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De Bach à Saint Jérôme : la cognition musicale et la cognition traductionnelle dans une optique interdisciplinaire de l’enseignement et de l’apprentissage

p. 133-154

Résumé

Dans le monde du savoir, où l’interdisciplinarité est au centre de la discussion, on peut se poser la question suivante : comment traductologues, chercheurs en sciences de l’éducation et experts en psychologie cognitive peuvent-ils profiter d’un travail conjoint pour favoriser l’apprentissage chez les étudiants ? Déjà, des traductologues se sont intéressés à l’aspect cognitif de la traduction, comme en font notamment état les travaux de Tirkkonen-Condit (1989), de Jääskeläinen (1996, 1998) et de Gile (2005). Les recherches accomplies en ce sens ont permis non seulement de pousser la réflexion sur l’activité des traducteurs, mais également de donner des repères aux formateurs. Les chercheurs ont aussi abordé les méthodes d’évaluation et le sujet de la compétence traductionnelle. Mais que reste-t-il à accomplir ? Dans cet article, nous abordons entre autres certaines études liées à la formation et à l’apprentissage réalisées en psychologie cognitive, plus spécifiquement en cognition musicale, qui pourraient inspirer des recherches conjointes entre les traductologues, les chercheurs en sciences de l’éducation et les experts en sciences cognitives.

Entrées d’index

Mots-clés : enseignement de la traduction, musicologie, psychologie cognitive, compétences des traducteurs, métacognition


Texte intégral

1Qu’est-ce qu’apprendre ? D’après Le dictionnaire actuel de l’éducation, apprendre consiste à « acquérir et développer des connaissances et des habiletés » (Legendre 2005 : 88). Pour notre part, nous proposons une n inspirée davantage du courant humaniste : apprendre, c’est partir à la recherche des autres et de soi en explorant un univers où on pourra s’épanouir et apporter sa contribution personnelle. Dans cette perspective, l’acte d’enseigner devient une entre prise de développement qui joue sur l’ensemble des dimensions humaines, qu’elles relèvent des plans cognitif, social, psychologique ou affectif. Partant, le formateur ne peut faire l’économie d’une réflexion, voire d’une autoréflexion, qui deviendra le pivot de l’enseignement, mais aussi de l’apprentissage. Il aidera les apprenants à prendre conscience de leurs forces et de leurs faiblesses, de leurs méthodes et de leurs stratégies, et, ce faisant, les outillera afin qu’ils puissent travailler dans une atmosphère de collaboration et actualiser leur plein potentiel. Les principes d’expression individuelle, de collaboration et d’autoréflexion auxquels nous adhérons relèvent donc respectivement des courants humaniste, socio-constructiviste et cognitiviste.

2Du dernier paradigme théorique, deux concepts ont particulièrement retenu notre attention ; celui de l’expertise, soit ce qui rend un individu compétent dans un domaine, et celui de la métacognition, ensemble complexe de processus qui permettent à ce même individu d’exercer un contrôle conscient sur son apprentissage. L’étude de ces deux phénomènes contribue selon nous à ancrer l’apprentissage collectif dans une réalité pratique, dans la mesure où, lorsque des actions et des gestes conscients sont posés par les apprenants, ces derniers gagnent en autonomie et peuvent appliquer des stratégies leur permettant de croître pour devenir les professionnels qui créeront la société de demain. Cette vision holistique de l’apprenant permet de tendre vers un idéal d’autoactualisation, concept qu’Abraham Maslow (1968) a placé au sommet de sa pyramide des besoins. Chez Donald Kiraly (2012), elle constitue également la base d’une approche pour enseigner la traduction. Kiraly, dont l’épistémologie s’inspire notamment des travaux de l’humaniste Carl Rogers et du courant socio-constructiviste, a attribué le qualificatif holistic-experiential (Kiraly 2012 : 90) à cette approche de l’enseignement axée sur l’expérience authentique et faisant intervenir l’ensemble des dimensions de l’individu et de son environnement. C’est aussi dans le sens d’une expérience globale que nous concevons l’apprentissage, soit à l’intérieur d’une communauté de pratique où l’affectif occupe une place au même titre que l’intellect, et où l’autoréflexion et l’analyse individuelle côtoient la réflexion critique et le dialogue. À l’instar de certains humanistes et d’autres adeptes de l’approche historico-socio-culturelle vygotskienne, nous croyons que l’acquisition du savoir se fait non seulement à partir de l’intellect, mais aussi au moyen de l’émotion et de l’action, c’est-à-dire « avec la tête, le cœur et les mains » (Connery et Curran 2010 : 155). Loin de considérer les travaux des cognitivistes comme déconnectés du monde du senti, nous les voyons plutôt comme des portes ouvertes sur une métaréflexion permettant d’allier connaissance et dépassement de soi. Nous croyons que ce dépassement peut se manifester de diverses façons, que ce soit par l’acquisition des compétences propres à un domaine, de l’habileté à gérer les savoir-faire et les connaissances qui y sont rattachés ou encore par une participation et une contribution toujours plus accrues de l’apprenant au microcontexte social (la classe) et à la communauté élargie des professionnels du métier. Dans cet article, c’est la composante métacognitive de l’apprentissage qui fera l’objet de notre attention.

3Afin d’explorer le sujet, nous décrirons les avenues pouvant être empruntées par les formateurs dans deux domaines qui partagent plusieurs points en commun : la traduction et la musique. Après avoir dressé des parallèles entre ces deux domaines, nous aborderons certaines études réalisées en cognition traductionnelle et en cognition musicale. Nous nous pencherons ensuite sur des questions relatives à la conception d’outils pédagogiques renfermant une composante métacognitive en proposant des exercices d’autoréflexion tirés ou inspirés de manuels de formation conçus pour l’apprentissage de la traduction et de la musique. Pour conclure, nous présenterons d’éventuels thèmes de discussion et de projets de recherche collaboratifs entre les chercheurs et formateurs qui s’intéressent à la cognition dans ces deux disciplines.

