La justice dans le comté d'Artois
p. 87-102
Texte intégral
1Rares sont les provinces dont les archives permettent une vue d’ensemble sur l’organisation et le fonctionnement de la justice pendant le Moyen Âge. La Provence grâce aux comptes des clavaires et aux registres des cours locales1, le Lyonnais et le Forez grâce aux registres des cours ecclésiastiques et des châtellenies2, la Bourgogne ducale – dans une moindre mesure – grâce aux comptes des châtellenies3… constituent de notables exceptions : dans la plupart des dépôts d’archives départementaux les sources de l’histoire de la justice médiévale sont maigres voire inexistantes. Comme les autres provinces du nord, l’Artois se singularise au contraire par une documentation riche et polymorphe.
2Son Trésor des chartes conserve un millier d’unités documentaires intéressant l’historien de la justice4. On y trouve d’abord les actes et règlements judiciaires qui émanent pour la plupart du pouvoir comtal5. Les comptes des baillis– auxquels on devrait ajouter ceux des receveurs d’Artois, conservés à Lille6 – sont une manne dont Carola M. Small a démontré la richesse7. À ceci s’ajoutent des pièces de procédure diverses, dont plusieurs peuvent concerner la même affaire et fournir ainsi des éclairages complémentaires8 : lettres et mandements de justice, commissions, comptes rendus d’aprises9 ou d’enquêtes, relations et mémoires sur telle ou telle affaire rédigés à l’usage des gens de justice ou des parties. En dehors du Trésor des chartes, les archives produites par les corps de ville sont d’une grande richesse, mise en valeur dès la deuxième moitié du XIXe siècle par de nombreuses études d’histoire locale10 et de copieuses monographies urbaines11 toutes consacrant d’abondants développements aux fonctions judiciaires du magistrat municipal. Les registres du parlement de Paris recèlent nombre d’arrêts concernant l’Artois, quoique rarement venus en appel de sentences des tribunaux du comté. Les registres du Trésor des chartes royal conservent nombre de lettres de rémission pour des sujets artésiens12, sans commune mesure toutefois avec l’énorme masse des lettres de rémission des comtes de Flandre conservées dans le fonds de la Chambre des comptes de Lille13.
3L’ensemble de ces sources et travaux apportent un éclairage inhabituellement vif sur le fonctionnement de la justice dans le comté. Nous essaierons de l’illustrer ici en mettant l’accent sur la période de ce qu’on pourrait appeler « l’indépendance » du comté, entre sa constitution en apanage (1237) et l’époque où Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, réunit l’Artois à ses possessions flamandes et transfère à Lille la tête de son administration (1384)14. Nous présenterons dans un premiers temps les linéaments du système judiciaire, avant de nous interroger sur la norme pénale et sur son application.
4Les piliers de l’institution sont les quinze bailliages artésiens, dont chacun est doté d’une cour de justice comtale. Lesdites cours diffèrent toutefois dans leur organisation comme dans leurs attributions car elles n’ont pas été créées ex nihilo par la volonté du comte mais résultent de l’histoire particulière de chacun des territoires qui furent intégrés à l’ensemble artésien sous le nom de bailliages. La plupart sont les héritières des cours échevinales des châtellenies flamandes, leurs membres n’étant plus appelés échevins mais « hommes jugeants le comte », ou « francs hommes15 ». Ils ont toute juridiction et rendent théoriquement leurs sentences hors de toute ingérence du bailli, qui ne délibère pas parmi eux. En effet, le rôle du bailli vis-à-vis de ces cours de justice est triple. Il les réunit-elles siègent « à la conjure » du bailli. Il poursuit devant elles ceux qu’il soupçonne de tel ou tel crime – elles jugent alors « à la calenge » du bailli16. Il assure toutes les opérations judiciaires se déroulant hors de la cour : saisies, arrestations, enquêtes, exécution des sentences.
5La répartition des tâches est la même entre baillis comtaux et tribunaux des échevinages urbains, du moins pour les communes de fondation comtale ou présumées telles, ce qui est le cas des villes principales : Arras, Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys...17 Ces villes ont par ailleurs un châtelain comtal mais celui-ci, dès la fin du XIIIe siècle, n’a plus de rôle judiciaire sinon comme aide du bailli ; à Arras par exemple, il sert surtout de garde des prisons avant son remplacement, en 1333, par un simple garde du château18.
6On sait que les échevinages urbains ont toute juridiction sur les bourgeois dans la ville et banlieue ainsi que dans les enclaves où s’exercent des juridictions seigneuriales19. Au-dessous de l’échevinage, les grandes villes pouvaient organiser des juridictions de quartier – huit à Saint-Omer par exemple, les vierscaires, ayant à leur tête un aman servant aussi d’officier de police judiciaire. On n’y jugeait certainement que les cas de basse justice, susceptibles d’appel au tribunal de la halle (échevinage)20. Enfin, à côté des cours comtales et municipales, les seigneurs justiciers avaient leurs cours – composées de leurs hommes de fief –, éventuellement présidées par un bailli, et subséquemment pour les cours temporelles des églises21.
7Là comme ailleurs, le pullulement des tribunaux ne facilitait pas forcément la poursuite des délinquants mais peut-être offrait-il aux justiciables l’avantage de choisir quelquefois leurs juges en alléguant la compétence de tel ou tel ratione personae, materiae ou loci22. À Saint-Omer par exemple, le château abrite à lui seul deux juridictions : la cour du comte, où siègent les vassaux du châtelain, juge les causes des nobles et les causes féodales ; les plaids généraux, où siègent des francs hommes avec les échevins de la ville, jugent le reste des affaires. A ces deux tribunaux s’ajoutent, en ville, celui de l’échevinage ainsi que deux cours temporelles d’Église : celle l’abbaye de Saint-Bertin et celle de la collégiale23.
