1 Toutes ces informations concernant les pratiques amateur à Arras ont pour source un article de René Bargeton dans Le Noroit n° 309, nov.-déc. 1988, ainsi qu’un document polycopié sur le théâtre à Arras édité par la bibliothèque municipale.
2 Le Cercle de la Commedia eut des activités de 1948 à 1954. Le Foyer littéraire fut fondé en 1924 par Paul Davrinche et quelques amis, avec comme vocation, à ses débuts et dans le contexte de l’après-guerre, de jouer en public à la demande de l’UNC (Union Nationale des Combattants), en se déplaçant dans les villages de la région. André Platel succède à Paul Davrinche en 1954. En réunissant d’autres troupes d’amateurs arrageois, il constitua ainsi Le Foyer de la Comédie qui devint plus tard, en 1958, Les Tréteaux d’Artois.
3 La compagnie des Tréteaux d’Artois, qui avait son siège dans les caves de l’Abbaye Saint-Vaast, produisit dès sa naissance deux spectacles par saison, tout en animant des ateliers et stages de pratique ouverts à tous, en particulier pour les jeunes, animés notamment par Sylvain Vaney, devenu ensuite comédien professionnel au TPF en 1971. Ce furent ainsi vingt-cinq pièces qui furent montées et cent-soixante-huit représentations organisées en dix-sept ans, entre 1954 et 1972, date du départ d’André Platel. Lui succède Pierre Duvet, qui venait lui-même du Cercle de la Commedia, et qui poursuivit l’objectif de « porter le théâtre là où on ne le voit jamais, dans les campagnes et les corons » – par exemple lors de représentations offertes lors des fêtes du 1er mai. Hugues Delaby prend sa suite pendant plus de vingt ans, de 1982 à 2004. À cette époque, la compagnie est soutenue par la ville, la DRAC (au titre de la formation), et bientôt par Culture Commune. Hugues Delaby se souvient en particulier d’une mise en scène de Molière à table, qui de 1995 à 1997 tourna longuement à Arras et dans la région et fut plébiscitée par un très large public.
4 Le Centre Culturel le Noroit, situé rue des Capucins à Arras, est fermé depuis 2002. Léonce Petitot (1908-1986) était un musicien classique, régulièrement soliste des « Grands Concerts » (Colonne, Lamoureux, Pasdeloup), mais aussi féru de jazz et de contemporain. Le Noroit est un bel exemple de lieu de dimension locale qui dépassa pourtant une simple vocation d’animation, ou une aventure purement individuelle. Il aurait pu manifestement, dans les années 1970, prétendre au statut de CAC, mais l’ombre du Théâtre municipal d’Arras ne le lui a probablement pas permis.
5 Telle que l’invitation de l’orchestre de l’ORTF en 1961, ou la création de L’Orestie de Xenakis en 1967, ou de Camera Oscura de François Bayle avec la danseuse Catherine Imbert.
6 Notamment de Françoise Dolto, Max-Pol Fouchet, Albert Béguin, et bien d’autres.
7 Source : Le Noroit n° 300, janvier 1987.
8 Voir la notice biographique concernant Pierre-Aimé Touchard en fin de volume.
9 Guy Mollet (1905-1975) est maire d’Arras de 1945 jusqu’à sa mort en 1975, et secrétaire général de la SFIO de 1946 à 1969. Homme politique majeur de la Quatrième République, il fut ministre d’État (SFIO) chargé des affaires européennes du gouvernement Léon Blum en 1946-1947, puis de celui de René Pleven (Union démocratique et socialiste de la résistance, de tendance centriste) en 1950 et 1951 – donc au moment de la création du festival d’Arras. Il est président du Conseil en 1956-1957 (au moment des « pouvoirs spéciaux » et de l’affaire de Suez), vice-président aux côtés de Pierre Pfimlin en 1958, puis ministre d’État chargé de la nouvelle constitution du gouvernement De Gaulle, de 1958 à 1959, juste avant l’adoption de la Cinquième République.
10 La formulation officielle est en l’occurrence : « Le Festival d’Arras, ou Festival d’art dramatique, est soutenu par la Commission des Arts et Lettres de la ville sous la présidence de M. le député-maire d’Arras, sous le haut patronage du M. le ministre de la Jeunesse et des Sports et de M. le secrétaire d’État aux Beaux-Arts, avec la participation du Commissariat Général au Tourisme ». En 1951, Georges Phalempin et Louis Le Sénéchal sont respectivement préfet et président du Conseil général du Pas-de-Calais. Les deux ministres de tutelle concernés sont Pierre Chevalier et André Cornu, membres du gouvernement Pleven, au centre sur l’échiquier politique, avant qu’un glissement à droite ne s’opère fin 1951 – provoquant, au passage, l’éviction de Jeanne Laurent du secrétariat aux Beaux-Arts. C’est ainsi André Cornu qui a signé, juste à temps, l’arrêté de nomination de Vilar à la tête du TNP.