Traduction et musique... sur une même longueur d’onde

4Qu’ont en commun l’apprentissage professionnel de la traduction et celui de la musique ? Tout d’abord, comme chacun le sait, la musique est un langage. La traduction, de son côté, a pour principal outil les langues. Il s’agit là d’un premier parallèle pouvant être dressé entre la discipline musicale et celle de la traduction, la dernière mettant en commun deux langues plutôt qu’une (du moins dans son acception la plus répandue). Sur le plan cognitif, il apparaît justement que la musique et les langues, principaux outils de travail du traducteur, pourraient avoir la même origine. Dans ses études sur les différences entre la représentation cognitive du système tonal majeur-mineur chez les enfants et les adultes, Stefan Koelsch (2014) a d’ailleurs conclu à cette origine commune dans le cerveau humain. En effet, le traitement de la musique et du langage se feraient dans le même hémisphère du cerveau chez les enfants (ce traitement diffère quelque peu chez l’adulte). D’autres recherches (Koelsch and Friederici 2003 ; Trehub, Schellenberg et Hill 2000 ; Sadakata, van der Zanden et Sekiyama 2010 et Schellenberg 2004) ont établi un lien important entre les compétences linguistiques et la musique. Le rôle des caractéristiques musicales du langage (ex. : motifs sonores, structures syntaxiques) dans l’acquisition des compétences linguistiques a notamment été mis en évidence (Koelsch & Friederici 2003 : 25). En ce qui concerne la formation musicale, il appert qu’en plus d’augmenter le QI des apprenants (Schellenberg 2004 : 513), elle peut faciliter l’apprentissage d’une deuxième langue en favorisant la reconnaissance de la hauteur et de la durée des sons, de même que les nuances propres au système vocalique (Sadakata van der Zanden & Sekiyama 2010 : 121). Par ailleurs, bien que l’acquisition de connaissances procédurales soit nécessaire en musique et en traduction, une grande partie de la formation dans ces deux disciplines est axée sur l’acquisition et le perfectionnement d’une méthode de travail qu’on appellera plus souvent méthodologie en traduction et technique en musique. Les deux domaines exigent donc une formation requérant l’acquisition de connaissances non seulement déclaratives (savoir), mais aussi procédurales (savoir-faire) et conditionnelles1.

5Notons également que les phases du processus musical et du processus de la traduction présentent des similarités. Alors que le processus musical se décompose en tâches de lecture, d’interprétation2 (décodage) et de reproduction (la performance), le processus de la traduction se décline en trois phases principales : les phases de lecture (compréhension) et de reformulation, qui sont encore ici séparées par une phase d’interprétation du sens (qu’on désigne parfois comme la déverbalisation3). Dans les deux cas, notons que ces phases se chevauchent et sont de nature récursive au cours d’une même opération, qu’il s’agisse de traduire un texte ou d’exécuter une pièce musicale. Pour toutes ces raisons, il nous semble intéressant de voir comment les domaines de la traduction et de la musique pourraient s’enrichir des avancées réalisées à la fois en cognition traditionnelle et en traduction musicale.

Mise en évidence des traits communs à partir de deux modèles de compétence

6Il semble que plusieurs parallèles puissent être établis entre les compétences requises de la part du musicien professionnel et celles exigées du traducteur dans le monde du travail. C’est à partir des modèles de compétence traditionnelle proposés par le groupe PACTE (2003)4 et Kelly (2002), deux modèles similaires mais complémentaires, que nous nous proposons de mettre en lumière les diverses composantes de la formation professionnelle partagées à la fois par les traducteurs et les musiciens. Dans le premier modèle, celui du groupe PACTE (2003), la sous-compétence stratégique occupe une place centrale. Elle est reliée à quatre autres sous-composantes : bilingue, extralinguistique, instrumentale et connaissances en tradition. À la base de cet ensemble se trouvent les composantes psychophysiologiques, qui influent sur l’ensemble des sous-composantes précédentes. Le deuxième modèle, celui de Kelly (2002) prend la forme d’une pyramide ayant pour sommet la sous-compétence stratégique. À la base de cette pyramide se trouvent les six sous-compétences suivantes : communicative et textuelle dans au moins deux langues et cultures, instrumentale professionnelle, psychophysiologique, thématique, culturelle et interpersonnelle. Notons que les éléments qui constituent les diverses composantes de la compétence traditionnelle se retrouvent en majeure partie dans les deux modèles, à l’exception de la composante interpersonnelle, qui n’apparaît pas dans le modèle du groupe PACTE.

7En combinant les éléments des deux modèles, voyons maintenant quelles sont les compétences communes entre la formation professionnelle des traducteurs et celle des musiciens. Si on s ’ attarde plus spécifiquement au modèle de Kelly, on remarquera que l’une de ces sous-compétences porte le nom de sous-compétence thématique. Il s’agit de la connaissance liée aux domaines abordés dans les textes à traduire. Elle rejoint la sous-compétence extralinguistique du modèle de PACTE, qui couvre toutefois un peu plus large pour inclure les « connaissances biculturelles, encyclopédiques et thématiques, textuelles et lexico-grammaticales » (Hurtado Albir 2008 : 28). Pour dresser un parallèle avec la musique, on pourrait penser aux connaissances que doivent acquérir les musiciens quant aux divers styles et genres musicaux, à leurs particularités rythmiques, mélodiques, et autres (appogiatures ou inflexions particulières liées aux styles, par exemple). Le modèle de Kelly comporte également une sous-compétence communicative et textuelle dans au moins deux langues et cultures ainsi qu’une sous-compétence culturelle, éléments qui se retrouvent dans la sous-compétence bilingue du groupe PACTE et en partie dans la sous-compétence extralinguistique définie précédemment. Dans le modèle de Kelly, cette première sous-compétence comprend la connaissance des conventions textuelles ainsi que « les phases passive et active de la communication » (Kelly 2002 : 14), qu’on peut assimiler respectivement à la compréhension (lors de la lecture d’un texte écrit ou l’écoute d’un discours oral) et l’expression (encore une fois écrite ou orale, selon que l’on parle de l’activité du traducteur ou de l’interprète). Pour le groupe PACTE, la sous-compétence bilingue se définit quant à elle comme un ensemble de « connaissances essentiellement opérationnelles, nécessaires à la communication en deux langues » (Hurtado Albir 2008 : 28). Kelly (2002) précise que la sous-compétence culturelle comprend les connaissances encyclopédiques, mais aussi les mythes, croyances, valeurs et comportements propres aux pays où sont parlées les langues de travail. Si on revient une fois de plus à la musique, on note que, même si l’interprétation musicale ne nécessite pas la connaissance de deux langues distinctes, elle requiert d’un côté une connaissance du langage écrit de la partition (langage musical) et de la culture musicale qui y correspond, et de l’autre, une connaissance du langage musical sonore propre à l’instrument joué, langage qui est lui aussi rattaché à une culture musicale. Par ailleurs, le modèle de compétence traductionnelle de Kelly comporte également une composante appelée sous-compétence interpersonnelle. Il s’agit d’une sous-compétence qui a trait à la capacité de travailler en équipe et d’interagir de manière professionnelle avec les autres intervenants du milieu. Pour le traducteur, cette sous-compétence se manifestera dans les relations qu’il entretient avec les clients, donneurs d’ouvrage, terminologues, experts de divers domaines, etc. Pour le musicien, elle touchera les relations interpersonnelles avec ses pairs (musiciens qui l’accompagnent) et avec le public, les agents, les producteurs et les techniciens, par exemple.

