La traduction de la Römische Geschichte de B. G. Niebuhr par P. A. de Golbéry : un projet original et une réalisation délicate
p. 59-76
Texte intégral
1En 1830 parait à Paris le premier volume de l’Histoire romaine de Georg Barthold Niebuhr, dans une traduction de Philippe Aimé de Golbéry. Cette parution, bien connue mais jamais rééditée1, est intéressante à plusieurs titres : quant à l’histoire de la science historique et de sa structuration en discipline académique ; quant à la connaissance de ses acteurs (les historiens) et à l’importance des traductions dans leur formation et dans leur œuvre ; quant à la connaissance des transferts franco-allemands ; enfin quant à l’histoire des traductions et de la traductologie.
2Par cet exemple très significatif se révèle l’importance du modèle allemand pour la constitution d’une science historique à l’Université. Elle éclaire les choix et les motifs qui amènent un homme, Golbéry, magistrat, député et érudit alsacien, à s’investir dans une traduction que l’on verra très délicate et fort longue. Elle témoigne enfin de l’historicité de toute activité traduisante et de sa réception.
Un auteur et un traducteur
3Historiciser cette parution nécessite de s’arrêter d’abord sur le binôme que forment, au sein de l’acte de traduction, l’auteur et le traducteur. Si le premier a bénéficié d’une importante notoriété, dont témoignent de nombreuses publications2, le second ne conserve qu’une reconnaissance limitée.
4Georg Barthold Niebuhr (1776-1831) est généralement présenté comme l’un des fondateurs de la tradition historiographique allemande3. Né à Copenhague, fils de l’orientaliste Carsten Niebuhr (1733-1815), il manifeste très jeune un don exceptionnel pour les langues étrangères, notamment anciennes et orientales. Cette prédisposition lui vaut une rapide réputation d’estime grâce à laquelle il obtient un poste de professeur à l’Université de Kiel, où il étudie alors. En parallèle, il entre au service de la couronne danoise. Il initie ainsi une double carrière, professorale et publique, qu’il continue à partir de 1806 auprès du gouvernement prussien à Berlin. Il obtient alors la chaire d’histoire ancienne de la jeune Université Humboldt. Sa mission d’émissaire de Prusse auprès du Saint-Siège, de 1816 à 1823, constitue pour lui l’occasion exceptionnelle d’un long séjour romain. Ses dernières années enfin, passées à l’Université de Bonn, sont ponctuées de nombreux voyages dans toute l’Europe, à la fois séjours d’études et visites diplomatiques.
5Membre fondateur de la Société des sciences historiques philologiques et critiques, il acquiert, avec sa Rômische Geschichte, une reconnaissance scientifique européenne4. Cet ouvrage constitue en effet un tournant méthodique et méthodologique et participe à l’émergence d’une authentique science historique de l’Antiquité. En cela Niebuhr apparait comme un acteur essentiel dans le mouvement global qui, dans cette première moitié du XIXe siècle, permet à l’histoire d’acquérir le statut de discipline académique à part entière, à l’instar des matières nobles traditionnelles de l’Université allemande (philosophie, philologie, droit). En outre, sous sa plume, la science de l’Antiquité (Altertumswissenschaft) devient à la fois un outil intellectuel pour penser le présent et une arme idéologique pour le relèvement de la Prusse5.
6La postérité de l’Alsacien Marie Philippe Aimé de Golbéry (1786- 1854) est bien plus discrète6. Les quelques notices nécrologiques et articles contemporains qui lui sont dédiés montrent pourtant un homme d’envergure régionale, si ce n’est nationale7. Son quasi-oubli s’explique par le jugement que portèrent sur lui les chroniqueurs et historiens libéraux, qui le décrivirent comme un piètre historien et un politicien sans ampleur, ne lui pardonnant en fait pas son attachement inconditionnel à la famille Bonaparte8.
7Né à Colmar et formé au droit à Coblence, Golbéry mène une triple carrière de juriste, de politicien et d’érudit. Son itinéraire professionnel est lié à l’Empire et à la Monarchie : avocat en 1808, il devient garde national puis procureur impérial en 1812. Démissionnaire à la chute de l’Empire, il retrouve en 1818 une place comme substitut du procureur à la cour de Colmar. Rallié à Louis-Philippe, il est promu procureur général sous la Monarchie de Juillet. Ces revirements politiques lui valent d’être l’un des premiers fonctionnaires révoqués en 1848, suite aux journées révolutionnaires, mais aussi en 1851 d’être nommé premier président à la Cour de Besançon par Napoléon III, promotion qu’il refusera, se retirant définitivement de la vie publique.
8Sa carrière politique se place sous le signe familial : il est le neveu du Général Barthélemy Scherer (1747-1804), ministère bonapartiste de la guerre ; son frère aîné sert dans l’armée de Vendée avant de se rallier au Consulat ; sa femme, Rose Honorine, est la fille du député conventionnel Merlin de Thionville (1762-1833), avec qui Golbéry crée un corps franc lors des Cent Jours. Napoléoniste convaincu, il rejoint progressivement le parti constitutionnel et adhère aux idées de Barante, de Guizot, du comte Molé et de Salvandy. C’est donc comme orléaniste modéré qu’il devient président du collège électoral du Haut Rhin en 1831, puis député de 1833 à 1848. Adepte du consensus, il apparaît de fait peu actif à la Chambre9, se présentant lui-même comme un propriétaire libéral, soucieux de l’état économique de son pays, l’Alsace, et un pacifiste10.