8Arthur Giry n’avait pas de mots trop durs pour fustiger l’enchevêtrement de ces juridictions, source de conflits permanents et surtout concurrence inacceptable, à ses yeux, pour la juridiction municipale24. Les conflits de juridiction existent effectivement mais ne sont pas très nombreux et semblent s’être réglés, le plus souvent, par des accords. Ils opposent plus souvent les puissances civiles aux puissances d’Église que les baillis comtaux aux municipalités25. Ainsi, pour Arras, les chartes réunies par Adolphe Guesnon montrent peu de conflits entre le comte et les échevins par rapport à ceux qui l’opposent à l’abbaye de Saint-Vaast ou aux démêlés des échevins avec l’évêque26. À Saint-Omer, la ville s’oppose souvent à Saint-Bertin et à la collégiale, à cause de la juridiction sur les bourgeois arrêtés dans le pourpris des églises27 ; nombre de ces procès viennent devant le Parlement, le plus souvent sans passer par la justice comtale, que ce soit à l’initiative des gens d’Église ou des magistrats municipaux28. Une autre pomme de discorde entre autorité comtale et magistrats urbains est la juridiction sur les officiers de justice. À Arras, le problème se posa pour les sergents du châtelain lorsque la châtellenie fut mise en la main comtale : les échevins réclamaient ces sergents comme leurs justiciables, ce que Marguerite de Flandre leur accorda en 136229. À Saint-Omer, les échevins prétendaient exercer leur pouvoir sur les officiers comtaux – y compris le bailli – lorsqu’ils se trouvaient en ville ; le Parlement leur dénia cette compétence en 1378 pour les crimes commis par eux, mais la leur reconnut pour les cas civils et pour les méfaits commis contre eux30.
9Si l’on a volontiers mis l’accent sur les conflits dus à la multiplicité des juridictions, on a rarement souligné leur possibilité de collaborer, dont il existe pourtant maints exemples. Cette collaboration s’imposait du fait même des fonctions des baillis, amenés à superviser l’ensemble des opérations judiciaires31, mais aussi parce que les cours les plus modestes devaient parfois chercher appui auprès de juridictions plus importantes. Ainsi à propos de ce meurtre commis à Ecques32, en 1424, par un homme aidé de son épouse. Les chanoines de Saint-Omer ont dans ce village un bailli et une cour de justice, mais celle-ci ne compte que six échevins, nombre insuffisant pour prononcer une condamnation à mort. Ils s’adjoignent donc les francs hommes du lieu, bien que les suspects n’aient rien de noble33. En outre les échevins des petites localités, lorsqu’ils étaient en difficulté face à un problème de procédure ou d’établissement de la coutume, consultaient régulièrement les échevins de la ville, plus importante, qui était leur chef de sens. Saint-Omer, par exemple, était chef de sens pour Ardres, Audruicq et Fauquembergues, dont la loi et les institutions imitaient d’ailleurs celles de Saint-Omer34.
10Les justices urbaines étaient également solidaires en appliquant la règle qu’un justiciable en fuite, condamné dans une ville et arrêté dans une autre, y subirait la même peine sans échappatoire et sans nouveau procès. De même pour les bannis, dont les villes s’échangeaient des listes35.
11Enfin, plusieurs degrés de justice collaboraient lors des assemblées de franche vérité, institution d’origine flamande qu’on rencontre dans les bailliages de Saint-Omer, Toumehem, Éperlecques, Merck et Calais36. Ces assemblées se tenaient en différentes localités de chaque châtellenie, tous les trois ans ou tous les sept ans par exemple, « à la conjure » du bailli. Elles réunissaient deux ou quatre hommes de fief du comte, autant d’échevins du lieu, ainsi qu’un sergent du bailliage. Elles entendaient tous les habitants de la paroisse pour dénoncer secrètement et sous serment les faits dont ils avaient eu connaissance et qui avaient échappé aux plaids échevinaux. Les franches vérités jugeaient sommairement les affaires vénielles comme adultères, petits larcins, infractions aux usages ruraux, et renvoyaient les causes importantes devant le chef de sens37.
12Malgré ces occasions de collaborer, les diverses cours de justice restaient indépendantes les unes des autres au sens où elles ne s’inscrivaient pas dans une hiérarchie comparable au système flamand, qui permet l’appel de chaque tribunal à la juridiction supérieure, et ainsi de suite jusqu’à la cour supérieure du comté38.
13Quant aux justices tenues en fief du comte, on pouvait théoriquement faire appel de leurs sentences devant la cour des francs hommes du bailliage. Mais ces appels sont rares ; le pouvoir comtal les décourageait, semble-t-il, en infligeant de lourdes amendes aux justiciables ayant mal appelé ou n’ayant pas soutenu leur appel, ainsi qu’aux seigneurs eux-mêmes dont la cour avait mal jugé39. Au-delà, la cour du comte ne semble guère avoir joué de rôle judiciaire ; l’appel des sentences des tribunaux d’échevinages ne fut en réalité régularisé qu’avec la création du Conseil d’Artois, en 153040. Quant aux cours temporelles des églises, l’appel allait de préférence à la juridiction royale la plus proche, celle du prévôt de Beauquesne ou du bailli d’Amiens, ou directement au Parlement. Enfin, on trouve des exemples d’appel des tribunaux d’échevinages urbains soit devant la cour du comte – c’est le cas à Hesdin – soit devant la juridiction royale – c’est le cas à Béthune ou Arras41, mais rien n’est systématique : pour Saint-Omer par exemple, on n’a conservé qu’un exemple d’appel au Parlement d’une sentence des échevins ; encore est-ce un cas particulier puisqu’il s’agit d’un banni qui renonce à son appel42.
14Les travaux de Carola Small sur les appels des tribunaux artésiens au Parlement de Paris à l’époque d’Eudes IV montrent que contre toute attente, le comte n’essaie pas d’entraver systématiquement les appels interjetés de ses propres tribunaux. En cas d’appel d’une justice seigneuriale tenue en fief de lui-même, il obtient assez facilement le renvoi devant sa propre cour tamquam omisso medio. En cas d’appel des cours de seigneurs qui ne tiennent pas de lui en fief, notamment des plus puissants d’entre eux comme les comtes d’Eu et de Guînes ou la comtesse de Boulogne, il ne peut obtenir le renvoi mais le Parlement lui donne quelquefois raison s’il conteste la mouvance de la justice dont on a appelé. Et pour toutes les causes mettant en jeu ses propres droits, le comte excipe de sa pairie pour récuser la compétence du bailli d’Amiens et rejeter l’obligation de plaider, même par procureur, devant une autre cour que le Parlement ; un arrêt de 1354 reconnaîtra formellement ce principe43. C’est dire à quel point ces appels mettent en jeu le statut politique du comté : pas plus que la souveraineté royale, le ressort du Parlement ne peut être contesté ; le comte doit en revanche faire en sorte que jamais le comté ne puisse être considéré comme une dépendance du domaine royal.