8Le modèle proposé par le groupe PACTE et celui de Kelly comportent aussi tous deux une sous-compétence instrumentale. Celle-ci a trait à la connaissance et à l’utilisation adéquate des outils nécessaires à l’exécution de l’opération traduisante. Kelly (2002) y ajoute également une composante professionnelle5 qui comprend l’habileté à gérer les tâches administratives liées à l’activité du traducteur (factures, contrats, etc.) et touche les aspects déontologiques du travail. Pour faire le parallèle entre la traduction et la musique, le traducteur doit pouvoir se servir des outils de référence (papier ou en ligne) et d’outils informatiques tels que mémoire de traduction, concordanciers, bitextes, banques terminologiques, alors que le musicien doit, de son côté, acquérir une maîtrise de son instrument et, selon le genre musical qu’il exécute, celle d’équipements connexes (amplificateurs, effets sonores, logiciels de notation musicale, etc.). En traduction, sont incluses dans cette sous-compétence l’identification, l’évaluation et l’utilisation des diverses sources de documentation et la réalisation de recherches terminologiques. En musique, ces activités pourraient correspondre à des recherches visant une meilleure compréhension de la pièce à jouer, de son contexte historique ou des autres interprétations qui en ont été faites (une activité qui s’apparente à la recherche de textes parallèles en traduction). Enfin, deux autres composantes entrent dans le modèle de compétence traductionnelle, soit les sous-composantes dites stratégique et psychophysiologique. La sous-compétence stratégique a trait aux « processus liés à l’organisation et à la réalisation de la tâche, à l’identification et à la résolution de problèmes et à l’autoévaluation et la révision » (Kelly 2002). Le groupe PACTE (2005) la considère comme la plus importante des sous-compétences puisqu’elle est responsable de l’activation de toutes les autres sous-compétences et du contrôle exercé sur celles-ci (notamment la compensation dans le cas de lacunes). Comme on peut le remarquer, tous les éléments énumérés dans la définition précédente font aussi partie de l’expérience des musiciens, qui doivent se familiariser avec la pièce à jouer, en saisir les subtilités, résoudre les difficultés techniques qu’elle présente, évaluer leurs progrès et l’atteinte de leur but et passer en revue leur performance pour voir si elle répond aux critères de qualité exigés. La composante psychophysiologique regroupe de son côté des composantes à la fois cognitives (mémoire, attention), altitudinales (persévérance, jugement critique) et psychomotrices (PACTE 2005). Pour Kelly (2002), elle se rapporte à la conscience de soi et à la confiance en soi ainsi qu’aux capacités d’attention et de mémorisation. Encore une fois, toutes ces facettes de la compétence concernent aussi bien les traducteurs que les musiciens. C’est d’ailleurs sur ces deux dernières sous-compétences, qui touchent les aspects cognitifs et métacognitifs de l’apprentissage, que nous nous pencherons dans les pages qui suivent.

L’importance des recherches en cognition pour la formation des musiciens et des traducteurs

9Parmi les axes de recherche de la discipline traductologique, les recherches en cognition recèlent un grand potentiel heuristique pour l’amélioration de la formation pratique des traducteurs. Les travaux accomplis dans ce domaine visent notamment à analyser les stratégies employées par les traducteurs et à mettre au jour celles que privilégient les experts, les « excellents étudiants » ou les auteurs des meilleures traductions. Est-ce qu’une recension de ces stratégies pourrait aider le formateur à mieux guider ses étudiants dans l’adoption d’une méthodologie plus efficace ? Les recherches en cognition ne se prononcent pas encore à ce sujet. À notre avis, il vaut toutefois la peine de se pencher sur les conclusions de ces recherches afin d’y puiser de l’inspiration pour susciter chez les étudiants une réflexion sur leur méthode de traduction. Tout en gardant en tête que les expériences réalisées en cognition traductionnelle l’ont été dans des conditions très diverses, nous présenterons ici quelques-unes des conclusions tirées par les chercheurs :

  • Les traducteurs professionnels prennent certaines décisions dès le départ et établissent des règles à suivre en fonction de ces décisions initiales (Jääskeläinen 1989).

  • Les professionnels s’en remettent à leurs connaissances encyclopédiques pour résoudre un problème plutôt que d’envisager ce dernier sous un angle purement linguistique (Tirkkonen-Condit 1989).

  • Les meilleurs étudiants traduisent en effectuant un aller-retour entre le texte source et le texte cible (Séguinot 1991).

  • Peu importe leur expérience en traduction, les traducteurs qui réussissent le mieux la tâche portent une grande attention au contenu factuel du texte source et aux besoins de leur lectorat cible (Jääskeläinen et Tirkkonen-Condit 1991).

  • Les traducteurs professionnels ont tendance à traduire sans interruption le plus longtemps possible en corrigeant les fautes d’orthographe et les coquilles et font une pause plus longue pour apporter les corrections les plus importantes (sens) (Séguinot 1989).

