difficile de savoir si l’obtention du titre de colonie honoraire eut une influence sur les institutions publiques et religieuses de la cité et leur évolution, quand bien même il est malaisé de déterminer jusqu’à quel point les manifestions du culte privé purent être le reflet de celle-ci, on préférera penser que la diffusion du culte de Jupiter dans les Pyrénées centrales fut liée à une volonté de fusion religieuse fondée sur un dieu qui représentait la puissance de l’Etat, plutôt que de régler la question de l’évolution des cultes dans la cité des Convènes par des aphorismes qui ne sont pas des réponses72, plutôt également que de persister dans les pas d’une recherche trop régionaliste.
ANNEXE 1. Les dédicaces à Jupiter trouvées dans la cité des Convènes
ANNEXE 2. Les dédicants à Jupiter
Porteurs de Tria ou duo nomina
N o | Nom du dédicant | Origine | Particularités du théonyme |
2 | G(naeus) Pompeius Martus | In Conuenis | |
5 | L(ucius) Pompeius Masc(u)linus | SBCaes-Valcabrère | |
11 | Iulia Ingertas | SBCges-Valcabrère | |
18 | VaHerius) lustus | Lescure | / O M auctori bonarum tempestatium |
19 | C(aius) Fab(ius) Lasci(u)us | Castelbiague | |
30 | lul(ius ou a) Primilin(us ou a) ? | Anla | |
31 | Senius Conditu(s) Congi (filius) | Bramevaque | |
33 | T(itus) Minicius Harbelex | Cazarilh-Barousse | |
34 | Antonius Vindemialis | Ilheu | |
36 | Tib(erius) Claud(ius) Rufus | Saint-Pé d’Ardet | |
39 | Q(uintus) Vedius Siluanus marmorarius | Siradan | / O M et ceteris |
49 | M(arcus) Val(enus) Potens | Cadéac | / O M Beisirisse |
50 | Lic(inii ?) Faustu[s] (et) Modesta ou Lic(inia) Fausti [f(ilia)] Modesta | Soulan | |
52 | Valeria l[-]uara | Asté |
Pérégrins libres
N o | Nom du dédicant | Origine | Particularités du théonyme |
1 | Clamosa ciuis trevera | In Conuenis | Deo loui |
3 | Paullus Galli fil(ius) | In Conuenis | |
9 | Silex | SBCges-Valcabrère | |
12 | Nigrinus Apti f(ilius) | SBCges-Valcabrère | |
15 | Placida Consu[eti f(ilia)] | SBCges-Valcabrère | D(eo) O(ptimo) I(oui) M(aximo) |
21 | Titullus Cintugnati f(ilius) | Valentine | |
32 | Annosus Pompeiani (filius) | Cazarilh-Barousse | |
38 | [B]onnu[s][---]suri f(ilius) | Signac | |
51 | Silex Salinis [f(ilius)] | Estensan | |
53 | [A]man[dus] Andosteni f(ilius) | Tarbes |
Esclaves
N o | Nom du dédicant | Origine | Particularités de la dédicace |
35 | Felicissimus Siradi | Bagiry | pro salute dominoru suorum et suorum |
37 | Sabinianus ser(uus) actor | Saint-Pé d’Ardet | |
41 | Fortunatus ac(tor) | Marignac | aram cum hostia u s l m |
Incert
N o | Nom du dédicant | Origine | Particularités du théonyme |
6 | Mansue[tus] | SBCges-Valcabrère | |
7 | Gem[---] | SBCges-Valcabrère | |
16 | Ulpianus | SBCges-Valcabrère | Ioui Salutari |
20 | Seueri[nus] | Lestelle | |
24 | Germanus | Saint-Plancard | |
27 | Secundina | Montmaurin | |
45 | [P]ositus | Saint-Béat | Deo [I]ou(i) et M[i]ner[u(ea)] |
Communauté
N o | Nom du dédicant | Origine | Particularités du théonyme |
47 | Pagani Collaies | Saint-Paul d’Oueil |
Notes de bas de page
1 Le territoire qui est traditionnellement attribué aux Convènes est celui qui se serait resserré, vers la fin du IIIe ou au début du IVe siècle, autour des vallées de la Garonne et de la Neste d’Aure au sud et des bassins supérieurs de la Noue, de la Nère, de la Save et de la Gesse au nord. Antérieurement associés aux Conuenae, les Consoranni (une part du Couserans à l’est [Escudé-Quillet et Maissant 1996, p. 40-44]) et les Bigerionnes (la Bigorre à l’ouest [Lussault 1997, p. 66]) s’en seraient séparés à la faveur de la réforme dioclétienne des provinces de l’empire et se seraient constitués en cités indépendantes. En l’absence de toute possibilité de datation de nos inscriptions religieuses, c’est à l’étendue initiale du territoire convène que nous nous attachons ici, dans une démarche identique à celle utilisée pour notre étude consacrée au dieu Mars : Schenck-David 2010.