11 Pour rappel, André Reybaz est né en 1922 et mort en 1989. Il fonde la compagnie du Myrmidon en 1946, qui est dissoute en 1960 au moment de sa nomination à Lille. Après Arras, et son triple mandat de directeur du Centre dramatique du Nord de 1960 à 1970, il est pensionnaire au Français de 1970 à 1975. Il joua occasionnellement au TNP (Le Roi Lear mis en scène par George Wilson en 1967), et eut aussi une carrière au cinéma et à la télévision.
12 Les auteurs de prédilection du duo Reybaz / Toth furent Jacques Audiberti, Michel de Ghelderode, et Boris Vian. Du premier, ils créent Quoat Quoat au Théâtre Agnès Capri (future Gaité Montparnasse) en janvier 1946 (m. en sc. C.T.), L’Ampélour, et Sa peau au Noctambules en avril 1950 (m. en sc. A.R.). Du second, Hop Signor au Noctambules puis à L’Œuvre en 1947 (m. en sc. C.T.), Fastes d’enfer au Noctambules puis au Vieux Colombier en 1949 (m. en sc. A.R.), et Sire Halewyn au Noctambules en 1950 (m. en sc. C.T.). Du troisième, ils montent J’irai cracher sur vos tombes, en avril 1948 au Théâtre Verlaine, mis en scène par Alfred Pasquali – invité pour l’occasion dans la compagnie – et L’Équarrissage pour tous, en 1950 au Noctambules. La compagnie prend ainsi totalement l’allure d’une jeune troupe de la Rive Gauche amatrice d’auteurs nouveaux d’avant-garde en cet immédiat après-guerre, même si son équipe n’est pas constituée d’un groupe fidèle de comédiens, mais plutôt de jeunes acteurs qui vont et viennent d’un projet à l’autre : André Valmy, Yves Péneau, Florence Brière, Pauline Brémont, Jacques Müller, Jean-Pierre Lorrain, Roger Paschel, Jean-Marc Lambert, Michel Beaumont, et bien d’autres – et aussi, une fois, Daniel Ivernel, que Reybaz retrouvera plus tard dans Peer Gynt.
13 René Allio (1924-1995), avant d’être (et après avoir été) le célèbre réalisateur de La Vieille dame indigne (1965) et des Camisards (1972), fut scénographe dès les années cinquante pour le Théâtre de la Cité à Villeurbanne avec Planchon, puis, plus tard, dans de nombreux théâtres importants : Comédie-Française, Opéra, TNP, Tréteaux de France, et même à la Scala ou à la Royal Shakespeare Company.
14 Par exemple alors qu’il prépare la première édition du festival, Reybaz répète déjà Capitaine Bada, de Jean Vauthier, qu’il crée au Théâtre de Poche en janvier 1952. En outre, cette activité parisienne compense manifestement la précarité des moyens alloués au festival.
15 Il eut aussi une carrière importante de second rôle au cinéma jusque dans les années 2010. Parmi les comédiens que Reybaz engage à Arras, on peut citer aussi Jeanne Reinhart (qui vient de chez Jouvet), Pierre Salas (fidèle depuis les débuts aux Noctambules), Pierre Fromont (également ancien du Myrmidon), Michel Bosne (élève de Dullin et ancien du Conservatoire National), ou Claude Romain et Jacques Denoël (que C. Toth avait dirigés dans une pièce de Friedrich Dürrenmatt aux Noctambules).
16 Jean Vagne signe l’adaptation, et Catherine Toth est toujours là comme réalisatrice des costumes, ce qui est un considérable travail pour une distribution de vingt-sept acteurs.
17 Il s’agit d’un mystère médiéval, qui fut joué dans la Cour du Puits du Musée.
18 Dans la cour du palais Saint-Vaast.
19 Cet emblématique Mariage de Figaro a été largement couvert par la presse, où l’on voit des photos de Reybaz en Figaro, Catherine Le Couey en Suzanne, Christian Bertola et Marie Déa en Comte et Comtesse, Claude Mero en Chérubin, tous dans des costumes du xviiie réalisés par Catherine Toth.