15À cet égard, les deux risques principaux sont que les gens du roi s’immiscent dans le contrôle des baillis comtaux44 et dans l’administration de la ville capitale, Arras, notamment par le biais des conflits entre les échevins et le comte qui pouvaient naître à chaque renouvellement du magistrat ou lors de la reddition des comptes de la ville. C’est ce qui survint en 1329-1330 par exemple : le magistrat urbain fit appel devant le Parlement, d’où l’envoi par le bailli d’Amiens d’un commissaire royal chargé de mettre la municipalité dans la main du roi pendant la durée du procès, ce qui entraîna la saisie du comté à la fin du règne d’Eudes IV45. L’appel au Parlement pouvait en réalité se retourner contre la ville, aussi bien que contre le comte. En effet, celui-ci n’hésitait pas non plus à poursuivre les échevins devant la cour souveraine du royaume46. Le Parlement offrait en effet un recours intéressant parce qu’il se comportait moins en juge qu’en arbitre permettant de dénouer les conflits entre pouvoir comtal, échevins, agents royaux et puissances d’Église47. Le même constat s’applique aux villes de Flandre pour le XVe siècle48.
16Quelle norme pénale appliquait le système judiciaire que nous venons de décrire, et de quelle façon ?
17La procédure en vigueur dans les cours échevinales est difficile à connaître avec précision. Les chartes de franchise se contentent le plus souvent d’indiquer un tarif des délits et ne précisent le mode de preuve employé – le témoignage de deux hommes de la commune par exemple – que pour des délits particuliers faisant exception au mode de preuve commun49.
18La preuve par témoins domine. On ne rencontre pas de duels judiciaires, dont certaines chartes de franchises excluent d’ailleurs explicitement les bourgeois50. Il en existe au contraire devant les cours comtales, au moins jusqu’aux premières décennies du XIIIe siècle, y compris un cas de justiciable exécuté en 1325 par le bailli de Bapaume après avoir été vaincu en duel, ce qui montre l’application très stricte de la procédure51. De façon plus inattendue, le comte fait parfois payer assez cher (30 £, 100 £...) le droit de recourir aux gages de bataille52.
19En cas de difficulté à prouver par témoins la culpabilité d’un homme, les échevins peuvent mettre en œuvre la procédure extraordinaire et faire usage de la question. C’est le cas pour le couple criminel évoqué plus haut : l’homme, ayant été pris en flagrant délit, est mis à la question mais n’avoue pas ; il est donc jugé sur la foi des dépositions des témoins. La femme, pour sa part, n’est mise à la gehine qu’après information ayant permis d’établir la présomption de culpabilité. Le document qui relate cette affaire, extrait des registres du greffe du domaine d’Ecques et copié dans le cartulaire du chapitre, a valeur exemplaire pour illustrer l’application de la procédure coutumière ; d’où son inhabituelle précision53. Pour le reste, la torture judiciaire reste comme d’habitude très discrète dans les sources. À moins qu’on n’ait dû l’appliquer à un grand nombre de personnes en une seule fois – ainsi aux lépreux lors du pogrom de 1321 –, auquel cas la mobilisation massive des sergents pour aider le bourreau laisse une trace marquante dans les comptes54.
20On sait que le droit pénal urbain est théoriquement régi par les chartes de franchises communales, lois ou keuren (sing, keure) en Flandre. L’essentiel de ces chartes, parfois la quasi-totalité de leur contenu, consiste dans l’énumération des cas poursuivis par le magistrat et des sanctions qui leur correspondent55. Or ces dispositions, datant pour l’essentiel de la grande époque de concession des chartes, c’est-à-dire du tournant des XIIe et XIIIe siècles, malgré des modifications possibles lors de confirmations ultérieures, ne sont pas appliquées dans toute leur rigueur. On peut en effet remarquer d’une part que le montant réel des amendes ne suit pas le tarif déterminé par la charte et semble taxé beaucoup plus librement, d’autre part que les peines corporelles et la peine de mort ne sont pas infligées aussi généralement que le prévoient les chartes, enfin qu’il existe bien des possibilités d’accommodement permettant d’échapper à la sanction pénale ou de l’alléger56.
21Quant aux amendes, la plus importante – celle qui correspond au « prix de l’homme » – est de 60 £. Les lois urbaines la prescrivent fréquemment : en cas de violences « à sang », vol caractérisé, bris de trêves, réception de bannis, etc. Les comptes montrent que pour ce genre d’actes, il existe en fait un large éventail de peines pécuniaires. Les plus élevées sanctionnent l’aide aux bannis (de 60 à 200 £), le bris de trêve, le simple fait d’avoir porté un couteau à pointe ou dégainé une épée (de 60 à 80 £)57, le viol, la rébellion contre des membres ou représentants de l’échevinage (60 £)58. En cas de violences, tout dépend non seulement de la gravité des faits mais également, et sans doute surtout, de la condition des personnes : 40 £, par exemple, pour avoir frappé un sergent, 32 £ pour avoir frappé un bourgeois, 60 s. seulement pour avoir frappé un valet59. L’ordre de grandeur le plus fréquent, pour des amendes en cas de violences, est de 3 à 5 £, ou 10 £ en cas de mêlée60. Au total ces amendes ne sont guère plus élevées que celles taxées pour des cas aussi minimes que les infractions aux usages ruraux, notamment lorsqu’elles sont commises au préjudice du domaine comtal61. Il est vrai que les amendes inférieures à 60 s. sont très rarement rapportées dans la documentation comptable, ce qui obère notre connaissance du traitement du petit contentieux.