9A contrario, c’est la reconnaissance de son statut d’érudit qui semble le plus soucier Golbéry. Pâle copie d’un François Guizot (1787-1874), auquel il tente de se mesurer11, il espère à plusieurs reprises une place à l’Université et clame le désintéressement de ses travaux d’historien et de traducteur12. Le recensement des édifices historiques de l’Alsace, qu’il dirige, lui donne la matière pour rédiger de courts mémoires13 puis l’opportunité, en association avec Jean Geoffroy Schweighaeuser (1776-1844), de publier l’ouvrage de référence que sont les Antiquités de l’Alsace (1828)14. Il obtient finalement en 1835 le titre d’inspecteur divisionnaire des Monuments historiques pour l’Est de la France. Collaborateur du CTHS, correspondant de l’Institut, Golbéry donne des notices pour le Dictionnaire de la conversation, l’Encyclopédie des gens du monde, les Mémoires de corps savants. Historien, archéologue et antiquaire, il se fait également philologue : il traduit et commente Suétone et surtout Cicéron, choix stratégique s’il en est, de celui qui symbolise l’alliance du courage et de la vertu, un « plébéien, arrivé aux plus hautes charges de l’État grâce à son mérite et à ses rares talents, qui sauva la république que la superbe des grands condamnait »15. Golbéry écrit enfin pour plusieurs journaux français et étrangers : le Courrier littéraire de Strasbourg, les Annales d’Heidelberg, l’Univers religieux, le Moniteur, le Journal des Savants, la Kritischen Zeitschrift für Rechtswissenschaft und Gesetzgebung des Auslandes. Un de ses soucis consiste à faire connaître en France la science allemande, ainsi qu’en témoignent ses comptes-rendus publiés dans le Bulletin Férussac, la Revue Encyclopédique et la Revue Germanique. Sa germanophilie est avérée et assumée, comme en témoignent ces mots adressés à Niebuhr : « J’aime à tourner mes regards vers cette chère Allemagne, où j’ai été élevé, où je fais aujourd’hui instruire ma fille aînée, pour que les traditions de famille se perpétuent, où peut-être enfin, je chercherai un asile à ma vieillesse, comme j’y ai trouvé une seconde patrie pour mon enfance »16.
10Sa formation, sa carrière, ses publications, le placent ainsi au sein d’un large réseau de sociabilité érudite française et européenne. Il entretient des relations avec de nombreux lettrés, écrivains, universitaires, traducteurs, imprimeurs, archéologues ou biologistes, parmi lesquels Jacques-Joseph Champollion-Figeac (1778-1867), le baron Chaudruc de Crazannes (1768-1839), Antoine-Jean Letronne (1787-1848), Sébastien Bottin (1764-1853), Guiseppe Micali (1776-1844), le baron d’Eckstein (1790-1861), Joseph-Marie Quérard (1797- 1865), Charles-Louis Panckoucke (1780-1844), le baron de Férussac (1786- 1836), Philarète Chasles (1798-1873), Saint Albin Berville (1788-1868), François Andrieux (1759-1833), Abel-François Villemain (1790-1870), le marquis de Pastoret (1755-1840), le comte Joseph Portalis (1778-1858) ; il correspond notamment, pour ce qui est de l’Allemagne, avec le philologue Georg Dissen (1784-1837), l’écrivain Johann Joseph Görres (1776-1848), le juriste Carl Joseph Mittermaier (1787-1867) et l’historien Friedrich Schlosser (1776-1861). C’est bien dans le cadre de cette posture de ‘passeur’ entre deux éruditions que s’insère l’entreprise de traduction de la Römische Geschichte17.
Römische Geschichte / Histoire romaine
11La première édition de la Römische Geschichte paraît à Berlin en 1810- 1812. Elle se compose de deux volumes et reçoit un accueil complexe, tant elle rompt avec l’historiographie classique. Mais Niebuhr a alors l’opportunité de partir pour Rome ; de ce long séjour naît une nouvelle approche de la romanité, favorisée par la proximité du savant avec les sources, la découverte de l’âme et du contexte géographique romain, mais également par la mise à jour de plusieurs manuscrits alors inconnus (ceux de Lydius, de Gaius, ainsi que des fragments de la République de Cicéron). Ceux-ci déterminent une refonte totale de l’œuvre, dont le premier volume paraît en 1826. Cette seconde édition rencontre néanmoins plusieurs problèmes matériels : Niebuhr, pris par ses obligations diplomatiques et professorales (exercées, pour ces dernières, à titre gratuit), se plaint d’un manque de temps, et suite à un accident domestique, le manuscrit du second volume, est entièrement détruit par le feu. Amère rançon de la gloire, l’historien reçoit en outre maintes critiques de détails. Devant ces difficultés, la parution des volumes suivants est interrompue pour faire place à une troisième édition, une fois encore nouvelle, de l’ensemble de l’œuvre, à partir de 1828.
12Le perfectionnisme de Niebuhr, qui explique en partie cette gestation longue et complexe, s’exprime également vis-à-vis des traductions qui sont très vite initiées, et ce dans toute l’Europe : en Angleterre dès 1827 par Francis August Walter, mais également au Danemark, puis en France. Leurs préfaces respectives attestent une difficulté similaire des traducteurs face à ce travail, et Niebuhr juge sévèrement le résultat final, notamment celui de Walter18. S’ensuit la décision de reprendre la traduction anglaise à partir de la troisième édition allemande, en confiant le travail au couple Julius Charles Hare et John Connop Thirlwall. Cette nouvelle version anglaise, qui paraît de 1828 à 1842, rencontre cette fois un succès de librairie et d’estime qui n’est pas sans flatter Niebuhr19. Elle sera pourtant reprise quelques années plus tard (1847-1851), par un nouveau duo, formé du lexicographe William Smith et l’historien Leonhard Schmitz, né à Eupen et marié avec une ancienne élève du maître20.
13Golbéry commence quant à lui son travail de traduction à partir du premier volume de la seconde édition, vraisemblablement en 1827. Lors d’un précédent voyage à Paris, Niebuhr avait rencontré Letronne, alors Conservateur des Médailles, académicien et directeur de l’École Nationale des Chartes. Celui-ci l’avait persuadé de l’importance de faire connaître son œuvre au public français21. De son côté Golbéry, à la recherche d’un ouvrage contemporain à traduire, avait été orienté par son ami Görres vers la Römische Geschichte. Il entre donc rapidement en contact avec l’auteur, et commence un travail long et contraignant, comme en témoignent leur correspondance et les préfaces successives.
