1 Peu de recherches scientifiques ont été entreprises à ce jour sur son parcours. On peut néanmoins mentionner deux mémoires soutenus à l’université de Lille (et accessibles à la bibliothèque universitaire), l’un en 1992 (Bénédicte Verdier, Le Théâtre Populaire des Flandres 1945-1981 : origine, rôle, influence), l’autre en 2001 (François Carré, Un exemple atypique de la décentralisation théâtrale dans la région lilloise : le Théâtre Populaire des Flandres 1953-1981). En outre, Daniel Lemahieu lui consacre un article dans le Dictionnaire encyclopédique du théâtre à travers le monde (dir. M. Corvin, Paris, Bordas, 2008), ce qui s’explique aisément puisqu’il est lui-même originaire du Nord et a sûrement de nombreux souvenirs de rencontres avec le Théâtre Populaire des Flandres.
2 IRHiS – UMR 8529 (université de Lille / CNRS).
3 Une table des matières exhaustive est disponible sur le site de l’IRHiS : [https://irhis.univ-lille.fr/fileadmin/user_upload/laboratoires/irhis/DocRobichezTPF.pdf]
4 Cyril Robichez entreposait ces archives dans ses bureaux, avenue du Peuple-belge, bureaux détruits par un incendie prétendument criminel – le mystère n’a jamais été élucidé. Une grande partie des photos, articles de presse, et dossiers des spectacles, a été réduite en cendres.
5 Le journaliste Pascal Percq, alors déjà en fonction à La Voix du Nord, témoigne du fait que s’il y eut une telle mobilisation pour Cyril Robichez à diverses périodes de son histoire, ce fut parce que son père Léon, son frère Jacques, sa femme Geneviève (qui travaillait également à La Voix du Nord) étaient journalistes (entretien avec Pascal Percq, 5 décembre 2019). Pour mémoire Pascal Percq, aujourd’hui journaliste et membre actif d’ATD-Quart Monde, est connu pour ses nombreux engagements militants et associatifs, et son attachement au territoire régional. Il fut pendant de nombreuses années à la tête du service « Démocratie participative et citoyenneté » à la mairie de Lille. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages dont Une région pour gagner, la nouvelle aventure du Nord–Pas-de-Calais, La Tour d’Aigues, éditions de l’aube, 2007.
6 Cyril Robichez, La Raison de ma folie. La saga du Théâtre Populaire des Flandres, Paris, Plon, 1990.
7 Maryline Romain, « Du théâtre populaire et des catholiques », dans Marion Denizot (dir.), Théâtre populaire et représentation du peuple, Rennes, PUR, 2010, p. 106.
8 Cyril Robichez, op. cit., p. 22. C. Robichez faisait partie vraisemblablement des Scouts de France. Les Coucous désignaient une des quatre patrouilles du camp-école de Chamarande (91). source : [https://fr.scoutwiki.org/1re_Chamarande].
9 Nous renvoyons ici à un article de Christiane Page, qui montre la façon dont Léon Chancerel a saisi l’occasion du scoutisme pour participer à l’éducation de la jeunesse par le théâtre et aider à la reconstruction de la Nation. Durant la guerre cette mission le conduira à adopter une position un temps favorable à la « révolution nationale » de Vichy. Voir Christiane Page, « Léon Chancerel : du théâtre pour le peuple », dans Marion Denizot (dir.), Théâtre populaire et représentation du peuple, op. cit., p. 167-178.
10 Sur Jeune France, voir également l’article de Jérémie Majorel « Jean Vilar et Jeune France », accessible sur [https://docplayer.fr/64789324-Jean-vilar-et-jeune-france.html]. Consulté le 30 septembre 2021.
11 Cyril Robichez, op. cit., p. 22. Les Compagnons de la chanson s’appellent alors en réalité encore les Compagnons de la musique et ne prendront leur nom définitif qu’en 1946.
12 Louis-François Caude témoigne du fait qu’au sein du groupe Jeune France à Lyon, Cyril Robichez avait rencontré de nombreux jeunes comédiens ou metteurs en scène avec lesquels il a gardé de bonnes relations, même si tous se sont éparpillés par la suite. En 1943, il avait rencontré Geneviève Serreau en même temps que Jean-Marie. Et celle-ci est restée très longtemps en contact avec lui, comme en témoigne le message chaleureux qu’elle envoie pour les festivités du 25e anniversaire du TPF, en 1978 (entretien avec Louis-François Caude, 5 décembre 2019).