22Quant aux peines corporelles et à la peine de mort, les chartes les prescrivent systématiquement en cas de meurtre et de mutilation selon le principe du talion, du moins lorsque le criminel est pris en flagrant délit. Or ce cas de figure est rare62 : la plupart du temps, le coupable s’est enfui et peut donc faire sa paix avec la victime ou sa famille. Les mutilations, comme partout ailleurs, sont sans doute infligées aux voleurs de manière graduée en cas de récidive, la peine de mort réservée aux voleurs endurcis. Le bourreau est d’ailleurs couramment appelé « pendeur de larrons »63. Ce sont les comptes qui nous renseignent le mieux dans ce domaine, en détaillant les frais des exécutions. Elles sont relativement fréquentes : entre une seule et une douzaine par an à Arras par exemple, sans que l’on sache lesquelles résultent de sentences de l’échevinage et lesquelles ont été prononcées par les francs hommes64. On constate sans surprise que là comme ailleurs la plupart des condamnés – des voleurs – sont pendus, les meurtriers sont traînés et pendus, la roue et la décapitation demeurent exceptionnelles tout comme le supplice des femmes, par enfouissement65 ou sur le bûcher66. Par rapport au nombre des exécutions capitales, les peines corporelles et l’exposition au pilori semblent finalement très rares : jamais plus de trois mutilations par an à Arras par exemple, moins encore certainement dans les autres bailliages67 ; il s’agit là encore, sans doute, d’une illusion documentaire due au moindre coût de ces opérations, qui laissent donc moins de traces dans les sources comptables.
23Les sergents touchent en effet 10 s. pour une exécution – la moitié seulement pour une mutilation –, dont une partie revient au bourreau qui ne touche comme gages, d’un bailliage à l’autre, qu’entre 24 et 60 s. par an – soit presque autant qu’un avocat ou procureur du comte dans un bailliage68. Les comptes détaillent jusqu’au prix du bois, des gants, des cordes, des charrettes et chevaux, du transport de l’échelle d’un gibet à l’autre, de l’enfouissement des corps longtemps restés sur le gibet69. Bouillir les faux monnayeurs coûte encore plus cher et la chose est plus fréquente qu’on ne s’y attend, mais les frais étaient largement couverts par la confiscation de la monnaie, même fausse, qu’ils avaient fabriquée70.
24Un dernier clivage entre la norme pénale énoncée par les lois urbaines et l’exercice effectif de la justice résulte des accommodements toujours possibles, et même encouragés, par une justice qui favorise la composition et la paix à partie.
25Composition, d’abord, avec les échevins eux-mêmes pour esquiver le procès ou la sanction qui en découle. C’est ce qu’on nomme « faire sa paix » après avoir été « calengé » ou « pourtrait » pour telle ou telle somme, ou « pourtrait de la tête », ou « banni de la tête » si l’on s’est enfui71. Les comptes permettent alors de vérifier que les sommes pour lesquelles on fait paix sont bien inférieures à celles que les juges auraient infligées : c’est parfois le cinquième ou le dixième72.
26On peut aussi composer pour « haster délivrance », « faire hastieu droit » lorsqu’on est contraint « d’attendre loi » au château pour un crime dont on est soupçonné mais dont l’instruction dure encore, ou pour lequel aucun accusateur ne se présente au terme du délai fixé par la coutume73. On verse alors une somme appelée « courtoisie », qui peut être très élevée – 200 ou 300 £ pour un homicide ou des vols de grand chemin – et payable en plusieurs fois74. Le montant de ces courtoisies varie surtout dans un rapport de 1 à 10, pour le même crime, en fonction des facultés de l’intéressé. De sorte que des hommes sans grande ressource peuvent être délivrés moyennant des courtoisies de 8 ou 10 £ pour des accusations où l’on risque le gibet, comme le vol de grands chemins. De façon plus inattendue, on extorque aussi de petites courtoisies aux prévenus qui se disent clercs, afin de hâter leur délivrance à leur juge ordinaire75.
27Parmi ces accommodements judiciaires, les flottements du vocabulaire rendent difficile à distinguer ce qui relève de la composition (payée spontanément par le justiciable pour éviter le procès), ce qui résulte d’un accord (négocié avec la partie adverse et homologué par les juges en cours de procédure), et ce qui manifeste le rachat d’une peine à laquelle on a été condamné. La chose est d’autant moins claire que les baillis, en faisant leurs comptes, se souciaient avant tout du montant des sommes encaissées, non de la procédure en vertu de laquelle elles leur parvenaient76. Certains justiciables sont en tout cas délivrés par courtoisie après s’être mis en enquête, donc soumis au verdict de celle-ci77. D’autres ont été mis à l’amende par les échevins et ont certainement déjà versé le tiers de l’amende revenant au magistrat municipal, mais font ensuite leur paix avec le bailli ; la somme qu’ils versent alors pour solde de tout compte ne correspond pas aux deux tiers restants mais représente plutôt le cinquième ou le douzième de l’amende78. Beaucoup d’amendes sont en outre remises in fine, à cause de l’impossibilité des justiciables les plus pauvres à s’en acquitter79.
28Il est malaisé de se rendre compte comment s’articulent la paix que l’on fait avec la partie adverse et celle que l’on fait avec la justice. Les sommes versées à l’une et à l’autre semblent corrélées en vertu d’un principe commun à bien des villes du royaume : la justice du comte perçoit ici le tiers du montant de la paix négociée avec la partie adverse80, du moins lorsqu’il n’y a pas eu de poursuites judiciaires. Afin de négocier ces paix à partie, il existe dans certaines villes d’Artois, au moins jusqu’à la fin du XIVe siècle, des prud'hommes ou « paiseurs » constitués en corps pour présider aux réconciliations, moyennant des indemnisations strictement tarifées et tout un cérémonial comparable à celui de l’amende honorable, qu’on appelle zoene ou zoeninghe à SaintOmer par exemple. Rien de moins informel, donc, que ces procédures « infrajudiciaires81 ».