14L’historien allemand le convainc d’attendre la parution de la troisième édition : Golbéry se soumet, patiente, puis, à la réception de l’ouvrage, reprend son travail22. Il compare son texte à la traduction anglaise et soumet épreuves et questions à l’auteur23. Il consulte les meilleurs spécialistes pour trancher les points litigieux et se rend en bibliothèque24. Il consacre plusieurs déplacements, à Paris et à Bonn, à l’entreprise. Les deux premiers volumes paraissent finalement l’un après l’autre en 1830, chacun doté d’une préface originale du traducteur. Ils correspondent au premier volume de l’œuvre source. Leur réception par Niebuhr est si peu enthousiaste que Golbéry songe à abandonner. Mais l’auteur meurt, et, guidé par l’élève de celui-ci, Peter Classen, qui se charge d’achever l’édition allemande, Golbéry reprend le travail. Un troisième volume est publié en 1834, qui correspond au second volume de l’édition originale, agrémentée d’une préface et d’une longue notice biographique. Le quatrième volume, en 1835, est constitué d’additifs portés par Niebuhr. Suit en 1836 une cinquième livraison, enrichie de la préface de Classen. La traduction est alors a priori achevée, et pourtant Golbéry publie en 1837 et 1840 deux derniers volumes : un sixième, composé d’une compilation d’articles de l’auteur, et un ultime septième qui contient un index original, des dissertations secondaires et diverses notices du traducteur (notamment une nouvelle notice biographique). S’y ajoutent un ensemble de pièces, qui ne sont pas de la plume de Niebuhr, mais choisies et traduites par Golbéry dans le but d’éclairer l’œuvre principale : des extraits du Versuch über die römischen Plebejer der ältesten Zeit de G. Strässer (1832), un compte rendu original de l’Einleitung in Roms alte Geschichte de Karl Ludwig Blum (1828), des passages de textes latins, notamment de Cicéron. La traduction se transforme ainsi en une sorte d’œuvre critique, novatrice, sous la forme d’une collection originale enrichie des nombreuses notes et précisions qu’apporte Golbéry.
15Ces sept volumes successifs paraissent ainsi en l’espace de dix ans à rythme irrégulier, auprès des éditions Levrault. Golbéry travaille principalement avec leur succursale strasbourgeoise, et salue leur confiance : si l’on en croit la préface du second volume, l’entreprise est en effet loin d’être lucrative, et seul un succès d’estime paie en retour traducteur et éditeur : « Puisse cet accueil répondre aux sacrifices que ne cesse de faire à nos relations intellectuelles avec l’Allemagne une maison de librairie qui a toujours placé les intérêts de la science au dessus de ceux du commerce ! », s’exclame le Français25. Dans sa correspondance, il insiste surtout sur la nature non rémunérée de ce travail, et se fait un point d’honneur de vanter à Niebuhr les bons résultats des ventes, qui à la suite d’une première édition à 1500 exemplaires, stimuleraient une rapide réédition26. Bien que celle-ci ne semble finalement pas avoir eu lieu, le succès mitigé de la traduction n’ébranle pas la fidélité de la maison d’édition, qui poursuit la publication.
Pourquoi traduire ?
16La démarche de Golbéry semble relever d’un faisceau de raisons circonstancielles, scientifiques, et politiques. Elle participe ainsi d’abord d’une mode, d’une stratégie de carrière et d’une opportunité. L’histoire est alors une science en cours d’institutionnalisation : depuis la rupture révolutionnaire, de premières chaires universitaires ont été créées, et le système des écoles supérieures rénové, tout comme les programmes de l’enseignement secondaire. L’histoire ne s’inscrit plus dans la linéarité passée de l’avant 1789 : le passé est devenu une antiquité qu’il s’agit d’appréhender scientifiquement. L’Allemagne fait ici figure de modèle, avec la création précoce (dès le milieu du XVIIIe) de premières chaires spécialisées. Les ouvrages historiques produits alors par leurs titulaires constituent des exemples à suivre. Cette dynamique s’inscrit dans un contexte européen, et les historiens français s’efforcent de s’inspirer de l’ensemble des productions, qu’elles soient anglaise (Edward Gibbon, traduit par les époux Guizot), italienne (Giambattista Vico, par Jules Michelet) ou allemande (Johannes Herder, par Edgar Quinet)27.
17Quand Golbéry, suivant l’exemple de ces éminents prédécesseurs, décide de se lancer dans la traduction similaire d’une œuvre de référence, il demande conseil à son ancien maître, le philologue Joseph Görres. Ce dernier mentionne les noms de ceux qu’il considère comme les historiens contemporains les plus illustres : Frédéric de Creuzer (1771-1858), Friedrich Schlosser, et Niebuhr. Une version de la Symbolik a déjà été donnée par Joseph Daniel Guigniaut (Les Religions de l’Antiquité, 1825). Golbéry publie d’abord une version française de l’Histoire universelle de l’Antiquité (1828), qui reçoit une réception limitée, puis se tourne vers Niebuhr. Ce travail doit lui permettre de renforcer sa position d’érudit, éventuellement lui ouvrir les portes de l’Université. Il est alors sans charge ni mandat, et souhaite se consacrer entièrement à la science historique. Il suit le chemin tracé par les Michelet ou Guizot, chez qui la traduction d’un mentor précède une grande œuvre. Mais pour Golbéry, celle-ci ne viendra pas : épuisé par les dix années consacrées à l’Histoire romaine, il donnera ensuite seulement quelques articles et une Histoire de la Suisse sans réel succès28.