10Dans le cadre de ses études empiriques en cognition traductionnelle, Erik Angelone (2010) s’est intéressé à la gestion de l’incertitude et à la résolution de problèmes sur le plan métacognitif. Il a constaté pour sa part que le comportement professionnel est marqué par une identification du problème, une recherche de solution et une évaluation systématique, c’est-à-dire que les professionnels règlent un problème en passant par un cycle cognitif complet avant de s’intéresser à un nouveau problème. Les études empiriques en cognition musicale donnent des résultats semblables. Rita Aiello note en effet que :

[l]es instrumentistes professionnels peuvent facilement évaluer les exigences d’une tâche, élaborer des stratégies pour surmonter les difficultés qu’elle présente, mesurer leurs progrès, repérer leurs erreurs et faire un lien entre leurs stratégies de répétition et de mémorisation, d’un côté, et la structure théorique d’une pièce musicale, de l’autre. (Aiello 2003 : 656, notre traduction)

11Mais comment ces constats peuvent-ils nous aider lorsqu’il s’agit de guider les apprentis vers l’acquisition des aptitudes qui caractérisent les professionnels de leur domaine respectif ? Comme le fait remarquer Michel Politis,

[l]’apprenti traducteur est appelé à traiter parallèlement plusieurs informations supposant des degrés de concentration différents. La concentration sur l’un de ces problèmes implique une difficulté pour garder en mémoire de travail des informations issues de traitements précédents. (Politis 2007 : 161)

12Outre les difficultés inhérentes au texte (terminologiques, sémantiques...) que l’apprenti traducteur peut rencontrer, il doit aussi répondre à des critères de qualité dont la liste s’allongera au fil de sa formation (respect du sens, du caractère idiomatique de la langue d’arrivée, des conventions textuelles propres au genre, du ton, de la fonction du texte, qualité de la langue, etc.). Le même problème se pose pour les musiciens novices au cours de leur apprentissage, puisqu’ils visent une performance qui exige à la fois la justesse, le respect du rythme, des nuances et de l’intonation ainsi qu’une position corporelle adaptée et une manipulation appropriée de l’instrument – ajoutons à cette liste la prononciation, l’émotion, la projection, le souffle et l’ouverture de la gorge pour les chanteurs. (Et ce ne sont là que quelques-uns des critères de qualité d’une performance musicale... en solo !). Le problème de surcharge cognitive semble donc un axe de recherche intéressant pour l’amélioration de la formation des traducteurs et des musiciens.

13Comment les recherches en cognition, en particulier celles liées à la métacognition, peuvent-elles nous éclairer sur la méthodologie à enseigner et les stratégies de traduction les plus efficaces ? Du côté de la cognition musicale, il existe une avenue ayant très peu été explorée à ce jour et qui constituerait un complément parfait à l’étude de l’excellence. C’est celle qui nous a été suggérée par Maria Sandgren (2009). La chercheuse constate que très peu de travaux se sont penchés sur le développement des compétences musicales sous le point de vue des principaux intéressés : les étudiants. D’après Sandgren (2009), les chercheurs en cognition musicale considèrent rarement le développement de stratégies d’apprentissage efficaces comme une composante essentielle de l’expertise musicale. Et pourtant, les résultats de ses travaux démontrent que les étudiants accordent une grande importance à la connaissance de stratégies permettant de mieux apprendre. Aiello (2003) croit pour sa part que les formateurs devraient s’attarder aux compétences métacognitives et les aborder explicitement en classe. Ces réflexions nous amènent à nous pencher sur la métacognition et son importance dans l’apprentissage. Mais tout d’abord, qu’entend-on par métacognition ? Comme le souligne Jacques Tardif (2006), le concept de métacognition est sujet à plus d’une interprétation. D’après Bissonnette et Richard,

[la métacognition] représente la capacité à réfléchir sur sa propre pensée, à conscientiser, à contrôler et à superviser les différents processus mentaux utilisés dans le traitement de l’information afin d’assurer leur fonctionnement optimal. (Bissonnette et Richard 2005 : 328)

14Comme on peut le remarquer, la définition ci-dessus ne rend pas compte des dimensions affectives de l’apprentissage. C’est pourquoi nous lui préférons celle de Hacker (1998), citée par Jacques Tardif (2006) :

Hacker (1998) précise qu’il est généralement admis – il fait même référence à un consensus – que la métacognition concerne, d’une part, la conscience qu’une personne a de ses propres connaissances, de ses processus ainsi que de ses états cognitifs et affectifs et, d’autre part, sa capacité de gérer et de réguler ses connaissances, ses processus de même que ses états cognitifs et affectifs. (Tardif 2006 : 48)

15Cette dernière définition laisse apparaître le rôle central d’une prise de conscience ou d’une réflexion chez l’apprenant qui sonde son intérieur et ses propres habitudes pour mieux se comprendre, s’ajuster et autoréguler ses activités. Le processus d’autorégulation, qui fait partie intégrante de la métacognition, joue d’ailleurs un rôle primordial dans l’acquisition de ce que Susann Herold (2010) considère comme une « métacompétence » (de la compétence) traductionnelle, soit celle qui consiste à savoir comment apprendre. L’autorégulation est un « ensemble complexe de processus et de croyances » (Fréchette, Legault et Brodeur 2010 : 89). Celle-ci « englobe les pensées, les sentiments et les actions de l’apprenant au cours de sa démarche d’apprentissage » (ibid). D’après Barry J. Zimmerman (1998), les théoriciens de l’autorégulation décomposent le processus d’autorégulation en trois phases correspondant respectivement aux périodes avant, pendant et après l’effort ou la performance : la planification6 (forethought), le contrôle d’exécution (performance or volitional control) et l’autoréflexion (self-reflexion). Dans ce cycle, la planification englobe les pensées et croyances ayant trait aux buts, à la valeur accordée à l’activité, au sentiment d’autoefficacité (croyances positives entretenues par rapport à ses propres capacités d’apprentissage ou de performance), aux stratégies choisies pour réaliser l’activité ainsi qu’à la motivation. Munis de cet arsenal, les apprenants entreprennent leur tâche et s’engagent dans la phase de contrôle d’exécution, au cours de laquelle ils verbalisent les actions à accomplir, se donnent des instructions ou vérifient leur niveau d’attention, par exemple. La phase d’autoréflexion constitue quant à elle un retour sur la performance en fonction des résultats obtenus (ex. : commentaires ou notes du formateur). C’est lors de cette phase que les apprenants évaluent leur performance, que ce soit en la comparant avec un modèle fourni par l’enseignant, une performance précédente ou les buts qu’ils s’étaient fixés lors de la phase de planification. C’est aussi à ce moment qu’on assiste au phénomène d’attribution, c’est-à-dire l’association faite entre la réussite (ou l’échec) et un facteur particulier (stratégies employées). Ensuite, lors de la phase d’autoréflexion, les apprenants adapteront leur comportement et leurs stratégies en fonction des résultats obtenus. Leurs croyances initiales ayant subi l’effet du processus d’autorégulation, le cycle sera ainsi complété, et reprendra lors d’une performance subséquente.