29Le bannissement joue bien entendu un rôle majeur dans ce système en protégeant le coupable contre la vengeance, le temps nécessaire à la négociation de la paix82. Comme on s’y attend, la plupart des bannissements sont prononcés par contumace83. Leur cause de loin la plus fréquente est l’homicide, souvent en cas de rixe. Au-delà de ce constat, le bannissement apparaît comme une mesure pénale extrêmement polyvalente, prononcée pour toute sorte de cas, dont les infractions aux règlements des métiers84, les dettes, ou des raisons politiques dans le cas des bannis qu’on appelle ennemis du roi85. De sorte qu’à Saint-Omer par exemple les bannissements se comptent par dizaines chaque année, au point que la ville obtient en 1336 puis en 1378 que les biens des bannis ne soient plus confisqués mais laissés à leurs héritiers s’il s’en présente. Arras avait obtenu la même chose en 1335, par dérogation à la coutume commune à toutes les villes de Flandre, Lille exclue86. Au regard des comptes, la saisie des biens des condamnés ne semble de toute façon guère lucrative87. Ajoutons que les bannis devaient quitter le comté et non pas simplement la ville, soit pour un certain temps – un an et un jour, trois ans et trois jours...88 soit à jamais, et ne pouvaient y revenir soit « sur la hart », soit « sur le poing », soit « sur l’oreille ». Ils pouvaient toutefois racheter la sentence de bannissement pour des sommes très variables – entre 40 s. et 60 £ – en fonction de leurs facultés. Le paiement de l’amende ou la conclusion de la paix à partie annulaient également le bannissement, sauf pour les meurtriers qui devaient rester au moins un an en exil89. Certains aidaient ou cachaient des bannis, soit moyennant finances soit par solidarité familiale ou amicale90 ; d’autres partaient avec les bannis91. Ceci atteste la dureté de cette peine, confirmée par plusieurs exemples de suicide de bannis92.
30Toutes les modulations dans l’application du droit pénal urbain que nous venons de décrire ne signifient pas que les prescriptions rigides des keuren ne puissent être appliquées jusqu’à la fin du Moyen Âge, à l’occasion, dans toute leur rigueur et leur particularité. Ainsi peut-on rencontrer au début du XVe siècle, par exemple, des cas d’arsin c’est-à-dire d’expéditions punitives organisées pour détruire les maisons de ceux qui avaient causé du tort à un bourgeois et refusaient de comparaître devant l’échevinage93.
31La justice médiévale, en Artois comme ailleurs, a suscité parmi les historiens des appréciations diamétralement opposées qui tiennent plus aux préjugés des auteurs qu’à l’examen sans a priori des sources. Pour Jules-Marie Richard, favorablement impressionné par les enquêtes contre les baillis, c’était l’image même du bon ordre et de l’équité. Arthur Giry voyait au contraire dans l’écheveau de ces justices une organisation « compliquée, incertaine, variable, grosse de conflits, [...] désordonnée, vicieuse94 ». Pour Robert Muchembled encore, si l’on en croit le témoignage des lettres de rémission, la violence est omniprésente et la justice impuissante95.
32Que la justice médiévale ait été polycentrique et polymorphe n’implique pas nécessairement qu’elle fût chaotique et inefficace. Ses modes d’action sont différenciés : elle taxe, punit, exclut, fait réparer les torts à partie, selon les cas et selon les personnes. Les moyens dont elle dispose paraissent au total beaucoup plus conséquents qu’on ne l’a dit. Les cours échevinales ne semblent nullement débordées puisqu’elles siègent à un rythme hebdomadaire ou tous les quinze jours, du moins jusqu’au XVe siècle où l’inflation des causes se manifeste clairement, en tout cas pour Arras96. Les auxiliaires de la justice sont sans doute moins insuffisants qu’on ne le pense : quatre sergents à verge ou à cheval et six sous-sergents (escarwettes) à Saint-Omer97 ; une vingtaine de sergents à Arras en comptant ceux du bourg et ceux du château mais sans y inclure les sergents du bailliage98. Nous n’évoquons même pas la prison d’Arras, dont la construction coûta plus de 2 000 £ à Mahaut d’Artois et qui fut apparemment une sorte de prison-modèle99.
33Enfin, au regard du pouvoir comtal tout au moins, cette justice rapportait beaucoup et coûtait assez peu : son profit était peut-être vingt fois supérieur à son coût et devait représenter au total plusieurs centaines de livres par an100. Les bourgeoisies urbaines avaient peut-être un point de vue différent sur la question, mais elles avaient plus que tout autre groupe intérêt au maintien de la paix publique, et nul doute qu’elles fussent prêtes à payer pour cela.
Notes de bas de page
1 Rodrigue Lavoie, « Les statistiques criminelles et le visage du justicier », Provence historique, 27 (1979), p. 3-20 ; Patricia MacCaughan, La Justice à Manosque au XIIIe siècle. Évolution et représentation, Paris, Champion, 2005.
2 Nicole Gonthier, Délinquance, justice et société dans le Lyonnais médiéval de la fin du XIIIe siècle au début du XVIe siècle, Paris, Arguments, 1993 ; Marguerite Gonon, « Quelques aspects de la violence au Moyen Âge en Forez », Bulletin du Centre d'histoire régionale de l’Université de Saint-Étienne, no 2 (1977), p. 7-16.
3 Robert-Henri Bautier et Janine Somay, Les Sources de l’histoire économique et sociale du Moyen Âge, 2 : Les États de la maison de Bourgogne, t. 1, 2001, p. 218 seq.
4 Archives départementales du Pas-de-Calais, A 7 à A 1013. Les cotes d’archives données ci-après sans autre précision concernent le même fonds.
5 Exemple : A 43, no 7 (11 mai 1298), loi donnée par le comte d’Artois à la ville de Calais pour remplacer sa charte communale après une émeute où furent tués le bailli du comte et ses soldats.
6 Bernard Delmaire, Le Compte général du receveur d’Artois pour 1303-1304, édition précédée d’une introduction à l’étude des institutions financières de l’Artois aux XIIIe-XIVe siècles, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1977.