18D’un point de vue scientifique, le choix de cette traduction est effectivement pertinent : la Römische Geschichte illustre une conception nouvelle de la science historique, elle valide le modèle novateur d’une histoire scientifique qui s’efforce de comprendre une société passée à travers ses propres structures de pensée. Cette démarche annonce la posture de l’historisme tel qu’il sera bientôt défini par Leopold von Ranke (1795-1886) : l’historien doit établir les faits tels qu ’ils se sont effectivement produits et saisir chaque moment passé dans sa singularité, sans chercher à émettre de jugement de valeur. Les explications systémiques sont rejetées au profit d’une recherche des causes immédiates des événements, hors de tout projet téléologique. Á l’universalisme classique est préférée la singularité de chaque cas national. L’ouvrage de Niebuhr rencontre ainsi la volonté de modernité des jeunes écoles historiographiques européennes, qui, en France, rejoint la tradition d’excellence de l’ancienne pratique érudite mauriste. Revendiquant cette filiation, Idéologues et historiens libéraux défendent une posture qui établit une distance raisonnée entre le passé et le présent, entre l’historien et son objet. La dimension normative de l’histoire antique, alors, disparaît. La dimension novatrice de l’œuvre de Niebuhr consiste de plus en une double révolution méthodologique : il renonce à l’ancienne pratique de la compilation, initiée par Tite-Live, et à son alternative, qui consistait à dresser un bilan des connaissances. Détaché des anciens, négligeant les modernes, il « franchit l’espace que de doctes erreurs avaient obscurci »29. Niebuhr ne se réfère pas à telle ou telle critique, il semble écrire hors du temps. Sa manière d’appréhender l’histoire romaine relève ainsi de l’intuition, de la conviction intime, elle est le fruit d’une sorte de contemplation des sources antiques, c’est-à-dire de leur lecture régulière et attentive. L’historien se plonge dans son corpus, s’en imbibe, le digère, et livre un résultat qui rompt tant avec les compilations anciennes qu’avec les modèles trop influencés par le présent : le passé se trouve effectivement comme recréé.
19De fait l’impact de Niebuhr sur la science historique européenne n’est pas seulement méthodologique, mais également stylistique. Quand nous lisons Niebuhr, explique Golbéry, « nous pouvons vivre avec les Romains comme avec des hommes de notre chair et de notre sang »30. Son style s’apparente à celui d’un voyant, et inspire en cela Michelet qui dira son admiration pour l’Allemand : « souvent l’inspiration familière à l’auteur se mêle à cette obscurité : Niebuhr parait prononcer des oracles »31.
20Ce choix correspond enfin à des motifs politiques. Golbéry, comme Niebuhr, sont d’ardents nationalistes, et le bonapartisme du Français s’accorde finalement avec la haine du second envers Bonaparte, puisqu’un même patriotisme la motive. Le premier est surtout sensible au double idéal que porte la Römische Geschichte : la foi en la restauration d’une concorde sociale, d’une part, et de l’autre la défense d’une démocratie locale régie par les élites. Ébranlées par les révolutions et les guerres, les sociétés française et prussienne doivent reconstruire paix et unité, en transcendant les divergences familiales, sociales et politiques passées. L’exemple romain paraît ici probant puisque la puissance de Rome résulte de l’union d’une dualité ou division primitive (Latins contre Sabins). Quant à la défense d’un exercice local du pouvoir à la fois démocratique et dominé par des élites, elle s’exprime par la question des gentes, point central du système niebuhrien, que Golbéry précise et valide.
21On considère désormais les Gentes de la Rome antique comme des groupes unis par la célébration de cultes communs32. Formés d’un aristocrate et de ses clients, elles constitueraient les communautés primitives. Leur origine et leur histoire se trouvent donc liées à la question de la formation de la cité et de la naissance de la propriété privée. Niebuhr, le premier, place cette notion au centre de la théorie explicative des débuts de la société romaine. Pour lui, les gentes préexistent à l’État : leur nombre est invariable, elles s’organisent en classes sociales qui valident la prépondérance des patriciens – les plébéiens n’ayant que des droits particuliers. Chaque gens porte le nom d’un héros éponyme mythique (« qui n’est point l’auteur de la gens »)33. Niebuhr en souligne l’importance en employant alternativement dans son texte le latin gens/gentes ou l’allemand Geschlecht. Golbéry utilise le même procédé avec les mots famille et maison. Il précise : « Nous répéterons encore que le mot de famille ne doit pas être entendu ici dans son acception ordinaire ; n’ayant point trouvé, en français, d’équivalent qui répondit au Gens des Latins, et le mot maison ne pouvant servir indifféremment en tout lieu, nous nous permettrons parfois l’usage de l’expression originale, comme l’a fait M. Niebuhr, qui l’emploie alternativement avec le mot allemand Geschlecht »34. La question des gentes est identifiée comme un des apports majeurs de l’historien allemand, et son analyse bénéficie d’une réception attentive. Un parallèle est établi entre les gentes (maisons patriciennes) et les pairages médiévaux (également nommées parentelae ou cognationes), – c’est-à-dire les familles patriciennes – dont les privilèges s’affirment au XIIIe siècle, mais qui possédaient une influence ancienne, fondée sur la richesse et une « longue illustration ». Cette division politique imite la famille, mais n’est pas d’essence biologique : leur formation s’est faite par agrégation. Elle ne suppose aucune ascendance commune et ce fait, établi d’après Cicéron, permet à Niebuhr de distinguer strictement gentilité (gentes) et parenté (Sippschaft). L’auteur souligne alors que la même organisation préside à la fondation des villes et à l’organisation locale de la vie publique en Allemagne. Á sa suite, Golbéry valide la réalité et la permanence d’un fonctionnement patricien, par famille, fondé sur l’agrégation et l’allégeance et non sur le sang, à la base de l’État médiéval et moderne. Il en défend la légitimité et les mérites, et c’est ce modèle qu’illustre finalement son propre engagement politique.
Comment traduire ?