16Comme on peut le remarquer, les trois phases de l’autorégulation font à leur tour intervenir des facteurs qui sont dignes d’intérêt dans l’étude de la composante métacognitive de l’apprentissage. Les travaux menés dans ce domaine ont en effet permis de tracer un portrait de l’apprenant autorégulé – un apprenant qui sait générer les pensées, les émotions et les actions nécessaires à l’atteinte de ses objectifs d’apprentissage (Tillema et Kremer-Hayon 2002 : 594) – tout en mettant en évidence les attitudes et comportements les plus propices à la réussite scolaire. Parmi ceux-ci, on remarque notamment une propension à se rappeler les progrès réalisés (plutôt que les erreurs passées ou les performances des pairs) ainsi qu’un grand sentiment d’auto-efficacité. Moins sujets à la distraction, les apprenants autorégulés se fixent des buts élevés qu’ils décomposent en une séquence d’objectifs réalistes, ce qui leur permet d’affronter les obstacles plus facilement. Dans la phase d’autoréflexion, ces apprenants effectuent enfin un retour sur la tâche réalisée en valorisant leurs efforts et en attribuant leur réussite à leur compétence plutôt qu’à des facteurs contextuels externes, et en évaluant les méthodes et stratégies gagnantes et celles qui doivent être modifiées. Selon Zimmerman (1998), il est important de familiariser les étudiants avec le cycle d’apprentissage (planification, contrôle d’exécution, autoréflexion), car celui-ci constitue une base sur laquelle repose l’autonomisation de l’apprenant. (Zimmerman 1998 : 10). Mais outre l’amélioration des stratégies d’apprentissage, certains aspects affectifs, psychologiques et relationnels revêtent autant d’importance que les compétences cognitives pour la préparation de l’apprenti au milieu du travail. C’est ce qu’Álvaro Echcvcrri (2008) a noté dans son analyse de trente-neuf rapports de stage rédigés par des étudiants de traduction de l’Université de Montréal. L’étude de ces rapports lui a en effet permis de recenser neuf facteurs métacognitifs qui constituent autant d’aptitudes à acquérir pour bien fonctionner dans le monde du travail. Ceux-ci ont trait aux relations interpersonnelles, à l’autoévaluation, à l’adaptation, à l’autogestion (qui inclut l’autorégulation), à la révision ainsi qu’aux stratégies d’apprentissage, à la prise de conscience, à la confiance en soi et à la responsabilisation. Bien entendu, il s’agit là de facteurs à prendre en considération dans la formation des futurs professionnels. Comme les observations précédentes s’appliquent autant au domaine de la musique qu’à celui de la traduction, nous axerons nos prochaines observations sur la composante métacognitive de l’enseignement et de l’apprentissage, en particulier sur sa présence dans les outils de formation que sont les manuels.

La composante métacognitive dans les ouvrages de formation

17Si on s’entend pour dire que la pratique a un rôle essentiel à jouer dans l’acquisition des compétences en traduction et en musique, qu’en est-il de la contribution du formateur ? Comment celui-ci peut-il guider les apprenants vers une maîtrise des stratégies leur permettant de progresser et d’acquérir le professionnalisme exigé sur le marché du travail ? Nous croyons que les résultats des recherches en cognition nous guident en partie pour répondre à ces questions, mais qu’une réflexion sur leurs applications pratiques est aussi nécessaire. Nous proposons ainsi l’intégration d’exercices qui s’inspirent de ces recherches, que ce soit dans les cours ou les ouvrages conçus pour la formation des étudiants.

18L’un de nos champs de recherche est l’exploration des manuels de traduction et l’analyse de leur contenu pédagogique. Dans une analyse comparative de manuels de traduction anglais-français (Marchand 2011), nous avons procédé à une étude des ouvrages en prenant appui sur les diverses approches en enseignement de la traduction (Kelly 2005). Nous en avons tiré quatre composantes d’un « noyau conceptuel des approches en enseignement de la traduction » : les objectifs d’apprentissage, la méthodologie, les aspects métacognitifs et les réalités professionnelles. Ayant noté une présence très peu marquée des composantes métacognitives dans les ouvrages de formation, nous en avons conclu qu’il serait opportun d’approfondir ce sujet en procédant à une recension plus vaste de manuels, en l’occurrence des ouvrages destinés aux apprenants d’autres paires de langues. Bien que les exemples recueillis jusqu’à présent soient peu nombreux, nous fournirons dans cette section des modèles inspirés de manuels qui favorisent le développement de stratégies métacognitives en traduction. Les exercices de réflexion portent en particulier sur la gestion de l’apprentissage, les stratégies d’identification et de résolution de problèmes (grâce à l’établissement d’objectifs et de stratégies), ainsi que l’image de soi. Chacun des exercices présentés peut être adapté, le cas échéant, aux traducteurs ou aux musiciens. Le premier exemple est tiré du manuel de traduction de Maurice Rouleau (2001). Dans une section de son manuel de traduction, Rouleau invite les étudiants à une réflexion sur leurs forces et leurs faiblesses en leur proposant les questions suivantes :

Suis-je conscient :
• des limites de mes ressources intellectuelles (connaissances) et psychologiques (motivations) ?
• des exigences de ma future tâche ?
• des stratégies utiles pour résoudre mes difficultés (habiletés) ?
(Rouleau 2001 : 33, expressions en gras dans le texte original)

19Les questions posées par Rouleau peuvent bien entendu être employées dans une phase préparatoire à l’exercice de la traduction, mais s’avèrent également utiles à l’apprenant tout au long de son processus d’apprentissage ou de sa formation dans la mesure où elles lui permettent de mesurer son évolution et ses progrès. Tandis que la première question amène l’étudiant à effectuer un bilan de ses acquis, de ses dispositions et intérêts, la deuxième requiert plutôt de celui-ci qu’il précise ses représentations existantes de la profession et des contraintes qui y sont rattachées. Tout comme la première question, la troisième est de nature introspective et métacognitive, mais touche cette fois-ci la résolution de problèmes. L’enseignant, tout comme l’étudiant, pourra tirer profit de cet exercice. Le formateur pourra notamment s’inspirer de la deuxième question pour proposer un projet significatif aux étudiants, comme rassembler des offres d’emploi qui les intéressent et faire une liste des qualités ou des exigences requises par les employeurs. Quant à la troisième question, elle peut aussi bien toucher les stratégies d’apprentissage en général que les difficultés rencontrées lors de la traduction. Elle se prêtera toutefois mieux dans un contexte où les étudiants ont déjà acquis une certaine expérience de la traduction. Enfin, on pourra obtenir un portrait de la classe en demandant aux étudiants, lors d’une première rencontre, pourquoi ils ont choisi leur domaine d’étude, quelles sont les compétences et connaissances qui les rendent aptes à exercer leur future profession, et quels sont les aspects qu’ils pensent devoir travailler pour atteindre le niveau de maîtrise souhaité.