7 « Profits of justice in early fourteenth-century Artois : the “exploits” of the baillis », Journal of medieval history, 16/2 (1990), p. 151-164 ; « The costs of urban justice. The exemple of Arras, 1300-1329 », dans Massimo MIglio et Giuseppe Lombardi (éd.), Símbolo e realtà della vita urbana nel tardo medioevo : atti del V Convegno storico italo-canadese, Viterbo 11-15 maggio 1988, Manziana, Veccharelli, 1993, p. 255-268 ; « Prisoners in the castellany of Artois in the early fourteenth-century », Histoire sociale-Social history, 26/52 (1993), p. 345-372.
8 Exemple : A 992/3 à 6 (1379), procédures du bailli d’Arras contre son lieutenant au Catelet-lez-Cambrai, accusé de concussions et abus d’autorité.
9 L’aprise est l’information préliminaire à l’ouverture d’un procès.
10 La plupart ont été publiés dans les Mémoires et le Bulletin historique de la Société des antiquaires de la Morinie (Saint-Omer, depuis 1834 et 1841).
11 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer et de ses institutions jusqu’au XIVe siècle, Paris, Vieweg, 1877 ; Fernand Lennel, Calais au Moyen Âge, des origines au siège de 1346, Calais, Peumery, 1909 ; Raymond Monier, Les Institutions judiciaires des villes de Flandre, des origines à la rédaction des coutumes, Lille, Bresle, 1924, p. 127-237 ; Paul Bertin, Une Commune flamande-artésienne : Aire-sur-la-Lys, des origines au XVIe siècle, Arras, Brunet, 1946, etc. Postérieurement à la plupart de ces études a été publié par Georges Espinas le Recueil de documents relatifs à l’histoire du droit municipal en France, des origines à la Révolution. Artois, 3 vol., Paris, Sirey, 1934-1943.
12 Arch, nat., JJ 82, fol. 276v, no 406 (octobre 1350) pour l'homicide d’un sergent royal à Arras ; JJ 86, fol. 111 v, no 331 & JJ 96, fol. 21v, no 66 (septembre et 29 décembre 1358) pour un sergent du bailliage d’Arras ayant secondé Jean de Picquigny, gouverneur d’Artois, dans la délivrance du roi de Navarre ; JJ 106, fol. 150, no 287 (22 juin 1372) pour des violences contre le prévôt de Bruay ; JJ 114, fol. 157v, no 303 (mai 1379)pour un mari homicide de l’amant de sa femme, etc. Ces lettres de rémission n’ont pas fait l’objet d’un inventaire particulier contrairement à celles d’autres régions.
13 Ce fonds a fourni à Robert Muchembled la matière de sa thèse, Violence et société : comportements et mentalités populaires en Artois (1400-1660), dactyl., Université de Paris I, 1985. Voir également Monique Pineau, « Les lettres de rémission lilloises (fin du XV, début du XVIe siècle), une source pour l’étude de la criminalité et des mentalités ? », Revue du Nord, 55 (1973), p. 231-239.
14 Carola Small, « Artois in the late thiteenth-century : a region discovering its identity ? », Historical reflections/Réflexions historiques, 19/2 (printemps 1993), p. 189-207.
15 Henri Nowé, Les Baillis comtaux de Flandre, des origines à la fin du XIVe siècle, Bruxelles, Lamertin, 1929.
16 Pour les détails de la procédure, dans l’exemple arrageois : Adolphe Guesnon, Inventaire chronologique des chartes de la ville d’Arras. Documents, s.l.n.d., XLIII (janvier 1273), p. 42 ; LXXX, p. 72 (1335).
17 Anton Koch, « Continuité ou rupture ? De la justice domaniale et abbatiale à la justice urbaine et comtale à Arras », Revue du Nord, 40 (1958), p. 289-296 ; Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 100 seq. ; Paul Bertin, Une commune..., p. 70 seq.
18 Carola Small, « Prisoners... », p. 350. Même évolution mais plus précoce à Lens (Pierre Feuchère, « L’évolution institutionnelle de l’office de châtelain à Lens du XIIIe au XVe siècle », Revue du Nord, 31 (1949), p. 194206).
19 Justin De Pas, Le Bourgeois de Saint-Omer. Sa condition juridique dans les institutions communales, Lille, Raoust, 1930, p. 194.
20 1 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 196-198.
21 Ibid., p. 133-134 ; Carola Small, « Appeals to the royal courts from the county of Artois, 1328-1346 », Proceedings of the sixth annual meeting of the Western Society for french history (9-11 novembre 1978), Santa-Barbara, 1979, p. 9-17. Pour un exemple illustrant la procédure : Aimé Courtois, « La justice criminelle en Artois au XVe siècle », Mémoires de la Société des antiquaires de la Morinie, 13 (1869), p. 578-590. Nous laissons ici volontairement de côté la question de la justice spirituelle.
22 Bernard Guenée, Tribunaux et gens de justice dans le bailliage de Senlis à la fin du Moyen Âge (vers 1380 - vers 1450), Publ. fac. Lettres de Strasbourg, 1963, p. 115-133, 280-309.
23 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 113-116, 122-147, 176-201.
24 Ibid., p. 149-150.
25 Ibid., p. 122-123, 136-138 (entre la ville et l’abbaye, avant l’accord de 1384-1385) ; Paul Berlin, Une Commune..., p. 73 seq.
26 Adolphe Guesnon, Inventaire chronologique...,passim.
27 Justin De Pas, Le Bourgeois de Saint-Omer..., p. 196-197.
28 Adolphe Guesnon, Inventaire chronologique..., LXXII, p. 64 (1323) ; LXXIV, p. 65 (1328) ; LXXVII, p. 68 (1332) ; C, p. 99 (1354), etc. X2a 2, fol. 106v & 107v (6 mai & 23 août 1318) : le prévôt forain de Beauquesne, ses sergents et d’autres ont justicié un clerc et mis le temporel de l’évêque d’Arras sous la main royale ; mandement d’enquêter. X2a 4, fol. 162v (5 juillet 1343) : les bailli et sergents d’Arras se sont rebellés contre le bailli de Saint-Waast et les sergents royaux gardiens de l’abbaye.