22La traduction de la Römische Geschichte apparaît rapidement comme une entreprise très difficile. Golbéry est confronté à un double défi : d’une part proposer un style qui convienne au public français, de l’autre respecter le texte source, exigence que contrôle un Niebuhr excellent francophone.
23La correspondance de Golbéry, tout comme les préfaces originales qu’il donne, témoigne de manière récurrente de l’âpreté de cette tâche. Sans cesse, il assure Niebuhr de sa bonne volonté et de son zèle : « Croyez, Monsieur, que je n’ai rien négligé, que j’ai fait tout ce qu’il était humainement possible de faire [...] Il est impossible de pousser plus soin plus loin que je l’ai fait »35. En plus des volumes à traduire, Niebuhr lui fournit les versions étrangères déjà effectuées et des indications générales sur l’esprit de son travail. Le Français lui demande ensuite conseil sur tel ou tel point précis : « Je vous serai fort obligé cependant si vous vouliez bien (ainsi que vous me l’avez fait espérer) me donner quelques explications. Votre dernière lettre me traçant la marche que j’ai suivie me promettait la solution de tout ce que nous n’avions pu accomplir entre nous »36. Son travail s’inscrit toujours dans le cadre ordonné par Niebuhr, et Golbéry semble subir le bon vouloir de l’auteur : « Quant au premier volume, tout a été fait comme vous l’avez demandé ; pour le second je vous supplie de me renvoyer les notes supplémentaires [...] j’en ai un besoin urgent »37. Il s’épanche particulièrement sur ses incertitudes quant à la difficile traduction de certains termes : « Pour les gentes, famille ne saurait convenir parce que ce serait prendre la partie pour le tout, et que j’ai besoin de ce mot pour la partie. Cependant le français n’a pas l’équivalent de votre Geschlecht [...] comme les Anglais ». Le mot maison lui semble trop solennel. C’est encore Niebuhr qui le convainc de l’employer, et d’ajouter une longue note explicative à son texte. Golbéry lui transmet régulièrement la liste des points qui lui posent problème : « Voici une nouvelle série de questions. Mes doutes vous paraîtront sans doute minutieux mais le soin [...] que j’apporte à ce travail m’en excuse »38. Puis, il soumet l’ensemble des pages traduites à l’auteur, qui en relève les éventuelles erreurs : « Pendant la correction des épreuves je mettrai le plus grand soin à ce que ne m’échappe aucune faute comme [...] quelques autres qui vous ont justement choqué, mais qui appartenaient à la précipitation de l’épreuve »39. Pourtant, le résultat ne semble à la hauteur ni des attentes de l’auteur, ni de celles du traducteur : « Malgré toutes ces précautions je me garderai bien de dire que la traduction est authentique. Elle ne l’est pas et vous avez toute latitude pour réclamer sur ce qui ne serait pas bien »40.
24Le problème crucial est bien celui du style et du hiatus existant entre les exigences des publics allemands et français. Niebuhr refuse par exemple l’emploi de synonymes. Golbéry doit proposer, sous la contrainte, une traduction très littérale (il dit lui-même « interlinéaire »), « comme on en agit pour certaines éditions des poèmes d’Homère, à l’usage des écoliers ». Il ne s’en satisfait pas, mais ses efforts pour influencer Niebuhr laissent l’Allemand de glace : Niebuhr « persista, en déclarant que son livre était pour la science, non pour la littérature »41. Il lui faut donc finalement abandonner ses velléités stylistiques, tout en s’en expliquant à son lecteur : « Niebuhr, dont l’esprit était d’ailleurs si élevé, n ’était pas moins le propriétaire de ses mots que de ses idées ; on ne pouvait s’enrichir des uns qu’en acceptant les autres »42.
25Définitivement, les qualités littéraires sont ainsi sacrifiées à l’impératif scientifique :
Notre but a été surtout de parvenir à une rigoureuse exactitude : parfois le sujet est aride et la phrase ingrate sous la plume du traducteur. Dans sa sévère concision, le livre de M. Niebuhr appartient à la littérature non point qu’à l’érudition. Je n’ai pu lui conserver que la seconde de ces qualités : pour nous c’était le point essentiel, et il importait de lui sacrifier toute autre considération. Il fallait maintenir les formes de l’ouvrage original ; s’écarter de la lettre de l’auteur, c’eut été lui retirer sa chair.
26Et malgré ces précautions, l’auteur rajoute encore, à la fin des deux premiers volumes, une série de notes justifiant sa traduction ou proposant des alternatives à celle-ci43.
27Lorsque le premier volume paraît enfin, Golbéry semble plutôt satisfait. Il adresse à Niebuhr une lettre enjouée, qui lui signale la bonne réception de la communauté scientifique44, et se dit près à poursuivre le travail. Niebuhr reste bien plus circonspect. Il lui fait parvenir une liste de corrigenda, que Golbéry doit annexer au livre, se plaint de la traduction à ses proches45, et oublie le Français dans ses remerciements ultérieurs46. Golbéry en est très affecté :
Je n’ai pas la prétention de continuer la traduction de votre histoire, et malgré les sollicitations du libraire qui se trouve à merveille de son entreprise, et malgré les salutations de Lerminier et de Blondeau, je m’arrête et j’abandonne [...]. J’ignore en quoi j’ai pu encourir de votre part une disgrâce aussi forte […]. Si je n’ai donné à mon pays qu’une copie décolorée, j’ai eu la franchise de le dire moi-même.47
28S’il se remet finalement au travail, c’est encore une fois, pour l’amour de la science : « par un travail pénible, j’ai fait perdre à l’ouvrage sa couleur littéraire [...] Mais j’ai donné à M. Niebuhr toute une Nation d’admirateurs, et j’ai l’âme navrée de son silence. Toutefois je continuerai qu’autant que cela lui conviendra »48.