13 Cyril Robichez, op. cit., p. 22.
14 Claude Martin, né Rollin (1912-1964), est d’abord militaire dans la marine, puis se forme au théâtre avant-guerre auprès de Charles Dullin. Pendant la guerre, il devient résistant et s’engage au parti communiste. À la libération, il est nommé par Jeanne Laurent pour diriger le Centre dramatique du Nord à Saint-Quentin (02). Voir sa biographie détaillée en fin d’ouvrage.
15 Cyril Robichez ne donne pas de date exacte et précise simplement que le premier Centre dramatique du Nord est créé à la suite de ceux de Saint-Étienne puis de Toulouse. Cependant, l’article de Daniel Lemahieu nous donne la date de 1947. En réalité, il n’ouvrira ses portes que quelques mois, de janvier à juillet 1948.
16 Cyril Robichez, op. cit., p. 26.
17 Ibid., p. 28.
18 Les géants, sortes de marionnettes géantes, de taille et de physionomie variables sont des figures majeures de la culture des Flandres. Importés par les Espagnols sous Charles Quint au xvie siècle, ces figures représentent souvent des héros tirés de légendes locales. Les plus anciens sont souvent des chevaliers, mais nous trouvons également des mineurs de fond. Ces marionnettes géantes défilent les jours de fêtes, de kermesses ou de carnavals, souvent accompagnés de leur famille ou de leurs rivaux.
19 Dans les années 1950, Radio-Lille diffusait des pièces radiophoniques chaque mardi. Parmi les comédiens, nous pouvons, entre autres, citer Line Dariel, Léopold Simons ou encore Serge Martel, qui ont participé à ces créations.
20 La ville actuelle d’Hénin-Beaumont résulte de la fusion de deux communes, Hénin-Liétard et Beaumont-en-Artois, en 1971.
21 Cyril Robichez, op. cit., p. 36.
22 Ibid., p. 39.
23 Augustin Laurent est maire de Lille de 1955 à 1973, et soutien sans faille du TPF.
24 Le « Festival du Mineur » à Oignies peut être considéré comme une véritable réussite du TPF. La ferveur des mineurs et des structures associatives et syndicales accompagne la venue du TPF dans le bassin minier. Ils et elles aident à la vente des tickets, au financement de bus pour ramasser les habitants. Nous pouvons parler de réussite, car l’ambition véritable du TPF se voit là réalisée : là où il n’y a aucune présence du théâtre, C. Robichez et son équipe créent un rendez-vous annuel, jouent des auteurs reconnus sur le plan dramatique, faisant participer les structures locales pour faire de la population également locale des spectateurs de théâtre.
25 Extrait du bilan de l’année 1967 reproduit dans Cyril Robichez, op. cit., p. 205.
26 Pascal Percq le confirme : étant de la génération du « baby-boom », il fréquentait les maisons des jeunes et de la culture à quinze ou seize ans, au début des années 1960, et témoigne du fait que tout ce réseau d’éducation populaire était étroitement lié au TPF. Il se souvient notamment du système de « carte famille », ou des tarifs préférentiels pour les associations (entretien avec P. Percq, 5 décembre 2019).
27 Nous pensons à la SMOB (scène mobile intercommunale de l’agglomération de Béthune-Bruay) de Culture Commune, Scène Nationale du bassin minier qui peut faire penser au théâtre ambulant, mais plus largement aussi à de nombreuses démarches entreprises par les scènes conventionnées pour aller à la rencontre des publics (abonnements, programmation hors les murs, ateliers avec la population, etc.).
28 Sur l’histoire du Centre dramatique du Nord et le contexte de la nomination de Cyril Robichez, voir la contribution d’Émeline Rotolo à cet ouvrage.
29 Pierre Bourdieu et Alain Darbel, L’Amour de l’art, les musées d’art européens et leur public, Paris, Les Éditions de Minuit, 1969, p. 58.