29 Adolphe Guesnon, Inventaire chronologique..., CXV, p. 129 (1362). C’était déjà peut-être le cas pour les autres sergents (ou serviteurs) comtaux depuis un siècle (ibid., XLIII, p. 42, janvier 1273).
30 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 122.
31 Paul Bertin, Une commune..., p. 75, p. 155.
32 C. Aire-sur-la-Lys.
33 Procès étudié en détail par Aimé Courtois, « La justice criminelle... ».
34 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 198-201. Cf. Raymond Monier, « Le recours au chef de sens, au Moyen Âge, dans les villes flamandes », Revue du Nord, 14(1928), p. 5-19.
35 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 190. Cf. Hanna Zaremska, Les Bannis au Moyen Âge, Paris, Aubier, 1996 (1re éd. 1994).
36 Jules-Marie Richard, « Les baillis de l’Artois au commencement du XIVe siècle (1300-1329) », in Inventaire sommaire des Archives Départementales du Pas-de-Calais, t. 2, Arras, 1887, p. II ; Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 115, n. 3.
37 Léo Verriest, « Une institution judiciaire en action. Les “Franches vérités” du bailliage de Flobecq-Lessines en la seconde moitié du XIVe siècle », Revue du Nord, 40 (1958), p. 411-421 ; Justin De Pas, Le Bourgeois de Saint-Omer..., p. 214-216. On trouve un écho de ces franches vérités dans les comptes (Bernard Delmaire, Le Compte général..., p. 16, p. 94). Ne pas confondre ces « franches vérités » avec les « vérités » qui semblent être des informations ou enquêtes (ibid., p. 16 et no 4052).
38 Carola Small, « Appeals to the royal courts... », spéc. p. 11.
39 Ead., « Profits of justice... », p. 155, col. 2.
40 Justin De Pas, Le Bourgeois de Saint-Omer..., p. 204.
41 Carola Small, « Appeals to the royal courts... », spéc. p. 11 ; Adolphe Guesnon, Inventaire chronologique..., LXVIII, p. 59 (1319).
42 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 201.
43 « Appeals to the royal courts... », spéc. p. 12-13.
44 Exemple : Xla 19, fol. 361, no 55 (16 juin 1369), le lieutenant en Artois de Marguerite, comtesse de Flandre et d’Artois, ayant condamné à 60 F d’amende un bourgeois de Hesdin pour rébellion contre le bailli du lieu, le Parlement casse la sentence et inflige la même amende à la comtesse.
45 Carola Small, « Appeals to the royal courts... », p. 13-14.
46 Exemple : X2a 8, fol. 349 (21 avril 1374).
47 Exemple : Xla 13, fol. 9 (13 janvier 1351), un sergent royal ayant dit des injures contre l’évêque d’Arras, le Parlement octroie licence d’accorder sans amende. Cf. Adolphe Guesnon, Inventaire chronologique..., XCVIII, p. 98 (1354) ; CXXX1, p. 144 (1379).
48 Serge Dauchy, « Le Parlement de Paris : juge contraignant ou arbitre conciliant ? Les conflits entre Philippe le Bon et ses bonnes villes de Flandre », Les Relations entre princes et villes aux XIVe-XVIe siècles : aspects politiques, économiques et sociaux, Publ. du Centre européen d’études bourguignonnes, 33 (1993) (Rencontres de Gand, 23-27 septembre 1992), Neuchâtel, 1993, p. 143-152.
49 Exemples pour Arras dans Adolphe Guesnon, Inventaire chronologique..., I (s.d.) ; IV (1194) ; IX (1211), etc.
50 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 187. Les arguments présentés contra par Justin De Pas, Le Bourgeois de Saint-Omer... (p. 273-275) ne sont pas concluants.
51 Jules-Marie Richard, Une Petite nièce de saint Louis, Mahaut, comtesse d’Artois et de Bourgogne (1302-1329), Paris, Champion, 1887, p. 45.
52 Carola Small, « Profits of justice... », p. 161, col. 2.
53 Aimé Courtois, « La justice criminelle... ».
54 Jules-Marie Richard, Une Petite nièce..., p. 45. Constat identique, dans un tout autre contexte, par Patrick Gyger, L'Épée et la corde. Criminalité et justice à Fribourg (1475-1505), Lausanne, Cahiers lausannois d’histoire médiévale, 1998, p. 66-69.
55 Exemples dans Adolphe Guesnon, Inventaire chronologique..., IV (1194) et IX (1211) ; Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 212-218.
56 Pour une idée générale des peines et de leur fréquence, voir Bernard Delmaire, Le Compte général..., passim.
57 Carola Small, « Profits of justice... », spéc. p. 158, col. 2 ; Bernard Delmaire, Le Compte général..., no 2287, 2624, 2629, etc.
58 Ibid., p. 185 ; no 4 (13 avril 1381) : amende de 601., finalement remise par la comtesse.
59 A 103, no 19 et 20 (24 juillet 1376 et 23 août 1382) ; Bernard Delmaire, Le Compte général..., p. 21 ; no 2827.
60 Carola Small, « Profits of justice... », p. 159, col. 1-2 ; Bernard Delmaire, Le Compte général..., no 1342.
61 Ibid., passim.
62 Justin De Pas, Le Bourgeois de Saint-Omer..., p. 224.
63 Bernard Delmaire, Le Compte général..., no 1963 ; Pagart d’Hermansart, « Le maître des hautes œuvres ou bourreau à Saint-Omer », Bulletin de la Société des Antiquaires de Morinie, 8 (1887-1891), p. 727-751.
64 Carola Small, « The costs of urban justice... », p. 256. Bernard Delmaire, Le Compte général..., no 698, no 2333-2337. Vers 1460, le chroniqueur Jacques du Clercq rapporte environ une exécution capitale par an (cité par Robert Muchembled, Violence et société..., p. 702).
65 Voir toutefois les réserves émises par Justin De Pas, Le Bourgeois de Saint-Omer..., p. 199, qui y voit plutôt un mode d’exposition du criminel, d’ailleurs également appliqué aux hommes.