2 Vié et alii 2007, p. 539-581.
3 Pour l’analyse épigraphique, cf. la contribution de Fabre dans Vié et alii 2007, p. 546-556.
4 L’article d’Eduardo Artica (« Júpiter en los Pireneos. El mundo religioso vasco-aquitano, una aproximación », Aquitania 27, 2011, p. 151-178), est paru en mars 2012, trop tardivement pour que je puisse ici en rendre compte. On notera avec intérêt que nos conclusions respectives sont diamétralement opposées.
5 Schenck-David 2006, p. 198-201.
6 Ces mêmes observations ont été formulées, de manière plus détaillée, dans Schenck-David 2005, p. 11-14 et plus récemment, dans les mêmes termes, mais de façon un peu plus développée qu’ici, dans Schenck-David 2010, p. 210-212, où l’on trouvera aussi une bibliographie plus complète.
7 Schenck dans Badie et alii 1994, p. 167-199.
8 Pour les plus récents d’entre eux, trouvés dans les dernières années du XXe siècle, cf. Schenck dans Badie et alii 1994, p. 202-203.
9 Nous ne tiendrons pas compte de la dédicace CIL XIII, 14*. Elle est, parmi les inscriptions perdues, celle qui paraît la moins assurée, car elle n’est signalée que par A. Dumège dont on connaît le goût pour l’exagération et parfois le faux (Dumège 1862, 3, p. 175, fig. 15 bis, 5). Elle est rangée parmi les inscriptions fausses par O. Hirschfeld, plus radical que J. Sacaze qui, en 1892, la jugeait douteuse, pour le moins mal copiée ou peut-être « fabriquée » : Sacaze 1892, 215 ; cf. aussi Beyrie et Sablayrolles 2006, p. 427 pour une opinion identique. En outre, nous ne suivrons pas ces derniers qui, à propos d’un autel trouvé à Cierp-Gaud, proposent la lecture [I(oui)] O(ptimo) M(aximo), pour la même raison qu’eux-mêmes refusent celle proposée par J. Sacaze : [De]o M(arti) : Beyrie et Sablayrolles 2006, p. 139-140 ; Sacaze 1892, 300 (= CIL XIII, 51). Ensuite, en ce qui concerne un autel trouvé à Gajan en Ariège, la lecture [I(oui)] O(ptimo) M(aximo) Haloisso initialement proposée est définitivement écartée : CMA-Tlse 2008, 173. Enfin pour mémoire, O. Hirschfeld juge fausses quatre autres dédicaces I(oui) O(ptimo) M(aximo), CIL XIII, 19* à 22*, toutes perdues et donc invérifiables.
10 Lizop 1931a, p. 307-311.
11 Pour les données chiffrées qui concernent Mars, cf. Schenck-David 2010, p. 212-213.
12 C’est bien ce que montrent les textes réunis sous le beau titre « Nommer les dieux » par N. Belayche à qui nous empruntons l’expression (Belayche et alii 2005).
13 Lizop 1931a, p. 310.
14 Toutain 1907, p. 211-213, est cependant plus nuancé, distinguant parmi les dévots de Jupiter un « groupe pyrénéen » constitué certes d’étrangers, les actores des grands domaines, mais aussi des gens du pays, issus de la « bourgeoisie provinciale ».
15 Jullian 1920-1926, VI, p. 35, qui voyait en Jupiter « le successeur latin du Gaulois Taran », mais qui estimait par ailleurs que le Jupiter romain n’avait bénéficié que d’une notoriété d’estime, fondée sur « sa puissance à Rome et ses triomphes dans l’empire ».
16 Lizop 1931a, p. 310-311.
17 Fouet et Soutou 1963, p. 275-294.
18 L’absence de stratigraphie et de tout indice architectural tient sans doute plus aux méthodes expéditives de la fouille qu’à un environnement que les inventeurs du site croyaient avoir de longue date été détruit par l’érosion naturelle et être donc peu susceptible de fournir des informations archéologiques précises.
19 Défendue par Georges Fabre, cette thèse a été développée au long d’une série d’articles : Fabre 1979, Fabre 1981 et 1982, Fabre 1993, et reprise récemment : CMA-Tlse 2008, p. 29. Voir aussi Rico 1997, p. 306 et 307 ; Spickermann 1994, p. 122-124.