29La mort de Niebuhr offre au traducteur une liberté nouvelle, celle de continuer l’entreprise telle qu’il l’entend. Pourtant il choisit de rester fidèle à l’esprit initial de l’auteur, ainsi qu’il s’en explique :
Avec un peu plus d’amour-propre, avec un peu moins d’amour pour la science, il se serait arrêté devant un écueil inévitable. L’évidence lui disait que l’auteur illustre, à côté duquel il allait marcher, aurait seul les honneurs de cette publication, et que son interprète n’était pas assez célèbre pour qu’on jugeât de son style par ses autres ouvrages : or, il y avait force que le genre de cette traduction fût celui de la dissertation et presque de la démonstration mathématique. D’ailleurs, le Germain revoyait les épreuves, recourbait et regermanisait les phrases […]. Plusieurs savans critiques ont justement apprécié la difficulté de l’entreprise ; d’autres, sans égards pour ce sacrifice d’amour-propre, nous ont reproché de n’avoir pas fait une œuvre littéraire de ce qui n’était qu’une œuvre de science. Aujourd’hui même que nous sommes dégagé des entraves dont on ne nous a pas tenu compte [i.e. la mort de Niebuhr], nous nous sommes attaché à calquer les démonstrations et les recherches de l’auteur, persuadé qu’on ne pouvait s’éloigner de l’expression qu’au préjudice de la pensée : notre unique but a été de donner à celle-ci plus de clarté.49
30Il en résulte une traduction très divergente de celle de la Symbolik donnée par Guigniaut : alors que le monde érudit français salue les efforts de ce dernier d’avoir « dégagé l’ouvrage original de tout ce que les formes allemandes ont de désagréable et de fatiguant pour les esprits français, de l’avoir épuré des discussions métaphysiques et philologiques [...] bref de l’avoir réduit à un véritable tableau historique composé de récits »50, le parti pris – obligé puis assumé – de Golbéry, d’une extrême fidélité à l’œuvre source, limite finalement la réception française de l’ouvrage de Niebuhr.
Réception et postérité de la traduction
31Dans un premier temps néanmoins, la traduction reçoit une réception positive, et bénéficie de plusieurs articles, notamment dans Le Globe et la Revue des Deux Mondes51 Au début de son Histoire romaine, Jules Michelet dit son admiration pour son illustre prédécesseur allemand, à qui il reconnaît le mérite d’avoir eu l’intuition, douze ans avant Augustin Thierry, de l’importance historique des races52. Rapidement pourtant, l’œuvre de Niebuhr est mise en concurrence avec une autre, plus ancienne, celle de l’érudit protestant Louis de Beaufort (1703-1795) : la Dissertation sur l’incertitude des cinq premiers siècles de l’histoire romaine, parue en 1738, devient le modèle et la référence, avec Montesquieu, d’une histoire scientifique proprement française53. Une sorte de réflexe antigermanique stigmatise l’apport niebuhrien, au profit d’une tradition nationale plus littéraire, dominée par l’esprit de système : on se plait à railler la méthode érudite allemande et sa fascination pour le détail, le cas particulier, et les historiens français s’accordent pour « défendre le bon sens français contre les atteintes du germanisme »54. Malgré la défense de quelques plumes55, le rejet de l’optique niebuhrienne s’affirme56. La connaissance de l’Antiquité doit tout à Beaufort, c’est-à-dire à la France, et rien à Niebuhr : sous la plume de ce dernier, « l’Allemagne n’a fait que nous renvoyer nos propres découvertes, enveloppées et obscurcies par les nuages d’une érudition pédantesque »57.
32Le succès du positivisme historique, à partir de 1850, puis de l’école méthodique, conforte la remise en cause de la méthode intuitive de Niebuhr. Si certains, tel Gaston Boissier (1823-1908), louent la dimension poétique de son œuvre, ils ajoutent : « La création de Niebuhr n’a pas résisté au temps. La critique a renversé l’édifice hardi qu’il avait élevé ; mais les ruines de son système conservent encore un air de grandeur qui séduit l’imagination. L’époque de Niebuhr est vraiment l’âge poétique de la science allemande »58. Progressivement son approche est abandonnée en tant que référence historiographique sérieuse : on parle ainsi des « fantaisies de Niebuhr »59. Par la révolution historiographique qu’ils font subir à la connaissance de l’Antiquité romaine, les deux grands historiens Theodor Mommsen (1817-1903) et Numa Denys Fustel de Coulanges (1830-1889) achèvent de disqualifier son apport. En privilégiant l’étude du juridique, du social et de l’économique pour penser le politique, le premier invalide la thèse niebuhrienne qui plaçait la poésie comme clé de voute des origines romaines : désormais, c’est le commerce qui explique la création et le succès de Rome. Fustel de Coulanges, quant à lui, reprend le problème des rapports entre famille, institution et religion à partir de l’analyse du sacré. C’est l’union autour d’un culte qui fonde alors la gens et celle-ci s’assimile, de fait, à la parenté60.
33Ainsi, à la fin du XIXe siècle, l’optique biologiste dominante invalide définitivement l’ancienne thèse niebuhrienne d’une formation des gentes par agrégation, au profit d’une définition génétique de la famille et de la race. Le succès d’une science historique libérale et pragmatique se distingue totalement de la vision romantique et inspirée qu’avait portée Niebuhr. S’il conserve, grâce à la dimension méthodologique de son œuvre, une certaine aura en Allemagne ou en Angleterre, il perd définitivement en France le crédit que la traduction si fidèle d’un Golbéry avait tant souhaité lui apporter.
Bibliographie
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Ms 5110 f. 69-73 Correspondance à Sébastien Bottin.
Ms 5579 Lettres et papiers divers.
Ms 3.602 Manuscrit de L’Alsace celtique.
Ms 3.600 Manuscrit de Mémoire sur quelques anciennes fortifications que l’on voit au sommet des Vosges : où l’on examine la question de savoir quel peuple, au temps de Jules César, était établi dans la Haute-Alsace.