66 Carola Small, « The costs of urban justice... », p. 262-263 ; Aimé Courtois, « La justice criminelle... » : trois cents personnes assistent au bûcher de la femme, ce qui suggère que le spectacle était rare. Autre exemple de femme complice de meurtre brûlée : Paul Bertin, Une Commune flamande-artésienne..., p. 166, n. 3 (1340). Une femme essorillée : Bernard Delmaire, Le Compte général..., no 3562.
67 Carola Small, « The costs of urban justice... », p. 366. Un homme aveuglé en 1303. Trois femmes essorillées en 1304.
68 Bernard Delmaire, Le Compte général..., p. 22-23, p. 208 ; no 197, 203, 636, 698-699, 1258-1260, 1355, 1963, 2057, 2301, 2636, 3241, 3835, etc.
69 Ibid., p. 16 ; no 1023 seq., 1981-1982, 2333-2337, 2925-2926, etc.
70 Ibid., p. 36-37 ; no 1274, 3220-3223 ; Carola Small, « Profits of justice... », p. 154, col. 2 ; « The costs of urban justice... », p. 261,265.
71 Bernard Delmaire, Le Compte général..., p. 12-13, 190 ; no 1706.
72 Ibid., no 1933-1937.
73 Ibid., no 2284, 2621, 2718, 3160, 3218, 3513.
74 Ibid., no 1240 ; no 2279. Courtoisies payées en deux fois ibid., no 2284 et 2285, 3513 et 3514, 4003.
75 Carola Small, « Profits of justice... », p. 156, col. 1 et 2.
76 Bernard Delmaire, Le Compte général..., no 3216, 3217, etc.
77 Ibid., p. 36 ; no 1240.
78 Ibid., no 612, 614, 621.
79 Carola Small, « Profits of justice... », p. 155, col. 1.
80 Carola Small, « The costs of urban justice... », p. 259. La comparaison avec d’autres villes du royaume s’appuie sur Roger Grand, « Justice criminelle aux XIIIe et XIVe siècles », Bibliothèque de l’École des chartes, 102 (1941), p. 51-108.
81 Justin De Pas, Le Bourgeois de Saint-Omer..., p. 229-231 ; Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 190-196 ; Oscar Bled, « Le zoène, ou la composition pour homicide à Saint-Omer jusqu’au XVIIe siècle », Bulletin de la Société des antiquaires de la Morinie, 19 (1884), p. 323.
82 Carola Small, « The costs of urban justice... », p. 261 ; « Profits of justice... », p. 160.
83 Bernard Delmaire, Le Compte général..., p. 82 ; no 1240.
84 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 220 ; Pagart d’Hermansart, « Le bannissement à Saint-Omer », Bulletin historique et philologique du Comité des travaux historiques et scientifiques, 1901, no 3 et 4, p. 451-465.
85 Bernard Delmaire, Le Compte général..., p. 73, no 1239 ; no 3058, 3059.
86 Justin De Pas, Le Bourgeois de Saint-Omer..., p. 141-148 ; p. 238-241 ; Adolphe Guesnon, Inventaire chronologique..., LXXX, p. 72 (juillet 1335).
87 Carola Small, « Profits of justice... », p. 153, col. 2 ; p. 154, col. 3 ; Bernard Delmaire, Le Compte général..., p. 5 passim, no 1112-1114, 3768, 3892 (contra : no 3815).
88 Ibid., p. 13.
89 Pagart d’Hermansart, « Le bannissement à Saint-Omer », p. 463.
90 Carola Small, « Profits of justice... », p. 159, col. 1.
91 Bernard Delmaire, Le Compte général..., no 1567.
92 Carola Small, « Profits of justice... », p. 160, col. 1.
93 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 180, n. 3.
94 Ibid, p. 149.
95 Violence et société..., passim.
96 Arthur Giry, Histoire de la ville de Saint-Omer..., p. 183-184 ; Paul Bertin, Une commune..., p. 187 ; Adolphe Guesnon, Inventaire chronologique..., CLVIII, p. 186 (1405) ; CC, p. 269 (1473) : création d’un petit auditoire pour juger les causes civiles mineures ; CCI, p. 274 (1473) : l’évêque d’Arras se plaint des lenteurs de la justice échevinale, etc.
97 Justin De Pas, « Les escarwettes à Saint-Omer » et « Les sergents à verge de l’échevinage de Saint-Omer », Bulletin de la Société des antiquaires de la Morinie, 11 (1902-1906), p. 599-612 ; 32 (1914-1920), p. 177-219.
98 Carola Small, « The costs of urban justice... », spéc. p. 258 ; « Prisoners in the castellany of Artois... ». Les sergents du bourg et les sergents à cheval sont suffisamment nombreux pour patrouiller autour de la ville, la nuit. Leurs gages se montent à 12 £ pour le tiers de l’an, soit, s’ils touchent chacun 20 s. comme le bourreau, 12 sergents (Bernard Delmaire, Le Compte général..., no 208, 2330).
99 Carola Small, « Prisoners in the castellany of Artois... », spéc. p. 266-267.
100 Ibid., p. 268 ; « Profits of justice... », spéc. p. 162-163. Les chiffres sont toutefois extrêmement variables d’un compte à l’autre, ce qui incite à rester prudent. Pour des exemple suggestifs : Bernard Delmaire, Le Compte général..., p. 41-42 ; no 1001, 1026, 1287, 1291, 1588, 1724, 2653, 3846-3847, etc. La justice comtale de Lens est donnée à cens pour 38 à 47 £ par an (p. 65 ; no 2565, 3744, 3842), une sergenterie de Calais pour 160 £ (no 1400). En tout état de cause, les coûts de cette justice paraissent très faibles comparés aux frais d’entretien des procureurs et messagers du comte (ibid., p. 23, 209 ; no 1292, 2298, 2300, 2324, 2549, 2733, 3539, 3979, etc. ; Carola Small, « Messengers in the county of Artois, 1295-1329 », Canadian journal of history - Annales canadiennes d’histoire, 25 (août 1990), p. 163-175).
Auteur
Université Paris Sorbonne - Paris IV - Centre Roland Mousnier (UMR 8596).
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