20 Tenue par William van Andringa, cette idée est exprimée à plusieurs reprises : Van Andringa 2002, p. 258 et 259.
21 Cf. Schenck-David 2005, p. 88-89, pour une révision de l’inscription, même si L. Rodriguez et R. Sablayrolles affichent leur préférence pour une lecture Deo Ioui : CMA-Tlse 2008, 51.
22 Lizop 1931a, p. 307-308.
23 C’est ce qu’expriment L. Rodriguez et R. Sablayrolles lorsqu’ils évoquent, utilisant de manière un peu abusive, le pluriel « [des] vallées du marbre » : CMA-Tlse 2008, p. 18.
24 Il y a bien évidemment de belles exceptions comme, entre autres exemples, la série des autels tauroboliques de Lectoure.
25 Rico 1997, p. 306 note 37.
26 Sablayrolles 2005, p. 82.
27 Voir à ce sujet les questions posées et non résolues dans Rico 1997, p. 285-289. On se reportera aux conclusions spéculatives, en l’absence de toute enquête archéologique, de R. Sablayrolles relayées par Ph. Leveau : respectivement Sablayrolles 2001, p. 67-68 et Leveau 2009, p. 166.
28 Cf. annexe 1, 10, 13, 28, 29, 40, 42, 44 (pour lequel un doute subsiste) et 48. Il s’agit là de 18 % des dédicaces, un chiffre très supérieur à ce que l’on connaît pour les autres divinités. Van Andringa 2002, p. 261.
29 Nos hésitations sont dues aux difficultés, non résolues, de lecture concernant les autels de Soulan et d’Anla (respectivement, annexes 1 et 2, 50 et 30).
30 CAMD-SBC 1988, p. 11-12.
31 L’un de ces autels offre à la lecture un des très rares textes convènes où la formule de dédicace traditionnelle u s l m est augmentée de la mention de la dépose de l’autel, aram fecit, et d’un sacrifice, cum hostia (annexe 2, 41).
32 Schenck-David 2010, p. 230-231
33 À propos des étrangers, on notera à l’encontre de J. Toutain (notre note 13) que, bien que les trois esclaves portent des noms latins très peu employés en Aquitaine, mais assez communs dans l’empire pour Felicissimus et Fortunatus (respectivement OPEL II, 1999, p. 137 et 151), moins répandu mais encore assez fréquent pour Sabinianus (OPEL IV, 2002, p. 39), rien n’indique qu’ils aient été des étrangers sur le territoire convène. Felicissimus, d’ailleurs, est esclave d’un certain Siradus qui porte un nom qui est un hapax et qui semble bien local.
34 Cf. Fabre 1993, p. 186 pour Jupiter et plus récemment encore Fabre 2003, p. 73 pour Mars. Aussi Sablayrolles 2005, p. 83.
35 Raepsaet-Charlier 1993, p. 12-17. Le Roux 1993, p. 191 (réponse à Fabre 1993). Le Roux 2006, p. 89.
36 Contrairement à ce que sous-entend Fabre 1993, p. 186.
37 Lizop 1931a, p. 202, a abusivement rattaché la dédicace de Clamosa au chef-lieu de cité, Lugdunum, alors que de longue date déjà elle était dite avoir été trouvée en un lieu indéterminé du Comminges. Cf. aussi Fabre 1993, p. 186. Clamosa fut peut-être une de ces curistes attirées par le renom des thermes des Onésiens, comme le furent la Rutène Mania (ou Manulia) Sacra (CIL XIII, 356) et la Séguviave Cassia Touta (CIL XIII, 352) qui, elles, honorèrent les Nymphes.
38 CIL XIII, 6637 (Stockstadt) : la dédicace associe à Jupiter, Junon reine, Mercure et un genius loci.
39 CIL XII, 2589 (Genève), où Mercure est associé à IOM et à Mars, et CIL V, 6594 (Italie, région XI), où il est honoré avec Jupiter OM et des Matronae indulgentes, par exemple.
40 Il suffit pour s’en convaincre de feuilleter les indices du CIL. Pour la formule la plus proche de celle employée par Silvanus, ceteri dii : ILS, 2418 (associés à Jupiter), 3092 (associés à Jupiter et cinq autres divinités), 3597, entre autres exemples.
41 Au sujet de l’implantation de cette famille en Aquitaine : Fabre 2004.
42 Schenck-David 2010.
43 Cf. les hésitations dont G. Fabre se fit l’interprète : Fabre 1993, p. 186 note 77.
44 Proposition de E. Mérimé, à laquelle s’opposa Lizop 1931a, p. 271 et p. 311 note 22. Aussi Lizop 1931b, p. 215 qui fit d’Ilun un dieu en rapport avec la montagne. Mais Fabre 1979, p. 13, note 44 revint à l’idée d’un dieu des eaux. Fabre 1992 p. 69, considérant toujours Ilun comme une divinité des eaux introduisit cependant la distinction entre culte des eaux et activité proprement thermale.