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Essai sur l’histoire et les antiquités du Département du Haut-Rhin, Mulhausen : Risler et Cie, 1821.
Histoire et description de la Suisse et du Tyrol, Paris, Didot, 1838.
Notice historique sur la vie et les ouvrages de B. G. Niebuhr, Strasbourg, Levrault, 1831, extrait de la Nouvelle revue germanique, VII, 1831.
Notice sur Suétone, Paris, Panckoucke, 1833.
Notice sur Cicéron, Paris, Panckoucke, 1838.
Mémoire sur quelques anciennes fortifications que l ’on voit au sommet des Vosges : où l ’on examine la question de savoir quel peuple, au temps de Jules César, était établi dans la Haute-Alsace, Strasbourg, Levrault, 1823.
Villes de la Gaule rasées par M. Dulaure, et rebâties par M. de Golbéry, 1821.
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Traductions du latin
Golbéry Philippe Marie Aimé de,
Albii Tibulli quae supersunt omina opera..., Paris, Lemaire, 1826.
Œuvres complètes de Cicéron, Paris, Panckoucke, 1831-1832 (collaboration).
Correspondance de Cicéron, I-III, Clermont-Ferrand, Paleo, « Sources de l’histoire antique », 2004 ; 2005 [vol. 1, Lettres 1 à 129 (69 à 56 av. J.-C.) – vol. 2, Lettres 130 à 265 (55 à 51 av. J.-C.) – vol. 3, Lettres 266 à 385 (51 à 50 av. J.-C.) – vol. 4, Lettres 386 à 561 (49 à 46 av. J.-C.) – vol. 5, Lettres 562 à 747 (46 à 45 av. J.-C.) – vol. 6, Lettres 748 à 858 (45 à 44 av. J.-C.)] – reprise des tomes 18-26 (Epistolae), de l’édition Panckoucke, 1829-1837.
Autre traduction de l’allemand
Golbéry, Philippe Marie Aimé de,
Histoire universelle de l’ Antiquité de Friedrich Schlosser, Strasbourg, Levrault, 1828.
Notes de bas de page
1 H. van Hoof, Histoire de la traduction en Occident, Paris, Duculot, 1991, p. 81 ; Mouza Raskolnikoff, Histoire romaine et critique historique dans l’Europe des Lumières, Rome, École française de Rome, 1992, p. 696.
2 Parmi celles-ci : J. Classen, Barthold Georg Niebuhr, Gotha : Perthes, 1876 ; G. Walther, Niebuhrs Forschung, Stuttgart : Steiner, 1993 ; G. Wirth (éd.), Barthold Georg Niebuhr, Historiker und Staatsmann, Bonn, Röhrscheid, 1984.
3 M. Raskolnikoff, op. cit., 1992, p. 737-762.
4 J. Classen, op. cit., 1876, p. 10 ; G. Wirth, op. cit., 1948, p. 5-6.
5 A. Momigliano, « Les origines des recherches sur l’Antiquité » dans Id., Les Fondations du savoir historique, Paris, Les Belles Lettres, 1992, p. 61-91 ; P. Payen, « Réception des historiens anciens et fabrique de l’histoire », dans Anabases 2005/1, p. 279.
6 E. Sitzmann (éd.), Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, I, article « Golbéry (Marie-Philippe Aimé de) », Paris, éditions du Palais Royal, 1973, p. 621-622 ; F. Igersheim, L’Alsace et ses historiens 1680-1914. La fabrique des monuments, Strasbourg, Presses Universitaires de Strasbourg, 2006.
7 J. Matter, La Vie et les travaux de P. de G., officier de la Légion d’Honneur, correspondant de l’Institut, de la société impériale des antiquaires de France, et de plusieurs autres sociétés savantes, premier président honoraire de la cour d’appel de Besançon, ancien député, Colmar, 1857, p. 1-44 ; id., « Notice sur la vie et les travaux de Philippe de Golbéry », Bulletin de la société impériale des antiquaires de France, 1858, p. 1-13 ; A. Robert, G. Cougny (dir.), Dictionnaire des parlementaires français 1789-1889, III, « Golbéry », Paris, Dourloton, 1909, p. 204-205.
8 J. Michaud, (dir.), Biographie universelle ancienne et moderne, t. XVIII, « Golbéry (Marie-Philippe Aimé de) », Paris, 1857, p. 100-101.
9 A. Robert, G. Cougny, op. cit., 1909, p. 205.
10 Selon ses propres tracts électoraux, BNUS MR 10 053 f. 4-5.
11 Lettre à sa femme (BNUS MR 5579) dans laquelle est évoqué avec douleur le peu d’intérêt qu’a pour lui Guizot.
12 Lettres à Niebuhr des 7 janvier 1830,7 mars 1830 et 18 janvier 1831 (BBAW Nr. 130).
13 P.M.A. de Golbéry, Essai sur l’histoire et les antiquités du Département du Haut-Rhin, Mulhausen, Risler et Cie, 1821 ; id., Villes de la Gaule rasées par M. Dulaure, et rebâties par M. de Golbéry, 1821.
14 L. Lang, « Godefroy Engelmann, imprimeur-lithographe et éditeur des Antiquités de l’Alsace », Bulletin du Musée Historique de Mulhouse, 1972, t. LXXX, p. 84-106.
15 C. Grell, Le XVIIIe siècle et l’Antiquité en France, 1680-1789, Oxford, Voltaire Foundation, 1995, p. 1094.
16 Lettre à Niebuhr du 13 novembre 1830, BBAW Nr. 130.
17 Les lettres de Golbéry à Niebuhr évoquent plusieurs de ces savants, et cette correspondance est également l’occasion d’échanger des nouvelles au sujet de certains d’entre eux, de prévoir de futures visites et d’annoncer les œuvres à paraître (BBAW Nr. 130).