20Toujours dans le domaine de la traduction, Ignacio Palacios Martinez et Elena Seoane Posse (2000) proposent quant à eux une activité complète, sous forme de fiche, dont l’une des questions porte sur les écueils que les étudiants redoutent le plus en traduction. Les auteurs suggèrent également une liste que les étudiants sont invités à compléter :

Quels sont les écueils que vous redoutez le plus lorsque vous traduisez ? Dans la liste suivante, choisissez-en cinq et placez-les en ordre décroissant d’importance. (N’hésitez pas à allonger la liste, au besoin.)
• Ordre des mots dans la phrase
• Traduction trop littérale
• Traduction trop libre
• Vocabulaire inapproprié
• Phrases trop longues
• Emploi d’expressions non idiomatiques
• Fautes de nature grammaticale (lesquelles ?)
• Manque de fluidité et de naturel
• Fautes de sens
• Traduction mot à mot, difficulté à traduire à partir du sens global du texte de départ
(Palacios Martinez & Seoane Posse 2000 : 118, notre traduction)

21L’exercice suggéré par Palacios Martinez et Seoane Posse présente l’avantage de favoriser chez les apprenants une autoévaluation très ciblée. En effet, les auteurs ne présentent pas ici un répertoire des difficultés de traduction lexicales ou grammaticales, par exemple (comme c’est le cas dans La traduction raisonnée, Delisle et Fiola 2013), mais invitent plutôt les étudiants à procéder à un autodiagnostic qui facilitera chez eux la prise de mesures pour remédier à des problèmes spécifiques qu’ils éprouvent. Les apprenants ont ainsi un meilleur portrait de ce qu’ils considèrent comme leurs compétences actuelles et peuvent comparer ce portrait avec la rétroaction de leur enseignant. À la suite de l’exercice, on pourra envisager une prise de décision autonome de la part de l’étudiant ou, au besoin, des conseils de la part de l’enseignant pour faciliter l’acquisition des connaissances ou compétences lacunaires.

22Cet exercice peut aussi constituer le tremplin pour une autoréflexion plus poussée sur le thème de la rétroaction, à l’occasion de laquelle les étudiants plus avancés procéderont à un bilan de la rétroaction reçue de la part de l’ensemble de leurs enseignants. Un exercice d’autoréflexion pourra consister à s’interroger sur le type et la fréquence des corrections apportées à leurs traductions et à développer leur jugement en faisant le tri parmi les commentaires qu’ils considèrent comme les plus pertinents, tout en évaluant leur utilité pour la progression de leur apprentissage. À partir de là, les étudiants seront mieux à même de constater leur rapport général à la rétroaction. Lorsqu’ils reçoivent une traduction, par exemple, se contentent-ils de lire passivement les commentaires ou prennent-ils le temps de réviser leur traduction pour en produire une version améliorée (en posant les questions nécessaires au formateur, au besoin) ? Certains étudiants se rendront peut-être compte qu’ils ont plutôt tendance à ignorer totalement les commentaires et à se concentrer plutôt sur la note obtenue. Cette prise de conscience pourra se faire spontanément et individuellement ou être facilitée par l’enseignant au moyen d’une discussion. Au terme de la réflexion et de la discussion, les étudiants découvriront peut-être qu’ils ne savent tout simplement pas quoi faire des commentaires ou qu’ils ne leur accordent tout simplement pas de valeur, soit en raison de leur complexité ou du manque de clarté dans leur présentation, par exemple, ou d’un manque de confiance ou d’estime en regard du formateur. Il y aura là un terrain fertile pour une « inter-rétroaction », c’est-à-dire une rétroaction qui permettra à la fois au formateur et aux étudiants d’améliorer leurs performances.

23Notre troisième exemple, tiré d’un ouvrage intitulé Power Performance for Singers, renferme quant à lui deux composantes principales et complémentaires, soit les objectifs et les stratégies. Dans un premier temps, Shirlee Emmons et Alma Thomas proposent aux étudiants de se fixer deux objectifs pour leur leçon de chant, puis, dans un deuxième temps, de réfléchir de manière stratégique aux façons de les atteindre :

Objectifs
Pensez à une pièce que vous voulez travailler au cours de votre prochaine leçon de chant. Écrivez ensuite deux aspects de cette pièce que vous voudriez améliorer pendant votre leçon. […] Il pourra s’agir d’une note aiguë, d’un interlude, de l’introduction, du message, etc.

Focalisation, attention, conscience
Afin d’atteindre ces deux objectifs et de bien exécuter votre pièce, sur quels éléments focaliserez-vous votre attention ? De quoi devrez-vous avoir conscience ?
(Emmons et Thomas 1998 : 113, notre traduction)

24À la lecture de cet exercice, on constate que les auteures proposent aux apprenants de se fixer un nombre limité d’objectifs, ce qui ne peut qu’avoir un impact positif sur la motivation, puisque l’apprenant n’a pas à jongler avec trop de variables à la fois. Cette approche, qui est en accord avec les stratégies d’autorégulation vues précédemment (décomposition de l’objectif principal en plusieurs objectifs réalisables), n’est pas non plus sans rappeler la suggestion du traductologue Daniel Gile (2005) en ce qui concerne la présentation d’un nombre restreint d’éléments d’évaluation pour une traduction, mais cette fois-ci dans l’optique du formateur qui établit les objectifs :

Dans la mesure où il est entendu que l’enseignant se concentre sur le processus et non pas sur le produit, il peut, à chaque étape, se permettre de se focaliser dans ses interventions correctrices sur l’aspect qu’il veut mettre au centre des efforts au moment concerné et ne pas se préoccuper du reste. Ainsi, il peut décider dans une première étape d’insister sur la compréhension du texte de départ et ne pas corriger les maladresses de reformulation ou les mauvais choix terminologiques [...]. (Gile 2005 : 28-29)

25Notons par ailleurs que la partie plus stratégique de l’exercice, en raison de sa formulation (l’emploi du terme « éléments », par exemple), peut couvrir assez large. Elle comporte toutefois l’avantage de laisser l’apprenant explorer les différentes dimensions de l’attention et de la prise de conscience. Nous proposons ci-dessous une simulation illustrant, au moyen de deux exemples, la démarche possible d’une étudiante. Les extraits choisis sont tirés de l’oratorio Matthaüs-Passion (La Passion selon saint Mathieu) de Jean-Sébastien Bach.