45 Schenck-David 2010, p. 224.
46 Fouet et Soutou 1963, p. 290-291, sont les initiateurs de l’amalgame entre leur Jupiter du Sacon et l’auctor bonarum tempestatium de Lescure.
47 Respectivement CIL VIII, 2609 (= ILS, 3061) et 2610.
48 Cf. à ce sujet Gricourt et Holllard 1991, p. 351-352.
49 Respectivement CIL XII, 7 et 18. Ces inscriptions sont aujourd’hui perdues, mais les lectures qui en ont été faites paraissent fiables : Escudé-Quillet et Maissant 1996, p. 158-159, 132.
50 Cf. notre note 40 à propos de la gens Valeria.
51 Cic., Q. 2, 2, 4 ou Att. 9, 13, 2. Virg., G. 1, 27, même si, en l’occurrence, les deux qualificatifs ne s’adressent pas à Jupiter.
52 Nous suivons ici l’opinion de J. Scheid : Scheid 1992, p. 36-37.
53 CIL III, 5456 = ILS, 3025.
54 Cf. Sacaze 1892, 146, 2 = CIL XIII, 15*.
55 Scheid 1992. Voir aussi Faure et Tran 2013 : dédicace à Jupiter Salutaris (Work in progress : http://univ-poitiers.academia.edu, pour le Corpus des inscriptions de la cité de Valence, ILN VIII). Aussi Rome : CIL VI, 425.
56 À l’opposé Sablayrolles 2005, p. 83.
57 Nous avons déjà abordé cette difficulté avec « Jupiter Beisirisse » et Ilun à Cadéac.
58 On regrette de ne pouvoir tenter pour le panthéon du chef-lieu de cité, ou pour d’autres sanctuaires du territoire, ce que fit J. Scheid pour les dieux du Capitole : Scheid 2005.
59 Fabre 1979.
60 Fabre 1979, p. 12, s’appuyant sur les propos invérifiables de G. Fouet, transfère cet autel de Labarthe-de-Rivière à Valentine alors que Beyrie et Sablayrolles 2006, p. 176, en restent à l’origine donnée initialement par J. Sacaze (Sacaze 1892, 167).
61 Fabre 1979, p. 12-13.
62 Cf. note 46, à propos du Jupiter du mont Sacon.
63 Par deux fois, un foudre (fig. 11, Valentine) et un aigle, sculptés sur les faces latérales, en renforcent le caractère latin.
64 Rappelons que la ciuitas Conuenarum a livré à elle seule plus de cinquante autels à Jupiter, alors qu’en 1973 P. Le Roux et A. Tranoy n’en comptaient pour l’ensemble de la péninsule ibérique que cent douze (Le Roux et Tranoy 1973, p. 218-220). Le constat est le même pour l’Aquitaine augustéenne (hors Convènes) : moins d’une vingtaine de dédicaces à Jupiter est recensée dans le CIL XIII ; dix-huit dédicaces à Jupiter sont référencées dans les corpus des sept ciuitates, actuellement publiés dans les Inscriptions latines d’Aquitaine.
65 Nous empruntons ce qualificatif à J. Scheid ainsi que la forte signification que lui a donné l’auteur : Scheid 2011, p. 30, 65, 144.
66 Tranoy 1981, p. 321, qui, en outre, mit en évidence une influence très contrastée de Jupiter d’un conventus à l’autre, Astorga, Braga et Lugo, dans le Nord-Ouest de l’Espagne.
67 Str., 4, 2, 2 : « Ajoutons que les Romains ont accordé le droit latin à certains peuples d’Aquitaine, notamment aux Auscii et aux Convènes ». Ptol., 2, 7, 13 : « Touchant aux Pyrénées il y a les Convènes et leur ville Lugdunum, colonie… » : l’obtention du statut colonial par la cité qui a très tôt reçu le droit latin est antérieure à la seconde moitié du IIe siècle.
68 Cf. Schenck dans Badie et alii 1994, p. 170-171 et p. 171-173. Pour les raisons de la promotion de Sérénus : Schenck-David 2008, p. 6.
69 Pour le titre de colonie : Labrousse 1956, p. 137-140.
70 Plin., Pan., 1, 5. Fears 1981, p. 80-85 : Traianus ab Ioue electus. Bennett 1997, p. 106-117.
71 Riccardi 2011.
72 Sablayrolles 2005, p. 87 ou CMA-Tlse 2008, p. 29-30.
Auteur
c2ra - Musée archéologique départemental Saint-Bertrand-de-Comminges
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