20 Daniel Ivernel interprète le rôle-titre. Il a joué à quatre reprises avec Vilar et deux avec Reybaz, qui retrouve également Jean Pommier pour l’occasion. Jacques Seiler commence sa carrière avec Michel Saint-Denis. Après le Peer Gynt il joue huit fois successivement au TNP, dirigé par Vilar puis Wilson. Cette mise en scène fit sensation, non seulement à cause du physique puissant et de la personnalité d’Ivernel, mais aussi par le choix de Reybaz de travailler avec la musique de Grieg, tout en remplaçant la fameuse scène de la danse d’Anitra par un ballet oriental, prenant à la lettre le rêve de Peer Gynt.
21 Source : Le Noroit, janvier 1987. L’article ne dit pas qui étaient les opposants en question.
22 Ibidem.
23 Le gagnant du concours était récompensé par un prix d’un million de francs (anciens). Le public, de son côté, votait à la sortie des spectacles à l’aide d’un carton sur lequel il cochait un avis allant de « Bon » à « Sans Intérêt » en passant par « Moyen » pour la pièce qu’il venait de voir.
24 Le préfet était, de 1958 à 1963, M. Robert Cousin.
25 Dans la compagnie du « Théâtre des Aspis », avec laquelle il a monté André Obey et Paul Claudel.
26 Voir la notice biographique sur André Clavé en fin de volume.
27 Si la ville doit en effet assurer une logistique technique importante, en concertation avec René Allio, concernant le montage des dispositifs scéniques en extérieur, la technique d’éclairage est alors sommaire. Dans un courrier envoyé à Charpak en 1959, il est spécifié qu’il aura à sa disposition un jeu d’orgue de huit circuits d’un kW et quatre de cinq-cents W, ce qui est réellement peu pour un spectacle, même en 1959 !
28 Sur ces presque cinq millions, plus de la moitié vient de la ville (1 M) et de l’État (1M5), tandis que le département donne sept cent cinquante mille francs. Il faut aussi noter le soutien de la direction des Houillères Nationales, à hauteur de trois cent mille francs. Le reste vient de la billetterie, de la publicité, des dons. Par ailleurs, chaque troupe sélectionnée reçoit une enveloppe de cinq cent mille francs avec laquelle elle doit assurer toutes ses dépenses, intendance comprise (transports et hébergement). Le Lauréat du prix du jury reçoit une somme d’un million, et celui du prix du public deux cent mille francs, sachant qu’un million d’anciens francs équivaut à peu près à dix-sept mille euros de 2020. On voit que là encore, même si l’on ne compte pas dans le budget les avantages en nature assurés par la ville, il reste réellement modeste.
29 La pièce est jouée dans la Cour d’Honneur du Palais Saint-Vaast. L’article de Claude Sarraute est publié dans Le Monde du 18 juin 1960. Elle y évoque aussi une autre pièce jouée cette année-là, qu’elle n’a pas vue : Ex-Napoléon, de Niño Franck et Paul Gilson, mise en scène par Jean-Jacques Aslanian.
30 Georges Peyrou (1925-2017), d’origine ouvrière, travaille par ailleurs aux dramatiques de France Culture, où il dirige Duras, Arrabal, Dubillard, etc. La compagnie, qui joue aussi en province et à l’étranger, défend un grand répertoire qu’il représente dans des formes populaires de plein air (Machiavel, Cervantès, Corneille, Molière, entre autres).
31 Il avait déjà travaillé avec Betsy Jolas l’année précédente sur un Ajax à l’Alliance Française ; après Arras il eut une belle carrière de metteur en scène, dirigeant en 1962 Delphine Seyrig et Alain Cuny dans Pirandello au Vieux-Colombier, en 1963 Évelyne Istria et Véronique Nordey dans Lenz au Récamier, et jusqu’à Maria Casarès en 1969 dans Mère Courage.
32 C’est elle qui incarne la femme dans Loin d’Hagondange de Jean-Paul Wenzel.
33 Cette étude n’aurait pu être menée à bien sans le précieux concours d’Alicia Hochard, étudiante de master à l’université d’Artois, et Hugues Delaby, ancien enseignant à l’université, et ancien président des Tréteaux d’Artois. La première a effectué un précieux travail de recherche et collecte de documents (correspondance, programmes, photos, presse) aux archives municipales d’Arras. Le second a donné accès à l’auteur de ces lignes une partie de ses archives personnelles, en particulier les bulletins du Noroit, et d’autres articles (Théâtre Populaire, La Voix du Nord), sources de précieuses informations. Qu’ils en soient ici tous deux chaleureusement remerciés.