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Figure 1 : Premier extrait de l’oratorio Matthaüs-Passion (J.-S. Bach)

26Premier objectif : améliorer la fluidité dans l’intervalle de sixte majeure descendante (Wiewohl) dans la première mesure du récitatif Wiewohl mein Herz in Tränen schwimmt. Ma stratégie consistera à me concentrer sur le son de la voyelle « o » pour garder la même ouverture et la même qualité sonore pendant la descente.

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Figure 2 : Deuxième extrait de l’oratorio Matthaüs-Passion (J.-S. Bach)

27Deuxième objectif : rendre le passage So macht mich doch sein Testament erfreut plus fluide, moins saccadé. Voici ma stratégie : je focaliserai sur les voyelles et non sur les consonnes, en particulier sur les voyelles suivies d’un « n », soit le son « a » dans « sein » et le son « è » dans « Testament » (je laisse le « i » se former de lui-même juste avant la prononciation de la nasale « n »).

28Notons que, pour ce même passage, l’objectif aurait pu toucher l’interprétation sur le plan émotif, par exemple communiquer la joie dans le passage. L’étudiante aurait ainsi fait appel à d’autres stratégies, comme évoquer un souvenir heureux ou tout simplement se rappeler de sourire intérieurement. La simulation précédente illustre les avantages d’un exercice comme celui que proposent Emmons et Thomas (1998). S’ il est effectué de façon autonome, dans un premier temps, et soumis au formateur par la suite, l’exercice permettra de rendre compte des concepts qui ont été assimilés (ex. : fluidité, ouverture, etc.) ainsi que de l’habileté de l’étudiante à se fixer des instructions et stratégies (avant) et à se donner des instructions (pendant, c’est-à-dire dans la phase de contrôle d’exécution). On aura ainsi un bon indicateur des progrès réalisés par l’étudiante lors de ses répétitions individuelles. Selon le niveau de l’étudiante, l’exercice peut aussi être guidé et effectué en temps réel. Le formateur posera alors les questions appropriées et évaluera le niveau d’assimilation technique de l’étudiante, pour ensuite proposer des types de stratégies (psychologique et émotionnelle, kinesthésique, mentale, etc.) auxquelles l’étudiante pourra avoir recours.

29Comme on peut le remarquer, les exemples précédents montrent qu’il est possible de sensibiliser les traducteurs et les musiciens novices à la composante métacognitive de l’apprentissage et de susciter chez eux une réflexion qui leur permet de renforcer leur autonomie. En effet, il est important que ces derniers fassent un effort conscient pour, d’une part, établir un lien entre les connaissances antérieures et les nouvelles informations et, d’autre part, associer à leur action une « signification personnelle » (Barth 1993 : 173). Nous croyons que l’introspection et la réflexion critique suscitées par les exercices présentés dans les ouvrages de formation peuvent faciliter l’attribution d’une signification personnelle aux acquis (connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles) des apprenants. En effet, ces activités leur donnent l’occasion de mieux se connaître et, partant, de mieux articuler leur pensée tout en les rendant conscients du pouvoir qu’ils détiennent pour apprendre et s’épanouir.

Des pistes de réflexion pour des recherches interdisciplinaires

30Il existe plusieurs avenues possibles pour une collaboration entre les chercheurs en cognition musicale et en cognition traductionnelle, mais aussi entre ces derniers et les formateurs des deux disciplines. Selon nous, l’étude des approches les plus efficaces pour aider les étudiants à acquérir un savoir procédural comme la méthode en traduction et la technique en musique en fait partie. Puisque la musique et le langage partagent plusieurs points communs sur le plan cognitif, l’étude des trois phases du processus (lecture/compréhension – interprétation/décodage – reformulation/exécution) en traduction et en musique semble pertinente pour trouver des moyens de favoriser l’apprentissage et l’acquisition ou le perfectionnement des compétences, en particulier pour les opérations de lecture/compréhension et de reformulation/exécution. Comme le suggère Politis (2007), l’étude du phénomène de surcharge cognitive constituerait en outre un axe de recherche intéressant, plus encore si les résultats des travaux sur ce sujet mènent à la création d’exercices axés sur la gestion du processus d’apprentissage chez les apprenants. Parmi les questions susceptibles de nourrir les discussions et faire l’objet d’éventuels projets de recherche interdisciplinaire, on pourra également explorer le potentiel d’une réflexion guidée sur les stratégies adoptées par les étudiants et sur leur image de soi en tant qu’apprenants et futurs professionnels de leur domaine respectif. Pour ce faire, on pourra s’attarder aux divers facteurs qui affectent le processus d’autorégulation en procédant à des études, de préférence longitudinales. Parmi ces facteurs, on recensera, par exemple, les objectifs que se fixent les étudiants avant de réaliser une traduction ou d’exécuter une pièce musicale. Par ailleurs, comme l’expliquent Barbara Hofer, Shirley L. Yu et Paul R. Pintrich (1998), le transfert par les apprenants des stratégies métacognitives acquises dans le cadre d’un atelier facultatif hors programme est souvent ardu, les étudiants éprouvant de la difficulté à appliquer ces stratégies au contenu des divers cours de leur cursus. Pour remédier à cette situation, nous sommes aussi d’avis qu’il peut être avantageux pour les formateurs d’accorder une place aux stratégies métacognitives à l’intérieur même de leurs cours. À l’instar de Dale H. Schunk et Barry J. Zimmerman (1998), nous suggérons une recherche concertée entre les chercheurs en cognition et les formateurs. À notre avis, la mise en commun des résultats obtenus lors de recherches réalisées sur le terrain pourrait servir à exposer un éventail de stratégies aux apprenants tout en les aidant à faire les ajustements nécessaires pour progresser dans leur apprentissage. Grâce à une collaboration étroite entre les formateurs et les chercheurs en cognition, il devient plus facile de trouver des applications pratiques pour répondre aux besoins des étudiants en quête de stratégies d’apprentissage, que ce soit en musique ou en traduction. Enfin, nous croyons qu’il est possible d’améliorer la formation des étudiants au moyen d’outils leur permettant d’acquérir ou d’approfondir leur connaissance de stratégies cognitives et métacognitives favorisant l’apprentissage. Les ouvrages de formation comptent parmi ceux-là. Il nous semble donc opportun de s’intéresser aux types d’exercices proposés dans les manuels de formation des traducteurs et des musiciens et de s’en inspirer pour guider les apprenants dans cette direction.