30 Cyril Robichez, op. cit., p. 102.
31 Ibid., p. 99.
32 Sur cet épisode les avis et les mémoires divergent… Pascal Percq, de son côté, ne se souvient pas que pendant l’occupation du Théâtre du Pont-Neuf (dont il avait été témoin en tant que journaliste), René Pillot ait été très présent. S’il avait la clé du théâtre, les élèves comédiens ou les étudiants de l’école de journalisme, qui faisaient partie des occupants, l’avaient aussi ! Enfin, les occupants du théâtre ont été délogés probablement plus par des anarchistes, qui perturbaient beaucoup de rassemblements à Lille durant cette période, que par la police ! (Entretien avec P. Percq, 5 décembre 2019).
33 Voir Cyril Robichez, op. cit., p. 99-102. Ces pages laissent transparaître l’amertume de Robichez quant aux critiques qui lui sont faites, alors qu’il a travaillé toute sa vie (comme Vilar) à rapprocher le public d’un théâtre de répertoire.
34 Patrice Chéreau, cité par Émile Copfermann, « L’avant-Mai : une crise rampante », dans Robert Abirached (dir.), La Décentralisation théâtrale – 1968, le tournant, Arles, Actes Sud, 2005, p. 17.
35 Jean-Pierre Ryngaert, de son côté, parle d’une forme de snobisme chez les jeunes de cette nouvelle génération, qui associe Robichez à un jeu « à l’ancienne », avec beaucoup d’effets, des gros maquillages, un public très proche du plateau. Au demeurant, il y eut en effet des situations assez étranges : Marius de Pagnol monté avec des comédiens du Nord par exemple. Il fallait aussi compter avec sa personnalité truculente. Jean-Pierre Ryngaert raconte comment, alors qu’il faisait un remplacement pour une tournée au TPF, Robichez attendait les comédiens de retour à Lille à une heure tardive pour prendre de leurs nouvelles, et demander avec sa grosse voix emphatique : « Alors les gars, comment ça s’est passé ce soir ? Et toi, le petit ? ». C’était le grand jeu ! Sur le plateau, il se laissait parfois aller à des choses de cet ordre, un jeu probablement excessif, du vieux théâtre, ce que les « parisiens » et les jeunes un peu « snobs » du conservatoire considéraient avec hauteur et ironie… Cela dit, si Jean-Pierre Ryngaert, à vingt ans (autour des années 1965-1970), trouvait lui-même le travail de Robichez très critiquable, il en mesure aujourd’hui, avec la distance et l’âge, toute la valeur : ainsi notamment de sa défense très courageuse du répertoire, qui le place dans le sillage des grands animateurs d’avant-guerre. Quant au Cyril Robichez acteur, Pierre-Étienne Heymann témoigne de son admiration pour lui, lorsqu’il l’avait dirigé dans La Mère de Brecht en 1980 : alors qu’il s’attendait à avoir en face de lui un « vieux cabot » jouant à l’ancienne, il a découvert un comédien de grand talent, extrêmement rigoureux. Ce jugement est confirmé par Jean-Pierre Ryngaert, venu de Paris voir le spectacle avec Bernard Dort, que l’on connait comme l’une des grandes voix critiques du théâtre de cette époque. Ce dernier avait lui-même jugé non seulement que c’était un très bon spectacle, mais que Cyril Robichez était un très bon acteur (entretien avec Pierre-Étienne Heymann et Jean-Pierre Ryngaert, 5 décembre 2019).
36 Voir Cyril Robichez, op. cit., p. 95 à 98. Dans ces pages, Cyril Robichez nous dit avoir la « bienveillance » du maire mais comme un « héritage du passé », et également que le maire finance surtout une culture élitiste.
37 Voir Alain Brossat, Le Grand dégoût culturel, Paris, Seuil, 2008. Dans cet ouvrage, le philosophe développe une vision de la société moderne (à partir des années 1980) comme « culturelle », c’est-à-dire comme un mode qui organise et contrôle la vie des individus non plus sur des structures politiques mais plutôt culturelles, incessamment inclusives. Il s’agit de faire disparaître le dissensus que peuvent faire naître les opinions politiques au profit de goûts, d’idées culturelles. Les questions politiques s’effacent, notamment dans l’art, et, à l’inverse, la culture envahit les sphères de vie, notamment la gestion politique.
38 Alain Brossat, op. cit., p. 140.