18 D. Behrens Hensler, Lebensnachrichten über Barthold Georg Niebuhr, Hambourg, Perthes, 1838, II, p. 162.
19 E. Bammel, « Niebuhr und England », dans G. Wirth (éd.), Barthold Georg Niebuhr, Historiker und Staatsmann, Bonn, Röhrscheid, 1984, p. 131-176, ici p. 145-148.
20 Ibid., p. 140.
21 Golbéry reproduit dans son VIIe volume de l’Histoire romaine, un fac-similé d’une lettre de Niebuhr à Letronne relatant cette visite et mentionnant les sollicitations du second (Niebuhr/Golbéry, Histoire romaine, Paris-Strasbourg, Levrault, VII, 1837 : n. p.).
22 BBAW Nr. 130, Lettre de juin 1828.
23 BBAW Nr. 130, Lettre du 9 septembre 1828.
24 « J’ai tout discuté tant avec des allemands qu’avec ce que nous avons de philologues les plus marquants de notre Académie des Inscriptions. Je n’ai pas non plus épargné les recherches dans les bibliothèques publiques et particulières » (BBAW Nr. 130, Lettre du 9 septembre 1828).
25 Niebuhr/Golbéry, Histoire romaine, I, 1830, préface, p. xj.
26 Lettre du 18 janvier 1831 (BBAW Nr. 130) ; dans la Lettre du 7 mars 1830, il précisait de même que la traduction était « un travail qui, je vous le jure sur l’honneur, a été complètement désintéressé, et duquel je n’ai jamais touché un denier, n’acceptant de l’éditeur que quelques livres ».
27 Sur cette réalité de l’historien-traducteur au début du XIXe siècle, cf. A. Graceffa « Le culturème Völkerwanderung et la question de l’historien-traducteur », dans C. Wecksteen et A. El Kaladi (éd.), La Traductologie dans tous ses états, Arras, APU, 2007, p. 79-92, ici p. 80-81.
28 P.A. de Golbéry, Histoire et description de la Suisse et du Tyrol, Paris, Didot, 1838.
29 Niebuhr/Golbéry, 1830, I, p. viij.
30 Niebuhr/Golbéry, Histoire romaine, III, 1834, p. Ixvj.
31 J. Michelet, Histoire romaine, Paris, Hachette, 1843, p. 10.
32 M. Christo et D. Nony, Rome et son empire. Des origines aux invasions barbares, Paris, Hachette, 2003, p. 38.
33 L’historien précise que « l’identité de noms de certaines tribus et de certaines gentes prouve seulement qu’elles étaient consacrées au même héros », mais non qu’il s’agissait de la même division.
34 Niebuhr/Golbéry 1830, II, p. v-xj ; 1-5 ; 134-165.
35 BBAW Nr. 130, Lettre non datée, fin 1828.
36 Ibid.
37 BBAW Nr. 130, Lettre du 2 novembre 1829.
38 BBAW Nr. 130, Lettre du 25 mars 1829.
39 BBAW Nr. 130, Lettre du 9 septembre 1828.
40 BBAW Nr. 130, Lettre non datée, fin 1828.
41 Niebuhr/Golbéry, 1830,I, p. x.
42 Ibid., p. ix.
43 Ibid., I, p. 430-444 ; II, p. 440-452.
44 BBAW Nr. 130, Lettre du 7 janvier 1830.
45 Hensler, 1838, III, p. 256.
46 B.G. Niebuhr, Römische Geschichte, Berlin, Reimer, 3e édition, III, 1831, p. II.
47 BBAW Nr. 130, Lettre du 7 mars 1830.
48 BBAW Nr. 130, Lettre du 18 janvier 1831.
49 Golbéry, 1834, p. vj-vij.
50 P. Régnier, « La question romantique comme enjeu national : critique française et littérature allemande autour de 1830 », Romantisme, 1991/21, p. 29-42, ici p. 38-39.
51 X. Marmier, « Revue littéraire de l’Allemagne », Revue des Deux Mondes, Tome 26, 1841.
52 Sur le système historique des races chez Thierry et sa postérité chez Michelet, cf. A. Graceffa, « Race mérovingienne et nation française », dans H. Reimitz et B. Zeller (éd.), Vergangenheit und Vergegenwärtigung, Vienne, OAW, 2009, p. 59-69, ici p. 64- 67.
53 M. Raskolnikoff, op. cit., 1992, p. 3-4.
54 Ibid., p. 739.
55 C.A de Sainte-Beuve, Portraits contemporains, II, Paris, Garnier, 1855, p. 246 ; J.F. Dübner, « Sur une attaque contre Niebuhr », Revue de philologie, de littérature et d’histoire anciennes, 1845,I, p. 168-183.
56 J.V. Le Clerc, Des Journaux chez les Romains. Recherches précédées d’un mémoire sur les Annales des Pontifes et suivies de fragments des journaux de l’ancienne Rome, Paris, Didot, 1838.
57 A. Blot, Introduction à L. de Beaufort, Dissertation sur l’incertitude des cinq premiers siècles de l’histoire romaine, nouvelle édition annotée, Paris, Maillet, 1866, p. IX.
58 G. Boissier, « L’Allemagne contemporaine, études et portraits. III M. Theodor Mommsen », Revue des Deux Mondes, mars-avril 1878, t. 98.
59 A. Momigliano, op. cit., p. 87.
60 N.D. Fustel de Coulanges, La Cité antique, Paris, Durand, 1864, p. 112-120.
Auteur
Docteur en histoire, est chargée de cours à l’Université de Lille 3. Ses travaux s’attachent à l’étude de la médiévistique aux XIXe et XXe siècles, tant du point de vue des discours que de ses acteurs. Outre la version remaniée de sa thèse, parue aux éditions Brepols sous le titre Les Historiens et la question franque. Le peuplement franc et les Mérovingiens dans l’historiographie française et allemande des XIXe-XXe siècles (Tumhout 2009), elle a publié une quinzaine d’articles consacrés à l’historiographie, aux transferts culturels érudits entre France et Allemagne et à ses auteurs.
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