31Favoriser l’apprentissage des étudiants signifie également s’intéresser aux attributs, aux compétences et à la performance de ceux qui les forment. Il apparaît toutefois que l’évaluation des pratiques en enseignement est un axe de recherche encore trop peu exploré dans le domaine de la traductologie, au même titre que la formation continue et l’évaluation formative, en particulier ce qui touche la rétroaction et les commentaires donnés aux étudiants (Kelly 2008). Du côté de la cognition musicale, Blanka Bogunovic (2003) s’est penchée sur les corrélations entre les caractéristiques des professeurs et certains aspects de la réussite des étudiants en musique. Les résultats de ses travaux montrent que les professeurs possédant la plus grande expertise sur leur instrument étaient les plus aptes à favoriser la réussite des étudiants de grand talent sur le plan du savoir-faire technique, alors que les enseignants qui possédaient des qualités comme le sens de la coopération, l’extroversion et l’amabilité offraient une meilleure assistance aux étudiants dans le contexte scolaire et lors de prestations dans des événements de moindre envergure. Bien que ces résultats ne semblent pas surprenants, ils permettent de pousser la réflexion quant aux attributs et compétences nécessaires chez les formateurs en fonction des cours prodigués pendant l’ensemble de la formation. En traduction, on pourrait par exemple se demander quels sont les attributs nécessaires d’un enseignant qui fournit les bases (méthodologie, recherche documentaire et terminologique, traduction générale) dans le cadre de la première année d’études comparativement à ceux de l’enseignant qui donne un cours de traduction avancée ou spécialisée (si tant est que le programme est suivi selon une progression prédéterminée). De même, on pourrait s’attarder sur les qualités requises pour les cours dispensés par les différentes catégories d’enseignants, soit les professeurs enseignant à temps plein, les professeurs qui partagent leur temps entre les tâches de recherche et d’enseignement ou encore les chargés de cours qui évoluent dans la communauté professionnelle des traducteurs.

Conclusion

32Les recherches en cognition représentent à notre avis une avenue des plus prometteuses pour l’amélioration de la formation des futurs professionnels. Afin de stimuler la création de pratiques novatrices, il semble donc pertinent d’explorer les possibilités d’échange entre les chercheurs en cognition de divers domaines, la traduction et la musique étant deux de ceux-là. En résumé, une prise de conscience de la composante métacognitive liée à l’apprentissage dans le cadre d’une formation en classe (ou dans les cours individuels en studio, dans le cas des musiciens) nous semble essentielle. Le travail commun des chercheurs en cognition et des formateurs des deux domaines, en particulier celui effectué sur le terrain, peut s’avérer une bonne méthode pour mettre au jour les stratégies métacognitives des étudiants.

33À partir de ces résultats, il sera plus facile de trouver des applications pratiques (exercices et activités) pour guider les étudiants vers une meilleure autorégulation et augmenter leur confiance en soi. L’étude des exercices proposés dans les manuels existants constitue également une bonne piste de départ. On pourra en effet s’en inspirer pour créer de nouveaux exercices, que l’on proposera dans les manuels à venir ou encore dans la littérature pédagogique destinée aux formateurs dans les deux disciplines. Il semble en effet important de recenser, mais aussi d’élargir le répertoire d’exercices et d’activités offerts dans les ouvrages (pour l’apprentissage autodidacte ou guidé par un formateur). Nous croyons enfin qu’un vaste répertoire d’exercices et d’activités élaborés à partir d’une recherche collaborative, notamment au moyen d’une étude sur le terrain, permettra de tirer profit du potentiel transformateur que recèle une discussion ouverte sur le sujet des stratégies métacognitives d’autorégulation. Une concertation entre les chercheurs en sciences de l’éducation, en cognition musicale et en cognition traductionnelle recèle un potentiel intéressant, notamment pour les formateurs qui sont à l’affût des pratiques novatrices dans leurs classes. Une mise en commun des acquis scientifiques ne peut en effet qu’être profitable, car, comme l’a si bien exprimé Antoine de Saint-Exupéry, « la pierre n’a point d’espoir d’être autre chose que pierre. Mais de collaborer, elle s’assemble et devient temple » (2000 : 211-212).

Bibliographie

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Notes de bas de page

1 Les connaissances conditionnelles correspondent à la « capacité à utiliser le contexte pour déterminer la réponse à apporter ou l’action à accomplir » (Vienneau 2011 : 292).

2 Bien que le terme « interprétation » soit souvent utilisé pour désigner la reproduction d’une œuvre dont le musicien n’est pas le compositeur, nous avons délibérément choisi de l’employer ici dans le sens du décodage de la partition, puisque celui-ci constitue, à notre avis, une interprétation au même titre que l’interprétation du sens en contexte effectuée par le traducteur dans son travail.

3 La déverbalisation est un concept mis de l’avant dans la théorie interprétative de la traduction (voir Lederer 1997 : 17).

4 Le groupe PACTE a proposé son premier modèle en 1998 lors du « IV Congrés Intemacional sobre Traducciô » (Universitat Autònoma de Barcelona). Voir PACTE (2000). Le modèle revisité de 2003 est celui que nous analyserons ici.

5 Notons qu’avant d’être révisé, le premier modèle du groupe PACTE (proposé en 1998) comportait une composante appelée « sous-compétence professionnelle et instrumentale ».

6 La traduction des termes employés pour décrire les phases du processus d ’ autorégulation est celle de Fréchette, Legault et Brodeur (2010 : 90).

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